CA Reims, ch. 1 civ. et com., 18 mars 2025, n° 24/00259
REIMS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Direct Moto (SARL)
Défendeur :
B2P Autos (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Dias da Silva
Conseillers :
Mme Pozzo di Borgo, M. Leclere Vue
Avocats :
Me Monnier, Me Penaud, SELARL BQD Avocats, SELARL Octav
EXPOSE DU LITIGE
Le 25 juin 2020 la SARL Direct Moto a acquis auprès de la SARL B2P autos un véhicule de type Porsche [Localité 5] turbo D, genre VP, immatriculé [Immatriculation 7], de 131 500 kilomètres au compteur, moyennant le prix de 25 000 euros toutes taxes comprises, après déduction de la somme de 3 000 euros correspondant au montant de la reprise du véhicule Mini Cooper S, immatriculé [Immatriculation 6], appartenant à Mme [I] [F].
Le véhicule a été immatriculé le 30 juin 2020 au nom de Mme [F], co-gérante de la société Direct Moto.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 18 septembre 2020, Mme [F] s'est plainte auprès de la société B2P de ce que le véhicule présentait des problèmes d'accélération, une fuite d'huile moteur et une impossibilité de rouler à 110 kilomètres sans qu'un bruit désagréable n'apparaisse au niveau de la portière droite côté passager, outre une défaillance du système de réglage du siège avant conducteur et le tour d'aile avant droit qui était abimé.
Le 12 octobre 2020, le véhicule litigieux a été soumis à un diagnostic auprès de la société Porsche Reims.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 10 décembre 2020, Mme [F] a mis en demeure la société B2P de lui rembourser sans délai la somme de 358,44 euros correspondant à la facturation du diagnostic de la société Porsche Reims.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 21 septembre 2021, le conseil de la société Direct Moto a mis vainement en demeure sous quinzaine la société B2P autos de lui restituer la somme de 28 000 euros, de lui rembourser la somme de 358,44 euros correspondant à la facturation du diagnostic du véhicule effectué par la société Porsche Reims et lui a fait part de ce que sa cliente avait constaté en mai 2021 l'apparition en surbrillance du voyant lumineux de préchauffage au niveau du tableau de bord ainsi qu'une coupure de gaz à hauteur de 2 500/tr.
Selon exploit d'huissier délivré le 26 octobre 2021, la société Direct Moto a fait assigner la société B2P autos devant le tribunal de commerce de Reims notamment en résolution et en annulation de la vente ainsi qu'en indemnisation de ses préjudices.
Par jugement contradictoire du 6 février 2024, le tribunal de commerce de Reims a :
- reçu la société Direct Moto en ses prétention et les a déclarées mal fondées,
- débouté la société Direct Moto de l'ensemble de ses prétentions,
- condamné la société Direct Moto à payer la somme de 1 000 euros à la société B2P autos au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toutes autres prétentions,
- rappelé l'exécution provisoire,
- condamné la société Direct Moto aux entiers dépens dont frais de greffe liquidés à la somme de 78,96 euros TTC.
Par déclaration du 14 février 2024, la société Direct Moto a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 7 janvier 2025, la société Direct Moto demande à la cour, au visa des articles 1101 et suivants, 1130 et suivants, 1227, 1228, 1231-1 et suivants, 1603 et suivants et 1641 et suivants du code civil, de :
confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société B2P autos de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive,
débouter la société B2P autos de l'ensemble de ses prétentions formées à hauteur de cour à son encontre,
infirmer le jugement déféré en ce qu'il :
* l'a reçue en ses prétentions, les a déclarées mal fondées,
* l'a déboutée de l'ensemble de ses prétentions,
* l'a condamnée à payer la somme de 1 000 euros à la société B2P autos au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* a rejeté toutes autres prétentions,
* l'a condamnée aux entiers dépens dont frais de greffe liquidés à la somme de 78,96 euros TTC,
Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant,
A titre principal,
- prononcer la résolution de la vente intervenue le 25 juin 2020 entre les parties portant sur le véhicule Porsche [Localité 5] Turbo D, genre VP, immatriculé [Immatriculation 7], aux torts exclusifs du vendeur professionnel,
A titre subsidiaire,
- prononcer l'annulation de la vente intervenue le 25 juin 2020 entre les parties portant sur le véhicule Porsche [Localité 5] Turbo D, genre VP, immatriculé [Immatriculation 7],
A titre encore plus subsidiaire,
- ordonner avant-dire droit une mesure d'expertise judiciaire, qu'il conviendra de confier à tel expert qu'il plaira à la cour de désigner selon les modalités énoncées au dispositif de ses dernières conclusions,
En tout état de cause,
- condamner la société B2P autos à lui verser la somme de 28 000 euros au titre du remboursement du prix d'achat du véhicule, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,
- ordonner la restitution du véhicule Porsche [Localité 5] Turbo D, genre VP, immatriculé [Immatriculation 7], à compter du règlement par la société B2P autos de la somme de 28 000 euros correspondant au prix d'achat du véhicule, à charge pour cette dernière d'assurer la reprise matérielle du véhicule à l'endroit où il est actuellement immobilisé,
- juger qu'à défaut pour la société B2P autos d'avoir procédé au règlement de la somme de 28 000 euros en remboursement du prix d'achat du véhicule et d'avoir assuré la reprise matérielle du véhicule Porsche [Localité 5] Turbo D, genre VP, immatriculé [Immatriculation 7], passé le délai d'un mois suivant la date de signification de l'arrêt à intervenir, la société Direct Moto sera autorisée à disposer librement du véhicule ou à faire procéder à sa destruction aux frais de la société B2P autos,
- condamner la société B2P autos à lui verser la somme de 1 295,20 euros au titre du préjudice matériel correspondant aux frais occasionnés par la vente,
- condamner la société B2P autos à lui verser la somme de 21 840 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance subi,
- condamner la société B2P autos à lui verser la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,
- condamner la société B2P à lui verser la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,
- condamner la société B2P aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec faculté de recouvrement direct au profit de son avocat, dans les formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
A l'appui de l'infirmation du jugement, elle soutient à titre principal, sur le fondement des articles 1641, 1644 et 1645 du code civil que le véhicule a rapidement, après la vente, présenté divers dysfonctionnements au niveau du moteur.
Elle expose que le fait que le véhicule a été gravement endommagé lors d'un accident survenu trois mois avant sa vente et qu'il a subi des réparations importantes est constitutif d'un vice caché.
Elle ajoute qu'il s'agit d'un vice caché dans la mesure où l'intimée ne l'a pas informée de l'existence de cet accident, qu'il ne pouvait être détecté lors d'un simple essai du véhicule et qu'elle n'aurait jamais acheté le véhicule si elle en avait eu connaissance.
Elle précise qu'elle ne peut être considérée comme un acheteur professionnel dans la mesure où elle n'exerce pas une activité de commerce et de réparation de véhicules automobiles et qu'en toute hypothèse un acheteur, même professionnel, peut agir en résolution judiciaire de la vente sur le fondement des vices cachés.
A titre subsidiaire, sur le fondement des articles 1130 et 1137 du code civil, elle fait valoir que l'intimée lui a dissimulé l'existence d'une procédure de véhicule endommagé et s'est délibérément abstenue de lui communiquer les procès-verbaux de contrôle technique établis le 16 mars 2020.
A titre infiniment subsidiaire, sur le fondement des articles 1604, 1610 et 1611 du code civil, elle estime que le vendeur a manqué à son obligation de délivrance conforme du véhicule dès lors que ce dernier lui a été vendu comme étant en parfait état et n'ayant subi aucune transformation notable alors qu'il s'avère qu'il a fait l'objet d'une procèdure de véhicule endommagé.
Au soutien de ses prétentions indemnitaires, elle indique avoir subi un préjudice matériel résultant du paiement de la carte grise du véhicule et de la facture de diagnostic auprès de la société Porsche Reims.
Elle estime que Mme [F] a subi un préjudice de jouissance du fait de l'impossibilité d'utiliser le véhicule depuis le mois de mai 2021 et un préjudice moral résultant de l'omission intentionnelle du vendeur de lui révéler l'état réel du véhicule.
Plus subsidiairement encore, elle estime nécessaire qu'une expertise judiciaire soit ordonnée pour démontrer les vices et défauts dont le véhicule est affecté.
En défense à l'appel incident, elle expose sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile n'avoir commis aucun abus dans l'exercice de son action en justice et être de bonne foi.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 13 janvier 2025, la société B2P autos demande à la cour, au visa des articles 31, 32-1 et 122 et suivants du code de procédure civile et des articles 1382, 1116, 1603, 1641 et 1642 et suivants du code civil, de :
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive,
Ce faisant,
- condamner la société Direct Moto à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions,
- débouter la société Direct Moto de l'ensemble de ses prétentions,
- condamner la société Direct Moto à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Direct Moto aux entiers dépens d'instance,
Subsidiairement, en cas de désignation d'un expert judiciaire,
- dire que dans le cadre de sa mission, l'expert devra déterminer l'origine et les causes des désordres qui affecteraient à ce jour le véhicule en retraçant son historique, son mode d'utilisation, les interventions éventuelles, outre les éventuels entretiens dont le véhicule a fait l'objet et ce, depuis le jour de la cession,
- dire et juger que la société Direct Moto, appelant, fera l'avance des frais de la mesure qu'il sollicite.
Au soutien de sa demande de confirmation du jugement, elle indique en défense, sur le fondement de l'article 1641 et 1642 du code civil, que l'appelante ne peut pas se prévaloir de la résolution de la vente pour vice caché puisqu'elle est une professionnelle de l'automobile comme le démontre ses statuts et les documents d'achat du véhicule.
Elle ajoute que le véhicule était exempt de vice au moment de la vente et que s'il a fait l'objet d'une procédure de véhicule gravement endommagé en janvier 2020, il a été réparé comme l'atteste le contrôle technique favorable effectué en mars 2020.
Elle précise que la société Porsche Reims n'a décelé qu'un défaut d'entretien et aucune anomalie du véhicule lors du diagnostic du 12 octobre 2020 et que les deux devis dont l'appelante se prévaut ne décrivent pas les anomalies dont le véhicule serait affecté.
Elle ajoute que le véhicule n'est pas immobilisé au vu du relevé kilométrique.
Sur le fondement de l'article 1116 du code civil, elle indique n'avoir commis aucune réticence dolosive à l'endroit de l'acquéreure et précise avoir acquis le véhicule postérieurement à l'accident après réparations et reconnaissance par un expert automobile de son aptitude à la circulation.
Elle précise ne rien avoir caché et avoir remis à l'acquéreur la facture de réparation du véhicule avec le carnet d'entretien au moment de la vente, qui mentionne les réparations intervenues à la suite de l'accident.
Sur le fondement des articles 1603, 1641 et 1642 du code civil, elle soutient avoir informé l'acquéreure du fait que le véhicule avait été accidenté, qu'il avait subi une réparation contrôlée et qu'il était en parfait état au jour de la vente.
Elle s'oppose à l'expertise judiciaire indiquant qu'elle interviendrait nécessairement plus de quatre ans après la vente et pourrait mettre en évidence des anomalies qui n'existaient pas au moment de celle-ci.
En réponse aux prétentions indemnitaires, elle indique que l'appelante ne justifie pas avoir engagé des frais d'immatriculation du véhicule, qu'elle ne peut pas réclamer de préjudice de jouissance pour le compte de Mme [F] qui est la seule utilisatrice du véhicule et que cette indemnisation doit de toute façon reposer sur la location effective d'un véhicule de remplacement et, enfin, qu'elle n'a commis aucun comportement frauduleux occasionnant un préjudice moral à l'appelante.
A l'appui de son appel incident, elle soutient sur le fondement des articles 32-1 du code de procédure civile et 1382 du code civil que l'appelante ne rapporte pas la preuve d'un vice caché ou un défaut de conformité et qu'elle agit dans le seul but d'obtenir la restitution à ses frais du véhicule au motif qu'il ne correspond plus à ses critères.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 janvier 2025 et l'affaire fixée à l'audience de plaidoiries le 4 février suivant.
MOTIFS DE LA DECISION
I. Sur la résolution de la vente fondée sur les vices cachés
Aux termes de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui en diminuent tellement l'usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
La mise en 'uvre de la garantie édictée par ces dispositions suppose de rapporter la preuve que :
- le vice est inhérent à la chose ;
- le vice qui affecte la chose a une origine antérieure à la vente,
- le vice qui affecte la chose n'est pas apparent au moment de la vente,
- le vice compromet l'usage de la chose ou en diminue l'usage.
A l'égard de l'acheteur professionnel, la jurisprudence retient une présomption simple de connaissance du vice.
En l'espèce, il n'est pas contesté que le véhicule a présenté quelques mois après son acquisition des problèmes d'accélération, une fuite d'huile moteur, une impossibilité de rouler à cent dix kilomètres heure sans qu'un bruit désagréable n'apparaisse au niveau de la portière droite côté passager, outre une défaillance du système de réglage du siège avant conducteur et le tour d'aile avant droit qui était abimé.
A l'appui de ses prétentions, la société Direct Moto verse aux débats :
- l'historique du véhicule « Histovec » indiquant que le véhicule a été accidenté en janvier 2020 et qu'il a fait l'objet d'une procédure véhicule endommagé avec réparation contrôlée (pièce n°16),
- la facture de diagnostic établi par le centre Porsche Reims le 12 octobre 2020 qui indique :
« Passage testeur et contrôle mémoire défaut
Réinitialisation valeurs adaptation boîte de vitesse
Pas de défaut en mémoire contrôle entrée d'eau
Nettoyage évacuation baie de pare-brise
Contrôle niveaux pressions » (pièce n°12),
- un devis non daté établi par la société Fast Lille pour un montant de 16 444,09 euros toutes taxes comprises (pièce n°14) et un devis établi le 5 novembre 2024 par la société Tinqueux autos pour un montant de 23 275,86 euros dont l'objet est « déplacement chez le client constat le moteur est bloqué » (pièces n°20),
En défense, l'intimée produit aux débats :
- un procès-verbal de contre-visite de contrôle technique établi le 16 mars 2020 portant la mention « favorable » (pièce n°6),
- une facture du 11 mai 2020 établi par le centre Porsche Reims d'un montant de 14 320,36 euros (pièce n°9),
- un rapport d'expertise automobile établi le 14 mai 2020 par le cabinet Nettelet expertises mentionnant « contrôle technique et 0 défaut » (pièce n°8).
Il résulte tout d'abord de ces éléments que si le véhicule a présenté des dysfonctionnements quelques mois après son acquisition, il n'est à aucun moment démontré que ces désordres sont imputables à l'accident survenu antérieurement à la vente ayant abouti à la procédure de véhicule endommagé avec réparation contrôlée.
Ensuite, à les supposer imputables à l'accident, il n'est pas davantage établi que ces désordres ont rendu le véhicule impropre à son usage ou que son usage en eût été tellement diminué que l'appelante ne l'aurait pas acquis.
Au demeurant, le diagnostic du centre Porsche ne met en exergue que des défauts mineurs sans aucun caractère de gravité. Les deux devis se limitent quant à eux à énumérer le coût des pièces et prestations de réparation du moteur, et ne sont en toute hypothèse corroborés par aucun élément permettant d'objectiver les défauts du moteur au-delà des seules allégations de l'appelante.
Au contraire, les relevés kilométriques mentionnés dans le certificat de cession du 25 juin 2020 (pièce appelante n°2) et dans le devis du 5 novembre 2024 susmentionné démontrent que le véhicule a parcouru près de douze mille kilomètres en l'espace de près de quatre ans et demi, ce qui démontre que le véhicule n'est pas impropre à son usage.
De son côté, l'intimée rapporte la preuve que le véhicule, une fois réparée, ne présentait plus aucune anomalie de nature à faire obstacle à sa remise en circulation à l'issue de la procédure de véhicule endommagé avec réparation controlée.
Si l'appelante conteste les conclusions du rapport d'expertise et le procès-verbal de contre-visite de contrôle technique favorable, elle ne produit aucune pièce permettant de combattre les constatations effectuées par des techniciens et experts qualifiés de l'automobile.
Ainsi, il ne saurait être déduit des seuls désordres mineurs décrits par l'appelante et de l'existence d'une procédure de véhicule endommagé avec réparation contrôlée les conditions légales permettant la mise en 'uvre de la garantie pour vices cachés.
C'est donc à bon droit que le premier juge a débouté la société Direct Moto de sa prétention tendant à obtenir la résolution de la vente pour vice caché.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
II. Sur l'annulation de la vente fondée sur le dol
Selon l'article 1130 du code civil, l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.
Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
L'article 1137 du même code dispose que le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.
Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation.
En raison de sa double nature de vice du consentement et de délit civil, le dol suppose d'établir l'intention de l'auteur de tromper son cocontractant.
En l'espèce, la société B2P autos allègue avoir remis à la société Direct Moto la facture de réparation du véhicule avec le carnet d'entretien, ce que l'appelante conteste.
En toute hypothèse, à supposer que l'intimée n'ait pas informé la société Direct Moto de l'existence antérieure à la vente d'une procédure de véhicule endommagé avec réparation contrôlée, celle-ci ne démontre pas en quoi l'absence de révélation de ce fait était destiné à la tromper et à la déterminer à acquérir le véhicule alors que le véhicule avait été de toute façon réparé et que tant le rapport d'expertise automobile que le procès-verbal de contrôle technique n'avaient décelé aucune anomalie faisant obstacle à sa remise en circulation (pièce n°6 et 8 intimée).
Au surplus, il résulte de ses propres statuts que la société Direct Moto n'est pas un acheteur profane et inexpérimenté dans le domaine de l'achat de véhicule puisqu'elle a pour objet « activité d'achat de vente, de motocyclettes neuves, d'occasions et de tous véhicules à moteur ainsi que la réparation et l'entretien desdits véhicules » (pièce intimée n°4). En cette qualité, elle aurait pu réclamer à la société B2P autos tous les documents utiles à l'acquisition d'un véhicule au prix de 28 000 euros et se renseigner sur la situation administrative du véhicule.
Il s'ensuit que la preuve d'une intention dolosive n'est pas rapportée.
C'est donc à bon droit que le premier juge a débouté la société Direct Moto de sa prétention tendant à obtenir l'annulation de la vente pour dol.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
III. Sur la résolution de la vente fondée sur le défaut de conformité
Selon l'article 1603 du code civil, le vendeur a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend.
En application de ces dispositions, la délivrance s'entend de la remise d'une chose conforme aux stipulations du contrat.
En l'espèce, contrairement à ce qu'allègue l'appelante, il ne résulte d'aucune pièce versée de part et d'autre que le véhicule litigieux aurait été vendu en parfait état.
Par ailleurs, si la société Direct Moto invoque la mention dans le certificat de cession selon laquelle « ce véhicule n'a pas subi de transformation notable susceptible de modifier les indications du certificat de conformité ou de l'actuel certificat d'immatriculation » (pièce appelante n°2), force est de constater que le véhicule n'a effectivement subi aucune transformation. Comme l'a démontré l'intimée, le véhicule a été intégralement réparé à l'issue de la procédure de véhicule endommagé avec réparation contrôlée, ce dont il ne saurait se déduire de la remise en état du véhicule une transformation notable de nature à modifier les documents administratifs qui lui sont afférents.
Enfin, tant le certificat de cession que la facture mentionnent que la vente portait sur un véhicule d'occasion, qu'il a été mis en circulation pour la première fois le 29 octobre 2013 et qu'il affichait 131 500 kilomètres au compteur (pièces n°2 et 3 appelante), de sorte que la société Direct Moto s'est vue délivrer un véhicule conforme aux éléments du contrat de vente.
Ce moyen n'est donc pas fondé.
C'est donc à bon droit que le premier juge a débouté la société Direct Moto de sa prétention tendant à obtenir la résolution de la vente pour défaut de conformité.
Le jugement sera donc confirmé de ce chef.
IV. Sur l'expertise judiciaire
L'article 143 du code de procédure civile dispose que les faits dont dépend la solution du litige peuvent, à la demande des parties ou d'office, être l'objet de toute mesure d'instruction légalement admissible.
Selon l'article 4 du même code, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
En application du principe dispositif, la cour est tenue d'examiner les prétentions des parties dans l'ordre où elles lui sont soumises.
En l'espèce, la cour a procédé à la vérification juridictionnelle au fond des prétentions de l'appelante dans l'ordre hiérarchique où elles lui ont été soumises.
Il en résulte que la demande d'expertise judiciaire, présentée à titre infiniment subsidaire, n'a pas d'objet.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
V. Sur les prétentions accessoires
La société Direct Moto, qui succombe en son appel, sera condamnée aux dépens de l'instance.
La société Direct Moto, condamnée aux dépens d'appel, sera également condamnée à verser à la société B2P autos la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Direct Moto sera en outre déboutée de sa propre prétention à ce titre.
Le jugement sera enfin confirmé du chef des dépens de première instance et du chef condamnant la société Direct Moto à verser à la société B2P autos une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Reims le 6 février 2024 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la SARL Direct Moto aux dépens de l'instance d'appel,
Condamne la SARL Direct Moto à verser à la SARL B2P autos la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute la SARL Direct Moto de sa prétention au titre de l'article 700 du code de procédure civile.