CA Montpellier, 3e ch. civ., 13 mars 2025, n° 20/05777
MONTPELLIER
Arrêt
Autre
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 13 MARS 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 20/05777 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OZNR
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 03 DECEMBRE 2020
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE PERPIGNAN
N° RG 20/1820
APPELANTE :
S.A.R.L. [Y] inscrite au RCS de PERPIGNAN sous le numéro 528 894 868 et prise en la personne de son représentant légal en exercice sis audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Vincent DE TORRES de la SCP DE TORRES - PY - MOLINA - BOSC BERTOU, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES - non plaidant
INTIMEE :
S.C.I. GERRY inscrite au RCS de PERPIGNAN sous le numéro 837 983 964 prise en la personne de son représentant légal,
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 11]
Représentée par Me Céline PIRET de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT-PIRET-JOUBES, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substitué par Me Marjorie AGIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTERVENANTS :
Monsieur [W] [E]
né le 27 Avril 1980 à [Localité 10]
de nationalité Française
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 6]
Non représenté - assigné le 08 mars 2021 à domicile
Monsieur [B] [V]
né le 18 Avril 1979 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 11]
Représenté par Me Carole TIXIER, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES
Ordonnance de clôture du 20 Décembre 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Janvier 2025,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère, chargée du rapport.
Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Gilles SAINATI, président de chambre
M. Thierry CARLIER, conseiller
Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère
Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL
ARRET :
- rendu par défaut ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE
La SARL [Y] a été missionnée par la SCI Gerry pour effectuer des travaux de maçonnerie, de peinture et sol dans un immeuble sis [Adresse 3], suivant devis du 14 mars 2018 pour un montant total de 32 641,17 euros TTC.
Par acte d'huissier en date du 07 août 2020, la SARL [Y] a fait assigner la SCI Gerry, prise en la personne de son gérant [W] [E], aux fins de paiement de la somme de 9 819,41 euros au titre du solde d'une facture de deuxième situation de travaux.
Suivant acte sous-seing privé en date du 20 novembre 2020, monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] ont cédé à la société Holding [F] et monsieur [X] [F] l'intégralité des parts de la SCI Gerry.
Par jugement réputé contradictoire du 03 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Perpignan a débouté la SARL [Y] de sa demande à l'encontre de la SCI Gerry et l'a condamnée aux dépens.
Par déclaration enregistrée au greffe le 16 décembre 2020, la SARL [Y] a régulièrement interjeté appel de ce jugement.
Les 19 et 22 mars 2021, la SCI Gerry a assigné en intervention forcée monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E], tous deux anciennement associés de la SCI Gerry, monsieur [W] [E] en ayant par ailleurs été le gérant.
Par ses conclusions enregistrées au greffe le 09 octobre 2024, la SARL [Y] sollicite l'infirmation du jugement et demande à la cour de :
- condamner la SCI Gerry à lui payer la somme de 9 819,41 euros au titre du paiement du solde de la facture de la deuxième situation de travaux,
- condamner la SCI Gerry à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
En cas de succès des appels en cause, elle demande à la cour de condamner solidairement les appelés en cause avec la SCI Gerry au paiement des sommes précitées.
Elle sollicite par ailleurs de voir :
- condamner la SCI Gerry aux entiers dépens et à lui payer la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement monsieur [W] [E] et monsieur [B] [V] à la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses conclusions enregistrées au greffe le 11 juin 2021, la SCI Gerry sollicite la confirmation du jugement et demande à la cour à titre subsidiaire de condamner solidairement monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E], et subsidiairement monsieur [W] [E] seul, à relever et garantir la SCI Gerry de toutes condamnations qui pourraient être mises à sa charge, et au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.
En tout état de cause, elle demande à voir :
- condamner solidairement la SARL [Y], monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement la SARL [Y], monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP Vial Pech de Laclause Escale Knoepffler Huot Piret Joubes, Avocats soussignés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- condamner toujours sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la SARL [Y], monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] à lui rembourser toutes sommes qui pourraient être mises à sa charge en application des dispositions du Décret n° 2001-212 du 08 mars 2001, modifiant le Décret 96-1080 du 12 décembre 1996 portant fixation du tarif des Huissiers de Justice en matière civile et commerciale et relatif à la détermination du droit proportionnel de recouvrement ou d'encaissement mis à la charge des créanciers.
Par ses conclusions enregistrées au greffe le 18 décembre 2024, monsieur [B] [V] sollicite la confirmation du jugement et demande à la cour, à titre subsidiaire de débouter la SCI Gerry de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions.
Très subsidiairement, il demande à la cour de :
- cantonner toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre à une somme totale qui ne saurait être supérieure à 4 811,51 euros,
- condamner monsieur [W] [E] à lui verser une somme équivalente au montant des condamnations qui seraient prononcées à son encontre, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi,
En toute hypothèse, il sollicite de voir :
- débouter la SARL [Y] et la SCI Gerry de leurs demandes relatives aux dommages et intérêts, à l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens,
- condamner toute partie succombante aux dépens et à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Malgré signification en date du 8 mars 2021, monsieur [W] [E] n'a pas constitué avocat.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance en date du 20 décembre 2024.
Pour un plus ample exposé des faits et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions des parties.
MOTIFS :
Sur la demande en paiement
Le tribunal, rappelant que la seule production de factures ne suffit pas à établir la réalité de l'obligation dont l'exécution est réclamée, a retenu qu'en l'espèce il n'était pas justifié de l'acceptation du devis de travaux, et ce alors que la SARL [Y] ne versait aux débats aucun élément au titre de l'avancée desdits travaux et de leur réalisation, et a par conséquent considéré que la SARL [Y] ne rapportait pas la preuve de l'obligation dont elle réclamait l'exécution.
La SARL [Y] fait valoir que la réalité des travaux serait établie par les photographies versées aux débats, l'autorisation de stationnement pour l'évacuation des déchets délivrée par la ville de [Localité 11] de la [Adresse 12] (l'immeuble étant traversant entre la [Adresse 13] et la [Adresse 12]) et plusieurs attestations de différents ouvriers et fournisseurs intervenus sur le chantier. Elle ajoute que la SCI Gerry a honoré ses factures relativement aux travaux litigieux et porté leur paiement en comptabilité, confirmant le solde retenu sur le grand livre comptable produit par la SARL [Y]. Elle souligne enfin que monsieur [W] [E] avait reconnu devoir la facture litigieuse, précisant à la SARL [Y] qu'elle serait réglée lors de la vente de l'immeuble.
La SCI Gerry considère au contraire que la preuve d'une créance certaine à son encontre n'est toujours pas rapportée. Elle souligne que le permis de chargement et de déchargement mentionne des travaux [Adresse 2] alors que l'immeuble appartenant à la SCI Gerry se situe [Adresse 3]. Elle ajoute que monsieur [W] [E], qui exerçait lui-même la profession de gestionnaire immobilier, aurait pu contracter avec la SARL [Y] à titre personnel.
Pour monsieur [B] [V], le devis non signé versé aux débats par la SARL [Y] ne permet pas de se persuader de l'acceptation par la SCI Gerry des travaux que la SARL [Y] aurait réalisés.
Si le devis versé aux débats par la SARL [Y] (pièce 1 de l'appelante) n'est pas signé de la SCI Gerry et ne peut dans ces conditions pas asseoir à lui seul la preuve des travaux commandés, les photographies produites (pièce 5 de la SARL Villabecque), le permis de chargement et de déchargement concernant la rue de la lanterne à laquelle l'immeuble appartenant à la SCI Gerry avait un accès (pièces 6, 11 et 12 de l'appelante) et les nombreuses attestations versées aux débats (pièces 14 à 19 de l'appelante) laissent clairement apparaître la réalité des travaux commandés et réalisés, et ce dans l'immeuble et donc pour le compte de la SCI Gerry, et non celui de monsieur [W] [E], associé de la SCI Gerry.
L'obligation de paiement de la SCI Gerry est par conséquent établie.
La SARL [Y] prétendant que sa facture n°18-056 du 10 août 2008 (pièce 2 de l'appelante) ne lui aurait pas été réglée, contrairement aux factures antérieures, il appartient à la SCI Gerry de démontrer qu'elle est libérée de son obligation en effectuant le paiement demandé, et ce par tous moyens aux termes de l'article 1342-8 du code civil.
Or, tel n'est pas le cas, et ce alors que les éléments du dossier laissent apparaître au contraire que cette facture d'un montant de 9 819,41 euros reste due par la SCI Gerry :
- monsieur [W] [E] a reconnu, dans un mail en date du 24 octobre 2019 adressé à monsieur [U] [Y] (pièce 7 de l'appelante), devoir une 'facture solde travaux [Adresse 13]' (intitulé du mail), puis a assuré que cette facture serait payée par le notaire (pièces 8 et 10 de l'appelante), ce qui n'a pas été le cas, ledit notaire ne disposant d'aucun fonds à remettre (pièce 13 de l'appelante),
- le comptable de la SCI Gerry a écrit le 29 janvier 2020 à monsieur [U] [Y] et au comptable de la SARL [Y] (pièce 9 de l'appelante), en joignant le grand livre pour le compte de la SCI Gerry, 'sur le grand livre pour l'exercice comptable du 01/07/19 au 30/06/19, il reste un solde dû de 9 819,41 euros sur la facturation de la situation 2 d'un montant total de 19 319,41 euros'.
Dans ces conditions, le jugement déféré sera infirmé et il sera fait droit à la demande en paiement de la somme de 9 819,41 euros.
Sur la demande en garantie et en dommages et intérêts de la SCI Gerry à l'encontre de monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E]
La SCI Gerry fait valoir que les cédants n'ont pas informé les acquéreurs des parts sociales de l'existence de la dette litigieuse, pas plus qu'ils n'en ont provisionné le montant au bilan (pièce 4 de la SCI Gerry) et qu'en application de la clause de garantie de passif contenue à l'acte de cession de parts sociales, ils doivent leur garantie. Selon elle, le délai pour actionner la garantie du passif a été respecté puisque, préalablement à l'envoi du 08 février 2021, il a été adressé à monsieur [B] [V], comme à monsieur [W] [E], une correspondance du 03 février 2021, laquelle a été retournée par les services de la poste.
La SARL [Y] estime quant à elle que les associés d'une SCI étant indéfiniment responsables des dettes de la société nées pendant qu'ils étaient associés, les associés [E] et [V] doivent être tenus de la dette.
Monsieur [V] soutient pour sa part que sa garantie n'est pas due puisque, contrairement à ce que prévoit l'acte de cession de parts sociales, il n'a pas été avisé de l'action contentieuse par lettre recommandée dans les 10 jours de la date à laquelle la société en a eu connaissance.
L'acte de cession de parts sociale prévoit que " les parties conviennent que le cédant sera tenu informé de toutes réclamations fiscales ou autres, de toute action contentieuse, de tout fait et événements générateurs de cette garantie " et qu'il " devra être avisé par lettre recommandée dans les 10 jours de la date à laquelle la société en aura connaissance ".
Ainsi que la SCI Gerry ne le conteste pas, elle a eu connaissance de la procédure introduite par la SARL [Y] par la signification de l'acte d'appel et des conclusions de cette dernière le 28 janvier 2021.
La SCI Gerry devait par conséquent aviser les anciens associés de cette action contentieuse au plus tard le 7 février 2025.
Or, ce n'est que par courriers datés du 8 février 2021 et réceptionnés les 10 et 13 février 2025 (pièces 5 et 6 de la SCI Gerry) que ces derniers ont été informés de l'existence de cette procédure, soit postérieurement au délai contractuellement prévu.
C'est en vain que la SARL [Y] soutient que le délai d'information imposé aurait en réalité été respecté eu égard à deux premières lettres aux anciens associés contenant les informations nécessaires datées du 3 février 2025 (pièces 7 et 8 de la SCI Gerry), dans la mesure où il n'est justifié ni de l'envoi ni de la réception desdites lettres, pour lesquelles la SARL [Y] se contente d'indiquer dans ses écritures qu'elles auraient été retournées par les services de la poste.
Dans ces conditions, faute de respect par la SCI Gerry du délai contractuellement imposé, la garantie de monsieur [B] [V] et de monsieur [W] [E] n'est pas due et, de ce fait, les demandes en garantie et en dommages et intérêts de la SCI Gerry à l'encontre de monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] ne peuvent prospérer.
La SCI Gerry sera par conséquent déboutée de ses demandes en ce sens.
Sur la demande de dommages et intérêts de la SARL [Y] pour résistance abusive
Les pièces du dossier laissant apparaître que la somme due à la SARL [Y] n'apparaissait pas dans la comptabilité de la SCI Gerry et que les associés actuels de la SCI Gerry n'ont eu connaissance de la présente procédure que le 28 janvier 2021 lors de la signification de l'acte d'appel et des conclusions de la SARL [Y], il ne peut être utilement soutenu que la SCI Gerry aurait résisté de manière abusive au paiement de la facture litigieuse.
S'agissant de monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E], l'action en garantie a échoué, de sorte que la demande de dommages et intérêts ne peut prospérer à leur encontre.
La SARL [Y] sera par conséquent déboutée de sa demande.
Sur les frais irrépétibles non compris dans les dépens et les dépens
Eu égard à l'issue de la présente procédure, le jugement déféré sera infirmé.
La SCI Gerry, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP Vial Pech de Laclause Escale Knoepffler Huot Piret Joubes, et à payer en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à la SARL [Y] la somme de 2 500 euros et à monsieur [B] [V] la somme de 1 250 euros.
La SCI Gerry sera quant à elle déboutée de ses demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Perpignan ;
Statuant de nouveau,
Déboute la SARL [Y] de sa demande de dommages et intérêts ;
Déboute la SCI Gerry de ses demandes dirigées contre monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] et de ses demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SCI Gerry à payer à la SARL [Y] la somme de 9 819,41 euros ;
Condamne la SCI Gerry à payer à la SARL [Y] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SCI Gerry à payer à monsieur [B] [V] la somme de 1 250 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SCI Gerry aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP Vial Pech de Laclause Escale Knoepffler Huot Piret Joubes en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier, Le président,
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 13 MARS 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 20/05777 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OZNR
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 03 DECEMBRE 2020
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE PERPIGNAN
N° RG 20/1820
APPELANTE :
S.A.R.L. [Y] inscrite au RCS de PERPIGNAN sous le numéro 528 894 868 et prise en la personne de son représentant légal en exercice sis audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Vincent DE TORRES de la SCP DE TORRES - PY - MOLINA - BOSC BERTOU, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES - non plaidant
INTIMEE :
S.C.I. GERRY inscrite au RCS de PERPIGNAN sous le numéro 837 983 964 prise en la personne de son représentant légal,
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 11]
Représentée par Me Céline PIRET de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT-PIRET-JOUBES, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substitué par Me Marjorie AGIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTERVENANTS :
Monsieur [W] [E]
né le 27 Avril 1980 à [Localité 10]
de nationalité Française
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 6]
Non représenté - assigné le 08 mars 2021 à domicile
Monsieur [B] [V]
né le 18 Avril 1979 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 11]
Représenté par Me Carole TIXIER, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES
Ordonnance de clôture du 20 Décembre 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Janvier 2025,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère, chargée du rapport.
Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Gilles SAINATI, président de chambre
M. Thierry CARLIER, conseiller
Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère
Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL
ARRET :
- rendu par défaut ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.
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EXPOSE DU LITIGE
La SARL [Y] a été missionnée par la SCI Gerry pour effectuer des travaux de maçonnerie, de peinture et sol dans un immeuble sis [Adresse 3], suivant devis du 14 mars 2018 pour un montant total de 32 641,17 euros TTC.
Par acte d'huissier en date du 07 août 2020, la SARL [Y] a fait assigner la SCI Gerry, prise en la personne de son gérant [W] [E], aux fins de paiement de la somme de 9 819,41 euros au titre du solde d'une facture de deuxième situation de travaux.
Suivant acte sous-seing privé en date du 20 novembre 2020, monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] ont cédé à la société Holding [F] et monsieur [X] [F] l'intégralité des parts de la SCI Gerry.
Par jugement réputé contradictoire du 03 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Perpignan a débouté la SARL [Y] de sa demande à l'encontre de la SCI Gerry et l'a condamnée aux dépens.
Par déclaration enregistrée au greffe le 16 décembre 2020, la SARL [Y] a régulièrement interjeté appel de ce jugement.
Les 19 et 22 mars 2021, la SCI Gerry a assigné en intervention forcée monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E], tous deux anciennement associés de la SCI Gerry, monsieur [W] [E] en ayant par ailleurs été le gérant.
Par ses conclusions enregistrées au greffe le 09 octobre 2024, la SARL [Y] sollicite l'infirmation du jugement et demande à la cour de :
- condamner la SCI Gerry à lui payer la somme de 9 819,41 euros au titre du paiement du solde de la facture de la deuxième situation de travaux,
- condamner la SCI Gerry à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
En cas de succès des appels en cause, elle demande à la cour de condamner solidairement les appelés en cause avec la SCI Gerry au paiement des sommes précitées.
Elle sollicite par ailleurs de voir :
- condamner la SCI Gerry aux entiers dépens et à lui payer la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement monsieur [W] [E] et monsieur [B] [V] à la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses conclusions enregistrées au greffe le 11 juin 2021, la SCI Gerry sollicite la confirmation du jugement et demande à la cour à titre subsidiaire de condamner solidairement monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E], et subsidiairement monsieur [W] [E] seul, à relever et garantir la SCI Gerry de toutes condamnations qui pourraient être mises à sa charge, et au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.
En tout état de cause, elle demande à voir :
- condamner solidairement la SARL [Y], monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement la SARL [Y], monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP Vial Pech de Laclause Escale Knoepffler Huot Piret Joubes, Avocats soussignés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- condamner toujours sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la SARL [Y], monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] à lui rembourser toutes sommes qui pourraient être mises à sa charge en application des dispositions du Décret n° 2001-212 du 08 mars 2001, modifiant le Décret 96-1080 du 12 décembre 1996 portant fixation du tarif des Huissiers de Justice en matière civile et commerciale et relatif à la détermination du droit proportionnel de recouvrement ou d'encaissement mis à la charge des créanciers.
Par ses conclusions enregistrées au greffe le 18 décembre 2024, monsieur [B] [V] sollicite la confirmation du jugement et demande à la cour, à titre subsidiaire de débouter la SCI Gerry de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions.
Très subsidiairement, il demande à la cour de :
- cantonner toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre à une somme totale qui ne saurait être supérieure à 4 811,51 euros,
- condamner monsieur [W] [E] à lui verser une somme équivalente au montant des condamnations qui seraient prononcées à son encontre, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi,
En toute hypothèse, il sollicite de voir :
- débouter la SARL [Y] et la SCI Gerry de leurs demandes relatives aux dommages et intérêts, à l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens,
- condamner toute partie succombante aux dépens et à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Malgré signification en date du 8 mars 2021, monsieur [W] [E] n'a pas constitué avocat.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance en date du 20 décembre 2024.
Pour un plus ample exposé des faits et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions des parties.
MOTIFS :
Sur la demande en paiement
Le tribunal, rappelant que la seule production de factures ne suffit pas à établir la réalité de l'obligation dont l'exécution est réclamée, a retenu qu'en l'espèce il n'était pas justifié de l'acceptation du devis de travaux, et ce alors que la SARL [Y] ne versait aux débats aucun élément au titre de l'avancée desdits travaux et de leur réalisation, et a par conséquent considéré que la SARL [Y] ne rapportait pas la preuve de l'obligation dont elle réclamait l'exécution.
La SARL [Y] fait valoir que la réalité des travaux serait établie par les photographies versées aux débats, l'autorisation de stationnement pour l'évacuation des déchets délivrée par la ville de [Localité 11] de la [Adresse 12] (l'immeuble étant traversant entre la [Adresse 13] et la [Adresse 12]) et plusieurs attestations de différents ouvriers et fournisseurs intervenus sur le chantier. Elle ajoute que la SCI Gerry a honoré ses factures relativement aux travaux litigieux et porté leur paiement en comptabilité, confirmant le solde retenu sur le grand livre comptable produit par la SARL [Y]. Elle souligne enfin que monsieur [W] [E] avait reconnu devoir la facture litigieuse, précisant à la SARL [Y] qu'elle serait réglée lors de la vente de l'immeuble.
La SCI Gerry considère au contraire que la preuve d'une créance certaine à son encontre n'est toujours pas rapportée. Elle souligne que le permis de chargement et de déchargement mentionne des travaux [Adresse 2] alors que l'immeuble appartenant à la SCI Gerry se situe [Adresse 3]. Elle ajoute que monsieur [W] [E], qui exerçait lui-même la profession de gestionnaire immobilier, aurait pu contracter avec la SARL [Y] à titre personnel.
Pour monsieur [B] [V], le devis non signé versé aux débats par la SARL [Y] ne permet pas de se persuader de l'acceptation par la SCI Gerry des travaux que la SARL [Y] aurait réalisés.
Si le devis versé aux débats par la SARL [Y] (pièce 1 de l'appelante) n'est pas signé de la SCI Gerry et ne peut dans ces conditions pas asseoir à lui seul la preuve des travaux commandés, les photographies produites (pièce 5 de la SARL Villabecque), le permis de chargement et de déchargement concernant la rue de la lanterne à laquelle l'immeuble appartenant à la SCI Gerry avait un accès (pièces 6, 11 et 12 de l'appelante) et les nombreuses attestations versées aux débats (pièces 14 à 19 de l'appelante) laissent clairement apparaître la réalité des travaux commandés et réalisés, et ce dans l'immeuble et donc pour le compte de la SCI Gerry, et non celui de monsieur [W] [E], associé de la SCI Gerry.
L'obligation de paiement de la SCI Gerry est par conséquent établie.
La SARL [Y] prétendant que sa facture n°18-056 du 10 août 2008 (pièce 2 de l'appelante) ne lui aurait pas été réglée, contrairement aux factures antérieures, il appartient à la SCI Gerry de démontrer qu'elle est libérée de son obligation en effectuant le paiement demandé, et ce par tous moyens aux termes de l'article 1342-8 du code civil.
Or, tel n'est pas le cas, et ce alors que les éléments du dossier laissent apparaître au contraire que cette facture d'un montant de 9 819,41 euros reste due par la SCI Gerry :
- monsieur [W] [E] a reconnu, dans un mail en date du 24 octobre 2019 adressé à monsieur [U] [Y] (pièce 7 de l'appelante), devoir une 'facture solde travaux [Adresse 13]' (intitulé du mail), puis a assuré que cette facture serait payée par le notaire (pièces 8 et 10 de l'appelante), ce qui n'a pas été le cas, ledit notaire ne disposant d'aucun fonds à remettre (pièce 13 de l'appelante),
- le comptable de la SCI Gerry a écrit le 29 janvier 2020 à monsieur [U] [Y] et au comptable de la SARL [Y] (pièce 9 de l'appelante), en joignant le grand livre pour le compte de la SCI Gerry, 'sur le grand livre pour l'exercice comptable du 01/07/19 au 30/06/19, il reste un solde dû de 9 819,41 euros sur la facturation de la situation 2 d'un montant total de 19 319,41 euros'.
Dans ces conditions, le jugement déféré sera infirmé et il sera fait droit à la demande en paiement de la somme de 9 819,41 euros.
Sur la demande en garantie et en dommages et intérêts de la SCI Gerry à l'encontre de monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E]
La SCI Gerry fait valoir que les cédants n'ont pas informé les acquéreurs des parts sociales de l'existence de la dette litigieuse, pas plus qu'ils n'en ont provisionné le montant au bilan (pièce 4 de la SCI Gerry) et qu'en application de la clause de garantie de passif contenue à l'acte de cession de parts sociales, ils doivent leur garantie. Selon elle, le délai pour actionner la garantie du passif a été respecté puisque, préalablement à l'envoi du 08 février 2021, il a été adressé à monsieur [B] [V], comme à monsieur [W] [E], une correspondance du 03 février 2021, laquelle a été retournée par les services de la poste.
La SARL [Y] estime quant à elle que les associés d'une SCI étant indéfiniment responsables des dettes de la société nées pendant qu'ils étaient associés, les associés [E] et [V] doivent être tenus de la dette.
Monsieur [V] soutient pour sa part que sa garantie n'est pas due puisque, contrairement à ce que prévoit l'acte de cession de parts sociales, il n'a pas été avisé de l'action contentieuse par lettre recommandée dans les 10 jours de la date à laquelle la société en a eu connaissance.
L'acte de cession de parts sociale prévoit que " les parties conviennent que le cédant sera tenu informé de toutes réclamations fiscales ou autres, de toute action contentieuse, de tout fait et événements générateurs de cette garantie " et qu'il " devra être avisé par lettre recommandée dans les 10 jours de la date à laquelle la société en aura connaissance ".
Ainsi que la SCI Gerry ne le conteste pas, elle a eu connaissance de la procédure introduite par la SARL [Y] par la signification de l'acte d'appel et des conclusions de cette dernière le 28 janvier 2021.
La SCI Gerry devait par conséquent aviser les anciens associés de cette action contentieuse au plus tard le 7 février 2025.
Or, ce n'est que par courriers datés du 8 février 2021 et réceptionnés les 10 et 13 février 2025 (pièces 5 et 6 de la SCI Gerry) que ces derniers ont été informés de l'existence de cette procédure, soit postérieurement au délai contractuellement prévu.
C'est en vain que la SARL [Y] soutient que le délai d'information imposé aurait en réalité été respecté eu égard à deux premières lettres aux anciens associés contenant les informations nécessaires datées du 3 février 2025 (pièces 7 et 8 de la SCI Gerry), dans la mesure où il n'est justifié ni de l'envoi ni de la réception desdites lettres, pour lesquelles la SARL [Y] se contente d'indiquer dans ses écritures qu'elles auraient été retournées par les services de la poste.
Dans ces conditions, faute de respect par la SCI Gerry du délai contractuellement imposé, la garantie de monsieur [B] [V] et de monsieur [W] [E] n'est pas due et, de ce fait, les demandes en garantie et en dommages et intérêts de la SCI Gerry à l'encontre de monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] ne peuvent prospérer.
La SCI Gerry sera par conséquent déboutée de ses demandes en ce sens.
Sur la demande de dommages et intérêts de la SARL [Y] pour résistance abusive
Les pièces du dossier laissant apparaître que la somme due à la SARL [Y] n'apparaissait pas dans la comptabilité de la SCI Gerry et que les associés actuels de la SCI Gerry n'ont eu connaissance de la présente procédure que le 28 janvier 2021 lors de la signification de l'acte d'appel et des conclusions de la SARL [Y], il ne peut être utilement soutenu que la SCI Gerry aurait résisté de manière abusive au paiement de la facture litigieuse.
S'agissant de monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E], l'action en garantie a échoué, de sorte que la demande de dommages et intérêts ne peut prospérer à leur encontre.
La SARL [Y] sera par conséquent déboutée de sa demande.
Sur les frais irrépétibles non compris dans les dépens et les dépens
Eu égard à l'issue de la présente procédure, le jugement déféré sera infirmé.
La SCI Gerry, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP Vial Pech de Laclause Escale Knoepffler Huot Piret Joubes, et à payer en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à la SARL [Y] la somme de 2 500 euros et à monsieur [B] [V] la somme de 1 250 euros.
La SCI Gerry sera quant à elle déboutée de ses demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Perpignan ;
Statuant de nouveau,
Déboute la SARL [Y] de sa demande de dommages et intérêts ;
Déboute la SCI Gerry de ses demandes dirigées contre monsieur [B] [V] et monsieur [W] [E] et de ses demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SCI Gerry à payer à la SARL [Y] la somme de 9 819,41 euros ;
Condamne la SCI Gerry à payer à la SARL [Y] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SCI Gerry à payer à monsieur [B] [V] la somme de 1 250 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SCI Gerry aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP Vial Pech de Laclause Escale Knoepffler Huot Piret Joubes en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier, Le président,