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Décisions

CA Rennes, 3e ch. com., 1 avril 2025, n° 24/02684

RENNES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Beer Invest (SAS), HDDB (SARL)

Défendeur :

Legeay Mary (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Contamine

Vice-président :

Mme Clément

Conseiller :

Mme Ramin

Avocats :

Me Verrando, Me Le Goc, Me Audegond, Me Dirickx

TJ Rennes, du 28 janv. 2025, n° R22-19.2…

28 janvier 2025

FAITS ET PROCEDURE :

La société HDDB exploite un établissement de débit de boissons spécialisé dans la bière artisanale, sous l'enseigne 'La capsule', à [Localité 6] (59).

La société Beer Invest est la société holding de la société HDDB.

Le 20 janvier 2015, la société HDDB a déposé auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (l'INPI), pour des produits et services relevant des classes 32 et 43 (bières et services de bars) la marque ' la capsule' n°154149873.

Le 11 juin 2015, la société HDDB a déposé auprès de l'INPI la marque semi figurative 'la Capsule' sous le numéro 4188080 pour les biens et services des classes 32 et 43 (Bières; Services de restauration (alimentation) ; services de bars) :

Cette marque a été transmise à la société Beer Invest le 14 juin 2022.

Le 25 juillet 2019, la société Beer Invest a déposé la marque semi-figurative 'la Capsule' sous le numéro 4570690.

Depuis le 7 juillet 2017, la société La Capsule maltée, devenue société Legeay-Mary, exploite un débit de boissons situe à [Localité 3] (49), sous l'enseigne 'la Capsule maltée'. Le 7 juillet 2007, elle a déposé auprès de l'INPI la marque semi-figurative 'la Capsule maltée' n°4374624 pour les classes de produit et services 32, 3-3 et 43 :

Le 12 avril 2018, la société HDDB a assigné la société La Capsule maltée en annulation de la marque semi-figurative « La Capsule maltée » pour défaut de distinctivité et en paiement de dommages-intérêts pour contrefaçon et parasitisme. La société La Capsule maltée a reconventionnellement demandé l'annulation de la marque verbale « La Capsule » et de la marque semi-figurative « La Capsule » pour défaut de distinctivité.

Par jugement du 2 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Rennes a :

- Débouté la société La Capsule maltée de sa demande en nullité de la marque verbale n° 4149873 « la capsule » et de la marque semi-figurative n° 4188080 « La Capsule » pour défaut de distinctivite,

- Débouté la société HDDB de sa demande en nullité de la marque semi-figurative n° 4374624 « la capsule maltée » pour atteinte à ses droits antérieurs,

- Débouté la société HDDB de ses demandes fondées sur la contrefaçon,

- Débouté la société HDDB de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme économique,

- Condamné la société HDDB à payer à la société La Capsule maltée la somme de 3.000 euros à titre de dommages et interêts pour procédure abusive,

- Condamné la société HDDB à payer à la société La Capsule maltée la somme de 7.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la société HDDB aux depens,

- Ordonné l'exécution provisoire.

Par arrêt du 17 mai 2022, la cour d'appel de Rennes a :

- Infirmé le jugement, sauf en ce qu'il a déboute la societe HDDB de ses demandes au titre du parasitisme économique,

Statuant à nouveau des chefs du jugement infirmés :

- Prononcé la nullité de l'enregistrement de la marque semi- figurative « la capsule maltée » déposée le 7 juillet 2017 sous le n° 4374624, en classes 32 (bières), 33 (boissons alcoolisées) et 43 (services de bar),

- Dit que le jugement sera transmis à l'INPI par la societe HDDB, aux fins d'inscription au registre national des marques,

- Condamné la société La Capsule maltée à payer à la société HDDB la somme de 2.000 euros au titre du préjudice moral résultant de la contrefaçon de la marque « La Capsule »,

- Condamné la société La Capsule maltée, à cesser, sous astreinte, l'usage des termes associés « La Caspule », sous quelque forme que ce soit y compris pour toutes communications et publicités, qu'elles soient physiques ou immatérielles et au titre de dénomination sociale,

- Ordonné la publication d'extraits de l'arrêt dans deux journaux quotidiens ou hebdomadaires nationaux du choix de la société HDDB, aux frais de la société La Capsule maltée,

- Débouté la société La Capsule maltée de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la société la Capsule maltée à payer à la société HDDB la somme de 8.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Dit que l'obligation de restituer les sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement résulte de plein droit de son infirmation et dit en conséquence n'y avoir lieu à ordonner leur restitution,

- Condamné la société La Capsule Maltée aux dépens de première instance et d'appel.

Par arrêt du 10 janvier 2024, la Cour de cassation a cassé partiellement l'arrêt :

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 17 mai 2022), la société HDDB, qui exploite un établissement de débit de boissons spécialisé dans la bière artisanale, sous l'enseigne « La capsule », à Lille, est titulaire de la marque verbale française « la capsule », déposée le 20 janvier 2015 sous le numéro 154149873 pour désigner des produits et services relevant des classes 32 et 43 (bières et services de bars).

2. Depuis le 7 juillet 2017, la société La Capsule maltée exploite un débit de boissons situé à [Localité 3], sous l'enseigne « la Capsule maltée ». Elle a déposé auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) la marque semi-figurative « la Capsule maltée » n° 4374624 pour désigner des produits et services en classes 32, 33 et 43.

3. Le 12 avril 2018, la société HDDB a assigné la société La Capsule maltée en annulation de sa marque « la capsule maltée » et en contrefaçon.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. La société La Capsule maltée fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité de l'enregistrement de la marque semi figurative « La Capsule maltée » déposé le 7 juillet 2017, de la condamner à verser à la société HDDB la somme de 2 000 euros au titre du préjudice moral résultant de la contrefaçon de la marque « La Capsule », de la condamner à cesser l'usage des termes associés « La Capsule », d'ordonner la publication d'extraits de l'arrêt et de rejeter sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, alors « que dans le cadre de l'examen de l'existence d'un risque de confusion, l'appréciation de la similitude entre deux signes ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d'une marque complexe et à le comparer avec une autre marque, que l'appréciation globale du risque de confusion pouvant résulter des similitudes entre les signes en présence doit, lors de l'examen de chaque aspect pertinent de ces similitudes, qu'elles soient visuelles, phonétiques ou conceptuelles, se fonder sur l'impression d'ensemble produite par ces signes, et ne peut être menée sur la seule base d'un élément dominant qu'à la condition que tous les autres composants de la marque soient négligeables, qu'en ne prenant en compte, pour apprécier l'existence d'un risque de confusion, et notamment pour identifier l'existence d'une similitude visuelle, que le syntagme nominal "La capsule" qu'elle tenait pour dominant, et en refusant de prendre en compte l'élément figuratif, jugé secondaire, sans constater que cet élément pouvait être tenu pour négligeable, la cour d'appel a violé les articles L. 711-4, L. 713-3 et L. 714-3 du code de la propriété intellectuelle, pris en leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2109-1169 du 13 novembre 2019, et interprétés la lumière de l'article 4 de la directive n° 2008/95/CE rapprochant les législations des États membres sur les marques.»

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 711-4, L. 713-3 et L. 716-1 du code de la propriété intellectuelle, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019 :

5. Il résulte du premier de ces textes que ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à une marque antérieure enregistrée et du deuxième, qu'il y a imitation de la marque, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public. Il résulte du troisième que la violation des interdictions prévues à l'article L. 713-3 constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur.

6. L'appréciation globale du risque de confusion pouvant résulter des similitudes entre les signes en présence doit, lors de l'examen de chaque aspect pertinent de ces similitudes, qu'elles soient visuelles, phonétiques ou conceptuelles, se fonder sur l'impression d'ensemble produite par ces signes, et ne peut être menée sur la seule base d'un élément dominant qu'à la condition que tous les autres composants de la marque soient négligeables.

7. Pour retenir l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du public entre les marques en présence, résultant d'une similitude entre celles-ci et, par conséquent, annuler la marque « La Capsule maltée » et condamner la société La Capsule maltée au titre de la contrefaçon, l'arrêt relève, d'abord, que la présence dans les deux marques des termes « La capsule » leur confère une proximité visuelle et phonétique, renforcée par la position d'attaque de ce terme dans la marque incriminée et par le fait que l'adjectif « maltée », bien qu'en lettres capitales, est en position inférieure et de moindre longueur.

8. Il retient, ensuite, que si les signes diffèrent du fait de la présence d'un élément figuratif représentant une gélule de médicament coiffée d'un casque de motard, tendant un pichet moussant de bière, qui surplombe les termes « la Capsule maltée », sur un fond noir représentant une capsule de bouteille, la société La Capsule maltée n'utilise pas systématiquement la police stylisée ni l'élément figuratif dans ses communications. Il en déduit que les diverses représentations de cette marque affaiblissent l'impact visuel de l'élément figuratif dans la perception du consommateur, qui sera amené à ne retenir que l'élément verbal de la marque querellée.

9. L'arrêt conclut que, compte tenu de l'élément distinctif et prépondérant que représente, dans le signe contesté, le syntagme nominal « La capsule », il s'infère de la comparaison visuelle, phonétique et conceptuelle des signes en conflit une impression d'ensemble en faveur d'une forte similitude entre eux.

10. En statuant ainsi, sans prendre en compte l'élément figuratif ni constater que cet élément pouvait être tenu pour négligeable, la cour d'appel a violé le texte précité.

Portée et conséquences de la cassation

11. L'arrêt infirmant le jugement, sauf en ce qu'il a débouté la société HDDB de ses demandes au titre du parasitisme économique, il infirme, par conséquent, le jugement qui a condamné la société HDDB à payer à la société La Capsule maltée la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

12. Cependant, si, dans ses motifs, l'arrêt indique que le jugement ne peut qu'être infirmé en ce qu'il a retenu le caractère abusif de la procédure initiée par la société HDDB et que la demande indemnitaire formée par la société La Capsule maltée sera rejetée, il omet, dans son dispositif, de se prononcer sur cette demande.

13. La cassation ne peut donc s'étendre à ce chef de demande.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule l'enregistrement de la marque semi- figurative « la Capsule maltée » déposée le 7 juillet 2017 sous le numéro 4374624, en classes 32 (bières), 33 (boissons alcoolisées) et 43 (services de bar), condamne la société La Capsule maltée à payer à la société HDDB la somme de 2 000 euros au titre du préjudice moral résultant de la contrefaçon de la marque « La Capsule », prononce des mesures d'interdiction et de publication judiciaire et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 17 mai 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes,

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée,

Les sociétés Beer Invest et HDDB ont saisi la cour de renvoi le 2 mai 2024.

Sur la recevabilité des conclusions de la société Legeay Mary :

Les sociétés Beer Invest et HDDB font valoir que les conclusions de la société Legeay Mary déposées le 1er octobre 2024 seraient irrecevables pour avoir été déposées plus de deux mois après le 2 juillet 2024, date à laquelle elles ont elles-mêmes déposé leurs conclusions.

Les dispositions de l'article 1037 du code de procédure prévoient un délai spécifique en la matière accordé aux parties qui ne sont pas les auteurs de la saisine de la cour de renvoi pour conclure.

Il est d'ailleurs à remarquer que les dispositions de l'article 905-2 ancien prévoyaient un délai d'un mois pour le dépôt des conclusions des parties qui ne sont pas les auteurs de la saisine de la cour de renvoi. Les dispositions de l'article 1037 avaient donc pour effet de leur octroyer un délai rallongé à deux mois.

Ce sont bien les dispositions de l'article 1037 qui régissent le délai dans lequel les parties adverses doivent remettre leurs conclusions à la cour. Le point de départ de ce délai n'est donc pas l'avis de fixation à bref délai, ou les premières conclusions des auteurs de la déclaration, mais la date de la notification des conclusions par l'auteur de la déclaration.

En l'espèce, la société Legeay Mary a constitué avocat devant la cour le 17 mai 2024. Elle a déposé ses premières conclusions le 1er octobre 2024 alors que les sociétés Beer Invest et HDDB lui avaient notifié leurs conclusions le 2 juillet 2024.

Ses conclusions prises hors délai devant la cour d'appel de renvoi sont irrecevables.

Elle est donc réputée s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elle avait soumis à la cour d'appel dont l'arrêt a été cassé dans ses dernières conclusions en date du 22 septembre 2020.

Les dernières conclusions des sociétés Beer Invest et HDDB sont en date du 28 novembre 2024.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 décembre 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS :

Les sociétés Beer Invest et HDDB demandent à la cour de :

- Déclarer recevable et fondée la saisine et les demandes de la société Beer Invest, venant aux droits de la société HDDB,

- Déclarer irrecevables les conclusions de l'intimé comme tardives,

Y faisant droit :

- Infirmer la décision rendu le 2 décembre 2019 par le tribunal de grande instance de Rennes en toutes ses dispositions critiquées restant en cause ensuite de la cassation intervenue et particulièrement en ce qu'il a :

- Débouté la société HDDB de sa demande en nullité de la marque semi-figurative n° 4374624 'la Capsule MALTÉE' pour atteinte à ses droits antérieurs,

- Débouté la société HDDB de ses demandes fondées sur la contrefaçon,

- Condamné la société HDDB à payer à la société La Capsule Maltée la somme de 7.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la S société HDDB aux dépens,

- Ordonné l'exécution provisoire

Et, statuant à nouveau :

- Prononcer la nullité de l'enregistrement de la marque semi figurative « la capsule maltée » déposée le 7 juillet 2017 sous le numéro 4374624 en classes 32, 33 et 43,

- Condamner la société Legeay-Mary à payer la société Beer Invest, venant aux droits de la société HDDB la somme de 25.000 euros au titre du préjudice moral résultant de la contrefaçon de la marque verbale « la Capsule »,

- Condamner la société Legeay-Mary à cesser l'usage des termes associés « la capsule « sous quelque forme que ce soit y compris pour toute communication et publicité, qu'elle soit physique ou immatérielle et au titre de dénomination sociale et ce dans le délai de 1 mois à compter de la signification de l'arrêt,

- Ordonner la publication d'extraits de l'arrêt dans 2 journaux quotidiens ou hebdomadaires régionaux du choix de la société Beer Invest, venant aux droits de la société HDDB au frais de la société Legeay-Mary,

- Fixer le coût maximum de chaque insertion à la somme de 2.000 euros hors taxes,

- Décharger la société Beer Invest des condamnations prononcées contre HDDB en principal, intérêts, frais et accessoires,

- Condamner la société Legeay-Mary à payer à la société Beer Invest, venant aux droits de la société HDDB la somme de 8.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société Legeay-Mary en tous les dépens, avec distraction au profit de l'avocat soussigné aux offres de droit.

La société Legeay-Mary demande à la cour de :

- Confirmer la décision, en ce qu'elle a débouté la société HDDB de sa demande en nullité de la marque semi-figurative n°4374624 « La Capsule Maltée » pour atteinte à ses droits antérieurs ; de ses demandes fondées sur la contrefaçon ainsi que de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et parasitaire,

- Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la société HDDB à payer à la société La Capsule maltée la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Et en conséquence :

- Condamner la société HDDB à payer à la société La Capsule maltée, la somme de 6.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- Condamner la société HDDB à payer à la société La Capsule maltée la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société HDDB aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.

DISCUSSION :

La cour n'est saisie que de la question de l'annulation de l'enregistrement de la marque semi- figurative « la Capsule maltée » déposée le 7 juillet 2017 sous le numéro 4374624, en classes 32 (bières), 33 (boissons alcoolisées) et 43 (services de bar), de la condamnation de la société La Capsule maltée à payer à la société HDDB des dommages-intérêts au titre du préjudice moral résultant de la contrefaçon de la marque « La Capsule », et du prononcé de mesures d'interdiction et de publication judiciaire outre des dépens d'appel et de l'application des dispositions de l'article 700.

La question de la condamnation éventuelle des sociétés Beer Invest et HDDB à des dommages-intérêts pour procédure abusive n'a pas été tranchée par la première cour dans le dispositif de son arrêt. La présente cour de renvoi en est donc également saisie.

Sur la nullité de la marque « La Capsule MALTÉE »

Aux termes de l'article L.714-3 du code de la propriété intellectuelle, « est déclaré nul par décision de justice l'enregistrement d'une marque qui n'est pas conforme aux dispositions des articles L.711-1 à L.711-4 ».

En vertu de l'article L711-4 précité : « ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs et notamment :

a) à une marque antérieure enregistrée ou notoirement connue au sens de l'article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, '

b) à une dénomination ou raison sociale, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public,

c) à un nom commercial ou à une enseigne connue sur l'ensemble du territoire national, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public».

Les sociétés Beer Invest et HDDB font valoir que la marque semi-figurative La Capsule Maltée serait nulle du fait d'un risque de confusion avec la marque verbale La Capsule. Elles motivent leurs demandes en comparant la marque semi-figurative La Capsule Maltée à la marque verbale La Capsule.

La marque La Capsule vise les Bières, les Services de restauration (alimentation) et les Services de bar.

La marque La Capsule maltée vise les Bières, Boissons alcoolisées et les Services de bar.

Les produits Bières sont donc identiques et les Services de bar également.

Les Services de restauration sont similaires aux Bières, Boissons alcoolisées et Services de bar auxquels ils sont associés, les services de restauration pouvant comporter un service de bar et servir ces bières et autres boissons alcoolisées.

Les Boissons alcoolisées sont similaires aux Bières qui sont le plus souvent des boissons alcoolisées.

Les biens et services des deux marques sont donc identiques ou similaires.

Les deux marques utilisent en attaque les mêmes deux mots, « La Capsule ». La marque contestée y ajoute un troisième mot, « Maltée ».

L'attaque par les deux mots « La Capsule » est, aux vu des biens et services concernés, faiblement distinctive en ce qu'ils désignent une capsule. Le mot capsule, même pris seul, peut en effet facilement être associé par un consommateur moyen aux termes du langage courant « capsule de bière » alors que de nombreuses bouteilles de bière sont dotées d'une capsule et que les biens et services visés par les deux marques concernent des activités de restauration, bar, et des bières.

Le terme malté renforce la référence à des boissons de type bière.

Ainsi, d'un point de vue phonétique, la ressemblance entre les deux marques est établie.

Dans leur élément intellectuel, les deux marques se ressemblent. Elles font référence à une capsule, caractéristique commune à de nombreuses bières commercialisées, boisson en rapport avec les activités désignées. Le mot capsule est en outre un accessoire indispensable de la plupart de bouteilles de bière et relève de la banalité.

L'ajout du terme malté dans la marque contestée ne permet pas de distinguer les deux de façon déterminante et apparaît comme une caractéristique particulière, voire une déclinaision, du produit ou service Capsule.

Ainsi, d'un point de vue conceptuel, la ressemblance entre les deux marques est donc établie.

Seule la marque La capsule maltée est semi-figurative. La marque verbale La Capsule, seule ici invoquée, ne peut être appréciée qu'au vu des mots qui la composent, indépendamment du graphisme, de la police et des minuscules, majuscules.

La première marque est composée de deux mots, la seconde de trois.

L'élément figuratif de la marque La Capsule Maltée met la part belle au dessin, un personnage portant un casque et tenant une chope de bière, le tout dans un cadre rond et dentelé représentant une capsule de bière. Les termes La Capsule Maltée n'occupent qu'un faible espace sur l'élément figuratif. Le consommateur normalement attentif retiendra en priorité le dessin, de part son originalité et le fait qu'il met en avant un personnage, et non pas les mots utilisés.

La ressemblance visuelle entre les deux marques est faible.

Pris dans leur ensemble, il résulte de ces éléments qu'un consommateur d'attention moyenne, n'ayant pas simultanément sous les yeux les deux marques, retiendra pour chacune d'elle qu'il s'agit d'un acteur fournissant notamment des bières. Les ressemblances des deux marques ne sont pas suffisantes pour qu'il puisse les confondre ou retenir que l'une est en lien avec l'autre.

Les demandes formées par les sociétés Beer Invest et HDDB d'annulation de la marque La Capsule Maltée seront rejetées, ainsi que les demandes de paiement de dommages-intérêts et de publicité y afférentes, et le jugement confirmé sur ce point.

Sur le caractère abusif de la procédure :

Il n'est pas établi que les sociétés Beer Invest et HDDB aient agi en justice dans un but autre que celui de faire valoir leurs droits. La demande de paiement de dommages-intérêts formée contre elles à ce titre sera rejetée.

Sur les frais et dépens :

Il y a lieu de condamner les sociétés Beer Invest et HDDB aux dépens d'appel et à payer la somme globale de 4.000 euros à la société Legeay-Mary au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant sur renvoi après cassation et dans les limites de sa saisine :

- Déclare irrecevables les conclusions de la société Legeay-Mary déposées devant la cour de renvoi,

- Confirme le jugement,

Y ajoutant :

- Rejette les demandes contraires ou plus amples des parties,

- Condamne les sociétés Beer Invest et HDDB à payer la somme globale de 4.000 euros à la société Legeay-Mary au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne les sociétés Beer Invest et HDDB aux dépens d'appel.

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