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Décisions

CA Colmar, ch. 2 a, 21 mars 2025, n° 23/00408

COLMAR

Arrêt

Autre

CA Colmar n° 23/00408

21 mars 2025

MINUTE N° 111/2025

Copie exécutoire

aux avocats

Le 21 mars 2025

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 21 MARS 2025

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 23/00408 - N° Portalis DBVW-V-B7H-H74L

Décision déférée à la cour : 05 Janvier 2023 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANTE :

Madame [J] [K]

demeurant [Adresse 1] à [Localité 4]

représenté par Me Eulalie LEPINAY, avocat à la cour.

INTIMÉE :

Le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE LES CEDRES, pris en la personne de son syndic, la SAS AGENCE SECKLER, sise [Adresse 3] à [Localité 4], prise en la personne de son représentant légal,

sis [Adresse 2] à [Localité 4]

représenté par Me Valérie SPIESER-DECHRISTE, avocat à la cour.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Octobre 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre et Madame Nathalie HERY, conseillère, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente de chambre

Madame Murielle ROBERT-NICOUD, conseillère

Madame Nathalie HERY, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Madame Sylvie SCHIRMANN

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement après prorogation du 7 mars 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Mme [J] [K] est propriétaire du lot n°24 au sein de l'immeuble en copropriété, la résidence Les Cèdres, située [Adresse 2] à [Localité 4] (68) au sein de laquelle s'est tenue une assemblée générale des copropriétaires le 15 octobre 2021.

Arguant de ce qu'elle n'y avait pas été régulièrement convoquée, Mme [J] [K], le 7 janvier 2022, a fait assigner le syndicat des copropriétaires de la copropriété, représenté par son syndic, la SAS Agence Seckler devant le tribunal judiciaire de Strasbourg afin d'en voir prononcer l'annulation.

Par jugement du 5 janvier 2023, le tribunal a :

déclaré irrecevable la demande de Mme [K] tendant à voir prononcer la nullité de l'ensemble des délibérations de l'assemblée générale des copropriétaires du syndicat de la résidence Les Cèdres, [Adresse 2] à [Localité 4] du 15 octobre 2021 ;

condamné Mme [J] [K] :

aux dépens de la présente instance,

à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Cèdres située [Adresse 2] à [Localité 4] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté Mme [J] [K] de sa demande de dispense de toute participation à la dépense commune des frais de procédure et des frais irrépétibles, dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires;

débouté les parties de l'ensemble de leurs autres fins, moyens, demandes et prétentions.

Après avoir refusé de rabattre l'ordonnance de clôture, le tribunal a déclaré Mme [K] irrecevable en ses demandes dès lors qu'elle était présente à l'assemblée générale en cause et y a voté :

en faveur des résolutions n°1, n°2 et n°3 qui ont été adoptées,

en faveur de la résolution n°4 qui a été rejetée,

contre la résolution n°5 qui a été adoptée.

Mme [K] a formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 23 janvier 2023.

L'instruction a été clôturée le 6 février 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 30 juin 2023, Mme [K] demande à la cour de :

déclarer son appel recevable et bien fondé ;

constater l'irrégularité de la procédure de première instance par le fait que le magistrat a soulevé en cours de délibéré, en violation des dispositions du code de procédure civile, un moyen soulevé d'office sans appeler les parties à en débattre dans le cadre d'un échange de conclusions au cours d'une mise en état ;

en conséquence :

infirmer dans toutes ses dispositions le jugement entrepris par le tribunal judiciaire de Strasbourg en date du 5 janvier 2023 ;

en statuant à nouveau :

prononcer la nullité de l'ensemble des délibérations de l'assemblée générale des copropriétaires du syndicat de la résidence Les Cèdres, [Adresse 2] à [Localité 4], du 15 octobre 2021, y compris l'ensemble des résolutions votées, en raison de l'absence de convocation régulière de l'assemblée générale par une personne habilitée à cet effet ;

subsidiairement :

prononcer la nullité des délibérations n°1, 4 et 5 de l'assemblée générale des copropriétaires du 15 octobre 2021, en raison de l'absence de convocation régulière de l'assemblée générale par une personne habilitée à cet effet ;

en tout état de cause :

condamner le syndicat des copropriétaires pris en la personne de l'agence Seckler en tous dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'au versement d'une indemnité de procédure de 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en l'excluant de toute obligation à la contribution des charges de la présente instance, y compris toute indemnité de procédure prononcée à son bénéfice en application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, tout copropriétaire triomphant dans le cadre d'une procédure judiciaire étant dispensé de participation à la dépense commune des frais de procédure à l'issue de l'instance l'opposant au syndicat ;

constater que l'arrêt à intervenir sera exécutoire par provision de plein droit ;

débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Cèdres de l'ensemble de ses fins et prétentions contraires et/ou reconventionnelles.

Mme [K] expose qu'après que l'affaire ait été plaidée à l'audience du 13 octobre 2022 et mise en délibéré au 5 janvier 2023, le juge de la mise en état, en cours de délibéré, a illégalement, invité les parties, par message envoyé par voie électronique le 16 décembre 2022, à se prononcer, et non à produire une note en délibéré, avant le 5 janvier 2023 sur l'irrecevabilité de ses demandes pour défaut de qualité à agir au regard des dispositions de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 et de la jurisprudence, et ce, en violation des règles de procédure civile, ce qui justifie l'infirmation de l'intégralité du jugement entrepris.

Mme [K] fait valoir que la convocation à l'assemblée générale en cause a été régularisée par M. [N] [D], copropriétaire et membre du conseil syndical alors que la précédente assemblée générale du 19 février 2021 n'était pas encore annulée puisque l'affaire était pendante devant le la cour d'appel, de sorte que ce dernier n'avait aucune légitimité à convoquer une assemblée générale, le syndic n'étant pas encore défaillant car toujours en fonction.

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 20 septembre 2023, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Cèdres demande à la cour de :

déclarer Mme [J] [K] mal fondée en son appel ;

l'en débouter ;

confirmer en toutes ses dispositions le jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Strasbourg en date du 5 janvier 2023 ;

condamner Mme [J] [K] aux entiers frais et dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le syndicat des copropriétaires soutient que c'est à bon droit que le jugement entrepris a jugé que Mme [K] pour avoir voté favorablement à certaines résolutions adoptées lors de l'assemblée générale du 15 octobre 2021 n'était pas recevable à en réclamer l'annulation en son entier ; que Mme [K] étant présente lors de l'assemblée litigieuse, a voté favorablement ou s'est abstenue lors des votes pour les résolutions n°1, n°2, n°3 et n°4, de sorte qu'elle doit être déclarée irrecevable en ses demandes conformément aux dispositions de l'article 42 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 ; que s'agissant de la résolution n°5, Mme [K] ayant voté contre cette résolution pourrait être déclarée recevable à en contester la validité mais s'abstient cependant d'exposer le motif de nullité de cette résolution.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions transmises aux dates susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION

Au préalable et en premier lieu, il y a lieu d'indiquer aux termes de l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. Ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à « constater », en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d'emporter de conséquences juridiques mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que la cour ne doit y répondre qu'à la condition qu'ils viennent au soutien de la prétention formulée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans le dispositif de l'arrêt mais dans ses motifs.

En second lieu, l'analyse des pièces produites permet de constater que le 16 décembre 2022, les avocats des parties ont été destinataires d'un message adressé par voie électronique par le tribunal judiciaire et non par le juge de la mise en état, aux termes duquel il leur était demandé de se prononcer avant le 5 janvier 2023 sur l'irrecevabilité des demandes de Mme [K] pour défaut de qualité à agir au regard des dispositions de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 et de la jurisprudence de la troisième chambre civile.

La demande ainsi formulée par le tribunal judiciaire est conforme à l'article 445 du code de procédure civile lequel autorise les parties, après la clôture des débats, à déposer une note à la demande du président qui est en droit d'inviter les parties à fournir les explications de droit ou de fait qu'il estime nécessaires. Dès lors que les parties ont été à même de s'expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur avaient été demandés, la réouverture des débats ne s'imposait pas.

L'infirmation du jugement entrepris n'est donc pas encourue de ce chef.

Sur les demandes tendant à l'annulation de l'assemblée générale du 15 octobre 2021

Aux termes des dispositions de l'article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée, sans ses annexes.

Se prévalant de ce que la convocation à l'assemblée générale est irrégulière, Mme [K] demande, à titre principal, l'annulation de l'assemblée générale en son entier et, à titre subsidiaire, l'annulation des résolutions n°1, n°4 et n°5.

Sur l'annulation de l'assemblée générale en son entier

Considérant que Mme [K] a voté pour certaines résolutions de cette assemblée générale, elle n'est pas recevable à en demander l'annulation, même si elle invoque la violation d'une formalité substantielle concernant la convocation à cette assemblée.

Le jugement entrepris est donc confirmé de ce chef.

Sur l'annulation des résolutions n°1, n°4 et n°5

Pour avoir voté pour la résolution n°1 laquelle a été adoptée, Mme [K] est irrecevable à en demander l'annulation puisqu'elle n'est pas opposante à cette résolution.

Pour avoir voté pour la résolution n°4 laquelle n'a pas été adoptée par la majorité des autres copropriétaires représentant plus de la moitié des voix, Mme [K] est recevable à en demander l'annulation puisqu'elle est opposante à cette résolution.

Pour avoir voté contre la résolution n°5 laquelle a été adoptée, Mme [K] est recevable à en demander l'annulation puisqu'elle est opposante à cette résolution.

La convocation à l'assemblée générale du 15 octobre 2021 a été faite par M. [N] [D] en sa qualité de copropriétaire sur le fondement des dispositions de l'article 17 de la loi du 10 juillet 1965 susvisée.

Cet article prévoit que, dans les cas où le syndicat est dépourvu de syndic, sauf hypothèse de défaut de nomination du syndic par l'assemblée générale des copropriétaires convoquée à cet effet, l'assemblée générale des copropriétaires peut être convoquée par tout copropriétaire aux fins de nommer un syndic.

Or, il est constant qu'une précédente assemblée générale s'est tenue le 19 février 2021 et qu'une procédure a été diligentée devant le tribunal judiciaire de Strasbourg pour voir prononcer l'annulation de cette assemblée générale et, subsidiairement, de certaines de ses résolutions dont celle concernant la désignation et le renouvellement du mandat de syndic de l'agence immobilière Seckler.

Considérant que les résolutions de cette assemblée générale doivent s'appliquer tant que la juridiction saisie n'a pas statué, la convocation à l'assemblée générale du 15 octobre 2021 faite par M. [D] n'apparaît pas régulière, dès lors que la copropriété disposait d'un syndic en la personne de l'agence immobilière Seckler.

Les résolutions n°4 et n°5 doivent donc être annulées.

Sur les dépens, les frais de procédure non compris dans les dépens et la dispense de participation à la dépense commune des frais de procédure

Le jugement entrepris est confirmé de ces chefs, considération prise de ce qu'en premier ressort, Mme [K] n'avait demandé que l'annulation de l'assemblée générale du 15 octobre 2021, en sa totalité et a été déclarée irrecevable en cette demande.

A hauteur d'appel, le syndicat des copropriétaires est condamné aux dépens ainsi qu'à payer à Mme [K] la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure exposés à hauteur d'appel non compris dans les dépens ; la demande d'indemnité formulée sur le même fondement par le syndicat des copropriétaires est rejetée.

Faisant application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 susvisée, il y a lieu de dispenser Mme [K] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure exposés à hauteur d'appel dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :

CONFIRME dans les limites de l'appel, le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 5 janvier 2023 ;

y ajoutant :

DECLARE Mme [J] [K] irrecevable en sa demande tendant à l'annulation de la résolution n°1 de l'assemblée générale du 15 octobre 2021 ;

DECLARE Mme [J] [K] recevable en sa demande d'annulation des résolutions n°4 et n°5 de l'assemblée générale du 15 octobre 2021 ;

ANNULE les résolutions n°4 et n°5 de l'assemblée générale du 15 octobre 2021 ;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de la copropriété la résidence Les Cèdres, située [Adresse 2] à [Localité 4] aux dépens de la procédure d'appel ;

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de la copropriété la résidence Les Cèdres, située [Adresse 2] à [Localité 4] à payer à Mme [J] [K] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel ;

REJETTE la demande du syndicat des copropriétaires de la copropriété la résidence Les Cèdres, située [Adresse 2] à [Localité 4] fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel ;

DISPENSE Mme [J] [K] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure exposés à hauteur d'appel dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires.

La greffière, La présidente de chambre,

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