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Décisions

CA Lyon, 6e ch., 3 avril 2025, n° 23/00159

LYON

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Bnp Paribas Personal Finance (SA)

Défendeur :

Bnp Paribas Personal Finance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Doat

Conseillers :

Mme Allais, Mme Robin

Avocats :

Me Boudier, Me Habib, Heracles Avocats, Me Goncalves, Selarl Levy Roche Sarda

TJ Lyon, du 29 sept. 2022, n° 1120002096

29 septembre 2022

FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES:

Dans le cadre d'un démarchage à domicile, Mme [M] [T] a commandé à la société Ecorenove :

- le 30 mai 2015, la fourniture, la pose et la mise en service d'un système aéro-volt/aéro-sun comprenant 12 panneaux aérovolt moyennant le prix de 23.800 euros toutes taxes comprises,

- le 5 juin 2015, la fourniture, la pose et la mise en service d'un système aéro-volt/aéro-sun comprenant 24 panneaux photovoltaïques moyennant le prix de 28.000 euros toutes taxes comprises.

M. [L] et Mme [T] ont accepté successivement deux offres préalables de prêt consenties par la société Sygma Banque:

- le 30 mai 2015, une offre d'un montant de 23.800 euros afin de financer en totalité le premier contrat de vente, le capital prêté étant remboursable au taux d'intérêt de 4,80 % sur une durée de 156 mois, avec un différé d'amortissement pendant les 12 premiers mois,

- le 5 juin 2015, une offre d'un montant de 28.000 euros afin de financer en totalité le second contrat de vente, le capital prêté étant remboursable au taux d'intérêt de 4,80 % sur une durée de 156 mois, avec un différé d'amortissement pendant les 12 premiers mois.

Mme [T] a signé deux certificats de livraison les 18 et 19 juin 2015 afférents au matériel commandé et a accepté le déblocage des fonds relatif à chaque commande au profit de la société Ecorenove.

Par jugement du 3 mars 2020, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société Ecorenove et désigné la société Jérôme [F] en qualité de liquidateur judiciaire.

Par actes d'huissier de justice des 22 juillet 2020, M. [L] et Mme [T] ont fait assigner la société Jérôme [F], ès-qualités et la société BNP Paribas Personal Finance (la société BNP), venant aux droits de la société Sygma Banque, devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lyon.

Dans le dernier état de la procédure, ils sollicitaient de voir à titre principal annuler les contrats de vente et de prêt susvisés et compte tenu des fautes commises par la société BNP, de voir condamner celle-ci à leur rembourser les sommes d'ores et déjà versées au titre des prêts.

La société BNP soulevait l'irrecevabilité des demandes de M. [L] et Mme [T] en raison de la prescription de celles-ci ainsi que de l'absence de déclaration de leur créance et concluait à titre subsidiaire au rejet de ces demandes.

La société Jérôme [F], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Ecorenove, n'a pas comparu.

Par jugement du 29 septembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lyon a:

- déclaré les demandes de nullité présentées par M. [L] et Mme [T] pour celles fondées sur le non-respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation, irrecevables comme prescrites,

- rejeté le surplus des fins de non-recevoir soulevées par la société BNP,

- en conséquence, déclaré l'ensemble des autres demandes présentées par M. [L] et Mme [T] recevable,

- rejeté toutes ces demandes,

- condamné in solidum M. [L] et Mme [T] à payer à la société BNP la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que la décision bénéficiait de l'exécution provisoire de droit,

- rejeté toutes les autres et plus amples demandes de la société BNP,

- condamné in solidum M. [L] et Mme [T] aux dépens.

Par déclaration du 6 janvier 2023, M. [L] et Mme [T] ont interjeté appel du jugement en ce que celui-ci a déclaré leurs demandes de nullité fondées sur le non-respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation irrecevables comme prescrites, a rejeté l'ensemble de leurs autres demandes, et les a condamnés in solidum au titre des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 20 décembre 2024 à la société BNP et dont le dispositif a été signifié en même temps que leurs premières conclusions le 5 avril 2023 à la société Jérôme [F], ès-qualités, M. [L] et Mme [T] demandent à la Cour de:

- infirmer le jugement dans les limites de leur appel,

- dire leurs demandes recevables et bien fondées,

- prononcer l'annulation des contrats de vente des 30 mai et 5 juin 2015,

- prononcer l'annulation des contrats de crédits affectés des 30 mai et 5 juin 2015,

