CA Lyon, 6e ch., 20 mars 2025, n° 24/02510
LYON
Arrêt
Autre
N° RG 24/02510 - N° Portalis DBVX-V-B7I-PR2J
Décision du
Juge de l'exécution de LYON
Au fond
du 12 mars 2024
RG : 23/08440
[I]
C/
S.C.I. PILARE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
6ème Chambre
ARRET DU 20 Mars 2025
APPELANT :
M. [L] [I]
né le [Date naissance 2] 1981 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Gérard BENOIT de la SELARL BENOIT - LALLIARD - ROUANET, avocat au barreau de LYON, toque : 505
INTIMEE :
S.C.I. PILARE
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Florian DESBOS de la SCP DESBOS BAROU & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1726
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 04 Février 2025
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 11 Février 2025
Date de mise à disposition : 20 Mars 2025
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Joëlle DOAT, présidente
- Evelyne ALLAIS, conseillère
- Stéphanie ROBIN, conseillère
assistées pendant les débats de Cécile NONIN, greffière
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Cécile NONIN, greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES
Par acte notarié en date du 17 janvier 2018, la société Caixa Geral de Depositos a consenti à la société civile immobilière (SCI) Asimov Participation un prêt d'un montant de 480 000 euros.
L'acte notarié contient les cautions personnelles, solidaires et indivisibles à hauteur de
312 000 euros chacun de M. [B] gérant et associé de la SCI Asimov Participation et de M. [I], associé de ladite SCI.
Par acte notarié en date du 31 mai 2018, la SCI Asimov Participation a acquis un local commercial et la société Caixa Geral de Depositos lui a consenti un prêt d'un montant de
480 000 euros.
L'acte notarié de prêt contient les cautions personnelles, solidaires et indivisibles de M. [B] et de M. [O] [I], à hauteur de 312 000 euros chacun.
Par actes en date du 5 mai 2021, la SCI Pilare a signifié à M. [I] deux contrats de cession de créances, le premier signé le 10 février 2021 entre la société Caixa Geral de Depositos et la société Solidia Invest contenant cession des créances détenues par la société Caixa Geral de Depositos à l'encontre de la SCI Asimov Participation et le second signé le 8 mars 2021 entre la société Solidia Invest et la société civile immobilière (SCI) Pilare contenant cession des créances détenues par la société Solidia Invest à l'encontre de la SCI Asimov Participation, en vertu des deux prêts d'un montant de 480 000 euros chacun octroyés par la banque.
Par actes de commissaire de justice en date du 7 septembre 2023,SCI Pilare a fait pratiquer au préjudice de M. [L] [I] entre les mains des sociétés Partagas Participation et Hupman Invest deux saisies du compte courant d'associé détenu par celui-ci dans ces sociétés pour paiement de la somme de 642 069,03 euros.
Quatre autres saisies de compte-courant d'associé et de droits d'associé ont été pratiquées le même jour entre les mains des sociétés Partagas Participation et Hupman Invest, pour paiement des sommes de 382 493,92 euros et de 382 518,39 euros.
Les six saisies ont été dénoncées à M. [I] le 12 septembre 2023.
Par acte d'huissier en date du 12 octobre 2023, M. [I] a fait assigner la SCI Pilare devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Lyon pour s'entendre prononcer la nullité des saisies ou ordonner leur mainlevée.
Par jugement en date du 12 mars 2024, le juge de l'exécution a :
- rejeté les demandes de M. [I]
- déclaré valables les six mesures de saisie
- 'débouté la SCI Pilare du surplus de ses demandes'
- condamné M. [I] à payer à la SCI Pilare la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
M. [I] a interjeté appel de ce jugement, le 22 mars 2024.
Il demande à la cour :
- d'infirmer le jugement
statuant à nouveau,
- de juger que la fraude dont il est victime justifie que soient ordonnées la nullité et la mainlevée aux frais de la SCI Pilare des six mesures de saisie pratiquées le 7 septembre 2023
- de condamner la SCI Pilare à lui payer la somme de 624 000 euros à titre de dommages et intérêts
- de condamner la SCI Pilare à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens
- 'de débouter la SCI Pilare de l'intégralité de ses prétentions plus amples ou contraires'.
Il fait valoir en substance que :
- la SCI Asimov ayant consenti deux baux commerciaux sur des locaux lui appartenant à deux agences bancaires, respectivement la banque CIC et la banque BNP Paribas, moyennant le versement de loyers dont le montant total annuel pour les deux baux s'élève à la somme de 128 783 euros hors charges, elle avait la capacité financière de rembourser les deux prêts consentis par la société Caixa Geral de Depositos mais ces loyers ont été détournés par la société TK Investment dont le gérant est M. [B]
- il est établi que le rachat des créances des banques par la SCI Pilare avec pour intermédiaire la société Solidia Invest a été frauduleusement financé par les loyers payés par les locataires de la SCI Asimov et de la société Tarare République et détournés au profit de la SCI Pilare et de la société TK Investment
- la SCI Pilare ne justifie pas de manière probante et convaincante le paiement de la créance qu'elle a rachetée à la société Solidia Invest dont était initialement titulaire la Caixa pour un montant de 860 000 euros
- la SCI Pilare n'a donc pas qualité à agir à son encontre
- il s'est engagé en qualité de caution au profit de la société Caixa dont la créance a été cédée à la société Solidia Invest, si bien que le paiement de la société Solidia Invest à la société Caixa a éteint la dette de la société Asimov Participation et son propre cautionnement
- il a le droit d'agir en nullité absolue, bien que tiers au contrat de cession de créances, dès lors que la fraude dont il est victime a pour effet juridique qu'une action en licitation partage est initiée par la SCI Pilare à son encontre et l'acte juridique de cession entaché de fraude doit être annulé
La SCI Pilare demande à la cour :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a 'déboutée du surplus de ses demandes'
- de confirmer le jugement pour le surplus
par conséquent,
- de débouter M. [I] de ses demandes
y ajoutant,
- de condamner M. [I] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.
Elle fait valoir en substance que :
- M. [I] n'a pas d'intérêt légitime à agir en nullité de l'acte de cession de créance et ses demandes sont irrecevables
- la situation de M. [I] n'est pas affectée par la cession de créances car il reste tenu envers elle (SCI Pilare) comme il l'était envers la Caixa et il conserve son action récursoire après paiement tant contre la SCI Asimov Participation,débiteur principal, que contre M. [B], autre caution solidaire
- l'absence de conséquence pour lui de l'acte de cession de créance fait qu'il ne dispose pas d'intérêt légitime à s'opposer à cet acte
- elle déclare qu'elle produit dans le cadre de la présente procédure la preuve du paiement du prix de cession effectué au moyen de plusieurs règlements au profit de la société Solidia Invest à hauteur de la somme de 860 000 euros
- la SCI Asimov lui a réglé des sommes qui sont venues en déduction de sa dette à son égard, en sa qualité de créancière aux lieu et place de Caixa
- au 1er septembre 2023, la dette de la SCI Asimov à son égard s'élève à :
* 361 196,89 euros au titre du prêt Caixa 1 en date du 17 janvier 2018
* 379 606, 78 euros au titre du prêt Caixa 2 en date du 31 mai 2018,
soit un montant supérieur à la somme globale de 624 000 euros correspondant aux deux cautionnements de M. [I].
L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 février 2025.
SUR CE :
Le juge de l'exécution a été saisi d'une demande de nullité ou de mainlevée de six mesures de saisie de comptes courants d'associé et de droits d'associé détenus par M. [I] pratiquées le même jour.
Or, il ne ressort pas du jugement que la validité des quatre mesures de saisie dont il est mentionné qu'elles sont effectuées en vertu d'une grosse notariée exécutoire d'un acte de vente avec prêt en date du 23 décembre 2010, pour paiement des sommes de 382 493,92 euros et de 382 518,39 euros, a été remise en cause devant le juge de l'exécution.
Devant la cour, aucun moyen n'est soulevé pour critiquer ces quatre saisies et l'acte de prêt du 23 décembre 2010 visé aux actes n'est pas produit par M. [I], auteur de la contestation.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement qui a déclaré que ces quatre saisies étaient valables.
Sur la recevabilité des demandes de M. [I]
La SCI Pilare reprend devant la cour la fin de non recevoir rejetée par le premier juge, tirée de l'absence d'intérêt légitime de M. [I] à agir en nullité de l'acte de cession de créance, soutenant que ce dernier étant tiers au contrat de créance, il ne peut en invoquer la nullité et que, par ailleurs, il ne justifie pas de la prétendue fraude qu'il invoque.
Les procès-verbaux des saisies pratiquées le 7 septembre 2023 du compte-courant d'associé entre les mains de la société Partagas Participation et du compte-courant d'associé entre les mains de la société Hupman Invest pour paiement de la somme de 642 069,03 euros mentionnent que la SCI Pilare déclare agir en vertu d'un contrat de rachat de prêt établi par acte notarié revêtu de la formule exécutoire en date du 17 janvier 2018 contenant cautionnement signé par M. [I], d'un acte de vente contenant prêt établi par acte notarié revêtu de la formule exécutoire en date du 31 mai 2018 contenant cautionnement signé par M. [I], d'une cession de créance au profit de la société Solidia Invest en date du 10 février 2021, d'une seconde cession au profit de la SCI Pilare en date du 8 mars 2021, toutes deux précédemment notifiées et d'un arrêt rendu par la cour d'appel de Lyon le 10 novembre 2022 définitif.
M. [I] qui conteste la validité des saisies de deux de ses comptes-courants d'associé pratiquées sur le fondement de deux actes de cession de créances a intérêt à critiquer l'opposabilité à son égard desdits actes.
C'est à juste titre que le juge de l'exécution a déclaré son action en contestation recevable, sauf à préciser qu'elle est limitée à la contestation des deux saisies ci-dessus énoncées.
Sur la demande en nullité des deux saisies
L'article 1321 du code civil modifié par l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 applicable à la date des contrats de prêt litigieux énonce que la cession de créance est un contrat par lequel le créancier cédant transmet, à titre onéreux ou gratuit, tout ou partie de sa créance contre le débiteur cédé à un tiers appelé le cessionnaire, qu'elle peut porter sur une ou plusieurs créances présentes ou futures, déterminées ou déterminables, qu'elle s'étend aux accessoires de la créance et que le consentement du débiteur n'est pas requis, à moins que la créance ait été stipulée incessible.
La cession d'une créance comprend les accessoires de celle-ci, tels que caution, privilège et hypothèque, ce dont il résulte que ce transfert s'opère de plein droit, même si l'acte de cession ne le précise pas.
L'article 1324 dispose que la cession n'est opposable au débiteur, s'il n'y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s'il en a pris acte.
Le débiteur peut opposer au cessionnaire les exceptions inhérentes à la dette, telles que la nullité, l'exception d'inexécution, la résolution ou la compensation des dettes connexes. Il peut également opposer les exceptions nées de ses rapports avec le cédant avant que la cession lui soit devenue opposable, telles que l'octroi d'un terme, la remise de dette ou la compensation de dettes non connexes.
Selon l'article 2313 du code civil dans sa version en vigueur à la date des contrats, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette, mais elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur.
Par acte notarié en date du 17 janvier 2018, M. [I] s'est porté caution solidaire de l'emprunteur, la SCI Asimov Participation, du remboursement d'un prêt professionnel d'un montant de 480 000 euros consenti par la Caixa Geral de Depositos Banque, à hauteur de la somme de 312 000 euros couvrant le montant du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard.
Par acte notarié en date du 31 mai 2018, M. [I] s'est porté caution solidaire de l'emprunteur, la SCI Asimov Participation, du remboursement d'un prêt immobilier d'un montant de 480 000 euros consenti par la Caixa Geral de Depositos Banque, à hauteur de la somme de 312 000 euros couvrant le montant du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard.
Le 24 juillet 2020, la banque Caixa Geral de Depositos a mis en demeure la SCI Asimov Participation d'avoir à lui payer la somme de 19 831,86 euros en principal au titre des échéances du prêt n° (...) 993002 non réglées depuis le mois de février 2020, sous quinze jours, délai passé lequel elle prononcerait la déchéance du terme.
Le 7 août 2020, la banque a informé M. [I] de la défaillance de la SCI Asimov et de la déchéance du terme dudit prêt n° (...) 993002 encourue faute de régularisation des échéances impayées dans le délai de quinze jours.
Le 7 août 2020, la banque a mis en demeure la SCI Asimov d'avoir à lui payer la somme de 26 677,70 euros en principal au titre des échéances non réglées du prêt n° (...) 993001 depuis le mois de janvier 2020, sous quinze jours, délai passé lequel elle prononcerait la déchéance du terme.
Le 7 août 2020, la banque a informé M. [I] de la défaillance de la SCI Asimov et de la déchéance du terme encourue faute de régularisation des échéances impayées dans le délai de quinze jours.
La SCI Pilare produit la lettre de notification de la déchéance du terme adressée le 24 août 2020 par la banque à la SCI Asimov Participation en ce qui concerne le prêt n° (...) 993001 et la mise en demeure d'avoir à lui payer la somme de 454 450,32 euros dûe à cette date.
Elle produit également :
- un contrat de cession de créances en date du 10 février 2021 passé entre la société Caixa Geral de Depositos et la société Solidia Invest désignant les deux créances cédées en vertu des prêts n° (...) 993001 et n° (...) 993002 pour les montants respectifs de 480 000 euros et 480 000 euros consentis par elle à la SCI Asimov Participation
- un contrat de cession de créances en date du 8 mars 2021 passé entre la société Solidia Invest et la SCI Pilare désignant les créances cédées de la même façon que ci-dessus
- le relevé de son compte courant ouvert à la BNP Paribas faisant apparaître au débit de son compte la somme de 700 000 euros au titre d'un virement émis 'motif Solidia Invest' le 29 mars 2021, ainsi que l'ordre de virement correspondant portant la date de valeur du 26 mars 2021
- trois relevés du compte courant ouvert à la banque Delubac & Cie par la société TK Investment faisant apparaître au débit du compte au titre de virements émis en faveur de Solidia Invest SCI Pilare les sommes de 100 000 euros le 22 mars 2021, 50 000 euros le 24 mars 2021 et 10 000 euros le 1er avril 2021, ainsi que les ordres de virement correspondants
- un détail du passif de la SCI Pilare faisant apparaître au 31 décembre 2021 un compte d'associé de la société TK Investment d'un montant de 194 850 euros
- deux documents intitulés 'notification de cession de créances' datés du 19 avril 2021 adressés à la SCI Asimov Participation et à M. [I], leur indiquant que la société Solidia Invest est désormais leur seul créancier, que le montant total intégralement exigible à la suite du prononcé de la déchéance du terme des deux prêts s'élève à la somme de
930 503,59 euros au 24 août 2021(ou plutôt 2020) et que tout paiement devra être effectué exclusivement entre ses mains
- la signification à M. [I] par actes d'huissier du 5 mai 2021 de la copie du contrat de cession de créances signé le 5 mai 2021 et de celle du contrat de cession de créances signé le 8 mars 2021
- une attestation de cession de créances résultant des deux prêts ci-dessus établie le 7 mai 2021 par la société Caixa Geral de Depositos en faveur de la société Solidia Invest
- une attestation de cession de créances résultant des deux prêts ci-dessus établie le 12 novembre 2021 par la société Solidia Invest en faveur de la SCI Pilare.
Le contrat de cession de créance entre la société Caixa Geral de Depositos et la société Solidia Invest du 10 février 2021 stipule à l'article 4 que la société Solidia règle à la société cédante à titre de prix de cession des créances définies au présent contrat XXX (espace laissé en blanc) à titre forfaitaire et définitif et à l'article 5 que la cession de créances prendra effet et le transfert de la propriété de créances interviendra dès l'encaissement définitif de la somme de XXX (espace laissé en blanc) par la société cédante et que la société Solidia sera alors seule titulaire des créances cédées.
Le contrat de cession de créance entre la société Solidia Invest et la SCI Pilare du 8 mars 2021 stipule aux articles 4 et 5 que le prix de cession des créances est fixé à la somme de 860 000 euros à titre forfaitaire et définitif, qui sera payée en deux versements sur le compte de la société cédante, le premier de 150 000 euros effectué avant le 15 mars 2021, le second de 710 000 euros effectué avant le 31 mars 2021, que la cession de créances prendra effet et le transfert de la propriété de créances interviendra dès l'encaissement définitif de la somme de 860 000 euros par la société cédante et que la société Pilare sera alors seule titulaire des créances cédées.
Il n'est pas rapporté la preuve du paiement par la société Solidia Invest à la société Caixa Geral de Depositos du montant de la créance de cette dernière sur la SCI Asimov Participation, s'élevant à la suite de la déchéance du terme des deux prêts à la somme de 930 503,59 euros ou du montant de la créance convenue entre les parties dont le montant a été masqué, d'autant plus que la Caixa Geral de Depositos ne s'est pas prévalue de la déchéance du terme concernant le second prêt n° (...) 993002 avant la cession de créance invoquée, mais que c'est la SCI Pilare qui a notifié à la SCI Asimov Participation la déchéance du terme de ce prêt , par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 mai 2021.
Dès lors, rien ne démontre que la somme de 700 000 euros versée à la société Solidia Invest et les sommes d'un total de 160 000 euros débitées du compte de la société TK Investment en faveur de la société Solidia Invest étaient destinées au rachat d'une créance qui aurait été effectivement cédée par la société Caixa Geral de Depositos à la société Solidia Invest, étant observé que la SCI Pilare invoque dans ses conclusions l'existence de conventions de trésorerie entre la société TK Investment et d'autres sociétés dans lesquels le gérant de la SCI Asimov Participation est également associé.
Par ailleurs, dans sa notification du 19 avril 2021, la société Solidia Invest se déclare seule créancière de la SCI Asimov Participation et de M. [I] alors que, selon les actes ci-dessus, elle avait antérieurement cédé sa créance à la SCI Pilare le 8 mars 2021, que la SCI Pilare affirme qu'elle avait déjà payé l'intégralité du prix de cession et que cette dernière ne s'était pas encore prévalue de la déchéance du terme à l'égard du débiteur principal.
Enfin, la SCI Pilare qui se prévaut de la cession de la créance initiale de la banque Caixa Geral de Depositos au profit de la société Solidia Invest puis à son profit, a pour associé M. [B], lequel détient un compte courant dans la SCI Pilare.
M. [B] est également l'associé et le gérant de la SCI Asimov Participation, débiteur principal, qui n'a pas remboursé les deux prêts litigieux, et la caution solidaire du remboursement de ces deux prêts par la SCI Asimov Participation à même hauteur que M. [I].
Au vu de l'ensemble de ces éléments, la SCI Pilare ne justifie pas de son droit à se prévaloir à l'encontre de M. [I] du bénéfice des cessions de créances invoquées et donc de créances certaines et exigibles constatées par un titre exécutoire.
Compte-tenu des dispositions de l'article L111-2 du code des procédures civiles d'exécution, elle ne pouvait dès lors en poursuivre l'exécution forcée.
Il convient d'ordonner la mainlevée des deux saisies de compte courant d'associé pratiquées pour paiement de la somme de 642 069,03 euros aux frais de la SCI Pilare.
Il n'appartient pas au juge de l'exécution de statuer sur la fraude invoquée, alors que le juge du fond est saisi de la question de la validité des cessions de créance litigieuses.
Il n'y a pas lieu d'examiner la demande en paiement de la somme de 624 000 euros à titre de dommages et intérêts présentée par M. [I], la cour n'ayant pas à statuer sur des prétentions qui ne sont soutenues par aucun moyen développé dans le corps des conclusions, en application de l'article 954 du code de procédure civile.
Compte-tenu de la solution apportée au litige, chacune des parties conserve la charge de ses dépens de première instance et d'appel.
Le jugement est infirmé en ce qu'il a condamné M. [I] à payer à la SCI Pilare une indemnité de procédure et cette demande est rejetée.
Les demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :
CONFIRME le jugement en ce qu'il a déclaré recevables les demandes en annulation et en mainlevée formées par M. [I] et en ce qu'il a déclaré valables les quatre saisies de compte-courant d'associé et de droits d'associé pratiquées le 7 septembre 2023 entre les mains des sociétés Partagas Participation et Hupman Invest, pour paiement des sommes de 382 493,92 euros et de 382 518,39 euros
INFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions
Statuant à nouveau,
PRONONCE la mainlevée des deux saisies de compte courant d'associé pratiquées le 7 septembre 2023 entre les mains des sociétés Partagas Participation et Hupman Invest pour paiement de la somme de 642 069,03 euros, aux frais de la SCI Pilare
DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel
REJETTE la demande de la SCI Pilare fondée sur l'article 700 du code de proécdure civile en première instance
REJETTE les demandes respectives des parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
Décision du
Juge de l'exécution de LYON
Au fond
du 12 mars 2024
RG : 23/08440
[I]
C/
S.C.I. PILARE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
6ème Chambre
ARRET DU 20 Mars 2025
APPELANT :
M. [L] [I]
né le [Date naissance 2] 1981 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Gérard BENOIT de la SELARL BENOIT - LALLIARD - ROUANET, avocat au barreau de LYON, toque : 505
INTIMEE :
S.C.I. PILARE
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Florian DESBOS de la SCP DESBOS BAROU & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1726
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Date de clôture de l'instruction : 04 Février 2025
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 11 Février 2025
Date de mise à disposition : 20 Mars 2025
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Joëlle DOAT, présidente
- Evelyne ALLAIS, conseillère
- Stéphanie ROBIN, conseillère
assistées pendant les débats de Cécile NONIN, greffière
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Cécile NONIN, greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES
Par acte notarié en date du 17 janvier 2018, la société Caixa Geral de Depositos a consenti à la société civile immobilière (SCI) Asimov Participation un prêt d'un montant de 480 000 euros.
L'acte notarié contient les cautions personnelles, solidaires et indivisibles à hauteur de
312 000 euros chacun de M. [B] gérant et associé de la SCI Asimov Participation et de M. [I], associé de ladite SCI.
Par acte notarié en date du 31 mai 2018, la SCI Asimov Participation a acquis un local commercial et la société Caixa Geral de Depositos lui a consenti un prêt d'un montant de
480 000 euros.
L'acte notarié de prêt contient les cautions personnelles, solidaires et indivisibles de M. [B] et de M. [O] [I], à hauteur de 312 000 euros chacun.
Par actes en date du 5 mai 2021, la SCI Pilare a signifié à M. [I] deux contrats de cession de créances, le premier signé le 10 février 2021 entre la société Caixa Geral de Depositos et la société Solidia Invest contenant cession des créances détenues par la société Caixa Geral de Depositos à l'encontre de la SCI Asimov Participation et le second signé le 8 mars 2021 entre la société Solidia Invest et la société civile immobilière (SCI) Pilare contenant cession des créances détenues par la société Solidia Invest à l'encontre de la SCI Asimov Participation, en vertu des deux prêts d'un montant de 480 000 euros chacun octroyés par la banque.
Par actes de commissaire de justice en date du 7 septembre 2023,SCI Pilare a fait pratiquer au préjudice de M. [L] [I] entre les mains des sociétés Partagas Participation et Hupman Invest deux saisies du compte courant d'associé détenu par celui-ci dans ces sociétés pour paiement de la somme de 642 069,03 euros.
Quatre autres saisies de compte-courant d'associé et de droits d'associé ont été pratiquées le même jour entre les mains des sociétés Partagas Participation et Hupman Invest, pour paiement des sommes de 382 493,92 euros et de 382 518,39 euros.
Les six saisies ont été dénoncées à M. [I] le 12 septembre 2023.
Par acte d'huissier en date du 12 octobre 2023, M. [I] a fait assigner la SCI Pilare devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Lyon pour s'entendre prononcer la nullité des saisies ou ordonner leur mainlevée.
Par jugement en date du 12 mars 2024, le juge de l'exécution a :
- rejeté les demandes de M. [I]
- déclaré valables les six mesures de saisie
- 'débouté la SCI Pilare du surplus de ses demandes'
- condamné M. [I] à payer à la SCI Pilare la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
M. [I] a interjeté appel de ce jugement, le 22 mars 2024.
Il demande à la cour :
- d'infirmer le jugement
statuant à nouveau,
- de juger que la fraude dont il est victime justifie que soient ordonnées la nullité et la mainlevée aux frais de la SCI Pilare des six mesures de saisie pratiquées le 7 septembre 2023
- de condamner la SCI Pilare à lui payer la somme de 624 000 euros à titre de dommages et intérêts
- de condamner la SCI Pilare à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens
- 'de débouter la SCI Pilare de l'intégralité de ses prétentions plus amples ou contraires'.
Il fait valoir en substance que :
- la SCI Asimov ayant consenti deux baux commerciaux sur des locaux lui appartenant à deux agences bancaires, respectivement la banque CIC et la banque BNP Paribas, moyennant le versement de loyers dont le montant total annuel pour les deux baux s'élève à la somme de 128 783 euros hors charges, elle avait la capacité financière de rembourser les deux prêts consentis par la société Caixa Geral de Depositos mais ces loyers ont été détournés par la société TK Investment dont le gérant est M. [B]
- il est établi que le rachat des créances des banques par la SCI Pilare avec pour intermédiaire la société Solidia Invest a été frauduleusement financé par les loyers payés par les locataires de la SCI Asimov et de la société Tarare République et détournés au profit de la SCI Pilare et de la société TK Investment
- la SCI Pilare ne justifie pas de manière probante et convaincante le paiement de la créance qu'elle a rachetée à la société Solidia Invest dont était initialement titulaire la Caixa pour un montant de 860 000 euros
- la SCI Pilare n'a donc pas qualité à agir à son encontre
- il s'est engagé en qualité de caution au profit de la société Caixa dont la créance a été cédée à la société Solidia Invest, si bien que le paiement de la société Solidia Invest à la société Caixa a éteint la dette de la société Asimov Participation et son propre cautionnement
- il a le droit d'agir en nullité absolue, bien que tiers au contrat de cession de créances, dès lors que la fraude dont il est victime a pour effet juridique qu'une action en licitation partage est initiée par la SCI Pilare à son encontre et l'acte juridique de cession entaché de fraude doit être annulé
La SCI Pilare demande à la cour :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a 'déboutée du surplus de ses demandes'
- de confirmer le jugement pour le surplus
par conséquent,
- de débouter M. [I] de ses demandes
y ajoutant,
- de condamner M. [I] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.
Elle fait valoir en substance que :
- M. [I] n'a pas d'intérêt légitime à agir en nullité de l'acte de cession de créance et ses demandes sont irrecevables
- la situation de M. [I] n'est pas affectée par la cession de créances car il reste tenu envers elle (SCI Pilare) comme il l'était envers la Caixa et il conserve son action récursoire après paiement tant contre la SCI Asimov Participation,débiteur principal, que contre M. [B], autre caution solidaire
- l'absence de conséquence pour lui de l'acte de cession de créance fait qu'il ne dispose pas d'intérêt légitime à s'opposer à cet acte
- elle déclare qu'elle produit dans le cadre de la présente procédure la preuve du paiement du prix de cession effectué au moyen de plusieurs règlements au profit de la société Solidia Invest à hauteur de la somme de 860 000 euros
- la SCI Asimov lui a réglé des sommes qui sont venues en déduction de sa dette à son égard, en sa qualité de créancière aux lieu et place de Caixa
- au 1er septembre 2023, la dette de la SCI Asimov à son égard s'élève à :
* 361 196,89 euros au titre du prêt Caixa 1 en date du 17 janvier 2018
* 379 606, 78 euros au titre du prêt Caixa 2 en date du 31 mai 2018,
soit un montant supérieur à la somme globale de 624 000 euros correspondant aux deux cautionnements de M. [I].
L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 février 2025.
SUR CE :
Le juge de l'exécution a été saisi d'une demande de nullité ou de mainlevée de six mesures de saisie de comptes courants d'associé et de droits d'associé détenus par M. [I] pratiquées le même jour.
Or, il ne ressort pas du jugement que la validité des quatre mesures de saisie dont il est mentionné qu'elles sont effectuées en vertu d'une grosse notariée exécutoire d'un acte de vente avec prêt en date du 23 décembre 2010, pour paiement des sommes de 382 493,92 euros et de 382 518,39 euros, a été remise en cause devant le juge de l'exécution.
Devant la cour, aucun moyen n'est soulevé pour critiquer ces quatre saisies et l'acte de prêt du 23 décembre 2010 visé aux actes n'est pas produit par M. [I], auteur de la contestation.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement qui a déclaré que ces quatre saisies étaient valables.
Sur la recevabilité des demandes de M. [I]
La SCI Pilare reprend devant la cour la fin de non recevoir rejetée par le premier juge, tirée de l'absence d'intérêt légitime de M. [I] à agir en nullité de l'acte de cession de créance, soutenant que ce dernier étant tiers au contrat de créance, il ne peut en invoquer la nullité et que, par ailleurs, il ne justifie pas de la prétendue fraude qu'il invoque.
Les procès-verbaux des saisies pratiquées le 7 septembre 2023 du compte-courant d'associé entre les mains de la société Partagas Participation et du compte-courant d'associé entre les mains de la société Hupman Invest pour paiement de la somme de 642 069,03 euros mentionnent que la SCI Pilare déclare agir en vertu d'un contrat de rachat de prêt établi par acte notarié revêtu de la formule exécutoire en date du 17 janvier 2018 contenant cautionnement signé par M. [I], d'un acte de vente contenant prêt établi par acte notarié revêtu de la formule exécutoire en date du 31 mai 2018 contenant cautionnement signé par M. [I], d'une cession de créance au profit de la société Solidia Invest en date du 10 février 2021, d'une seconde cession au profit de la SCI Pilare en date du 8 mars 2021, toutes deux précédemment notifiées et d'un arrêt rendu par la cour d'appel de Lyon le 10 novembre 2022 définitif.
M. [I] qui conteste la validité des saisies de deux de ses comptes-courants d'associé pratiquées sur le fondement de deux actes de cession de créances a intérêt à critiquer l'opposabilité à son égard desdits actes.
C'est à juste titre que le juge de l'exécution a déclaré son action en contestation recevable, sauf à préciser qu'elle est limitée à la contestation des deux saisies ci-dessus énoncées.
Sur la demande en nullité des deux saisies
L'article 1321 du code civil modifié par l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 applicable à la date des contrats de prêt litigieux énonce que la cession de créance est un contrat par lequel le créancier cédant transmet, à titre onéreux ou gratuit, tout ou partie de sa créance contre le débiteur cédé à un tiers appelé le cessionnaire, qu'elle peut porter sur une ou plusieurs créances présentes ou futures, déterminées ou déterminables, qu'elle s'étend aux accessoires de la créance et que le consentement du débiteur n'est pas requis, à moins que la créance ait été stipulée incessible.
La cession d'une créance comprend les accessoires de celle-ci, tels que caution, privilège et hypothèque, ce dont il résulte que ce transfert s'opère de plein droit, même si l'acte de cession ne le précise pas.
L'article 1324 dispose que la cession n'est opposable au débiteur, s'il n'y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s'il en a pris acte.
Le débiteur peut opposer au cessionnaire les exceptions inhérentes à la dette, telles que la nullité, l'exception d'inexécution, la résolution ou la compensation des dettes connexes. Il peut également opposer les exceptions nées de ses rapports avec le cédant avant que la cession lui soit devenue opposable, telles que l'octroi d'un terme, la remise de dette ou la compensation de dettes non connexes.
Selon l'article 2313 du code civil dans sa version en vigueur à la date des contrats, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette, mais elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur.
Par acte notarié en date du 17 janvier 2018, M. [I] s'est porté caution solidaire de l'emprunteur, la SCI Asimov Participation, du remboursement d'un prêt professionnel d'un montant de 480 000 euros consenti par la Caixa Geral de Depositos Banque, à hauteur de la somme de 312 000 euros couvrant le montant du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard.
Par acte notarié en date du 31 mai 2018, M. [I] s'est porté caution solidaire de l'emprunteur, la SCI Asimov Participation, du remboursement d'un prêt immobilier d'un montant de 480 000 euros consenti par la Caixa Geral de Depositos Banque, à hauteur de la somme de 312 000 euros couvrant le montant du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard.
Le 24 juillet 2020, la banque Caixa Geral de Depositos a mis en demeure la SCI Asimov Participation d'avoir à lui payer la somme de 19 831,86 euros en principal au titre des échéances du prêt n° (...) 993002 non réglées depuis le mois de février 2020, sous quinze jours, délai passé lequel elle prononcerait la déchéance du terme.
Le 7 août 2020, la banque a informé M. [I] de la défaillance de la SCI Asimov et de la déchéance du terme dudit prêt n° (...) 993002 encourue faute de régularisation des échéances impayées dans le délai de quinze jours.
Le 7 août 2020, la banque a mis en demeure la SCI Asimov d'avoir à lui payer la somme de 26 677,70 euros en principal au titre des échéances non réglées du prêt n° (...) 993001 depuis le mois de janvier 2020, sous quinze jours, délai passé lequel elle prononcerait la déchéance du terme.
Le 7 août 2020, la banque a informé M. [I] de la défaillance de la SCI Asimov et de la déchéance du terme encourue faute de régularisation des échéances impayées dans le délai de quinze jours.
La SCI Pilare produit la lettre de notification de la déchéance du terme adressée le 24 août 2020 par la banque à la SCI Asimov Participation en ce qui concerne le prêt n° (...) 993001 et la mise en demeure d'avoir à lui payer la somme de 454 450,32 euros dûe à cette date.
Elle produit également :
- un contrat de cession de créances en date du 10 février 2021 passé entre la société Caixa Geral de Depositos et la société Solidia Invest désignant les deux créances cédées en vertu des prêts n° (...) 993001 et n° (...) 993002 pour les montants respectifs de 480 000 euros et 480 000 euros consentis par elle à la SCI Asimov Participation
- un contrat de cession de créances en date du 8 mars 2021 passé entre la société Solidia Invest et la SCI Pilare désignant les créances cédées de la même façon que ci-dessus
- le relevé de son compte courant ouvert à la BNP Paribas faisant apparaître au débit de son compte la somme de 700 000 euros au titre d'un virement émis 'motif Solidia Invest' le 29 mars 2021, ainsi que l'ordre de virement correspondant portant la date de valeur du 26 mars 2021
- trois relevés du compte courant ouvert à la banque Delubac & Cie par la société TK Investment faisant apparaître au débit du compte au titre de virements émis en faveur de Solidia Invest SCI Pilare les sommes de 100 000 euros le 22 mars 2021, 50 000 euros le 24 mars 2021 et 10 000 euros le 1er avril 2021, ainsi que les ordres de virement correspondants
- un détail du passif de la SCI Pilare faisant apparaître au 31 décembre 2021 un compte d'associé de la société TK Investment d'un montant de 194 850 euros
- deux documents intitulés 'notification de cession de créances' datés du 19 avril 2021 adressés à la SCI Asimov Participation et à M. [I], leur indiquant que la société Solidia Invest est désormais leur seul créancier, que le montant total intégralement exigible à la suite du prononcé de la déchéance du terme des deux prêts s'élève à la somme de
930 503,59 euros au 24 août 2021(ou plutôt 2020) et que tout paiement devra être effectué exclusivement entre ses mains
- la signification à M. [I] par actes d'huissier du 5 mai 2021 de la copie du contrat de cession de créances signé le 5 mai 2021 et de celle du contrat de cession de créances signé le 8 mars 2021
- une attestation de cession de créances résultant des deux prêts ci-dessus établie le 7 mai 2021 par la société Caixa Geral de Depositos en faveur de la société Solidia Invest
- une attestation de cession de créances résultant des deux prêts ci-dessus établie le 12 novembre 2021 par la société Solidia Invest en faveur de la SCI Pilare.
Le contrat de cession de créance entre la société Caixa Geral de Depositos et la société Solidia Invest du 10 février 2021 stipule à l'article 4 que la société Solidia règle à la société cédante à titre de prix de cession des créances définies au présent contrat XXX (espace laissé en blanc) à titre forfaitaire et définitif et à l'article 5 que la cession de créances prendra effet et le transfert de la propriété de créances interviendra dès l'encaissement définitif de la somme de XXX (espace laissé en blanc) par la société cédante et que la société Solidia sera alors seule titulaire des créances cédées.
Le contrat de cession de créance entre la société Solidia Invest et la SCI Pilare du 8 mars 2021 stipule aux articles 4 et 5 que le prix de cession des créances est fixé à la somme de 860 000 euros à titre forfaitaire et définitif, qui sera payée en deux versements sur le compte de la société cédante, le premier de 150 000 euros effectué avant le 15 mars 2021, le second de 710 000 euros effectué avant le 31 mars 2021, que la cession de créances prendra effet et le transfert de la propriété de créances interviendra dès l'encaissement définitif de la somme de 860 000 euros par la société cédante et que la société Pilare sera alors seule titulaire des créances cédées.
Il n'est pas rapporté la preuve du paiement par la société Solidia Invest à la société Caixa Geral de Depositos du montant de la créance de cette dernière sur la SCI Asimov Participation, s'élevant à la suite de la déchéance du terme des deux prêts à la somme de 930 503,59 euros ou du montant de la créance convenue entre les parties dont le montant a été masqué, d'autant plus que la Caixa Geral de Depositos ne s'est pas prévalue de la déchéance du terme concernant le second prêt n° (...) 993002 avant la cession de créance invoquée, mais que c'est la SCI Pilare qui a notifié à la SCI Asimov Participation la déchéance du terme de ce prêt , par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 mai 2021.
Dès lors, rien ne démontre que la somme de 700 000 euros versée à la société Solidia Invest et les sommes d'un total de 160 000 euros débitées du compte de la société TK Investment en faveur de la société Solidia Invest étaient destinées au rachat d'une créance qui aurait été effectivement cédée par la société Caixa Geral de Depositos à la société Solidia Invest, étant observé que la SCI Pilare invoque dans ses conclusions l'existence de conventions de trésorerie entre la société TK Investment et d'autres sociétés dans lesquels le gérant de la SCI Asimov Participation est également associé.
Par ailleurs, dans sa notification du 19 avril 2021, la société Solidia Invest se déclare seule créancière de la SCI Asimov Participation et de M. [I] alors que, selon les actes ci-dessus, elle avait antérieurement cédé sa créance à la SCI Pilare le 8 mars 2021, que la SCI Pilare affirme qu'elle avait déjà payé l'intégralité du prix de cession et que cette dernière ne s'était pas encore prévalue de la déchéance du terme à l'égard du débiteur principal.
Enfin, la SCI Pilare qui se prévaut de la cession de la créance initiale de la banque Caixa Geral de Depositos au profit de la société Solidia Invest puis à son profit, a pour associé M. [B], lequel détient un compte courant dans la SCI Pilare.
M. [B] est également l'associé et le gérant de la SCI Asimov Participation, débiteur principal, qui n'a pas remboursé les deux prêts litigieux, et la caution solidaire du remboursement de ces deux prêts par la SCI Asimov Participation à même hauteur que M. [I].
Au vu de l'ensemble de ces éléments, la SCI Pilare ne justifie pas de son droit à se prévaloir à l'encontre de M. [I] du bénéfice des cessions de créances invoquées et donc de créances certaines et exigibles constatées par un titre exécutoire.
Compte-tenu des dispositions de l'article L111-2 du code des procédures civiles d'exécution, elle ne pouvait dès lors en poursuivre l'exécution forcée.
Il convient d'ordonner la mainlevée des deux saisies de compte courant d'associé pratiquées pour paiement de la somme de 642 069,03 euros aux frais de la SCI Pilare.
Il n'appartient pas au juge de l'exécution de statuer sur la fraude invoquée, alors que le juge du fond est saisi de la question de la validité des cessions de créance litigieuses.
Il n'y a pas lieu d'examiner la demande en paiement de la somme de 624 000 euros à titre de dommages et intérêts présentée par M. [I], la cour n'ayant pas à statuer sur des prétentions qui ne sont soutenues par aucun moyen développé dans le corps des conclusions, en application de l'article 954 du code de procédure civile.
Compte-tenu de la solution apportée au litige, chacune des parties conserve la charge de ses dépens de première instance et d'appel.
Le jugement est infirmé en ce qu'il a condamné M. [I] à payer à la SCI Pilare une indemnité de procédure et cette demande est rejetée.
Les demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :
CONFIRME le jugement en ce qu'il a déclaré recevables les demandes en annulation et en mainlevée formées par M. [I] et en ce qu'il a déclaré valables les quatre saisies de compte-courant d'associé et de droits d'associé pratiquées le 7 septembre 2023 entre les mains des sociétés Partagas Participation et Hupman Invest, pour paiement des sommes de 382 493,92 euros et de 382 518,39 euros
INFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions
Statuant à nouveau,
PRONONCE la mainlevée des deux saisies de compte courant d'associé pratiquées le 7 septembre 2023 entre les mains des sociétés Partagas Participation et Hupman Invest pour paiement de la somme de 642 069,03 euros, aux frais de la SCI Pilare
DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel
REJETTE la demande de la SCI Pilare fondée sur l'article 700 du code de proécdure civile en première instance
REJETTE les demandes respectives des parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE