CA Versailles, ch. com. 3-2, 25 mars 2025, n° 24/01604
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 4IF
Chambre commerciale 3-2
ARRET N°
REPUTE CONTRADICTOIRE
DU 25 MARS 2025
N° RG 24/01604 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WM6N
AFFAIRE :
[G] [Y]
...
C/
[N] [B]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Février 2024 par le TJ de NANTERRE
N° chambre : 1
N° RG : 22/06001
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Olivier BAULAC
Me Jean-christophe BLANCHIN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT CINQ MARS DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANT
Monsieur [G] [Y]
né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 11] (30)
[Adresse 4]
[Localité 12]
Représentant : Me Olivier BAULAC de la SCP CABINET BAULAC & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0207
S.C.I. LOUIMAREMA
n° Siret 479 329 658 RCS NANTERRE
Ayant son siège
[Adresse 4]
[Localité 12]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Olivier BAULAC de la SCP CABINET BAULAC & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0207
****************
INTIME
Madame [N] [B]
née le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 14]
[Adresse 9]
[Localité 12]
Représentant : Me Jean-christophe BLANCHIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0410 - N° du dossier E0004ZN6
S.E.L.A.R.L. [R][F] SELARL [R][F], prise en la personne de Maître [R] [F], ès qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement par voie de continuation de la SCI LOUIMAREMA selon jugement rendu le 10 février 2017 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
Ayant son siège
[Adresse 3]
[Localité 10]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Défaillant - déclaration d'appel signifiée à personne habilitée
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 Janvier 2025, Monsieur Ronan GUERLOT, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,
Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
EXPOSE DU LITIGE
Le 17 septembre 2004, Mme [B] et M. [Y], alors concubins, ont constitué la SCI Louimarema. Cette société a acquis un immeuble situé à [Localité 12] le 3 décembre 2004 au moyen d'un prêt bancaire et de deniers personnels de Mme [B].
Le 24 février 2016, le tribunal de grande instance de Nanterre a placé la société Louimarema en redressement judiciaire et a désigné la SELARL [R] [F], prise en la personne de M. [F], en qualité de mandataire judiciaire.
Le 7 novembre 2016, M. [F] a établi la liste des créances déclarées suivante :
- 707 976,49 euros déclarés par M. [Y] ;
- 215 839,73 euros déclarés par la société CIC au titre de l'emprunt initial ;
- 384 179,11 euros déclarés par Mme [B] ;
- 3 469,76 euros déclarés par la Caisse régionale du crédit mutuel de [Localité 13] ;
- 5 004 euros déclarés par le Trésor public.
Le 25 janvier 2017, le juge-commissaire a fixé au passif de la société Louimarema la créance de Mme [B] à hauteur de :
164 035,86 euros à titre privilégié ;
220 143,25 euros à titre chirographaire.
Le 10 février 2017, un plan de redressement par voie de continuation a été adopté, la société [R] [F] étant désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Le 14 avril 2017, Mme [B] a déposé une réclamation contre l'état des créances admises au passif de la société Louimarema auprès du juge-commissaire, contestant en particulier l'admission de la créance en compte courant d'associé de M. [Y] pour un montant de 707 976,49 euros.
Le 30 juin 2017, le juge-commissaire a rejeté la créance de 707 976,49 euros déclarée par M. [Y].
Le 16 juin 2022, après cassation de l'arrêt du 11 juin 2019 rendu par la cour d'appel de Versailles ayant déclaré l'appel de la société Louimarema à l'encontre de l'ordonnance du 30 juin 2017 irrecevable, la cour d'appel de Versailles, statuant comme juridiction de renvoi, a considéré qu'il convenait d'infirmer l'ordonnance rendue par le juge-commissaire en ce qu'elle a rejeté la créance déclarée par M. [Y], de surseoir à statuer sur l'admission de cette créance et d'inviter M. [Y], créancier, à saisir le juge du fond.
Le 12 juillet 2022, M. [Y] et la société Louimarema ont assigné Mme [B] devant le tribunal judiciaire de Nanterre aux fins de voir prononcer l'admission définitive de la créance déclarée.
Le 16 février 2024, par jugement réputé contradictoire, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
- déclaré irrecevable la demande de M. [Y] tendant à l'admission de sa créance ;
- déclaré irrecevable la demande de condamnation en paiement de la société Louimarema formée par M. [Y] ;
- dit que M. [Y] ne justifie pas de l'existence de la créance invoquée au titre de sommes figurant sur un compte courant d'associé ;
- déclaré irrecevables les demandes reconventionnelles formées par Mme [B] ;
- condamné M. [Y] à payer à Mme [B] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [Y] aux dépens.
Le 6 mars 2024, M. [Y] et la société Louimarema ont interjeté appel de ce jugement en tous ses chefs de disposition, à l'exception de ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes reconventionnelles formées par Mme [B].
Par dernières conclusions du 3 décembre 2024, ils demandent à la cour de :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 16 février 2024 et statuant à nouveau ;
- débouter Mme [B] et la déclarer mal fondée en ses demandes d'irrecevabilité et autres moyens ;
- constater que M. [Y] justifie de l'existence et du montant de sa créance à l'égard de la société Louimarema soit un compte courant créditeur de M. [Y] arrêté à la somme de 707 976 euros déduction à faire du compte courant de Mme [B] de 136 000 euros et donc un montant de créance de M. [Y] de 571 976 euros ;
- fixer le montant de la créance de compte courant de M. [Y] à la somme de 571 976 euros ;
- condamner en tant que de besoin, la société Louimarema à payer à M. [Y] la somme de 571 976 euros correspondant à sa créance justifiée ;
- subsidiairement, et avant dire droit, désigner tout expert judiciaire afin de fournir à la cour tous éléments concernant l'existence et le montant de la créance de compte courant revendiquée par M. [Y] ;
Dans tous les cas,
- condamner Mme [B] à la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par dernières conclusions du 20 novembre 2024, Mme [B] demande à la cour de :
- déclarer M. [Y] et la société Louimarema irrecevables en toutes leurs demandes ;
- constater l'absence de toute prétention présentée à la cour par les appelants dans leurs conclusions n°2 signifiées le 14 novembre 2024 ;
Et dès lors,
- confirmer le jugement du 16 février 2024 ;
Subsidiairement,
- ordonner une expertise judiciaire portant sur les comptes sociaux de la société Louimarema afin de fournir à la cour tous éléments concernant l'existence et le montant de la créance revendiquée par M. [Y] ;
- sursoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise définitif ;
En tout état de cause,
- condamner in solidum M. [Y] et la société Louimarema à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner solidairement la société Louimarema et M. [Y] aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Blanchin, Avocat au Barreau de Paris, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à la société [R] [F] le 3 mai 2024. Celle-ci n'a pas constitué avocat.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 19 décembre 2024.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.
MOTIFS
Sur la recevabilité contestée des demandes de M. [Y]
Mme [B] soutient que les appelants ont présenté entre leurs première et deuxième conclusions deux demandes nouvelles, en ce qu'ils ont abandonné leur demande de condamnation de la société Louimarema au paiement de la créance de compte courant au profit d'une demande tendant à voir juger que M. [Y] justifie d'une créance de compte courant à l'égard de la société.
Elle ajoute que la demande tendant à voir « constater et juger » que M. [Y] justifie d'une créance de compte courant à l'encontre de la société ne constitue pas une demande mais un moyen de sorte que faute de demande présentée à la cour d'appel, l'effet dévolutif de la déclaration d'appel n'a pas joué.
Elle prétend que la demande d'admission des créances relève de la seule compétence du juge-commissaire de sorte que cette demande devant la cour d'appel est irrecevable.
Les appelants, qui ne répondent pas sur tous les points, admettent que les « constater », « dire », « juger » ne sont pas des prétentions. Ils soulignent toutefois qu'ils font appel de la décision du tribunal qui a retenu « dit que M. [Y] ne justifie pas de l'existence de la créance invoquée ».
Réponse de la cour
- Sur la nouveauté des demandes et leur recevabilité
L'article 564 du code de procédure civile dispose : « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
L'article 565 du même code prévoit : « Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. »
L'article 566 du même code prévoit : « Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. »
L'article 910-4, dans sa rédaction applicable du 1er janvier 2020 au 1er septembre 2024, dispose :
« A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
Enfin, l'article 954, alinéas 3 et4, du même code dans sa version applicable au litige dispose :
« La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Les parties reprennent, dans leurs dernières conclusions, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées. »
Il ressort du jugement dont appel que M. [Y] demandait notamment au tribunal de
« - prononcer l'admission définitive de la créance de M. [Y] à hauteur de 707 976,49 euros au passif de la société Louimarema ;
- condamner en tant que de besoin la société Louimarema à payer à M. [Y] la somme de 707 976,49 euros dans les termes du jugement du 10 février 2017 arrêtant le plan de redressement' ».
Selon leurs premières conclusions notifiées par RPVA le 30 avril 2024, les appelants demandaient à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau de
« -Prononcer l'admission définitive de la créance de Monsieur [G] [Y] à hauteur de 707.976,49 euros au passif de la société LOUIMAREMA,
- Condamner en tant que de besoin la société LOUIMAREMA à payer à Monsieur [G] [Y] la somme de 707.976,49 euros dans les termes du jugement du 10 février 2017 arrêtant le plan de redressement' »
Si à partir de leurs deuxièmes conclusions, ils ont ajouté « Constater et juger que Monsieur [Y] justifie de l'existence et du montant de sa créance à l'égard de la société LOUIMAREMA' », cet ajout ne constitue pas une prétention mais un moyen.
L'intimée ne peut pas non plus prétendre que la cour n'est saisie d'aucune demande dès lors que, dans leurs premières conclusions, les appelants sollicitaient la condamnation de la société Louimarena à lui payer « la somme la somme de 707 976,49 euros dans les termes du jugement du 10 février 2017 arrêtant le plan de redressement », étant observé qu'ils demandent dans leurs dernières écritures, la fixation de la créance de M. [Y] au passif de la société et sa condamnation en tant que de besoin à payer cette créance.
