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Décisions

CA Rennes, 9e ch securite soc., 19 mars 2025, n° 21/05421

RENNES

Arrêt

Autre

CA Rennes n° 21/05421

19 mars 2025

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 21/05421 - N° Portalis DBVL-V-B7F-R636

URSSAF PAYS DE LA LOIRE

C/

[P] [E]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 19 MARS 2025

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Clotilde RIBET, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère

GREFFIER :

Monsieur Philippe LE BOUDEC lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 04 Décembre 2024

devant Madame Véronique PUJES, magistrat chargé d'instruire l'affaire, tenant seule l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 19 Mars 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 17 Mai 2021

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal Judiciaire de VANNES - Pôle Social

Références : 20/00307

****

APPELANTE :

L'UNION DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES DES PAYS DE LA LOIRE

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Sabrina ROGER de la SARL ROGER AVOCAT, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉE :

Monsieur [P] [E]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Lucien FLAMENT, avocat au barreau de PARIS

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 15 décembre 2017, l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales des Pays de la Loire (l'URSSAF) a adressé à M. [P] [E] un appel de cotisation subsidiaire maladie au titre de la protection universelle maladie afférente à l'année 2016 pour un montant de 27 185 euros, calculée sur ses revenus du patrimoine 2016, exigible au 19 janvier 2018.

Le 25 juin 2019, l'URSSAF a adressé une mise en demeure à M. [E] pour le recouvrement de cette cotisation dont le montant a été ramené à 26 589 euros au titre du 4ème trimestre 2016.

Par courrier du 6 septembre 2019, M. [E] a saisi la commission de recours amiable puis, en l'absence de décision rendue dans les délais impartis, a porté le litige devant le pôle social du tribunal de grande instance de Nantes le 24 décembre 2019 (recours n° RG 20/00307).

Par ordonnance du 25 juin 2020, ce tribunal devenu pôle social du tribunal judiciaire de Nantes s'est déclaré territorialement incompétent au profit du pôle social du tribunal judiciaire de Vannes.

En parallèle, lors de sa séance du 28 janvier 2020, la commission précitée a rejeté le recours de M. [E], lequel a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Vannes en contestation de cette décision le 24 septembre 2020 (recours n° RG 20/00446).

Par jugement du 17 mai 2021, ce tribunal a :

- ordonné la jonction des recours n°20/00307 et 20/00446 ;

- annulé l'appel de cotisation daté du 15 décembre 2017 ;

- infirmé la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF en date du 28 janvier 2020 ;

- rejeté les demandes de l'URSSAF ;

- condamné l'URSSAF à verser à M. [E] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné l'URSSAF aux dépens ;

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration adressée le 28 juillet 2021 par courrier recommandé avec avis de réception, l'URSSAF a interjeté appel de ce jugement adressé par le greffe le 8 juillet 2021 (AR manquant).

Par ses écritures n° 2 parvenues au greffe par le RPVA le 7 mars 2024, auxquelles s'est référé, qu'a développées et complétées son conseil à l'audience, l'URSSAF demande à la cour :

- de déclarer irrecevable la contestation de la mise en demeure du 25 juin 2019 ;

- d'infirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a ordonné la jonction des recours n°20/00307 et 20/00446 ;

Statuant à nouveau,

- de constater que M. [E] ne peut pas contester la mise en demeure du 25 juin 2019, faute pour lui d'avoir saisi la commission de recours amiable de sa contestation ;

- de confirmer la décision de la commission de recours amiable en date du 28 janvier 2020 ;

- de valider l'appel de cotisation subsidiaire maladie du 15 décembre 2017 pour son montant ramené à la somme de 26 589 euros ainsi que la mise en demeure du 25 juin 2019 en tout état de cause parfaitement régulière en la forme ;

- de condamner M. [E] au paiement de la somme de 26 589 euros outre les majorations de retard restant à courir ;

- de débouter M. [E] de l'ensemble de ses demandes.

Par ses écritures parvenues au greffe par le RPVA le 27 février 2024, auxquelles s'est référé et qu'a développées son conseil à l'audience, M.[E] demande à la cour :

- de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions ;

- d'annuler la mise en demeure du 25 juin 2019 ;

- de condamner l'URSSAF au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de rejeter l'intégralité des demandes de l'URSSAF.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1 - Sur la recevabilité de la contestation de la mise en demeure

M. [E] soulève l'irrégularité de la mise en demeure du 25 juin 2019 au motif qu'elle vise le 4ème trimestre 2016 alors que la cotisation subsidiaire maladie porte sur l'année entière et que cette inexactitude l'induit en erreur en lui laissant penser que la somme due s'établit en réalité à 4 fois le montant indiqué.

L'URSSAF réplique que cette demande de nullité de la mise en demeure est irrecevable faute pour le cotisant d'avoir contesté celle-ci devant la commission de recours amiable.

Sur ce :

M. [E], qui avait saisi la commission de recours amiable d'une contestation relative à la cotisation réclamée par la mise en demeure du 25 juin 2019, est recevable à invoquer devant la juridiction contentieuse la nullité de cette mise en demeure, peu important qu'il ne l'ait pas soulevée à l'occasion du recours amiable. (2e Civ., 14 septembre 2006, pourvoi n°05-10.919 ; Soc., 16 mai 2007, pourvoi n° 05-18.298)

2 - Sur la régularité de la mise en demeure

Il convient de relever que la mise en demeure du 25 juin 2019 mentionne, outre le délai d'un mois pour s'acquitter de la somme réclamée :

le motif de recouvrement ("vous restez redevable d'une somme dont vous trouverez le détail ci-dessous... absence de versement") ;

la nature des cotisations ( 'cotisation subsidiaire maladie') ;

la période de référence (4° trimestre 2016) ;

- le montant réclamé (26 589 euros).

Force est de constater que ces mentions permettent à M. [E] de connaître la cause, la nature et l'étendue de ses obligations. La mention '4e TRIM 16" n'était pas de nature à faire obstacle à cette connaissance, étant rappelé que l'intéressé avait reçu l'appel de cotisations du 15 décembre 2017 qui se rapportait bien à l'année 2016 dans sa totalité.

Le moyen soulevé par M. [E] ne saurait par conséquent prospérer.

3- Sur le moyen tiré de l'inconstitutionnalité de la cotisation subsidiaire maladie

M. [E] fait valoir que, dans sa décision n°2018-735 du 27 septembre 2018, le Conseil constitutionnel a émis une réserve sur la cotisation subsidiaire maladie, applicable aux cotisations dues au titres des années 2016, 2017 et 2018, en jugeant que le pouvoir réglementaire devait fixer le taux et les modalités de cette cotisation de façon à éviter une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ; or, selon lui, le décret n°2016-979 instituant un taux de 8% pour la cotisation précitée ne prévoit pas de plafond, ce qui entraîne une telle rupture.

