CA Aix-en-Provence, ch. 1-2, 20 mars 2025, n° 24/10669
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-2
ARRÊT
DU 20 MARS 2025
N° 2025/158
Rôle N° RG 24/10669 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNTES
[G] [L]
C/
Syndicat des copropriétaires LES MARINETTES
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Guillaume GOGUET
Me Sébastien BADIE
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par le Président du TJ de NICE en date du 08 Août 2024 enregistrée au répertoire général sous le n° 23/00928.
APPELANT
Monsieur [G] [L]
de nationalité Anglaise,
né le 7 Novembre 1986 à [Localité 6] (ROYAUME UNI)
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Guillaume GOGUET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
INTIMEE
Syndicat des copropriétaires LES MARINETTES
sis [Adresse 1],
représenté par son syndic en exercice le CABINET PROGEDI
dont le siège social est [Adresse 2]
représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assisté par Me Vivian THOMAS, avocat au barreau de NICE substitué par Me Aurélie FRANCESCONI, avocat au barreau de NICE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 11 Février 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Laurent DESGOUIS, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Mme Angélique NETO, Présidente
Mme Séverine MOGILKA, Conseillère
M. Laurent DESGOUIS, Conseiller rapporteur
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Caroline VAN-HULST.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Mars 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Mars 2025,
Signé par Mme Angélique NETO, Présidente et Mme Caroline VAN-HULST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Acquis suivant acte authentique du 3 novembre 2020, M. [G] [L] est propriétaire non-occupant d'un appartement constituant le lot n°2, résidence Les Marinettes, située [Adresse 5] à [Localité 4].
Suivant courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 18 août 2022, la société Progedi a, en sa qualité de syndic de copropriété de la résidence Les Marinettes, mis en demeure M. [G] [L] de cesser les locations saisonnières de son bien comme étant contraires au règlement de copropriété et générant des nuisances au sein de la copropriété.
Suivant courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 22 septembre 2022, la société Progedi a réitéré sa mise en demeure à l'égard de M. [G] [L].
Suivant exploit délivré le 28 décembre 2022, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes, représenté par son syndic en exercice, a fait assigner M. [G] [L] devant le président du tribunal de Nice, statuant en référé, aux fins de voir notamment enjoindre à M. [G] [L] de cesser son activité de location meublée de courte durée et condamner celui-ci au paiement d'une provision de 5 000 € à valoir sur l'indemnisation du préjudice subi.
Suivant ordonnance contradictoire rendue le 8 août 2024, le juge des référés a :
ordonné à M. [G] [L] de cesser son activité de location touristique au sein de la copropriété Les Marinettes, sous astreinte provisoire de 500 € par jour de retard passé le délai de 8 jours à compter de la signification de la présente décision, cette astreinte courant sur une période de 3 mois ;
dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de M. [G] [L] tendant à voir supprimer le mot de « garni » du règlement de copropriété et renvoyé les parties dès qu'elles aviseront, devant le juge du fond ;
condamné M. [G] [L] à payer au syndicat des copropriétaires la somme provisionnelle de 3 000 € à valoir sur l'indemnisation de son préjudice de jouissance ;
condamné le même à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1 800 € au fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens ;
débouté les parties pour le surplus.
Ce magistrat a ainsi retenu que :
sur l'activité de location :
si le règlement de copropriété n'interdit pas la location d'un appartement meublé, toute activité commerciale et la location en garni, comprise comme celle prévoyant la fourniture de prestations secondaires telle que la location de linge et/ou l'entretien et le nettoyage de locaux, reste quant à elle, proscrites ;
il ressort des annonces diffusées par M. [G] [L] sur différentes plateformes que son appartement est loué meublé, de manière habituelle, au bénéfice de prestations complémentaires telle que la fourniture de linge ;
cette activité commerciale de location est contraire au règlement de copropriété et génère un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser ;
la demande tendant à voir supprimer le mot « garni » du règlement de copropriété se heurte à une contestation sérieuse, tenant notamment au respect des règles d'inscription éventuelle de cette question à l'ordre du jour d'une prochaine assemblée générale des copropriétaires.
Suivant déclaration enregistrée au greffe le 26 août 2024, M. [G] [L] a interjeté appel de l'ordonnance en toutes ses dispositions dûment reprises.
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 5 septembre 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample expose' des prétentions et moyens, M. [G] [L] sollicite de la cour qu'elle infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau :
in limine litis, dise que l'acte introductif d'instance du 28 décembre 2022 est entaché de nullité, faute pour la société Progedi, représentant le syndicat des copropriétaires Les Marinettes, d'être pourvu d'un pouvoir pour agir contre lui ;
A titre principal :
dise qu'aucune interdiction de location saisonnière n'est expressément visée par le règlement de copropriété ;
dise que la Cour de cassation, par un arrêt du 25 janvier 2024 (Civ. 3e, 25 janv. 2024, F-D, n°22-21.455) autorise un copropriétaire à louer son appartement de manière saisonnière et en énonce le caractère d'activité civile ;
dise qu'aucune interdiction de location saisonnière n'aurait pu même être comprise par le concluant, citoyen britannique, anglophone, dès lors que le règlement de copropriété dont question n'évoque que les termes de location garnie ;
dise qu'aucune location actuelle saisonnière n'est démontrée ;
dise que tout ce qui précède à valeur de contestations sérieuses, qu'aucune urgence n'est démontrée et que le juge des référés n'avait pas compétence pour interpréter l'intention des parties dans le règlement de copropriété à l'aune du terme « garni ».
dise n'y avoir lieu à référé ;
déboute l'intimé de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
à titre reconventionnel :
condamne le syndicat des copropriétaires à supprimer la notion de « garni » du règlement de copropriété et cela par décision d'assemblée générale à intervenir dans un délai de 3 mois ;
dise que le syndicat le poursuit sans justifier ni de moyens juridiques ni de faits qui rendraient son comportement fautif ;
dise qu'en cela, le syndicat des copropriétaires fait dégénérer son droit en abus ;
condamne le syndicat des copropriétaires à payer la somme de 10 000,00 € au titre des dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile ;
condamne le même à lui payer la somme de 5 000 € au fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre entiers dépens dont distraction au bénéfice de Me Guillaume Goguet, avocat.
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 3 octobre 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample expose' des prétentions et moyens, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes, représenté par son syndic en exercice, demande à la cour la confirmation de l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions et statuant à nouveau qu'elle :
juge que M. [G] [L] se livre à une activité de location meublée de courte durée notamment sur les plateformes Airbnb et Abritel ;
juge que cette activité n'est pas autorisée par le règlement de copropriété de la résidence Les Marinettes ;
juge que cette activité constitue un trouble manifestement illicite, et représente un dommage imminent ;
condamne M. [G] [L] à stopper son activité de location meublée ;
assortisse cette interdiction d'une astreinte de 500 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir ;
assortisse cette interdiction d'une astreinte de 500 € par infraction constatée, soit par toute remise en location meublée de courte durée par tous moyens ;
déboute M. [G] [L] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions ;
condamne le même à payer au concluant une provision de 3 000 € à valoir sur le préjudice qu'il subi ;
condamne le même à lui payer la somme de 5 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre entiers dépens.
L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance au 28 janvier 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il convient de rappeler que la cour n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constater », « donner acte », « dire et/ou juger » ou encore « déclarer » qui, sauf dispositions légales spécifiques, ne sont pas des prétentions, en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques, mais des moyens qui ne figurent que par erreur dans le dispositif, plutôt que dans la partie discussion des conclusions d'appel.
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité pour agir :
L'article 122 du code de procédure civile dispose que « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».
L'article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967, pris pour l'application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, dispose que « le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale.
Seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndic à agir en justice.
Une telle autorisation n'est pas nécessaire pour les actions en recouvrement de créance, la mise en 'uvre des voies d'exécution forcée à l'exception de la saisie en vue de la vente d'un lot, les mesures conservatoires, l'opposition aux travaux permettant la recharge normale des véhicules électriques prévue à l'article R. 136-2 du code de la construction et de l'habitation et les demandes qui relèvent des pouvoirs de juge des référés, ainsi que pour défendre aux actions intentées contre le syndicat. Elle n'est pas non plus nécessaire lorsque le président du tribunal judiciaire est saisi en application des premiers alinéas des articles 29-1A et 29-1 de la loi du 10 juillet 1965 ou du premier alinéa de l'article L. 615-6 du code de la construction et de l'habitation.
Dans tous les cas, le syndic rend compte à la prochaine assemblée générale des actions introduites ».
Pour contester la qualité pour agir du syndic, l'appelant soutient que ce dernier n'est en possession d'aucun pouvoir spécial, qu'il doit en toute circonstance tirer d'une assemblée générale des copropriétaires.
Il ressort toutefois des dispositions du 3e alinéa de l'article 55 sus énoncées que le syndic de copropriété dispose qu'une qualité pour agir au nom du syndicat des copropriétaires qu'il représente devant le juge des référés, sans que le texte ne vienne opérer une quelconque distinction sur la nature de la demande formée devant celui-ci.
De cette manière, l'acte introductif d'instance délivré le 28 décembre 2022 n'est pas entaché d'irrégularité de ce chef et la fin de non-recevoir élevée par M. [G] [L] sera écartée.
Sur les troubles manifestement illicites :
Il résulte des dispositions du premier alinéa de l'article 835 du code de procédure civile que le président peut toujours, même en cas de contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer et le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.
Si l'existence de contestations sérieuses sur le fond du droit n'interdit pas au juge de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser un trouble manifestement illicite, l'absence d'évidence de l'illicéité du trouble peut en revanche justifier qu'il refuse d'intervenir. En effet, même lorsque le juge est appelé à faire cesser un trouble manifestement illicite, celui-ci doit être évident, comme doit l'être la mesure que le juge des référés prononce en cas d'urgence.
La cour doit apprécier l'existence d'un dommage imminent ou d'un trouble manifestement illicite au moment où le premier juge a statué, peu important le fait que ce dernier ait cessé, en raison de l'exécution de l'ordonnance déférée, exécutoire de plein droit.
Sur les locations de courtes durées :
La violation d'un règlement de copropriété et des décisions prises par l'assemblée générale des copropriétaires sont susceptibles de caractériser l'illicéité manifeste d'un trouble.
Le règlement de copropriété précise l'objet des parties privatives et communes, définit leurs modalités de jouissance et contribue à la détermination de la destination de l'immeuble.
Aux termes des dispositions de l'article 8 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, il ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l'immeuble, tel que définie aux actes, par ses caractères ou sa situation.
En application des dispositions des deux derniers alinéas de l'article 26 de la même loi, l'assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu'elles résultent du règlement de copropriété. Elle ne peut, sauf à l'unanimité des voix de tous les copropriétaires, décider la modification des stipulations du règlement de copropriété relative à la destination de l'immeuble.
Cet article 26 a été modifié par la loi n° 2024-1039 du 19 novembre 2024 renforçant les outils de régulation des meublés de tourisme. Un d) a été ajouté aux termes duquel la modification du règlement de copropriété qui concerne l'interdiction de location des lots à usage d'habitation autres que ceux constituant une résidence principale en meublés de tourisme peuvent être prises à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix.
Cette possibilité ne concerne que les propriétés qui comportent dans leur règlement une clause dite d'habitation bourgeoise qui autorise l'habitation et les activités libérales dans l'immeuble mais interdit les activités commerciales en dehors des lots dédiés.
Il est admis que l'activité de location touristique meublée, lorsqu'elle n'est assortie d'aucune prestation de services accessoires ou seulement de prestations mineures ne revêtant pas le caractère d'un service para-hôtelier, n'est pas de nature commerciale, de sorte que toute location touristique meublée n'est pas nécessairement incompatible avec une destination d'immeuble bourgeoise.
La destination de l'immeuble en droit de la copropriété est définie comme l'ensemble des conditions en vue desquelles un copropriétaire a acheté son lot, compte tenu de divers éléments, notamment de l'ensemble des clauses des documents contractuels, des caractéristiques physiques et de la situation de l'immeuble, ainsi que la situation sociale de ses occupants. Ainsi, selon les clauses, plus ou moins restrictives, et selon le standing de l'immeuble, la situation de celui-ci et celle de ses occupants, la destination de l'immeuble pourra être considérée comme plus ou moins résidentielle et, dès lors, compatible ou non avec la gêne liée à une location touristique meublée.
En l'espèce, le règlement de copropriété de la résidence Les Marinettes, située [Adresse 5] à [Localité 4], stipule en page 26 que « les appartements et locaux devront être occupés par des personnes de bonne vie et m'urs. Ils seront, principalement, destinés à l'habitation. Toutefois, et sous réserve que les règlements l'autorisent, il sera permis d'exercer une activité professionnelle, à condition que celle-ci ne cause aucun trouble de caractère exceptionnel par rapport à la destination de l'immeuble. Sont ainsi formellement proscrits l'exploitation d'un
cabinet vétérinaire, d'un cabinet de radiologie pénétrante, l'exercice sous forme de profession de la danse, du chant ou de la musique. Les propriétaires intéressés seront seuls responsables de l'utilisation par eux faite de leurs locaux vis-à-vis des administrations ainsi que des conséquences de tous ordres pouvant en résulter vis-à-vis des autres copropriétaires, dont notamment la perte d'avantages fiscaux. Ils devront justifier s'il y a lieu, de l'obtention de toutes condamnations nécessaires auprès du syndic. La transformation des appartements en chambres meublées destinées à être louées à des personnes distinctes est interdite. Il en est ainsi de l'organisation d'une pension de famille ou de l'exploitation d'un garni. Mais la location meublée d'un appartement dans son entier est autorisée, de même que la location à titre accessoire d'une pièce d'un appartement. Les appartements et locaux ne devront pas être occupés par un plus grand nombre de personnes que celui auxquels ils sont destinés ».
Partant, s'il ne relevait pas des pouvoirs du juge des référés de livrer une interprétation des termes dudit règlement en général, et du terme « garni » en particulier, il lui revenait de vérifier le caractère civil, ou non, de la location en cause à la lumière des conditions rappelées plus haut.
Ici, l'immeuble dont question est un immeuble d'habitation bourgeoise dans lequel l'exercice de professions libérales au sein des parties privatives sont autorisées à la condition qu'elles ne génèrent pas de nuisances aux copropriétaires. A l'inverse, les activités commerciales sont prohibées.
Aux termes des procès-verbaux de constats, établis par commissaires de justice les 27 octobre 2022, d'une part, et 24 et 25 septembre 2024, d'autre part, l'appartement constitué par le lot n°2 de la résidence Les Marinettes, propriété de l'appelant, est annoncé à la location via les plateformes habituelles de locations de courtes durées, en l'espèce Abritel et Airbnb.
En ce sens, le premier procès-verbal met en évidence une occupation dudit appartement entre le 27 octobre et le 1er novembre 2022, comme une disponibilité pour l'ensemble du mois de novembre 2022. Sans autre indication, il n'est pas établi que l'indisponibilité de 6 jours corresponde à une période de location effective du bien considéré.
Le second procès-verbal mentionne quant à lui en page 57 : « une liste de 55 équipements apparaît, dont « caractéristique de l'emplacement : accès au complexe hôtelier, les voyageurs peuvent utiliser les installations du complexe à proximité ». Puis dans l'onglet service : le petit déjeuner est inclus, ainsi que le dépôt de bagages « pour le confort des voyageurs en cas d'arrivée tardive ou de départ tardif ».
Pour autant, la liste annoncée de 55 équipements n'est évoquée que de manière très incomplète, de sorte à ce qu'il ne puisse être déterminé avec le degré de précision requis, ni le complexe hôtelier auquel il est fait référence dès lors qu'à la même page 57 du constat désigne le bien loué comme « un appartement en duplex (') qui présente tous les avantages d'une villa ».
De plus, les deux prestations ne revêtent, à l'évidence, pas le caractère de services hôteliers, d'autant qu'elles ne sont pas automatiques mais optionnelles, sans qu'il soit besoin de rechercher si l'activité en question est soumise au régime fiscal de la location meublée comme remplissant les critères des dispositions de l'article 261 D du code général des impôts.
En outre, et pour ordonner la cessation de l'activité commerciale de location de M. [G] [L], le premier juge a retenu que ce dernier proposait des prestations complémentaires de type fourniture de linge.
Alors que l'appelant conteste la proposition de cette prestation, il ressort du procès-verbal établi le 27 octobre 2022 que l'annonce sur le site Abritel mentionne « et grâce à la machine à laver et au sèche-linge, vous pourrez même voyager léger » (p. 17), sans qu'aucune référence à une éventuelle fourniture de linge ne soit évoquée.
Dès lors que l'activité de locations touristiques de courte durée s'analyse, avec l'évidence requise en référé, comme une activité civile et non commerciale, non-prohibée par le règlement de copropriété, la violation de la destination d'habitation bourgeoise de l'immeuble ne saurait constituer un trouble manifestement illicite au détriment des copropriétaires, ni même un dommage imminent.
L'ordonnance déférée sera en conséquence infirmée en ce qu'elle fait injonction à M. [L] de cesser son activité sous astreinte.
Le syndicat des copropriétaires sera ainsi débouté de sa demande tendant à interdire à M. [G] [L] son activité de location meublée, sous astreinte.
Sur les troubles de jouissance :
L'article 1240 du code civil dispose que « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
Pour caractériser l'existence d'un trouble manifestement illicite né des nuisances et troubles consécutifs à l'occupation de l'appartement querellé par des locataires de passage, l'intimé produit cinq témoignages établis par des copropriétaires.
Si le premier juge a retenu le caractère précis et concordant de ces attestations pour condamner M. [L] à verser au syndicat des copropriétaires la somme provisionnelle de 3 000 € à valoir sur son préjudice de jouissance, il apparaît toutefois que ces témoignages restent insuffisamment circonstanciés pour établir un lien suffisamment solide entre l'occupation sauvage du parking et la mise en location dont question.
De la même manière, aucun lien de cette nature n'est établi à la lecture du témoignage rédigé par M. [C] [B] concernant l'activité de pêche, au demeurant interdite à proximité de l'immeuble.
A ce titre, si l'appelant reconnait les annonces de location, il conteste la réalité d'une location effective, qui ne ressort eu demeurant pas des procès-verbaux de constats produits aux débats. Il explique à ce titre que l'appartement n'a pu être loué sur la période considéré dans la mesure où celui-ci doit faire l'objet de travaux de confortement de la roche le surplombant. A l'appui de ses affirmations, M. [L] produit les éléments démontrant que les travaux dont question n'avait pas été réalisés au moins à l'été 2023, leur nécessité ayant préalablement été déterminée par l'entremise d'une expertise judiciaire.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que ni la récurrence, ni même la réalité d'une occupation du bien mis en location sur les plateformes habituelles de locations de courtes durées de biens meublés n'est caractérisée.
L'étendue du préjudice subi par les copropriétaires ne ressort pas davantage des attestations versées aux débats tout comme l'existence d'un lien de causalité direct entre ceux-ci et la mise en location.
Il convient dès lors d'infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a condamné M. [G] [L] à payer au syndicat des copropriétaires la somme provisionnelle de 3 000 € à valoir sur l'indemnisation de son préjudice de jouissance.
Le syndicat des copropriétaires sera en conséquence débouté de sa demande formée de ce chef.
Sur la suppression du terme « garni » du règlement de copropriété :
En estimant que la demande formée par M. [G] [L] se heurtait des contestations sérieuses, tenant notamment au respect des règles relative à l'éventuelle inscription de cette question à l'ordre du jour d'une prochaine assemblée générale des copropriétaires, le premier juge a fait une exacte appréciation de ses pouvoirs pour débouter ce dernier de sa demande tendant à voir supprimer le terme « garni » du règlement de propriété.
Pour solliciter l'infirmation de ce chef de décision, ce dernier ne saurait dès lors valablement invoquer, en l'espèce, le fait que l'intimé contrevient aux dispositions de l'article 49 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 qui obligent à la mise à jour des règlements de copropriété.
L'ordonnance entreprise sera donc confirmée de ce chef.
Sur le caractère abusif de la procédure engagée :
L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
En l'espèce, et au-delà des tensions, réelles ou supposées et en tout cas non étayées en l'état, qui caractérisent les relations entre les parties, aucun élément ne vient démontrer la malice, la mauvaise foi ou la légèreté blâmable du syndicat des copropriétaires dans son action judiciaire.
L'ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle débouté M. [G] [L] de sa demande tendant à l'octroi de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
L'ordonnance déférée sera réformée en ce qu'elle a condamné M. [G] [L], qui obtient gain de cause en appel, à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1 800 € au fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens.
En application des dispositions des articles 696 et 699 du même code, le syndicat des copropriétaires, qui succombe en ses prétentions, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel, distraits au bénéfice de Me Guillaume Goguet, avocat.
En application des dispositions de l'article 700 du même code, l'équité commande de condamner le syndicat des copropriétaires à payer à M. [G] [L] la somme de 4 000 € au titre des frais irrépétibles, non compris dans les dépens, engagés par lui en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle a :
dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de M. [G] [L] tendant à voir supprimer le mot de « garni » du règlement de copropriété et renvoyé les parties dès qu'elles aviseront, devant le juge du fond ;
débouté M. [G] [L] de sa demande tendant à l'octroi de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Infirme ladite ordonnance pour le surplus de ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Écarte la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité pour agir de la société Progedi, agissant en tant que syndic du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes, située [Adresse 5] à [Localité 4] et déclare l'action recevable ;
Déboute le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes de sa demande tendant à interdire, sous astreinte, à M. [G] [L] d'exercer son activité de location meublée de courte durée ;
Déboute le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes de sa demande tendant à l'octroi d'une provision à valoir sur le préjudice de jouissance subi ;
Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes à payer à M. [G] [L] la somme de 4 000 € au titre des frais irrépétibles, non compris dans les dépens, engagés par lui en première instance et en appel ;
Condamne le syndicat des copropriétaires aux dépens de première instance et d'appel, distraits au bénéfice de Me Guillaume Goguet, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La greffière La présidente
Chambre 1-2
ARRÊT
DU 20 MARS 2025
N° 2025/158
Rôle N° RG 24/10669 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNTES
[G] [L]
C/
Syndicat des copropriétaires LES MARINETTES
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Guillaume GOGUET
Me Sébastien BADIE
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par le Président du TJ de NICE en date du 08 Août 2024 enregistrée au répertoire général sous le n° 23/00928.
APPELANT
Monsieur [G] [L]
de nationalité Anglaise,
né le 7 Novembre 1986 à [Localité 6] (ROYAUME UNI)
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Guillaume GOGUET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
INTIMEE
Syndicat des copropriétaires LES MARINETTES
sis [Adresse 1],
représenté par son syndic en exercice le CABINET PROGEDI
dont le siège social est [Adresse 2]
représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assisté par Me Vivian THOMAS, avocat au barreau de NICE substitué par Me Aurélie FRANCESCONI, avocat au barreau de NICE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 11 Février 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Laurent DESGOUIS, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Mme Angélique NETO, Présidente
Mme Séverine MOGILKA, Conseillère
M. Laurent DESGOUIS, Conseiller rapporteur
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Caroline VAN-HULST.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Mars 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Mars 2025,
Signé par Mme Angélique NETO, Présidente et Mme Caroline VAN-HULST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Acquis suivant acte authentique du 3 novembre 2020, M. [G] [L] est propriétaire non-occupant d'un appartement constituant le lot n°2, résidence Les Marinettes, située [Adresse 5] à [Localité 4].
Suivant courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 18 août 2022, la société Progedi a, en sa qualité de syndic de copropriété de la résidence Les Marinettes, mis en demeure M. [G] [L] de cesser les locations saisonnières de son bien comme étant contraires au règlement de copropriété et générant des nuisances au sein de la copropriété.
Suivant courrier recommandé avec demande d'avis de réception du 22 septembre 2022, la société Progedi a réitéré sa mise en demeure à l'égard de M. [G] [L].
Suivant exploit délivré le 28 décembre 2022, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes, représenté par son syndic en exercice, a fait assigner M. [G] [L] devant le président du tribunal de Nice, statuant en référé, aux fins de voir notamment enjoindre à M. [G] [L] de cesser son activité de location meublée de courte durée et condamner celui-ci au paiement d'une provision de 5 000 € à valoir sur l'indemnisation du préjudice subi.
Suivant ordonnance contradictoire rendue le 8 août 2024, le juge des référés a :
ordonné à M. [G] [L] de cesser son activité de location touristique au sein de la copropriété Les Marinettes, sous astreinte provisoire de 500 € par jour de retard passé le délai de 8 jours à compter de la signification de la présente décision, cette astreinte courant sur une période de 3 mois ;
dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de M. [G] [L] tendant à voir supprimer le mot de « garni » du règlement de copropriété et renvoyé les parties dès qu'elles aviseront, devant le juge du fond ;
condamné M. [G] [L] à payer au syndicat des copropriétaires la somme provisionnelle de 3 000 € à valoir sur l'indemnisation de son préjudice de jouissance ;
condamné le même à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1 800 € au fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens ;
débouté les parties pour le surplus.
Ce magistrat a ainsi retenu que :
sur l'activité de location :
si le règlement de copropriété n'interdit pas la location d'un appartement meublé, toute activité commerciale et la location en garni, comprise comme celle prévoyant la fourniture de prestations secondaires telle que la location de linge et/ou l'entretien et le nettoyage de locaux, reste quant à elle, proscrites ;
il ressort des annonces diffusées par M. [G] [L] sur différentes plateformes que son appartement est loué meublé, de manière habituelle, au bénéfice de prestations complémentaires telle que la fourniture de linge ;
cette activité commerciale de location est contraire au règlement de copropriété et génère un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser ;
la demande tendant à voir supprimer le mot « garni » du règlement de copropriété se heurte à une contestation sérieuse, tenant notamment au respect des règles d'inscription éventuelle de cette question à l'ordre du jour d'une prochaine assemblée générale des copropriétaires.
Suivant déclaration enregistrée au greffe le 26 août 2024, M. [G] [L] a interjeté appel de l'ordonnance en toutes ses dispositions dûment reprises.
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 5 septembre 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample expose' des prétentions et moyens, M. [G] [L] sollicite de la cour qu'elle infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau :
in limine litis, dise que l'acte introductif d'instance du 28 décembre 2022 est entaché de nullité, faute pour la société Progedi, représentant le syndicat des copropriétaires Les Marinettes, d'être pourvu d'un pouvoir pour agir contre lui ;
A titre principal :
dise qu'aucune interdiction de location saisonnière n'est expressément visée par le règlement de copropriété ;
dise que la Cour de cassation, par un arrêt du 25 janvier 2024 (Civ. 3e, 25 janv. 2024, F-D, n°22-21.455) autorise un copropriétaire à louer son appartement de manière saisonnière et en énonce le caractère d'activité civile ;
dise qu'aucune interdiction de location saisonnière n'aurait pu même être comprise par le concluant, citoyen britannique, anglophone, dès lors que le règlement de copropriété dont question n'évoque que les termes de location garnie ;
dise qu'aucune location actuelle saisonnière n'est démontrée ;
dise que tout ce qui précède à valeur de contestations sérieuses, qu'aucune urgence n'est démontrée et que le juge des référés n'avait pas compétence pour interpréter l'intention des parties dans le règlement de copropriété à l'aune du terme « garni ».
dise n'y avoir lieu à référé ;
déboute l'intimé de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
à titre reconventionnel :
condamne le syndicat des copropriétaires à supprimer la notion de « garni » du règlement de copropriété et cela par décision d'assemblée générale à intervenir dans un délai de 3 mois ;
dise que le syndicat le poursuit sans justifier ni de moyens juridiques ni de faits qui rendraient son comportement fautif ;
dise qu'en cela, le syndicat des copropriétaires fait dégénérer son droit en abus ;
condamne le syndicat des copropriétaires à payer la somme de 10 000,00 € au titre des dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile ;
condamne le même à lui payer la somme de 5 000 € au fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre entiers dépens dont distraction au bénéfice de Me Guillaume Goguet, avocat.
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 3 octobre 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample expose' des prétentions et moyens, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes, représenté par son syndic en exercice, demande à la cour la confirmation de l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions et statuant à nouveau qu'elle :
juge que M. [G] [L] se livre à une activité de location meublée de courte durée notamment sur les plateformes Airbnb et Abritel ;
juge que cette activité n'est pas autorisée par le règlement de copropriété de la résidence Les Marinettes ;
juge que cette activité constitue un trouble manifestement illicite, et représente un dommage imminent ;
condamne M. [G] [L] à stopper son activité de location meublée ;
assortisse cette interdiction d'une astreinte de 500 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir ;
assortisse cette interdiction d'une astreinte de 500 € par infraction constatée, soit par toute remise en location meublée de courte durée par tous moyens ;
déboute M. [G] [L] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions ;
condamne le même à payer au concluant une provision de 3 000 € à valoir sur le préjudice qu'il subi ;
condamne le même à lui payer la somme de 5 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre entiers dépens.
L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance au 28 janvier 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, il convient de rappeler que la cour n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constater », « donner acte », « dire et/ou juger » ou encore « déclarer » qui, sauf dispositions légales spécifiques, ne sont pas des prétentions, en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques, mais des moyens qui ne figurent que par erreur dans le dispositif, plutôt que dans la partie discussion des conclusions d'appel.
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité pour agir :
L'article 122 du code de procédure civile dispose que « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».
L'article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967, pris pour l'application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, dispose que « le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale.
Seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l'absence d'autorisation du syndic à agir en justice.
Une telle autorisation n'est pas nécessaire pour les actions en recouvrement de créance, la mise en 'uvre des voies d'exécution forcée à l'exception de la saisie en vue de la vente d'un lot, les mesures conservatoires, l'opposition aux travaux permettant la recharge normale des véhicules électriques prévue à l'article R. 136-2 du code de la construction et de l'habitation et les demandes qui relèvent des pouvoirs de juge des référés, ainsi que pour défendre aux actions intentées contre le syndicat. Elle n'est pas non plus nécessaire lorsque le président du tribunal judiciaire est saisi en application des premiers alinéas des articles 29-1A et 29-1 de la loi du 10 juillet 1965 ou du premier alinéa de l'article L. 615-6 du code de la construction et de l'habitation.
Dans tous les cas, le syndic rend compte à la prochaine assemblée générale des actions introduites ».
Pour contester la qualité pour agir du syndic, l'appelant soutient que ce dernier n'est en possession d'aucun pouvoir spécial, qu'il doit en toute circonstance tirer d'une assemblée générale des copropriétaires.
Il ressort toutefois des dispositions du 3e alinéa de l'article 55 sus énoncées que le syndic de copropriété dispose qu'une qualité pour agir au nom du syndicat des copropriétaires qu'il représente devant le juge des référés, sans que le texte ne vienne opérer une quelconque distinction sur la nature de la demande formée devant celui-ci.
De cette manière, l'acte introductif d'instance délivré le 28 décembre 2022 n'est pas entaché d'irrégularité de ce chef et la fin de non-recevoir élevée par M. [G] [L] sera écartée.
Sur les troubles manifestement illicites :
Il résulte des dispositions du premier alinéa de l'article 835 du code de procédure civile que le président peut toujours, même en cas de contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer et le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.
Si l'existence de contestations sérieuses sur le fond du droit n'interdit pas au juge de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser un trouble manifestement illicite, l'absence d'évidence de l'illicéité du trouble peut en revanche justifier qu'il refuse d'intervenir. En effet, même lorsque le juge est appelé à faire cesser un trouble manifestement illicite, celui-ci doit être évident, comme doit l'être la mesure que le juge des référés prononce en cas d'urgence.
La cour doit apprécier l'existence d'un dommage imminent ou d'un trouble manifestement illicite au moment où le premier juge a statué, peu important le fait que ce dernier ait cessé, en raison de l'exécution de l'ordonnance déférée, exécutoire de plein droit.
Sur les locations de courtes durées :
La violation d'un règlement de copropriété et des décisions prises par l'assemblée générale des copropriétaires sont susceptibles de caractériser l'illicéité manifeste d'un trouble.
Le règlement de copropriété précise l'objet des parties privatives et communes, définit leurs modalités de jouissance et contribue à la détermination de la destination de l'immeuble.
Aux termes des dispositions de l'article 8 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, il ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l'immeuble, tel que définie aux actes, par ses caractères ou sa situation.
En application des dispositions des deux derniers alinéas de l'article 26 de la même loi, l'assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu'elles résultent du règlement de copropriété. Elle ne peut, sauf à l'unanimité des voix de tous les copropriétaires, décider la modification des stipulations du règlement de copropriété relative à la destination de l'immeuble.
Cet article 26 a été modifié par la loi n° 2024-1039 du 19 novembre 2024 renforçant les outils de régulation des meublés de tourisme. Un d) a été ajouté aux termes duquel la modification du règlement de copropriété qui concerne l'interdiction de location des lots à usage d'habitation autres que ceux constituant une résidence principale en meublés de tourisme peuvent être prises à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix.
Cette possibilité ne concerne que les propriétés qui comportent dans leur règlement une clause dite d'habitation bourgeoise qui autorise l'habitation et les activités libérales dans l'immeuble mais interdit les activités commerciales en dehors des lots dédiés.
Il est admis que l'activité de location touristique meublée, lorsqu'elle n'est assortie d'aucune prestation de services accessoires ou seulement de prestations mineures ne revêtant pas le caractère d'un service para-hôtelier, n'est pas de nature commerciale, de sorte que toute location touristique meublée n'est pas nécessairement incompatible avec une destination d'immeuble bourgeoise.
La destination de l'immeuble en droit de la copropriété est définie comme l'ensemble des conditions en vue desquelles un copropriétaire a acheté son lot, compte tenu de divers éléments, notamment de l'ensemble des clauses des documents contractuels, des caractéristiques physiques et de la situation de l'immeuble, ainsi que la situation sociale de ses occupants. Ainsi, selon les clauses, plus ou moins restrictives, et selon le standing de l'immeuble, la situation de celui-ci et celle de ses occupants, la destination de l'immeuble pourra être considérée comme plus ou moins résidentielle et, dès lors, compatible ou non avec la gêne liée à une location touristique meublée.
En l'espèce, le règlement de copropriété de la résidence Les Marinettes, située [Adresse 5] à [Localité 4], stipule en page 26 que « les appartements et locaux devront être occupés par des personnes de bonne vie et m'urs. Ils seront, principalement, destinés à l'habitation. Toutefois, et sous réserve que les règlements l'autorisent, il sera permis d'exercer une activité professionnelle, à condition que celle-ci ne cause aucun trouble de caractère exceptionnel par rapport à la destination de l'immeuble. Sont ainsi formellement proscrits l'exploitation d'un
cabinet vétérinaire, d'un cabinet de radiologie pénétrante, l'exercice sous forme de profession de la danse, du chant ou de la musique. Les propriétaires intéressés seront seuls responsables de l'utilisation par eux faite de leurs locaux vis-à-vis des administrations ainsi que des conséquences de tous ordres pouvant en résulter vis-à-vis des autres copropriétaires, dont notamment la perte d'avantages fiscaux. Ils devront justifier s'il y a lieu, de l'obtention de toutes condamnations nécessaires auprès du syndic. La transformation des appartements en chambres meublées destinées à être louées à des personnes distinctes est interdite. Il en est ainsi de l'organisation d'une pension de famille ou de l'exploitation d'un garni. Mais la location meublée d'un appartement dans son entier est autorisée, de même que la location à titre accessoire d'une pièce d'un appartement. Les appartements et locaux ne devront pas être occupés par un plus grand nombre de personnes que celui auxquels ils sont destinés ».
Partant, s'il ne relevait pas des pouvoirs du juge des référés de livrer une interprétation des termes dudit règlement en général, et du terme « garni » en particulier, il lui revenait de vérifier le caractère civil, ou non, de la location en cause à la lumière des conditions rappelées plus haut.
Ici, l'immeuble dont question est un immeuble d'habitation bourgeoise dans lequel l'exercice de professions libérales au sein des parties privatives sont autorisées à la condition qu'elles ne génèrent pas de nuisances aux copropriétaires. A l'inverse, les activités commerciales sont prohibées.
Aux termes des procès-verbaux de constats, établis par commissaires de justice les 27 octobre 2022, d'une part, et 24 et 25 septembre 2024, d'autre part, l'appartement constitué par le lot n°2 de la résidence Les Marinettes, propriété de l'appelant, est annoncé à la location via les plateformes habituelles de locations de courtes durées, en l'espèce Abritel et Airbnb.
En ce sens, le premier procès-verbal met en évidence une occupation dudit appartement entre le 27 octobre et le 1er novembre 2022, comme une disponibilité pour l'ensemble du mois de novembre 2022. Sans autre indication, il n'est pas établi que l'indisponibilité de 6 jours corresponde à une période de location effective du bien considéré.
Le second procès-verbal mentionne quant à lui en page 57 : « une liste de 55 équipements apparaît, dont « caractéristique de l'emplacement : accès au complexe hôtelier, les voyageurs peuvent utiliser les installations du complexe à proximité ». Puis dans l'onglet service : le petit déjeuner est inclus, ainsi que le dépôt de bagages « pour le confort des voyageurs en cas d'arrivée tardive ou de départ tardif ».
Pour autant, la liste annoncée de 55 équipements n'est évoquée que de manière très incomplète, de sorte à ce qu'il ne puisse être déterminé avec le degré de précision requis, ni le complexe hôtelier auquel il est fait référence dès lors qu'à la même page 57 du constat désigne le bien loué comme « un appartement en duplex (') qui présente tous les avantages d'une villa ».
De plus, les deux prestations ne revêtent, à l'évidence, pas le caractère de services hôteliers, d'autant qu'elles ne sont pas automatiques mais optionnelles, sans qu'il soit besoin de rechercher si l'activité en question est soumise au régime fiscal de la location meublée comme remplissant les critères des dispositions de l'article 261 D du code général des impôts.
En outre, et pour ordonner la cessation de l'activité commerciale de location de M. [G] [L], le premier juge a retenu que ce dernier proposait des prestations complémentaires de type fourniture de linge.
Alors que l'appelant conteste la proposition de cette prestation, il ressort du procès-verbal établi le 27 octobre 2022 que l'annonce sur le site Abritel mentionne « et grâce à la machine à laver et au sèche-linge, vous pourrez même voyager léger » (p. 17), sans qu'aucune référence à une éventuelle fourniture de linge ne soit évoquée.
Dès lors que l'activité de locations touristiques de courte durée s'analyse, avec l'évidence requise en référé, comme une activité civile et non commerciale, non-prohibée par le règlement de copropriété, la violation de la destination d'habitation bourgeoise de l'immeuble ne saurait constituer un trouble manifestement illicite au détriment des copropriétaires, ni même un dommage imminent.
L'ordonnance déférée sera en conséquence infirmée en ce qu'elle fait injonction à M. [L] de cesser son activité sous astreinte.
Le syndicat des copropriétaires sera ainsi débouté de sa demande tendant à interdire à M. [G] [L] son activité de location meublée, sous astreinte.
Sur les troubles de jouissance :
L'article 1240 du code civil dispose que « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
Pour caractériser l'existence d'un trouble manifestement illicite né des nuisances et troubles consécutifs à l'occupation de l'appartement querellé par des locataires de passage, l'intimé produit cinq témoignages établis par des copropriétaires.
Si le premier juge a retenu le caractère précis et concordant de ces attestations pour condamner M. [L] à verser au syndicat des copropriétaires la somme provisionnelle de 3 000 € à valoir sur son préjudice de jouissance, il apparaît toutefois que ces témoignages restent insuffisamment circonstanciés pour établir un lien suffisamment solide entre l'occupation sauvage du parking et la mise en location dont question.
De la même manière, aucun lien de cette nature n'est établi à la lecture du témoignage rédigé par M. [C] [B] concernant l'activité de pêche, au demeurant interdite à proximité de l'immeuble.
A ce titre, si l'appelant reconnait les annonces de location, il conteste la réalité d'une location effective, qui ne ressort eu demeurant pas des procès-verbaux de constats produits aux débats. Il explique à ce titre que l'appartement n'a pu être loué sur la période considéré dans la mesure où celui-ci doit faire l'objet de travaux de confortement de la roche le surplombant. A l'appui de ses affirmations, M. [L] produit les éléments démontrant que les travaux dont question n'avait pas été réalisés au moins à l'été 2023, leur nécessité ayant préalablement été déterminée par l'entremise d'une expertise judiciaire.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que ni la récurrence, ni même la réalité d'une occupation du bien mis en location sur les plateformes habituelles de locations de courtes durées de biens meublés n'est caractérisée.
L'étendue du préjudice subi par les copropriétaires ne ressort pas davantage des attestations versées aux débats tout comme l'existence d'un lien de causalité direct entre ceux-ci et la mise en location.
Il convient dès lors d'infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a condamné M. [G] [L] à payer au syndicat des copropriétaires la somme provisionnelle de 3 000 € à valoir sur l'indemnisation de son préjudice de jouissance.
Le syndicat des copropriétaires sera en conséquence débouté de sa demande formée de ce chef.
Sur la suppression du terme « garni » du règlement de copropriété :
En estimant que la demande formée par M. [G] [L] se heurtait des contestations sérieuses, tenant notamment au respect des règles relative à l'éventuelle inscription de cette question à l'ordre du jour d'une prochaine assemblée générale des copropriétaires, le premier juge a fait une exacte appréciation de ses pouvoirs pour débouter ce dernier de sa demande tendant à voir supprimer le terme « garni » du règlement de propriété.
Pour solliciter l'infirmation de ce chef de décision, ce dernier ne saurait dès lors valablement invoquer, en l'espèce, le fait que l'intimé contrevient aux dispositions de l'article 49 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 qui obligent à la mise à jour des règlements de copropriété.
L'ordonnance entreprise sera donc confirmée de ce chef.
Sur le caractère abusif de la procédure engagée :
L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
En l'espèce, et au-delà des tensions, réelles ou supposées et en tout cas non étayées en l'état, qui caractérisent les relations entre les parties, aucun élément ne vient démontrer la malice, la mauvaise foi ou la légèreté blâmable du syndicat des copropriétaires dans son action judiciaire.
L'ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle débouté M. [G] [L] de sa demande tendant à l'octroi de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
L'ordonnance déférée sera réformée en ce qu'elle a condamné M. [G] [L], qui obtient gain de cause en appel, à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1 800 € au fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre dépens.
En application des dispositions des articles 696 et 699 du même code, le syndicat des copropriétaires, qui succombe en ses prétentions, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel, distraits au bénéfice de Me Guillaume Goguet, avocat.
En application des dispositions de l'article 700 du même code, l'équité commande de condamner le syndicat des copropriétaires à payer à M. [G] [L] la somme de 4 000 € au titre des frais irrépétibles, non compris dans les dépens, engagés par lui en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle a :
dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de M. [G] [L] tendant à voir supprimer le mot de « garni » du règlement de copropriété et renvoyé les parties dès qu'elles aviseront, devant le juge du fond ;
débouté M. [G] [L] de sa demande tendant à l'octroi de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Infirme ladite ordonnance pour le surplus de ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Écarte la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité pour agir de la société Progedi, agissant en tant que syndic du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes, située [Adresse 5] à [Localité 4] et déclare l'action recevable ;
Déboute le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes de sa demande tendant à interdire, sous astreinte, à M. [G] [L] d'exercer son activité de location meublée de courte durée ;
Déboute le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes de sa demande tendant à l'octroi d'une provision à valoir sur le préjudice de jouissance subi ;
Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Marinettes à payer à M. [G] [L] la somme de 4 000 € au titre des frais irrépétibles, non compris dans les dépens, engagés par lui en première instance et en appel ;
Condamne le syndicat des copropriétaires aux dépens de première instance et d'appel, distraits au bénéfice de Me Guillaume Goguet, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La greffière La présidente