En outre, la cour relève qu'une demande de condamnation s'analyse nécessairement en demande de fixation de créance, la société étant placée en liquidation judiciaire, cette demande étant énoncée dans les dernières conclusions saisissant la cour. Il en résulte qu'il n'y a pas eu d'évolution dans les prétentions ou de prétentions nouvelles.
Si, enfin, l'intimée relève à juste titre que la demande d'admission de la créance relève de la compétence exclusive du juge-commissaire, la cour relève que cette demande ne figure plus dans les dernières conclusions des appelants, bien qu'ils sollicitent l'infirmation de tous les chefs du jugement y compris en conséquence celui qui a déclaré, à juste titre, M. [Y] irrecevable en sa demande d'admission de sa créance de compte courant.
De là, il résulte que les demandes d'irrecevabilité ne peuvent être qu'écartées.
2 -Sur la créance de compte courant d'associé de M. [Y]
Les appelants exposent que Mme [B] n'a jamais contesté durant la procédure de vérification des créances de la société Louimarema la créance de compte courant d'associé de M. [Y].
Ils soulignent qu'ils produisent l'approbation des comptes des exercices 2013 à 2016 ; que les comptes 2004 à 2010 ont été établis par l'expert-comptable [Z] et que ceux des exercices 2007 à 2010 par le cabinet BC associés ; qu'ils ont été vérifiés et attestés par le cabinet d'expertise-comptable Exco Nexion ; qu'ils font ressortir que son compte courant d'associé est créditeur et qu'il augmente chaque année ; qu'ils ont été approuvés par les assemblée générales annuelles ; que sont produits les grands livres généraux sur la période 2010 à 2016 ; que la présente contestation de Mme [B] se heurte en tout état de cause à la circonstance que les comptes ont été approuvés par les associés ; que contrairement à ce qu'elle affirme , les grands livres des exercices 2010 à 2012 démontrent l'existence de son compte courant avant sa révocation et avant l'ouverture de la procédure collective du 24 février 2016 à l'égard de la société Louimarema.
Ils ajoutent, pour contester le jugement, que la jurisprudence considère que les documents comptables approuvés certifiés et déposés constituent des preuves de créance ; que la formation initiale de son compte courant est justifiée par la production des comptes 2005 ; que son compte courant, qui était de 259 075,12 euros au 31 décembre 2015, était constitué de diverses factures outre 200 000 euros de virements au profit de la société ; que les comptes approuvés montrent que le solde créditeur de son compte courant s'est accru d'année en année ; que ces comptes n'ont jamais été contestés par Mme [B].
Mme [B] conteste l'existence du compte courant de M. [Y] et soutient qu'il n'a jamais inscrit une quelconque somme à son compte courant d'associé jusqu'à sa révocation du 21 février 2013 ; qu'aucune avance en compte courant n'a été non plus mentionnée dans les comptes sous la gérance de Mme [W], compagne de M. [Y] ; et qu'à aucun moment avant la procédure collective, ce dernier ne s'est prévalu d'un compte courant ; qu'il se limite à produire des comptes sociaux non détaillés de 2013 à 2016 et de 2020 à 2021, sans justifier de l'origine des fonds prétendument versés ; qu'il ne justifie d'un apport de 547 358 euros réalisé au cours de l'exercice 2012 au cours duquel le compte courant est apparu pour la première fois ; que malgré l'absence d'activité économique de la société, il ne justifie ni des apports depuis 2012 ni de leur importance ; que l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 16 juin 2022 avait déjà relevé l'absence de justification des apports alors que la dépense principale de la société était constituée par le remboursement de l'emprunt qui n'était plus honorée depuis décembre 2014 ; que les comptes sociaux produits en l'absence de justificatif sont incohérents ; qu'en outre le taux d'intérêt de rémunération des comptes courants des associés décidé par l'assemblée générale du 2 mars 2013 est usuraire ; que ce taux d'intérêt ne saurait être appliqué de manière rétroactive de sorte que les comptes courants ne peuvent pas produire d'intérêts avant le 2 mars 2013 ; qu'une partie de la créance en compte courant revendiquée par M. [Y] lui appartient à hauteur de 136 000 euros conformément à ce que l'arrêt de la cour d'appel de Versailles a jugé le 17 décembre 2015 ; qu'à la suite de cette décision, la société aurait dû modifier ses comptes en précisant que le compte courant était détenu par Mme [B] ; que le compte courant à la clôture de l'exercice 2015 comporterait nécessairement sa créance de 136 000 euros.
Elle ajoute qu'avant le jugement d'ouverture, M. [Y] ne percevait que le RSA de sorte qu'il n'a pas pu apporter en 2012 la somme de 547 358 euros ; qu'en outre, il a joui du pavillon sans payer de loyer ; que le bilan 2015 sur lequel s'appuie M. [Y] pour justifier de la créance de 707 976,49 euros présente de nombreuses lacunes ; que l''augmentation fictive du compte courant relève d'un jeu d'écritures comptables destinées à équilibrer un compte tronqué ; qu'il est en réalité débiteur d'un loyer à l'égard de la société puisqu'il occupe gratuitement son immeuble et qu'en tout état de cause, il ne pouvait pas aux termes des statuts s'attribuer seul la jouissance de l'immeuble.
Réponse de la cour
- Sur l'existence du compte courant de M. [Y]
L'article 1315, aliéna 1er, du code civil, dans sa version applicable au litige, dispose « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. »
L'article 15 des statuts de la société Loumarema intitulé comptabilité, comptes annuels et comptes courants d'associés prévoit que les « comptes courants d'associés résulteront de la comptabilité de la société » et qu'ils produiront des intérêts au taux légal majoré de trois points. »
Pour contester l'existence du compte courant d'associé de M. [Y], Mme [B] produit les déclarations d'impôts de la société Louimarema de 2005 à 2008 et 2010, ses états financiers au 31 décembre 2008 établis le cabinet Neos conseil et expertises.
Ce dernier document, dans sa partie « bilan passif » mentionne comme dettes financières l'emprunt contracté auprès du CIC (245 003 euros au 31 décembre 2008), des dettes fournisseurs (16 957 euros) et au titre des dettes d'exploitation des « dettes fournisseurs et comptes rattachés » pour 329 846 au 31 décembre 2008 et pour 301 193 euros au 31 juillet 2007. Cette dernière mention n'est pas explicitée.
Le passif du bilan de l'exercice 2009 qu'elle produit en pièce 15 mentionne une somme de 360 935 euros (2009, année n) et de 329 846 euros (2008, année -1) sous une rubrique « emprunts et dettes financières divers », sans plus de précision dont le premier juge a considéré qu'il pouvait correspondre au compte courant litigieux.
Ces montants sont corroborés par l'extrait du grand livre de l'exercice 2009 versé aux débats par les appelants en annexe du bilan 2009 (pièce 44).
Figure dans ce grand livre, une rubrique n° [XXXXXXXXXX05] intitulée « compte cour. gérant » retraçant les mouvements entre le 1er janvier et le 31 décembre 2009.
De ces documents, il résulte qu'un compte courant au nom de M. [Y] existait bien dès l'exercice 2008.
Les autres éléments versés aux débats par les appelants, à savoir les comptes 2005 à 2008, les comptes 2010, un extrait du grand livre 2011 et les comptes 2015 à 2016 confirment l'existence d'un compte courant d'associé au nom de M. [Y], dont le solde créditeur a augmenté constamment au fur et à mesure des exercices. Ils établissent par ailleurs que Mme [B] disposait également d'un compte courant d'associé, en tout cas dès le 1er juillet 2004 puisque le relevé de compte courant versé en pièce 40 couvre la période du 1er juillet 2004 au 31 décembre 2005, ce dont il se déduit que le compte a commencé à fonctionner concomitamment à l'achat par la société Louimarema de l'immeuble de [Localité 12].
- Sur le quantum de la créance de compte courant de M. [Y]
Comme l'ont rappelé à juste titre les premiers juges, les appelants doivent établir le bien-fondé du montant de la créance de compte courant revendiquée par M. [Y].
A titre liminaire, la cour relève comme le tribunal qu'en tout état de cause, sont sans incidence sur l'appréciation du bien-fondé de la créance de compte courant alléguée par M. [Y], l'absence de contestation au cours de la procédure de vérification ou encore l'approbation des comptes annuels par l'assemblée des associés.
Pour justifier du quantum de sa créance, M. [Y] expose que sa créance de compte courant d'associé a été régulièrement déclarée au passif de la société Louimarema, sans contestation ni de la part du liquidateur, maître [F], ni de la débitrice, ni dela société Louimarema, et ni de Mme [B] et qu'elle est établie par les documents comptables établis sous leur responsabilité par des experts-comptables ainsi que par les attestations d'experts comptables, que les comptes annuels ont été approuvés par les différentes assemblées générales auxquelles l'intimée ne s'est pas rendue.
Les appelants soulignent également que la société Louimarema a dû payer de nombreux travaux de rénovation, s'acquitter de la taxe foncière ou encore des échéances de remboursement de l'emprunt.
Sur le premier point, M. [Y] ne peut sérieusement affirmer que Mme [B] n'a pas contesté sa créance de compte courant.
Il sera ainsi rappelé que si sa créance a été admise pour 707 976,49 euros (pièce 3) et que le jugement du 10 février 2017 arrêtant le plan de redressement indique que « le passif a été diminué de la créance de M. [Y] d'un montant de 707 976,49 euros correspondant à un compte courant d'associé ; qu'il a en effet abandonné cette créance pour les besoins du plan, avec clause de retour à meilleure fortune », Mme [B] a toutefois formé une tierce opposition contre cette décision, qui a été rejetée par un arrêt définitif du 7 novembre 2017, et qu'elle a contesté devant le juge-commissaire la créance de M. [Y], la présente instance étant la suite de cette contestation après l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 16 juin 2022 rendu après l'arrêt de la Cour de cassation du 22 octobre 2022.