L'URSSAF réplique que la décision 2018-735 du Conseil constitutionnel a validé la conformité à la Constitution de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, sous la réserve du paragraphe 19 de la décision, qui précise qu'il appartient au pouvoir réglementaire de fixer le taux et les modalités prévus à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale de façon à ce que la cotisation n'entraîne pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Selon l'organisme, il s'agit d'une réserve d'interprétation directive, c'est-à-dire qu'elle donne l'interprétation à retenir et comporte une prescription à l'égard du pouvoir réglementaire chargé de l'application de la loi. Cette seule réserve d'interprétation ne peut donc conduire à écarter purement et simplement l'application des dispositions réglementaires des articles D. 380-1 et D. 380-2 du code de la sécurité sociale. Elle estime en outre que cette réserve d'interprétation ne vaut que pour le pouvoir réglementaire et ne peut donc être invoquée directement par les justiciables à l'appui d'une irrégularité de l'appel à cotisations. Elle rappelle par ailleurs que cette même réserve ne vaut que pour l'avenir et n'a pas d'effet rétroactif. Elle soutient encore que les modifications de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, introduites par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2019, ne sont pas la conséquence directe de cette réserve d'interprétation mais visaient principalement à répondre aux critiques en lien avec les effets de seuil constatés. Elle ajoute enfin que le taux de 8% n'a rien d'exceptionnel au regard des taux d'autres cotisations d'assurance maladie. Ainsi, le cotisant ne peut selon elle se prévaloir de la réserve d'interprétation précitée pour écarter l'application des articles D. 380-1 et D. 380-2 du code de la sécurité sociale.

Sur ce :

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 a instauré la protection universelle maladie (Puma) en remplacement, à compter du 1er janvier 2016, de la couverture maladie universelle de base (CMU). Les personnes inactives ou dont les revenus professionnels étaient trop faibles pour être assujetties à un régime de sécurité sociale obligatoire étaient bénéficiaires de la Puma et par voie de conséquence assujetties, dès l'année 2016, et pour les années suivantes, à une nouvelle cotisation dénommée 'cotisation subsidiaire maladie'.

Le premier alinéa de l'article L. 160-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, disposait que toute personne travaillant ou lorsqu'elle n'exerce pas d'activité professionnelle, résidante en France de manière stable et régulière, bénéficie en cas de maladie ou de maternité de la prise en charge de ses frais de santé dans les conditions fixées au présent livre.

L'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, disposait :

'Les personnes mentionnées à l'article L. 160-1 sont redevables d'une cotisation annuelle lorsqu'elles remplissent les conditions suivantes :

1° Leurs revenus tirés, au cours de l'année considérée, d'activités professionnelles exercées en France sont inférieurs à un seuil fixé par décret. En outre, lorsqu'elles sont mariées ou liées à un partenaire par un pacte civil de solidarité, les revenus tirés d'activités professionnelles exercées en France de l'autre membre du couple sont également inférieurs à ce seuil ;

2° Elles n'ont perçu ni pension de retraite, ni rente, ni aucun montant d'allocation de chômage au cours de l'année considérée. Il en est de même, lorsqu'elles sont mariées ou liées à un partenaire par un pacte civil de solidarité, pour l'autre membre du couple.

Cette cotisation est fixée en pourcentage du montant des revenus fonciers, de capitaux mobiliers, des plus-values de cession à titre onéreux de biens ou de droits de toute nature, des bénéfices industriels et commerciaux non professionnels et des bénéfices des professions non commerciales non professionnels, définis selon les modalités fixées au IV de l'article 1417 du code général des impôts, qui dépasse un plafond fixé par décret. Servent également au calcul de l'assiette de la cotisation, lorsqu'ils ne sont pas pris en compte en application du IV de l'article 1417 du code général des impôts, l'ensemble des moyens d'existence et des éléments de train de vie, notamment les avantages en nature et les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers, dont le bénéficiaire de la couverture maladie universelle a disposé, en quelque lieu que ce soit, en France ou à l'étranger, et à quelque titre que ce soit. Ces éléments de train de vie font l'objet d'une évaluation dont les modalités sont fixées par décret en Conseil d'Etat. Un décret détermine le taux et les modalités de calcul de cette cotisation ainsi que les obligations déclaratives incombant aux assujettis.

Lorsque les revenus d'activité mentionnés au 1° sont inférieurs au seuil défini au même 1° mais supérieurs à la moitié de ce seuil, l'assiette de la cotisation fait l'objet d'un abattement dans des conditions fixées par décret. Cet abattement croît à proportion des revenus d'activité, pour atteindre 100% à hauteur du seuil défini audit 1°.

La cotisation est recouvrée l'année qui suit l'année considérée, mentionnée aux 1° et 2° du présent article, selon les dispositions des sections 2 à 4 du chapitre III et du chapitre IV du titre IV du livre II du présent code, sous réserve des adaptations prévues par décret du Conseil d'Etat.'

L'article D. 380-1 du même code, dans sa version applicable, prévoit :

'I.-Le montant de la cotisation mentionné à l'article L. 380-2 due par les assurés dont les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à un seuil fixé à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale est déterminé selon les formules suivantes :

1° Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale :

Montant de la cotisation = 8 % × (A-D)

Où :

A est l'assiette des revenus définie au quatrième alinéa de l'article L.380-2 ;

D, qui correspond au plafond mentionné au quatrième alinéa du même article, est égal à 25 % du plafond annuel de la sécurité sociale ;

2° Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont compris entre 5 % et 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale :

Montant de la cotisation = 8 % × (A-D) × 2 × (1-R/ S)

Où :

R est le montant des revenus tirés d'activités professionnelles ;

S, qui correspond au seuil des revenus tirés d'activités professionnelles mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 380-2, est égal à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale.

II.-Lorsque le redevable de cette cotisation ne remplit les conditions mentionnées à l'article L. 160-1 que pour une partie de l'année civile, le montant de la cotisation due est calculé au prorata de cette partie de l'année.

III.- Si, au titre d'une période donnée, l'assuré est redevable de la cotisation prévue à l'article L. 380-3-1, il ne peut être redevable de la cotisation prévue à l'article L. 380-2 pour la même période. Le montant de celle-ci est alors calculé dans les conditions prévues au II.'

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision QPC n°2018-735 du 27 septembre 2018, a déclaré l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale instituant la cotisation subsidiaire maladie conforme à la Constitution, sous la réserve d'interprétation énoncée au paragraphe 19, aux termes duquel la seule absence de plafonnement d'une cotisation dont les modalités de détermination de l'assiette ainsi que le taux sont fixés par voie réglementaire n'est pas, en elle-même, constitutive d'une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Le Conseil constitutionnel précise toutefois qu'il appartient au pouvoir réglementaire de fixer ce taux et ces modalités de façon à ce que la cotisation n'entraîne pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Il n'a nullement soumis la constitutionnalité de l'article L.380-2 du code de la sécurité sociale à l'obligation pour le pouvoir réglementaire d'instaurer un mécanisme de plafonnement de la cotisation subsidiaire maladie, mais a simplement émis une réserve en imposant au pouvoir réglementaire de fixer les modalités et les taux de la cotisation subsidiaire maladie de façon à ce que cette cotisation n'entraîne pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.