- retenir que la société BNP, venant aux droits de Sygma Banque, a commis des fautes de nature à la priver de ses créances de restitution,

- ordonner le remboursement par la société BNP des sommes qui lui ont été versées par les consorts [L]-[T] et ce jusqu'au jour de l'arrêt à intervenir, outre les mensualités postérieures acquittées, avec intérêt à taux légal à compter de la décision à intervenir,

à titre subsidiaire :

- condamner la société BNP à leur verser à titre de dommages et intérêts les sommes de 23.800 et 28.000 euros, soit un total de 51.800 euros,

- condamner en outre la société BNP à leur restituer les sommes perçues en sus du capital

emprunté, intérêts et assurance compris, à parfaire au jour de l'exécution de la décision à

intervenir,

à titre infiniment subsidiaire :

- prononcer la déchéance du droit de la société BNP aux intérêts du crédit affecté,

en tout état de cause,

- condamner la société BNP à leur verser les sommes suivantes:

3.000 euros au titre de leur préjudice économique et du trouble de jouissance,

3.000 euros au titre de leur préjudice moral.

en tout état de cause :

- condamner la société BNP à leur verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société BNP au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses conclusions notifiées le 30 juin 2023 à M. [L] et Mme [T] et signifiées le 7 juillet 2023 à la société Jérôme [F], ès-qualités, la société BNP demande à la Cour de:

à titre principal,

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter M. [L] et Mme [T] de l'ensemble de leurs demandes,

à titre subsidiaire et dans l'hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée,

- débouter M. [L] et Mme [T] de l'ensemble de leurs demandes,

- dire et juger que l'absence de faute de l'établissement de crédit laisse perdurer les obligations de restitutions réciproques,

- condamner solidairement M. [L] et Mme [T] à lui payer les sommes de 23.800 et 28.000 euros ( (capital déduction à faire des règlements),

- fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove les sommes de 9.032 et 10.625,12 euros au titre des intérêts perdus,

à titre infiniment subsidiaire et dans l'hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée et

une faute des établissements de crédit retenue,

- débouter M. [L] et Mme [T] de l'ensemble de leurs demandes,

- condamner M. [L] et Mme [T] à lui payer les sommes de 23.800 euros et 28.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- fixer au passif de la liquidation de la société Ecorenove les sommes de 32.832 euros et 38.625,12 euros au titre du capital et des intérêts perdus,

en tout état de cause,

- condamner solidairement M. [L] et Mme [T] à lui payer une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [L] et Mme [T] aux entiers dépens.

La société Jérôme [F], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Ecorenove, n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 7 janvier 2025.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties aux conclusions écrites susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION:

La déclaration d'appel ayant été signifiée le 3 mars 2023 à la personne de la société Jérôme [F], ès-qualités, la présente décision sera réputé contradictoire en application de l'article 474 du code de procédure civile.

Les contrats de vente et de prêt ayant été conclus le 30 mai et le 5 juin 2015, les articles du code civil et du code de la consommation applicables s'entendent dans leur rédaction en vigueur à cette date.

sur la recevabilité des demandes de nullité des contrats de vente résultant de l'absence de respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation:

Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Si le premier juge a constaté que plus de cinq ans s'étaient écoulés entre la date de chacun des contrats de vente et l'action en nullité de ces contrats diligentée le 22 juillet 2020, M. [L] et Mme [T] observent à juste titre que le terme du délai pour agir était compris dans la période d'urgence sanitaire juridiquement protégée du 12 mars au 23 juin 2020, étant observé que le délai pour agir expirait le 30 mai 2020 pour le premier contrat et le 5 juin 2020 pour le second contrat. Aussi, le délai considéré a été prolongé jusqu'au 23 août 2020 inclus en vertu de l'article 2 de l'ordonnance n°2020-306 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période.

L'assignation de M. [L] et Mme [T] ayant été délivrée à la société Jérôme [F], ès-qualités, avant le 23 août 2020, il convient de déclarer recevable les demandes de nullité des contrats de vente résultant de l'absence de respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation et d'infirmer le jugement de ce chef.

sur la nullité des contrats de vente:

quant aux informations contenues dans les contrats:

Les contrats de vente ayant été conclus hors établissement, les informations devant être contenues par ceux-ci à peine de nullité sont régies par les articles L.121-18-1, L.121-17, L.111-1 et L.111-2 du code de la consommation.

M. [L] et Mme [T] font valoir que:

- les mentions des bons de commande sont insuffisantes quant aux caractéristiques essentielles des biens vendus ne permettant pas de connaître la réelle marque des panneaux, le modèle, les références, la dimension, le poids des panneaux et de l'onduleur, l'aspect des panneaux, le type de cellule ainsi que les modalités de pose envisagées en l'absence de tout plan technique; ces mentions sont également insuffisantes quant aux délais d'exécution, en l'absence de précision des délais de livraison et de mise en service; enfin, les bons de commande ne mentionnent pas le nom de l'établissement bancaire, le détail du coût des installations de même que le coût total des crédits,

- les bons de commande ne respectent pas les dispositions du code de la consommation quant au délai de rétractation, le fomulaire joint à chaque contrat n'étant pas conforme aux exigences du code de la consommation et étant erroné quant au délai de rétractation dont dispose l'acquéreur.

Le bon de commande du 30 mai 2015 porte sur les biens et prestations suivantes:

'fourniture et pose de 12 panneaux Aerovolt Ecorenove/Systovi/Gse/Sillia,

garantie 25 ans production,

puissance totale: 3 Kwc de production d'électricité-5 Kw de production thermique,

fourniture 6 micro onduleurs type Enecsys,

garantie 20 ans pièces main d'oeuvre et déplacement,

passerelle de communication, monitoring: raccordement internet, maintenance en ligne,

coffrets de protection électriques AC/DC, intégration toiture,

module de ventilation, bouches d'insufflation, thermostat digital,

raccordement et mise en service à la charge de Ecorenove+frais de Consuel

injection partiel de la production '

Le bon de commande du 5 juin 2015 porte sur les biens et prestations suivantes:

'fourniture et pose de 24 panneaux photovoltaïques Ecorenove/Systovi/Gse/Sillia,

garantie 25 ans production,

puissance totale: 6.000 Kwc de production d'électricité,

fourniture 12 micro onduleurs type Enecsys,

garantie 20 ans pièces main d'oeuvre et déplacement,

passerelle de communication, monitoring: raccordement internet, maintenance en ligne,

coffrets de protection électriques AC/DC, intégration toiture,

module de ventilation, bouches d'insufflation, thermostat digital,

raccordement et mise en service à la charge de Ecorenove+frais de Consuel

injection partiel de la production '

Les bons de commande mentionnent chacun le prix total de la commande, de telle sorte qu'ils satisfont aux conditions de l'article L.111-1 du code de la consommation quant au prix de vente, même s'ils ne précisent pas le prix des panneaux, le coût de la main d'oeuvre et le coût de réalisation des prestations de service. En outre, les mentions quant au coût total du crédit prévues par l'article L.311-1 alinéa 7 du code de la consommation doivent être contenues dans le contrat de crédit et non dans le contrat de vente. Enfin, la mention du nom du prêteur sur les bons de commande n'est pas prévue à peine de nullité.

En revanche, les bons de commande sont insuffisants quant aux caractéristiques essentielles du matériel commandé en ce qu'ils ne sont pas suffisamment renseignés quant à la marque, au modèle des panneaux et des micro-onduleurs de même que quant aux modalités de pose de ce matériel, en l'absence de plan technique. Une facture du 16 juin 2015 fait apparaître que la société Ecorenove a livré 12 micro-onduleurs Emphase et non Enecsys au titre du second bon de commande.

Par ailleurs, les bons de commande indiquent 'délais prévus: 8 à 10 semaines à compter de la prise de cotes par le technicien et l'encaissement de l'acompte ou l'accord définitif de la société de financement'. Dès lors, le délai d'exécution des contrats de vente est imprécis, le point de départ de ce délai pouvant correspondre à deux dates différentes et étant laissé pour le premier à la discrétion du vendeur. Les bons de commande ne sont donc pas suffisamment renseignés quant à leur délai d'exécution, alors que cette mention est essentielle compte tenu des obligations successives et complexes de livraison, pose et mise en service à la charge du vendeur.

Enfin, le délai de rétractation de 14 jours à partir de la commande mentionné dans le formulaire de rétractation joint à chacun des contrats de vente ainsi que dans les conditions générales du contrat de vente est erroné, ce délai courant à compter de la livraison du matériel commandé en application de l'article L.121-20 du code de la consommation, moyen à l'encontre duquel la société BNP ne fait valoir aucun argument.

Aussi, le contrat est affecté d'irrégularités, causes de nullité, au regard des articles L.121-17, L.111-1 et L.121-18-1 du code de la consommation.

La nullité encourue par le contrat de vente du fait du non respect des dispositions d'ordre public du code de la consommation relatives à la vente à domicile est une nullité relative. En application de l'article 1338 alinéa 2 du code civil, les causes de nullité susvisées sont susceptibles d'être couvertes par l'exécution volontaire de l'obligation par l'acquéreur, sous réserve de la connaissance par celui-ci du vice affectant l'acte nul et de sa volonté de le réparer.

Mme [T] a reconnu avoir pris connaissance des conditions de vente figurant au verso de chaque bon de commande et des articles L.121-21 à L.121-21-8 du code de la consommation et notamment de la faculté de renonciation prévue par l'article L.121-21 en utilisant le formulaire détachable au verso. Toutefois, les articles précités ne sont afférents qu'au bordereau de rétractation et contrairement à ce que soutient la société BNP, les conditions générales des contrats de vente ne reproduisent pas les dispositions du code de la consommation rappelant les mentions obligatoires devant figurer sur le bon de commande à peine de nullité, soit les dispositions des articles L.121-18-1, L.121-17, L.111-1 et L.111-2 du code de la consommation.

Il n'est donc pas avéré que Mme [T] a eu connaissance du vice affectant les bons de commande lors de la signature de ceux-ci.

Dès lors, le fait que Mme [T] ait signé deux certificats de livraison et d'installation du matériel commandé sans émettre aucune réserve, demandé à la société BNP de débloquer les fonds au profit du vendeur, payé les échéances des prêts ne suffit pas à établir qu'elle a agi en connaissance de cause et exprimé la volonté expresse et non équivoque de couvrir les irrégularités des bons de commande.

Il convient en conséquence de prononcer la nullité des contrat de vente conclus les 30 mai 2015 et 5 juin 2015 entre Mme [T] et la société Ecorenove en application de l'article L.121-18-1 du code de la consommation.

quant au consentement de Mme [T] :

En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la Cour estime que le premier juge a répondu au moyen de nullité du contrat fondé sur le dol par des motifs pertinents qu'il convient d'adopter. Il y a lieu de relever notamment qu'en l'absence d'autres pièces signées entre les parties lors de la conclusion du contrat de vente, aucun engagement de la société Ecorenove quant à la rentabilité de l'installation photovoltaïque ou à l'autofinancement de celle-ci ne résulte des contrats de vente, de telle sorte que M. [L] et Mme [T] n'établissent pas les propos mensongers de la société Ecorenove quant à ces éléments. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité des contrats de vente fondée sur le dol.

sur la nullité des contrats de crédit:

En application de l'article L.311-32 du code de la consommation, l'annulation du contrat de vente en vue duquel le contrat de crédit a été conclu entraîne l'annulation de plein droit du contrat de crédit.

Les prêts conclus le 30 mai et le 5 juin 2015 entre la société Sygma Banque et les consorts [L]-[T] étant destinés à financer les contrats de vente annulés, il y a lieu de constater l'annulation de plein droit des contrats de crédit.

sur les conséquences de la nullité des contrats:

Compte tenu de l'anéantissement des contrats de vente et de crédit, les parties doivent être remises dans l'état où elles se trouvaient antérieurement à ces contrats.

La nullité des prêts emporte obligation pour les emprunteurs d'avoir à rembourser le capital prêté, sous déduction des sommes versées en exécution des prêts.

En l'absence de justification des sommes réglées au titre des deux prêts, la société BNP sera condamnée à rembourser à M. [L] et Mme [T] les sommes qu'elle a perçues au titre de ces prêts, sans autre précision, conformément à la demande.

M. [L] et Mme [T] soutiennent que le prêteur a commis des fautes qui leur ont causé un préjudice.

La faute reprochée à la société BNP quant à la vérification de la solvabilité des emprunteurs est sans rapport avec la nullité des contrats de vente. Il n'y a donc pas lieu de l'examiner.

En revanche, compte tenu de l'interdépendance existant entre les contrats de vente et les contrats de crédit affectés, il incombait au prêteur nonobstant l'effet relatif des contrats, de s'assurer de la régularité des contrats de vente au regard des dispositions du code de la consommation quant au démarchage à domicile. Aussi, le défaut de vérification par le prêteur de la régularité des contrats de vente avant de les financer est constitutif d'une faute.

Par ailleurs, le déblocage des fonds a été effectué par la société BNP fin juin 2015 immédiatement après les certificats de livraison conformes signés par Mme [T], soit bien avant le raccordement de l'installation au réseau électrique lequel n'est intervenu qu'en mars 2016. Or, ces certificats de livraison, signés moins d'un mois après les bons de commande, ne pouvaient être de nature à caractériser l'exécution complète des contrats de vente au regard notamment de la durée habituelle des démarches de raccordement et de mise en service à la charge du vendeur.La société BNP a donc également commis une faute en débloquant prématurément les fonds avant l'exécution complète des contrats de vente.

En principe, à la suite de l'annulation de la vente, l'emprunteur obtient du vendeur la restitution du prix, de sorte que l'obligation de restituer le capital à la banque ne constitue pas, en soi, un préjudice réparable.

Il en va différemment lorsque le vendeur est en liquidation judiciaire.

En effet, dans ce cas, d'une part, compte-tenu de l'annulation du contrat de vente, l'emprunteur n'est plus propriétaire de l'installation qu'il avait acquise, laquelle doit être restituée au vendeur, d'autre part, l'impossibilité pour l'emprunteur d'obtenir la restitution du prix du fait de la déconfiture du vendeur est, selon le principe d'équivalence des conditions, une conséquence de la faute de la banque dans l'examen du contrat principal.

Le préjudice résultant pour l'emprunteur de l'impossibilité d'obtenir auprès du vendeur placé en liquidation judiciaire la restitution du prix de vente d'un matériel dont il n'est plus propriétaire, indépendamment de l'état de fonctionnement de l'installation, n'aurait pas été subi sans la faute de la banque, de sorte que cette dernière ne peut prétendre à la restitution du capital prêté qui est normalement la conséquence de la nullité du contrat de prêt.

Dans ces conditions, la demande de la société BNP Paribas Personal Finance aux fins de voir condamner M. [L] et Mme [T] à lui payer les sommes de 23 800 euros et 28 000 euros correspondant au capital prêté, dont à déduire les sommes déjà remboursées en exécution du prêt, doit être rejetée.

M. [L] et Mme [T], qui expliquent que le matériel vendu a été détruit à la suite de l'incendie de leur maison d'habitation survenu en 2022, n'établissent pas avoir subi un préjudice du fait de la mauvaise exécution du contrat de prêt.

Ils sont déboutés du surplus de leur demande indemnitaire dirigée contre le prêteur, le jugement étant confirmé sur ce point.

sur les autres demandes:

La société BNP ne démontre pas que M. [L] et Mme [T] ont fait preuve d'un comportement fautif dans le cadre de la présente procédure au seul motif qu'ils ont diligenté leur action alors que la société Ecorenove était en liquidation judiciaire. Elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre des emprunteurs.

Par ailleurs, si la société BNP sollicite de voir fixer ses créances au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove à hauteur des sommes de 32.383 euros et 38.625,12 euros au titre du capital et des intérêts perdus, elle n'établit pas avoir déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove. Il convient donc de déclarer irrecevable cette demande.

Compte tenu de la solution apportée au litige, le jugement sera infirmé quant aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile. La société BNP, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et conservera la charge de ses frais irrépétibles tant en première instance qu'en appel. Elle sera condamnée en outre à payer à M. [L] et Mme [T] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme le jugement, sauf en en ce qu'il a déclaré les demandes de nullité présentées par M. [L] et Mme [T] pour celles fondées sur le non respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation irrecevables comme prescrites et a condamné in solidum M. [L] et Mme [T] au titre des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile;

L'infirme de ces chefs;

STATUANT A NOUVEAU,

Déclare recevables les demandes de M. [L] et Mme [T] afin de nullité des contrats de vente résultant de l'absence de respect du formalisme informatif prévu par le code de la consommation;

Prononce la nullité des contrats de vente conclus les 30 mai et 5 juin 2015 entre Mme [T] et la société Ecorenove;

Constate la nullité de plein droit des contrats de prêt affecté conclus les 30 mai et 5 juin 2015 entre les consorts [L]-[T] et la société BNP ;

Condamne la société BNP à rembourser à M. [L] et Mme [T] les sommes qu'ils ont réglées au titre des prêts susvisés;

Rejette la demande de la société BNP en restitution des capitaux prêtés, déduction faite des règlements effectués en exécution des prêts;

Déboute la société BNP de sa demande de dommages et intérêts à l'égard de M. [L] et Mme [T];

Déclare irrecevable la demande de la société BNP tendant à voir fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove les créances de 32.832 euros et 38.625,12 euros à son profit;

Condamne la société BNP aux dépens de première instance et d'appel;

Condamne la société BNP à payer à M. [L] et Mme [T] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

Rejette la demande de la société BNP sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

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