CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 21 mars 2025, n° 23/14454
PARIS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Défendeur :
Actiforge (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Renard
Vice-président :
Mme Salord
Conseiller :
M. Buffet
Avocats :
Me Lellinger, Me Ribaut, Me Hordot
Vu le jugement rendu le 14 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Paris qui a :
- rejeté la demande de la société Actiforge tirée de la forclusion de l'action du syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et de la commune de [Localité 1] par tolérance de sa marque semi-figurative française n°4013824,
- débouté le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1] de leur demande d'annulation de la marque semi-figurative française n°4013824 de la société Actiforge,
- débouté le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1] de leur demande de déchéance de la société Actiforge de sa marque semi-figurative n° 4013824 pour défaut d'usage sérieux,
- débouté le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1] de leur demande d'annulation du modèle communautaire n°008197107 de la société Actiforge,
- débouté le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1] de leur demande en concurrence déloyale et parasitisme,
- débouté le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1] de leur demande en dénigrement,
- débouté le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1] de leur demande en pratiques commerciales trompeuses,
- débouté le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1] de leurs demandes en indemnisation, en publication, en interdiction du terme « [Localité 1] » et en astreinte,
- débouté la société Actiforge de sa demande en procédure abusive,
- condamné le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1] aux dépens, avec droit pour Me Gantelme, avocat au barreau de Paris, de recouvrer ceux dont il a fait l'avance sans recevoir provision,
- débouté le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1] de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1] à payer 10 000 euros à la société Actiforge en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté la demande de la société Actiforge d'écarter l'exécution provisoire de droit,
Vu l'appel interjeté le 17 août 2023 par le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1],
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 17 décembre 2024 par le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] (SFACL) et la commune de [Localité 1], qui demandent à la cour de :
- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par le SFACL et la commune de [Localité 1],
- déclarer l'intimée irrecevable, à tout le moins mal fondée, en son appel incident, en toutes ses demandes, fins et conclusions, et l'en débouter purement et simplement,
Y faisant droit,
- infirmer la décision entreprise mais uniquement en ce qu'elle a :
- débouté les appelants de leurs demandes tendant à voir déclarer la société Actiforge responsable d'actes de pratiques commerciales trompeuses, de concurrence déloyale et parasitaires et de dénigrement,
- débouté les appelants de leurs demandes tendant à prononcer :
- l'annulation de la marque semi-figurative française n°4013824 de la société Actiforge,
- la déchéance de la marque semi-figurative française n°4013824,
- l'annulation du modèle communautaire n°008197107 de la société Actiforge,
- l'interdiction sous astreinte pour la société Actiforge d'exploiter du terme « [Localité 1] » ou toute autre déclinaison sous quelque forme et quelque support que ce soit,
- la condamnation de la société Actiforge à indemniser les appelantes en réparation du préjudice subi du fait des actes susvisés,
- la condamnation sous astreinte de la société Actiforge à publier le dispositif de la décision à intervenir sur le site internet www.couteau-[Localité 1].com, le compte Facebook https://www.facebook.com/Couteau-[Localité 1]-Actiforge 408353919244089/ exploités par la société Actiforge et dans cinq journaux ou revue en France ou à l'international,
- condamné les appelants aux dépens de 1ère instance et à régler à la société Actiforge une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les appelants de leurs demandes en paiement des frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
- rejeté la demande tendant à écarter l'exécution provisoire,
- débouté les appelants de tous autres chefs dépendants des chefs critiqués ci-dessus, et non mentionnés dans le dispositif du jugement, incluant notamment la demande formulée à la juridiction de se réserver le pouvoir de liquider les astreintes prononcées et celle tendant à condamner la société Actiforge à justifier de l'inscription de la décision à intervenir au registre national des marques auprès de l'INPI, sous un mois suivant la décision à intervenir, et à défaut, à autoriser le SFACL à procéder à ladite inscription passé ce délai,
Statuant à nouveau,
- dire et juger que la société Actiforge s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale et parasitaire à l'encontre du SFACL et la commune de [Localité 1],
- prononcer la nullité de droits de la société Actiforge sur l'enregistrement de marque française n°4013824 pour l'ensemble des produits couverts, pour dépôt de mauvaise foi,
- prononcer la nullité de droits de la société Actiforge sur l'enregistrement de marque française n°4013824 pour l'ensemble des produits couverts, pour caractère trompeur et/ou atteinte aux droits des membres du SFACL et de la commune de [Localité 1],
- prononcer la déchéance des droits de la société Actiforge sur l'enregistrement de marque française n°4013824 pour l'ensemble des produits couverts, pour caractère trompeur,
- prononcer la nullité du modèle de l'Union Européenne n°008197107,
- ordonner que la défenderesse (sic) justifie, dans le délai d'un mois de la signification de l'arrêt à intervenir, de l'inscription de celui-ci au Registre National des Marques auprès de l'Institut National de la propriété Intellectuelle (sic), et à défaut autoriser le SFACL à faire inscrire ledit jugement (sic),
- interdire à la société Actiforge d'exploiter sous quelque forme et quelque support que ce soit (en ce compris sur des vidéos, brochures, catalogues, sites internet, applications mobiles sur tous types de systèmes d'exploitation (Ios, Android etc.), publications Instagram, Facebook ou tout autre réseau social et sur toutes chaînes de télévision) le terme [Localité 1] ou toute déclinaison, sous astreinte de 10 000 euros par infraction constatée et par jour de retard à compter d'un délai de 5 jours suivant la signification du jugement à intervenir (sic),
- ordonner la publication du dispositif de l'arrêt à intervenir, dans un délai de 3 jours à compter de la signification du jugement à intervenir (sic) et sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard, sur les pages d'accueil du site Internet www.couteau-[Localité 1].com, du compte Facebook https://www.facebook.com/Couteau-[Localité 1]-Actiforge 408353919244089/ exploités par la société Actiforge, pendant le délai d'un mois,
- ordonner la publication du dispositif de l'arrêt à intervenir, accompagné d'un message objectif et explicatif, dans cinq journaux ou revues au choix de la société Actiforge, en France et/ou à l'international, aux frais avancés par Actiforge, sans que le coût n'excède la somme de 5 000 euros hors taxes par insertion,
- condamner la société Actiforge à payer aux demandeurs la somme de 150 000 euros, à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et de parasitisme,
- se réserver la liquidation des astreintes ordonnées aux termes de l'arrêt à intervenir,
- confirmer la décision entreprise pour le surplus, en ce qu'elle a :
- rejeté la demande de la société Actiforge tirée de la forclusion de l'action du syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et de la commune de [Localité 1] par tolérance de sa marque semi-figurative française n° 4013824,
- débouté la société Actiforge de sa demande en procédure abusive,
Ce faisant,
- ordonner le remboursement des sommes qui auront pu être versées en vertu de l'exécution provisoire de la décision entreprise, en principal, intérêts, frais et accessoires, avec intérêts au taux légal à compter de leur versement, et ce au besoin à titre de dommages intérêts,
En toute hypothèse,
- débouter la société Actiforge de toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
- condamner la société Actiforge à verser aux appelants la somme de 20 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Actiforge en tous les dépens de 1ère instance et d'appel,
Vu les dernières conclusions n°5 remises au greffe et notifiées par voie électronique le 18 décembre 2024 par la société Actiforge, qui demande à la cour de :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 14 juin 2023 en ce qu'il a :
- débouté le SFACL et la commune de [Localité 1] de l'intégralité de leurs demandes et notamment :
- débouté le SFACL et la commune de [Localité 1] de leur demande d'annulation de la marque semi-figurative française n°4013824 de la société Actiforge,
- débouté le SFACL et la commune de [Localité 1] de leur demande de déchéance de la société Actiforge de sa marque semi-figurative française n°4013824 pour défaut d'usage sérieux,
- débouté le SFACL et la commune de [Localité 1] de leur demande d'annulation du modèle communautaire n°008197101 de la société Actiforge,
- débouté le SFACL et la commune de [Localité 1] de leur demande en concurrence déloyale et parasitisme,
- débouté le SFACL et la commune de [Localité 1] de leur demande en dénigrement,
- débouté le SFACL et la commune de [Localité 1] de leur demande en pratiques commerciales trompeuses,
- débouté le SFACL et la commune de [Localité 1] de leurs demandes en indemnisation, en publication, en interdiction du terme « [Localité 1] » et en astreinte,
- débouté le SFACL et la commune de [Localité 1] de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné le SFACL et la commune de [Localité 1] aux dépens,
- condamné le SFACL et la commune de [Localité 1] à payer 10 000 euros à la société Actiforge en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 14 juin 2023 en ce qu'il a :
- rejeté la demande de la société Actiforge tirée de la forclusion de l'action du SFACL et de la commune de [Localité 1] par tolérance de sa marque semi-figurative française n°4013824,
- débouté la société Actiforge de sa demande indemnitaire pour procédure abusive,
Statuant à nouveau,
- déclarer irrecevable, car forclose par tolérance, la demande d'annulation des droits de la société Actiforge sur l'enregistrement de la marque française n°4013824,
- condamner solidairement le SFACL et la commune de [Localité 1] à verser à la société Actiforge la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
En tout état de cause,
- déclarer irrecevable, car nouvelle en cause d'appel, la demande du SFACL et de la commune de [Localité 1] de « prononcer la nullité de droit de la société Actiforge sur l'enregistrement de marque française n°4013824 pour l'ensemble des produits couverts, pour dépôt de mauvaise foi,
- débouter le SFACL et la commune de [Localité 1] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
- condamner le SFACL et la commune de [Localité 1] aux entiers dépens d'appel,
- condamner le SFACL et la commune de [Localité 1] à verser à la société Actiforge la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile concernant les frais de procédure d'appel,
Vu l'ordonnance de clôture du 19 décembre 2024 ;
SUR CE,
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.
Il sera simplement rappelé que le Syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] (ci-après le SFACL), constitué le 3 juin 2013, indique avoir pour objectif de protéger le couteau de [Localité 1] fabriqué en nord-Aveyron, de promouvoir et maintenir le savoir-faire des couteliers de cette région et de garantir l'origine géographique des couteaux de [Localité 1]. Huit sociétés sont membres du syndicat.
La commune de [Localité 1] est située dans le département de l'Aveyron.
La SAS Actiforge, immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 10 mai 1990, a pour activité l'étude, la réalisation, la commercialisation et la représentation de tous produits à usage domestique et industriel et précise commercialiser, principalement via son site internet, des couteaux de type [Localité 1].
Elle est titulaire :
- de la marque semi-figurative française n°4013824, déposée le 20 juin 2013 et modifiée le 3 janvier 2014 à l'Institut national de la propriété industrielle (INPI), en classe 8 pour désigner les « outils et instruments à main entraînés manuellement, coutellerie, fourchettes et cuillers, armes blanches, rasoirs tous les produits précités étant d'origine française ou fabriqués en France » ci-après représentée :
- du modèle communautaire n°008197107, déposé le 8 octobre 2020 et publié le 22 octobre 2020 portant sur un couteau de poche présentant un système d'ouverture à pompe contenu dans une encoche située au tiers inférieur du manche.
Considérant que la société Actiforge utilise la dénomination « [Localité 1] » dans l'ensemble de sa communication sur internet, par le biais de la vente et de la promotion de ses produits et est à l'origine de nombreuses allégations fausses et dénigrantes de nature à tromper le consommateur et susceptibles de constituer une concurrence déloyale et parasitaire, le SFACL et la commune de [Localité 1] ont mis en demeure cette dernière de cesser ces agissements par lettre recommandée et courriel du 17 juin 2020.
Par courrier officiel en réponse du 3 août 2020, la société Actiforge a contesté les allégations de tromperie des consommateurs et a indiqué être disposée à retirer et/ou refaire une vidéo de présentation historique « du [Localité 1] » présente sur son site internet et à prendre attache auprès d'un site marchand tiers pour lui demander de corriger la présentation de ses produits.
Par courriel du 12 octobre 2020, le SFACL et la commune de [Localité 1] ont mis en demeure la société Actiforge de renoncer à la marque semi-figurative française dont elle est titulaire du fait de sa déchéance pour absence d'usage sérieux, ce que cette dernière a refusé par courrier officiel du 29 octobre 2020.
Par acte d'huissier de justice du 18 février 2021, le SFACL et la commune de [Localité 1] ont fait assigner la société Actiforge devant le tribunal judiciaire de Paris pour pratiques commerciales trompeuses et parasitisme ainsi qu'en nullité et déchéance de la marque française semi-figurative n°4013824 et nullité du modèle de l'Union européenne n°008197107.
C'est dans ce contexte qu'a été rendu le jugement dont appel.
A titre liminaire, il convient de relever que si, aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions, le SFACL et la commune de [Localité 1] demandent à la cour de déclarer l'intimée irrecevable en son appel incident et en toutes ses demandes, aucun moyen ni aucune aucune de non-recevoir ne sont développées de ces chefs.
De la même manière, et malgré les termes du dispositif de leurs dernières conclusions, le SFACL et la commune de [Localité 1], ne développent devant la cour aucun moyen relatif au dénigrement.
En conséquence, il ne sera pas statué de ces chefs.
Sur la demande de nullité de la marque française semi-figurative française n°4013824
Le SFACL et la commune de [Localité 1] poursuivent la nullité de la marque française semi-figurative n°4013824 aux motifs qu'elle constitue une référence évidente au village éponyme et que dès lors le dépôt a été fait de mauvaise foi, que la marque a un caractère descriptif et un caractère trompeur, et qu'elle porte atteinte à la dénomination sociale du syndicat et au nom de la commune de [Localité 1].