Le Conseil constitutionnel a donc validé l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à l'espèce, et, partant, l'existence d'un seuil d'assujettissement.

Le conseil constitutionnel n'a pas déclaré cette disposition inconstitutionnelle et l'article 62 de la Constitution, évoqué par M. [E] n'a pas vocation à s'appliquer.

L'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale fait partie des dispositions réglementaires prises en application de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale et visées par la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel.

En outre, comme le souligne l'URSSAF, le Conseil d'Etat, saisi en nullité pour excès de pouvoir de la circulaire de la ministre des solidarités et de la santé et du ministre de l'action et des comptes publics n° DSS/5B/2017/322 du 15 novembre 2017 relative à la cotisation subsidiaire maladie prévue à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, a rendu la décision suivante (Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 10 juillet 2019, 417919, inédit) :

'7. Les dispositions de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale mentionnées au point 1 créent une différence de traitement entre les assurés sociaux redevables de cotisations sociales sur leurs seuls revenus professionnels et ceux qui, dès lors que leur revenu d'activité professionnelle est inférieur au seuil fixé par le pouvoir réglementaire en application du 1° de cet article et qu'ils n'ont perçu aucun revenu de remplacement, sont redevables d'une cotisation assise sur l'ensemble de leurs revenus du patrimoine. Toutefois, elles visent à faire contribuer à la prise en charge des frais de santé les personnes qui, tout en bénéficiant de revenus du patrimoine supérieurs à un certain niveau, ne perçoivent pas de revenus professionnels ou perçoivent des revenus professionnels insuffisants pour que les cotisations assises sur ces revenus constituent une participation effective à cette prise en charge. Dans ces conditions, le législateur, en créant une distinction entre les personnes pour la détermination des modalités de leur participation au financement de l'assurance maladie selon le montant de leurs revenus professionnels, a fondé son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts qu'il se proposait...

10. En troisième lieu, par sa décision n° 2018-735 QPC du 27 septembre 2018, le Conseil constitutionnel a déclaré les première et dernière phrases du quatrième alinéa de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale conformes à la Constitution sous la réserve suivante : " (...) la seule absence de plafonnement d'une cotisation dont les modalités de détermination de l'assiette ainsi que le taux sont fixés par voie réglementaire n'est pas, en elle-même, constitutive d'une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Toutefois, il appartient au pouvoir réglementaire de fixer ce taux et ces modalités de façon à ce que la cotisation n'entraîne pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.

11. Les réserves d'interprétation dont une décision du Conseil constitutionnel assortit la déclaration de conformité à la Constitution d'une disposition législative sont revêtues de l'autorité absolue de la chose jugée et lient tant les autorités administratives que le juge pour l'application et l'interprétation de cette disposition.

12. Aux termes du I de l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret du 19 juillet 2016 relatif aux modalités de calcul de la cotisation prévue à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale : 'Le montant de la cotisation mentionné à l'article L. 380-2 due par les assurés dont les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à un seuil fixé à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale est déterminé selon les formules suivantes : / 1° Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à 5 % du plafond annuel de la sécurité sociale : / Montant de la cotisation = 8 % × (A-D) / Où : / A est l'assiette des revenus définie au quatrième alinéa de l'article L. 380-2 ; / D, qui correspond au plafond mentionné au quatrième alinéa du même article, est égal à 25 % du plafond annuel de la sécurité sociale ; / 2° Si les revenus tirés d'activités professionnelles sont compris entre 5 % et 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale : / Montant de la cotisation = 8 % × (A-D) × 2 × (1-R/ S) / Où : / R est le montant des revenus tirés d'activités professionnelles ; / S, qui correspond au seuil des revenus tirés d'activités professionnelles mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 380-2, est égal à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale'. Ces dispositions prévoient ainsi que la cotisation subsidiaire maladie est due par les assurés dont les revenus tirés d'activités professionnelles sont inférieurs à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale et qu'elle s'applique, au taux de 8 %, à la part des revenus du patrimoine excédant 25 % du même plafond. En outre, l'abattement d'assiette prévu en application du cinquième alinéa de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale équivaut à appliquer aux revenus du patrimoine un taux de cotisation décroissant de façon linéaire de 8 à 0 % en fonction du montant des revenus professionnels lorsque ceux-ci sont compris entre 5 et 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale.

13. En fixant, dans le cadre déterminé par les dispositions de l'article L.380-2 précité, le seuil de revenus professionnels prévu au deuxième alinéa de cet article, en-deçà duquel la cotisation est due, à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 3 861,60 euros en 2016, le montant des revenus du patrimoine mentionné au quatrième alinéa du même article, au-delà duquel s'applique le prélèvement, à 25 % de ce même plafond, soit 9 654 euros en 2016, et le taux de la cotisation en cause à 8 %, le pouvoir réglementaire a défini les modalités de calcul de cette cotisation dans des conditions qui n'entraînent pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale aurait méconnu le principe d'égalité devant les charges publiques garanti par l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et des citoyens de 1789, non plus que les dispositions de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale telles qu'interprétées par le Conseil constitutionnel, et que la circulaire attaquée réitérerait ainsi des dispositions réglementaires contraires à ces normes.

14. En dernier lieu, le sixième alinéa de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi du 21 décembre 215, dispose que : 'La cotisation est recouvrée l'année qui suit l'année considérée, mentionnée aux 1° et 2° du présent article, selon les dispositions des sections 2 à 4 du chapitre III et du chapitre IV du titre IV du livre II du présent code, sous réserve des adaptations prévues par décret du Conseil d'Etat'. Le décret du 3 mai 2017 relatif aux règles d'identification, d'affiliation et de rattachement des bénéficiaires des prestations de sécurité sociale et portant modifications de diverses dispositions relatives à l'assurance maladie, publié au Journal officiel de la République française du 5 mai 2017, a modifié à cette fin les articles R.380-3 à R. 380-7 du code de la sécurité sociale, en prévoyant notamment que la cotisation mentionnée à l'article L. 380-2 est appelée au plus tard le dernier jour ouvré du mois de novembre de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due et qu'elle est exigible dans les trente jours suivant la date à laquelle elle est appelée. Ces dispositions réglementaires se bornent à préciser les modalités de recouvrement intervenant, pour l'année 2016, première année d'assujettissement à cette cotisation, à la fin de l'année 2017, sans comporter aucun élément relatif à l'assiette ni au taux de la cotisation, complètement déterminés par les dispositions issues de la loi du 21 décembre 2015 et du décret du 19 juillet 2016 précités. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions de la circulaire prescrivant l'application des dispositions de l'article L. 380-2 et des articles R. 380-3 à R. 380-7 du code de la sécurité sociale pour le recouvrement de la cotisation due au titre de l'année 2016 méconnaîtraient le principe de non-rétroactivité des actes réglementaires doit être écarté.

15. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que M. [M]...et les autres requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de la circulaire du 15 novembre 2017 qu'ils attaquent.'

Il en ressort que le Conseil d'Etat n'a pas plus sanctionné la circulaire mettant en application les dispositions des articles D. 380-1 et suivants du code de la sécurité sociale.

Dans un autre arrêt de la première chambre du 29 juillet 2020 (CE, 29 juillet 2020, n° 430326), le Conseil d'Etat a décidé 'qu'en fixant, dans le cadre déterminé par les dispositions de l'article L. 380-2 précité, le seuil de revenus professionnels prévu au deuxième alinéa de cet article, en deçà duquel la cotisation est due, à 10 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 3 922,80 euros en 2017, le montant des revenus du patrimoine mentionné au quatrième alinéa du même article, au-delà duquel s'applique le prélèvement, à 25 % de ce même plafond, soit 9 807 euros en 2017, et le taux de la cotisation en cause à 8 %, le pouvoir réglementaire a défini les modalités de calcul de cette cotisation dans des conditions qui n'entraînent pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Il s'en suit que l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret du 19 juillet 2016 précité, ne méconnaît pas le principe d'égalité devant les charges publiques garanti par l'article 13 de la Déclaration des droits de l'Homme et des citoyens de 1789, pas plus que les dispositions de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale telles qu'interprétées par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2018-735 QPC du 27 septembre 2018, qui, contrairement à ce qui est soutenu, n'impliquait pas l'adoption de mesures réglementaires pour le passé.'

L'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, tel que rédigé pour l'appel de la cotisation subsidiaire maladie 2016, est donc conforme à la Constitution.

Contrairement à ce que prétend le cotisant, il ne peut être tiré aucune conséquence, dans le cadre de la présente affaire, de la réserve énoncée au paragraphe 19 de la décision du 27 septembre 2018 ; telles que définies par l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, les modalités de calcul spécifiquement invoquées par le cotisant, qui relèvent du seul pouvoir réglementaire, ne peuvent être contrôlées par le Conseil constitutionnel, et encore moins par le juge judiciaire.

En conséquence, l'appel à cotisations délivré par l'URSSAF sera déclaré régulier au regard de la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel en date du 27 septembre 2018.

4- Sur le moyen tiré d'une discrimination sur le fondement de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme

M. [E], qui rappelle que le décret n°2016-979 du 19 juillet 2016 fixe à 10% du PASS le montant maximal des revenus d'activités au-delà duquel la cotisation subsidiaire maladie n'est pas due et que cette cotisation est due pour les personnes ayant perçu des revenus inférieurs à ce montant mais bénéficiant de revenus du capital supérieurs à 25% du PASS, considère que ces modalités de calcul sont discriminatoires. En effet, ayant perçu 349 464 euros de revenus du capital et du patrimoine en 2016 et seulement 1 552 euros de revenus d'activité, il s'est vu réclamer par l'URSSAF la somme de 27 185 euros au titre de cette cotisation alors que s'il avait perçu des revenus d'activité d'au moins 10% du PASS (3 861 euros en 2016), l'assiette se serait limitée à ces revenus-là et pas aux revenus du capital et le montant de la cotisation aurait été dérisoire. En outre, selon lui, cette disproportion revêt un caractère confiscatoire en ce qu'elle n'est pas justifiée par le but recherché qui est de faire participer le plus grand nombre de bénéficiaires de la Puma au financement de l'assurance maladie. Enfin, cette discrimination rompt l'égalité des cotisants devant la participation de tous au financement de la sécurité sociale.

Sur ce :

L'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme relatif à l'interdiction de discrimination, dispose que la jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.

Il n'est pas contesté que ce texte combiné avec l'article 1 du Protocole n°1 s'applique en matière de sécurité sociale. ( Soc., 14 janvier 1999, pourvoi n°97-12.487)

La loi du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016 a consacré l'universalité du droit de chacun à l'assurance maladie en posant un principe de protection universelle maladie, au profit de toute personne qui travaille ou réside en France de manière stable et régulière.

Au regard d'un principe de financement de l'assurance maladie reposant sur des cotisations assises sur les revenus d'activité professionnelle, le législateur, par la modification des dispositions de l'article L. 380-2 du code de sécurité sociale, a institué une cotisation présentant un caractère subsidiaire à l'égard des personnes n'exerçant pas d'activité professionnelle en France ou dont les revenus d'activité professionnelle, sont inférieurs aux montants prévus par ces textes, qui ont pour effet de prendre en compte des revenus faibles. Pour éviter des effets de seuils, il a été prévu par ce texte des mécanismes d'abattement à proportion des revenus d'activités dont les modalités sont précisées à l'article D. 380-1 du code de sécurité sociale.

La thèse défendue par M. [E] ne saurait toutefois prospérer dans la mesure où, précisément, les dispositions de l'article L. 380-2 reposent sur la distinction entre la nature des revenus perçus quant aux critères qui président à l'assujettissement à cette cotisation, ses modalités de calcul et les règles d'abattement destinées à limiter l'effet de seuil résultant du principe de cette cotisation.

L'intéressé ne saurait se prévaloir d'une situation identique à celle d'une personne ayant en tout ou partie perçu des revenus d'activité et la différence qui en résulte apparaît justifiée au regard de l'objectif visé par la loi de répartir l'effort contributif entre tous les assurés et, à l'inverse, de ne pas faire reposer le financement de la PUMA sur les seuls actifs comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 27 septembre 2018, paragraphe 15 : 'en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu faire contribuer à la prise en charge des frais de santé les personnes ne percevant pas de revenus professionnels ou percevant des revenus professionnels insuffisants pour que les cotisations assises sur ces revenus constituent une participation effective à cette prise en charge'.

De façon plus générale au regard des conditions de contribution des assurés sociaux au titre de l'assurance maladie, salariés, assimilés ou travailleurs indépendants, il ne saurait au cas présent, être fait état d'une violation caractérisée du principe d'égalité de traitement ou encore de discrimination. En effet, compte tenu de l'assiette retenue in fine au titre de l'année considérée, de 339 813 euros après abattement, le montant de la cotisation d'un montant de 27 185 euros n'apparaît ni disproportionné ni excessif au regard de l'effort contributif applicable aux personnes ayant perçu des revenus d'activité professionnelle d'un niveau équivalent ; à défaut de cotisations payées au titre d'un revenu du travail insuffisant et en présence d'un revenu de capitaux supérieur à un certain montant, il ne paraît pas excessif de calculer les cotisations sur ces derniers revenus, sachant que seuls les revenus du capital entrent dans le calcul de l'assiette et non les capitaux eux-mêmes. Il sera simplement rappelé en conclusion sur ce point que les cotisations sont la contrepartie du bénéfice des prestations en nature servies à ces personnes par les branches maladies et maternité de la sécurité sociale.

