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CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 25 mars 2025, n° 20/12470

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 20/12470

25 mars 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 25 MARS 2025

(n° / 2025, 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/12470 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCJUS

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Juillet 2020 -Tribunal de commerce de PARIS - RG n° 2018063373

APPELANT

Monsieur [D] [X]

Né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 13]

De nationalité française

Demeurant [Adresse 3]

[Localité 7]

Représenté par Me Laurent-Haim BENOUAICH de la SELARL BBO Société d'avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : R057,

Assisté de Me Pierre-Alain TOUCHARD, avocat au barreau de PARIS, toque : R057,

INTIMÉS

Monsieur [U] [K]

Né le [Date naissance 4] 1975 à [Localité 14] (94)

De nationalité française

Demeurant [Adresse 2]

[Localité 8]

S.A.S. HADAR CONSULTING, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 831 906 789,

Dont le siège social est situé [Adresse 6]

[Localité 9]

Représentés par Me Stéphane FERTIER de la SELARL JRF & TEYTAUD SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 octobre 2024, en audience publique, devant la cour, composée de :

Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,

Madame Constance LACHEZE, conseillère,

Monsieur François VARICHON, conseiller,

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Liselotte FENOUIL

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

FAITS ET PROCÉDURE:

Le 11 septembre 2017, M.[D] [X] (49%) et M.[U] [K] (51%) ont constitué la SAS Hadar Consulting, M.[K] en étant le président et M.[X] le salarié. La société a pour objet toutes prestations de consultants de conseils et de services auprès de toutes entreprises quel que soit leur domaine d'action, des particuliers et de tout organisme public ou para-public, toute conception, élaboration, opération de formation et plus généralement toute opération commerciale financière ou immobilière se rattachant à l'objet social ou à tout objet connexe, l'exercice, la gestion et le développement de toute activité liée au domaine de la médiation sous toutes ses formes.

La société avait pour expert-comptable Mme [X]-[Z], soeur de M.[X].

Le 4 septembre 2017, la société GFI Securities a conclu avec la société Hadar Consulting un contrat 'd'Agent Lié', intuitu personae, ayant pour objet la fourniture, par Hadar Consulting, de services d'investissement comme la réception et la transmission d'ordres sur les marchés financiers et le conseil en investissement.Le contrat a été conclu à effet du 4 septembre 2017 pour une durée indéterminée et était résiliable à tout moment en respectant un préavis de 6 mois.

Les relations se sont rapidement dégradées entre les deux associés, qui se reprochaient mutuellement leurs défaillances dans la société et dans l'exécution du contrat avec GFI Securities et M.[X] a démissionné de son emploi le 17 août 2018. A la suite de son départ, GFI Securities a, le 30 août 2018, résilié le contrat qu'elle avait passé avec la société Hadar Consulting.

Reprochant à M.[K] d'abuser de sa position majoritaire et de son mandat de président et d'empêcher le versement de dividendes, de s'octroyer une rémunération sans rapport avec son activité, et de ne pas recouvrer les sommes restant dues au titre du contrat d'Agent Lié, M.[X] a, par actes des 13 et 14 novembre 2018 fait assigner M.[K] et la société Hadar Consulting devant le tribunal de commerce de Paris pour voir prononcer la dissolution de la société aux torts de M.[K], désigner un administrateur judiciaire pour procéder aux opérations de liquidation et pour voir condamner M.[K] au paiement de dommages et intérêts à lui-même ou subsidiairement à la société Hadar Consulting.

Par jugement du 29 juillet 2020, le tribunal de commerce de Paris a débouté M.[X] de sa demande de dissolution de la société et de désignation d'un administrateur judiciaire, de sa demande de dommages et intérêts tant à son profit qu'à celui de la société Hadar Consulting, a débouté M.[K] de sa demande reconventionelle en dommages et intérêts et a condamné M.[X] aux dépens et à payer une indemnité procédurale de 2.000 euros à M.[K].

M.[X] a relevé appel de cette décision le 27 août 2020.

En cours de procédure, l'assemblée générale de la société Hadar Consulting a décidé de la liquidation amiable de la société et nommé M.[K] en qualité de liquidateur amiable

Deux incidents de procédure ont par ailleurs été soulevés par M.[X].

Par ordonnance du 7 septembre 2021, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable l'appel incident formé par M.[K] et la société Hadar Consulting, mais sur déféré la cour d'appel a, le 11 janvier 2022, infirmé l'ordonnance et a rejeté la fin de non recevoir soulevée par M.[X].

Par ordonnance du 17 octobre 2023, le conseiller de la mise en état a jugé irrecevable l'appel incident formé par les intimés dans leurs conclusions notifiées le 18 avril 2023. Sur déféré, la cour d'appel a, par arrêt du 8 septembre 2024, confirmé l'ordonnance, ayant déclaré l'appel incident irrecevable.

Dans ses conclusions n°3, déposées au greffe et notifiées par RPVA le 16 septembre 2024, M.[X] demande à la cour de:

- le juger recevable et fondé en son appel,

- infirmer le jugement, statuant à nouveau,

- nommer un administrateur judiciaire en qualité de liquidateur amiable de la société Hadar Consulting pour procéder aux opérations de liquidation et notamment pour payer les dettes de la société et répartir le boni de liquidation,

- condamner M.[K] à payer à M.[X] la somme de 110.856,13 euros

( 41.766,13 euros + 69.090 euros) à titre de dommages et intérêts en réparation des fautes qu'il a commises et la somme de 50.000 euros en réparation de son préjudice moral,

- subsidiairement, condamner M.[K] à payer à la société Hadar Consulting, la somme de 141.000 euros au titre de la créance sur GFI Securities, celle de 20.000 euros en réparation du préjudice moral, celle de 100.000 euros en réparation du préjudice économique,

- condamner M.[K] à payer à M.[X] une indemnité procédurale de 10.000 euros ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans leurs conclusions n°2 déposées au greffe et notifiées par RPVA le 18 avril 2023, M.[K] et la société Hadar Consulting demandent à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M.[X] de sa demande de dommages et intérêts et de le condamner à une indemnité procédurale de 10.000 euros.

Il sera rappelé que seul l'appel incident formé dans ces conclusions a été jugé irrecevable, de sorte que la cour peut examiner les moyens de réponse opposés aux demandes de M.[X].

SUR CE

- Sur la désignation d'un liquidateur amiable

Depuis le jugement dont appel, l'assemblée générale extraordinaire de la société Hadar Consulting, réunie le 31 décembre 2020, a décidé à la majorité la dissolution anticipée de la société et sa liquidation amiable et a désigné M.[K] en qualité de liquidateur amiable.

En conséquence, M.[X] conclut qu'il n'y a plus matière à hauteur d'appel de statuer sur sa demande initiale de dissolution de la société. Il limite sa demande à la désignation d'un liquidateur judiciaire pour exercer les fonctions de liquidateur amiable en remplacement de M.[K], arguant que la désignation d'un professionnel est indispensable pour mener à bien les opérations de liquidation, payer les dettes de la société et répartir le boni de liquidation eu égard aux fautes commises par M.[K] et à la mésentente entre les associés.

Les opérations de liquidation n'ont manifestement pas avancé depuis la décision du 31 décembre 2020. Il existe une mésentente profonde entre les associés qui se réclament mutuellement des fonds, M.[X] recherchant la responsabilité de M.[K] et apparaissant lui-même rester devoir des fonds à la société Hadar Consulting au titre d'un prêt de 20.000 euros, dont la dernière échéance avait été fixée au mois de février 2021.

Dans ce contexte, il y a lieu, ainsi que le sollicite M.[X], de désigner en qualité de liquidateur amiable de la société Hadar Consulting, un professionnel en remplacement de M.[K], la SELARL AJRS, en la personne de Maître [B] [L] à l'effet de procéder aux opérations de liquidation, faisant suite à la dissolution de la société.

- Sur les demandes de dommages et intérêts formées par M.[X] à titre personnel

M.[X] forme, à titre principal, une demande de réparation des préjudices personnels qu'il estime avoir subis du fait des fautes qu'il impute à M.[K], et exerce subsidiairement l'action sociale en visant les faits suivants:

- la tenue fictive d'une assemblée générale le 15 juin 2018,

- son désintérêt pour l'activité de la société depuis sa création et pour la gestion du contrat avec GFI Securities, seul cocontractant de la société Hadar Consulting,

- l'absence de diligence pour recouvrer les sommes que la société GFI Securities restait devoir à la société au titre d'une part du préavis de 6 mois et d'autre part de la contrepartie financière de la clause de non concurrence prévue par le contrat d'Agent Lié,

- une violation des statuts en ce qu'il a fait inscrire et voter lors de l'assemblée générale du 6 juin 2019 l'affectation du bénéfice à la réserve légale contre l'avis de M.[X], alors que la réserve n'est que de 5% du bénéfice et limitée à 10% du capital social soit 100 euros,

- en tant que président, de s'être octroyé une rémunération pouvant aller jusqu'à 50.000 euros bruts pour l'exercice 2018/2019, ce qui en l'absence de toute activité réelle de la société constitue de facto un abus de bien social ou est à tout le moins une opération contraire à l'intérêt social, sachant qu'il s'est en réalité octroyé une rémunération de 54.216 euros, que cette rémunération n'a eu d'autre but que de vider la société des bénéfices qui auraient dû être distribués.

M.[K] et la société Hadar Consulting sollicitent la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts de M.[X] à titre personnel, exposant que les difficultés rencontrées par la société ne résultaient pas de la négligence ou de l'incapacité de M.[K] à gérer la société, mais du brutal départ de M.[X], qui s'est accompagné de celui de sa soeur, expert-comptable de la société.

Il incombe à M.[X] de caractériser non seulement les fautes qui auraient été commises par M.[K], mais également le caractère personnel du préjudice qu'il allègue, distinct de celui qu'a pu subir la société du fait des fautes alléguées.

- Sur l'absence distribution de dividendes

M.[X] soutient que M.[K] a violé les statuts en ce qu'il a fait inscrire et voter lors de l'assemblée générale du 6 juin 2019 l'affectation du bénéfice de 85.237 euros à la réserve légale contre l'avis de M.[X], alors que la réserve n'est que de 5% du bénéfice et qu'elle est limitée à 10% du capital social soit 100 euros. Il considère que cette faute lui a causé un préjudice de 41.766,13 euros au titre des dividendes non perçus sur les bénéfices du premier exercice social, soit 49% de 85.237 euros après retrait de 100 euros constituant la réserve légale.

M.[K] conteste toute faute, arguant que la distribution des dividendes dépend des statuts et de la volonté des associés quant à l'affectation des bénéfices, que la société est tenue d'affecter les bénéfices à la réserve légale, et qu'il était de l'intérêt de la société d'affecter le bénéfice du premier exercice social clos au 30 juin 2018, à la réserve légale.

La société Hadar Consulting a clôturé son premier exercice le 30 juin 2018.

Il ressort du procès-verbal de l'assemblée générale daté du 6 juin 2019 ayant notamment pour objet l'approbation des comptes clos au 30 juin 2018 et l'affectation des résultats, que cet exercice s'est terminé avec un résultat bénéficiaire de 85.337 euros et qu'à la majorité (M.[X] ayant voté contre) l'assemblée générale a décidé d'affecter ce bénéfice comme suit:

- dotation à la réserve légale: 100 euros,

- le solde de 85.237 euros au poste 'report à nouveau'.

L'article 20 des statuts de la société Hadar Consulting, dont se prévaut M.[X], stipule qu''il est fait sur le bénéfice, diminué le cas échéant des pertes antérieures, un prélèvement d'un vingtième au moins pour doter la réserve légale. Ce prélèvement cesse d'être obligatoire lorsque la réserve légale a atteint une somme égale au dixième du capital initial [....]Le bénéfice distribuable est constitué par le bénéfice de l'exercice, diminué des pertes antérieures et des sommes portées en réserve en application de la loi, et augmenté du report à nouveau bénéficiaire.Ce bénéfice est réparti entre les Associés proportionnellement au nombre de leurs actions. Les dividendes sont prélévés par priorité sur le bénéfice distribuable'.

Contrairement à l'interprétation qu'en fait M.[X], il ne résulte aucunement de cette clause que le bénéfice réalisé au cours de l'exercice écoulé doit automatiquement, de plein droit, être distribué à l'issue de l'exercice considéré.

La distribution du bénéfice réalisé au cours d'un exercice après affectation à la réserve légale procède d'une décision de la collectivité des associés après approbation des comptes, étant observé que la résolution décidant d'affecter le bénéfice sur le compte report à nouveau ne résulte pas de la décision de M.[K], en tant que dirigeant, mais en tant qu'associé majoritaire. Si le fait pour un majoritaire de s'opposer de manière récurrente à une distribution des bénéfices peut, selon la situation de la société, constituer un abus de majorité, tel n'est pas le cas en l'espèce. En effet, il s'agissait du premier résultat de la société, dont le capital social (1.000 euros) était très modeste, de sorte que le report du bénéfice réalisé sur l'exercice suivant traduit une décision prudente, l'activité de courtage sur les marchés financiers pouvant être aléatoire, et qu'il pouvait apparaître préférable de voir à plus longue échéance l'évolution de cette toute jeune société avant de distribuer les premiers bénéfices.

M.[X] manque en conséquence à établir une faute de M.[K] dans son refus de voter en faveur d'une distribution du premier bénéfice. Le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de cette demande.

- Sur la tenue d'une assemblée générale fictive le 15 juin 2018

M.[X] fait valoir qu'il n'a pas été convoqué à cette assemblée générale, qui avait pour but de repousser le plus loin possible la clôture du premier exercice afin de ne pas distribuer de dividendes.

Le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire mentionne l'adoption 'à l'unanimité' d'une résolution, destinée à compléter l'article 6 des statuts, qui prévoit que l'exercice social commence le 1er juillet et se termine le 30 juin, en ajoutant la mention suivante:'Exceptionnellement, le premier exercice social débutera le jour de l'immatriculation de la Société au Registre du commerce et des sociétés et se terminera le 30 juin 2019.'

A supposer caractérisée la faute de M.[K] en ce qu'il aurait fait adopter cette résolution sans avoir convoqué ou consulté M.[X], ce dernier n'établit pas qu'il aurait pour autant subi un préjudice en lien avec le retard dans la distribution de dividendes, puisqu'il vient d'être jugé qu'il n'était pas abusif d'affecter le bénéfice de ce premier long exercice au compte report à nouveau.

- Sur la rémunération du dirigeant

Le dirigeant qui perçoit une remunération non autorisée ou excessive au regard de la situation de la société est susceptible d'engager sa responsabilité. Il en répond toutefois devant la société, qui se trouverait privée de la trésorerie correspondant aux sommes qui auraient été indûment prélevées.

M.[X] n'est donc pas fondé à invoquer de ce chef un préjudice personnel, distinct de celui de la société Hadar Consulting.

- Sur l'absence de facturation et de recouvrement auprès de GFI Securites des sommes dues au titre du préavis

M.[X] reproche à M.[K] de n'avoir entrepris aucune diligence pour recouvrer auprès de la société GFI les sommes que celle-ci restait devoir et reconnaissait devoir à la société Hadar Consulting, au titre du préavis de 6 mois faisant suite à la résiliation du contrat d'Agent Lié ( soit 10.000 euros X 6 mois),

Le contrat d'Agent Lié signé entre la société GFI Securities (le Mandant) et la société Hadar Consulting (l'Agent Lié) le 4 septembre 2017 a été conclu intuitu personae, en considération de la personnalité des Représentants de l'Agent Lié, M.[X] et M.[K] (article 2). L'article 9 stipule que le contrat a été conclu pour une durée indéterminée mais qu'à tout moment les parties peuvent y mettre fin en respectant un préavis de six mois, le contrat pouvant même être résilié par le Mandant à tout moment sans formalité, ni préavis, notamment en cas de survenance d'un fait énuméré à l'article 2 du contrat.

Le 30 août 2018, la société GFI a résilié le contrat d'agent lié avec effet au 28 février 2019, respectant ainsi un délai de préavis de six mois. Cette résiliation faisait suite à la démission de M.[X] et à la perte de sa qualité de Représentant de l'Agent Lié.

L'article 5 du contrat stipule que la rémunération de l'Agent Lié

(la société Hadar Consulting) donne lieu au paiement d'avances mensuelles sur honoraires d'un montant de 27.000 HT, mais que si M.[X] devait cesser ses fonctions chez l'Agent Lié, les avances sur honoraires seraient fixées à 10.000 euros HT.

Par courrier du 9 juillet 2019, la société GFI a contesté le montant des factures qui lui avaient été adressées au titre de la période de préavis, rappelant à la société Hadar Consulting qu'en application de l'article 5 du contrat, suite à l'arrêt de l'activité de M.[X], le montant mensuel des avances sur honoraires de la société devait être réduit à 10.000 euros HT pendant toute la période de préavis soit de septembre 2018 à février 2019 et qu'elle avait reçu des factures d'un montant erroné de 27.000 euros au lieu de 10.000 euros pour les mois de septembre, octobre et novembre 2018, puis à nouveau des factures d'un même montant erroné pour les mois de décembre 2018, janvier et février 2019. Elle demandait en conséquence à la société Hadar Consulting de lui adresser les six factures avec le bon montant afin de pouvoir procéder au règlement.

Le créancier de la rémunération due au titre du préavis est la société Hadar Consulting, en sa qualité d'Agent Lié et non ses Représentants.

A supposer le manquement du dirigeant caractérisé, le préjudice en résultant serait subi directement par la société Hadar Consulting. M.[X] manque en conséquence à établir l'existence d'un préjudice personnel, distinct de celui susceptible d'avoir été subi par la société Hadar Consulting.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M.[X] de sa demande de ce chef.

- sur l'absence de recouvrement des sommes indemnisant la clause de non concurrence

M.[X] reproche à M.[K] ne pas s'être soucié du recouvrement des sommes dues en contrepartie de la clause de non concurrence prévue aux articles 5 et 10.5 du contrat d'Agent Lié et fait état d'un préjudice de 81.000 euros soit 27.000 euros X 6 mois /2.

L'article 10.2 du contrat d'Agent Lié prévoit une clause de non concurrence en vertu de laquelle l'Agent Lié et ses Représentants s'engagent à ne pas directement ou indirectement pendant la durée du contrat et durant une période de 6 mois suivant la fin du contrat participer à une activité concurrente décrite à l'article 10.3, limitée à la France, [Localité 11], [Localité 12], l'Espagne, la Suisse et [Localité 10].

L'article 10.5 stipule qu'au cours de la période de six mois suivant la fin du contrat et au titre de l'interdiction de non-concurrence le Mandant (la société GFI) 'versera à l'Agent Lié chaque mois une somme brute égale à la moitié de l'Avance sur Commissions. Le Mandant se réserve cependant la faculté de libérer l'Agent Lié de son obligation de non concurrence indiquée au paragraphe 10.2.'

L'indemnisation de la clause de non concurrence en fin de contrat revenant à l'Agent Lié, donc à la société Hadar Consulting, dont MM.[X] et [K] n'étaient que les Représentants, M.[X] manque à nouveau à établir l'existence d'un préjudice personnel et distinct de celui susceptible d'avoir été subi par la société Hadar Consulting.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M.[X] de sa demande de ce chef.

- Sur la demande au titre du préjudice moral

M.[X] sollicite 50.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, consécutif au fait qu'il a dû cesser son activité professionnelle du jour au lendemain alors que la société Hadar Consulting n'avait été constituée que pour l'exécution du contrat avec GFI, et que cette situation lui a fait perdre de la crédibilité dans le milieu des traders.

Il n'est pas contesté que M.[X] a fait le choix de démissionner de la société Hadar Consulting par courrier daté du 17 août 2018. Son courrier de démission fait suite à un courriel adressé le 5 août à M.[K], dans lequel M.[X] reprochait à son associé de lui laisser réaliser la totalité du chiffre d'affaires, de profiter des fruits de son travail sans contrepartie, d'avoir pris la liberté de s'absenter sans aucune explication du 3 juin au 3 juillet, d'avoir modifié au travers de l'assemblée générale du 15 juin 2018 l'exercice social pour le porter à 22 mois, sans autre objet que de l'empêcher d'obtenir des informations légitimes sur la société et une légitime répartition des dividendes, concluant qu'il n'avait pas l'intention de continuer à travailler pour qu'il s'enrichisse sur son dos.

M.[X] ne démontre pas que M.[K] l'a contraint à démissionner. Il ne pouvait ignorer que sa décision allait, d'une part, le priver de son salaire de consultant au sein de la société Hadar Consulting (2.500 euros par mois) alors qu'il était en instance de divorce depuis 2016 et père de 6 enfants, d'autre part que la société GFI allait manifestement résilier le contrat d'Agent Lié eu égard à la clause d'intuitu personae spécialement marquée à son égard.

Il n'établit pas non plus que suite à son départ, M.[K] l'aurait dénigré dans le milieu des traders.

C'est dès lors à juste titre que le tribunal l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts de ce chef de demande.

- Sur l'action ut singuli

M.[X] exerce à titre subsidiaire l'action ut singuli afin de voir condamner M.[K] à payer à la société Hadar Consulting les sommes suivantes:

- 141.000 euros au titre de la créance GFI ( non recouvrement à l'encontre de GFI,

- 100.000 euros au titre du préjudice économique lié au total désintérêt du dirigeant pour la conduite des affaires de la société menant à l'arrêt de son activité,

- 20.000 euros en réparation du préjudice moral subi par la société consécutivement à la violation des dispositions statutaires et à la tenue d'une fausse assemblée générale le 15 juin 2018.

Il résulte de l'article R223-32 du code de commerce que ' Lorsque l'action sociale est intentée par un ou plusieurs associés, agissant soit individuellement, soit dans les conditions prévues à l'article R223-31, le tribunal ne peut statuer que si la société a été régulièrement mise en cause par l'intermédiaire de ses représentants légaux./ Le tribunal peut désigner un mandataire ad hoc pour représenter la société dans l'instance, lorsqu'il existe un conflit d'intérêt entre celle-ci et ses représentants légaux'.

M.[K], dont la responsabilité est recherchée dans le cadre d'une action ut singuli, a conclu en réplique tant en son nom personnel qu'au nom de la société Hadar Consulting, alors qu'il existe un potentiel conflit d'intérêts, M.[K] n'ayant manifestement aucun intérêt à voir aboutir une telle action à son encontre.

Ce conflit ne permet pas à M.[K] d'assurer la défense des intérêts de la société Hadar Consulting dans le cadre de l'action ut singuli.

La SELARL en la personne de Maître [B] [L], désignée liquidateur amiable de la société Hadar Consulting aux lieu et place de M.[K], sera également désignée en qualité de mandataire ad hoc de la société Hadar Consulting avec pour mission de représenter cette société dans la présente instance et dans celles éventuellement à suivre en cas de recours.

- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les dépens et les demandes en paiement d'indemnités procédurales seront réservées en l'attente de la réouverture des débats sur l'action ut singuli.

PAR CES MOTIFS,

- Désigne la SELARL AJRS, en la personne de Maître [B] [L], [Adresse 5] en qualité de liquidateur amiable de la société Hadar Consulting, en remplacement de M.[K] à l'effet de procéder aux opérations de liquidation de la société Hadar Consulting,

- Fixe à 2.000 euros la provision à valoir sur les honoraires de la SELARL AJRS, prise en la personne de Maître [L], ès qualités, de liquidateur amiable, qui sera versée à la SELARL AJRS par la société Hadar Consulting ou prélevée sur son compte dans le délai d'un mois à compter du présent arrêt, dit qu'à défaut de trésorerie suffisante sur le compte de la société Hadar Consulting, M.[X] procédera dans le mois suivant à l'avance de cette somme pour le compte de la société Hadar Consulting,

- Confirme le jugement en ce qu'il a débouté M.[X] de ses demandes formées à titre personnel en paiement de dommages et intérêts,+

- Avant dire droit sur l'action ut singuli, désigne en qualité de mandataire ad hoc de la société Hadar Consulting la SELARL AJRS, en la personne de Maître [B] [L], [Adresse 5], avec pour mission de représenter la société Hadar Consulting dans la présente instance et dans celles éventuellement à suivre en cas de recours,

- Fixe à 2.000 euros la provision à valoir sur les honoraires de la SELARL AJRS, prise en la personne de Maître [L], ès qualités, de mandataire ad hoc de la société Hadar Consulting, qui sera versée à la SELARL AJRS par la société Hadar Consulting ou prélevée sur son compte dans le délai d'un mois à compter du présent arrêt, dit qu'à défaut de trésorerie suffisante sur le compte de la société Hadar Consulting, M.[X] procédera dans le mois suivant à l'avance de cette somme pour le compte de la société Hadar Consulting,

Ordonne la réouverture des débats à l'audience du 23 juin 2025 à 14H,

Réserve les demandes formées dans le cadre de l'action ut singuli, ainsi que les dépens et les demandes en paiement d'indemnités procédurales.

La greffière,

Liselotte FENOUIL

La présidente,

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT

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