Sur le dépôt de mauvaise foi
Les appelants font valoir en premier lieu que la marque litigieuse a été déposée à l'INPI quelques semaines après la création du SFACL, soit après le lancement du projet d'unification de la profession autour de la dénomination « le couteau de [Localité 1] », que c'est donc sciemment que la défenderesse a méconnu les intérêts légitimes à la protection de cette dénomination par un dépôt intervenant dans le contexte d'un processus de reconnaissance et de protection déjà très largement engagé. Ils en concluent que le dépôt litigieux ne peut s'expliquer que par la volonté d'échapper à l'impossibilité future mais certaine d'en faire usage pour des produits qui ne satisferaient pas aux critères posés par le syndicat et qui avaient vocation à devenir les critères d'une future indication géographique, qu'il doit en conséquence être annulé pour fraude.
La société Actiforge conclut à l'irrecevabilité de cette demande comme étant nouvelle en cause d'appel et en tout état de cause à son caractère infondé.
Aux termes de l'article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
En l'espèce, la demande de nullité de la marque n°4013824 pour dépôt de mauvaise foi tend à la même fin que la demande de nullité de ladite marque formée en première instance pour caractère descriptif, caractère trompeur et atteinte à la dénomination sociale du SFACL et au nom de la collectivité locale [Localité 1]. Elle est donc recevable en cause d'appel.
Par ailleurs, la marque litigieuse ayant été déposée le 20 juin 2013, les dispositions des articles L 714-3 et L 712 -11 issues de l'ordonnance du 13 novembre 2019 ne sont pas applicables en l'espèce.
Pour autant, un dépôt de marque est frauduleux lorsque le déposant l'effectue dans l'intention de priver autrui d'un signe nécessaire à son activité présente ou future, l'ancien article L 712-6 du code de la propriété intellectuelle, qui ne fait pas obstacle à ce que la victime de la fraude se borne à obtenir la nullité du dépôt frauduleux prévoyant en outre que « si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice ».
Or, en l'espèce, la société Actiforge était titulaire depuis 2007 d'une marque n°3502966 ci-dessous représentée :
Elle a déposé la marque n°4013824 le 20 juin 2013 alors que le SFACL a été constitué également le 3 juin 2013.
S'il n'est pas contesté que la première demande d'indication géographique « Couteau de [Localité 1] » a été déposée le 24 novembre 2020 par le SFACL soit 7 ans plus tard, il résulte des éléments du dossier que :
- l'étude d'impact du projet de loi relatif à la consommation du 30 avril 2013 indiquait au titre du chapitre « Etat des lieux » que « L'administration a été saisie de plusieurs demandes de protection de noms géographiques de produits non alimentaires (porcelaine de [Localité 5] et couteaux de [Localité 1] notamment). L'absence de protection du nom de ces produits contribue à l'essor de produits similaires fabriqués principalement à l'étranger, ce qui crée une concurrence déloyale pour les entreprises concernées lorsqu'elles s'efforcent de maintenir la production et donc les emplois dans la zone historique de production et de garantir des savoir-faire de tradition dans l'élaboration de ces produits. (')
Par ailleurs, des collectivités territoriales ont demandé un renforcement des moyens de protection de leurs dénominations afin de limiter leurs utilisations à des fins commerciales qui peuvent s'avérer abusives. Des petites communes, comme [Localité 1] dans l'Aveyron, rencontrent en effet des difficultés à se prémunir d'une appropriation de leur nom à des fins commerciales et notamment lutter contre le dépôt de leur nom en tant que marque, source de confusion pour le consommateur »,
- M. [F] [D], alors ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, a présenté publiquement à [Localité 5] le 17 juin 2013, soit trois jours avant le dépôt de la marque, la partie du projet de loi sur la consommation concernant l'extension des indications géographiques protégées aux produits manufacturés,
- un article du journal La Dépêche du 30 avril 2013 intitulé « [Localité 1] compte sur la loi consommation pour protéger enfin son couteau » a indiqué : « [Localité 1], au bord du plateau de l'Aubrac, se réjouit du projet de loi sur la consommation, présenté jeudi en conseil des ministres, qui devrait lui permettre de protéger enfin son fameux couteau par une Indication Géographique (IG) »,
- un autre article du même journal La Dépêche du 9 janvier 2013 intitulé « Espalion. Le [Localité 1], à couteaux tirés avec tous les parasitaires » a indiqué : « Le [Localité 1] est avant tout un couteau fabriqué au village aveyronnais de [Localité 1]. Il a été créé par des forgerons vers 1830' Les élus souhaitent la création d'une IGP (Indication Géographique Protégée). Dans le contexte actuel de mondialisation, c'est une affaire à suivre. »,
- la Ministre [M] [V] indique dans le Pacte pour l'Artisanat présenté le 3 janvier 2013, « La situation du village de [Localité 1], dont un particulier s'est approprié le nom en déposant en 1993 la marque auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI), a démontré la nécessité de relancer l'idée d'une extension des indications géographiques protégées (IGP) aux produits manufacturés' L'expérience de [Localité 1] rend urgente la mise en 'uvre de cette protection en France et en Europe»,
- en 2012 et 2013, la presse nationale a relayé l'idée d'une protection à venir, un article du journal Le Figaro du 7 octobre 2012 indiquant « [Localité 1] reçoit le soutien de la ministre de l'Artisanat » et un article du journal Le Parisien du 5 mai 2013 titrant « Les couteaux [Localité 1] bientôt protégés par la loi »,
- enfin un podcast portant sur « L'indication géographique protégée » a été diffusé sur France Bleu le 17 juin 2013.
Il en résulte que le futur dépôt de la demande d'indication géographique « Couteau de [Localité 1] » a été médiatisé dès 2012 et en particulier au moment de la création du SFACL en 2013 et que la société Actiforge avait connaissance, au jour du dépôt de la marque française semi-figurative n° 4013824, de la volonté du syndicat appelant de protéger la dénomination « Couteau de [Localité 1] » en tant qu'indication géographique protégée.
Le dépôt de la marque n°4013824 est donc intervenu dans le contexte de démarches avancées d'organisation de la profession des couteliers de la région de [Localité 1] en vue d'obtenir une indication géographique protégée, dans le but d'échapper à l'impossibilité future d'en faire usage pour des produits qui ne satisferaient pas aux critères de cette indication géographique, en s'aménageant une protection sur un signe composé d'éléments évocateurs du lieu de provenance des produits, étant rappelé que la nécessité de relancer l'idée d'une extension des indications géographiques aux produits manufacturés était notamment induite par la situation du village de [Localité 1].
A cet égard, la société Actiforge ne peut sérieusement soutenir que son dirigeant a décidé de moderniser la précédente marque déposée par la mère de son dirigeant et de la protéger dès lors que le terme « [Localité 1] » était absent de la marque antérieure. Elle ne peut pas plus soutenir que la ville de [Localité 1] et la ville de [Localité 7] sont toutes deux reconnues pour la fabrication de couteux de type « [Localité 1] » dès lors qu'en 2013, elle n'était domiciliée dans aucune de ces villes.
Le dépôt frauduleux de la marque en cause étant caractérisé, il y a lieu d'en prononcer la nullité.
Les autres motifs de nullité de la marque, la fin de non-recevoir tirée de la forclusion par tolérance qui, malgré les termes du dispositif des dernières conclusions de la société Actiforge, n'est invoquée que s'agissant de la demande de nullité de la marque pour atteinte à la dénomination sociale des membres du SFACL et au nom de la collectivité locale [Localité 1], et la demande de déchéance de la même marque pour caractère trompeur deviennent sans objet.
Sur la nullité du modèle de l'Union européenne n°008197107
Le SFACL et la commune de [Localité 1] poursuivent la nullité du modèle de l'Union européenne n°008197107 pour absence de nouveauté et de caractère individuel ainsi que pour atteinte au nom [Localité 1].
Or aux termes de l'article 24 1. du règlement (CE) du 12 décembre 2001 sur les dessins et modèles communautaires, « Un dessin ou modèle communautaire enregistré est déclaré nul sur demande introduite auprès de l'Office, conformément à la procédure prévue aux titres VI et VII, ou par un tribunal des dessins ou modèles communautaires à la suite d'une demande reconventionnelle dans le cadre d'une action en contrefaçon.
S'agissant en l'espèce d'une demande principale en nullité dudit modèle déposé par la société Actiforge le 8 octobre 2020, la cour soulève d'office son incompétence pour connaitre de la demande et invite les parties à s'expliquer sur ce point.
Sur la concurrence déloyale et parasitaire
L'action en concurrence déloyale ou parasitaire présente un fondement délictuel et il incombe en conséquence aux appelants de rapporter la preuve d'un agissement fautif de la société Actiforge commis à leur préjudice.
Le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.
Le SFACL et la commune de [Localité 1] reprochent à la société Actiforge d'avoir cherché à profiter de manière illégitime de la réputation de [Localité 1] en faisant un usage massif de la dénomination éponyme. Ils considèrent que l'intimée profite, sans bourse délier, des fruits des combats judiciaires menés par la commune pour retrouver la pleine maitrise de son nom et de leurs investissements pour protéger le terme [Localité 1] qui renvoie directement au village éponyme.
La société Actiforge réplique que la réputation des couteau [Localité 1] est en grande partie due aux couteliers thiernois qui n'ont jamais cessé la fabrication et ont su conserver leur savoir-faire, qu'elle a adhéré à l'association Couteau [Localité 1] Aubrac Auvergne (CLAA) en 2016, qu'elle participe au développement de la notoriété du couteau [Localité 1] et rappelle sur son site internet que le couteau [Localité 1] est fabriqué à [Localité 7] et à [Localité 1] suivant un savoir-faire artisanal et spécifique.
S'agissant de la concurrence déloyale, force est de constater que les appelants n'invoquent aucun moyen dans la partie discussion de leurs dernières écritures relatif à la concurrence déloyale, leurs seuls développements étant ici consacrés au parasitisme, y compris le grief résultant de l'utilisation sur le site internet de la société Actiforge de la dénomination « [Localité 1] [Y] [N] » pour laquelle il est conclu « Ceci constitue donc un parasitisme évident ».
Au titre du parasitisme, les appelants invoquent des atteintes commises par la société Actiforge à la réputation de « [Localité 1] » de par la reproduction du signe éponyme sur son site internet.
Il sera rappelé que par décision du 7 avril 2022, l'INPI a rejeté la demande d'indication géographique déposée par le SFACL pour la dénomination « Couteau de [Localité 1] » et que cette décision a été annulée par arrêt définitif de la cour d'appel d'Aix en Provence du 11 juillet 2024. Par ailleurs, par décision du 24 septembre 2024, l'INPI a fait droit à la demande d'homologation du cahier des charges de l'indication géographique « Couteau de [Localité 1] », le CLAA a interjeté appel de cette décision et la procédure est pendante devant la cour d'appel de Lyon.
Enfin, par décision du 6 septembre 2022, l'INPI a homologué la demande d'indication géographique déposée par le CLAA pour la dénomination « Couteau [Localité 1] ». Cette décision a été annulée par arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 11 juillet 2024 et le CLAA a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.
Il résulte des éléments du débat que le terme [Localité 1] évoque le nom du village éponyme qui jouit d'une réputation pour la coutellerie. A cet égard, les appelants versent aux débats des études de notoriété desquelles il résulte que, en 2010, 92 % des personnes interrogées rattachent un couteau à la commune de [Localité 1], en 2018, près de 9 répondant sur 10 connaissent le mot ou le nom de [Localité 1], 87% des personnes interrogées associent spontanément le terme [Localité 1] à un couteau et 2/3 de ces mêmes personnes l'associent également à un lieu géographique en cas de question assistée, et en 2019, 85% des personnes interrogées connaissant le terme [Localité 1], 84 % l'associent à un lieu de fabrication de couteaux et 63% ne seraient pas prêtes à acheter, à qualité égale, un couteau de [Localité 1], qui ne soit pas fabriqué à [Localité 1], mais en France.
Enfin la réputation du couteau originaire de [Localité 1] résulte de l'enquête publique menée par l'INPI dans le cadre de l'instruction de la demande d'IGPIA aux termes de laquelle, sur les 2226 observations exprimées toutes provenances confondues, consommateurs, associations et professionnels, 1 694 étaient favorables au projet tel que présenté, soit une origine géographique limitée à [Localité 1] et ses environs.
Par ailleurs la commune de [Localité 1] justifie de nombreuses procédures judiciaires visant à protéger son toponyme et sa réputation et à ce jour, la seule IGPIA enregistrée est « Couteau de [Localité 1] » dont la gestion et la défense sont assurées par la SFACL.
Enfin, si la ville de [Localité 7] a elle aussi une tradition en matière de coutellerie, celle-ci concerne tous les types de couteaux dits régionaux et n'est pas spécialement liée au couteau [Localité 1].
Dès lors, de par l'usage non contesté sur son site internet de la dénomination « [Localité 1] » pour promouvoir ses produits, notamment les couteaux de poche qu'elle offre à la vente, la société Actiforge profite, sans bourse délier de la notoriété de [Localité 1] et des investissements qui y sont consacrés par les appelants, de sorte que les conditions du parasitisme sont réunies et que le jugement doit être infirmé de ce chef.
Sur les actes de tromperie
Selon les appelants, l'intimée commet encore des actes de tromperie en se prévalant du terme [Localité 1] pour désigner des couteaux qui ne correspondent pas à des couteaux de [Localité 1] ainsi que pour sa communication sur internet (adresse internet, adresse de contact et page Facebook) et de la qualité de fabricant à laquelle elle ne peut prétendre. Ils se prévalent d'une confusion faite par un journaliste dans un article spécial Région Occitanie paru dans Pyrénées Magazine en 2021 entre les informations provenant du site internet de la société Actiforge et celles d'un coutelier d'Aveyron/Occitanie. Par ailleurs ils font grief à la société Actiforge de se prévaloir de la qualité de fabricant alors qu'elle ne dispose que de 15 m2 de locaux, d'un seul salarié rémunéré 340 euros par mois et d'une seule machine. Ils en déduisent que l'ensemble de ces pratiques est de nature à altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, et donc à constituer une pratique commerciale déloyale au sens de l'article L. 121-1 du code de la consommation. Ils ajoutent que la société intimée continue à se prévaloir de l'IGPIA sur son site Internet, près de deux mois après l'annulation de l'homologation et que l'atteinte portée à une indication géographique en violation de la protection qui lui est accordée constitue une tromperie.
La société Actiforge réplique qu'elle vend des couteaux de type [Localité 1] fabriqués par des entreprises du bassin thiernois qui concourent à la préservation du savoir-faire traditionnel de la fabrication artisanale du couteau [Localité 1], qu'elle commercialise, via son site marchand des couteaux de poche, que le « [Localité 1] » est son produit phare, raison pour laquelle il est mis à l'honneur, qu'elle commercialise également d'autres couteaux régionaux tel que le « [Localité 7] » et qu'elle garantit à ses clients une provenance française de ses produits précisant clairement sur son site que les [Localité 1] (sic) qu'elle commercialise sont fabriqués à [Localité 7]. Elle ajoute que si elle disposait d'un atelier à [Localité 6] dans la Loire (où elle effectuait certaines prestations telle que l'aiguisage et le marquage), lieu de son siège social, ce n'est aujourd'hui plus le cas mais qu'à aucun moment, elle n'indique que ses couteaux seraient fabriqués à [Localité 1] dans l'Aveyron. Elle en conclut qu'aucune tromperie sur la nature et l'origine des produits ne saurait par conséquent lui être reprochée.
Il est constant qu'une pratique commerciale est réputée trompeuse lorsque soit elle contient des informations fausses, soit elle est susceptible d'induire en erreur le consommateur moyen, et qu'elle est en outre de nature à altérer de manière substantielle le comportement économique de celui-ci en le conduisant à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement.
La société Actiforge reconnait ne plus fabriquer de couteaux. Les arguments des appelants tendant à contester ses moyens pour le faire sont donc sans objet.
Pour autant, les trois illustrations issues de son site internet reproduites dans les écritures des appelants (conseils du coutelier, l'histoire du couteau [Localité 1] et l'entretien du couteau [Localité 1]) n'indiquent pas que la société intimée est fabricant, pas plus que la rubrique « Atelier » dont le contenu est partiellement reproduit dans les écritures du SFACL et la commune de [Localité 1] et qui ne fait qu'indiquer que les couteaux vendus par la société Actiforge sont fabriqués à [Localité 7] ou comment fabriquer et assembler un couteau. Par ailleurs les propos tenus par un journaliste en 2021 dans Pyrénées Magazine n'engagent que leur auteur.
En revanche, il a été dit que la société Actiforge fait de nombreuses références sur son site internet au toponyme [Localité 1] dont la réputation en matière de coutellerie a été établie pour désigner des couteaux fabriqués à [Localité 7]. Elle faisait également encore référence le 17/08/2024 sur son site internet à une indication géographique qui à ce jour n'a pas été homologuée.
Ces usages, outre le fait qu'ils constituent une atteinte à l'IGPIA que les appelants invoquent également au titre des actes de tromperie, sont susceptibles d'induire en erreur le consommateur moyen, et sont de nature à altérer de manière substantielle le comportement économique de celui-ci en le conduisant à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement et sont en conséquence trompeurs.
Sur le préjudice
Le SFACL et la commune de [Localité 1] sollicitent paiement de la somme de 150 000 euros à titre de dommages intérêts tenant compte des campagnes judiciaires menées contre des tiers, de la réputation et de l'importance des couteaux [Localité 1] pour l'artisanat français, de l'évolution du chiffre d'affaires de la société Actiforge, de l'homologation de l'IG Couteau [Localité 1], aujourd'hui annulée, et dont l'intimée aurait pleinement profité, de l'augmentation moyenne des prix des couteaux [Localité 1] de la société Actiforge, du nombre d'avis sur le site de cette société et d'un préjudice moral.
La société intimée s'oppose à la demande en faisant valoir qu'elle n'est en concurrence ni avec la commune de [Localité 1] ni avec le SFACL qui n'exercent pas de commerce, que l'augmentation de son chiffre d'affaires est due à sa bonne connaissance de la technique de vente sur internet qu'elle pratique depuis les années 2000, que l'augmentation de ses coûts de vente n'est pas liée à l'obtention de l'indication géographique mais à l'augmentation du coût des matières premières, que M. [Y] [N], président du SFACL, est gérant d'une entreprise concurrente qui vend des couteaux [Localité 1] fabriqués à [Localité 7], enfin que le syndicat ne justifie d'aucun préjudice propre.
En effet, ni le SFACL ni la commune de [Localité 1] ne sont en concurrence directe avec la société Actiforge, la commune ne pouvant au demeurant se prévaloir des procédures engagées contre des tiers pour évaluer son préjudice dans le cadre de la présente instance.
Le préjudice des appelants est dès lors tout au plus constitué de l'atteinte à la notoriété de la commune de [Localité 1] en matière de coutellerie et à l'IGPIA dont la gestion et la défense sont assurées par la SFACL. Ainsi il leur sera alloué la somme totale de 20 000 euros en réparation de leur préjudice.
Ces dommages intérêts étant de nature à réparer l'entier préjudice du SFACL et de la commune de [Localité 1], la demande de publication sera rejetée.
Enfin il sera fait droit à la demande d'interdiction dans les termes ci-après définis au dispositif du présent arrêt.
Sur la demande de la société Actiforge en dommages intérêts pour procédure abusive
La société Actiforge qui succombe ne peut voir prospérer sa demande de dommages intérêts pour procédure abusive.
Sur les autres demandes
Le présent arrêt valant titre, il n'y a pas lieu d'ordonner le remboursement par la société Actiforge des sommes qui auront pu être versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement dont appel.
Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles seront infirmées.
Partie perdante, la société Actiforge sera condamnée en tous les dépens de première instance et d'appel.
Enfin le SFACL et la commune de [Localité 1] ont dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à leur charge. Il y a lieu en conséquence de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement dont appel sauf en ce qu'il a débouté le syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et la commune de [Localité 1] de leurs demandes de publication et débouté la société Actiforge de sa demande en procédure abusive.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que la société Actiforge s'est rendue coupable d'actes de parasitisme à l'encontre du syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et de la commune de [Localité 1].
Déclare recevable et bien fondée la demande du syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et de la commune de [Localité 1] tendant à voir prononcer la nullité de droit de la société Actiforge sur l'enregistrement de marque française n°4013824 pour l'ensemble des produits couverts, pour dépôt de mauvaise foi,
En conséquence, prononce la nullité de droits de la société Actiforge sur l'enregistrement de marque française n°4013824 pour l'ensemble des produits couverts, pour dépôt de mauvaise foi.
Ordonne la transmission à l'Institut National de la propriété Industriel du présent arrêt aux fins d'inscription au Registre National des Marques de la nullité de la marque française n°4013824 pour l'ensemble des produits couverts.
Dit sans objet le surplus des demandes de nullité et en déchéance de la marque française n°4013824.
Interdit à la société Actiforge d'exploiter sous quelque support que ce soit le terme [Localité 1], sous astreinte de 100 euros par infraction constatée à compter d'un délai de 30 jours suivant la signification du présent arrêt, l'astreinte courant pendant un délai de six mois.
Condamne la société Actiforge à payer au syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et à la commune de [Localité 1], ensemble, la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de parasitisme commis à leur encontre.
Condamne la société Actiforge à verser au syndicat des fabricants aveyronnais du couteau de [Localité 1] et à la commune de [Localité 1] la somme de 10 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires.
Condamne la société Actiforge en tous les dépens de première instance et d'appel.
Soulève d'office l'incompétence de la cour pour statuer sur la demande principale en nullité du modèle de l'Union Européenne n°008197107 et ordonne la réouverture des débats pour recueillir les explications des parties uniquement sur ce point.
Renvoie la cause et les parties à l'audience du 19 juin 2025 (durée des plaidoiries : 15 mn).
Dit que les parties devront conclure sur cette question au plus tard le 19 mai 2025.