Sur le second point, les documents précités versés aux débats par les appelants montrent l'évolution des différences comptes courants des associés de la société Louimarema et détaillent, lorsqu'un extrait du grand livre est fourni, la nature des opérations créditrices et débitrices du compte courant de M. [Y].
Leur lecture révèle qu'ils sont cohérents entre eux, en ce sens que les montants des soldes des comptes courants se suivent.
Il ressort des documents comptables ainsi que justificatifs versés en pièce 47 à hauteur d'appel les principaux éléments suivants.
Le bilan détaillé de l'exercice 2005 (pièce 40) apporte les précisions suivantes :
« Associés : 270 228,12 euros ;
[XXXXXXXXXX06] C :c M. [Y] : 259 075,12 euros ;
[XXXXXXXXXX07] C/c Mme [B] : 9 353 euros ;
[XXXXXXXXXX08] C :c Elco SAS : 1 800 euros ; »
La balance générale reprend ces montants.
Les mouvements entre le 1er juillet 2004 et le 31 décembre 2005 du compte courant d'associé de M. [Y] sont également versés aux débats (voir la télécopie du 28 juillet 2006 du cabinet d'expertise-comptable [Z] relative au compte [XXXXXXXXXX07] C/c [G] [Y], pièce 40). Le solde au 31 décembre 2005 s'établit également à 259 075,12 euros selon ce relevé.
La cour relève que ce dernier document permet de retracer le compte courant litigieux depuis son origine puisque sont enregistrés les mouvements à compter du 1er juillet 2004, date à laquelle le solde du compte s'établissait à 16,70 euros au profit de M. [Y].
Il liste la nature de chaque mouvement créditeur ou débiteur.
Bien qu'il ne soit pas analysé par les appelants, la cour relève que la plupart des opérations inscrites au crédit du compte de M. [Y] se rapporte à des achats dans des enseignes de bricolage.
On peut ainsi lire par exemple en pages 1e et 2 du relevé : « Castorama gravillon béton, Leroy Merlin chauffage payé ; greffe TC payé ; [K], constat payé ; loyer c/C [G][Y]').
Il ressort des pièces justificatives (pièces 47) les éléments exposés ci-après.
Le virement de 29 000 euros du 7 décembre 2014 émis par M. [Y] au profit de la société mentionné dans le relevé de compte courant est corroboré par son relevé de compte personnel Caisse d'épargne (pièce 47).
M. [Y] justifie de sept factures « Erpi » de novembre 2014 d'un montant respectif de 7 369,60 euros, de 9 574 euros, 8 000 euros, 6 691,52 euros, 3 308,48 euros, 7 199,96 euros et de 1 378 euros soit un montant global de 43 522,56 euros au profit de la société Erpi Décoration adressée à la société Louimarema, étant observé que le relevé de compte courant mentionne plusieurs acomptes « Erpi » en décembre 2014 d'un montant global de 39 010 euros.
Les factures Aubade de décembre 2004 d'un montant respectif de 321,19 euros et de 853,41 sont concordantes avec les mouvements inscrits en compte courant.
L'appelant ne propose aucune analyse de son relevé de compte Caisse d'épargne du 4 décembre 2004 (pièce 47) qui fait état de plusieurs chèques émis en novembre et décembre 2004 que l'on ne retrouve pas dans le relevé du compte courant (pièce 40 précité).
En revanche, tel n'est pas le cas des frais de statuts pour 500 euros justifiés par le compte de la société Louimarema établi par l'étude de notaire Colas-Langlois le 23 juillet 2014.
Il résulte en outre du relevé bancaire personnel Banque Populaire de M. [Y] (relevé n°10 du 29 octobre 2004 au 30 novembre 2004) qu'il justifie des mouvements inscrits en compte courant au titre de dépenses effectués dans les enseignes Castorama, Brico, Ikéa entre octobre et novembre 2014 à hauteur de la somme globale de 3 748,28 euros.
L'extrait du grand livre des comptes généraux de l'exercice 2006 mentionne le compte « [XXXXXXXXXX06] C/C M. [Y] », soit son compte courant et fait état d'un solde de 272 435,81 euros au 31 décembre 2006 au profit de M. [Y].
Il précise la nature de chacune des opérations (par exemple, loyer parking, Casto, C :C [Y] VRT, greffe, Brico, virement').
Les neuf virements de 1 900 euros (soit 17 000 euros) au profit de la société Louimarema mentionnés dans les mouvements du compte courant sont justifiés (pièce 47), de même que la facture de l'expert-comptable Ryest de 1 500 euros et la taxe foncière de 647 euros. En effet, les écritures du compte courant sont cohérentes avec les justificatifs versés en appel.
Le bilan passif détaillé de l'exercice précise que le solde du compte 45501 de M. [Y] s'élève à 272 435,81 euros au 31 décembre 2007.
Il mentionne également le solde du compte courant n° 455 102 de Mme [B] dont le solde s'établit à 9 353 euros tant au 31 décembre 2006 qu'au 31 décembre 2007.
L'extrait du grand livre corrobore les montants indiqués pour M. [Y] par le bilan passif et détaille les mouvements ainsi que leurs références (C/C Elco SAS, Perso, versement ESP ; versement espèces, C/C [Y] Studexe, couleurs privilèges, assurances Macif, taxe foncière, loyers et indemnités d'occupation).
M. [Y] justifie avoir acquitté la taxe foncière 2007 d'un montant de 657 euros (pièce 47) à hauteur de sa participation dans la société soit 112,02 euros.
Les virements effectués par M. [Y] et mentionnés dans son compte courant sont corroborés par le relevé bancaire CIC de la société Louimarema (pièce 47) ; il est ainsi justifié de virements pour un montant total de 25 784 euros.
La rubrique « dettes diverses, autres dettes » du bilan passif des états financiers de l'exercice 2008 établie par le cabinet d'expertise-comptable Neos Conseils et Expertises (pièce 43 appelants) précise que le montant « des autres dettes » s'élevait au 31 décembre 2008 à 329 846. Elle correspond aux différents comptes courants d'associés.
Elle est précisée dans le détail des comptes de passif dont il résulte que le compte courant de M. [Y] a augmenté de 28 656,34 euros et est passé de 291 839,93 euros au 31 décembre 2007 à 329 846 euros au 31 décembre 2008.
La cour relève qu'il n'est pas produit d'extrait du grand livre permettant d'identifier chacun des mouvements du compte courant litigieux.
Toutefois, les appelants versent aux débats en pièce 47 une note d'honoraire du cabinet d'expertise comptable du 31 mai 2008, d'un montant de 1 846 euros adressée à la société Louimarema, qui sera donc retenue car elle se rapporte indéniablement à l'exercice considéré.
Les appelants justifient en outre par la production des mouvements du compte de la société Louimarema arrêté au 4 septembre 2008 que M. [Y] a réalisé six virements au profit de la société pour un montant global de 11 290 euros. Cette somme sera donc également retenue.
Le bilan passif de l'exercice 2009 mentionne au titre des dettes diverses une somme de 329 846 euros au 31 décembre 2008 et de 360 935 euros au 31 décembre 2009.
La balance globale confirme qu'il s'agit du compte courant du gérant référence sous le numéro [XXXXXXXXXX05].
L'extrait du grand livre reprend le montant du solde précité, précise chacune des opérations en débit ou crédit sans toutefois en préciser la nature de la plupart d'entre elles.
Ainsi, il est indiqué pour la majorité des mouvements « compte courant gérant » ou « impayé ». Certaines opérations sont toutefois identifiées sous les références « taxes assimilées à la TVA, [T], expert judiciaire bâtiment ».
Malgré ces imprécisions, le compte bancaire de la société Louimarema permet de rattacher des opérations faites par M. [Y] à son compte courant.
Ainsi, hormis le virement du 5 février 2009, les virements inscrits au compte bancaire de la société Louimarema arrêtés au 8 mai 2009 (pièce 47) sont corroborés par le relevé de compte courant de M. [Y]. Ce dernier justifie ainsi avoir avancé à la société la somme globale de 33 800 euros.
En outre, les autres relevés de compte CIC de la société Louimarema sont concordants avec les écritures du compte courant pour ce qui concerne les virements effectués par M. [Y] au profit de la société à compter du 1er juillet 2009. Il sera donc retenu au titre de ces virements la somme globale de 7 520 euros.
Le bilan passif de l'exercice 2010 versé aux débats (pièce 45) n'est pas lisible. En revanche, la balance globale fait état d'un compte courant n° [XXXXXXXXXX05], soit le compte courant litigieux, dont le solde « à nouveau » et de 360 935,08 euros.
Le grand livre (pièce 18 appelants) reprend ce montant au 31 janvier 2010 et mentionne un montant de -376 889,15 euros au 31 décembre 2010. Il précise la nature des opérations au débit et au crédit.
Pour les opérations au crédit, il est fait état d'apports, de CPAM, de « Ionis prévoyance », d'un « prêt d'honneur », de frais bancaires, de « HBBC BNP », de « frais extournés » ou encore de « associés comptes courants ».
Il est justifié par M. [Y], en pièce 47, de plusieurs remises de chèque de 1 300 euros, de 4 730, de 1 972 et de 3 707 euros au profit de la société Louimarema, concordantes avec les écritures du grand livre. Les autres bulletins de remise de chèques (656 ; 600,06) ne concordent pas avec les écritures du compte courant et ne seront pas retenus.
Les appelants versent aux débats l'avis d'impôt de la taxe foncière de l'année 2010 (721 euros) ; toutefois, aucune écriture inscrite au compte courant ne correspond à cette somme ou à un pourcentage de ce montant en fonction des droits de M. [Y] dans la société.
Pour l'exercice 2011, il est produit un extrait du grand livre du compte courant n° [XXXXXXXXXX05] (pièce 24), soit celui de M. [Y], ne mentionnant que quatre opérations débitrices et créditrices (solde au 1er janvier 2011 : 376 889,15 ; échéance prêt 2011 : 20 905 euros ; loyer annuel : 5 100 euros ; charges d'exploitation : 100,25 euros, solde au 31 décembre 2011 : 392 794,60 euros).
Pour l'exercice 2012, l'extrait du grand livre général (pièce 26) enseigne que le solde du compte courant de M. [Y] est passé de 392 794,60 à 547 358,14 euros à la clôture de l'exercice ; les opérations débitrices étant constituées de dépenses modestes Castorama (36,69 et 158,90 euros), de loyers (au crédit pour 3 600 euros) et d'opérations débitrices plus importantes non expliquées (« Bonnely », « décomptes 2012 », « règlement échéance [G][Y], 3 760 euros », ou encore « médiation ».
Il est en outre inscrit au débit une somme très importante (139 192,38 euros) référencée « intérêts c/c depuis 2005 ».
L'extrait du grand livre général de l'exercice 2013 (pièce 28) montre que le compte courant n° [XXXXXXXXXX05] de M. [Y] a augmenté de 547 357,14 euros à 601 613,49 euros et est constituée d'honoraires, de frais de greffe, de frais de publication, de frais d'Infogreffe, du paiement d'échéances 2012 (12 555,34 euros), du paiement d'échéances 2013 (5 469,82 + 2 664,84 euros), d'une opération au débit (loyer annuel : 3 600 euros).
La cour relève que les opérations créditrices les plus importantes sont celles relatives aux honoraires (1 196 + 3 588), aux échéances (précitées) et aux intérêts (31 746,77 euros).
Selon l'extrait du grand livre général de l'exercice 2014 (pièce 30) le solde du compte courant litigieux a diminué pour s'établir à 592 305,40 euros compte tenu d'opérations débitrice de loyer (3 600 euros), d'intérêts c/c 2014 de 35 495,20 euros extournant une opération créditrice du même montant et d'intérêts 2013 (31 746,77 euros). Les opérations créditrices les plus importantes sont des honoraires d'avocat (4 200 + 432), d'huissier (207), de remboursements 2014 (1 854,43 + 13 626,39) et de remboursement d'intérêts (4 534,31 euros).
L'extrait du grand livre général de l'exercice 2015 (pièce 32) mentionne un solde pour le compte courant litigieux de 701 367 euros au 31 décembre 2015.
Ce montant n'est pas corroboré par l'attestation établie par la société d'expertise comptable IDF Expertise Sud du 15 mai 2017 (pièce 10 des appelants) où l'on peut notamment lire :
« Sur la base des travaux réalisés, nous attestons que le compte courant de M. [Y] ('.) est de 697 707 euros au 31 décembre 2015. »
Les mouvements créditeurs sont essentiellement constitués d'honoraires d'avocats ou d'autres honoraires pour un montant total de 6 400,74 euros ainsi que des intérêts (intérêts c/c 2015) pour 34 351,31 euros.
Sur ce point, la cour relève que les intérêts sont référencés sous le n° 4558000 associés (s souligné par la cour).
Il n'est plus mentionné de paiement d'échéance du prêt ou de loyer.
L'extrait du grand livre général de l'exercice 2016 (pièce 34) fait état d'un solde au 1er janvier 2016 de 599 773,72 euros, ce qui n'est pas cohérent avec le solde mentionné dans le grand livre 2015.
En effet, il est indiqué un solde de 616 436,66 euros au 31 décembre 2016 (hors intérêts) et de 753 887,93 euros avec les intérêts « associés » (référencés sous n° 4558000) d'un montant de 35 538 euros au 31 décembre 2016 et d'un montant au 1er janvier 2016 « S.A.N. » de 101 593,28 euros, soit un montant total de 753 387,94 euros. Ces montants sont cohérents avec la pièce 7 (comptes annuels 2016).
L'attestation de la société d'expertise comptable IDF Expertise Sud du 19 juin 2017 fait état d'un solde de 705 095 euros au 28 février 2016, ce qui n'est pas cohérent le grand livre général qui indique un solde de 601 581,72 euros au 4 mars 2016.
Il ressort en outre de cet extrait que les opérations créditrices sont constituées d'honoraires, de taxes foncières 2015 et 2016, de plusieurs virements (1 300, 100 et 12 000 euros à et que les opérations débitrices portent sur deux échéances annuelles de « loyer garage » (3 600 X 2).
Pour les exercices suivants, aucun autre document comptable n'est versé aux débats.
Dès lors, la commande n° 768106 du 8 août 2020 Leroy Merlin d'un montant de 2 931,60 euros ne saurait être prise en compte.
La cour observe que les comptes versés aux débats ne sont aucunement certifiés par un commissaire aux comptes et ne sont donc pas certifiés de sorte qu'il appartenait au premier juge d'apprécier la valeur probante des éléments versés aux débats par les appelants.
Mme [B] considère qu'il est peu probable que M. [Y] ait pu faire des apports à la société compte tenu de sa situation financière d'allocataire au RSA. A cet égard, elle produit une lettre de la CAF des Hauts-de-Seine du 27 juillet 2012, sans fournir d'éléments postérieurs et notamment à partir de 2004, date de l'acquisition de l'immeuble par la société.
Elle soutient également que M. [B] est débiteur de la société Louimarema au titre de loyers.
Ce dernier ne discute pas occuper l'immeuble de la société, ce qui est d'ailleurs confirmé par le rapport du liquidateur (pièce 9, Mme [B]).
Ce rapport précise que les recettes encaissées par la société constituées par les loyers s'élevaient en 2013, à 3 600 euros, en 2014, à 3 600 euros et en 2015 à 3 400 euros, ce qui représente un loyer mensuel d'environ 300 euros pour une maison de 200 m² à [Localité 12].
La cour relève que le jugement d'ouverture du 17 février 2017 fait état de loyers mensuels de 1 891 euros (soit 22 692 euros par an) augmentés à 3 000 euros (soit 36 000 euros par an) dans la perspective du plan de redressement (pièce 4, appelants).
Le premier juge a considéré que les loyers modestes perçus par la société de 3 600 euros annuels en 2013, 2014 et 2016 correspond à un garage et non au loyer de la maison, ce qui est corroboré par les écritures des appelants (p. 20). En effet, ces derniers affirment que « rien ne s'oppose à ce que M. [Y] puisse jouir gratuitement de ce logement mais au surplus la quasi absence de loyer, voire l'absence de loyers ne fait que renforcer la preuve de la constitution d'un compte courant ». La cour observe au reste que le compte courant 2005 litigieux mentionne l'encaissement de loyers de 137 euros. Le relevé de compte courant de l'exercice 2006 mentionne la perception de loyers « parking » pour 140 euros. Les rapports de gestion mentionnent également la location de garages comme source de recettes de la société (pièce 18 à 22, [B]).
En l'absence d'éléments sur le paiement d'un loyer, l'article 15 des statuts étant muet sur ce point et en l'absence de chiffrage avancé par Mme [B], ce moyen ne peut qu'être écarté.
Enfin, contrairement à ce que prétend Mme [B], la circonstance qu'il ait été reconnu que Mme [B] avait effectué un apport de 136 000 euros à la suite de l'arrêt de la présente cour du 17 décembre 2015 est sans incidence sur l'existence d'une créance de compte courant au profit de M. [Y].
Au demeurant, s'il est exact que les comptes de la société Louimarema devaient tenir compte de cette créance, celle-ci ainsi qu'une créance de 8 000 euros au titre de frais irrépétibles figure bien dans la liste des créances déclarées échues à la procédure de liquidation de la société.
Des éléments qui précèdent, il résulte que M. [Y] justifie d'apports en compte courant pour les exercices 2005 à 2010 à hauteur de la somme globale de 184 640,88 euros.
Il n'est pas discuté que M. [Y] a pris en charge les échéances du prêt finançant l'acquisition de l'immeuble de la société.
Il est constant que le prêt a été consenti par la société CIC à hauteur de 285 000 euros, selon l'acte de vente versé en pièce 2 par Mme [B] et que la procédure collective ouverte en 2016 a entraîné la déchéance du terme, la banque ayant déclaré une créance de 215 839 euros.
Des documents comptables versés, il n'est justifié que du paiement d'une somme de 20 905 euros (voir relevé de compte courant 2011) qui sera retenu.
Mme [B] n'est pas contredite lorsqu'elle affirme que la société a cessé de rembourser le prêt en 2011. La cour relève qu'hormis l'acte de vente, aucun autre document relatif au prêt n'est versé aux débats.
Les appelants admettent qu'il y a lieu de déduire de la créance de compte courant de M. [Y] la somme de 136 000 euros à laquelle la société a été condamnée en contrepartie de l'apport fait par Mme [B]. En définitive, la créance de M. [Y] au titre de son compte courant s'établit à 48 640 + 20 905 (échéances du prêt justifiés). = 69 545 euros.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit que M. [Y] ne justifiait pas d'une créance de compte courant et il convient de fixer la créance de M. [Y] au passif de la société Louimarema à la somme de 69 545 euros.
Compte tenu de la solution retenue, il n'y a pas lieu d'acceuillir la demande d'expertise formées par les parties à titre subsidiaire pour déterminer l'existence et le quantum de la créance de compte courant de M. [Y].
3- Sur les demandes accessoires
L'équité commande de rejeter les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt réputé contradictoire,
Déclare recevable les demandes de M. [Y] ;
Infirme le jugement en ce qu'il a dit que M. [Y] ne justifiait pas de l'existence de la créance invoquée au titre de sommes figurant sur un compte courant d'associé ;
Statuant à nouveau du chef infirmé ;
Fixe la créance de M. [Y] au passif de la société Louimarema à 69 545 euros ;
Y ajoutant ;
Condamne Mme [B] aux dépens d'appel et de première instance ;
Rejette les autres demandes.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
DE
VERSAILLES
Code nac : 4IF
Chambre commerciale 3-2
ARRET N°
REPUTE CONTRADICTOIRE
DU 25 MARS 2025
N° RG 24/01604 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WM6N
AFFAIRE :
[G] [Y]
...
C/
[N] [B]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Février 2024 par le TJ de NANTERRE
N° chambre : 1
N° RG : 22/06001
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Olivier BAULAC
Me Jean-christophe BLANCHIN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT CINQ MARS DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANT
Monsieur [G] [Y]
né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 11] (30)
[Adresse 4]
[Localité 12]
Représentant : Me Olivier BAULAC de la SCP CABINET BAULAC & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0207
S.C.I. LOUIMAREMA
n° Siret 479 329 658 RCS NANTERRE
Ayant son siège
[Adresse 4]
[Localité 12]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Olivier BAULAC de la SCP CABINET BAULAC & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0207
****************
INTIME
Madame [N] [B]
née le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 14]
[Adresse 9]
[Localité 12]
Représentant : Me Jean-christophe BLANCHIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0410 - N° du dossier E0004ZN6
S.E.L.A.R.L. [R][F] SELARL [R][F], prise en la personne de Maître [R] [F], ès qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement par voie de continuation de la SCI LOUIMAREMA selon jugement rendu le 10 février 2017 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE
Ayant son siège
[Adresse 3]
[Localité 10]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Défaillant - déclaration d'appel signifiée à personne habilitée
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 Janvier 2025, Monsieur Ronan GUERLOT, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,
Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
EXPOSE DU LITIGE
Le 17 septembre 2004, Mme [B] et M. [Y], alors concubins, ont constitué la SCI Louimarema. Cette société a acquis un immeuble situé à [Localité 12] le 3 décembre 2004 au moyen d'un prêt bancaire et de deniers personnels de Mme [B].
Le 24 février 2016, le tribunal de grande instance de Nanterre a placé la société Louimarema en redressement judiciaire et a désigné la SELARL [R] [F], prise en la personne de M. [F], en qualité de mandataire judiciaire.
Le 7 novembre 2016, M. [F] a établi la liste des créances déclarées suivante :
- 707 976,49 euros déclarés par M. [Y] ;
- 215 839,73 euros déclarés par la société CIC au titre de l'emprunt initial ;
- 384 179,11 euros déclarés par Mme [B] ;
- 3 469,76 euros déclarés par la Caisse régionale du crédit mutuel de [Localité 13] ;
- 5 004 euros déclarés par le Trésor public.
Le 25 janvier 2017, le juge-commissaire a fixé au passif de la société Louimarema la créance de Mme [B] à hauteur de :
164 035,86 euros à titre privilégié ;
220 143,25 euros à titre chirographaire.
Le 10 février 2017, un plan de redressement par voie de continuation a été adopté, la société [R] [F] étant désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Le 14 avril 2017, Mme [B] a déposé une réclamation contre l'état des créances admises au passif de la société Louimarema auprès du juge-commissaire, contestant en particulier l'admission de la créance en compte courant d'associé de M. [Y] pour un montant de 707 976,49 euros.
Le 30 juin 2017, le juge-commissaire a rejeté la créance de 707 976,49 euros déclarée par M. [Y].
Le 16 juin 2022, après cassation de l'arrêt du 11 juin 2019 rendu par la cour d'appel de Versailles ayant déclaré l'appel de la société Louimarema à l'encontre de l'ordonnance du 30 juin 2017 irrecevable, la cour d'appel de Versailles, statuant comme juridiction de renvoi, a considéré qu'il convenait d'infirmer l'ordonnance rendue par le juge-commissaire en ce qu'elle a rejeté la créance déclarée par M. [Y], de surseoir à statuer sur l'admission de cette créance et d'inviter M. [Y], créancier, à saisir le juge du fond.
Le 12 juillet 2022, M. [Y] et la société Louimarema ont assigné Mme [B] devant le tribunal judiciaire de Nanterre aux fins de voir prononcer l'admission définitive de la créance déclarée.
Le 16 février 2024, par jugement réputé contradictoire, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
- déclaré irrecevable la demande de M. [Y] tendant à l'admission de sa créance ;
- déclaré irrecevable la demande de condamnation en paiement de la société Louimarema formée par M. [Y] ;
- dit que M. [Y] ne justifie pas de l'existence de la créance invoquée au titre de sommes figurant sur un compte courant d'associé ;
- déclaré irrecevables les demandes reconventionnelles formées par Mme [B] ;
- condamné M. [Y] à payer à Mme [B] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [Y] aux dépens.
Le 6 mars 2024, M. [Y] et la société Louimarema ont interjeté appel de ce jugement en tous ses chefs de disposition, à l'exception de ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes reconventionnelles formées par Mme [B].
Par dernières conclusions du 3 décembre 2024, ils demandent à la cour de :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 16 février 2024 et statuant à nouveau ;
- débouter Mme [B] et la déclarer mal fondée en ses demandes d'irrecevabilité et autres moyens ;
- constater que M. [Y] justifie de l'existence et du montant de sa créance à l'égard de la société Louimarema soit un compte courant créditeur de M. [Y] arrêté à la somme de 707 976 euros déduction à faire du compte courant de Mme [B] de 136 000 euros et donc un montant de créance de M. [Y] de 571 976 euros ;
- fixer le montant de la créance de compte courant de M. [Y] à la somme de 571 976 euros ;
- condamner en tant que de besoin, la société Louimarema à payer à M. [Y] la somme de 571 976 euros correspondant à sa créance justifiée ;
- subsidiairement, et avant dire droit, désigner tout expert judiciaire afin de fournir à la cour tous éléments concernant l'existence et le montant de la créance de compte courant revendiquée par M. [Y] ;
Dans tous les cas,
- condamner Mme [B] à la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par dernières conclusions du 20 novembre 2024, Mme [B] demande à la cour de :
- déclarer M. [Y] et la société Louimarema irrecevables en toutes leurs demandes ;
- constater l'absence de toute prétention présentée à la cour par les appelants dans leurs conclusions n°2 signifiées le 14 novembre 2024 ;
Et dès lors,
- confirmer le jugement du 16 février 2024 ;
Subsidiairement,
- ordonner une expertise judiciaire portant sur les comptes sociaux de la société Louimarema afin de fournir à la cour tous éléments concernant l'existence et le montant de la créance revendiquée par M. [Y] ;
- sursoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise définitif ;
En tout état de cause,
- condamner in solidum M. [Y] et la société Louimarema à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner solidairement la société Louimarema et M. [Y] aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Blanchin, Avocat au Barreau de Paris, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à la société [R] [F] le 3 mai 2024. Celle-ci n'a pas constitué avocat.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 19 décembre 2024.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.
MOTIFS
Sur la recevabilité contestée des demandes de M. [Y]
Mme [B] soutient que les appelants ont présenté entre leurs première et deuxième conclusions deux demandes nouvelles, en ce qu'ils ont abandonné leur demande de condamnation de la société Louimarema au paiement de la créance de compte courant au profit d'une demande tendant à voir juger que M. [Y] justifie d'une créance de compte courant à l'égard de la société.
Elle ajoute que la demande tendant à voir « constater et juger » que M. [Y] justifie d'une créance de compte courant à l'encontre de la société ne constitue pas une demande mais un moyen de sorte que faute de demande présentée à la cour d'appel, l'effet dévolutif de la déclaration d'appel n'a pas joué.
Elle prétend que la demande d'admission des créances relève de la seule compétence du juge-commissaire de sorte que cette demande devant la cour d'appel est irrecevable.
Les appelants, qui ne répondent pas sur tous les points, admettent que les « constater », « dire », « juger » ne sont pas des prétentions. Ils soulignent toutefois qu'ils font appel de la décision du tribunal qui a retenu « dit que M. [Y] ne justifie pas de l'existence de la créance invoquée ».
Réponse de la cour
- Sur la nouveauté des demandes et leur recevabilité
L'article 564 du code de procédure civile dispose : « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
L'article 565 du même code prévoit : « Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. »
L'article 566 du même code prévoit : « Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. »
L'article 910-4, dans sa rédaction applicable du 1er janvier 2020 au 1er septembre 2024, dispose :
« A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
Enfin, l'article 954, alinéas 3 et4, du même code dans sa version applicable au litige dispose :
« La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Les parties reprennent, dans leurs dernières conclusions, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées. »
Il ressort du jugement dont appel que M. [Y] demandait notamment au tribunal de
« - prononcer l'admission définitive de la créance de M. [Y] à hauteur de 707 976,49 euros au passif de la société Louimarema ;
- condamner en tant que de besoin la société Louimarema à payer à M. [Y] la somme de 707 976,49 euros dans les termes du jugement du 10 février 2017 arrêtant le plan de redressement' ».
Selon leurs premières conclusions notifiées par RPVA le 30 avril 2024, les appelants demandaient à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau de
« -Prononcer l'admission définitive de la créance de Monsieur [G] [Y] à hauteur de 707.976,49 euros au passif de la société LOUIMAREMA,
- Condamner en tant que de besoin la société LOUIMAREMA à payer à Monsieur [G] [Y] la somme de 707.976,49 euros dans les termes du jugement du 10 février 2017 arrêtant le plan de redressement' »
Si à partir de leurs deuxièmes conclusions, ils ont ajouté « Constater et juger que Monsieur [Y] justifie de l'existence et du montant de sa créance à l'égard de la société LOUIMAREMA' », cet ajout ne constitue pas une prétention mais un moyen.
L'intimée ne peut pas non plus prétendre que la cour n'est saisie d'aucune demande dès lors que, dans leurs premières conclusions, les appelants sollicitaient la condamnation de la société Louimarena à lui payer « la somme la somme de 707 976,49 euros dans les termes du jugement du 10 février 2017 arrêtant le plan de redressement », étant observé qu'ils demandent dans leurs dernières écritures, la fixation de la créance de M. [Y] au passif de la société et sa condamnation en tant que de besoin à payer cette créance.
En outre, la cour relève qu'une demande de condamnation s'analyse nécessairement en demande de fixation de créance, la société étant placée en liquidation judiciaire, cette demande étant énoncée dans les dernières conclusions saisissant la cour. Il en résulte qu'il n'y a pas eu d'évolution dans les prétentions ou de prétentions nouvelles.
Si, enfin, l'intimée relève à juste titre que la demande d'admission de la créance relève de la compétence exclusive du juge-commissaire, la cour relève que cette demande ne figure plus dans les dernières conclusions des appelants, bien qu'ils sollicitent l'infirmation de tous les chefs du jugement y compris en conséquence celui qui a déclaré, à juste titre, M. [Y] irrecevable en sa demande d'admission de sa créance de compte courant.
De là, il résulte que les demandes d'irrecevabilité ne peuvent être qu'écartées.
2 -Sur la créance de compte courant d'associé de M. [Y]
Les appelants exposent que Mme [B] n'a jamais contesté durant la procédure de vérification des créances de la société Louimarema la créance de compte courant d'associé de M. [Y].
Ils soulignent qu'ils produisent l'approbation des comptes des exercices 2013 à 2016 ; que les comptes 2004 à 2010 ont été établis par l'expert-comptable [Z] et que ceux des exercices 2007 à 2010 par le cabinet BC associés ; qu'ils ont été vérifiés et attestés par le cabinet d'expertise-comptable Exco Nexion ; qu'ils font ressortir que son compte courant d'associé est créditeur et qu'il augmente chaque année ; qu'ils ont été approuvés par les assemblée générales annuelles ; que sont produits les grands livres généraux sur la période 2010 à 2016 ; que la présente contestation de Mme [B] se heurte en tout état de cause à la circonstance que les comptes ont été approuvés par les associés ; que contrairement à ce qu'elle affirme , les grands livres des exercices 2010 à 2012 démontrent l'existence de son compte courant avant sa révocation et avant l'ouverture de la procédure collective du 24 février 2016 à l'égard de la société Louimarema.
Ils ajoutent, pour contester le jugement, que la jurisprudence considère que les documents comptables approuvés certifiés et déposés constituent des preuves de créance ; que la formation initiale de son compte courant est justifiée par la production des comptes 2005 ; que son compte courant, qui était de 259 075,12 euros au 31 décembre 2015, était constitué de diverses factures outre 200 000 euros de virements au profit de la société ; que les comptes approuvés montrent que le solde créditeur de son compte courant s'est accru d'année en année ; que ces comptes n'ont jamais été contestés par Mme [B].
Mme [B] conteste l'existence du compte courant de M. [Y] et soutient qu'il n'a jamais inscrit une quelconque somme à son compte courant d'associé jusqu'à sa révocation du 21 février 2013 ; qu'aucune avance en compte courant n'a été non plus mentionnée dans les comptes sous la gérance de Mme [W], compagne de M. [Y] ; et qu'à aucun moment avant la procédure collective, ce dernier ne s'est prévalu d'un compte courant ; qu'il se limite à produire des comptes sociaux non détaillés de 2013 à 2016 et de 2020 à 2021, sans justifier de l'origine des fonds prétendument versés ; qu'il ne justifie d'un apport de 547 358 euros réalisé au cours de l'exercice 2012 au cours duquel le compte courant est apparu pour la première fois ; que malgré l'absence d'activité économique de la société, il ne justifie ni des apports depuis 2012 ni de leur importance ; que l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 16 juin 2022 avait déjà relevé l'absence de justification des apports alors que la dépense principale de la société était constituée par le remboursement de l'emprunt qui n'était plus honorée depuis décembre 2014 ; que les comptes sociaux produits en l'absence de justificatif sont incohérents ; qu'en outre le taux d'intérêt de rémunération des comptes courants des associés décidé par l'assemblée générale du 2 mars 2013 est usuraire ; que ce taux d'intérêt ne saurait être appliqué de manière rétroactive de sorte que les comptes courants ne peuvent pas produire d'intérêts avant le 2 mars 2013 ; qu'une partie de la créance en compte courant revendiquée par M. [Y] lui appartient à hauteur de 136 000 euros conformément à ce que l'arrêt de la cour d'appel de Versailles a jugé le 17 décembre 2015 ; qu'à la suite de cette décision, la société aurait dû modifier ses comptes en précisant que le compte courant était détenu par Mme [B] ; que le compte courant à la clôture de l'exercice 2015 comporterait nécessairement sa créance de 136 000 euros.
Elle ajoute qu'avant le jugement d'ouverture, M. [Y] ne percevait que le RSA de sorte qu'il n'a pas pu apporter en 2012 la somme de 547 358 euros ; qu'en outre, il a joui du pavillon sans payer de loyer ; que le bilan 2015 sur lequel s'appuie M. [Y] pour justifier de la créance de 707 976,49 euros présente de nombreuses lacunes ; que l''augmentation fictive du compte courant relève d'un jeu d'écritures comptables destinées à équilibrer un compte tronqué ; qu'il est en réalité débiteur d'un loyer à l'égard de la société puisqu'il occupe gratuitement son immeuble et qu'en tout état de cause, il ne pouvait pas aux termes des statuts s'attribuer seul la jouissance de l'immeuble.
Réponse de la cour
- Sur l'existence du compte courant de M. [Y]
L'article 1315, aliéna 1er, du code civil, dans sa version applicable au litige, dispose « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. »
L'article 15 des statuts de la société Loumarema intitulé comptabilité, comptes annuels et comptes courants d'associés prévoit que les « comptes courants d'associés résulteront de la comptabilité de la société » et qu'ils produiront des intérêts au taux légal majoré de trois points. »
Pour contester l'existence du compte courant d'associé de M. [Y], Mme [B] produit les déclarations d'impôts de la société Louimarema de 2005 à 2008 et 2010, ses états financiers au 31 décembre 2008 établis le cabinet Neos conseil et expertises.
Ce dernier document, dans sa partie « bilan passif » mentionne comme dettes financières l'emprunt contracté auprès du CIC (245 003 euros au 31 décembre 2008), des dettes fournisseurs (16 957 euros) et au titre des dettes d'exploitation des « dettes fournisseurs et comptes rattachés » pour 329 846 au 31 décembre 2008 et pour 301 193 euros au 31 juillet 2007. Cette dernière mention n'est pas explicitée.
Le passif du bilan de l'exercice 2009 qu'elle produit en pièce 15 mentionne une somme de 360 935 euros (2009, année n) et de 329 846 euros (2008, année -1) sous une rubrique « emprunts et dettes financières divers », sans plus de précision dont le premier juge a considéré qu'il pouvait correspondre au compte courant litigieux.
Ces montants sont corroborés par l'extrait du grand livre de l'exercice 2009 versé aux débats par les appelants en annexe du bilan 2009 (pièce 44).
Figure dans ce grand livre, une rubrique n° [XXXXXXXXXX05] intitulée « compte cour. gérant » retraçant les mouvements entre le 1er janvier et le 31 décembre 2009.
De ces documents, il résulte qu'un compte courant au nom de M. [Y] existait bien dès l'exercice 2008.
Les autres éléments versés aux débats par les appelants, à savoir les comptes 2005 à 2008, les comptes 2010, un extrait du grand livre 2011 et les comptes 2015 à 2016 confirment l'existence d'un compte courant d'associé au nom de M. [Y], dont le solde créditeur a augmenté constamment au fur et à mesure des exercices. Ils établissent par ailleurs que Mme [B] disposait également d'un compte courant d'associé, en tout cas dès le 1er juillet 2004 puisque le relevé de compte courant versé en pièce 40 couvre la période du 1er juillet 2004 au 31 décembre 2005, ce dont il se déduit que le compte a commencé à fonctionner concomitamment à l'achat par la société Louimarema de l'immeuble de [Localité 12].
- Sur le quantum de la créance de compte courant de M. [Y]
Comme l'ont rappelé à juste titre les premiers juges, les appelants doivent établir le bien-fondé du montant de la créance de compte courant revendiquée par M. [Y].
A titre liminaire, la cour relève comme le tribunal qu'en tout état de cause, sont sans incidence sur l'appréciation du bien-fondé de la créance de compte courant alléguée par M. [Y], l'absence de contestation au cours de la procédure de vérification ou encore l'approbation des comptes annuels par l'assemblée des associés.
Pour justifier du quantum de sa créance, M. [Y] expose que sa créance de compte courant d'associé a été régulièrement déclarée au passif de la société Louimarema, sans contestation ni de la part du liquidateur, maître [F], ni de la débitrice, ni dela société Louimarema, et ni de Mme [B] et qu'elle est établie par les documents comptables établis sous leur responsabilité par des experts-comptables ainsi que par les attestations d'experts comptables, que les comptes annuels ont été approuvés par les différentes assemblées générales auxquelles l'intimée ne s'est pas rendue.
Les appelants soulignent également que la société Louimarema a dû payer de nombreux travaux de rénovation, s'acquitter de la taxe foncière ou encore des échéances de remboursement de l'emprunt.
Sur le premier point, M. [Y] ne peut sérieusement affirmer que Mme [B] n'a pas contesté sa créance de compte courant.
Il sera ainsi rappelé que si sa créance a été admise pour 707 976,49 euros (pièce 3) et que le jugement du 10 février 2017 arrêtant le plan de redressement indique que « le passif a été diminué de la créance de M. [Y] d'un montant de 707 976,49 euros correspondant à un compte courant d'associé ; qu'il a en effet abandonné cette créance pour les besoins du plan, avec clause de retour à meilleure fortune », Mme [B] a toutefois formé une tierce opposition contre cette décision, qui a été rejetée par un arrêt définitif du 7 novembre 2017, et qu'elle a contesté devant le juge-commissaire la créance de M. [Y], la présente instance étant la suite de cette contestation après l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 16 juin 2022 rendu après l'arrêt de la Cour de cassation du 22 octobre 2022.
Sur le second point, les documents précités versés aux débats par les appelants montrent l'évolution des différences comptes courants des associés de la société Louimarema et détaillent, lorsqu'un extrait du grand livre est fourni, la nature des opérations créditrices et débitrices du compte courant de M. [Y].
Leur lecture révèle qu'ils sont cohérents entre eux, en ce sens que les montants des soldes des comptes courants se suivent.
Il ressort des documents comptables ainsi que justificatifs versés en pièce 47 à hauteur d'appel les principaux éléments suivants.
Le bilan détaillé de l'exercice 2005 (pièce 40) apporte les précisions suivantes :
« Associés : 270 228,12 euros ;
[XXXXXXXXXX06] C :c M. [Y] : 259 075,12 euros ;
[XXXXXXXXXX07] C/c Mme [B] : 9 353 euros ;
[XXXXXXXXXX08] C :c Elco SAS : 1 800 euros ; »
La balance générale reprend ces montants.
Les mouvements entre le 1er juillet 2004 et le 31 décembre 2005 du compte courant d'associé de M. [Y] sont également versés aux débats (voir la télécopie du 28 juillet 2006 du cabinet d'expertise-comptable [Z] relative au compte [XXXXXXXXXX07] C/c [G] [Y], pièce 40). Le solde au 31 décembre 2005 s'établit également à 259 075,12 euros selon ce relevé.
La cour relève que ce dernier document permet de retracer le compte courant litigieux depuis son origine puisque sont enregistrés les mouvements à compter du 1er juillet 2004, date à laquelle le solde du compte s'établissait à 16,70 euros au profit de M. [Y].
Il liste la nature de chaque mouvement créditeur ou débiteur.
Bien qu'il ne soit pas analysé par les appelants, la cour relève que la plupart des opérations inscrites au crédit du compte de M. [Y] se rapporte à des achats dans des enseignes de bricolage.
On peut ainsi lire par exemple en pages 1e et 2 du relevé : « Castorama gravillon béton, Leroy Merlin chauffage payé ; greffe TC payé ; [K], constat payé ; loyer c/C [G][Y]').
Il ressort des pièces justificatives (pièces 47) les éléments exposés ci-après.
Le virement de 29 000 euros du 7 décembre 2014 émis par M. [Y] au profit de la société mentionné dans le relevé de compte courant est corroboré par son relevé de compte personnel Caisse d'épargne (pièce 47).
M. [Y] justifie de sept factures « Erpi » de novembre 2014 d'un montant respectif de 7 369,60 euros, de 9 574 euros, 8 000 euros, 6 691,52 euros, 3 308,48 euros, 7 199,96 euros et de 1 378 euros soit un montant global de 43 522,56 euros au profit de la société Erpi Décoration adressée à la société Louimarema, étant observé que le relevé de compte courant mentionne plusieurs acomptes « Erpi » en décembre 2014 d'un montant global de 39 010 euros.
Les factures Aubade de décembre 2004 d'un montant respectif de 321,19 euros et de 853,41 sont concordantes avec les mouvements inscrits en compte courant.
L'appelant ne propose aucune analyse de son relevé de compte Caisse d'épargne du 4 décembre 2004 (pièce 47) qui fait état de plusieurs chèques émis en novembre et décembre 2004 que l'on ne retrouve pas dans le relevé du compte courant (pièce 40 précité).
En revanche, tel n'est pas le cas des frais de statuts pour 500 euros justifiés par le compte de la société Louimarema établi par l'étude de notaire Colas-Langlois le 23 juillet 2014.
Il résulte en outre du relevé bancaire personnel Banque Populaire de M. [Y] (relevé n°10 du 29 octobre 2004 au 30 novembre 2004) qu'il justifie des mouvements inscrits en compte courant au titre de dépenses effectués dans les enseignes Castorama, Brico, Ikéa entre octobre et novembre 2014 à hauteur de la somme globale de 3 748,28 euros.
L'extrait du grand livre des comptes généraux de l'exercice 2006 mentionne le compte « [XXXXXXXXXX06] C/C M. [Y] », soit son compte courant et fait état d'un solde de 272 435,81 euros au 31 décembre 2006 au profit de M. [Y].
Il précise la nature de chacune des opérations (par exemple, loyer parking, Casto, C :C [Y] VRT, greffe, Brico, virement').
Les neuf virements de 1 900 euros (soit 17 000 euros) au profit de la société Louimarema mentionnés dans les mouvements du compte courant sont justifiés (pièce 47), de même que la facture de l'expert-comptable Ryest de 1 500 euros et la taxe foncière de 647 euros. En effet, les écritures du compte courant sont cohérentes avec les justificatifs versés en appel.
Le bilan passif détaillé de l'exercice précise que le solde du compte 45501 de M. [Y] s'élève à 272 435,81 euros au 31 décembre 2007.
Il mentionne également le solde du compte courant n° 455 102 de Mme [B] dont le solde s'établit à 9 353 euros tant au 31 décembre 2006 qu'au 31 décembre 2007.
L'extrait du grand livre corrobore les montants indiqués pour M. [Y] par le bilan passif et détaille les mouvements ainsi que leurs références (C/C Elco SAS, Perso, versement ESP ; versement espèces, C/C [Y] Studexe, couleurs privilèges, assurances Macif, taxe foncière, loyers et indemnités d'occupation).
M. [Y] justifie avoir acquitté la taxe foncière 2007 d'un montant de 657 euros (pièce 47) à hauteur de sa participation dans la société soit 112,02 euros.
Les virements effectués par M. [Y] et mentionnés dans son compte courant sont corroborés par le relevé bancaire CIC de la société Louimarema (pièce 47) ; il est ainsi justifié de virements pour un montant total de 25 784 euros.
La rubrique « dettes diverses, autres dettes » du bilan passif des états financiers de l'exercice 2008 établie par le cabinet d'expertise-comptable Neos Conseils et Expertises (pièce 43 appelants) précise que le montant « des autres dettes » s'élevait au 31 décembre 2008 à 329 846. Elle correspond aux différents comptes courants d'associés.
Elle est précisée dans le détail des comptes de passif dont il résulte que le compte courant de M. [Y] a augmenté de 28 656,34 euros et est passé de 291 839,93 euros au 31 décembre 2007 à 329 846 euros au 31 décembre 2008.
La cour relève qu'il n'est pas produit d'extrait du grand livre permettant d'identifier chacun des mouvements du compte courant litigieux.
Toutefois, les appelants versent aux débats en pièce 47 une note d'honoraire du cabinet d'expertise comptable du 31 mai 2008, d'un montant de 1 846 euros adressée à la société Louimarema, qui sera donc retenue car elle se rapporte indéniablement à l'exercice considéré.
Les appelants justifient en outre par la production des mouvements du compte de la société Louimarema arrêté au 4 septembre 2008 que M. [Y] a réalisé six virements au profit de la société pour un montant global de 11 290 euros. Cette somme sera donc également retenue.
Le bilan passif de l'exercice 2009 mentionne au titre des dettes diverses une somme de 329 846 euros au 31 décembre 2008 et de 360 935 euros au 31 décembre 2009.
La balance globale confirme qu'il s'agit du compte courant du gérant référence sous le numéro [XXXXXXXXXX05].
L'extrait du grand livre reprend le montant du solde précité, précise chacune des opérations en débit ou crédit sans toutefois en préciser la nature de la plupart d'entre elles.
Ainsi, il est indiqué pour la majorité des mouvements « compte courant gérant » ou « impayé ». Certaines opérations sont toutefois identifiées sous les références « taxes assimilées à la TVA, [T], expert judiciaire bâtiment ».
Malgré ces imprécisions, le compte bancaire de la société Louimarema permet de rattacher des opérations faites par M. [Y] à son compte courant.
Ainsi, hormis le virement du 5 février 2009, les virements inscrits au compte bancaire de la société Louimarema arrêtés au 8 mai 2009 (pièce 47) sont corroborés par le relevé de compte courant de M. [Y]. Ce dernier justifie ainsi avoir avancé à la société la somme globale de 33 800 euros.
En outre, les autres relevés de compte CIC de la société Louimarema sont concordants avec les écritures du compte courant pour ce qui concerne les virements effectués par M. [Y] au profit de la société à compter du 1er juillet 2009. Il sera donc retenu au titre de ces virements la somme globale de 7 520 euros.
Le bilan passif de l'exercice 2010 versé aux débats (pièce 45) n'est pas lisible. En revanche, la balance globale fait état d'un compte courant n° [XXXXXXXXXX05], soit le compte courant litigieux, dont le solde « à nouveau » et de 360 935,08 euros.
Le grand livre (pièce 18 appelants) reprend ce montant au 31 janvier 2010 et mentionne un montant de -376 889,15 euros au 31 décembre 2010. Il précise la nature des opérations au débit et au crédit.
Pour les opérations au crédit, il est fait état d'apports, de CPAM, de « Ionis prévoyance », d'un « prêt d'honneur », de frais bancaires, de « HBBC BNP », de « frais extournés » ou encore de « associés comptes courants ».
Il est justifié par M. [Y], en pièce 47, de plusieurs remises de chèque de 1 300 euros, de 4 730, de 1 972 et de 3 707 euros au profit de la société Louimarema, concordantes avec les écritures du grand livre. Les autres bulletins de remise de chèques (656 ; 600,06) ne concordent pas avec les écritures du compte courant et ne seront pas retenus.
Les appelants versent aux débats l'avis d'impôt de la taxe foncière de l'année 2010 (721 euros) ; toutefois, aucune écriture inscrite au compte courant ne correspond à cette somme ou à un pourcentage de ce montant en fonction des droits de M. [Y] dans la société.
Pour l'exercice 2011, il est produit un extrait du grand livre du compte courant n° [XXXXXXXXXX05] (pièce 24), soit celui de M. [Y], ne mentionnant que quatre opérations débitrices et créditrices (solde au 1er janvier 2011 : 376 889,15 ; échéance prêt 2011 : 20 905 euros ; loyer annuel : 5 100 euros ; charges d'exploitation : 100,25 euros, solde au 31 décembre 2011 : 392 794,60 euros).
Pour l'exercice 2012, l'extrait du grand livre général (pièce 26) enseigne que le solde du compte courant de M. [Y] est passé de 392 794,60 à 547 358,14 euros à la clôture de l'exercice ; les opérations débitrices étant constituées de dépenses modestes Castorama (36,69 et 158,90 euros), de loyers (au crédit pour 3 600 euros) et d'opérations débitrices plus importantes non expliquées (« Bonnely », « décomptes 2012 », « règlement échéance [G][Y], 3 760 euros », ou encore « médiation ».
Il est en outre inscrit au débit une somme très importante (139 192,38 euros) référencée « intérêts c/c depuis 2005 ».
L'extrait du grand livre général de l'exercice 2013 (pièce 28) montre que le compte courant n° [XXXXXXXXXX05] de M. [Y] a augmenté de 547 357,14 euros à 601 613,49 euros et est constituée d'honoraires, de frais de greffe, de frais de publication, de frais d'Infogreffe, du paiement d'échéances 2012 (12 555,34 euros), du paiement d'échéances 2013 (5 469,82 + 2 664,84 euros), d'une opération au débit (loyer annuel : 3 600 euros).
La cour relève que les opérations créditrices les plus importantes sont celles relatives aux honoraires (1 196 + 3 588), aux échéances (précitées) et aux intérêts (31 746,77 euros).
Selon l'extrait du grand livre général de l'exercice 2014 (pièce 30) le solde du compte courant litigieux a diminué pour s'établir à 592 305,40 euros compte tenu d'opérations débitrice de loyer (3 600 euros), d'intérêts c/c 2014 de 35 495,20 euros extournant une opération créditrice du même montant et d'intérêts 2013 (31 746,77 euros). Les opérations créditrices les plus importantes sont des honoraires d'avocat (4 200 + 432), d'huissier (207), de remboursements 2014 (1 854,43 + 13 626,39) et de remboursement d'intérêts (4 534,31 euros).
L'extrait du grand livre général de l'exercice 2015 (pièce 32) mentionne un solde pour le compte courant litigieux de 701 367 euros au 31 décembre 2015.
Ce montant n'est pas corroboré par l'attestation établie par la société d'expertise comptable IDF Expertise Sud du 15 mai 2017 (pièce 10 des appelants) où l'on peut notamment lire :
« Sur la base des travaux réalisés, nous attestons que le compte courant de M. [Y] ('.) est de 697 707 euros au 31 décembre 2015. »
Les mouvements créditeurs sont essentiellement constitués d'honoraires d'avocats ou d'autres honoraires pour un montant total de 6 400,74 euros ainsi que des intérêts (intérêts c/c 2015) pour 34 351,31 euros.
Sur ce point, la cour relève que les intérêts sont référencés sous le n° 4558000 associés (s souligné par la cour).
Il n'est plus mentionné de paiement d'échéance du prêt ou de loyer.
L'extrait du grand livre général de l'exercice 2016 (pièce 34) fait état d'un solde au 1er janvier 2016 de 599 773,72 euros, ce qui n'est pas cohérent avec le solde mentionné dans le grand livre 2015.
En effet, il est indiqué un solde de 616 436,66 euros au 31 décembre 2016 (hors intérêts) et de 753 887,93 euros avec les intérêts « associés » (référencés sous n° 4558000) d'un montant de 35 538 euros au 31 décembre 2016 et d'un montant au 1er janvier 2016 « S.A.N. » de 101 593,28 euros, soit un montant total de 753 387,94 euros. Ces montants sont cohérents avec la pièce 7 (comptes annuels 2016).
L'attestation de la société d'expertise comptable IDF Expertise Sud du 19 juin 2017 fait état d'un solde de 705 095 euros au 28 février 2016, ce qui n'est pas cohérent le grand livre général qui indique un solde de 601 581,72 euros au 4 mars 2016.
Il ressort en outre de cet extrait que les opérations créditrices sont constituées d'honoraires, de taxes foncières 2015 et 2016, de plusieurs virements (1 300, 100 et 12 000 euros à et que les opérations débitrices portent sur deux échéances annuelles de « loyer garage » (3 600 X 2).
Pour les exercices suivants, aucun autre document comptable n'est versé aux débats.
Dès lors, la commande n° 768106 du 8 août 2020 Leroy Merlin d'un montant de 2 931,60 euros ne saurait être prise en compte.
La cour observe que les comptes versés aux débats ne sont aucunement certifiés par un commissaire aux comptes et ne sont donc pas certifiés de sorte qu'il appartenait au premier juge d'apprécier la valeur probante des éléments versés aux débats par les appelants.
Mme [B] considère qu'il est peu probable que M. [Y] ait pu faire des apports à la société compte tenu de sa situation financière d'allocataire au RSA. A cet égard, elle produit une lettre de la CAF des Hauts-de-Seine du 27 juillet 2012, sans fournir d'éléments postérieurs et notamment à partir de 2004, date de l'acquisition de l'immeuble par la société.
Elle soutient également que M. [B] est débiteur de la société Louimarema au titre de loyers.
Ce dernier ne discute pas occuper l'immeuble de la société, ce qui est d'ailleurs confirmé par le rapport du liquidateur (pièce 9, Mme [B]).
Ce rapport précise que les recettes encaissées par la société constituées par les loyers s'élevaient en 2013, à 3 600 euros, en 2014, à 3 600 euros et en 2015 à 3 400 euros, ce qui représente un loyer mensuel d'environ 300 euros pour une maison de 200 m² à [Localité 12].
La cour relève que le jugement d'ouverture du 17 février 2017 fait état de loyers mensuels de 1 891 euros (soit 22 692 euros par an) augmentés à 3 000 euros (soit 36 000 euros par an) dans la perspective du plan de redressement (pièce 4, appelants).
Le premier juge a considéré que les loyers modestes perçus par la société de 3 600 euros annuels en 2013, 2014 et 2016 correspond à un garage et non au loyer de la maison, ce qui est corroboré par les écritures des appelants (p. 20). En effet, ces derniers affirment que « rien ne s'oppose à ce que M. [Y] puisse jouir gratuitement de ce logement mais au surplus la quasi absence de loyer, voire l'absence de loyers ne fait que renforcer la preuve de la constitution d'un compte courant ». La cour observe au reste que le compte courant 2005 litigieux mentionne l'encaissement de loyers de 137 euros. Le relevé de compte courant de l'exercice 2006 mentionne la perception de loyers « parking » pour 140 euros. Les rapports de gestion mentionnent également la location de garages comme source de recettes de la société (pièce 18 à 22, [B]).
En l'absence d'éléments sur le paiement d'un loyer, l'article 15 des statuts étant muet sur ce point et en l'absence de chiffrage avancé par Mme [B], ce moyen ne peut qu'être écarté.
Enfin, contrairement à ce que prétend Mme [B], la circonstance qu'il ait été reconnu que Mme [B] avait effectué un apport de 136 000 euros à la suite de l'arrêt de la présente cour du 17 décembre 2015 est sans incidence sur l'existence d'une créance de compte courant au profit de M. [Y].
Au demeurant, s'il est exact que les comptes de la société Louimarema devaient tenir compte de cette créance, celle-ci ainsi qu'une créance de 8 000 euros au titre de frais irrépétibles figure bien dans la liste des créances déclarées échues à la procédure de liquidation de la société.
Des éléments qui précèdent, il résulte que M. [Y] justifie d'apports en compte courant pour les exercices 2005 à 2010 à hauteur de la somme globale de 184 640,88 euros.
Il n'est pas discuté que M. [Y] a pris en charge les échéances du prêt finançant l'acquisition de l'immeuble de la société.
Il est constant que le prêt a été consenti par la société CIC à hauteur de 285 000 euros, selon l'acte de vente versé en pièce 2 par Mme [B] et que la procédure collective ouverte en 2016 a entraîné la déchéance du terme, la banque ayant déclaré une créance de 215 839 euros.
Des documents comptables versés, il n'est justifié que du paiement d'une somme de 20 905 euros (voir relevé de compte courant 2011) qui sera retenu.
Mme [B] n'est pas contredite lorsqu'elle affirme que la société a cessé de rembourser le prêt en 2011. La cour relève qu'hormis l'acte de vente, aucun autre document relatif au prêt n'est versé aux débats.
Les appelants admettent qu'il y a lieu de déduire de la créance de compte courant de M. [Y] la somme de 136 000 euros à laquelle la société a été condamnée en contrepartie de l'apport fait par Mme [B]. En définitive, la créance de M. [Y] au titre de son compte courant s'établit à 48 640 + 20 905 (échéances du prêt justifiés). = 69 545 euros.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit que M. [Y] ne justifiait pas d'une créance de compte courant et il convient de fixer la créance de M. [Y] au passif de la société Louimarema à la somme de 69 545 euros.
Compte tenu de la solution retenue, il n'y a pas lieu d'acceuillir la demande d'expertise formées par les parties à titre subsidiaire pour déterminer l'existence et le quantum de la créance de compte courant de M. [Y].
3- Sur les demandes accessoires
L'équité commande de rejeter les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt réputé contradictoire,
Déclare recevable les demandes de M. [Y] ;
Infirme le jugement en ce qu'il a dit que M. [Y] ne justifiait pas de l'existence de la créance invoquée au titre de sommes figurant sur un compte courant d'associé ;
Statuant à nouveau du chef infirmé ;
Fixe la créance de M. [Y] au passif de la société Louimarema à 69 545 euros ;
Y ajoutant ;
Condamne Mme [B] aux dépens d'appel et de première instance ;
Rejette les autres demandes.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT