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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 3, 27 mars 2025, n° 22/03296

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Société civile de construction vente (SCCV)

Défendeur :

Financière TC (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Recoules

Conseillers :

Mme Dupont, Mme Girousse

Avocats :

Me Grappotte-Benetreau, Me Antomarchi, Me Parmentier, Me Binelli, SCP Grappotte Benetreau, SELARL Woog & Associes

T. com. Paris, 10e ch., du 21 janv. 2022…

21 janvier 2022

FAITS ET PROCÉDURE

La société SCCV [Adresse 5], société civile de construction vente, a acquis deux parcelles de terrain, sur lesquelles étaient bâties des constructions, situées [Adresse 5] , [Adresse 4] et [Adresse 3] dans le [Localité 1].

Par arrêté du 21 septembre 2018, la société SCCV [Adresse 5] a obtenu un permis de construire autorisant la construction sur ces parcelles, aprés démolition des constructions existantes, d'un bâtiment de 10 étages sur 3 niveaux de sous-sol, comprenant 61 logements, 35 places de stationnement en sous-sol et un commerce.

Pour réaliser cette opération immobilière, la société SCCV [Adresse 5] a dû obtenir la libération des lieux par l'ensemble des locataires dont la société MCMTC qui y exploitait un fonds de commerce de bar-hôtel-restaurant-débit de tabac-jeux (FDJ et PMU).

Après une première convention en date du 20 juillet 2017devenue caduque, la société SCCV [Adresse 5] et la société MCMTC ont conclu une seconde convention intitulée « itérative convention de résiliation de bail sous conditions suspensives », par acte sous seing privé du 5 juin 2019. Cette convention a fait l'objet d'un avenant, par acte sous seing privé du 12 novembre 2019.

Cette convention prévoit la résiliation anticipée du bail commercial consentie à la société MCMTC moyennant le versement d'une indemnité de 4.615.000 ' sous réserve de la réalisation de plusieurs conditions suspensives.

Elle comporte également une promesse unilatérale de vente par la société SCCV [Adresse 5] au bénéfice de la société MCMTC ou de toute personne morale qu'elle se substituerait, sous la forme d'une vente en l'état futur d'achèvement, portant sur des murs commerciaux situés dans l'immeuble à construire, d'une surface de plancher d'environ 235 m² (200 m² au rez-de-chaussée et 35 m² au sous-sol), au prix de 8.333 ' HT/m², la surface de réserve au sous-sol étant pondérée au tiers du prix.

Par lettre du 29 juillet 2019, la société Erisma a notifié à la société MCMTC une offre de prix pour la réservation des locaux à hauteur de 1.752.671 ' HT en joignant à sa lettre le plan de vente et la notice descriptive.

Par lettre du 23 août 2019, la société MCMTC a confirmé procéder à la levée de son option d'achat et a indiqué son souhait de régulariser un contrat de réservation comme prévu dans la convention du 5 juin 2019.

La société MCMTC a libéré les lieux le 12 novembre 2019.

Lors de son assemblée générale extraordinaire du 20 avril 2020, la société MCMTC, société en nom collectif, a été transformée en société par actions simplifiée, son objet social a été modifié et sa dénomination sociale est devenue ' Financière TC'.

Lors de son assemblée générale extraordinaire du 1er juillet 2020, la société Financière TC a opéré une réduction de son capital social et est devenue un société par actions simplifiée à associé unique.

Par acte extrajudiciaire du 1er décembre 2020, la société SCCV [Adresse 5] a fait signifier à la société Financière TC la caducité de la promesse unilatérale de vente figurant dans la convention du 5 juin 2019 estimant que la lettre de la société MCMTC du 23 août 2019 ne valait pas levée de son option d'achat.

Par acte extrajudiciaire du 18 décembre 2020, la société Financière TC a contesté la caducité de la promesse de vente invoquée par la société SCCV [Adresse 5], fait sommation à la société SCCV [Adresse 5] de régulariser un contrat de réservation portant sur les locaux objet de la promesse unilatérale de vente du 5 juin 2019 et fait interdiction à la société SCCV [Adresse 5] de contracter avec un tiers.

Par acte du 21 septembre 2021, la société SCCV [Adresse 5] a fait assigner la société Financière TC devant le tribunal de commerce de Paris, notamment pour voir prononcer la nullité de la lettre de levée d'option de la société MCMTC du 23 août 2019 et en conséquence la caducité de la promesse de vente du 5 juin 2019 consentie par la société SCCV [Adresse 5] à la société MCMTC désormais dénommée Financière TC.

Par jugement du 21 janvier 2022, le tribunal de commerce de Paris a :

- débouté la SASU Financière TC venant aux droits de la société MCMTC de sa demande de renvoi des parties en conciliation ;

- condamné la société SCCV [Adresse 5] à régulariser le contrat de réservation avec la SASU Financière TC venant aux droits de la SNC MCMTC, dans les conditions contenues dans la convention du 5 juin 2019, dans un délai de 45 jours à compter de la signification du jugement, sous astreinte de 500 ' par jour de retard à compter du 45ème jour après la date de signification du présent jugement et ce pendant une durée de 100 jours à l'issue de laquelle il pourra être à nouveau fait droit en cas de non-exécution ;

- débouté la SASU Financière TC venant aux droits de la SNC MCMTC de sa demande de condamnation de la société SCCV [Adresse 5] à lui payer la somme de 119.700 ' HT à titre de paiement de l'affichage des panneaux publicitaires ;

- condamné la société société SCCV [Adresse 5] à payer à la SASU Financière TC venant aux droits de la SNC MCMTC la somme de 3.000 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

- condamné la société SCCV [Adresse 5] aux dépens de l'instance dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 71,35 ' dont 11,68 ' de TVA ;

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration du 10 février 2022, la société SCCV [Adresse 5] a interjeté appel du jugement en ce qu'il a :

- condamné la société SCCV [Adresse 5] à régulariser le contrat de réservation avec la SASU Financière TC venant aux droits de la SNC MCMTC, dans les conditions contenues dans la convention du 5 juin 2019, dans un délai de 45 jours à compter de la signification du présent jugement, sous astreinte de 500 ' par jour de retard à compter du 45ème jour après la date de signification du présent jugement et ce pendant une durée de 100 jours à l'issue de laquelle il pourra être à nouveau fait droit en cas de non-exécution ;

- condamné la société SCCV [Adresse 5] à payer à la SASU FinancièreTC la somme de 3.000 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté la société SCCV [Adresse 5] de ses demandes tendant à juger nulle la lettre de levée d'option de la SASU FinancièreTC du 23 août 2019 et en conséquence jugé caduque la promesse de vente consentie par la société SCCV [Adresse 5] à la SASU Financière TC en exécution de la convention du 5 juin 2019 ;

- condamné la société société SCCV [Adresse 5] aux dépens de l'instance dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 71,35 ' dont 11,68 ' de TVA ;

- ordonné l'exécution provisoire.

Les parties ont régularisé un acte de vente en l'état futur d'achèvement, le 16 juin 2022.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 20 novembre 2024.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Dans ses conclusions déposées et notifiées le 25 octobre 2024, la société SCCV [Adresse 5], demande à la cour de :

- la juger recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes et en son appel ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 21 janvier 2022 en ce qu'il a débouté la société Financière TC, anciennement dénommée la société MCMTC de sa demande de renvoi devant un conciliateur et de sa demande reconventionnelle en paiement d'une somme de 119.700 ' HT ;

Pour le surplus :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 21 janvier 2022 en ce qu'il a débouté la société SCCV [Adresse 5] de sa demande de juger nulle la lettre de levée d'option de la société Financière TC, anciennement dénommée la société MCMTC, du 23 août 2019 et en conséquence, juger caduque la promesse de vente consentie par la société SCCV [Adresse 5] à la société Financière TC en exécution de la convention du 5 juin 2019 ;

Statuant à nouveau :

- juger nulle la lettre de levée d'option de la société Financière TC, anciennement dénommée la société MCMTC du 23 août 2019 ;

- en conséquence, juger caduque la promesse de vente consentie par la société SCCV [Adresse 5] à la société Financière TC, anciennement dénommée la société MCMTC, en exécution de l'article 5 de la convention du 5 juin 2019 ;

- juger nul l'acte de VEFA régularisé le 16 juin 2022 en exécution de l'article 5 de la convention du 5 juin 2019 et de la condamnation prononcée par le tribunal de commerce de Paris en date du 21 janvier 2022 assortie de l'exécution provisoire et portant sur la vente en VEFA du lot n° 1 de l'ensemble immobilier situé [Adresse 5] - [Adresse 4] à [Localité 1], cadastré Section AK n° [Cadastre 6] et [Cadastre 8] ;

- ordonner la remise en l'état des parties et la publication à la conservation des hypothèques de l'arrêt à intervenir ;

- condamner la société Financière TC à :

50.000 ' au titre des loyers perçus par la société Financière TC pour 2024 ;

12.000 ' par mois à parfaire en fonction de la date de la décision et de la remise en état des parties pour l'année 2025,

36.000 ' au titre du dépôt de garantie perçu par la société Financière TC,

le montant des charges perçues par la société Financière TC depuis le 1er janvier 2024, date d'effet du bail ;

- faire sommation de communiquer à la société Financière TC les quittances adressées à la société Elilou et la preuve des paiements de cette dernière ;

- débouter la société Financière TC, anciennement dénommée la société MCMTC, de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société Financière TC, anciennement dénommée la société MCMTC, à payer à la société SCCV [Adresse 5] la somme de 20.000 ' en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP Grappotte Benetreau en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La société SCCV [Adresse 5] fait valoir :

Sur la nullité de la levée d'option du 23 août 2019 et la caducité de la promesse de vente du 5 juin 2019,

- que la notification de l'offre de prix et de la notice descriptive, en date du 29 juillet 2019, est valable pour avoit été faite par la société Erisma qui bénéfice d'une convention du 4 septembre 2017 l'autorisant à agir en lieu et place de la société SCCV [Adresse 5] ;

- qu'en levant l'option d'achat, la société MCMTC a procédé à une novation de la promesse unilatérale de vente qui est devenue une promesse synallagmatique de vente ; qu'en application de l'article 1589 du code civil, une promesse synallagmatique de vente vaut vente ;

- qu'à la date de la levée de l'option d'achat, la société MCTMC était une société en nom collectif dont l'objet social portait exclusivement sur l'exploitation d'un fonds de commerce ; qu'en application des articles L. 221-5 du code de commerce et 1849 du code civil, le gérant de la société MCMTC ne pouvait pas engager la société à l'égard de la société SCCV [Adresse 5] par la levée de l'option d'achat ; qu'en conséquence, la levée de l'option d'achat par la société MCMTC le 23 août 2019 est nulle ;

- que la société SCCV [Adresse 5] peut invoquer les dispositions de l'article L. 221-5 du code de commerce à son bénéfice ( 3ème CIV, 14 juin 2018, n° 16-28678) ;

- que la motivation du juge de première instance est erronée en ce que :

- la société SCCV [Adresse 5] a toujours été de bonne foi, étant rappelé en outre que son eventuelle mauvaise foi ne serait pas une cause exonératoire pour échapper à la nullité de l'acte litigieux ;

- la mauvaise foi de la société Financière TC est établie par le fait que la société Financière TC ne lui a pas notifié la date à laquelle les fonds séquestrés ont été libérés entre ses mains alors que cette date faisait partir le délai dans lequel l'acte authentique de vente devait être régularisé et que la société Financière TC n'a jamais sollicité la régularisation de l'acte authentique de vente en l'état futur d'achèvement ;

- la mauvaise foi de la société Financière TC est également établie par les conditions dans lesquelles les lieux lui ont été restitués en fin de bail (locaux remplis d'objets et de meubles alors qu'ils devaient êtres restitués vides, locaux encore occupés), par le fait qu'elle ne lui a pas remboursé les frais consécutifs au débarrassage des locaux et à l'expulsion du dernier occupant de l'hôtel contrairement à ce qui était prévu dans l'avenant du 12 novembre 2019 ainsi que par le fait qu'elle a menti dans les conventions liant les parties en indiquant qu'elle était à jour de ses loyers et charges alors qu'il résulte d'une ordonnance de référé du 17 septembre 2018 qu'elle avait une dette de loyers de plus de 150.000 euros;

- il n'est pas utile d'invoquer un préjudice à l'appui d'une demande de nullité,

- que le tribunal de commerce a fait une confusion entre les dispositions de l'article 1103 du code civil et celles de l'article 1104 du même code, que le contrat n'est pas légalement formé faute pour le gérant de la société MCMTC d'avoir eu le pouvoir de lever l'option d'achat ;

- que la société MCMTC avait la possibilité de se substituer une société pour procéder à la levée d'option ce qu'elle n'a fait ;

- que faute pour la société MCMTC d'avoir valablement levé l'option d'achat dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'offre de prix, la promesse de vente est devenue caduque ; qu'il appartenait à la société MCMTC soit de modifier son objet social avant le 29 août 2019 soit d'utiliser la faculté de substitution prévue à l'article 7 de la convention du 5 juin 2019 ;

Sur la demande d'annulation des actes régularisés en exécution du jugement du tribunal de commerce de Paris du 21 janvier 2022 et les conséquences de cette annulation,

- que la vente en l'état futur d'achèvement a été régularisée par acte authentique du 16 juin 2022 ; - que les parties devraient être remises dans leur situation avant la vente et qu'à ce titre, la société Financière TC devrait lui rembourser les loyers perçus de la société Elilou depuis la prise d'effet du bail, le 1er janvier 2024, le montant des charges réglées par la locataire et le dépôt de garantie ;

Sur le rejet de la demande de la société Financière TC d'une indemnisation pour recours abusif,

- qu'elle n'a commis aucun abus de droit ;

Sur les nouvelles demandes de l'intimée,

- que ce n'est que la veille de la signature de l'acte de vente que la société Financière TC a invoqué son droit de substitution alors qu'il était manifestement trop tard ;

- que la société Financière TC soutient qu'elle subit un préjudice fiscal au titre de cette absence de substitution, qu'elle ne démontre pas ce préjudice ; qu'elle peut toujours apporté le bien acquis à une société civile immobilière ;

- que le refus de substitution ne saurait constituer une faute puisque l'article 1216 du code civil conditionne la possibilité de se faire substituter à l'insertion d'une telle clause dans l'avant contrat, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

- que les frais de constitution de la SCI ne sont pas un préjudice imputable à la société SCCV [Adresse 5], la société Financière TC devant s'assurer de l'accord de celle-ci concernant la substitution avant de constituer la SCI,

- que, la procédure en cours devant lui permettre de récupérer la propriété du local commercial, elle était légitime à s'assurer que le locataire choisi par la société Financière TC, et qu'elle devait potentiellement faire sien par la suite, propose des garanties suffisantes, ce qui n'était pas le cas du premier locataire choisi par la société Financière TC ; qu'elle n'a donc pas commis de faute ;

- que le projet de bail versé aux débats n'est pas daté de sorte qu'il ne permet pas de calculer une éventuelle perte de loyer puisque la date à laquelle il aurait pu prendre effet est inconnue ;

- que le préjudice aurait été une perte de chance ;

- que le contrat de bail finalement conclu avec la société Elilou stipule un loyer supérieur à celui figurant au projet de bail avec le premier locataire choisi par la société Financière TC, ce qui procure à la société Financière TC un gain largement supérieur au préjudice dont l'intimée fait état.

Dans ses conclusions déposées et notifiée le 5 novembre 2024, la société Financière TC demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 21 janvier 2022, en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a considéré dans ses motifs que « le plan de vente, la notice descriptive des locaux et l'offre de prix ont été notifiés à MCMTC le 29 juillet 2019 » ;

Y ajoutant :

- Condamner la société SCCV [Adresse 5] à lui payer une somme globale de 146.189,42 euros à titre de dommages et intérêts au titre de ses différents préjudices (3.420 euros au titre des frais exposés + 30.000 euros au titre du préjudice moral + 52.769,42 euros au titre des frais de cession des locaux commerciaux + 60.000 euros au titre de la perte de loyers) ;

En tout état de cause :

- débouter la société SCCV [Adresse 5] de ses demandes ;

- condamner la société SCCV [Adresse 5] à lui payer une somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société société SCCV [Adresse 5] aux entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de la SELARL Woog & Associes, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Financière TC fait valoir :

Sur la mise en oeuvre de la promesse de vente du 5 juin 2019,

- qu'au moment de l'introdution de l'instance devant le tribunal de commerce de Paris, toutes les sommes séquestrées au titre de la prise en charge des frais concernant l'expulsion du dernier occupant de l'hôtel n'avaient pas été libérées ;

- qu'elle n'avait pas l'obligation de notifier à la société SCCV [Adresse 5] la libération des fonds séquestrés ;

Sur l'irrégularité de la notification du 29 juillet 2019,

- que c'est Erisma et non la société SCCV [Adresse 5] qui a émis cette notification alors que la société SCCV [Adresse 5] n'a pas fait usage de la faculté de substitution prévue dans la convention du 5 juin 2019,

- que la convention de gestion et de commercialisation du 4 septembre 2017 conclue entre Erisma et la société SCCV [Adresse 5] n'est pas opposable à la société Financière TC car cette convention ne lui a pas été dénoncée ;

- que la notification de l'offre de prix de vente n'entrait pas dans les missions déléguées par la société SCCV [Adresse 5] à Erisma en vertu de l'article 1er de la convention de gestion et de commercialisation du 4 septembre 2017,

- que la société SCCV [Adresse 5] a effectué toutes les autres diligences relatives à l'opération litigeuse ;

- que le fait qu'elle ait répondu à la notification du 29 juillet 2019 est indifférent quant à la validité de cette notification ;

- que compte-tenu de son irrégularité, la notification du 29 juillet 2019 n'a pas fait courir le délai de la société MCMTC ou de son substitué pour lever l'option ;

Sur la régularité de la levée d'option,

- qu'il n'est pas contesté qu'à la date du 23 août 2019, il n'entrait pas dans l'objet social de la SNC MCMTC d'acquérir un actif immobiolier ;

- qu'il s'agit néanmoins d'une nullité relative qui ne peut être invoquée que par la société ou ses associés ;

- que les tiers peuvent invoquer la violation des statuts d'une société uniquement dans les cas où l'acte litigieux leur cause un préjudice et non pour se délier de leur engagement ; que statuer dans le sens contraire serait une prime au désengagement unilatéral ;

- que la société MCMTC n'a pas procédé à la novation de la promesse unilatérale de vente en promesse synallagmatique de vente, faute d'avoir mentionné cette novation dans la lettre du 23 août 2019 ;

- que la société MCMTC disposait de la capacité de se substituer une autre société postérieurement au 23 août 2019, soit postérieurement à la levée de l'option en application des articles 5 et 7 de la convention du 5 juin 2019 ;

- que l'article 1589 du code civil ne s'applique pas au cas d'espèce faute de prise de possession des lieux par la société MCMTC à la date du 23 août 2019 ;

- que la société MCMTC a renouvelé son intention de lever l'option d'achat par plusieurs courriels des 7 octobre, 15 octobre et 29 novembre 2019 ;

- que la société SCCV [Adresse 5] cherche à tirer profit d'une supposée impossibilité de la société MCMTC de lever l'option alors qu'elle était informée de cette situation et qu'elle était disposée à poursuivre l'opération ; que la société SCCV [Adresse 5] n'a jamais fait état de l'impossibilité pour la société MCMTC d'acquérir des biens immobiliers avant les 27 novembre et 1er décembre 2020 et qu'à cette époque la société MCMTC était devenue la SAS financière TC disposant de cette capacité ;

- que si la société MCMTC ne disposait pas de la capacité de conclure un acte de vente, elle disposait de la capacité de lever l'option ;

- que la société Financière TC a renouvelé son intention de lever l'option par sommation du 18 décembre 2020 aux termes de laquelle elle demandait la régularisation du contrat de réservation ;

Sur la mauvaise foi de la société SCCV [Adresse 5],

- que l'action de la société SCCV [Adresse 5] s'inscrit dans une logique punitive pour sanctionner la société MCMTC qui lui a demandé de lui payer la somme de 119.700 euros TTC pour avoir posé deux panneaux publicitaires sur les murs de son établissement à compter du 21 janvier 2019 ;

- que la société SCCV [Adresse 5] a attendu plus d'un an pour invoquer la caducité de la promesse de vente ;

- que la mauvaise foi de la société SCCV [Adresse 5] résulte du comportement de celle-ci à l'égard de la société MCMTC depuis la signature de la première convention entre les parties le 20 juillet 2017 ;

- qu'en dépit du jugement entrepris, l'acte authentique de vente en l'état futur d'achèvement n'a été signé que le 16 juin 2022, soit 6 mois après que le tribunal avait ordonné la signature d'un contrat de réservation ; que la société SCCV [Adresse 5] a raccourci les délais de convocation pour la signature de l'acte afin de faire pression sur la société Financière TC et 'a passé outre' le jugement de première instance qui l'obligeait à conclure un contrat de réservation et non un contrat de vente ;

- que la société Financière TC a manifesté sa volonté de faire usage de sa faculté de substitution dès le 13 mai 2022 mais que cela lui a été refusé au motif que la substitution devait intervenir avant la réalisation de la condition suspensive, date expirée ;

- que les délais prévus à l'article 5 de la convention du 5 juin 2019 n'ont pas été respectés, empêchant la société MCMTC de se prévaloir en temps utile de sa faculté de substitution ;

- que la société SCCV [Adresse 5] se prévaut de frais exposés au titre de l'expulsion du dernier occupant de l'immeuble et d'impayés de loyer pour tenter de faire croire à la cour d'appel que les lieux ont été restitués dans de mauvaises conditions ; que tous les frais ont été réglés par la société Financière TC et que les impayés de loyer ne démontrent que les difficultés passées de la société ;

Sur l'indemnisation du préjudice subi par la société Financière TC, sur le fondement des articles 559 du code de procédure civile et 1240 du code civil,

- que la société SCCV [Adresse 5] a fautivement imposé à la société Financière TC la conclusion d'un acte authentique de vente en lieu et place d'un contrat de réservation, sans lui permettre de se substituer une SCI nouvellement créée ;

- que son préjudice est composé des frais inutiles de constitution et de dissolution de la SCI à hauteur de 3.420 euros et du préjudice futur mais certain qui résultera de la fiscalité applicable à une SAS en cas de cession du local commercial ;

- que la société SCCV [Adresse 5] a commis une faute en poursuivant inutilement un recours abusif contre la décision de première instance alors que la vente est intervenue, cette faute ayant entraîné un préjudice moral pour la société et son président ;

- que la société SCCV [Adresse 5] a commis une faute en retardant de 6 mois la location des locaux ce qui a entraîné un préjudice économique de 60.000 euros HT.

Il convient, en application de l'article 455 du code de procédure civile, de se référer aux conclusions des parties, pour un exposé plus ample de leurs prétentions et moyens.

SUR CE,

Sur l'irrégularité de la notification du 29 juillet 2019

Pour mener à bien son opération immobilière, la société SCCV [Adresse 5] a conclu avec la société Erisma une convention de gestion et de commercialisation suivant acte sous seing privé du 4 septembre 2017. Aux termes de cette convention, la société Erisma a pour mission, sur le plan juridique, de mettre au point et signer 'tous les actes nécessaires à la préparation et à la réalisation de l'opération susvisée dans l'exposé qui précède, jusqu'à la réception des travaux et notamment :

(...)

- élaboration des documents nécessaires à la commercialisation de l'opération,

- notification et signature des contrats de réservation, actes de vente et toutes pièces annexes,

- et de manière plus large à tous les actes ou documents juridiques nécessaires pour mener à bien l'opération.'

L'article 5 de la convention du 5 juin 2019, conclue entre la société SCCV [Adresse 5] et la société MCMTC (désormais dénommés Financière TC) stipule, s'agissant de la promesse unilatérale de vente des murs commerciaux, notamment :

' Dès lors que les autorisations administratives qui devront être déposées pour permettre la réalisation de l'immeuble à construire seront devenus définitives, c'est à dire purgées de tout recours ou droit de retrait, la société SCCV [Adresse 5] ou son substitué notifiera à la société MCMTC ou son substitué un plan de vente, une notice descriptive des locaux et une offre de prix, objet de la promesse de vente.'

La lettre du 29 juillet 2019, adressée à la société MCMTC désormais dénommée Financière TC afin de lui notifier le plan de vente, la notice descriptive et l'offre de prix pour la réservation des locaux concernés par la promesse unilatérale de vente figurant dans la convention du 5 juin 2019 conclue entre la société SCCV [Adresse 5] et la société MCMTC, émane de la société Erisma et non de la société SCCV [Adresse 5].

Contrairement à ce que soutient la société Financière TC, la société Erisma n'a pas établi et envoyé cet acte pour son compte. Elle est intervenue dans le cadre de la mission que lui avait confiée la société SCCV [Adresse 5] selon le contrat de gestion et de commercialisation du 4 septembre 2017. La société Erisma a donc agi comme mandataire de la société SCCV [Adresse 5] et non comme sa substituée dans les droits et obligations issus de la convention du 5 juin 2019.

Dès lors, les moyens de la société Financière TC tirés du fait que la société SCCV [Adresse 5] n'est pas l'autrice de la notification du 29 juillet 2019 et du fait que la convention de gestion et de commercialisation du 4 septembre 2017 ne lui a pas été dénoncée sont inopérants.

Contrairement à ce que soutient la société Financière TC, la notification du plan de vente, de la notice descriptive et de l'offre de prix à la société MCMTC entrait dans les missions confiées par la société SCCV [Adresse 5] à la société Erisma aux termes de la convention du 4 septembre 2017. En effet, il s'agit d'un acte juridique nécessaire pour mener à bien l'opération immobilière poursuivie par la société SCCV [Adresse 5], qui était prévu dans la convention du 5 juin 2019 afin de faire partir le délai de levée de l'option d'achat de la société MCMTC.

En outre, il résulte des dispositions de l'article 1156 du code civil que le tiers contractant ne peut pas invoquer l'inopposabilité ou la nullité de l'acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au delà de ses pouvoirs dès lors que le représenté a ratifié ledit acte. Or, en l'espèce, en soutenant la validité et la régularité de la notification du 29 juillet 2019 dans le cadre de la présente instance, la société SCCV [Adresse 5] a ratifié cet acte.

Sur la nullité de la levée de l'option d'achat par la société MCMTC le 23 août 2019

La levée de l' option est un acte unilatéral par lequel le bénéficiaire donne son consentement au contrat objet de la promesse unilatérale.

En application de l'article 1100-1 du code civil, les actes unilatéraux obéissent, pour leur validité et leurs effets, aux règles qui gouvernent les contrats.

L'article 1128 du code civil prévoit que la capacité de contracter est nécessaire à la validité d'un contrat.

Il s'en déduit qu'au moment de la levée d'une option d'achat, le bénéficiaire de l'option doit avoir la capacité de conclure la vente objet de la promesse unilatérale.

L'article 1145 du code civil dispose en son alinéa 2 que la capacité des personnes morales est limitée par les règles applicables à chacune d'entre elles.

L'article 1147 du code civil précise que l'incapacité de contracter est une cause de nullité relative.

L'article 1181 du code civil ajoute que la nullité relative ne peut être demandée que par la partie que la loi entend protéger et qu'elle peut être couverte par la confirmation.

Par ailleurs, dans les sociétés en nom collectif, l'article L. 221-5 du code de commerce dispose que dans les rapports avec les tiers, le gérant engage la société par les actes entrant dans l'objet social.

Le dépassement de l'objet social d'une société affecte sa capacité juridique. En effet, une société ne peut agir que dans le cadre de son objet social.

En l'espèce, au moment de la levée de son option d'achat, le 23 août 2019, la société MCMTC était une société en nom collectif. Son objet social était le suivant : 'l'exploitation d'un fonds de commerce de bar, brasserie, café, restaurant, tabletterie, jeux, auquel est annexée la gérance d'un débit de tabac et accessoires (Française des jeux et PMU), hôtel, maison meublée, pension de famille et généralement toutes opérations commerciales, financières, mobilières se rattachant directement ou indirectement à l'objet social ou pouvant en favoriser le développement.'

Cet objet social n'inclut pas l'acquisition de biens immobiliers. La société Financière TC ne le conteste d'ailleurs pas en écrivant dans ses conclusions (page 14) : 'il n'est pas contesté qu'à la date du 23 août 2019, il n'entrait pas dans l'objet social de la SNC MCMTC d'acquérir un actif immobilier'.

La société MCMTC désormais dénommée Financière TC n'avait donc pas la capacité de lever l'option d'achat à la date du 23 août 2019.

Néanmoins, il apparait que cette nullité est une nullité relative, en ce qu'elle concerne l'incapacité de contracter de la société MCMTC, et qu'elle ne peut pas être invoquée par la société SCCV [Adresse 5].

En effet, d'une part, la détermination de l'objet social d'une société en nom collectif, étant rappelé que les associés d'une société en nom collectif répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales, a pour finalité la protection de la société et des associés en limitant les pouvoirs du gérant.

La détermination de l'objet social d'une société n'a pas pour finalité la protection du tiers contractant pour lui permettre, alors qu'il s'est régulièrement engagé, de se libérer unilatéralement de ses obligations vis à vis de la société en excipant du dépassement de l'objet social de sa co-contractante.

En outre, la société SCCV [Adresse 5] savait, lorsqu'elle a a promis à la société MCTMC de lui vendre des locaux commerciaux dans l'immeuble à construire, en même temps qu'elle négociait la résiliation anticipée du bail consentie à la société MCMTC, puis lorsqu'elle lui a notifié l'offre de prix par l'intermédiaire de la société Erisma, que la société MCMTC était une société en nom collectif qui exploitait un fonds de commerce de bar-brasserie-hôtel-tabac-jeux. La forme de la société MCMTC et son activité sont indiquées tant dans la convention du 5 juin 2019 que dans la première convention conclue entre les parties le 20 juillet 2017. La société SCCV [Adresse 5] savait également que le gérant ne pouvait pas engager la société MCMTC pour les actes n'entrant pas dans l'objet social de la société. Or, la société SCCV [Adresse 5], professionnelle de la promotion immobilière contrairement à la société MCMTC, n'a pas attiré l'attention de la société MCMTC sur le périmètre de son objet social, ni en 2017 lors de la signature de la première convention entre les parties, ni le 5 juin 2019 lors de la signature de la seconde convention, ni le 29 juillet 2019 lorsqu'elle a procédé à la notification qui a fait partir le délai de la société MCMTC pour lever son option d'achat. La société SCCV [Adresse 5] a attendu plus d'un an après la levée de l'option d'achat par la société MCTMC désormais dénommée Financière TC pour vérifier l'objet social de celle-ci puis pour lui faire savoir, par acte d'huissier de justice du 1er décembre 2020, que la levée de son option d'achat par lettre du 23 août 2019 n'était pas valable faute d'entrer dans son objet social, étant observé qu'entretemps la société MCMTC avait libéré les lieux, confirmé par courriels des 17 octobre 2019 et 29 novembre 2019 son intention de régulariser un contrat de réservation à la suite de la levée de son option d'achat et entretenu des rapports avec la société SCCV [Adresse 5] à propos d'un litige avec le dernier occupant de l'hôtel. La société SCCV [Adresse 5] a ainsi manqué à son obligation de loyauté et de bonne foi vis à vis de sa co-contractante, étant rappelé que cette obligation s'applique tant aux relations précontractuelles entre les parties qu'à l'exécution des contrats en vertu des articles 1104 et 1112 du code civil.

D'autre part, la société Financière TC a modifié son objet social lors de son assemblée générale extraordinaire du 20 avril 2020, à l'unanimité de ses associés, pour le rendre compatible avec l'acquisition de biens immobiliers. Ainsi, l'objet social de la société Financière TC comprend, depuis le 20 avril 2020, notamment 'l'acquisition, la prise à bail, la mise en valeur de tous terrains, immeubles, appartements et l'édification sur lesdits terrains, de bâtiments ou locaux, à usage commercial ou d'habitation et notamment l'acquisition de locaux à usage d'habitation' et 'la construction ou l'achat de tous biens biens immobiliers et mobiliers'.

Et la société Financière TC, par acte extrajudiciaire du 18 décembre 2020, a contesté la caducité de la promesse de vente invoquée par la société SCCV [Adresse 5], a fait sommation à cette dernière de régulariser un contrat de réservation portant sur les locaux objets de la promesse de vente du 5 juin 2019 et lui a fait interdiction de contracter avec un tiers.

En rendant, postérieurement à celle-ci, son objet social compatible avec la levée de son option d'achat en date du 23 août 2019 puis en faisant sommation à la société SCCV [Adresse 5] de régulariser un contrat de réservation portant sur les locaux objets de la promesse de vente du 5 juin 2019, la société Financière TC a confirmé la levée de l'option d'achat du 23 août 2019, couvrant ainsi la nullité relative de cette option qui a pu prendre effet à sa date initiale.

En conséquence, au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société SCCV [Adresse 5] à régulariser le contrat de réservation avec la société Financière TC venant aux droits de la société MCMTC, dans les conditions contenues dans la convention du 5 juin 2019, dans un délai de 45 jours à compter de la signification du jugement, sous astreinte de 500 ' par jour de retard à compter du 45ème jour après la date de signification du présent jugement et ce pendant une durée de 100 jours à l'issue de laquelle il pourra être à nouveau fait droit en cas de non-exécution. Y ajoutant, la demande de la société SCCV [Adresse 5] tendant au prononcé de la nullité de la lettre de levée d'option de la société Financière TC du 23 août 2019 et la demande de caducité de la promesse unilatérale de vente sont rejetées.

Sur les autres demandes de la société SCCV [Adresse 5]

Compte-tenu de la confirmation du jugement entrepris, il convient de rejeter la demande d'annulation de l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 16 juin 2022 conclu entre les parties en exécution du jugement entrepris ainsi que les demandes qui étaient fondées sur cette annulation.

Sur la demande de dommages et intérêts de la société Financière TC

La société Financière TC demande la condamnation de la société SCCV [Adresse 5] au paiement de la somme de 3.420 euros au titre des frais exposés pour la constitution et la dissolution de la société civile immobilière Mursco qu'elle a voulu se substituer ainsi qu'au paiement de la somme de 52.769,42 euros correspondant aux frais de vente des locaux ou d'apport des locaux à une société civile immobilière. Elle reproche à la société SCCV [Adresse 5] d'avoir refuser qu'elle soit substituée par la SCI Mursco lors de la vente du 16 juin 2022.

Dans la convention du 5 juin 2019, il était prévu une faculté pour la société MCMTC de se substituer toute personne morale dans le bénéfice de la présente convention 'jusqu'à la réalisation de la condition suspensive'.

Or, il est acquis qu'à la date de libération des lieux, le 12 novembre 2019, l'ensemble des conditions suspensives prévues dans la convention du 5 juin 2019 avaient été réalisées.

La société SCCV [Adresse 5] n'a donc pas commis de faute en refusant à la société Financière TC de se substituer une autre personne morale en 2022, le délai laissé à la société Financière TC pour se faire substituer par une autre personne morale étant alors expiré. Il est observé que la société civile immobilière Mursco n'a été créée que le 16 mai 2022, soit près de 3 ans après la convention du 5 juin 2019 qui ouvrait une faculté de substitution à la société Financière TC. En outre, la société Financière TC n'établit avoir payé les frais de constitution et de dissolution de la société Mursco dont elle n'était pas l'associée.

La société Financière TC demande la réparation d'un préjudice moral à hauteur de 30.000 euros consécutif à la poursuite par la société SCCV [Adresse 5] d'un recours abusif.

Toutefois, il n'est pas apporté la preuve d'un usage abusif par la SCCV [Adresse 5] de son droit d'appel. La société SCCV [Adresse 5] était en droit de faire rejuger le litige en appel. La vente intervenue le 16 juin 2022 ne vaut pas acquiescement au jugement entrepris et n'a été conclue par la société SCCV [Adresse 5] que pour se conformer au jugement du tribunal de commerce de Paris du 21 janvier 2022 qui bénéficiait de l'exécution provisoire, sans qu'il puisse être reproché à la société SCCV [Adresse 5] de ne pas avoir diligenté une procédure en arrêt de l'exécution provisoire s'agissant d'un droit et non d'une obligation. En outre, la société Financière TC ne justifie pas de l'existence d'un préjudice moral qu'elle n'explicite d'ailleurs pas, se bornant à procéder par voie d'affirmation. Il est également rappelé que le préjudice moral de son président n'est pas celui de la société.

La société Financière TC demande la réparation d'une perte de loyers de 60.000 euros au motif que la société SCCV [Adresse 5] a refusé de donner son accord au premier bail envisagé par la société Financière TC, ce qui a entraîné un retard dans la mise en location des locaux.

Il ressort des éléments produits aux débats que compte-tenu de la procédure d'appel en cours, pour assurer la sécurité du preneur à bail, les parties avaient décidé de soumettre la conclusion d'un bail commercial portant sur les locaux concernés par le litige à la condition suspensive de l'accord de la société SCCV [Adresse 5] de conserver le preneur et de se substituer à la société Financière TC en qualité de bailleur dans l'hypothèse d'une infirmation du jugement du tribunal de commerce de Paris du 21 janvier 2022 par la cour d'appel.

La société Financière TC a signé un bail commercial en état futur d'achèvement avec M.[G] [K], agissant au nom et pour le compte de la société en cours de création X [Adresse 5], le 23 mars 2023. Ce bail était d'une durée de 9 ans à compter de la date d'achèvement des travaux, étant précisé que la date prévisionnelle d'achèvement était fixée au 30 juin 2023 et que la livraison des locaux au bailleur est intervenue le 27 juin 2023 (page 9 et 27 des conclusions de la société Financière TC). Il prévoyait un loyer fixe de 120.000 euros HT et HC par an, une franchise de loyer de 9 mois et un loyer variable de 4 % du chiffre d'affaires compris entre trois millions et cinq millions d'euros.

La société SCCV [Adresse 5] n'a pas donné son accord à ce bail commercial.

Par acte du 9 janvier 2024, la société Financière TC a conclu un bail commercial avec la société Elilou Paris. La société SCCV [Adresse 5] a donné son accord à ce bail qui a une durée de 9 ans à compter du 1er janvier 2024. Le bail prévoit un loyer de 144.000 euros HT et HC par an, une franchise de 7 mois, un allégement de loyers de 24.000 euros HT la première année qui se cumule avec la franchise de loyers et un allégement de loyers de 12.000 euros HT la deuxième année.

Les pièces produites aux débats sont insuffisantes pour établir que le refus de la société SCCV [Adresse 5] de donner son accord au bail commercial en l'état futur d'achèvement conclu entre la société Financière TC et M. [G] [K] est fautif. Il s'agit d'un refus isolé que la société SCCV [Adresse 5] explique par la crainte de l'insolvabilité du preneur, étant précisé que la société E [Adresse 5] était en cours de création et qu'il n'est produit aux débats aucun projet d'entreprise.

En outre, la société Financière TC ne justifie pas de l'existence du préjudice économique qu'elle allègue. En effet, si la société SCCV [Adresse 5] avait donné son accord au bail commercial entre la société Financière TC et M. [G] [K], la société Financière TC aurait perçu un loyer fixe de 990.000 euros hors taxe et hors indexation entre le 1er juillet 2023 et le 30 juin 2032. La perception d'un loyer variable sur la même période n'était pas certaine dès lors qu'elle dépendait du chiffre d'affaires du preneur qui devait excéder 3 millions d'euros par an pour déclencher le paiement de la part variable du loyer. Or, compte-tenu du bail commercial conclu avec la société Elilou Paris, la société Financière TC va percevoir des loyers d'un montant de 1.104.000 euros jusqu'au 30 juin 2032 hors taxe et hors indexation, étant précisé que la clause d'indexation est la même dans les deux baux. IL n'est donc pas certain que la société Financière TC aurait perçu une somme supérieure au titre des loyers si la société SCCV [Adresse 5] avait donné son accord au bail commercial en l'état futur d'achèvement que la société Financière TC avait conclu avec M.[G] [K].

En conséquence, la demande de dommages et intérêts formée par la société Financière TC est rejetée en totalité.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Compte-tenu de la confirmation du jugement entrepris, la société SCCV [Adresse 5] succombe. Les dispositions de jugement du tribunal de commerce de Paris du 21 janvier 2022 au titre des dépens et des frais irrépétibles sont donc également confirmées.

En outre, la société SCCV [Adresse 5] qui succombe en appel est condamnée aux dépens de la procédure d'appel.

Par ailleurs, il est équitable de condamner la société SCCV [Adresse 5] à payer à la société Financière TC la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés par celle-ci à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort ;

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Paris du 21 janvier 2022 (RG 2021044087) en toutes ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant

Rejette la demande de la société SCCV [Adresse 5] tendant à voir prononcer la nullité de la lettre de levée d'option de la société MCMTC désormais dénommée Financière TC du 23 août 2019 et la caducité de la promesse de vente du 5 juin 2019 consentie par la société SCCV [Adresse 5],

Rejette la demande de la société SCCV [Adresse 5] d'annulation de l'acte de vente en l'état futur d'achèvement conclue le 16 juin 2022 entre la société SCCV [Adresse 5] et la société Financière TC et ses demandes subséquentes de remise en état des parties, de publication de l'arrêt au service de la publicité foncière, de communication des quittances de loyers adressées à la société Elilou Paris et de condamnation de la société Financière TC à lui payer le dépôt de garantie, les loyers et les charges perçus depuis le 1er janvier 2024 en exécution du bail commercial consenti par la société Financière TC à la société Elilou Paris,

Rejette la demande de dommages et intérêts de la société Financière TC,

Condamne la société SCCV [Adresse 5] aux dépens de la procédure d'appel, dont distraction au profit de la Selarl Woog & associés et de la Scp Grappotte Bénetreau conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne la société SCCV [Adresse 5] à payer à la société Financière TC la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

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