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Cass. com., 2 avril 2025, n° 23-15.214

COUR DE CASSATION

Autre

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Thiolat développement (SA)

Défendeur :

Directeur général des finances publiques

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ponsot

Rapporteur :

M. Maigret

Avocats :

SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Foussard et Froger

Cass. com. n° 23-15.214

1 avril 2025

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 19 avril 2023), un juge des libertés et de la détention a rendu, le 13 mai 2022, sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, une ordonnance autorisant des opérations de visite et saisie dans les locaux et dépendances sis [Adresse 2] à [Localité 7], susceptibles d'être occupés par la société de droit luxembourgeois Thiolat développement, en vue de rechercher la preuve d'une fraude fiscale de cette société au regard de l'impôt sur les bénéfices et de la taxe sur le chiffre d'affaires, ainsi que des infractions d'achats ou ventes sans factures et d'omissions d'écritures comptables ou de passations d'écritures comptables inexactes ou fictives.

2. Le juge des libertés a précisé, dans son ordonnance, que celle-ci sera réputée caduque si elle n'est pas exécutée avant le 13 juin 2022.

3. Le 13 juin 2022, le juge des libertés et de la détention a rendu une ordonnance dans laquelle il a prolongé l'effet de l'ordonnance délivrée le 13 mai 2022, du 13 mai au 30 juin 2022, et les opérations de visite et de saisie se sont déroulées le 14 juin 2022.

4. La société Thiolat développement a interjeté appel des deux ordonnances du juge des libertés et de la détention rendues les 13 mai et 13 juin 2022.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La société Thiolat développement fait grief à l'ordonnance de confirmer et déclarer régulières les ordonnances rendues par le juge des libertés et de la détention les 13 mai et 13 juin 2022, déclarer régulières les opérations de visite et de saisie réalisées au [Adresse 1] à [Localité 7] le 14 juin 2022, et de rejeter toutes autres demandes, alors :

« 1°/ que la société Thiolat développement faisait valoir que l'ordonnance du 13 mai 2022, qui n'autorise "qu'une visite unique des lieux désignés sera réputée caduque si elle n'est pas exécutée avant le 13 juin 2022", a fixé ainsi une date de caducité, qui expirait le 12 à 24 h 00, qu'à cette date, faute d'exécution de la visite unique des lieux autorisés par le juge des libertés et de la détention l'ordonnance était caduque, ce dont il s'évinçait que la demande de prorogation faite le 13 juin 2022 n'était pas recevable ; qu'ayant relevé que le JLD a prévu dans son ordonnance du 13 mai 2022 que celle-ci devait être exécutée avant le 13 juin 2022 puis retenu que le fait de déclarer l'ordonnance caduque à l'expiration du délai n'exclut pas l'application des articles 640 à 642 du code de procédure civile concernant la computation des délais, que l'article 642 alinéa 2 prévoit que lorsqu'un délai expire un samedi, un dimanche ou en jour férié, il est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable, qu'il résulte d'une jurisprudence constante que la règle formulée par l'alinéa 2 s'applique à la notification de tous actes juridiques et judiciaires, quelle que soit la qualification du délai, pour en déduire que l'article susvisé s'applique à l'ordonnance du JLD qui est une décision judiciaire et qui ne relève pas d'une procédure administrative comme le prétend la partie appelante, quand la mesure de visite et de saisie devait être exécutée avant la date ultime fixée par le JLD, laquelle excluait de ce fait toute prorogation, et non un délai au terme duquel l'ordonnance deviendrait caduque, la conseillère délégataire du premier président a violé l'article 642 alinéa 2 du code de procédure civile ;

2°/ que la société Thiolat développement faisait valoir que l'ordonnance du 13 mai 2022, qui n'autorise "qu'une visite unique des lieux désignés sera réputée caduque si elle n'est pas exécutée avant le 13 juin 2022", a fixé ainsi une date de caducité, qui expirait le 12 à 24 h 00, qu'à cette date, faute d'exécution de la visite unique des lieux autorisés par le juge des libertés et de la détention l'ordonnance était caduque, ce dont il s'évinçait que la demande de prorogation faite le 13 juin 2022 n'était pas recevable ; qu'ayant relevé que le JLD a prévu dans son ordonnance du 13 mai 2022 que celle-ci devait être exécutée avant le 13 juin 2022 puis retenu que le fait de déclarer l'ordonnance caduque à l'expiration du délai n'exclut pas l'application des articles 640 à 642 du code de procédure civile concernant la computation des délais, que l'article 642 alinéa 2 prévoit que lorsqu'un délai expire un samedi, un dimanche ou en jour férié, il est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable, qu'il résulte d'une jurisprudence constante que la règle formulée par l'alinéa 2 s'applique à la notification de tous actes juridiques et judiciaires, quelle que soit la qualification du délai, pour en déduire que l'article susvisé s'applique à l'ordonnance du JLD qui est une décision judiciaire et qui ne relève pas d'une procédure administrative comme le prétend la partie appelante quand ladite ordonnance se contentait de fixer une date d'exécution de la mesure autorisée, ce qui ne constituait pas une notification d'un acte ou d'une décision judiciaire et n'en imposait aucune, la conseillère délégataire du premier président de la cour d'appel de Paris qui se prononce par des motifs inopérants a violé l'article 642, alinéa 2, du code de procédure civile ;

3°/ que la cassation de l'arrêt sur les deux premières branches entraînera la cassation de l'arrêt en ce qu'il a décidé par voie de conséquence que l'ordonnance de prorogation du 13 juin 2022 est régulière ainsi que les opérations de visite et de saisie par application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Aux termes de l'article 640 du code de procédure civile, lorsqu'un acte ou une formalité doit être accompli avant l'expiration d'un délai, celui-ci a pour origine la date de l'acte, de l'événement, de la décision ou de la notification qui le fait courir.

7. Aux termes de l'article 642, alinéa 2, du même code, le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.

8. Il en résulte qu'en prévoyant une date avant laquelle son ordonnance autorisant des opérations de visites et de saisies, prise sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédure fiscales, doit être exécutée sous peine de caducité, le juge des libertés et de la détention fixe, pour un acte qu'il ordonne, le délai avant l'expiration duquel celui-ci doit être accompli, et que ce dernier, conformément à l'article 642, alinéa 2, du code de procédure civile, s'il expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.

9. C'est dès lors à bon droit que le premier président a retenu que le juge des libertés et de la détention a pu, par une ordonnance non frappée de caducité, le 13 juin 2022, prolonger au 30 juin suivant les effets de son ordonnance du 13 mai 2022, de sorte que les opérations de visite et de saisie ont pu être exécutées le 14 juin 2022.

10. Le moyen, qui en sa deuxième branche, critique des motifs surabondants, et, en sa troisième branche, est sans objet, n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Thiolat développement aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Thiolat développement et la condamne à payer au directeur général des finances publiques, représenté par l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction nationale des enquêtes fiscales, la somme de 3 000 euros ;

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