Il convient dans ces conditions de rejeter ce moyen.

5- Sur le moyen tiré de la non-rétroactivité des décrets d'application

M. [E] fait valoir que les dispositions réglementaires pour l'application de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, et plus précisément celles du décret n°2017-736 du 3 mai 2017, étant parues postérieurement à 2016, il n'était pas possible pour lui d'avoir connaissance de son éligibilité à la cotisation litigieuse et l'URSSAF ne peut s'en prévaloir à son égard pour l'année 2016.

L'URSSAF réplique que l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale est rédigé de manière complète et précise, dans des termes qui se suffisent à eux-mêmes, et invoque l'arrêt précité du Conseil d'Etat du 10 juillet 2019.

Sur ce :

Il est constant que les lois entrent en vigueur à compter de leur publication au Journal Officiel ou de la date qu'elles fixent et que seule l'entrée en vigueur du décret d'application d'une loi est susceptible de différer l'entrée en vigueur de celle-ci.

Mais il est tout aussi constant, comme le rappelle la Cour de cassation, qu'une disposition légale se suffisant à elle-même est applicable sans attendre la publication d'un décret, à la date d'entrée en vigueur de cette loi.

Au cas présent, le sixième alinéa de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi du 21 décembre 2015, dispose : 'La cotisation est recouvrée l'année qui suit l'année considérée, mentionnée aux 1 et 2 du présent article, selon les dispositions des sections 2 à 4 du chapitre III et du chapitre IV du titre IV du livre II du présent code, sous réserve des adaptations prévues par décret du Conseil d'Etat'.

Cette disposition ne dépendait pas, pour la mise en oeuvre immédiate de ses principes, de son décret d'application du 19 juillet 2016.

Ce décret relatif aux modalités de calcul de la cotisation subsidiaire est entré en vigueur le 22 juillet 2016, soit bien avant l'appel de cotisations de l'URSSAF et son exigibilité au cas d'espèce.

Le décret n°2017-240 du 24 février 2017 est quant à lui relatif au contrôle des conditions permettant de bénéficier de la protection universelle maladie et lui-même antérieur à l'appel de cotisation du 15 décembre 2017.

Enfin, le décret n°2017-736 du 3 mai 2017 relatif aux règles d'identification, d'affiliation et de rattachement des bénéficiaires des prestations de sécurité sociale et portant modifications de diverses dispositions relatives à l'assurance maladie, publié au Journal Officiel de la République Française du 5 mai 2017, également antérieur à l'appel de cotisation, a modifié les articles R. 380-3 à R. 380-7 du code de la sécurité sociale, en prévoyant, notamment, que la cotisation mentionnée à l'article L. 380-2 est appelée au plus tard le dernier jour ouvré du mois de novembre de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due et qu'elle est exigible dans les trente jours suivant la date à laquelle elle est appelée.

Ces dispositions réglementaires se limitent à préciser les modalités de recouvrement intervenant, pour l'année 2016, première année d'assujettissement à cette cotisation, à la fin de l'année 2017, et force est de constater qu'elles ne modifient pas le principe, les conditions d'assujettissement, ni l'assiette dans son étendue de la cotisation subsidiaire maladie, qui sont exclusivement prévues par les dispositions issues de la loi du 21 décembre 2015 et du décret du 19 juillet 2016.

Ainsi, dès 2015, l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, complété par l'article D. 380-1, comportait les précisions nécessaires à la détermination de l'assiette, du taux et du mode de calcul de la cotisation subsidiaire maladie dont il était indiqué, dès le 1er janvier 2016, qu'elle serait recouvrée l'année suivante, soit courant 2017, de sorte que les dispositions du décret du 3 mai 2017, qui ne portent que sur les modalités de recouvrement de la cotisation, n'étaient pas nécessaires à l'entrée en vigueur de la cotisation.

En conséquence, le moyen tiré de ce que l'URSSAF, en appliquant les dispositions de l'article L. 380-2 et des articles R. 380-3 à R. 380-7 du code de la sécurité sociale pour le recouvrement de la cotisation due au titre de l'année 2016 méconnaîtrait le principe de non-rétroactivité des actes réglementaires doit être écarté.

6 - Sur le transfert des données et l'information du cotisant

M. [E] fait valoir que la loi informatique et liberté pose le principe de l'information de la personne soumise à un recueil de données à caractère personnel et que la Commission nationale informatique et liberté (CNIL), dans son avis n°2017-279 du 26 octobre 2017, a spécifiquement insisté sur l'obligation d'information de la Direction générale des finances publiques (DGFIP) et de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) s'agissant de la PUMA. Il relève que cette obligation a été rappelée par la CJUE, dans sa décision du 1er octobre 2015 et qu'il incombe aux organismes de justifier qu'ils l'ont respectée. Or, le concernant, l'obligation d'information n'ayant été respectée ni par l'ACOSS ni par la DGFIP, l'appel de cotisation doit être annulé. Il ajoute que le transfert des données à caractère personnel entre l'ACOSS et l'URSSAF d'une part, et entre la DGFIP et l'ACOSS d'autre part, est illégal car intervenu avant la parution des décrets n°2017-1530 du 3 novembre 2017 et n°2018-392 du 24 mai 2018.

L'URSSAF, qui rappelle les dispositions de l'article 27 de la loi n° 78-18 du 6 janvier 1978 ainsi que la délibération de la CNIL du 26 octobre 2017 autorisant la mise en oeuvre d'un traitement de données à caractère personnel destiné au calcul de la cotisation en cause, réplique que M. [E] était informé d'un transfert de données de la DGFIP à l'URSSAF et, à supposer cette information lacunaire, il n'est justifié d'aucun grief par l'intéressé qui a pu faire valoir ses droits par la suite.

Sur ce :

Aux termes du dernier alinéa de l'article L.380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige issue de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015,

'Les agents des administrations fiscales communiquent aux organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 les informations nominatives déclarées pour l'établissement de l'impôt sur le revenu par les personnes remplissant les conditions mentionnées au premier alinéa de l'article L.380-2, conformément à l'article L. 152 du livre des procédures fiscales.'

Le premier alinéa de l'article D. 380-5 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret 2016-979 du 19 juillet 2016, ajoute :

'I.-Les éléments nécessaires à la détermination des revenus mentionnés aux articles D. 380-1 et D. 380-2 sont communiqués par l'administration fiscale aux organismes chargés du calcul et du recouvrement des cotisations mentionnées à l'article L. 380-2 et au deuxième alinéa du IV de l'article L.380-3-1", c'est-à-dire aux URSSAF.

Le transfert est mis en oeuvre par un service informatique de la direction générale des finances publiques.

Par délibération n° 2017-279 du 26 octobre 2017, portant avis sur un projet de décret autorisant la mise en oeuvre d'un traitement automatisé de transfert de données à caractère personnel destiné au calcul de la cotisation prévue à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, la CNIL a précisé que 'seront destinataires des données à caractère personnel à raison de leurs attribution et du besoin de connaître:

- les agents habilités de l'ACOSS,

- les agents habilités des organismes mentionnés aux articles L213-1 et L752-2 du code de la sécurité sociale en charge du calcul, du recouvrement et du contrôle de la cotisation. S'agissant de ces organismes, la commission prend acte de ce qu'ils ne seront destinataires que des données concernant les cotisants pour lesquels ils sont territorialement compétents. Un tel accès aux données apparaît justifié au regard des finalités du traitement.

Sur l'information du droit des personnes:

Le projet demeure silencieux sur les modalités d'information des personnes concernées. La commission observe dans le dossier joint à la saisine que le ministère renvoie au décret visant à autoriser le traitement mis en oeuvre par la DGFIP relatif au transfert des données fiscales concernant le traitement mis en oeuvre de la cotisation annuelle subsidiaire.

Elle rappelle toutefois que si la DGFIP a pour obligation d'informer les personnes en ce qui concerne le traitement automatisé de transfert de données fiscales dont elle est responsable de traitement, l'ACOSS devra également assurer l'information des personnes concernées pour le traitement qu'elle met en oeuvre'.

Dans une autre délibération 2017-250 du 14 septembre 2017 portant avis sur un projet de décret portant création d'un traitement automatisé de transfert de données fiscales relatives aux redevables de la cotisation annuelle prévue à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, la CNIL a estimé que 'la communication par la DGFIP du NIR à l'ACOSS, qui doit intervenir dans le cadre d'échanges nécessaires à la détermination de l'assiette et du montant de la cotisation subsidiaire maladie, n'appelle pas d'observation de la part de la commission'.

Il en résulte que la CNIL a autorisé ce transfert de données provenant de l'administration fiscale au profit, in fine, de l'URSSAF.

Le décret n°2017-1530 en date du 3 novembre 2017 'autorisant la mise en oeuvre d'un traitement de données à caractère personnel destiné au calcul de la cotisation prévue à l'article L.380-2 du code de la sécurité sociale d'un traitement de données à caractère personnel destiné au contrôle de la résidence et modifiant le décret n°2015-390 en date du 3 avril 2015", vise expressément l'avis de la CNIL du 26 octobre 2017.

Publié au journal officiel en date du 4 novembre 2017, ce décret était applicable à la date de l'appel de cotisation du 15 décembre 2017, objet du présent litige, portant sur la cotisation subsidiaire maladie due pour l'année 2016.

L'article 1 de ce décret dispose que :

I. - Pour l'application des dispositions de l'article L.380-2 du code de la sécurité sociale est autorisée la création par l'ACOSS d'un traitement de données à caractère personnel dénommé 'Cotisation spécifique maladie'.

Les finalités de ce traitement sont le calcul et le recouvrement par les organismes mentionnés aux articles L.213-1 et L.752-2 du code de la sécurité sociale de la cotisation spécifique maladie prévue par l'article L.380-2 du code de la sécurité sociale.

II. - Le traitement autorisé par le présent article porte sur les catégories de données suivantes :

1° Données relatives à l'identité des personnes (...)

2° Données fiscales relatives aux revenus :

- traitements et salaires;

- pensions, retraites et rentes;

- revenus et plus-values des professions non salariées : revenus agricoles, revenus industriels et commerciaux professionnels, revenus industriels et commerciaux non professionnels, revenus non commerciaux professionnels, revenus non commerciaux non professionnels;

- divers : montant net des revenus agricoles, revenus industriels et commerciaux, revenus non commerciaux non soumis aux contributions sociales par les organismes sociaux, indemnités d'élus locaux, revenus étrangers imposables en France, ouvrant droit à un crédit d'impôt égal au montant de l'impôt français ;

- revenus des valeurs et capitaux mobiliers ;

- plus-values et gains divers ;

- revenus fonciers ;

- revenus fonciers exceptionnels ou différés ;

- le cas échéant, rectifications apportées, par le contribuable ou les services de la direction générale des finances publiques, aux mêmes données, en cas d'émission de rôles supplémentaires et de dégrèvements.

III. - Sont destinataires des données à caractère personnel mentionnées au II du présent article, à raison de leurs attributions respectives et dans la limite du besoin d'en connaître:

1° Les agents de l'ACOSS individuellement habilités par le directeur de l'Agence;

2° Les agents des organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 du code de la sécurité sociale chargés du calcul, du recouvrement et du contrôle de la cotisation prévue par l'article L. 380-2, individuellement habilités par le directeur de l'organisme concerné.

IV. - Les données à caractère personnel mentionnées au II du présent article sont conservées par l'ACOSS pendant quatre ans à dater de leur réception.

Ces données sont conservées par les organismes mentionnés aux articles L.213-1 et L. 752-2 du code de la sécurité sociale pendant quatre ans à compter de leur réception ou jusqu'à expiration des délais de recours en cas de contentieux portant sur la cotisation calculée en application de l'article L.380-2 à partir des données transmises.

V. - Les droits d'accès et de rectification prévus aux articles 39 et 40 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée s'exercent auprès du directeur de l'organisme mentionné aux articles L. 213-1 et L. 752-2 du code de la sécurité sociale auquel la personne est rattachée au vu de l'adresse de domicile qu'elle a déclarée à l'administration fiscale.

Ce décret a ainsi autorisé le traitement par l'ACOSS et les organismes en charge du calcul et du recouvrement de la cotisation subsidiaire maladie, au nombre desquels les URSSAF, des informations nominatives déclarées pour l'établissement de l'impôt sur le revenu par les personnes remplissant les conditions pour verser la cotisation subsidiaire maladie, et a mis à la charge de l'ACOSS l'obligation d'informer les personnes concernées du traitement mis en oeuvre.

Il importe peu que la création d'un traitement automatisé de transfert de données relatives aux redevables de la cotisation annuelle prévue à l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale soit intervenue par décret n°2018-392 du 24 mai 2018, le principe du traitement ayant été prévu par le décret du 3 novembre 2017.

M. [E] n'est donc pas fondé à alléguer qu'à la date d'appel de la cotisation le 15 décembre 2017, la transmission des données personnelles fiscales aux organismes de recouvrement n'était pas régulière au regard de la loi 78-17 du 6 janvier 1978.

La cour relève par ailleurs que le principe de la transmission des données personnelles a été porté à la connaissance du cotisant par la publication des textes législatifs et réglementaires ayant trait à la cotisation subsidiaire maladie au Journal Officiel, que nul n'est censé ignorer.

En outre, l'appel de cotisation du 15 décembre 2017 faisait état de l'entrée en vigueur de la PUMA le 1er janvier 2016, précisant en effet qu'une cotisation subsidiaire maladie était mise en place pour les assurés répondant à des conditions de revenus professionnels et du capital, avec application d'un pourcentage audit montant ; il indiquait encore que 'selon les éléments transmis par la Direction générale des finances publiques, il était redevable de la somme de 27 185 euros' et que si le montant des revenus était erroné, il était invité à contacter l'URSSAF.

De plus, aux termes d'une lettre certes non datée mais nécessairement antérieure à novembre 2017 et donc avant l'appel de cotisation précité, l'URSSAF a informé M. [E], qui ne conteste pas avoir reçu ce courrier, de la mise en place de la PUMA ; après un exposé du cadre de celle-ci et un renvoi aux articles L. 380-2, R. 380-3 à R. 380-8 et D. 380-1 du code de la sécurité sociale, l'organisme informe l'intéressé de la mise en recouvrement de cette cotisation 'au cours du mois de novembre 2017 sur la base des éléments transmis dans votre déclaration fiscale au titre des revenus 2016".

Aucun manquement à l'obligation d'information ne peut donc être retenu à l'encontre de l'URSSAF, étant au surplus observé que l'ACOSS, à la charge de laquelle la CNIL a mis l'obligation discutée, n'est pas partie à l'instance.

Les moyens soulevés par l'appelant seront donc écartés.

7 - Sur le moyen tiré de l'incompétence de l'URSSAF des Pays de la Loire pour émettre l'appel de cotisation

M. [E] soutient que l'URSSAF des Pays de la Loire n'était pas compétente pour émettre l'avis de cotisation dès lors qu'il résidait en Bretagne ; que la délégation de compétence entre l'URSSAF Bretagne et l'URSSAF des Pays de la Loire, en date du 11 décembre 2017 et publiée le 15 janvier 2018, ne peut utilement lui être opposée dès lors que dès avant sa signature, il avait été informé qu'un appel de cotisation serait émis et que son dossier était confié à l'URSSAF des Pays de la Loire ; que le transfert de ses données personnelles et leur exploitation par l'URSSAF des Pays de la Loire ont ainsi manifestement eu lieu avant la délégation ; que l'URSSAF des Pays de la Loire a de ce fait excédé ses attributions et violé les dispositions de l'article 27 de la loi n° 78-18 du 6 janvier 1978 en traitant un fichier contenant des données personnelles sans autorisation et au mépris d'un avis de la CNIL ; qu'il s'est vu privé ainsi des droits et garanties de cette loi puisque le droit d'accès et de rectification ne peut, aux termes du décret du 3 novembre 2017, s'exercer qu'auprès de l'URSSAF de son domicile.

L'URSSAF réplique, au visa de l'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale et de la décision du 11 décembre 2017 du directeur de l'ACOSS publiée le 15 janvier 2018, qu'elle était compétente pour émettre l'appel contesté.

Sur ce :

L'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable dispose :

'Le directeur d'un organisme local ou régional peut déléguer à un organisme local ou régional la réalisation des missions ou activités liées à la gestion des organismes, au service des prestations, au recouvrement et à la gestion des activités de trésorerie, par une convention qui prend effet après approbation par le directeur de l'organisme national de chaque branche concernée. [...]'.

M. [E] produit aux débats la décision du directeur de l'ACOSS du 11 décembre 2017 approuvant les conventions de mutualisation interrégionales prises en application de l'article L. 122-7 du code de la sécurité sociale et conclues entre les URSSAF aux fins de délégation du calcul, de l'appel et du recouvrement des cotisations dues en application de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, à des URSSAF délégataires, conformément au tableau figurant en annexe de la décision, mentionnant la délégation de compétence de l'URSSAF Bretagne à l'URSSAF Pays de Loire.

En application des dispositions claires de l'article L. 122-7 sus-visé, cette convention de délégation a pris effet le 11 décembre 2017, soit antérieurement à l'appel de cotisation litigieux daté du 15 décembre 2017, la date de publication de la décision du directeur de l'ACOSS au BO Santé - Protection sociale - Solidarité étant à ce titre indifférente.

Il ne peut pas être déduit, comme le fait M. [E], de la simple mention 'la gestion de votre dossier est confiée à l'URSSAF Pays de la Loire' dans le courrier adressé à M. [E] à une date non précisée que l'URSSAF des Pays de la Loire avait dès avant la signature de la décision de délégation reçu et exploité les données personnelles du cotisant.

L'URSSAF des Pays de la Loire ayant reçu délégation de compétence à effet au 11 décembre 2017, l'appel à cotisation du 15 décembre 2017 est régulier. 8 - Sur le moyen tiré du caractère tardif de l'appel de cotisation

M. [E] soutient que l'appel de cotisation du 15 décembre 2017 a été réalisé après le délai de l'article R. 380-4 du code de la sécurité sociale de sorte qu'il doit être annulé.

L'URSSAF réplique que le non-respect de la date d'appel à cotisation n'est sanctionné par aucune nullité textuelle et ne saurait entacher d'illégalité la procédure de recouvrement ; que ce retard a pour seul effet de reporter la date d'exigibilité de la cotisation ; qu'au surplus, il n'est en l'espèce justifié d'aucun grief.

Sur ce :

L'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur du 1er janvier 2016 au 1er janvier 2019, issue de la loi n°2015-1702 du 21 décembre 2015, dispose :

'Les personnes mentionnées à l'article L. 160-1 sont redevables d'une cotisation annuelle lorsqu'elles remplissent les conditions suivantes :

1° Leurs revenus tirés, au cours de l'année considérée, d'activités professionnelles exercées en France sont inférieurs à un seuil fixé par décret. En outre, lorsqu'elles sont mariées ou liées à un partenaire par un pacte civil de solidarité, les revenus tirés d'activités professionnelles exercées en France de l'autre membre du couple sont également inférieurs à ce seuil ;

2° Elles n'ont perçu ni pension de retraite, ni rente, ni aucun montant d'allocation de chômage au cours de l'année considérée. Il en est de même, lorsqu'elles sont mariées ou liées à un partenaire par un pacte civil de solidarité, pour l'autre membre du couple.

Cette cotisation est fixée en pourcentage du montant des revenus fonciers, de capitaux mobiliers, des plus-values de cession à titre onéreux de biens ou de droits de toute nature, des bénéfices industriels et commerciaux non professionnels et des bénéfices des professions non commerciales non professionnels, définis selon les modalités fixées au IV de l'article 1417 du code général des impôts, qui dépasse un plafond fixé par décret. Servent également au calcul de l'assiette de la cotisation, lorsqu'ils ne sont pas pris en compte en application du IV de l'article 1417 du code général des impôts, l'ensemble des moyens d'existence et des éléments de train de vie, notamment les avantages en nature et les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers, dont le bénéficiaire de la couverture maladie universelle a disposé, en quelque lieu que ce soit, en France ou à l'étranger, et à quelque titre que ce soit. Ces éléments de train de vie font l'objet d'une évaluation dont les modalités sont fixées par décret en Conseil d'Etat. Un décret détermine le taux et les modalités de calcul de cette cotisation ainsi que les obligations déclaratives incombant aux assujettis.

Lorsque les revenus d'activité mentionnés au 1° sont inférieurs au seuil défini au même 1° mais supérieurs à la moitié de ce seuil, l'assiette de la cotisation fait l'objet d'un abattement dans des conditions fixées par décret. Cet abattement croît à proportion des revenus d'activité, pour atteindre 100% à hauteur du seuil défini audit 1°.

La cotisation est recouvrée l'année qui suit l'année considérée, mentionnée aux 1° et 2° du présent article, selon les dispositions des sections 2 à 4 du chapitre III et du chapitre IV du titre IV du livre II du présent code, sous réserve des adaptations prévues par décret du Conseil d'Etat.

Les agents des administrations fiscales communiquent aux organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-2 les informations nominatives déclarées pour l'établissement de l'impôt sur le revenu par les personnes remplissant les conditions mentionnées au premier alinéa de l'article L.380-2, conformément à l'article L. 152 du livre des procédures fiscales'.

Conformément à la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-735 QPC du 27 septembre 2018, les première et dernière phrases du quatrième alinéa de l'article L. 380-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016, sont conformes à la Constitution, sous la réserve énoncée au paragraphe 19 de la décision, aux termes de laquelle il appartient au pouvoir réglementaire de fixer le taux et les modalités de détermination de l'assiette de la cotisation de façon à ne pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.

Il résulte de l'article R. 380-4 du code de la sécurité sociale que la cotisation subsidiaire maladie 'mentionnée à l'article L. 380-2 est appelée au plus tard le dernier jour ouvré du mois de novembre de l'année suivant celle au titre de laquelle elle est due. Elle est exigible dans les trente jours suivant la date à laquelle elle est appelée.'

Comme le rappellent à juste titre les premiers juges, le non-respect par l'organisme de recouvrement de la date limite mentionnée par ce texte a pour seul effet de reporter le délai au terme duquel la cotisation devient exigible (2e Civ., 28 janvier 2021, pourvoi n° 19-25.853, F-P+I). De nombreux arrêts sont venus confirmer cette solution (pour les plus récents : 2e Civ., 16 février 2023, pourvoi n° 21-12.677 et pourvoi n° 21-12.613).

Il s'ensuit que le fait que l'appel de la cotisation en cause soit intervenu le 15 décembre 2017 ne saurait faire obstacle à son recouvrement selon les modalités prévues à l'article R. 380-4.

Le moyen sera ainsi rejeté.

9 - Sur le moyen tiré du caractère indu de la cotisation

M. [E], qui précise avoir déclaré 5 352 euros de revenus d'activités professionnelles intégralement soumis à cotisations sans abattement, reproche à l'URSSAF d'avoir, s'agissant du calcul de la cotisation subsidiaire maladie, appliqué l'abattement fiscal de 71% réservé au calcul de l'assiette imposable au barème progressif de l'impôt sur le revenu des commerçants indépendants, réduisant ainsi le montant de ses revenus à seule fin de le soumettre à ladite cotisation.

L'URSSAF reproche aux premiers juges d'avoir suivi ce raisonnement. Elle rappelle à cet effet que les revenus d'activités de M. [E] ont été déclarés fiscalement dans la catégorie des micro BIC/BNC et ont donc bénéficié de l'abattement de 71% comme indiqué dans l'avis d'impôt transmis ; qu'après application de cet abattement, expressément prévu par la réglementation et rappelé par la circulaire interministérielle du 15 novembre 2017 pour le calcul de la cotisation concernée, le bénéfice imposable constituant l'assiette de cotisations s'est élevé à 3 630 euros, somme inférieure au seuil de 10% du PASS visé par l'article D. 380-1 du code de la sécurité sociale (3 862 euros pour 2016), de sorte que l'intéressé est bien redevable de la cotisation contestée.

Sur ce :

Il résulte des articles L. 380-2 et D. 380-1 du code de la sécurité sociale rappelés ci-dessus que sont redevables de la cotisation subsidiaire maladie les personnes remplissant les conditions suivantes :

- leurs revenus d'activités professionnelles exercées en France sont inférieurs à 10% du PASS au titre de l'année civile pour laquelle la cotisation est due ;

- leurs revenus fonciers, de capitaux mobiliers, des plus-values de cession à titre onéreux de biens ou de droits, des bénéfices industriels et commerciaux non professionnels et des bénéfices des professions non commerciales non professionnels dépassent 25% du PASS.

Pour l'année 2016, il n'est pas contesté que ces seuils s'établissaient respectivement à 3 861,60 euros (10% du PASS) et 9 654 euros (25% du PASS).

La circulaire précitée du 15 novembre 2017, relative à la cotisation subsidiaire maladie, qui a été soumise à l'examen du Conseil d'Etat comme indiqué ci-dessus, précise que 'pour les micro-entrepreneurs, la cotisation forfaitaire maladie est calculée sur le bénéfice par application de l'abattement forfaitaire au chiffre d'affaire de 87% (bénéfices agricoles), de 71% (activités de vente et assimilées), de 50% (prestations de service et locations meublées)ou de 34% (activités relevant des BNC).'

M. [E] ne conteste pas qu'il exerçait en 2016 une activité sous le régime de la micro-entreprise dans le domaine de la vente et assimilée, ni qu'il a déclaré fiscalement ses revenus professionnels dans cette catégorie.

L'abattement de 71% lui a été par conséquent à juste titre appliqué pour le calcul de la cotisation en litige, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges.

Ses revenus professionnels s'étant élevés cette année-là à 5 352 euros, comme l'admet l'URSSAF dans sa lettre du 5 septembre 2019 (pièce n°2 de M. [E]) et dans ses conclusions, l'application de l'abattement de 71% conduit à retenir un montant de revenus inférieur au seuil de 10% du PASS.

M. [E] ne conteste pas par ailleurs que ses revenus de capitaux dépassent le seuil de 25% du PASS.

Il s'ensuit que l'URSSAF est fondée à réclamer à M. [E] le paiement de la somme de 26 589 euros, outre les majorations de retard.

10 - Sur les dépens

Les dépens de la présente procédure seront laissés à la charge de M. [E] qui succombe à l'instance et qui de ce fait ne peut prétendre à l'application des dispositions l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Dit que la contestation par M. [E] de la régularité de la mise en demeure du 25 juin 2019 est recevable mais mal fondée ;

Déclare ladite mise en demeure régulière ;

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il ordonne la jonction des recours ;

Statuant à nouveau :

Condamne M. [E] à payer à l'URSSAF des Pays de la Loire la somme de 26 589 euros, outre les majorations de retard ;

Condamne M. [E] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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