CA Lyon, 6e ch., 3 avril 2025, n° 22/03095
LYON
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
BNP Paribas Personal Finance (SA)
Défendeur :
BNP Paribas Personal Finance (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Doat
Conseillers :
Mme Allais, Mme Robin
Avocats :
Me Boudier, Me Leboucher, Me Goncalves
Faits, procédure et demandes des parties
Par un bon de commande signé le 1er octobre 2014 dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. [G] [D] et Mme [U] [K] ont commandé à la société Ecorenove la fourniture et la pose d'une installation aérothermique au prix de 23 800 euros.
Le même jour, M. [G] [D] et Mme [U] [K] ont souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance un crédit d'un montant de 23 800 euros remboursable en 156 échéances mensuelles de 215,46 euros au taux contractuel de 4,8% l'an destiné à financer cette installation.
Une attestation de fin de travaux a été signée par Mme [D] et M. [K] le 19 novembre 2014.
Par actes d'huissier du 26 février 2018, M. [D] et Mme [K] ont fait assigner les sociétés Ecorenove et BNP Paribas Personal Finance devant le tribunal d'instance de Lyon aux fins de voir principalement :
- prononcer la nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté
- prononcer à titre subsidiaire la résolution de ces deux contrats
- condamner la banque à leur restituer les sommes déjà versées par eux.
La société Ecorenove a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Lyon du 3 mars 2020.
M [D] et Mme [K] ont appelé en cause la SELARL [Z] [L] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ecorenove et les deux procédures ont été jointes.
En dernier lieu, M. [D] et Mme [K] ont maintenu les termes de leur assignation, et y ajoutant ont sollicité la privation de la banque au remboursement du capital prêté et sa condamnation à leur restituer la somme de 9827,61 euros au 30 mars 2019, somme à parfaire, au titre des sommes versées en exécution du prêt.
Subsidiairement, si la faute du prêteur n'était pas retenue, ils ont demandé la fixation de leur créance à hauteur de 23 800 euros au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société Ecorenove et la privation rétroactive du droit aux intérêts de la banque.
Ils ont en outre sollicité la condamnation du vendeur et du prêteur à prendre en charge le coût des travaux de dépose de l'installation et de remise en état.
En toutes hypothèses, ils ont sollicité la condamnation solidaire du vendeur et de la banque à leur payer la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
La banque BNP Paribas Personal Finance s'est opposée à l'ensemble des demandes.
Le liquidateur de la société Ecorenove n'a pas comparu.
Par jugement du 31 mars 2022, le juge des contentieux de la protection a :
- prononcé la nullité du contrat de fourniture et de pose de l'installation conclu avec la société Ecorenove
- dit que le contrat de prêt affecté consenti par la société BNP Paribas Personal Finance est annulé de plein droit
- condamné M. [G] [D] et Mme [U] [K] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 23 800 euros en deniers ou quittance, sous déduction des mensualités de remboursement du crédit déjà versées,
- fixé par inscription au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove représentée par la SELARL [L] la créance de M. [G] [D] et Mme [U] [K] à la somme ci dessus
- dit que faute pour le mandataire liquidateur de la société Ecorenove de faire procéder au retrait de l'installation photovoltaïque dans le mois suivant la signification de la présente décision, le matériel restera à la disposition de M. [G] [D] et de Mme [U] [K]
- débouté les parties du surplus de leurs demandes
- dit n'y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile
- condamné la SELARL [Z] [L] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Ecorenove aux entiers dépens
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire
Par déclaration du 28 avril 2022, M. [G] [D] et Mme [U] [K] ont relevé appel du jugement.
Par dernières conclusions notifiées par voie dématérialisée le 13 décembre 2024, M. [G] [D] et Mme [U] [K] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de fourniture et de pose de l'installation photovoltaïque et dit que le contrat de crédit affecté était annulé de plein droit
- infirmer le jugement en ce qu'il :
* les a condamnés à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 23 800 euros en deniers ou quittance, sous déduction des mensualités de remboursement de crédit déjà versées,
* a fixé par inscription au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove représentée par la SELARL [L] leur créance à la somme de 23 800 euros
* a dit que faute pour le mandataire liquidateur de la société Ecorenove de faire procéder au retrait de l'installation photovoltaïque dans le mois suivant la signification de la présente décision, le matériel restera à la disposition de M. [G] [D] et de Mme [U] [K]
* les a déboutés du surplus de leurs demandes, et a dit n'y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile
statuant de nouveau
- condamner Sygma/BNP Paribas Personal Finance à leur restituer les sommes versées au titre de l'emprunt soit la somme de 17 387,31 euros au mois de janvier 2023, somme à parfaire au jour de la décision à intervenir et en fonction des échéances payées,
- priver Sygma/BNP Paribas Personal Finance du droit au remboursement du capital, des frais et accessoires versés entre les mains de la société Ecorenove
- fixer leur créance à la somme de 5284 euros au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société Ecorenove au titre de la dépose et de la remise en état de l'installation
à titre subsidiaire
- prononcer la résolution du contrat de vente conclu entre Ecorenove et eux mêmes
- prononcer la résolution consécutive du contrat de prêt affecté conclu entre eux et la société Sygma/BNP Paribas Personal Finance
en conséquence
- condamner Sygma /BNP Paribas Personal Finance à leur restituer les sommes versées au titre de l'emprunt soit la somme de 17 387,31 euros au mois de janvier 2023, somme à parfaire au jour de la décision à intervenir et en fonction des échéances payées
- priver Sygma /BNP Paribas Personal Finance du droit à remboursement du capital, des frais et accessoires versées entre les mains de la société Ecorenove
- fixer leur créance à la somme de 5284 euros au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société Ecorenove au titre de la dépose et de la remise en état de l'installation
en toutes hypothèses
- condamner solidairement la SELARL [Z] [L] et BNP Paribas Personal Finance à leur payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
A l'appui de leur prétentions, ils font valoir que :
- le bon de commande est nul, au motif du non respect des dispositions du code de la consommation dans la mesure où il ne comporte pas les caractéristiques essentielles des biens, mentionne un délai de livraison non conforme, ne précise pas les modalités exactes du délai de rétractation et au surplus est rédigé dans une police inférieure au corps 8 et est de fait illisible,
- il n'ont pas renoncé à se prévaloir de la nullité du bon de commande, leur connaissance du vice et leur volonté de le réparer n'étant pas démontrées
- subsidiairement, la résolution du contrat sera prononcée pour inexécution contractuelle, l'installation n'ayant jamais fonctionné correctemment, le vendeur n'ayant pas communiqué son attestation d'assurance décennale et la déclaration attestant de l'achèvement et de la conformité des travaux n'ayant jamais été déposée
- le contat de prêt affecté doit être annulé de plein droit
- la banque doit être privée de son droit à restitution du capital, à raison de sa faute, n'ayant pas vérifié la régularité du bon de commande et ayant libéré de manière prématurée les fonds ce qui est en lien causal avec leur préjudice, puisque sans l'appui donné par un prêteur peu diligent à la société Ecorneove, ils n'auraient jamais contracté. De plus ils ne pourront récupérer aucune somme auprès de la société Ecorenove en liquidation judiciaire.
Par dernières conclusions en réponse et d'appel incident notifiées par voie dématérialisée le 22 mai 2023, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour :
- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions
statuant à nouveau
- de débouter la société Ecorenove, Mme [U] [K] et M. [G] [D] de l'ensemble de leurs demandes
- de dire et juger que Mme [U] [K] et M. [G] [D] seront tenus d'exécuter les contrats jusqu'à leur terme et condamnés en sus des échéances en cours au paiement des échéances impayées au jour de l'arrêt à intervenir,
à titre subsidiaire
- de confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions
- débouter la société Ecorenove, Mme [U] [K] et M. [G] [D] de l'ensemble de leurs demandes
à titre infiniment subsidiaire
- de fixer au passif de la société Ecorenove à son profit la somme de 23 800 euros au titre du capital perdu
en tout état de cause
- de condamner solidairement Mme [U] [K] et M. [G] [D] à lui payer la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- de condamner les mêmes aux dépens.
Elle soutient que :
- le bon de commande est régulier, comportant l'ensemble des caractéristiques essentielles des panneaux photovoltaïques
- les conditions d'exécution du contrat sont précises
- le bordereau de rétractation est conforme aux exigences légales
- même si une cause de nullité était retenue, il s'agit d'une nullité relative, laquelle a été couverte par le comportement des demandeurs qui avaient connaissance le cas échéant des irrégularités, de sorte qu'ils ont exécuté volontairement le contrat
- si les nullités du contrat de vente et du contrat de prêt affectée étaient confirmées, les restitutions réciproques doivent avoir lieu, dans la mesure où elle n'a pas commis de faute, n'ayant pas à vérifier la régularité du bon de commande et aucun grief ne pouvant être formulé à son encontre concernant le déblocage des fonds ou la nature du crédit octroyé
- en toutes hypothèses aucun lien de causalité ne peut être établi entre les fautes alléguées et le préjudice subi par les emprunteurs, ce dernier correspondant tout au plus à une perte de chance de ne pas contracter.
La cour se réfère aux conclusions précitées pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties en application de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 janvier 2025.
La SELARL [Z] [L] ès qualités de mandataire judiciaire n'a pas constitué avocat.
La déclaration d'appel a été signifiée à la SELARL [Z] [L] ès qualités de mandataire judiciaire de la société Ecorenove le 8 juin 2022.
L'acte a été remis à une personne se déclarant habilitée à les recevoir pour le compte de la personne morale.
Les conclusions d'appel ont été signifiées à la SELARL [Z] [L] ès qualités de mandataire judiciaire de la société Ecorenove le 26 juillet 2022.
L'acte a été remis à une personne se déclarant habilitée à les recevoir pour le compte de la personne morale.
L'arrêt sera réputé contradictoire.
MOTIFS DE LA DECISION
Liminairement, il convient de relever que le bon de commande et le contrat de crédit ayant été signés le 1er octobre 2014, les articles du code de la consommation s'entendent dans leur rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 et antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.
Par ailleurs, la cour n'a pas à statuer sur les demandes tendant à 'constater' ou 'déclarer' qui ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile.
- Sur la demande de nullité du contrat de vente
Les consorts [D]- [K] fondent leur demande de nullité du contrat de vente sur le non respect des dispositions du code de la consommation.
Ils exposent que les caractériques essentielles des biens ne figurent pas sur le contrat, que le délai de livraion est imprécis, que des irrégularités affectent le bordereau de rétractation et que le contrat est peu lisibile, étant rédigé dans une police inférieure au corps 8.
La société BNP Paribas Personal Finance réplique que le contrat comporte l'ensemble des caractéristiques essentielles, que le délai de livraison et le bordereau de rétractation sont conformes aux textes.
Aux termes de l'article L 121-17 du code de la consommation applicable au présent litige :
I.-Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat ;
3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;
4° L'information sur l'obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d'un contrat de prestation de services, de distribution d'eau, de fourniture de gaz ou d'électricité et d'abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l'exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l'article L. 121-21-5 ;
5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l'article L. 121-21-8, l'information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;
6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l'utilisation de la technique de communication à distance, à l'existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
II.-Si le professionnel n'a pas respecté ses obligations d'information concernant les frais supplémentaires mentionnés au I de l'article L. 113-3-1 et au 3° du I du présent article, le consommateur n'est pas tenu au paiement de ces frais.
III.-La charge de la preuve concernant le respect des obligations d'information mentionnées à la présente sous-section pèse sur le professionnel.
En l'espèce, le bon de commande est tout d'abord particulièrement lacunaire portant sur :
- la fourniture de 12 panneaux aérothermiques type R-Volt,
- puissance totale 3 Kwc de production d'électricité,
- puissance totale 4500 W de production thermique
- intégration toiture
- module de ventilation, bouches d'insufflation, thermostat digital
- raccordement et mise en service à la charge de Ecorenove
- injection partielle de la production
pour le prix total TTC de 23 800 euros.
Ainsi, si le prix unitaire, la taille et le poids des panneaux ne constituent pas des caractéristiques essentielles, il n'est en revanche pas précisé la marque des panneaux, alors qu'il s'agit d'une caractéristique essentielle des biens dans le cadre d'un démarchage à domicile (Cour de Cassation 1ère Civ 24 janvier 2024 pourvoi n°21-20.691), contrairement à ce que soutient le prêteur. En effet, l'acquéreur ne connait pas les specificités du bien acquis et n'est pas en mesure d'effectuer des comparaisons.
Ensuite, s'agissant du délai de livraison, il est mentionné 'délai prévu : 12 semaines à compter de la prise de cotes par le technicien et l'encaissement de l'accompte ou l'accord définitif de la société de financement'.
Ce délai n'est pas conforme aux dispositions du code de la consommation. En effet, le point de départ du délai est imprécis faisant références à deux hypothèses possibles, dont la date est inconnue et ce délai ne distingue pas entre le délai de pose des modules et celui de réalisation des prestations à caractère administratif. Dès lors, un tel délai global ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur exécutera ses différentes obligations, de sorte que la nullité du contrat principal est encourue.
De plus, l'article L. 121-21 du code de la consommation, dans sa version applicable au présent contrat prévoit que le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts que ceux prévus aux articles L. 121-21-3 à L. 121-21-5. Toute clause par laquelle le consommateur abandonne son droit de rétractation est nulle.
Le délai mentionné au premier alinéa du présent article court à compter du jour :
1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l'article L. 121-16-2 ;
2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens et les contrats de prestation de services incluant la livraison de biens.
Or, le contrat prévoyant à la fois la fourniture de prestations de services et la livraison de bien est assimilié à un contrat de vente. Le point de départ du délai de rétractation de 14 jours est ainsi le jour la réception du bien. Pour autant, le contrat litigieux prévoit dans le bordereau de rétraction que ce dernier doit être expédié au plus tard le quatorzième jour à partir du jour de la commande ou si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, le premier jour ouvrable suivant.
Ainsi, le point de départ du délai de rétractation est erroné et ce manquement est sanctionné par la nullité du contrat, les dispositions étant d'ordre public, et les consorts [D]- [K] étant des consommateurs non avertis.
Au regard de ces éléments, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués au soutien de la demande en nullité du contrat principal pour non respect du code de la consommation, le bon de commande est affecté de multiples irrégularités, sanctionnées par la nullité.
Pour s'opposer à la nullité du contrat principal, le prêteur soutient que cette nullité est relative et qu'elle a été couverte, compte tenu de la reproduction dans le bon de commande des dispositions du code de la consommation relatives aux mentions obligatoires devant figurer à peine de nullité, et des actes postérieurs au contrat, ce que réfutent les appelants, qui invoquent une nullité absolue et subsidiairement une absence de confirmation du contrat.
S'il s'agit bien d'une nullité relative et non absolue, contrairement à ce que soutiennent M. [D] et Mme [K], la confirmation du contrat impose la connaissance du vice et la volonté de le réparer.
En dépit des affirmations du prêteur, le contrat ne contient pas les articles du code de la consommation sur les mentions obligatoires devant figurer sur le bon de commande à peine de nullité, de sorte que ce moyen est inopérant, d'autant plus que la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat en l'absence de circonstances qu'il appartient au juge de relever,(Cour de cassation Civ 1ère 24 janvier 2024 n° 22-16.115, la Cour de Cassation opérant un revirement de jurisprudence et précisant qu'il est justifié de juger ainsi dans les contrats souscrits antérieurement comme postérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016).
En outre, le fait que M. [D] et Mme [K] aient signé le contrat, pris connaissance des conditions générales de ce dernier, signé une attestation de fin de travaux sans réserve, ordonné à la banque de débloquer les fonds pour financer l'opération et remboursé régulièrement les mensualités ne révèle pas qu'ils avaient connaissance des irrégularités du bon de commande et qu'ils ont exprimé la volonté expresse et non équivoque de les couvrir.
Dès lors, les conditions de la confirmation ne sont pas réunies et il convient de prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre la société Ecorenove d'une part et M. [D] et Mme [K] d'autre part, le jugement étant confirmé.
- Sur la nullité du contrat de prêt
En application de l'article L 311-32 du code de la consommation (devenu L 312-55), le contrat de prêt est résolu ou annulé de plein droit, lorsque le contrat, en vue duquel il a été conclu, est lui même judiciairement résolu ou annulé.
Il est établi que le prêt souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance est un crédit affecté exclusivement au financement du contrat annulé conclu avec la société Ecorenove.
Dès lors, la nullité du contrat de crédit affecté doit également être prononcée.
Le jugement déféré est donc confirmé sur ce point.
- Sur les conséquences de la nullité du contrat de vente
Le contrat de vente ayant été annulé, les parties doivent être remises en l'état, où elles se trouvaient antérieurement à la vente. La nullité donne ainsi lieu à des restitutions réciproques, ce qui implique que le vendeur doit restituer le prix et l'acquéreur le matériel, ce dernier devant être laissé à la disposition du liquidateur pour la reprise.
Eu égard à la liquidation judiciaire de la société Ecorenove, la reprise de l'installation photovoltaïque par le liquidateur judiciaire de cette société est très hypothétique. Il n'y a donc pas lieu de mettre à la charge de la société [Z] [L], ès-qualités, cette reprise et il convient de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove la créance de M. [D] et de Mme [K] au titre des frais de dépose de l'installation photovoltaïque et de remise en état de la toiture à la somme de 5284 euros au regard des pièces produites.
- Sur les conséquences de la nullité quant au contrat de prêt
Le contrat de prêt étant annulé, les parties doivent être remises dans l'état où elles se trouvaient antérieurement à ce contrat.
Il découle de la nullité du contrat de crédit, l'obligation pour les emprunteurs de rembourser le capital emprunté, déduction faite des mensualités réglées à la banque.
Les emprunteurs ne peuvent être exonérés du remboursement du capital financé que s'ils justifient d'une faute du prêteur, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux.
En l'espèce, les consorts [D]- [K] invoquent des fautes de la part du prêteur et lui reprochent ainsi de ne pas avoir vérifié la régularité du bon de commande et d'avoir débloqué prématurément les fonds.
La société BNP Paribas Personal Finance répond qu'elle n'a pas commis de faute, considérant qu'elle n'a pas à contrôler la validité formelle du bon de commande, que même à déceler des irrégularités, elle a légitimement pu penser que ces dernières étaient couvertes par l'attitude des acquéreurs et qu'elle n'a pas débloqué les fonds de manière prématurée.
En sa qualité de professionnel, il appartenait à la banque de procéder à la vérification de la validité formelle du bon de commande, contrairement à ce qu'elle soutient.
Elle ne peut valablement arguer avoir cru que les irrégularités étaient couvertes, les arguments invoqués ne caractérisant nullement une confirmation, comme cela a été rappelé précédemment.
La banque a ainsi commis une faute en consentant un crédit au vu d'un bon de commande affecté de multiples causes de nullité, qui aurait dû la conduire à une plus grande vigilance.
En principe, à la suite de l'annulation de la vente, l'emprunteur obtient du vendeur la restitution du prix, de sorte que l'obligation de restituer le capital à la banque ne constitue pas, en soi, un préjudice réparable.
Cependant, il en va différemment lorsque le vendeur est en liquidation judiciaire.
En effet, les emprunteurs se trouvent du fait de la nullité du contrat de vente privés de la propriété de l'équipement dont l'acquisition était l'objet du prêt et compte tenu de la procédure de liquidation judiciaire de la venderesse, le remboursement du prix versé ne pourra pas avoir lieu, compte tenu de l'insolvabilité du vendeur.
L'emprunteur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'un préjudice qui selon le principe de l'équivalence des conditions est une conséquence de la faute de la banque dans la vérification de la validité formelle du bon de commande.
Le préjudice résultant pour l'emprunteur de l'impossibilité d'obtenir auprès du vendeur placé en liquidation judiciaire la restitution du prix de vente d'un matériel dont il n'est plus propriétaire, indépendamment de l'état de fonctionnement de l'installation, n'aurait pas été subi sans la faute de la banque, de sorte que cette dernière ne peut prétendre à la restitution du capital qui est normalement la conséquence de la nullité du contrat de prêt.
Dès lors, il convient de rejeter la demande de restitution du capital prêté formé par la société BNP Paribas Personal Finance, sans qu'il y ait besoin d'examiner les autres fautes alléguées.
Il convient en outre de condamner la société BNP Paribas Personal Finance à rembourser aux consorts [D]- [K] l'intégralité des sommes versées par eux, en exécution du prêt, les pièces versées aux débats ne permettant pas d'en déterminer précisément le montant, et le prêteur n'admettant pas avoir reçu la somme réclamée, sollicitant de la part des acquéreurs les justificatifs du versement de celle-ci, ce qu'ils ne font pas.
Le jugement est donc infirmé en ce sens.
- Sur la demande de la société BNP Paribas Personal Finance de fixation de la somme de 23 800 euros au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove
Cette demande est irrecevable, la société BNP Paribas Personal Finance n'ayant pas justifié de sa déclaration de créance, s'agissant d'une créance née antérieurement à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, puisqu'en raison de la nullité du contrat de crédit, les parties sont replacées dans la situation dans laquelle elles se trouvaient à la date de la souscription du prêt.
- Sur les demandes accessoires
Les dispositions du jugement relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens sont confirmées.
La société BNP Paribas Personal Finance, partie perdante, est condamnée aux dépens d'appel.
L'équité commande de la condamner à payer à Mme [K] et M. [D] la somme de 1500 euros pour les frais irrépétibles exposés par eux en cause d'appel.
Compte tenu de la solution apportée au litige, la société BNP Paribas Personal Finance est déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a :
- condamné M. [G] [D] et Mme [U] [K] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 23 800 euros en deniers ou quittances, sous déduction des mensualités de remboursement du crédit déjà versées,
- fixé par inscription au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove représentée par la SELARL [Z] [L] la créance de M. [G] [D] et Mme [U] [K] à la somme de 23 800 euros,
- dit que faute pour le mandataire liquidateur de la société Ecorenove de faire procéder au retrait de l'installation photovoltaïque dans le mois suivant la signification de la présente décision, le matériel restera à la disposition de M. [G] [D] et de Mme [U] [K],
Statuant à nouveau de ces chefs infirmés et y ajoutant,
Déboute la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande de restitution du capital prêté, déduction faite des sommes réglées par M. [G] [D] et Mme [U] [K] au titre du prêt,
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à rembourser à M. [G] [D] et Mme [U] [K] l'intégralité des sommes versées par eux en exécution du contrat de prêt,
Fixe par inscription au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove représentée par la SELARL [Z] [L] la créance de M. [G] [D] et de Mme [U] [K] à la somme de 5284 euros au titre de la dépose de l'installation et des frais de remise en état,
Déclare irrecevable la demande de la société BNP Paribas Personal Finance de fixation au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove représentée par la SELARL [Z] [L] de la somme de 23 800 euros à son profit,
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens d'appel
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [G] [D] et Mme [U] [K] la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Déboute la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile.