CA Lyon, ch. soc. a, 2 avril 2025, n° 21/05569
LYON
Arrêt
Autre
AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
N° RG 21/05569 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NXEJ
[P]
C/
Société SAS KLAXOON
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes de LYON CEDEX
du 17 Juin 2021
RG : 20/01035
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 02 AVRIL 2025
APPELANT :
[D] [P]
né le 10/01/1980
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Mathieu LAJOINIE de la SELAS SELAS JABERSON, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉE :
SOCIETE KLAXOON, anciennement dénommée SOCIETE REGARD
RCS de Rennes N° 511 962 219
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Weena LAIGLE de l'AARPI ACTIO AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Janvier 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Catherine MAILHES,Présidente
Anne BRUNNER, Conseillère
Antoine-Pierre D'USSEL, Conseiller
Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffière.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 02 Avril 2025, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MAILHES, Présidente et par Malika CHINOUNE, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [P] a signé un contrat à durée indéterminée le 22 janvier 2014, pour le poste de directeur de développement au sein de la société regard devenue la société klaxoon, position 3.1, coefficient 170, statut cadre de la convention collective Syntec.
La société employait habituellement au moins 11 salariés au moment du licenciement.
Le 14 janvier 2020, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à licenciement pour le 24 janvier 2020.
La société lui a notifié son licenciement par courrier du 29 janvier 2020, dans les termes suivants :
' 1. Au cours de cet entretien, j'ai rappelé que vous avez été embauché en qualité de Directeur Développement le 22 janvier 2014. Dans le contexte de l'époque, vos missions étaient de développer l'activité de Regards en recrutant et manageant une équipe de commerciaux.
Depuis juin 2015, Regards est devenu une holding à la tête de 2 filiales : Regards Services abritant les activités historiques du groupe (développement de modules e-learning et de logiciels métiers à destination de clients grands comptes) et Klaxoon abritant le nouveau modèle économique du groupe consistant en la vente d'une solution SAAS et de produits hardwares associés.
A partir du 2ème semestre 2017, l'activité de Regards Services a été progressivement arrêtée afin de concentrer toutes les forces vives du groupe sur le développement de Klaxoon qui non seulement est l'aboutissement de la philosophie portée par le groupe mais qui constitue également une activité plus rentable et avec une récurrence de revenus.
Vous avez suivi ce repositionnement stratégique et vu vos fonctions évoluer de la vente de services vers la vente de produits.
2. Après deux exercices complets de recentrage de l'activité sur Klaxoon, nous devons constater des insuffisances récurrentes dans l'organisation et la direction du développement commercial.
En octobre 2018, nous avons dû prendre la décision de sortir les entrants et les renouvellements hors grands comptes de votre périmètre afin qu'ils soient correctement traités, ce qui n'était pas le cas, et que vous concentriez votre action sur les grands comptes et les comptes à fort potentiel.
Au lieu de vous concentrer sur l'amélioration des résultats commerciaux et le développement des comptes, notamment l'augmentation du panier moyen, vous n'avez pas soutenu cette nouvelle organisation que vous avez annoncée brutalement à vos équipes sans accompagner la décision.
A la fin du 1er trimestre 2019, nous avons constaté que les résultats en termes de renouvellement des abonnements étaient catastrophiques sur votre périmètre, notamment en comparaison des résultats de la nouvelle équipe constituée fin 2018. Vous avez reconnu à cette époque ne pas avoir dirigé vos équipes sur cette mission et les avoir concentrées sur la conquête de nouveaux clients alors que le renouvellement et la création de revenus récurrents sont la base de notre business model.
En février 2019, nous avons pris la décision de recruter un manager commercial en charge de développer les ventes indirectes, axe stratégique que vous n'avez jamais vraiment travaillé. Là encore, vous n'avez pas soutenu cette décision et avez au contraire adopté un comportement agressif à son encontre dès son arrivée en le remettant en cause et le taxant d'incompétence.
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Les résultats commerciaux sur votre périmètre ne s'améliorant pas au cours du 2ème trimestre 2019, nous avons dû de nouveau intervenir en septembre. J'ai dû m'impliquer personnellement dans la mise en place d'un nouveau business model et l'accompagnement de vos équipes, initiative que vous n'avez non seulement pas soutenue mais par ailleurs ouvertement critiquée. Ce nouveau modèle a été lancé pour le dernier trimestre 2019 et a déjà fait ses preuves puisqu'il a permis une amélioration significative des ventes sur cette période, sans toutefois permettre de rattraper le retard pris lors des trois premiers trimestres.
Par conséquent, nous devons faire le bilan qu'au-delà de la conduite des actions menées sur les grands comptes, vous avez manifesté dans l'exercice de vos fonctions de Directeur Développement des carences managériales, mais aussi comportementales en vous inscrivant à l'encontre des actions prises pour redynamiser notre activité commerciale, alors que nos résultats commerciaux sont nettement en-deçà du business plan.
3. A cela s'ajoute l'attitude que vous avez adoptée ces deux derniers mois, après avoir, courant octobre 2019, formulé votre souhait de vendre vos titres dans le capital de la holding Regards et de "prendre du recul" avant de poursuivre d'autres projets professionnels, et d'avoir rencontré à ce sujet des membres du board (Comité Stratégique), sans que cela ait débouché sur une suite favorable à votre projet.
Nous avons en effet constaté successivement les faits suivants :
' Pendant l'inauguration du Klaxoon Store le 26 novembre 2019 vous avez pris à part un membre du board puis plusieurs collaborateurs pour critiquer cet investissement et plus globalement ma gestion de l'entreprise.
' Le 9 décembre 2019, le Comité Social et Economique nous a informé que vous teniez avec eux un point mensuel à votre initiative pour évoquer les sujets relevant du comité, sans m'en avoir informé ni moi, ni [HU] [E] qui pilote le CSE, et en nous tenant dans l'ignorance de la teneur de ces échanges.
' Le même jour le CSE nous a également alerté sur l'existence d'un projet de nouvelle organisation de l'équipe commerciale auquel vous travailliez et qui inquiétait les équipes au regard des nouvelles modifications de leur périmètre qui pourraient y être associées, alors que vous ne m'avez jamais informé d'une telle initiative, d'autant plus déplacée que selon les informations remontées par le CSE ce projet de nouvelle organisation impacterait le périmètre Customer Experience qui n'est pas sous votre responsabilité et que le manager de cette équipe était lui aussi tenu à l'écart de vos projets.
' Le 23 janvier 2020, nous avons également découvert via des questions posées par le CSE, que les informations que vous auriez communiquées oralement aux équipes commerciales concernant les parts variables 2019 ne seraient pas conformes à ce qui a été validé contractuellement. De surcroit, nous avons à répondre à des questionnements sur un manque de transparence sur le suivi des résultats et sur des différences de traitement non justifiées.
Ces agissements caractérisent un manquement à votre obligation de loyauté et perturbent le fonctionnement de la direction et de l'entreprise, entrainant corrélativement une désorganisation fortement préjudiciable en période de plein développement.
De surcroît, vous vous êtes permis des écarts de comportement à l'égard de membres d'autres équipes qui ne sont pas plus acceptables. Nous avons reçu le 13 décembre une plainte formelle de salariées de l'équipe Finance concernant, outre des reproches concernant leur travail, des propos sexistes et outrageants (« Bonjour les pintades»). Et cela alors même que [HU] [E] vous avait déjà recadré suite au dernier IAA début avril 2019 pour le même type de comportement (insulte à la communauté portugaise sous un prétexte humoristique, devant tous les salariés).
Lors de l'entretien préalable, vous n'avez apporté aucune explication concrète sur ces reproches, vous vous êtes borné à nier tout grief à votre encontre et vous n'avez rien manifesté qui laisse entrevoir une amélioration de la situation.
Nous regrettons donc d'être contraints de vous notifier par la présente votre licenciement, d'une part en raison des carences que vous avez manifestées depuis la réorientation du business model de la société et d'autre part en raison des agissements fautifs rappelés ci-dessus. '
Le 12 mai 2020, contestant son licenciement, M. [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de voir la société klaxoon condamnée à lui verser un complément d'indemnité de licenciement (18.882,56 euros), des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (120.520,96 euros), des dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire (72.312,58 euros), des dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement (12.052,70 euros), une somme à titre de rappel d'heures supplémentaires (total de 278'916,06 euros), des dommages et intérêts pour repos compensateurs non pris (208.656,60 euros), une indemnité au titre du travail dissimulé (72.321,58 euros), des dommages et intérêts pour non-respect du temps de repos et de la durée maximale de travail (72.321,58 euros), un rappel de salaire au titre de sa rémunération variable 2017 à 2019 (total de 652'313,66 euros), et congés payés afférents (65.231,37 euros), des dommages et intérêts pour perte de chance d'exercer ses BSPCE, de voir prospérer ses actions et de réaliser une plus-value (9.153.034,02 euros) outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile (10.000 euros), à lui remettre les bulletins de salaire et documents de fin de contrat rectifiés avec astreinte, au remboursement des indemnités Pôle Emploi à hauteur de 6 mois de salaire.
La société regard devenue la société klaxoon a été convoquée devant le bureau de conciliation et d'orientation par courrier recommandé avec accusé de réception envoyé le 29 mai 2020.
La société regards devenue la société klaxoon s'est opposée aux demandes du salarié et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de celui-ci au versement de la somme de 4.500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 17 juin 2021, le conseil de prud'hommes de Lyon a :
fixé le salaire de M. [P] à 12.052,70 euros mensuels bruts ;
dit que les faits reprochés à M. [P] sont établis et de nature à justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse ;
débouté M. [P] de ses demandes relatives à la nature de son licenciement ;
fixé la date d'embauche de M. [P] au 22 janvier 2014 ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre du caractère vexatoire du licenciement;
débouté M. [P] de ses demandes au titre du non-respect de la procédure de licenciement ;
condamné la S.A.S. REGARDS à verser à M. [P] 13.000 euros pour l'année 2018, 12.000 euros pour l'année 2019 et 11.000 euros pour l'année 2020 au titre des heures supplémentaires ;
débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect du droit à repos compensateur ;
débouté M. [P] de sa demande de reconnaissance du travail dissimulé ;
débouté M. [P] de sa demande au titre de travail égal, salaire égal ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre de la perte de droit à l'exercice des BSCPE ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre de Pôle Emploi ;
condamné la S.A.S. REGARDS à verser à M. [P] la somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif;
condamné la S.A.S. REGARDS au entiers dépens
Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 30 juin 2021, M. [P] a interjeté appel dans les formes et délais prescrits de ce jugement, aux fins de réformation ou d'annulation en ce qu'il : FIXE le salaire de Monsieur [D] [P] à 12.052,70 euros mensuels bruts ; DIT ET JUGE que les faits reprochés à Monsieur [D] [P] sont établis et de nature à justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de ses demandes relatives à la nature de son licenciement ; FIXE la date d'embauche de Monsieur [D] [P] au 22 janvier 2014 ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de ses demandes au titre du caractère vexatoire du licenciement DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de ses demandes au titre du non respect de la procédure de licenciement CONDAMNE la S.A.S. REGARDS à verser à Monsieur [D] [P] 13.000,00 euros pour l'année 2018, 12.000,00 euros pour l'année 2019 et 11.000,00 euros pour l'année 2020 au titre des heures supplémentaires ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect du droit à repos compensateur ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de sa demande de reconnaissance du travail dissimulé ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de sa demande au titre de travail égal, salaire égal ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de ses demandes autitre de la perte de droit à l'exercice des BSCPE ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de ses demandes au titre de Pôle Emploi ; CONDAMNE la S.A.S. REGARDS à verser à Monsieur [D] [P] la somme de 1.800,00 euros au titre de l'Article 700 du Code de Procédure Civile ; DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif ; CONDAMNE la S.A.S. REGARDS auxentiers dépens.
Aux termes des dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 6 décembre 2024, M. [P] demande à la cour de :
infirmer, en toutes ses dispositions, le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Lyon en date du 17 juin 2021, en ce qu'il a :
fixé le salaire de M. [P] à 12.052,70 euros mensuels bruts ;
dit que les faits reprochés à M. [P] sont établis et de nature à justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse ;
débouté M. [P] de ses demandes relatives à la nature de son licenciement;
fixé la date d'embauche de M. [P] au 22 janvier 2014 ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre du caractère vexatoire du licenciement ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre du non-respect de la procédure de licenciement ;
condamné la S.A.S. REGARDS à verser à M. [P] 13.000 euros pour l'année 2018, 12.000 euros pour l'année 2019 et 11.000 euros pour l'année 2020 au titre des heures supplémentaires ;
débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect du droit à repos compensateur ;
débouté M. [P] de sa demande de reconnaissance du travail dissimulé ;
débouté M. [P] de sa demande au titre de travail égal, salaire égal ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre de la perte de droit à l'exercice des BSCPE ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre de Pôle Emploi ;
condamné la S.A.S. REGARDS à verser à M. [P] la somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif ;
condamné la S.A.S. REGARDS aux entiers dépens
statuer à nouveau :
juger que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse ;
condamner en conséquence la société au versement des sommes suivantes :
18.882,56 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement ;
20.520,96 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
juger les circonstances du licenciement comme brutales et vexatoires ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 72.312,58 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire ;
juger que la procédure de licenciement n'a pas été respectée par la société ;
condamner en conséquence la société à la somme de 12.052,70 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement ;
juger que la société n'a pas respecté son obligation de formation, adaptation et réalisation d'entretiens professionnels ;'''
condamner la société à la somme de 72.312,58 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de l'obligation de formation et adaptation ;
juger que la société n'a pas respecté les dispositions juridiques applicables en matière de temps de travail ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 101.620,58 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période allant du 7 mai 2021 au 7 mai 2018, outre 10.162,06 euros au titre des congés payés afférents ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 101.620,58 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période allant du 7 mai 2018 au 7 mai 2019, outre 10.162,06 euros au titre des congés payés afférents ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 75.674,90 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période allant du 7 mai 2019 au 24 janvier 2020, outre 7.783,70 euros au titre des congés payés afférents ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 188.381,65 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la contrepartie obligatoire en repos;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 72.321,58 euros à titre de travail dissimulé ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 72.321,58 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du temps de repos et de la durée maximum du travail ;
juger que la société n'a pas respecté le principe à travail égal salaire égal ;
condamner la société au versement de la somme de161.345,97 euros au titre de rappel de rémunération variable pour l'année 2017, outre 16.134,60 euros au titre des congés payés afférents ;
condamner la société au versement de la somme de 246.443,21 euros au titre de rappel de rémunération variable pour l'année 2018, outre 24.644,32 euros au titre des congés payés afférents ;
condamner la société au versement de la somme de 244.524,46 euros au titre de rappel de rémunération variable pour l'année 2019 outre 24.452,45 euros au titre des congés payés afférents ;
débouter la société de sa demande d'irrecevabilité concernant sa demande pour rappel de salaire au titre de la clause de non-concurrence ;
condamner la société à lui verser le rappel de salaire à titre de la clause de non-concurrence, conformément au calcul établi, soit 60.972,35 euros ;
condamner, à titre principal, la société au versement de la somme de 9.153.034,02 euros de dommages et intérêts pour perte de chanche d'exercer ses BSPCE, de voir prospérer ses actions et, le cas échéant, de les céder ;
à titre subsidiaire, diligenter une expertise sur la valorisation de la société mère du groupe Klaxoon en 2020 afin de déterminer la valeur de ses BSPCE dans les plus brefs délais ;
condamner la société au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
ordonner la délivrance de bulletins de paie rectifiés et d'une attestation Pôle emploi régularisée ;
ordonner le remboursement des indemités Pôle emploi à hauteur de 6 mois de salaire;
condamner la société aux entiers dépens.
Selon les dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 11 décembre 2024, la société klaxoon ayant fait appel incident, demande à la cour de :
confirmer le jugement en ce qu'il a fixé le salaire de M. [P] à 12.052,70 euros mensuels bruts, dit que les faits reprochés à M. [P] sont établis et de nature à justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse, débouté M. [P] de ses demandes relatives à la nature de son licenciement, fixé la date d'embauche de M. [P] au 22 janvier 2014, débouté M. [P] de ses demandes au titre du caractère vexatoire du licenciement, débouté M. [P] de ses demandes au titre du non-respect de la procédure de licenciement, débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect du droit à repos compensateur, débouté M. [P] de sa demande de reconnaissance du travail dissimulé, débouté M. [P] de sa demande au titre de travail égal, salaire égal, débouté M. [P] de ses demandes au titre de la perte de droit à l'exercice des BSCPE, débouté M. [P] de ses demandes au titre de Pôle Emploi et condamné M. [P] à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamnée à verser à M. [P] 13.000,00 euros pour l'année 2018, 12.000 euros pour l'année 2019 et 11.000 euros pour l'année 2020 au titre des heures supplémentaires, la somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens;
débouter M. [P] de ses demandes relatives aux heures supplémentaires ainsi que ses demandes relatives au paiement de 15.000 euros d'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
débouter M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour l'obligation de formation et d'adaptation ;
juger irrecevable la demande de M. [P] relative au rappel au titre de la clause de non concurrence et en tout état de cause le débouter de cette demande ;
condamner M. [P] à verser à lui verser la somme de 4.500 euros en complément de la condamnation déjà intervenue en première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La clôture des débats a été ordonnée le 12 décembre 2024 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 7 janvier 2025.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'exécution du contrat de travail
1- Sur l'obligation d'adaptation et de formation
Le salarié fait grief au jugement de ne pas avoir statué sur cette demande et fait valoir qu'à l'exception d'une seule formation en anglais en 2015, il n'a pas bénéficié de la moindre formation durant l'ensemble de sa période d'emploi au sein de la société en violation de l'article L. 6321-1 du code du travail et de l'article 48 de la convention collective SYNTEC, et la société ne ramène aucun élément probant venant démontrer le contraire.
La société réplique que le salarié bénéficiait d'une solide expérience dans le management d'équipe et dans la vente de services et aucune évolution de matériel ou de fonctions ne justifiait de formation, la seule demande faite au salarié étant qu'il se recentre sur le renouvellement des abonnements des grands comptes, ce qu'il n'a pas fait ; elle lui a par ailleurs financé les formations conformément à ses souhaits, notamment 47 heures de formation en anglais, et il a participé aux bizweeks annuels sur les techniques de vente animée.
***
L'article L.6321-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, dispose que :
L'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail.
Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.
Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme, notamment des actions d'évaluation et de formation permettant l'accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret.
Les actions de formation mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de développement des compétences mentionné au 1° de l'article L. 6312-1. Elles peuvent permettre d'obtenir une partie identifiée de certification professionnelle, classée au sein du répertoire national des certifications professionnelles et visant à l'acquisition d'un bloc de compétences.
L'article 48 de la convention collective nationale dite Syntec applicable prévoit que pour assumer pleinement ses responsabilités de commandement et d'animation, le personnel d'encadrement (les ingénieurs et cadres et le personnel appartement au groupe 'conception ou gestion élargie' de la grille de classification ETAM, à condition qu'il exerce une fonction de commandement auprès d'autres salariés) doit privilégier de plus en plus les actions de formations, de coordination et de conseil de manière notamment, à contribuer à l'amélioration des rapports humains dans l'entreprise.
Le bon exercice des responsabilités du personnel d'encadrement implique qu'il dispose :
- d'une information spécifique sue la marche générale de l'entreprise ;
- de la possibilité de donner son point de vue à la direction sur cette marche générale de l'entreprise ;
- de la possibilité de participer à des sessions de formation professionnelle, conformément aux dispositions légales et conventionnelles, et de se préoccuper de la formation du personnel dont il est responsable.
En l'occurrence, M. [P] engagé en qualité de directeur de développement, était titulaire d'un diplôme d'ingénieur du Conservatoire national des Arts et Métiers. Il avait une solide expérience de responsable de l'amélioration des méthodes dans l'industrie de plus de 5 ans, de consultant formateur dans un cabinet de conseil spécialisé en formation (un an), de directeur d'agence au sein d'une agence Alten au sein de laquelle il dirigeait 83 personnes (plus de 5 ans) avant d'entrer dans le groupe Regards.
Il a bénéficié d'une formation en anglais de 40 heures entre le 23 décembre 2014 et le 31 juillet 2015, financées par la société.
Il a également participé aux sessions de formation Bizweek portant sur la technique de vente organisées par la société, auxquels il pouvait assister en tant qu'observateur ou bien d'organisateur ou de formateur, comme il ressort des diverses attestations et courriels versés aux débats, notamment en 2016. Sa qualité d'observateur même non inscrit comme participant actif lui permettait de tirer bénéfice de ces formations pour son adaptation à son poste de travail et au maintien de sa capacité à occuper un emploi.
S'il a financé une formation en anglais de 17 heures en septembre 2019, il ne justifie pas avoir sollicité son employeur de bénéficier d'une nouvelle formation en anglais. En conséquence, compte-tenu de la précédente formation dispensée en anglais en 2015 et de la participation du salarié aux bizweeks, il y a lieu de considérer que l'employeur s'est loyalement acquitté de son obligation légale d'adaptation au poste de travail et de son obligation conventionnelle.
Selon les dispositions de l'article L.6315-1 du code du travail, il est prévu que :
A l'occasion de son embauche, le salarié est informé qu'il bénéficie tous les deux ans d'un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives d'évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d'emploi. Cet entretien ne porte pas sur l'évaluation du travail du salarié. Cet entretien comporte également des informations relatives à la validation des acquis de l'expérience, à l'activation par le salarié de son compte personnel de formation, aux abondements de ce compte que l'employeur est susceptible de financer et au conseil en évolution professionnelle.
L'employeur ne justifie pas avoir organisé un entretien professionnel tous les deux ans portant sur les perspectives d'évolution de carrière. Néanmoins, le salarié ne justifie pas de la réalité et de l'ampleur du préjudice qu'il aurait subi à ce titre. Il sera en conséquence débouté de sa demande à ce titre.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de dommages-intérêts à ce titre.
2- Sur les heures supplémentaires
Le salarié conteste le volume d'heures supplémentaires retenu par les juges de première instance et au titre desquelles la société a été condamnée, précisant que :
- il démontre la réalisation des heures supplémentaires réalisées en produisant 8 attestations de salariés quotidiennement présents auprès de lui, de très nombreux SMS professionnels envoyés tôt le matin ou tard le soir, un tableau précis récapitulant les heures effectuées, dans la limite de la prescription applicable, duquel il ressort qu'il effectuait 60 heures par semaines, voir régulièrement plus de 70 ou 80 heures lors des 'bizweek' ou des 'opérations commandos' ;
- la charge de la preuve a été aménagée au gré de la jurisprudence pour que le salarié présente des éléments suffisamment précis à l'appui de sa demande, ce qui est son cas, pour permettre à l'employeur d'y répondre ; en l'espèce, et nonobstant les éléments de preuve fournis, la société ne rapporte pas la preuve contraire, mais admet au contraire ne pas payer les heures supplémentaires réalisées par son équipe commerciale, ce dont il ressort du procès-verbal de la réunion du CSE du 26 mars 2020.
La société réplique que :
- non seulement il connaissait les limites de la durée du travail veillant lui-même à son respect pour les 60 salariés qu'il dirigeait en sa qualité de directeur du développement, mais il faisait partie du top management et organisait à ce titre son temps de travail comme bon lui semblait dans les limites fixées par l'accord relatif à la durée du travail applicable depuis le 1er octobre 2016 ;
- le groupe a appliqué une référence annuelle pour décompter les heures supplémentaires en application de l'accord du 1er octobre 2016 qui se substituait aux dispositions contractuelles antérieures : 37 heures en moyenne par semaine avec l'attribution de jours de repos ; elle assurait également le paiement de 10,33 heures supplémentaires par mois au taux majoré de 25% outre des récupérations ;
- le salarié n'a jamais fait état d'heures supplémentaires au cours de la relation contractuelle et base sa réclamation sur des estimations faites à la louche, à l'appui d'attestations de salariés qui travaillaient moins d'heures que lui et de quelques SMS, non probants ; il ne rapporte aucune preuve matérielle du dépassement contractuelle revendiqué ;
- elle produit à l'inverse un état des heures supplémentaires payées ainsi qu'un état des jours de récupération de 2017 à novembre 2021, la société privilégiant le temps de récupération sur l'indemnisation ; toutes les heures supplémentaires effectuées à la demande de la hiérarchie ou validées a posteriori ont ainsi bien été soit compensées, soit payées ;
- M. [C] n'a jamais indiqué au cours de la réunion du CSE du 20 mars 2020 ne jamais payer les heures supplémentaires, mais a simplement fait savoir qu'il n'était pas favorable à l'installation d'une pointeuse afin de maintenir l'équilibre instauré dans l'entreprise.
***
La durée légale du travail effectif des salariés est fixée à 35 heures par semaine soit 151.67 heures par mois.
La convention collective nationale des bureaux d'étude techniques dans sa rédaction applicable au litige prévoyait que :
Les heures supplémentaires sont les heures de travail accomplies à la demande de l'employeur au-delà de la durée légale ou conventionnelle du travail, compte tenu des modalités d'aménagement du temps de travail retenues.
Dans le cas d'un aménagement du temps de travail sur l'année, les heures supplémentaires sont les heures effectuées sur l'année, au-delà de la durée du travail annuelle, légale ou conventionnelle, applicable dans l'entreprise.
Les heures supplémentaires sont payées conformément aux majorations prévues par la loi.
Le contingent réglementaire s'applique pour les ingénieurs et cadres.
La durée du travail hebdomadaire s'entend des heures de travail effectif et des temps assimilés, étant précisé que selon les dispositions de l'article L.3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles.
Les heures supplémentaires s'accomplissent dans le cadre d'un contingent annuel et ouvrent droit à une contrepartie obligatoire en repos.
En l'espèce, le salarié, engagé à temps complet, était soumis à la durée collective du travail en vigueur dans l'entreprise fixée à 39 heures par semaine aux termes du contrat de travail. Le contrat stipulait également que l'horaire collectif pourra être modifié par l'employeur en fonction des nécessités de l'entreprise.
L'horaire collectif était fixé de 8h30-18h30 avec 1h30 de pause le midi comme il ressort du procès-verbal de réunion du comité social et économique du 26 mars 2020.
Lors de la réunion du comité social et économique UES Regards-Klaxoon du 26 mars 2020, les membres élus avaient posé la question suivante : ' Pourquoi les cadres des équipes Sales ne sont-ils pas au forfait jour ' Qu'est-ce-que des heures supplémentaires et comment les déclarer pour avoir une compensation ''
Il est noté au procès-verbal que : '[M] met en avant le fait qu'il y a des contraintes horaires pour un Sales, liées à son métier (...) Egalement, payer les heures supplémentaires voudrait dire fonctionner avec des 'pointeuses', loin de l'esprit de l'entreprise. Il est en effet impossible de verser ces heures supplémentaires de manière aléatoire et par exemple aujourd'hui le temps passé en pause cigarette, ping-pong etc n'est pas décompté, tout repose sur une confiance réciproque. Il ne faut pas perdre le 'côté humain', la souplesse et l'agilité. Klaxoon n'en serait pas là aujourd'hui sans cela (...)
[HU] indique que le forfait jour n'est plus aussi souple qu'au début car il a été fortement encadré par le législateur ces dernières années et aujourd'hui le suivi engendré est assez important. De plus, dans la convention Syntec, le forfait jour est limité à la position 3 ou à un niveau de salaire au moins égal à 2 fois le plafond de la sécurité sociale.
Le CES répond qu'il est difficile pour un Sales de faire les horaires : 8h30-18h30 avec 1h30 de pause le midi.
[M] et [HU] évoquent tout d'abord le principe d'autonomie inhérent à ce type de métier avec une rémunération variable en fonction des résultats. Or les heures supplémentaires sont des heures demandées par l'employeur uniquement. Si un Sales travaille une heure supplémentaire spontanément, elle n'est pas considérée comme une heure supplémentaire légalement. Elle ajoute que les Sales sont autonomes dans l'organisation : les personnes peuvent gérer également des rendez-vous plus personnels (médicaux par exemple) dans la journée. C'est donc un équilibre qui doit se créer et encore une fois une confiance mutuelle (...)'
Ces déclarations ne manifestent pas l'opposition de l'employeur au paiement d'heures supplémentaires tout en sachant qu'il en a été accompli, mais l'opposition de l'employeur à l'accomplissement d'heures supplémentaires en dehors de ce qu'il a demandé et surtout, sa volonté de ne pas contrôler le nombre d'heures de travail accomplies par les équipes de vendeurs sous prétexte d'autonomie et de confiance.
En conséquence, l'horaire mis en place au sein de la société ne saurait être considéré comme un horaire collectif au sens des articles D.3171-1 et suivants du code du travail.
L'amplitude de l'horaire était de 12 heures et en considération d'une pause de 1h30, de 8,5 heures par jour, soit sur 5 jours de travail par semaine de 42,5 heures habdomadaires.
Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail/ ou de l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L.8112-1 (rédaction issue de la loi 2016-1088 du 8 août 2016), les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.
Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
L'absence de revendication du paiement d'heures supplémentaires pendant la relation salariale, qui ne vaut reconnaissance de l'absence d'heures supplémentaires ou renonciation à son droit, n'empêche pas le salarié d'en réclamer à l'occasion du litige consécutif à la rupture du contrat de travail.
Le salarié verse aux débats :
- les attestations concordantes de Mmes [G], [W], [U], [H], de MM [EV], [F], [V], [X] faisant état de ce que leur directeur travaillait jusqu'à 60 heures par semaine, qu'il était très disponible, jusqu'à tard le soir au téléphone ou par SMS, également lors des opérations 'commando' avec des séances de travail dépassant minuit ;
- les échanges SMS entre M. [P] et un membre du comité social et économique sur la demande de paiement des heures supplémentaires ;
- des sms échangés avec des membres de ses équipes sur des sujets professionnels an dehors des horaires de 8h30 à 18h30 (20h15, 22h32 23h19, 8h06...) ;
- un tableau récapitulatif des heures de travail effectuées de la semaine 18 de l'année 2017à la semaine 18 de l'année 2020 mentionnant le nombre d'heures accomplies par semaine, précisant l'existence de jours fériés, de congés, de rtt, périodes de voyage professionnel à l'étranger) suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre utilement en apportant ses propres éléments.
L'employeur n'apporte pas d'élément de décompte autre que l'application de l'horaire collectif duquel il ressort dores et déjà un horaire hebdomadaire de plus des 37 heures hebdomadaires qu'il invoque.
Il n'est pas contesté qu'il a été fait application d'un accord d'annualisation du temps de travail du 1er octobre 2016 fixant la durée du travail à 1607 heures par an, s'agissant au demeurant de la durée légale annuelle. Ainsi le décompte des heures accomplies s'effectue à l'année.
Sur l'année 2017 incomplète, les heures accomplies par le salarié telles qu'elles ressortent de l'ensemble des éléments versés aux débats ne dépassent pas 1 607 heures par an, en sorte que le salarié ne saurait prétendre à paiement d'heures supplémentaires au-delà des 10,33 heures supplémentaires qui lui ont été réglées par mois.
Sur l'année complète 2018, le salarié a accompli 2025 heures soit 418 heures supplémentaires sur l'année, dont 304,37 heures supplémentaires au-delà des 10,33 heures supplémentaires réglées par mois.
Sur l'année complète 2019, le salarié a accompli 2014 heures soit 407 heures supplémentaires sur l'année dont 293,37 heures supplémentaires au-delà des 10,33 heures supplémentaires réglées chaque mois.
Sur l'année 2020, le salarié n'a pas dépassé le nombre annuel de 1607 heures de travail et ne saurait prétendre à paiement d'heures supplémentaires sur la dite période.
En considération de ses fonctions de directeur de développement avec une soixantaine de collaborateurs dans un secteur en pleine croissance, des attestations versées aux débats qui ne sont pas utilement contestées, les heures accomplies par le salarié au-delà des 37 heures hebdomadaires payées étaient rendues nécessaires par les tâches qui lui étaient confiées.
Il ressort de l'extrait du livre de paie 2017/2021 comme du procès-verbal de réunion du comité social et économique ci-avant cité, qu'il existait au sein de la société un système de jours de repos de récupération des heures supplémentaires. Néanmoins, elle ne justifie pas avoir permis à M. [P] de bénéficier de jours de repos de récupération au titre des heures supplémentaires accomplies alors même qu'il ressort du procès-verbal de réunion de comité social et économique cité ci-avant que certains managers rechignaient à accepter les récupérations sollicitées. Les quelques bulletins de salaire versés aux débats et autres pièces ne font pas apparaître la récupération d'heures supplémentaires par le salarié.
En conséquence, la société reste devoir au salarié en considération de la base salariale de 70,89 euros de l'heure, des majorations applicables de 25% et 50%, les sommes suivantes:
- pour l'année 2018, 27.868,27 euros à titre de rappel de salaire outre 2.786,82 au titre de l'indemnité de congés payés afférente;
- pour l'année 2019, 26.699,65 euros à titre de rappel de salaire outre 2.669,96 euros au titre de l'indemnité de congés payés afférente.
Le salarié sera débouté du surplus de ses demandes au titre des heures supplémentaires. Le jugement entrepris sera infirmé des chefs de condamnation au titre des heures supplémentaires.
3- Sur l'indemnité de contrepartie obligatoire en repos
Le salarié soutient que chaque heure supplémentaire ouvrant droit également à une contrepartie obligatoire en repos qu'il n'a pas perçue, il peut prétendre à ce titre au montant d'une indemnité calculée comme s'il avait pris son repos et à l'indemnité de congés payés correspondante, pour la période du 7 mai 2017 au 24 janvier 2020.
La société ne présente aucun moyen à ce titre.
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La convention collective nationale ne prévoit pas de contingent annuel d'heures supplémentaires pour les cadres et renvoie aux dispositions légales, en sorte qu'il sera fait application des dispositions de l'article D. 3121-24 du code du travail (issu du décret n°2008-1132 du 4 novembre 2008 resté inchangé) fixant à 220 heures le contingent annuel d'heures supplémentaires.
Le dépassement du contingent donne lieu à compensation selon les dispositions légales de l'article L.3121-38 du code du travail.
Ainsi, compte tenu de l'accomplissement de 418 heures supplémentaires en 2018 et de 407 heures supplémentaires en 2019, la salarié a droit à une contrepartie obligatoire en repos compensateur pour les 198 heures effectuées au-delà du contingent annuel en 2018 et pour les 187 heures effectuées au-delà du contingent annuel en 2019.
Tout salarié dont le contrat est rompu avant qu'il ait pu bénéficier d'un repos compensateur reçoit en application des dispositions de l'article D.3121-23 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, une indemnité en espèce correspondant à ses droits acquis comprenant l'indemnité de congés payés. Il ne peut prétendre à indemnité compensatrice de congés payés indépendante en plus de l'indemnité.
En considération des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel des heures, du droit à repos compensateur équivalent à 100 % de ces heures s'agissant d'une entreprise de plus de vingt salariés et du salaire horaire de base de 70,89 euros, le salarié est en droit de bénéficier d'une indemnité de :
- 15.439,44 euros pour l'année 2018 ainsi calculée : 198 heures x 70,89' + 10% de ce montant ;
- 14.582,07 euros pour l'année 2019 que la société sera condamnée à lui verser.
Le salarié sera débouté de ses demandes au titre des années 2017 et 2020.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'indemnité au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour les années 2018 et 2019.
4- Sur l'indemnité de travail dissimulé
Le salarié fait valoir que la société ne pouvait ignorer la quantité d'heures effectuées, dont la matérialité est établie par les attestations et SMS produits aux débats, de sorte qu'il peut prétendre au versement de l'indemnité dû en cas de dissimulation d'emploi au sens de l'article L. 8221-5 du code du travail.
La société explique que le salarié n'ayant jamais revendiqué le moindre paiement d'heures supplémentaires, il ne saurait y avoir d'intention de ne pas les payer.
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Il résulte de l'article L. 8221-5 du code du travail que la dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée que si l'employeur, de manière intentionnelle, soit s'est soustrait à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10 relatif à la déclaration préalable à l'embauche, soit s'est soustrait à la formalité prévue à l'article L. 3243-2 relatif à la délivrance d'un bulletin de paie ou a mentionné sur le bulletin de paye un nombre d'heure de travail inférieur à celui réellement effectué.
En l'occurrence, le caractère intentionnel de la minoration du nombre d'heures de travail accompli n'est pas établi et il sera débouté de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article L. 8223-1 du code du travail.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'indemnité à ce titre.
5- Sur les dommages-intérêts pour non-respect des repos obligatoires et de la durée maximum du travail
Le salarié expose qu'il ressort des éléments évoqués antérieurement dans ses écritures que les durées maximales quotidiennes et hebdomadaires, les temps de pause, de repos quotidiens telles que fixées aux articles L. 3121-34 et -35 du code du travail n'ont pas été respectées par la société.
La société s'oppose à cette demande en soutenant que le salarié n'a pas accompli d'heures supplémentaires au-delà de ce qu'il lui a été payé et de ce qu'il a récupéré.
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Aux termes de l'article L. 3131-1 du code du travail, dans sa version postérieure à l'entrée en vigueur à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, tout salarié bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives, sauf dans les cas prévus aux articles L. 3131-2 et L. 3131-3 ou en cas d'urgence, dans des conditions déterminées par décret.
Le seuil communautaire, qui résulte de la Directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993, modifiée par la Directive 2000/34/CE du Parlement et du Conseil du 22 juin 2000, fixant à 11 heures consécutives la période minimale du repos journalier, se traduit en droit interne par l'interdiction de dépasser l'amplitude journalière de 13 heures, celle-ci étant définie comme le temps séparant la prise de poste de sa fin.
Or, la charge de la preuve du respect des seuils et plafonds prévus en matière de temps de travail tant par le droit de l'Union européenne que par le droit interne incombe à l'employeur.
En l'espèce, la société qui n'apporte aucun élément de contrôle de la durée du travail, ne justifie pas du respect des seuils et plafonds, en sorte qu'en considération de décomptes produits qui font apparaître des semaines à plus de 48 heures de travail et du nombre d'heures supplémentaires accomplies retenues ci-avant, la société a manqué à son obligation touchant à la santé et à la sécurité du salarié et ce manquement a causé un préjudice qui sera entièrement réparé par la somme de 6.000 euros à titre de dommages et intérêts.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de toute demande de dommages-intérêts à ce titre.
6- Sur les rappels de salaire variable et de base
Le salarié fait valoir que la société n'a pas respecté le principe jurisprudentiel 'à travail égal salaire égal' concernant sa rémunération variable comme sa rémunération de base, et fait valoir à ce titre que :
sur la rémunération variable : malgré la mise en place d'une rémunération variable pour tous les collaborateurs du service commercial de la société se trouvant dans une situation comparable à la sienne au sens de l'article L. 3221-4 du code du travail, lesquels bénéficiaient sans exception d'une prime sur le chiffre d'affaire réalisé par chaque salarié du service, il n'a jamais pu bénéficier de la moindre prime ;
sur la rémunération de base : à l'instar de la rémunération de base, il n'a jamais pu bénéficier de revalorisation de son salaire fixe depuis de nombreuses années en dépit de l'hyper croissance de la société et de son travail acharné.
La société nie toute violation de l'égalité de traitement et soutient que le salarié n'était pas dans une situation comparable à celle des deux salariés dont il fait référence : Mme [N], responsable commerciale sous sa subordination et bénéficiant d'un salaire de base moitié moins important que le sien ; M. [A], lequel a un périmètre d'intervention bien plus important que le sien, de sorte qu'il n'est pas dans la même situation que ce dernier, pas la même fonction et pas les mêmes responsabilités, et qui n'a par ailleurs pas assuré son remplacement.
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Le principe 'à travail égal, salaire égal' dont s'inspirent les articles L. 1242-14, L. 1242-15, L. 2261-22.9, L. 2271-1.8° et L. 3221-2 du code du travail impose à l'employeur d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous les salariés.
Ainsi, n'effectuent pas un travail de valeur égale, des salariés qui exercent des fonctions différentes.
Le principe d'égalité de traitement s'étend à l'ensemble des droits individuels et collectifs et notamment en matière d'évolution et progression de carrière.
Pour autant l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction détermine les rémunérations et peut fixer des salaires différents pour tenir compte des compétences et capacités de chaque salarié, de la nature des fonctions ou des conditions de leur exercice. Il peut ainsi accorder des avantages particuliers à certains salariés, mais c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique puissent bénéficier de l'avantage ainsi accordé et que les règles déterminant l'octroi de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables et pertinents au regard de l'avantage considéré.
En application de l'article 1353 du code civil, il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe sus-visé de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération et il incombe ensuite à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence.
Il est un fait que le salarié a demandé à bénéficier d'une rémunération variable sur le chiffre d'affaires en plus de sa rémunération de base.
Sa comparaison avec Mme [N] qu'il indique être placée directement sous sa responsabilité, sans évoquer la fonction occupée par cette dernière et son niveau de responsabilité empêche de considérer que M. [P], directeur du développement se trouvait dans une situation comparable à cette dernière. Il ne se trouvait pas plus dans une situation comparable à celle des commerciaux qu'il manageait. Il se saurait ainsi prétendre à un rappel de salaire au titre d'une rémunération variable.
Lors de la conclusion du contrat de travail en janvier 2014, le salaire de directeur de développement était fixé à 5100 euros brut pour 169 heures par mois soit 61 200 euros brut annuel. Il était passé à 7.082,64 euros en octobre 2016 incluant l'avantage en nature de 207,63 euros et à environ 11.800 euros mensuel en 2019. Ce faisant, c'est à tort que le salarié se plaint de ne pas avoir bénéficié d'augmentations régulières comme les autres salariés.
Le salarié soutient par ailleurs l'existence d'une différence de rémunération entre lui et M. [A] qu'il soutient être son remplaçant.
Or les éléments versés par l'employeur, organigramme et courriels, démontrent sans qu'il soit nécessaire de produire le contrat de travail de M. [A], que ce dernier occupait un poste de directeur général des ventes et pilotait l'ensemble des canaux de vente : KA/HPA- indirect- international- US, s'inscrivant dans le cadre de la restructuration des ventes, alors que le poste de directeur du développement occupé par le salarié était limité au secteur 'KA/HPA' et qu'il a été remplacé par un directeur commercial M. [Z]. Il s'ensuit que la situation de M. [A] n'est pas comparable à celle de M. [P], ne s'agissant pas des mêmes fonctions occupées.
Le salarié sera en définitive débouté de sa demande de rappel de salaire que ce soit le salaire variable ou le salaire de base sur le fondement de d'une inégalité de traitement. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.
7- Sur la clause de non-concurrence
Le salarié fait valoir à titre liminaire que cette demande a bien été évoquée au sein de ses conclusions de première instance et lors de la plaidoirie devant le conseil de prud'hommes et ne saurait être déclarée irrecevable ; il est dans l'attente d'éléments permettant de chiffrer exactement cette demande, et il devra être pris en compte le calcul contenu au sein du pacte d'associés, plus favorable que les dépositions contractuelles.
La société fait valoir que le salarié n'ayant pas soutenu cette demande devant le conseil de prud'hommes, ni à l'écrit ni à l'oral, il ne peut s'en prévaloir en appel ; elle a quoi qu'il en soit bien appliqué la clause insérée dans le pacte d'associé et a été rempli de ses droits sur ce point.
***
C'est à tort que la société se prévaut de l'existence d'une demande nouvelle en appel puisque le salarié avait sollicité un rappel de salaire au titre de la clause de non-concurrence dans le cadre de la première instance, sans pour autant la chiffrer.
Il résulte des dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au litige, que les parties doivent présenter dès leurs premières conclusions en appel, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond mais que demeurent recevables dans les limites des chefs de jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou révélation d'un fait.
En l'occurrence, au sein de ses premières conclusions en appel remises à la cour le 28 septembre 2021, M. [P] a sollicité la condamnation de la société klaxoon à lui 'verser le rappel de salaire à titre de la clause de non-concurrence, conformément au calcul établi' sans précision du montant sollicité alors même qu'il avait disposé de toute la durée de la procédure de première instance et le délai de l'article 908 du code de procédure civile pour y procéder. Ainsi, il n'a pas présenté l'ensemble de ses prétentions sur le fond dans ses premières conclusions, en sorte que la demande en paiement d'une contrepartie financière au titre de la cause de non-concurrence de 60 972,35 euros est irrecevable en appel.
Sur la rupture du contrat de travail
Le salarié fait grief au jugement de dire son licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse et soutient que :
- il conteste les insuffisances qui lui sont reprochées, au regard de ce que la société admet elle-même, en produisant l'attestation de M. [XO], que ce dernier et M. [C] ont essayé de le convaincre de rester dans la société jusqu'à la date d'engagment de son licenciement, et de ce que, dans un contexte de forte croissance, inhérent au travail acharné de ses équipes commerciales, son travail était reconnu et salué au sein de la société, notamment par la remise du prix du business développeur de l'année 2018 ;
- il a également permis à la société, par son implication, de gagner les plus grosses ventes de 2019 comme en attestent plusieurs de ses collaborateurs ; d'autres attestations produites justifient par ailleurs de ses grandes qualités managériales et comportementales ;
- l'organisation annoncée fin 2018 a été réalisée de manière particulièrement brutale et a entraîné le départ de plusieurs commerciaux ; par ailleurs, et en dépit de ses alertes sur les répercussions en termes de résultats, la société a souhaité concrétiser son projet 'Jack' et ne saurait aujourd'hui lui imputer la baisse des résultats commerciaux pour le début d'année 2019 ;
- les éléments qu'il produit permettent de constater que non seulement M. [I] l'a remercié pour son accueil, mais qu'il a pris le temps d'évoquer avec lui les canaux de ventes et aussi le périmètre de son intervention et ses objectifs ; ils ont toujours entretenu des relations processionnelles et respectueuses durant l'ensemble de leur collaboration, sans que ne puisse lui être reprochée une quelconque attitude déplacée ou agressive envers ce dernier;
- le grief d'insuffisance ne saurait par ailleurs être établi dès lors n'a reçu aucun rappel à l'ordre oral ou écrit de 2009 à 2020, qu'il n'a pu bénéficier, à l'exception d'une formation d'anglais en e-learning au cours de l'année 2015, de la moindre formation, qu'il a été mis à l'écart par M. [C] de l'ensemble des informations stratégiques sur la marche de l'entreprise depuis 2018 et n'a pu donner son point de vue sur les décisions prises depuis 2018 ;
- concernant son attitude prétendument déplacée, il conteste les allégations infondées du courrier de licenciement : il n'a ainsi pas pris à part un membre du Board lors de l'inauguration du Klaxoon store pour critiquer la gestion de l'entreprise mais l'a accueilli et félicité pour son intégration prochaine au Board ; il n'a jamais effectué de points informels mensuels avec le CSE ce dont il ressort de l'attestation d'un de ses membres ; il n'a fomenté aucun projet de réorganisation, modification de management ou de portefeuille client mais simplement mis en place des trinômes commerciaux dans l'industrie constituée pour améliorer l'animation de la performance et il n'a jamais fourni d'informations aux équipes concernant les parts variables 2019 ;
- concernant les écarts de comportement reprochés : les courriels produits, dénonçant l'attitude survenue 8 mois plus tôt à l'égard de Mme [S], ont été orchestrés et planifiés par la directrice des ressources humaines et le CEO de la société ; les autres éléments versés aux débats ne font état d'aucun fait précis, daté ou circonstancié ; les attestations qu'il produit démontrent au contraire qu'il est reconnu pour sa bienveillance et témoignent de l'absence de propos sexistes ou discriminatoires notamment lors de l'IAA d'avril 2019 ; les propos qu'il a pu avoir doivent être analysés tout en prenant en compte l'ambiance détendue régnant au sein de l'entreprise, l'absence de passif disciplinaire le concernant et ses qualité humaines et managériales ;
- le caractère injustifié de son licenciement n'est pas une exception dans l'entreprise, de nombreux salariés ayant également été licenciés du jour au lendemain pour des motifs fallacieux.
La société réplique que :
concernant les insuffisances reprochées au salarié, elles ont consisté en :
- une absence de soutien s'agissant de la nouvelle organisation mise en place : alors qu'il devait fidéliser les abonnés face au déploiement d'un produit standard commercialisé par abonnement à compter du second semestre 2016, il n'est pas parvenu à développer ce nouveau business model ;
- un faible résultat en termes de renouvellement des abonnements pour les deux premiers trimestres de l'année 2019 : en dépit de l'organisation mise en place afin de le rattacher au pôle 'experience client' et 'customer experience' afin qu'il se concentre sur le renouvellement des abonnements grands comptes et le développement du portefeuille afférent, son objectif n'était toujours pas atteint ; la croissance de la société s'est réalisée en raison d'un contexte et d'un marché très dynamique, et non pas du travail acharné du requérant, comme l'affirme ce dernier ;
- des carences managériales et comportementales, concernant notamment le dénigrement de M. [I] opéré à compter de son intégration au sein de la société en tant que salarié, pour tenter de l'évincer, et les agissements néfastes de ce dernier, lequel tente manifestement de perturber l'entreprise même après son départ en instrumentalisant le CSE et ses anciens collaborateurs au moyen d'attestations mensongères ;
concernant les fautes reprochées, les griefs sont relatifs :
- aux critiques formulées par le salarié auprès d'un nouvel investisseur, lequel en a fait part par mail au président de l'entretprise, M. [C], visé par ces critiques relatives à sa gestion ;
- aux réunions mensuelles informelles organisées par le salarié avec les membres du CSE sans mandats ni directives en ce sens, sur des thématiques relevant des réunions de cette instance, dans le but de court-circuiter la direction sur sa compétence en la matière ; la directrice des ressources humaines s'est vu confirmer cette pratique par mail du secrétaire du CSE, alors même que la société ne lui avait jamais donné mandat pour présider de telles réunions, et les attestations produites par le salarié, émanant de membres du CSE, ne remettent pas en cause ce grief ;
- à l'attitude du salarié : concernant d'une part le manque d'intérêt du salarié et de ses équipes commerciales quant aux chiffres présentés par l'équipe commerciale internationale, ce que relate M. [Y], manager, par mail envoyé au président de la société, et concernant ensuite son attitude face au service administration des ventes, ayant fait une alerte auprès de la directrice des ressources humaines afin de dénoncer ses remarques récurrentes pour le moins désobligeantes, voire méprisantes ; le salarié avait par ailleurs déjà fait l'objet d'un recadrage pour des propos insultants et sexistes tenus à l'égard de la communauté portugaise début avril 2019, dépassant le cadre de la liberté de ton au sein d'une équipe ;
- les attestations produites par le salarié, émanant de ses plus proches collaborateurs, ne sont pas de nature à l'exonérer de sa responsabilité quant aux propos tenus aux salariées du service ADV qui se sentaient méprisées à force d'accumulation de remarques et quant aux propos tenus lors du séminaire IAA d'avril 2019, tenus face à l'ensemble des collaborateurs;
- les copies d'écran produites par le salarié, concernant des témoignages postés sur la plateforme balancetastartup, sont non seulement anonymes mais non exhasutifs, le salarié ayant manifestement pris soin de ne pas produire ceux relatifs à son propre comportement.
***
L'employeur peut invoquer dans la lettre de licenciement plusieurs motifs de rupture inhérents à la personne du salarié, à condition de respecter les règles de procédure applicables à chaque cause de licenciement.
Le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit être apprécié au vu des éléments fournis par les parties, étant précisé que, si un doute subsiste, il profite au salarié, conformément aux dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce.
Si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif.
Si l'employeur est juge des aptitudes professionnelles de son salarié et de son adaptation à l'emploi, pour constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, l'insuffisance professionnelle doit être caractérisée par des faits objectifs et matériellement vérifiables. Si la preuve est partagée en matière de licenciement pour cause réelle et sérieuse, il incombe à l'employeur d'apporter au juge des éléments objectifs à l'appui des faits qu'il invoque comme propres, selon lui, à caractériser l'insuffisance professionnelle dont il se prévaut.
L'insuffisance professionnelle se définit comme l'incapacité objective, non fautive et durable, d'un salarié à accomplir correctement la prestation de travail pour laquelle il est employé, c'est-à-dire conformément à ce qu'on est fondé à attendre d'un salarié moyen ou ordinaire, employé pour le même type d'emploi et dans la même situation.
La faute disciplinaire correspond quant à elle, à tout manquement du salarié aux règles de discipline et d'organisation collective du travail énoncées dans le règlement intérieur ainsi qu'aux obligations qui découlent du contrat de travail, à savoir du lien de subordination et de l'appartenance du salarié à une communauté de travail outre à l'obligation générale de loyauté.
L'obligation de loyauté interdit ainsi au salarié de se livrer à des agissements pénalement répréhensibles mais également à des agissements moralement blâmables.
Sur le motif disciplinaire
* Sur le grief : Pendant l'inauguration du Klaxoon Store le 26 novembre 2019 vous avez pris à part un membre du board puis plusieurs collaborateurs pour critiquer cet investissement et plus globalement ma gestion de l'entreprise.
L'employeur verse aux débats le courriel du 3 décembre 2019 que M. [K] lui a adressé: et mentionnant que : 'Je tenais à te relater en synthèse les propos que m'a tenus [D] [P], le sor de l'inauguration du Klaxoon Store le 26 novembre vers 19h. Ils m'ont particulièrement étonné de la part d'un membre important de la direction de Klaxoon à destination d'une personne extérieure qu'il n'avait pas vue depuis plus de 2 ans. Je lui ai annoncé ma nomination imminente en qualité de board membre. Il m'a alors dit que c'était une bonne nouvelle, qu'on avait besoin de mieux s'organiser pour faire face à la croissance. Il m'a tenu des propos essentiellement critiques sur la façon dont u gérais la société : '[M], il est très fort en communication mais on apprend tout au dernier moment. On découvre le lancement d'un nouveau produit mais on n'a pas les argumentaires. On n'a aucun chiffre sur l'activité. On ne sait pas où on en est. On lance une nouvelle politique tarifaire mais les outils ne sont pas paramétrés. On travailler avec des outils inadaptés. Des devis sont encore faits sous word.' Je trouvais cela suffisamment grave pour que je prenne la peine de retranscrire ces propos. Cordialement (...)'
Le caractère contemporain du courriel d'information et de la date de l'inauguration du Klaxoon store sont suffisants pour établir la réalité des propos dénoncés dès lors que le salarié n'apporte aucun élément autre que sa propre dénégation.
Néanmoins, ces propos critiques envers le dirigeant lors d'une conversation avec un membre du bureau, portant sur l'organisation et les outils de travail, ne caractérise pas une insubordination ni un manquement à son obligation de loyauté. Ce fait ne sera pas retenu comme fautif.
* Sur le grief : Le 9 décembre 2019, le Comité Social et Economique nous a informé que vous teniez avec eux un point mensuel à votre initiative pour évoquer les sujets relevant du comité, sans m'en avoir informé ni moi, ni [HU] [E] qui pilote le CSE, et en nous tenant dans l'ignorance de la teneur de ces échanges.
Au soutien de ce grief, l'employeur produit le courriel de la DRH Mme [E] du 9 décembre 2019, qui indique : '[M], Pour info, lors d'un point comité social et économique ce jour, j'ai appris que [D] voit en off Gantant et Pierre V tous les mois pour faire le point sur les sujets qui relèvent du CSE, sans jamais m'en informer, et également qu'il aurait promis en juillet à l'équipe commerciale, une prime collective si le objectifs étaient atteints à la fin décembre...'
Ce courriel qui n'est pas corroboré par d'autres éléments, alors qu'il ressort de l'attestation de M. [L], membre du comité social et économique et exerçant comme ingénieur d'affaires au sein de la société sous la direction de M. [P], laquelle n'est pas utilement contestée, que lors d'un échange avec Mme [E] au comité social et économique il avait été convenu que certaines remontées des salariés pouvaient être traitées directement par les managers de proximité et qu'il avait ainsi proposé avec M. [B], à M. [P], d'effectuer un point ensemble régulièrement, que dans ce cadre, ils avaient échangé à deux reprises à propos d'une question concernant la prise en charge des valises et de l'inquiétude de l'équipe 'industrie' concernant un possible changement de méthode d'animation d'équipe.', est insuffisant pour établir l'existence de réunions régulières sur des sujets relevant du comité social et économique. D'ailleurs, la DRH était elle-même à l'initiative portant sur le dialogue manager de proximité et représentants du personnel de l'agence de [Localité 5], étant précisé que les échanges informels avec les représentants du personnel de l'agence de [Localité 5] participent d'une forme de dialogue social courant dans les structures comprenant divers établissement.
Le grief à ce titre ne sera donc pas retenu comme fautif.
* Sur le grief : Le même jour le CSE nous a également alerté sur l'existence d'un projet de nouvelle organisation de l'équipe commerciale auquel vous travailliez et qui inquiétait les équipes au regard des nouvelles modifications de leur périmètre qui pourraient y être associées, alors que vous ne m'avez jamais informé d'une telle initiative, d'autant plus déplacée que selon les informations remontées par le CSE ce projet de nouvelle organisation impacterait le périmètre Customer Experience qui n'est pas sous votre responsabilité et que le manager de cette équipe était lui aussi tenu à l'écart de vos projets.
Le 11 décembre 2019, Mme [E] a informé le dirigeant à la suite de la réunion du comité social et économique portant sur le budget 2019, qu'en fin de réunion, un point avait été remonté
concernant l'inquiétude des équipes quant à un projet de nouvelle organisation de l'équipe commerciale initiée par [D] et qu'elle reviendrait vers lui ultérieurement, n'étant pas informé de ce projet.
L'existence même d'un projet de nouvelle organisation de l'équipe commerciale, est contredite par les attestations concordantes de MM [F] et [R]. Le premier indique effectivement : 'J'atteste qu'il n'y a eu aucune organisation de l'équipe industrie à la fin de l'année 2019 et début 2020. Il s'agit d'une rétrospective de l'année 2019 à mon initiative et celle de [J] [N], dans le cadre des missions qui nous sont respectivement confiées, et ayant pour objectif de servir la performance commerciale, l'interaction, la capitalisation, le partage des informations et le ciblage liées à nos activités (...) J'atteste que ce retour d'expérience a été fait avec les managers de cette équipe, et que [D] [P] a été informé uniquement lorsque nous avions abouti à des propositions. Il a été par ailleurs sur cette période très sollicité et l'un des acteurs principaux de plusieurs dossiers...'. Le second atteste également qu'il n'a jamais été question de réorganisation commerciale fin 2019 début 2020 mais uniquement d'ajustements réalisés en autonomie avec [J] [N] et les business Managers de l'équipe Industrie, du fait des mouvement au sein de l'équipe en 2019.
Le grief à ce titre n'est donc pas établi.
* Sur le grief : Le 23 janvier 2020, nous avons également découvert via des questions posées par le CSE, que les informations que vous auriez communiquées oralement aux équipes commerciales concernant les parts variables 2019 ne seraient pas conformes à ce qui a été validé contractuellement. De surcroit, nous avons à répondre à des questionnements sur un manque de transparence sur le suivi des résultats et sur des différences de traitement non justifiées.
Ce grief, certes postérieur à l'engagement de la procédure de licenciement, doit être examiné par la cour et contrairement à ce qu'a considéré le conseil de prud'homme, ne saurait être écarté sur ce seul motif.
La teneur exacte de la communication orale effectuée par M. [P] sur les parts variables 2019 n'est pas connue de la cour et dans ces circonstances, la déloyauté dans la communication opérée n'est pas établie. Le caractère fautif de ce grief sera rejeté.
* Sur le grief : De surcroît, vous vous êtes permis des écarts de comportement à l'égard de membres d'autres équipes qui ne sont pas plus acceptables. Nous avons reçu le 13 décembre une plainte formelle de salariées de l'équipe Finance concernant, outre des reproches concernant leur travail, des propos sexistes et outrageants (« Bonjour les pintades»). Et cela alors même que [HU] [E] vous avait déjà recadré suite au dernier IAA début avril 2019 pour le même type de comportement (insulte à la communauté portugaise sous un prétexte humoristique, devant tous les salariés).
M. [O] atteste que lors du séminaire entreprise du 2 avril 2019, plusieurs personnes de son équipe lui ont remonté avoir été choquées des blagues sexistes et sur la communauté portugaise qui ont été faites par M. [P] devant l'ensemble des collaborateurs.
La réalité de l'usage de l'expression 'travail de portugais' par le salarié lors d'une réunion plénière est attestée par le témoignage de M. [T], produit par le salarié, même s'il indique que cette remarque sur un ton humoristique était pour mettre en valeur la qualité du travail de cette personne.
Dans ces circonstances, le message de Mme [E] du 13 décembre 2019 indiquant au dirigeant qu'elle avait recadré M. [P] le jour de l'IAA début avril, suite aux propos déplacés qu'il avait tenus à l'égard de la communauté portugaise et à l'égard des femmes face à l'ensemble des salariés, vient corroborer la réalité des faits que la réalité du recadrage.
Au sein de son courriel adressé au dirigeant et à la DRH le 13 décembre 2019, Mme [S], responsable du service administration des ventes a indiqué à la direction que : 'Les relations ADV/[D] peuvent être qualifiées de mitigées et ne sont pas de nature à favoriser une relation de collaboration bienveillante et efficace. L'équipe ADV a souvent l'impression de ne pas être considérée et peu soutenue dans son périmètre. Ce ressenti est notamment dû à quelques remarques récurrentes pour le moins maladroite, désobligeantes, voire méprisantes comme : 'Bonjour les pintades', ' alors, ça fature' Il faut facturer plus!!!', 'Vous ne facturez pas assez'... Cela est d'autant plus vrai que ces messages sont parfois claironnés dans l'appartement Finance sans discrétion et sans esprit constructif ce qui est dommageable pour toute l'équipe. Le peu d'échange par mail se résume souvent à quelques mots, sans bonjour ni merci et très peu clairs quant aux suites à donner'.
Si ce courriel a été adressé à la suite d'une demande de renseignement de la direction sur la perception du salarié par ses équipes et que cela se produisait dans le contexte de rupture des négociations de sortie de la société de M. [P] qui était détenteur de parts sociales, il n'en demeure pas moins que les propos rapportés portent en eux la preuve de leur sincérité, s'inscrivant dans le type d'humour discriminatoire, que le salarié avait pu manifester lors du séminaire précédent devant une assemblée d'une centaine de collaborateurs.
Ces propos tenu à la cantonade : 'bonjour les pintades', caractérisent, en considération du devoir d'exemplarité attaché au positionnement managérial du salarié, directeur de développement, devant promouvoir la lutte contre le sexisme et toute forme de discrimination au sein de l'entreprise, exactement relevé par le conseil de prud'homme, un abus de sa liberté d'expression, constitutif d'une cause réelle et sérieuse de licenciement. La mesure de licenciement n'était pas disproportionnée et ne portait pas une atteinte excessive à la liberté d'expression du salarié qui avait été précédemment recadré pour des propos déplacés à connotation discriminatoire au sein d'une assemblée qui ne connaissait pas la réalité de ses origines ou les détails de sa vie personnelle.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse.
Sur les conséquences de la rupture
1- Sur l'ancienneté du salarié et le reliquat d'indemnité de licenciement
Le salarié fait valoir qu'il a rejoint la société dès le mois 2009 et endossé les fonctions de directeur développement, et que la société est redevable à ce titre d'un complément d'indemnité de licenciement au titre de l'ancienneté non prise en compte.
La société réplique que :
- si le salarié a été associé à la société dès 2009, il demeurait en parallèle toujours directeur d'agence à temps plein d'avril 2006 à janvier 2012 pour la société Elitys, et les attestations produites par le salarié sont contradictoires ;
- les seuls mails produits par ailleurs, datant de 2009, avait pour seul but de l'associer au lancement de l'activité Regards, en tant qu'associé, mais il n'a été embauché qu'à compter de 2014, son aide n'étant avant cette date que ponctuelle ;
- son action en revendication de reprise d'ancienneté est prescrite par application de l'article L. 1471-1 comme de l'article L. 3245-1 du code du travail.
***
La prescription de l'action est déterminée par la nature de la créance.
En l'occurrence, la demande reliquat d'indemnité de licenciement est une créance salariale, soumise à la prescription triennale, courant à compter du licenciement, en sorte que la demande présentée lors de la saisine du conseil de prud'homme le 12 mai 2020, à peine quatre mois après son licenciement est recevable.
Le salarié était associé au sein de la société klaxoon et c'est dans ce cadre qu'il a pu être associé au lancement de l'activité de la société en 2009. Il ne justifie pas de l'existence d'un lien de subordination pendant la période renvendiquée de 2009 à 2014, étant précisé qu'il occupait le poste de directeur d'agence au sein de la société Alter jusqu'en 2012. Il se présente d'ailleurs lui-même comme co-fondateur de la société au sein de sa page Linkedin et de son curriculum vitae.
Il sera donc débouté de sa demande de rappel d'indemnité de licenciement et le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.
2- Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Le salarié dont le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse sera débouté de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.
3- Sur les circonstances vexatoires du licenciement
Le salarié soutient que les circonstances de son licenciement sont brutales et vexatoires alors que présent depuis 2009 au sein de la société, il n'a reçu aucun reproche de sa hiérarchie, était au contraire félicité, et il en justifie par la production de nombreuses attestations ; son licenciement était manifestement prévu et orchestré au vu de la longueur de la procédure d'embauche de M. [A], recruté pour le remplacer.
La société réplique qu'elle a pris soin d'annoncer le départ du salarié sans verser dans la polémique et sans qu'aucune parole dénigrante, malveillante ou vexatoire n'ait été prononcée au moment de son départ, qu'elle lui a laissé sa voiture jusqu'au terme du préavis ainsi que ses accès informatiques, et n'a pas commis la moindre faute, soucieuse de préserver les apparences.
***
Le salarié ne justifie pas de circonstances brutales et vexatoires entourant le licenciement, en sorte qu'il sera débouté de sa demande de dommages-intérêts à ce titre
L'attestation de M. [T] qui indique : 'Suite au départ de M. [P], de nombreuses personnes sont venues questionner le CSE. Les questions étaient relatives à la soudaineté de l'annonce du départ et l'incompréhension de ce départ soudain' et les autres attestations versées aux débats ne permettent pas de considérer que l'équipe a été avertie de son départ avant l'entretien préalable comme il le soutient. En outre, la dispense d'exécution du préavis ne caractérise pas une circonstance brutale entourant le licenciement.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire.
4- Sur l'irrégularité de la procédure
Le salarié fait valoir que la procédure de licenciement était irrégulière et lui a causé un préjudice dès lors que la société l'a convoqué à un entretien préalable à son licenciement dans ses locaux parisiens, nonobstant l'existence de locaux lyonnais au sein desquels il travaillait, peu important qu'il ait, ou non, remis en cause le lieu de cet entretien ; l'intimée ne démontre pas qu'il préférait que l'entretien se déroule à [Localité 6] comme elle le soutient.
La société réplique que c'est le salarié qui a préféré, compte tenu du mouvement social de 2020, que l'entretien se tienne à [Localité 6], que le salarié ne démontre pas son préjudice, et que l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne saurait se cumuler avec l'indemnité pour licenciement irrégulier ne se cumulent pas le cas échéant.
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En application de l'article L. 1235-2 du code du travail, alinéa 5, lorsqu'une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d'un salarié intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L. 1232-4, L. 1233-11, L. 1233-12 et L. 1233-13 ait été observée ou sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.
En l'occurrence, le salarié qui s'est rendu à l'entretien préalable au sein des locaux d'IdInvest, fonds d'investissements au capital de la société, ne justifie pas du préjudice résultant de l'irrégularité de la procédure. Il sera débouté de sa demande d'indemnité à ce titre.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'indemnité pour irrégularité de procédure de licenciement.
5- Sur la perte de chance d'exercer les bons de souscription de parts de créateur d'entreprise (BSPCE)
Le salarié fait grief au jugement de le débouter de sa demande à ce titre en soutenant que:
- en lui refusant la communication de la documentation sociale relative aux droits qu'il avait acquis au titre de ses BSPCE, la société est à l'origine d'une perte de chance de souscrire 36.780 actions de la société, et le dommage direct minimum s'élève à 2.059.312 euros compte tenu de ce qu'il aurait pu souscire à ces actions pour le prix fixe et prédeterminé de 641.443 euros et pour lesquelles il avait la capacité financière ;
- la rupture de son contrat de travail n'a pas été loyale au vu des enjeux financiers que représentent des BSPCE 2016 complémentaires dont il était titulaire ; M. [C] a profité de la subordination de l'exercice des BSPCE au contrat de travail pour se défaire de ses engagements concernant son intéressement individuel au capital ;
- il est établi que sa convocation à l'entretien préalable de licenciement rendait immédiatement caducs les BSPCE déténus, de sorte que le lien de causalité entre la rupture sans cause réelle et sérieuse de son licenciement et la perte directe de la faculté d'exercer ses BSPCE.
La société soutient que :
- le salarié n'avait pas l'intention de lever ses BSPCE, mais sa véritable préoccupation était de monnayer son départ en valorisant les titres déjà acquis sans avoir à débourser le moindre euros ;
- la valeur de l'action ayant chutée, il a en réalité évité de perdre plus de 600.000 euros et ne peut plus rien lui reprocher ; sa demande est devenue sans objet ;
- le salarié bénéficiait d'une totale liberté pour exercer ses BSCPE en dehors de toute clause restrictive existant sur le sujet avant l'engagement de la procédure de licenciement, dont il était pourtant averti, mais n'a pas souhaité concomitament payer le prix de souscription des action, soit 641.442,20 euros durant les 4 années de leur détention ; ce dernier n'avait pas l'intention d'exercer ses bons et d'acheter de nouveaux titres de la société ;
- elle a tout mis en oeuvre pour préserver les droits d'associés du salarié, M. [C] étant intervenu auprès des associés, alors que rien ne l'y obligeait, pour présenter le départ du requérant comme consensuel et éviter une décote de 90% ;
- elle conteste l'évaluation démesurée de la prétendue perte de chance du salarié.
***
Selon les dispositions de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à la réparer.
En l'occurrence, le licenciement du salarié à raison duquel il ne peut plus exercer son droit à souscription de parts de créateur d'entreprise repose sur une cause réelle et sérieuse. Aucune faute de l'employeur n'en découle, en sorte que la responsabilité délictuelle de la société à raison de ce licenciement ne saurait être retenue.
Le salarié sera débouté de sa demande de dommages-intérêts au titre d'une perte de chance de souscription et de la demande subséquente d'expertise afférente à l'évaluation du préjudice financier invoqué.
Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.
Sur les demandes accessoires
En conséquence de la décision, il convient d'ordonner à la société klaxoon de remettre à M. [P] dans le délai de deux mois à compter de ce jour un bulletin de salaire rectifié conforme au présent arrêt outre une attestation Pôle emploi rectifiée conformément au présent arrêt.
Il n'y a pas lieu à application de l'article L.1235-4 du code du travail.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
La société klaxoon succombant sera condamnée aux entiers dépens de l'appel. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande de faire bénéficier le salarié d'une indemnité complémentaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la société klaxoon à lui verser la somme de 1.800 euros au titre de l'appel.
Le jugement entrerpis sera confirmé sur ses dispositions portant sur les dépens et l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile;
Dans la limite de la dévolution,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société regard devenue klaxoon à verser à M. [P] 13.000 euros pour l'année 2018, 12.000 euros pour l'année 2019 et 11.000 euros pour l'année 2020 au titre des heures supplémentaires, en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect du droit à repos compensateur et de sa demande de dommages-intérêts pour non-respect des temps de repos et durée maximale de travail, en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de contrepartie financière au titre de la clause de non-concurrence;
Statuant à nouveau dans cette limite,
Déclare irrecevable la demande en paiement d'une contrepartie financière au titre de la clause de non-concurrence ;
Condamne la société klaxoon à verser à M. [P] les sommes suivantes :
27.868,27 euros à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires accomplies en 2018 outre 2.786,82 au titre de l'indemnité de congés payés afférente,
26.699,65 euros à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires accomplies en 2019 outre 2.669,96 euros au titre de l'indemnité de congés payés afférente,
15.439,44 euros au titre de l'indemnité de contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2018,
14.582,07 euros au titre de l'indemnité de contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2019,
6.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect des plafonds et seuils en matière de repos et durée maximale de travail ;
Déboute M. [P] du surplus de ses demandes ;
Rappelle que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut ;
Rappelle que les intérêts au taux légal sur les créances de nature salariale courent à compter de la demande, soit à compter de la notification à la société klaxoon de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes ;
Rappelle que les intérêts au taux légal sur les créances de nature indemnitaires courent à compter de ce jour ;
Confirme le jugement entrepris sur le surplus,
Y ajoutant,
Condamne la société klaxoon à verser à M. [P] la somme complémentaire de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société klaxoon aux dépens de l'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
N° RG 21/05569 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NXEJ
[P]
C/
Société SAS KLAXOON
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes de LYON CEDEX
du 17 Juin 2021
RG : 20/01035
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 02 AVRIL 2025
APPELANT :
[D] [P]
né le 10/01/1980
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Mathieu LAJOINIE de la SELAS SELAS JABERSON, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉE :
SOCIETE KLAXOON, anciennement dénommée SOCIETE REGARD
RCS de Rennes N° 511 962 219
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Weena LAIGLE de l'AARPI ACTIO AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Janvier 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Catherine MAILHES,Présidente
Anne BRUNNER, Conseillère
Antoine-Pierre D'USSEL, Conseiller
Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffière.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 02 Avril 2025, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MAILHES, Présidente et par Malika CHINOUNE, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [P] a signé un contrat à durée indéterminée le 22 janvier 2014, pour le poste de directeur de développement au sein de la société regard devenue la société klaxoon, position 3.1, coefficient 170, statut cadre de la convention collective Syntec.
La société employait habituellement au moins 11 salariés au moment du licenciement.
Le 14 janvier 2020, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à licenciement pour le 24 janvier 2020.
La société lui a notifié son licenciement par courrier du 29 janvier 2020, dans les termes suivants :
' 1. Au cours de cet entretien, j'ai rappelé que vous avez été embauché en qualité de Directeur Développement le 22 janvier 2014. Dans le contexte de l'époque, vos missions étaient de développer l'activité de Regards en recrutant et manageant une équipe de commerciaux.
Depuis juin 2015, Regards est devenu une holding à la tête de 2 filiales : Regards Services abritant les activités historiques du groupe (développement de modules e-learning et de logiciels métiers à destination de clients grands comptes) et Klaxoon abritant le nouveau modèle économique du groupe consistant en la vente d'une solution SAAS et de produits hardwares associés.
A partir du 2ème semestre 2017, l'activité de Regards Services a été progressivement arrêtée afin de concentrer toutes les forces vives du groupe sur le développement de Klaxoon qui non seulement est l'aboutissement de la philosophie portée par le groupe mais qui constitue également une activité plus rentable et avec une récurrence de revenus.
Vous avez suivi ce repositionnement stratégique et vu vos fonctions évoluer de la vente de services vers la vente de produits.
2. Après deux exercices complets de recentrage de l'activité sur Klaxoon, nous devons constater des insuffisances récurrentes dans l'organisation et la direction du développement commercial.
En octobre 2018, nous avons dû prendre la décision de sortir les entrants et les renouvellements hors grands comptes de votre périmètre afin qu'ils soient correctement traités, ce qui n'était pas le cas, et que vous concentriez votre action sur les grands comptes et les comptes à fort potentiel.
Au lieu de vous concentrer sur l'amélioration des résultats commerciaux et le développement des comptes, notamment l'augmentation du panier moyen, vous n'avez pas soutenu cette nouvelle organisation que vous avez annoncée brutalement à vos équipes sans accompagner la décision.
A la fin du 1er trimestre 2019, nous avons constaté que les résultats en termes de renouvellement des abonnements étaient catastrophiques sur votre périmètre, notamment en comparaison des résultats de la nouvelle équipe constituée fin 2018. Vous avez reconnu à cette époque ne pas avoir dirigé vos équipes sur cette mission et les avoir concentrées sur la conquête de nouveaux clients alors que le renouvellement et la création de revenus récurrents sont la base de notre business model.
En février 2019, nous avons pris la décision de recruter un manager commercial en charge de développer les ventes indirectes, axe stratégique que vous n'avez jamais vraiment travaillé. Là encore, vous n'avez pas soutenu cette décision et avez au contraire adopté un comportement agressif à son encontre dès son arrivée en le remettant en cause et le taxant d'incompétence.
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Les résultats commerciaux sur votre périmètre ne s'améliorant pas au cours du 2ème trimestre 2019, nous avons dû de nouveau intervenir en septembre. J'ai dû m'impliquer personnellement dans la mise en place d'un nouveau business model et l'accompagnement de vos équipes, initiative que vous n'avez non seulement pas soutenue mais par ailleurs ouvertement critiquée. Ce nouveau modèle a été lancé pour le dernier trimestre 2019 et a déjà fait ses preuves puisqu'il a permis une amélioration significative des ventes sur cette période, sans toutefois permettre de rattraper le retard pris lors des trois premiers trimestres.
Par conséquent, nous devons faire le bilan qu'au-delà de la conduite des actions menées sur les grands comptes, vous avez manifesté dans l'exercice de vos fonctions de Directeur Développement des carences managériales, mais aussi comportementales en vous inscrivant à l'encontre des actions prises pour redynamiser notre activité commerciale, alors que nos résultats commerciaux sont nettement en-deçà du business plan.
3. A cela s'ajoute l'attitude que vous avez adoptée ces deux derniers mois, après avoir, courant octobre 2019, formulé votre souhait de vendre vos titres dans le capital de la holding Regards et de "prendre du recul" avant de poursuivre d'autres projets professionnels, et d'avoir rencontré à ce sujet des membres du board (Comité Stratégique), sans que cela ait débouché sur une suite favorable à votre projet.
Nous avons en effet constaté successivement les faits suivants :
' Pendant l'inauguration du Klaxoon Store le 26 novembre 2019 vous avez pris à part un membre du board puis plusieurs collaborateurs pour critiquer cet investissement et plus globalement ma gestion de l'entreprise.
' Le 9 décembre 2019, le Comité Social et Economique nous a informé que vous teniez avec eux un point mensuel à votre initiative pour évoquer les sujets relevant du comité, sans m'en avoir informé ni moi, ni [HU] [E] qui pilote le CSE, et en nous tenant dans l'ignorance de la teneur de ces échanges.
' Le même jour le CSE nous a également alerté sur l'existence d'un projet de nouvelle organisation de l'équipe commerciale auquel vous travailliez et qui inquiétait les équipes au regard des nouvelles modifications de leur périmètre qui pourraient y être associées, alors que vous ne m'avez jamais informé d'une telle initiative, d'autant plus déplacée que selon les informations remontées par le CSE ce projet de nouvelle organisation impacterait le périmètre Customer Experience qui n'est pas sous votre responsabilité et que le manager de cette équipe était lui aussi tenu à l'écart de vos projets.
' Le 23 janvier 2020, nous avons également découvert via des questions posées par le CSE, que les informations que vous auriez communiquées oralement aux équipes commerciales concernant les parts variables 2019 ne seraient pas conformes à ce qui a été validé contractuellement. De surcroit, nous avons à répondre à des questionnements sur un manque de transparence sur le suivi des résultats et sur des différences de traitement non justifiées.
Ces agissements caractérisent un manquement à votre obligation de loyauté et perturbent le fonctionnement de la direction et de l'entreprise, entrainant corrélativement une désorganisation fortement préjudiciable en période de plein développement.
De surcroît, vous vous êtes permis des écarts de comportement à l'égard de membres d'autres équipes qui ne sont pas plus acceptables. Nous avons reçu le 13 décembre une plainte formelle de salariées de l'équipe Finance concernant, outre des reproches concernant leur travail, des propos sexistes et outrageants (« Bonjour les pintades»). Et cela alors même que [HU] [E] vous avait déjà recadré suite au dernier IAA début avril 2019 pour le même type de comportement (insulte à la communauté portugaise sous un prétexte humoristique, devant tous les salariés).
Lors de l'entretien préalable, vous n'avez apporté aucune explication concrète sur ces reproches, vous vous êtes borné à nier tout grief à votre encontre et vous n'avez rien manifesté qui laisse entrevoir une amélioration de la situation.
Nous regrettons donc d'être contraints de vous notifier par la présente votre licenciement, d'une part en raison des carences que vous avez manifestées depuis la réorientation du business model de la société et d'autre part en raison des agissements fautifs rappelés ci-dessus. '
Le 12 mai 2020, contestant son licenciement, M. [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de voir la société klaxoon condamnée à lui verser un complément d'indemnité de licenciement (18.882,56 euros), des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (120.520,96 euros), des dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire (72.312,58 euros), des dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement (12.052,70 euros), une somme à titre de rappel d'heures supplémentaires (total de 278'916,06 euros), des dommages et intérêts pour repos compensateurs non pris (208.656,60 euros), une indemnité au titre du travail dissimulé (72.321,58 euros), des dommages et intérêts pour non-respect du temps de repos et de la durée maximale de travail (72.321,58 euros), un rappel de salaire au titre de sa rémunération variable 2017 à 2019 (total de 652'313,66 euros), et congés payés afférents (65.231,37 euros), des dommages et intérêts pour perte de chance d'exercer ses BSPCE, de voir prospérer ses actions et de réaliser une plus-value (9.153.034,02 euros) outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile (10.000 euros), à lui remettre les bulletins de salaire et documents de fin de contrat rectifiés avec astreinte, au remboursement des indemnités Pôle Emploi à hauteur de 6 mois de salaire.
La société regard devenue la société klaxoon a été convoquée devant le bureau de conciliation et d'orientation par courrier recommandé avec accusé de réception envoyé le 29 mai 2020.
La société regards devenue la société klaxoon s'est opposée aux demandes du salarié et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de celui-ci au versement de la somme de 4.500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 17 juin 2021, le conseil de prud'hommes de Lyon a :
fixé le salaire de M. [P] à 12.052,70 euros mensuels bruts ;
dit que les faits reprochés à M. [P] sont établis et de nature à justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse ;
débouté M. [P] de ses demandes relatives à la nature de son licenciement ;
fixé la date d'embauche de M. [P] au 22 janvier 2014 ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre du caractère vexatoire du licenciement;
débouté M. [P] de ses demandes au titre du non-respect de la procédure de licenciement ;
condamné la S.A.S. REGARDS à verser à M. [P] 13.000 euros pour l'année 2018, 12.000 euros pour l'année 2019 et 11.000 euros pour l'année 2020 au titre des heures supplémentaires ;
débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect du droit à repos compensateur ;
débouté M. [P] de sa demande de reconnaissance du travail dissimulé ;
débouté M. [P] de sa demande au titre de travail égal, salaire égal ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre de la perte de droit à l'exercice des BSCPE ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre de Pôle Emploi ;
condamné la S.A.S. REGARDS à verser à M. [P] la somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif;
condamné la S.A.S. REGARDS au entiers dépens
Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 30 juin 2021, M. [P] a interjeté appel dans les formes et délais prescrits de ce jugement, aux fins de réformation ou d'annulation en ce qu'il : FIXE le salaire de Monsieur [D] [P] à 12.052,70 euros mensuels bruts ; DIT ET JUGE que les faits reprochés à Monsieur [D] [P] sont établis et de nature à justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de ses demandes relatives à la nature de son licenciement ; FIXE la date d'embauche de Monsieur [D] [P] au 22 janvier 2014 ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de ses demandes au titre du caractère vexatoire du licenciement DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de ses demandes au titre du non respect de la procédure de licenciement CONDAMNE la S.A.S. REGARDS à verser à Monsieur [D] [P] 13.000,00 euros pour l'année 2018, 12.000,00 euros pour l'année 2019 et 11.000,00 euros pour l'année 2020 au titre des heures supplémentaires ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect du droit à repos compensateur ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de sa demande de reconnaissance du travail dissimulé ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de sa demande au titre de travail égal, salaire égal ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de ses demandes autitre de la perte de droit à l'exercice des BSCPE ; DÉBOUTE Monsieur [D] [P] de ses demandes au titre de Pôle Emploi ; CONDAMNE la S.A.S. REGARDS à verser à Monsieur [D] [P] la somme de 1.800,00 euros au titre de l'Article 700 du Code de Procédure Civile ; DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif ; CONDAMNE la S.A.S. REGARDS auxentiers dépens.
Aux termes des dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 6 décembre 2024, M. [P] demande à la cour de :
infirmer, en toutes ses dispositions, le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Lyon en date du 17 juin 2021, en ce qu'il a :
fixé le salaire de M. [P] à 12.052,70 euros mensuels bruts ;
dit que les faits reprochés à M. [P] sont établis et de nature à justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse ;
débouté M. [P] de ses demandes relatives à la nature de son licenciement;
fixé la date d'embauche de M. [P] au 22 janvier 2014 ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre du caractère vexatoire du licenciement ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre du non-respect de la procédure de licenciement ;
condamné la S.A.S. REGARDS à verser à M. [P] 13.000 euros pour l'année 2018, 12.000 euros pour l'année 2019 et 11.000 euros pour l'année 2020 au titre des heures supplémentaires ;
débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect du droit à repos compensateur ;
débouté M. [P] de sa demande de reconnaissance du travail dissimulé ;
débouté M. [P] de sa demande au titre de travail égal, salaire égal ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre de la perte de droit à l'exercice des BSCPE ;
débouté M. [P] de ses demandes au titre de Pôle Emploi ;
condamné la S.A.S. REGARDS à verser à M. [P] la somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif ;
condamné la S.A.S. REGARDS aux entiers dépens
statuer à nouveau :
juger que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse ;
condamner en conséquence la société au versement des sommes suivantes :
18.882,56 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement ;
20.520,96 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
juger les circonstances du licenciement comme brutales et vexatoires ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 72.312,58 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire ;
juger que la procédure de licenciement n'a pas été respectée par la société ;
condamner en conséquence la société à la somme de 12.052,70 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement ;
juger que la société n'a pas respecté son obligation de formation, adaptation et réalisation d'entretiens professionnels ;'''
condamner la société à la somme de 72.312,58 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de l'obligation de formation et adaptation ;
juger que la société n'a pas respecté les dispositions juridiques applicables en matière de temps de travail ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 101.620,58 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période allant du 7 mai 2021 au 7 mai 2018, outre 10.162,06 euros au titre des congés payés afférents ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 101.620,58 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période allant du 7 mai 2018 au 7 mai 2019, outre 10.162,06 euros au titre des congés payés afférents ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 75.674,90 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires pour la période allant du 7 mai 2019 au 24 janvier 2020, outre 7.783,70 euros au titre des congés payés afférents ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 188.381,65 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la contrepartie obligatoire en repos;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 72.321,58 euros à titre de travail dissimulé ;
condamner en conséquence la société au versement de la somme de 72.321,58 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du temps de repos et de la durée maximum du travail ;
juger que la société n'a pas respecté le principe à travail égal salaire égal ;
condamner la société au versement de la somme de161.345,97 euros au titre de rappel de rémunération variable pour l'année 2017, outre 16.134,60 euros au titre des congés payés afférents ;
condamner la société au versement de la somme de 246.443,21 euros au titre de rappel de rémunération variable pour l'année 2018, outre 24.644,32 euros au titre des congés payés afférents ;
condamner la société au versement de la somme de 244.524,46 euros au titre de rappel de rémunération variable pour l'année 2019 outre 24.452,45 euros au titre des congés payés afférents ;
débouter la société de sa demande d'irrecevabilité concernant sa demande pour rappel de salaire au titre de la clause de non-concurrence ;
condamner la société à lui verser le rappel de salaire à titre de la clause de non-concurrence, conformément au calcul établi, soit 60.972,35 euros ;
condamner, à titre principal, la société au versement de la somme de 9.153.034,02 euros de dommages et intérêts pour perte de chanche d'exercer ses BSPCE, de voir prospérer ses actions et, le cas échéant, de les céder ;
à titre subsidiaire, diligenter une expertise sur la valorisation de la société mère du groupe Klaxoon en 2020 afin de déterminer la valeur de ses BSPCE dans les plus brefs délais ;
condamner la société au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
ordonner la délivrance de bulletins de paie rectifiés et d'une attestation Pôle emploi régularisée ;
ordonner le remboursement des indemités Pôle emploi à hauteur de 6 mois de salaire;
condamner la société aux entiers dépens.
Selon les dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 11 décembre 2024, la société klaxoon ayant fait appel incident, demande à la cour de :
confirmer le jugement en ce qu'il a fixé le salaire de M. [P] à 12.052,70 euros mensuels bruts, dit que les faits reprochés à M. [P] sont établis et de nature à justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse, débouté M. [P] de ses demandes relatives à la nature de son licenciement, fixé la date d'embauche de M. [P] au 22 janvier 2014, débouté M. [P] de ses demandes au titre du caractère vexatoire du licenciement, débouté M. [P] de ses demandes au titre du non-respect de la procédure de licenciement, débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect du droit à repos compensateur, débouté M. [P] de sa demande de reconnaissance du travail dissimulé, débouté M. [P] de sa demande au titre de travail égal, salaire égal, débouté M. [P] de ses demandes au titre de la perte de droit à l'exercice des BSCPE, débouté M. [P] de ses demandes au titre de Pôle Emploi et condamné M. [P] à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamnée à verser à M. [P] 13.000,00 euros pour l'année 2018, 12.000 euros pour l'année 2019 et 11.000 euros pour l'année 2020 au titre des heures supplémentaires, la somme de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens;
débouter M. [P] de ses demandes relatives aux heures supplémentaires ainsi que ses demandes relatives au paiement de 15.000 euros d'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
débouter M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour l'obligation de formation et d'adaptation ;
juger irrecevable la demande de M. [P] relative au rappel au titre de la clause de non concurrence et en tout état de cause le débouter de cette demande ;
condamner M. [P] à verser à lui verser la somme de 4.500 euros en complément de la condamnation déjà intervenue en première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La clôture des débats a été ordonnée le 12 décembre 2024 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 7 janvier 2025.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'exécution du contrat de travail
1- Sur l'obligation d'adaptation et de formation
Le salarié fait grief au jugement de ne pas avoir statué sur cette demande et fait valoir qu'à l'exception d'une seule formation en anglais en 2015, il n'a pas bénéficié de la moindre formation durant l'ensemble de sa période d'emploi au sein de la société en violation de l'article L. 6321-1 du code du travail et de l'article 48 de la convention collective SYNTEC, et la société ne ramène aucun élément probant venant démontrer le contraire.
La société réplique que le salarié bénéficiait d'une solide expérience dans le management d'équipe et dans la vente de services et aucune évolution de matériel ou de fonctions ne justifiait de formation, la seule demande faite au salarié étant qu'il se recentre sur le renouvellement des abonnements des grands comptes, ce qu'il n'a pas fait ; elle lui a par ailleurs financé les formations conformément à ses souhaits, notamment 47 heures de formation en anglais, et il a participé aux bizweeks annuels sur les techniques de vente animée.
***
L'article L.6321-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, dispose que :
L'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail.
Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.
Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme, notamment des actions d'évaluation et de formation permettant l'accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret.
Les actions de formation mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de développement des compétences mentionné au 1° de l'article L. 6312-1. Elles peuvent permettre d'obtenir une partie identifiée de certification professionnelle, classée au sein du répertoire national des certifications professionnelles et visant à l'acquisition d'un bloc de compétences.
L'article 48 de la convention collective nationale dite Syntec applicable prévoit que pour assumer pleinement ses responsabilités de commandement et d'animation, le personnel d'encadrement (les ingénieurs et cadres et le personnel appartement au groupe 'conception ou gestion élargie' de la grille de classification ETAM, à condition qu'il exerce une fonction de commandement auprès d'autres salariés) doit privilégier de plus en plus les actions de formations, de coordination et de conseil de manière notamment, à contribuer à l'amélioration des rapports humains dans l'entreprise.
Le bon exercice des responsabilités du personnel d'encadrement implique qu'il dispose :
- d'une information spécifique sue la marche générale de l'entreprise ;
- de la possibilité de donner son point de vue à la direction sur cette marche générale de l'entreprise ;
- de la possibilité de participer à des sessions de formation professionnelle, conformément aux dispositions légales et conventionnelles, et de se préoccuper de la formation du personnel dont il est responsable.
En l'occurrence, M. [P] engagé en qualité de directeur de développement, était titulaire d'un diplôme d'ingénieur du Conservatoire national des Arts et Métiers. Il avait une solide expérience de responsable de l'amélioration des méthodes dans l'industrie de plus de 5 ans, de consultant formateur dans un cabinet de conseil spécialisé en formation (un an), de directeur d'agence au sein d'une agence Alten au sein de laquelle il dirigeait 83 personnes (plus de 5 ans) avant d'entrer dans le groupe Regards.
Il a bénéficié d'une formation en anglais de 40 heures entre le 23 décembre 2014 et le 31 juillet 2015, financées par la société.
Il a également participé aux sessions de formation Bizweek portant sur la technique de vente organisées par la société, auxquels il pouvait assister en tant qu'observateur ou bien d'organisateur ou de formateur, comme il ressort des diverses attestations et courriels versés aux débats, notamment en 2016. Sa qualité d'observateur même non inscrit comme participant actif lui permettait de tirer bénéfice de ces formations pour son adaptation à son poste de travail et au maintien de sa capacité à occuper un emploi.
S'il a financé une formation en anglais de 17 heures en septembre 2019, il ne justifie pas avoir sollicité son employeur de bénéficier d'une nouvelle formation en anglais. En conséquence, compte-tenu de la précédente formation dispensée en anglais en 2015 et de la participation du salarié aux bizweeks, il y a lieu de considérer que l'employeur s'est loyalement acquitté de son obligation légale d'adaptation au poste de travail et de son obligation conventionnelle.
Selon les dispositions de l'article L.6315-1 du code du travail, il est prévu que :
A l'occasion de son embauche, le salarié est informé qu'il bénéficie tous les deux ans d'un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives d'évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d'emploi. Cet entretien ne porte pas sur l'évaluation du travail du salarié. Cet entretien comporte également des informations relatives à la validation des acquis de l'expérience, à l'activation par le salarié de son compte personnel de formation, aux abondements de ce compte que l'employeur est susceptible de financer et au conseil en évolution professionnelle.
L'employeur ne justifie pas avoir organisé un entretien professionnel tous les deux ans portant sur les perspectives d'évolution de carrière. Néanmoins, le salarié ne justifie pas de la réalité et de l'ampleur du préjudice qu'il aurait subi à ce titre. Il sera en conséquence débouté de sa demande à ce titre.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de dommages-intérêts à ce titre.
2- Sur les heures supplémentaires
Le salarié conteste le volume d'heures supplémentaires retenu par les juges de première instance et au titre desquelles la société a été condamnée, précisant que :
- il démontre la réalisation des heures supplémentaires réalisées en produisant 8 attestations de salariés quotidiennement présents auprès de lui, de très nombreux SMS professionnels envoyés tôt le matin ou tard le soir, un tableau précis récapitulant les heures effectuées, dans la limite de la prescription applicable, duquel il ressort qu'il effectuait 60 heures par semaines, voir régulièrement plus de 70 ou 80 heures lors des 'bizweek' ou des 'opérations commandos' ;
- la charge de la preuve a été aménagée au gré de la jurisprudence pour que le salarié présente des éléments suffisamment précis à l'appui de sa demande, ce qui est son cas, pour permettre à l'employeur d'y répondre ; en l'espèce, et nonobstant les éléments de preuve fournis, la société ne rapporte pas la preuve contraire, mais admet au contraire ne pas payer les heures supplémentaires réalisées par son équipe commerciale, ce dont il ressort du procès-verbal de la réunion du CSE du 26 mars 2020.
La société réplique que :
- non seulement il connaissait les limites de la durée du travail veillant lui-même à son respect pour les 60 salariés qu'il dirigeait en sa qualité de directeur du développement, mais il faisait partie du top management et organisait à ce titre son temps de travail comme bon lui semblait dans les limites fixées par l'accord relatif à la durée du travail applicable depuis le 1er octobre 2016 ;
- le groupe a appliqué une référence annuelle pour décompter les heures supplémentaires en application de l'accord du 1er octobre 2016 qui se substituait aux dispositions contractuelles antérieures : 37 heures en moyenne par semaine avec l'attribution de jours de repos ; elle assurait également le paiement de 10,33 heures supplémentaires par mois au taux majoré de 25% outre des récupérations ;
- le salarié n'a jamais fait état d'heures supplémentaires au cours de la relation contractuelle et base sa réclamation sur des estimations faites à la louche, à l'appui d'attestations de salariés qui travaillaient moins d'heures que lui et de quelques SMS, non probants ; il ne rapporte aucune preuve matérielle du dépassement contractuelle revendiqué ;
- elle produit à l'inverse un état des heures supplémentaires payées ainsi qu'un état des jours de récupération de 2017 à novembre 2021, la société privilégiant le temps de récupération sur l'indemnisation ; toutes les heures supplémentaires effectuées à la demande de la hiérarchie ou validées a posteriori ont ainsi bien été soit compensées, soit payées ;
- M. [C] n'a jamais indiqué au cours de la réunion du CSE du 20 mars 2020 ne jamais payer les heures supplémentaires, mais a simplement fait savoir qu'il n'était pas favorable à l'installation d'une pointeuse afin de maintenir l'équilibre instauré dans l'entreprise.
***
La durée légale du travail effectif des salariés est fixée à 35 heures par semaine soit 151.67 heures par mois.
La convention collective nationale des bureaux d'étude techniques dans sa rédaction applicable au litige prévoyait que :
Les heures supplémentaires sont les heures de travail accomplies à la demande de l'employeur au-delà de la durée légale ou conventionnelle du travail, compte tenu des modalités d'aménagement du temps de travail retenues.
Dans le cas d'un aménagement du temps de travail sur l'année, les heures supplémentaires sont les heures effectuées sur l'année, au-delà de la durée du travail annuelle, légale ou conventionnelle, applicable dans l'entreprise.
Les heures supplémentaires sont payées conformément aux majorations prévues par la loi.
Le contingent réglementaire s'applique pour les ingénieurs et cadres.
La durée du travail hebdomadaire s'entend des heures de travail effectif et des temps assimilés, étant précisé que selon les dispositions de l'article L.3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles.
Les heures supplémentaires s'accomplissent dans le cadre d'un contingent annuel et ouvrent droit à une contrepartie obligatoire en repos.
En l'espèce, le salarié, engagé à temps complet, était soumis à la durée collective du travail en vigueur dans l'entreprise fixée à 39 heures par semaine aux termes du contrat de travail. Le contrat stipulait également que l'horaire collectif pourra être modifié par l'employeur en fonction des nécessités de l'entreprise.
L'horaire collectif était fixé de 8h30-18h30 avec 1h30 de pause le midi comme il ressort du procès-verbal de réunion du comité social et économique du 26 mars 2020.
Lors de la réunion du comité social et économique UES Regards-Klaxoon du 26 mars 2020, les membres élus avaient posé la question suivante : ' Pourquoi les cadres des équipes Sales ne sont-ils pas au forfait jour ' Qu'est-ce-que des heures supplémentaires et comment les déclarer pour avoir une compensation ''
Il est noté au procès-verbal que : '[M] met en avant le fait qu'il y a des contraintes horaires pour un Sales, liées à son métier (...) Egalement, payer les heures supplémentaires voudrait dire fonctionner avec des 'pointeuses', loin de l'esprit de l'entreprise. Il est en effet impossible de verser ces heures supplémentaires de manière aléatoire et par exemple aujourd'hui le temps passé en pause cigarette, ping-pong etc n'est pas décompté, tout repose sur une confiance réciproque. Il ne faut pas perdre le 'côté humain', la souplesse et l'agilité. Klaxoon n'en serait pas là aujourd'hui sans cela (...)
[HU] indique que le forfait jour n'est plus aussi souple qu'au début car il a été fortement encadré par le législateur ces dernières années et aujourd'hui le suivi engendré est assez important. De plus, dans la convention Syntec, le forfait jour est limité à la position 3 ou à un niveau de salaire au moins égal à 2 fois le plafond de la sécurité sociale.
Le CES répond qu'il est difficile pour un Sales de faire les horaires : 8h30-18h30 avec 1h30 de pause le midi.
[M] et [HU] évoquent tout d'abord le principe d'autonomie inhérent à ce type de métier avec une rémunération variable en fonction des résultats. Or les heures supplémentaires sont des heures demandées par l'employeur uniquement. Si un Sales travaille une heure supplémentaire spontanément, elle n'est pas considérée comme une heure supplémentaire légalement. Elle ajoute que les Sales sont autonomes dans l'organisation : les personnes peuvent gérer également des rendez-vous plus personnels (médicaux par exemple) dans la journée. C'est donc un équilibre qui doit se créer et encore une fois une confiance mutuelle (...)'
Ces déclarations ne manifestent pas l'opposition de l'employeur au paiement d'heures supplémentaires tout en sachant qu'il en a été accompli, mais l'opposition de l'employeur à l'accomplissement d'heures supplémentaires en dehors de ce qu'il a demandé et surtout, sa volonté de ne pas contrôler le nombre d'heures de travail accomplies par les équipes de vendeurs sous prétexte d'autonomie et de confiance.
En conséquence, l'horaire mis en place au sein de la société ne saurait être considéré comme un horaire collectif au sens des articles D.3171-1 et suivants du code du travail.
L'amplitude de l'horaire était de 12 heures et en considération d'une pause de 1h30, de 8,5 heures par jour, soit sur 5 jours de travail par semaine de 42,5 heures habdomadaires.
Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail/ ou de l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L.8112-1 (rédaction issue de la loi 2016-1088 du 8 août 2016), les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.
Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
L'absence de revendication du paiement d'heures supplémentaires pendant la relation salariale, qui ne vaut reconnaissance de l'absence d'heures supplémentaires ou renonciation à son droit, n'empêche pas le salarié d'en réclamer à l'occasion du litige consécutif à la rupture du contrat de travail.
Le salarié verse aux débats :
- les attestations concordantes de Mmes [G], [W], [U], [H], de MM [EV], [F], [V], [X] faisant état de ce que leur directeur travaillait jusqu'à 60 heures par semaine, qu'il était très disponible, jusqu'à tard le soir au téléphone ou par SMS, également lors des opérations 'commando' avec des séances de travail dépassant minuit ;
- les échanges SMS entre M. [P] et un membre du comité social et économique sur la demande de paiement des heures supplémentaires ;
- des sms échangés avec des membres de ses équipes sur des sujets professionnels an dehors des horaires de 8h30 à 18h30 (20h15, 22h32 23h19, 8h06...) ;
- un tableau récapitulatif des heures de travail effectuées de la semaine 18 de l'année 2017à la semaine 18 de l'année 2020 mentionnant le nombre d'heures accomplies par semaine, précisant l'existence de jours fériés, de congés, de rtt, périodes de voyage professionnel à l'étranger) suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre utilement en apportant ses propres éléments.
L'employeur n'apporte pas d'élément de décompte autre que l'application de l'horaire collectif duquel il ressort dores et déjà un horaire hebdomadaire de plus des 37 heures hebdomadaires qu'il invoque.
Il n'est pas contesté qu'il a été fait application d'un accord d'annualisation du temps de travail du 1er octobre 2016 fixant la durée du travail à 1607 heures par an, s'agissant au demeurant de la durée légale annuelle. Ainsi le décompte des heures accomplies s'effectue à l'année.
Sur l'année 2017 incomplète, les heures accomplies par le salarié telles qu'elles ressortent de l'ensemble des éléments versés aux débats ne dépassent pas 1 607 heures par an, en sorte que le salarié ne saurait prétendre à paiement d'heures supplémentaires au-delà des 10,33 heures supplémentaires qui lui ont été réglées par mois.
Sur l'année complète 2018, le salarié a accompli 2025 heures soit 418 heures supplémentaires sur l'année, dont 304,37 heures supplémentaires au-delà des 10,33 heures supplémentaires réglées par mois.
Sur l'année complète 2019, le salarié a accompli 2014 heures soit 407 heures supplémentaires sur l'année dont 293,37 heures supplémentaires au-delà des 10,33 heures supplémentaires réglées chaque mois.
Sur l'année 2020, le salarié n'a pas dépassé le nombre annuel de 1607 heures de travail et ne saurait prétendre à paiement d'heures supplémentaires sur la dite période.
En considération de ses fonctions de directeur de développement avec une soixantaine de collaborateurs dans un secteur en pleine croissance, des attestations versées aux débats qui ne sont pas utilement contestées, les heures accomplies par le salarié au-delà des 37 heures hebdomadaires payées étaient rendues nécessaires par les tâches qui lui étaient confiées.
Il ressort de l'extrait du livre de paie 2017/2021 comme du procès-verbal de réunion du comité social et économique ci-avant cité, qu'il existait au sein de la société un système de jours de repos de récupération des heures supplémentaires. Néanmoins, elle ne justifie pas avoir permis à M. [P] de bénéficier de jours de repos de récupération au titre des heures supplémentaires accomplies alors même qu'il ressort du procès-verbal de réunion de comité social et économique cité ci-avant que certains managers rechignaient à accepter les récupérations sollicitées. Les quelques bulletins de salaire versés aux débats et autres pièces ne font pas apparaître la récupération d'heures supplémentaires par le salarié.
En conséquence, la société reste devoir au salarié en considération de la base salariale de 70,89 euros de l'heure, des majorations applicables de 25% et 50%, les sommes suivantes:
- pour l'année 2018, 27.868,27 euros à titre de rappel de salaire outre 2.786,82 au titre de l'indemnité de congés payés afférente;
- pour l'année 2019, 26.699,65 euros à titre de rappel de salaire outre 2.669,96 euros au titre de l'indemnité de congés payés afférente.
Le salarié sera débouté du surplus de ses demandes au titre des heures supplémentaires. Le jugement entrepris sera infirmé des chefs de condamnation au titre des heures supplémentaires.
3- Sur l'indemnité de contrepartie obligatoire en repos
Le salarié soutient que chaque heure supplémentaire ouvrant droit également à une contrepartie obligatoire en repos qu'il n'a pas perçue, il peut prétendre à ce titre au montant d'une indemnité calculée comme s'il avait pris son repos et à l'indemnité de congés payés correspondante, pour la période du 7 mai 2017 au 24 janvier 2020.
La société ne présente aucun moyen à ce titre.
***
La convention collective nationale ne prévoit pas de contingent annuel d'heures supplémentaires pour les cadres et renvoie aux dispositions légales, en sorte qu'il sera fait application des dispositions de l'article D. 3121-24 du code du travail (issu du décret n°2008-1132 du 4 novembre 2008 resté inchangé) fixant à 220 heures le contingent annuel d'heures supplémentaires.
Le dépassement du contingent donne lieu à compensation selon les dispositions légales de l'article L.3121-38 du code du travail.
Ainsi, compte tenu de l'accomplissement de 418 heures supplémentaires en 2018 et de 407 heures supplémentaires en 2019, la salarié a droit à une contrepartie obligatoire en repos compensateur pour les 198 heures effectuées au-delà du contingent annuel en 2018 et pour les 187 heures effectuées au-delà du contingent annuel en 2019.
Tout salarié dont le contrat est rompu avant qu'il ait pu bénéficier d'un repos compensateur reçoit en application des dispositions de l'article D.3121-23 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, une indemnité en espèce correspondant à ses droits acquis comprenant l'indemnité de congés payés. Il ne peut prétendre à indemnité compensatrice de congés payés indépendante en plus de l'indemnité.
En considération des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel des heures, du droit à repos compensateur équivalent à 100 % de ces heures s'agissant d'une entreprise de plus de vingt salariés et du salaire horaire de base de 70,89 euros, le salarié est en droit de bénéficier d'une indemnité de :
- 15.439,44 euros pour l'année 2018 ainsi calculée : 198 heures x 70,89' + 10% de ce montant ;
- 14.582,07 euros pour l'année 2019 que la société sera condamnée à lui verser.
Le salarié sera débouté de ses demandes au titre des années 2017 et 2020.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'indemnité au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour les années 2018 et 2019.
4- Sur l'indemnité de travail dissimulé
Le salarié fait valoir que la société ne pouvait ignorer la quantité d'heures effectuées, dont la matérialité est établie par les attestations et SMS produits aux débats, de sorte qu'il peut prétendre au versement de l'indemnité dû en cas de dissimulation d'emploi au sens de l'article L. 8221-5 du code du travail.
La société explique que le salarié n'ayant jamais revendiqué le moindre paiement d'heures supplémentaires, il ne saurait y avoir d'intention de ne pas les payer.
***
Il résulte de l'article L. 8221-5 du code du travail que la dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée que si l'employeur, de manière intentionnelle, soit s'est soustrait à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10 relatif à la déclaration préalable à l'embauche, soit s'est soustrait à la formalité prévue à l'article L. 3243-2 relatif à la délivrance d'un bulletin de paie ou a mentionné sur le bulletin de paye un nombre d'heure de travail inférieur à celui réellement effectué.
En l'occurrence, le caractère intentionnel de la minoration du nombre d'heures de travail accompli n'est pas établi et il sera débouté de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article L. 8223-1 du code du travail.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'indemnité à ce titre.
5- Sur les dommages-intérêts pour non-respect des repos obligatoires et de la durée maximum du travail
Le salarié expose qu'il ressort des éléments évoqués antérieurement dans ses écritures que les durées maximales quotidiennes et hebdomadaires, les temps de pause, de repos quotidiens telles que fixées aux articles L. 3121-34 et -35 du code du travail n'ont pas été respectées par la société.
La société s'oppose à cette demande en soutenant que le salarié n'a pas accompli d'heures supplémentaires au-delà de ce qu'il lui a été payé et de ce qu'il a récupéré.
***
Aux termes de l'article L. 3131-1 du code du travail, dans sa version postérieure à l'entrée en vigueur à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, tout salarié bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives, sauf dans les cas prévus aux articles L. 3131-2 et L. 3131-3 ou en cas d'urgence, dans des conditions déterminées par décret.
Le seuil communautaire, qui résulte de la Directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993, modifiée par la Directive 2000/34/CE du Parlement et du Conseil du 22 juin 2000, fixant à 11 heures consécutives la période minimale du repos journalier, se traduit en droit interne par l'interdiction de dépasser l'amplitude journalière de 13 heures, celle-ci étant définie comme le temps séparant la prise de poste de sa fin.
Or, la charge de la preuve du respect des seuils et plafonds prévus en matière de temps de travail tant par le droit de l'Union européenne que par le droit interne incombe à l'employeur.
En l'espèce, la société qui n'apporte aucun élément de contrôle de la durée du travail, ne justifie pas du respect des seuils et plafonds, en sorte qu'en considération de décomptes produits qui font apparaître des semaines à plus de 48 heures de travail et du nombre d'heures supplémentaires accomplies retenues ci-avant, la société a manqué à son obligation touchant à la santé et à la sécurité du salarié et ce manquement a causé un préjudice qui sera entièrement réparé par la somme de 6.000 euros à titre de dommages et intérêts.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de toute demande de dommages-intérêts à ce titre.
6- Sur les rappels de salaire variable et de base
Le salarié fait valoir que la société n'a pas respecté le principe jurisprudentiel 'à travail égal salaire égal' concernant sa rémunération variable comme sa rémunération de base, et fait valoir à ce titre que :
sur la rémunération variable : malgré la mise en place d'une rémunération variable pour tous les collaborateurs du service commercial de la société se trouvant dans une situation comparable à la sienne au sens de l'article L. 3221-4 du code du travail, lesquels bénéficiaient sans exception d'une prime sur le chiffre d'affaire réalisé par chaque salarié du service, il n'a jamais pu bénéficier de la moindre prime ;
sur la rémunération de base : à l'instar de la rémunération de base, il n'a jamais pu bénéficier de revalorisation de son salaire fixe depuis de nombreuses années en dépit de l'hyper croissance de la société et de son travail acharné.
La société nie toute violation de l'égalité de traitement et soutient que le salarié n'était pas dans une situation comparable à celle des deux salariés dont il fait référence : Mme [N], responsable commerciale sous sa subordination et bénéficiant d'un salaire de base moitié moins important que le sien ; M. [A], lequel a un périmètre d'intervention bien plus important que le sien, de sorte qu'il n'est pas dans la même situation que ce dernier, pas la même fonction et pas les mêmes responsabilités, et qui n'a par ailleurs pas assuré son remplacement.
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Le principe 'à travail égal, salaire égal' dont s'inspirent les articles L. 1242-14, L. 1242-15, L. 2261-22.9, L. 2271-1.8° et L. 3221-2 du code du travail impose à l'employeur d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous les salariés.
Ainsi, n'effectuent pas un travail de valeur égale, des salariés qui exercent des fonctions différentes.
Le principe d'égalité de traitement s'étend à l'ensemble des droits individuels et collectifs et notamment en matière d'évolution et progression de carrière.
Pour autant l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction détermine les rémunérations et peut fixer des salaires différents pour tenir compte des compétences et capacités de chaque salarié, de la nature des fonctions ou des conditions de leur exercice. Il peut ainsi accorder des avantages particuliers à certains salariés, mais c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique puissent bénéficier de l'avantage ainsi accordé et que les règles déterminant l'octroi de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables et pertinents au regard de l'avantage considéré.
En application de l'article 1353 du code civil, il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe sus-visé de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération et il incombe ensuite à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence.
Il est un fait que le salarié a demandé à bénéficier d'une rémunération variable sur le chiffre d'affaires en plus de sa rémunération de base.
Sa comparaison avec Mme [N] qu'il indique être placée directement sous sa responsabilité, sans évoquer la fonction occupée par cette dernière et son niveau de responsabilité empêche de considérer que M. [P], directeur du développement se trouvait dans une situation comparable à cette dernière. Il ne se trouvait pas plus dans une situation comparable à celle des commerciaux qu'il manageait. Il se saurait ainsi prétendre à un rappel de salaire au titre d'une rémunération variable.
Lors de la conclusion du contrat de travail en janvier 2014, le salaire de directeur de développement était fixé à 5100 euros brut pour 169 heures par mois soit 61 200 euros brut annuel. Il était passé à 7.082,64 euros en octobre 2016 incluant l'avantage en nature de 207,63 euros et à environ 11.800 euros mensuel en 2019. Ce faisant, c'est à tort que le salarié se plaint de ne pas avoir bénéficié d'augmentations régulières comme les autres salariés.
Le salarié soutient par ailleurs l'existence d'une différence de rémunération entre lui et M. [A] qu'il soutient être son remplaçant.
Or les éléments versés par l'employeur, organigramme et courriels, démontrent sans qu'il soit nécessaire de produire le contrat de travail de M. [A], que ce dernier occupait un poste de directeur général des ventes et pilotait l'ensemble des canaux de vente : KA/HPA- indirect- international- US, s'inscrivant dans le cadre de la restructuration des ventes, alors que le poste de directeur du développement occupé par le salarié était limité au secteur 'KA/HPA' et qu'il a été remplacé par un directeur commercial M. [Z]. Il s'ensuit que la situation de M. [A] n'est pas comparable à celle de M. [P], ne s'agissant pas des mêmes fonctions occupées.
Le salarié sera en définitive débouté de sa demande de rappel de salaire que ce soit le salaire variable ou le salaire de base sur le fondement de d'une inégalité de traitement. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.
7- Sur la clause de non-concurrence
Le salarié fait valoir à titre liminaire que cette demande a bien été évoquée au sein de ses conclusions de première instance et lors de la plaidoirie devant le conseil de prud'hommes et ne saurait être déclarée irrecevable ; il est dans l'attente d'éléments permettant de chiffrer exactement cette demande, et il devra être pris en compte le calcul contenu au sein du pacte d'associés, plus favorable que les dépositions contractuelles.
La société fait valoir que le salarié n'ayant pas soutenu cette demande devant le conseil de prud'hommes, ni à l'écrit ni à l'oral, il ne peut s'en prévaloir en appel ; elle a quoi qu'il en soit bien appliqué la clause insérée dans le pacte d'associé et a été rempli de ses droits sur ce point.
***
C'est à tort que la société se prévaut de l'existence d'une demande nouvelle en appel puisque le salarié avait sollicité un rappel de salaire au titre de la clause de non-concurrence dans le cadre de la première instance, sans pour autant la chiffrer.
Il résulte des dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au litige, que les parties doivent présenter dès leurs premières conclusions en appel, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond mais que demeurent recevables dans les limites des chefs de jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou révélation d'un fait.
En l'occurrence, au sein de ses premières conclusions en appel remises à la cour le 28 septembre 2021, M. [P] a sollicité la condamnation de la société klaxoon à lui 'verser le rappel de salaire à titre de la clause de non-concurrence, conformément au calcul établi' sans précision du montant sollicité alors même qu'il avait disposé de toute la durée de la procédure de première instance et le délai de l'article 908 du code de procédure civile pour y procéder. Ainsi, il n'a pas présenté l'ensemble de ses prétentions sur le fond dans ses premières conclusions, en sorte que la demande en paiement d'une contrepartie financière au titre de la cause de non-concurrence de 60 972,35 euros est irrecevable en appel.
Sur la rupture du contrat de travail
Le salarié fait grief au jugement de dire son licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse et soutient que :
- il conteste les insuffisances qui lui sont reprochées, au regard de ce que la société admet elle-même, en produisant l'attestation de M. [XO], que ce dernier et M. [C] ont essayé de le convaincre de rester dans la société jusqu'à la date d'engagment de son licenciement, et de ce que, dans un contexte de forte croissance, inhérent au travail acharné de ses équipes commerciales, son travail était reconnu et salué au sein de la société, notamment par la remise du prix du business développeur de l'année 2018 ;
- il a également permis à la société, par son implication, de gagner les plus grosses ventes de 2019 comme en attestent plusieurs de ses collaborateurs ; d'autres attestations produites justifient par ailleurs de ses grandes qualités managériales et comportementales ;
- l'organisation annoncée fin 2018 a été réalisée de manière particulièrement brutale et a entraîné le départ de plusieurs commerciaux ; par ailleurs, et en dépit de ses alertes sur les répercussions en termes de résultats, la société a souhaité concrétiser son projet 'Jack' et ne saurait aujourd'hui lui imputer la baisse des résultats commerciaux pour le début d'année 2019 ;
- les éléments qu'il produit permettent de constater que non seulement M. [I] l'a remercié pour son accueil, mais qu'il a pris le temps d'évoquer avec lui les canaux de ventes et aussi le périmètre de son intervention et ses objectifs ; ils ont toujours entretenu des relations processionnelles et respectueuses durant l'ensemble de leur collaboration, sans que ne puisse lui être reprochée une quelconque attitude déplacée ou agressive envers ce dernier;
- le grief d'insuffisance ne saurait par ailleurs être établi dès lors n'a reçu aucun rappel à l'ordre oral ou écrit de 2009 à 2020, qu'il n'a pu bénéficier, à l'exception d'une formation d'anglais en e-learning au cours de l'année 2015, de la moindre formation, qu'il a été mis à l'écart par M. [C] de l'ensemble des informations stratégiques sur la marche de l'entreprise depuis 2018 et n'a pu donner son point de vue sur les décisions prises depuis 2018 ;
- concernant son attitude prétendument déplacée, il conteste les allégations infondées du courrier de licenciement : il n'a ainsi pas pris à part un membre du Board lors de l'inauguration du Klaxoon store pour critiquer la gestion de l'entreprise mais l'a accueilli et félicité pour son intégration prochaine au Board ; il n'a jamais effectué de points informels mensuels avec le CSE ce dont il ressort de l'attestation d'un de ses membres ; il n'a fomenté aucun projet de réorganisation, modification de management ou de portefeuille client mais simplement mis en place des trinômes commerciaux dans l'industrie constituée pour améliorer l'animation de la performance et il n'a jamais fourni d'informations aux équipes concernant les parts variables 2019 ;
- concernant les écarts de comportement reprochés : les courriels produits, dénonçant l'attitude survenue 8 mois plus tôt à l'égard de Mme [S], ont été orchestrés et planifiés par la directrice des ressources humaines et le CEO de la société ; les autres éléments versés aux débats ne font état d'aucun fait précis, daté ou circonstancié ; les attestations qu'il produit démontrent au contraire qu'il est reconnu pour sa bienveillance et témoignent de l'absence de propos sexistes ou discriminatoires notamment lors de l'IAA d'avril 2019 ; les propos qu'il a pu avoir doivent être analysés tout en prenant en compte l'ambiance détendue régnant au sein de l'entreprise, l'absence de passif disciplinaire le concernant et ses qualité humaines et managériales ;
- le caractère injustifié de son licenciement n'est pas une exception dans l'entreprise, de nombreux salariés ayant également été licenciés du jour au lendemain pour des motifs fallacieux.
La société réplique que :
concernant les insuffisances reprochées au salarié, elles ont consisté en :
- une absence de soutien s'agissant de la nouvelle organisation mise en place : alors qu'il devait fidéliser les abonnés face au déploiement d'un produit standard commercialisé par abonnement à compter du second semestre 2016, il n'est pas parvenu à développer ce nouveau business model ;
- un faible résultat en termes de renouvellement des abonnements pour les deux premiers trimestres de l'année 2019 : en dépit de l'organisation mise en place afin de le rattacher au pôle 'experience client' et 'customer experience' afin qu'il se concentre sur le renouvellement des abonnements grands comptes et le développement du portefeuille afférent, son objectif n'était toujours pas atteint ; la croissance de la société s'est réalisée en raison d'un contexte et d'un marché très dynamique, et non pas du travail acharné du requérant, comme l'affirme ce dernier ;
- des carences managériales et comportementales, concernant notamment le dénigrement de M. [I] opéré à compter de son intégration au sein de la société en tant que salarié, pour tenter de l'évincer, et les agissements néfastes de ce dernier, lequel tente manifestement de perturber l'entreprise même après son départ en instrumentalisant le CSE et ses anciens collaborateurs au moyen d'attestations mensongères ;
concernant les fautes reprochées, les griefs sont relatifs :
- aux critiques formulées par le salarié auprès d'un nouvel investisseur, lequel en a fait part par mail au président de l'entretprise, M. [C], visé par ces critiques relatives à sa gestion ;
- aux réunions mensuelles informelles organisées par le salarié avec les membres du CSE sans mandats ni directives en ce sens, sur des thématiques relevant des réunions de cette instance, dans le but de court-circuiter la direction sur sa compétence en la matière ; la directrice des ressources humaines s'est vu confirmer cette pratique par mail du secrétaire du CSE, alors même que la société ne lui avait jamais donné mandat pour présider de telles réunions, et les attestations produites par le salarié, émanant de membres du CSE, ne remettent pas en cause ce grief ;
- à l'attitude du salarié : concernant d'une part le manque d'intérêt du salarié et de ses équipes commerciales quant aux chiffres présentés par l'équipe commerciale internationale, ce que relate M. [Y], manager, par mail envoyé au président de la société, et concernant ensuite son attitude face au service administration des ventes, ayant fait une alerte auprès de la directrice des ressources humaines afin de dénoncer ses remarques récurrentes pour le moins désobligeantes, voire méprisantes ; le salarié avait par ailleurs déjà fait l'objet d'un recadrage pour des propos insultants et sexistes tenus à l'égard de la communauté portugaise début avril 2019, dépassant le cadre de la liberté de ton au sein d'une équipe ;
- les attestations produites par le salarié, émanant de ses plus proches collaborateurs, ne sont pas de nature à l'exonérer de sa responsabilité quant aux propos tenus aux salariées du service ADV qui se sentaient méprisées à force d'accumulation de remarques et quant aux propos tenus lors du séminaire IAA d'avril 2019, tenus face à l'ensemble des collaborateurs;
- les copies d'écran produites par le salarié, concernant des témoignages postés sur la plateforme balancetastartup, sont non seulement anonymes mais non exhasutifs, le salarié ayant manifestement pris soin de ne pas produire ceux relatifs à son propre comportement.
***
L'employeur peut invoquer dans la lettre de licenciement plusieurs motifs de rupture inhérents à la personne du salarié, à condition de respecter les règles de procédure applicables à chaque cause de licenciement.
Le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit être apprécié au vu des éléments fournis par les parties, étant précisé que, si un doute subsiste, il profite au salarié, conformément aux dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce.
Si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif.
Si l'employeur est juge des aptitudes professionnelles de son salarié et de son adaptation à l'emploi, pour constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, l'insuffisance professionnelle doit être caractérisée par des faits objectifs et matériellement vérifiables. Si la preuve est partagée en matière de licenciement pour cause réelle et sérieuse, il incombe à l'employeur d'apporter au juge des éléments objectifs à l'appui des faits qu'il invoque comme propres, selon lui, à caractériser l'insuffisance professionnelle dont il se prévaut.
L'insuffisance professionnelle se définit comme l'incapacité objective, non fautive et durable, d'un salarié à accomplir correctement la prestation de travail pour laquelle il est employé, c'est-à-dire conformément à ce qu'on est fondé à attendre d'un salarié moyen ou ordinaire, employé pour le même type d'emploi et dans la même situation.
La faute disciplinaire correspond quant à elle, à tout manquement du salarié aux règles de discipline et d'organisation collective du travail énoncées dans le règlement intérieur ainsi qu'aux obligations qui découlent du contrat de travail, à savoir du lien de subordination et de l'appartenance du salarié à une communauté de travail outre à l'obligation générale de loyauté.
L'obligation de loyauté interdit ainsi au salarié de se livrer à des agissements pénalement répréhensibles mais également à des agissements moralement blâmables.
Sur le motif disciplinaire
* Sur le grief : Pendant l'inauguration du Klaxoon Store le 26 novembre 2019 vous avez pris à part un membre du board puis plusieurs collaborateurs pour critiquer cet investissement et plus globalement ma gestion de l'entreprise.
L'employeur verse aux débats le courriel du 3 décembre 2019 que M. [K] lui a adressé: et mentionnant que : 'Je tenais à te relater en synthèse les propos que m'a tenus [D] [P], le sor de l'inauguration du Klaxoon Store le 26 novembre vers 19h. Ils m'ont particulièrement étonné de la part d'un membre important de la direction de Klaxoon à destination d'une personne extérieure qu'il n'avait pas vue depuis plus de 2 ans. Je lui ai annoncé ma nomination imminente en qualité de board membre. Il m'a alors dit que c'était une bonne nouvelle, qu'on avait besoin de mieux s'organiser pour faire face à la croissance. Il m'a tenu des propos essentiellement critiques sur la façon dont u gérais la société : '[M], il est très fort en communication mais on apprend tout au dernier moment. On découvre le lancement d'un nouveau produit mais on n'a pas les argumentaires. On n'a aucun chiffre sur l'activité. On ne sait pas où on en est. On lance une nouvelle politique tarifaire mais les outils ne sont pas paramétrés. On travailler avec des outils inadaptés. Des devis sont encore faits sous word.' Je trouvais cela suffisamment grave pour que je prenne la peine de retranscrire ces propos. Cordialement (...)'
Le caractère contemporain du courriel d'information et de la date de l'inauguration du Klaxoon store sont suffisants pour établir la réalité des propos dénoncés dès lors que le salarié n'apporte aucun élément autre que sa propre dénégation.
Néanmoins, ces propos critiques envers le dirigeant lors d'une conversation avec un membre du bureau, portant sur l'organisation et les outils de travail, ne caractérise pas une insubordination ni un manquement à son obligation de loyauté. Ce fait ne sera pas retenu comme fautif.
* Sur le grief : Le 9 décembre 2019, le Comité Social et Economique nous a informé que vous teniez avec eux un point mensuel à votre initiative pour évoquer les sujets relevant du comité, sans m'en avoir informé ni moi, ni [HU] [E] qui pilote le CSE, et en nous tenant dans l'ignorance de la teneur de ces échanges.
Au soutien de ce grief, l'employeur produit le courriel de la DRH Mme [E] du 9 décembre 2019, qui indique : '[M], Pour info, lors d'un point comité social et économique ce jour, j'ai appris que [D] voit en off Gantant et Pierre V tous les mois pour faire le point sur les sujets qui relèvent du CSE, sans jamais m'en informer, et également qu'il aurait promis en juillet à l'équipe commerciale, une prime collective si le objectifs étaient atteints à la fin décembre...'
Ce courriel qui n'est pas corroboré par d'autres éléments, alors qu'il ressort de l'attestation de M. [L], membre du comité social et économique et exerçant comme ingénieur d'affaires au sein de la société sous la direction de M. [P], laquelle n'est pas utilement contestée, que lors d'un échange avec Mme [E] au comité social et économique il avait été convenu que certaines remontées des salariés pouvaient être traitées directement par les managers de proximité et qu'il avait ainsi proposé avec M. [B], à M. [P], d'effectuer un point ensemble régulièrement, que dans ce cadre, ils avaient échangé à deux reprises à propos d'une question concernant la prise en charge des valises et de l'inquiétude de l'équipe 'industrie' concernant un possible changement de méthode d'animation d'équipe.', est insuffisant pour établir l'existence de réunions régulières sur des sujets relevant du comité social et économique. D'ailleurs, la DRH était elle-même à l'initiative portant sur le dialogue manager de proximité et représentants du personnel de l'agence de [Localité 5], étant précisé que les échanges informels avec les représentants du personnel de l'agence de [Localité 5] participent d'une forme de dialogue social courant dans les structures comprenant divers établissement.
Le grief à ce titre ne sera donc pas retenu comme fautif.
* Sur le grief : Le même jour le CSE nous a également alerté sur l'existence d'un projet de nouvelle organisation de l'équipe commerciale auquel vous travailliez et qui inquiétait les équipes au regard des nouvelles modifications de leur périmètre qui pourraient y être associées, alors que vous ne m'avez jamais informé d'une telle initiative, d'autant plus déplacée que selon les informations remontées par le CSE ce projet de nouvelle organisation impacterait le périmètre Customer Experience qui n'est pas sous votre responsabilité et que le manager de cette équipe était lui aussi tenu à l'écart de vos projets.
Le 11 décembre 2019, Mme [E] a informé le dirigeant à la suite de la réunion du comité social et économique portant sur le budget 2019, qu'en fin de réunion, un point avait été remonté
concernant l'inquiétude des équipes quant à un projet de nouvelle organisation de l'équipe commerciale initiée par [D] et qu'elle reviendrait vers lui ultérieurement, n'étant pas informé de ce projet.
L'existence même d'un projet de nouvelle organisation de l'équipe commerciale, est contredite par les attestations concordantes de MM [F] et [R]. Le premier indique effectivement : 'J'atteste qu'il n'y a eu aucune organisation de l'équipe industrie à la fin de l'année 2019 et début 2020. Il s'agit d'une rétrospective de l'année 2019 à mon initiative et celle de [J] [N], dans le cadre des missions qui nous sont respectivement confiées, et ayant pour objectif de servir la performance commerciale, l'interaction, la capitalisation, le partage des informations et le ciblage liées à nos activités (...) J'atteste que ce retour d'expérience a été fait avec les managers de cette équipe, et que [D] [P] a été informé uniquement lorsque nous avions abouti à des propositions. Il a été par ailleurs sur cette période très sollicité et l'un des acteurs principaux de plusieurs dossiers...'. Le second atteste également qu'il n'a jamais été question de réorganisation commerciale fin 2019 début 2020 mais uniquement d'ajustements réalisés en autonomie avec [J] [N] et les business Managers de l'équipe Industrie, du fait des mouvement au sein de l'équipe en 2019.
Le grief à ce titre n'est donc pas établi.
* Sur le grief : Le 23 janvier 2020, nous avons également découvert via des questions posées par le CSE, que les informations que vous auriez communiquées oralement aux équipes commerciales concernant les parts variables 2019 ne seraient pas conformes à ce qui a été validé contractuellement. De surcroit, nous avons à répondre à des questionnements sur un manque de transparence sur le suivi des résultats et sur des différences de traitement non justifiées.
Ce grief, certes postérieur à l'engagement de la procédure de licenciement, doit être examiné par la cour et contrairement à ce qu'a considéré le conseil de prud'homme, ne saurait être écarté sur ce seul motif.
La teneur exacte de la communication orale effectuée par M. [P] sur les parts variables 2019 n'est pas connue de la cour et dans ces circonstances, la déloyauté dans la communication opérée n'est pas établie. Le caractère fautif de ce grief sera rejeté.
* Sur le grief : De surcroît, vous vous êtes permis des écarts de comportement à l'égard de membres d'autres équipes qui ne sont pas plus acceptables. Nous avons reçu le 13 décembre une plainte formelle de salariées de l'équipe Finance concernant, outre des reproches concernant leur travail, des propos sexistes et outrageants (« Bonjour les pintades»). Et cela alors même que [HU] [E] vous avait déjà recadré suite au dernier IAA début avril 2019 pour le même type de comportement (insulte à la communauté portugaise sous un prétexte humoristique, devant tous les salariés).
M. [O] atteste que lors du séminaire entreprise du 2 avril 2019, plusieurs personnes de son équipe lui ont remonté avoir été choquées des blagues sexistes et sur la communauté portugaise qui ont été faites par M. [P] devant l'ensemble des collaborateurs.
La réalité de l'usage de l'expression 'travail de portugais' par le salarié lors d'une réunion plénière est attestée par le témoignage de M. [T], produit par le salarié, même s'il indique que cette remarque sur un ton humoristique était pour mettre en valeur la qualité du travail de cette personne.
Dans ces circonstances, le message de Mme [E] du 13 décembre 2019 indiquant au dirigeant qu'elle avait recadré M. [P] le jour de l'IAA début avril, suite aux propos déplacés qu'il avait tenus à l'égard de la communauté portugaise et à l'égard des femmes face à l'ensemble des salariés, vient corroborer la réalité des faits que la réalité du recadrage.
Au sein de son courriel adressé au dirigeant et à la DRH le 13 décembre 2019, Mme [S], responsable du service administration des ventes a indiqué à la direction que : 'Les relations ADV/[D] peuvent être qualifiées de mitigées et ne sont pas de nature à favoriser une relation de collaboration bienveillante et efficace. L'équipe ADV a souvent l'impression de ne pas être considérée et peu soutenue dans son périmètre. Ce ressenti est notamment dû à quelques remarques récurrentes pour le moins maladroite, désobligeantes, voire méprisantes comme : 'Bonjour les pintades', ' alors, ça fature' Il faut facturer plus!!!', 'Vous ne facturez pas assez'... Cela est d'autant plus vrai que ces messages sont parfois claironnés dans l'appartement Finance sans discrétion et sans esprit constructif ce qui est dommageable pour toute l'équipe. Le peu d'échange par mail se résume souvent à quelques mots, sans bonjour ni merci et très peu clairs quant aux suites à donner'.
Si ce courriel a été adressé à la suite d'une demande de renseignement de la direction sur la perception du salarié par ses équipes et que cela se produisait dans le contexte de rupture des négociations de sortie de la société de M. [P] qui était détenteur de parts sociales, il n'en demeure pas moins que les propos rapportés portent en eux la preuve de leur sincérité, s'inscrivant dans le type d'humour discriminatoire, que le salarié avait pu manifester lors du séminaire précédent devant une assemblée d'une centaine de collaborateurs.
Ces propos tenu à la cantonade : 'bonjour les pintades', caractérisent, en considération du devoir d'exemplarité attaché au positionnement managérial du salarié, directeur de développement, devant promouvoir la lutte contre le sexisme et toute forme de discrimination au sein de l'entreprise, exactement relevé par le conseil de prud'homme, un abus de sa liberté d'expression, constitutif d'une cause réelle et sérieuse de licenciement. La mesure de licenciement n'était pas disproportionnée et ne portait pas une atteinte excessive à la liberté d'expression du salarié qui avait été précédemment recadré pour des propos déplacés à connotation discriminatoire au sein d'une assemblée qui ne connaissait pas la réalité de ses origines ou les détails de sa vie personnelle.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse.
Sur les conséquences de la rupture
1- Sur l'ancienneté du salarié et le reliquat d'indemnité de licenciement
Le salarié fait valoir qu'il a rejoint la société dès le mois 2009 et endossé les fonctions de directeur développement, et que la société est redevable à ce titre d'un complément d'indemnité de licenciement au titre de l'ancienneté non prise en compte.
La société réplique que :
- si le salarié a été associé à la société dès 2009, il demeurait en parallèle toujours directeur d'agence à temps plein d'avril 2006 à janvier 2012 pour la société Elitys, et les attestations produites par le salarié sont contradictoires ;
- les seuls mails produits par ailleurs, datant de 2009, avait pour seul but de l'associer au lancement de l'activité Regards, en tant qu'associé, mais il n'a été embauché qu'à compter de 2014, son aide n'étant avant cette date que ponctuelle ;
- son action en revendication de reprise d'ancienneté est prescrite par application de l'article L. 1471-1 comme de l'article L. 3245-1 du code du travail.
***
La prescription de l'action est déterminée par la nature de la créance.
En l'occurrence, la demande reliquat d'indemnité de licenciement est une créance salariale, soumise à la prescription triennale, courant à compter du licenciement, en sorte que la demande présentée lors de la saisine du conseil de prud'homme le 12 mai 2020, à peine quatre mois après son licenciement est recevable.
Le salarié était associé au sein de la société klaxoon et c'est dans ce cadre qu'il a pu être associé au lancement de l'activité de la société en 2009. Il ne justifie pas de l'existence d'un lien de subordination pendant la période renvendiquée de 2009 à 2014, étant précisé qu'il occupait le poste de directeur d'agence au sein de la société Alter jusqu'en 2012. Il se présente d'ailleurs lui-même comme co-fondateur de la société au sein de sa page Linkedin et de son curriculum vitae.
Il sera donc débouté de sa demande de rappel d'indemnité de licenciement et le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.
2- Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Le salarié dont le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse sera débouté de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.
3- Sur les circonstances vexatoires du licenciement
Le salarié soutient que les circonstances de son licenciement sont brutales et vexatoires alors que présent depuis 2009 au sein de la société, il n'a reçu aucun reproche de sa hiérarchie, était au contraire félicité, et il en justifie par la production de nombreuses attestations ; son licenciement était manifestement prévu et orchestré au vu de la longueur de la procédure d'embauche de M. [A], recruté pour le remplacer.
La société réplique qu'elle a pris soin d'annoncer le départ du salarié sans verser dans la polémique et sans qu'aucune parole dénigrante, malveillante ou vexatoire n'ait été prononcée au moment de son départ, qu'elle lui a laissé sa voiture jusqu'au terme du préavis ainsi que ses accès informatiques, et n'a pas commis la moindre faute, soucieuse de préserver les apparences.
***
Le salarié ne justifie pas de circonstances brutales et vexatoires entourant le licenciement, en sorte qu'il sera débouté de sa demande de dommages-intérêts à ce titre
L'attestation de M. [T] qui indique : 'Suite au départ de M. [P], de nombreuses personnes sont venues questionner le CSE. Les questions étaient relatives à la soudaineté de l'annonce du départ et l'incompréhension de ce départ soudain' et les autres attestations versées aux débats ne permettent pas de considérer que l'équipe a été avertie de son départ avant l'entretien préalable comme il le soutient. En outre, la dispense d'exécution du préavis ne caractérise pas une circonstance brutale entourant le licenciement.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire.
4- Sur l'irrégularité de la procédure
Le salarié fait valoir que la procédure de licenciement était irrégulière et lui a causé un préjudice dès lors que la société l'a convoqué à un entretien préalable à son licenciement dans ses locaux parisiens, nonobstant l'existence de locaux lyonnais au sein desquels il travaillait, peu important qu'il ait, ou non, remis en cause le lieu de cet entretien ; l'intimée ne démontre pas qu'il préférait que l'entretien se déroule à [Localité 6] comme elle le soutient.
La société réplique que c'est le salarié qui a préféré, compte tenu du mouvement social de 2020, que l'entretien se tienne à [Localité 6], que le salarié ne démontre pas son préjudice, et que l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne saurait se cumuler avec l'indemnité pour licenciement irrégulier ne se cumulent pas le cas échéant.
***
En application de l'article L. 1235-2 du code du travail, alinéa 5, lorsqu'une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d'un salarié intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L. 1232-4, L. 1233-11, L. 1233-12 et L. 1233-13 ait été observée ou sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.
En l'occurrence, le salarié qui s'est rendu à l'entretien préalable au sein des locaux d'IdInvest, fonds d'investissements au capital de la société, ne justifie pas du préjudice résultant de l'irrégularité de la procédure. Il sera débouté de sa demande d'indemnité à ce titre.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'indemnité pour irrégularité de procédure de licenciement.
5- Sur la perte de chance d'exercer les bons de souscription de parts de créateur d'entreprise (BSPCE)
Le salarié fait grief au jugement de le débouter de sa demande à ce titre en soutenant que:
- en lui refusant la communication de la documentation sociale relative aux droits qu'il avait acquis au titre de ses BSPCE, la société est à l'origine d'une perte de chance de souscrire 36.780 actions de la société, et le dommage direct minimum s'élève à 2.059.312 euros compte tenu de ce qu'il aurait pu souscire à ces actions pour le prix fixe et prédeterminé de 641.443 euros et pour lesquelles il avait la capacité financière ;
- la rupture de son contrat de travail n'a pas été loyale au vu des enjeux financiers que représentent des BSPCE 2016 complémentaires dont il était titulaire ; M. [C] a profité de la subordination de l'exercice des BSPCE au contrat de travail pour se défaire de ses engagements concernant son intéressement individuel au capital ;
- il est établi que sa convocation à l'entretien préalable de licenciement rendait immédiatement caducs les BSPCE déténus, de sorte que le lien de causalité entre la rupture sans cause réelle et sérieuse de son licenciement et la perte directe de la faculté d'exercer ses BSPCE.
La société soutient que :
- le salarié n'avait pas l'intention de lever ses BSPCE, mais sa véritable préoccupation était de monnayer son départ en valorisant les titres déjà acquis sans avoir à débourser le moindre euros ;
- la valeur de l'action ayant chutée, il a en réalité évité de perdre plus de 600.000 euros et ne peut plus rien lui reprocher ; sa demande est devenue sans objet ;
- le salarié bénéficiait d'une totale liberté pour exercer ses BSCPE en dehors de toute clause restrictive existant sur le sujet avant l'engagement de la procédure de licenciement, dont il était pourtant averti, mais n'a pas souhaité concomitament payer le prix de souscription des action, soit 641.442,20 euros durant les 4 années de leur détention ; ce dernier n'avait pas l'intention d'exercer ses bons et d'acheter de nouveaux titres de la société ;
- elle a tout mis en oeuvre pour préserver les droits d'associés du salarié, M. [C] étant intervenu auprès des associés, alors que rien ne l'y obligeait, pour présenter le départ du requérant comme consensuel et éviter une décote de 90% ;
- elle conteste l'évaluation démesurée de la prétendue perte de chance du salarié.
***
Selon les dispositions de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à la réparer.
En l'occurrence, le licenciement du salarié à raison duquel il ne peut plus exercer son droit à souscription de parts de créateur d'entreprise repose sur une cause réelle et sérieuse. Aucune faute de l'employeur n'en découle, en sorte que la responsabilité délictuelle de la société à raison de ce licenciement ne saurait être retenue.
Le salarié sera débouté de sa demande de dommages-intérêts au titre d'une perte de chance de souscription et de la demande subséquente d'expertise afférente à l'évaluation du préjudice financier invoqué.
Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.
Sur les demandes accessoires
En conséquence de la décision, il convient d'ordonner à la société klaxoon de remettre à M. [P] dans le délai de deux mois à compter de ce jour un bulletin de salaire rectifié conforme au présent arrêt outre une attestation Pôle emploi rectifiée conformément au présent arrêt.
Il n'y a pas lieu à application de l'article L.1235-4 du code du travail.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
La société klaxoon succombant sera condamnée aux entiers dépens de l'appel. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande de faire bénéficier le salarié d'une indemnité complémentaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la société klaxoon à lui verser la somme de 1.800 euros au titre de l'appel.
Le jugement entrerpis sera confirmé sur ses dispositions portant sur les dépens et l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile;
Dans la limite de la dévolution,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société regard devenue klaxoon à verser à M. [P] 13.000 euros pour l'année 2018, 12.000 euros pour l'année 2019 et 11.000 euros pour l'année 2020 au titre des heures supplémentaires, en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect du droit à repos compensateur et de sa demande de dommages-intérêts pour non-respect des temps de repos et durée maximale de travail, en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de contrepartie financière au titre de la clause de non-concurrence;
Statuant à nouveau dans cette limite,
Déclare irrecevable la demande en paiement d'une contrepartie financière au titre de la clause de non-concurrence ;
Condamne la société klaxoon à verser à M. [P] les sommes suivantes :
27.868,27 euros à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires accomplies en 2018 outre 2.786,82 au titre de l'indemnité de congés payés afférente,
26.699,65 euros à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires accomplies en 2019 outre 2.669,96 euros au titre de l'indemnité de congés payés afférente,
15.439,44 euros au titre de l'indemnité de contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2018,
14.582,07 euros au titre de l'indemnité de contrepartie obligatoire en repos pour l'année 2019,
6.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect des plafonds et seuils en matière de repos et durée maximale de travail ;
Déboute M. [P] du surplus de ses demandes ;
Rappelle que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut ;
Rappelle que les intérêts au taux légal sur les créances de nature salariale courent à compter de la demande, soit à compter de la notification à la société klaxoon de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes ;
Rappelle que les intérêts au taux légal sur les créances de nature indemnitaires courent à compter de ce jour ;
Confirme le jugement entrepris sur le surplus,
Y ajoutant,
Condamne la société klaxoon à verser à M. [P] la somme complémentaire de 1.800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société klaxoon aux dépens de l'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE