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Décisions

CA Douai, 2e ch. sect. 2, 3 avril 2025, n° 23/04517

DOUAI

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Route de Bergues (SCI)

Défendeur :

Gifi Mag (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Barbot

Conseillers :

Mme Cordier, Mme Mimiague

Avocats :

Me Joly, Me Le Roy, Me Nicolas

TJ Dunkerque, du 11 sept. 2023, n° 20/02…

11 septembre 2023

FAITS ET PROCEDURE

Le 22 juin 2009, la société SNC Littoral, aux droits de laquelle vient la SCI Route de Bergues (la SCI), a donné à bail commercial à la société Gifi mag (la société Gifi) un bâtiment à édifier, en rez-de-chaussée uniquement avec une mitoyenneté, d'une surface SHON de 1800 m² environ livré clos et couvert, dont 1600 m² au total de surface de vente, et 47 places de parking.

Le bail a été conclu pour une durée de 9 années entières et consécutives ayant commencé à courir le 31 juillet 2009, date de prise de possession des lieux, pour se terminer le 30 juillet 2018.

Par acte du 21 février 2018 à effet au 31 juillet 2018, la société Gifi a demandé le renouvellement du bail moyennant un loyer fixé 135 000 euros HT/HC/an correspondant, selon elle, à la valeur locative.

Par acte du 30 avril 2018, le bailleur a accepté le principe du renouvellement du bail, mais proposé de fixer le loyer à 198 000 euros HT/HC/an.

Le 27 octobre 2020, la société Gifi a assigné la SCI devant le tribunal judiciaire de Dunkerque aux fins de prononcer, sur le fondement de l'article L.112-1 du code monétaire et financier, la nullité de la clause d'indexation prévue au bail et voir, en conséquence, dire et juger que le loyer applicable entre les parties est celui initialement convenu lors de la prise d'effet du bail, soit 135000 ' HT/HC/an, et que la somme trop payée à lui restituer est de 142 417,25 euros.

Par jugement du 11 septembre 2023, le tribunal judiciaire de Dunkerque a fait partiellementdroit aux demandes de la société Gifi et a':

- dit que la clause 8-1 des conditions générales et la clause de révision du loyer des conditions

Particulières à l'exception de l'alinéa 1 et de la stipulation suivante «'à titre de condition particulière, les parties conviennent de supprimer l'article 8-5 a) relatif à la clause d'actualisation. Par dérogation à l'article 8-5 b) des conditions générales les parties conviennent que l'indexation du loyer aura lieu sur la variation de l'indice des loyers commerciaux

Indice de base': dernier indice connu au jour de la prise d'effet du bail'» sont réputées non écrites ;

- débouté la société Gifi de sa demande de fixation du loyer la somme de 135'000 euros';

- condamné la SCI à payer à la société Gifi la somme de 137 110,22 euros trop perçue au titre des loyers échus entre le mois d'octobre 2015 et le mois de décembre 2022 ;

- condamné la SCI aux dépens ;

- condamne la SCI à payer à la société Gifi la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

- rejeté le surplus des demandes.

Le 10 octobre 2023, la SCI a fait appel de cette décision.

PRETENTIONS

Par conclusions signifiées par voie électronique le 3 janvier 2024, la SCI demande à la cour de':

- infirmer le jugement entreprise en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté la société Gifi de sa demande de fixation du loyer à la somme de 135 000 euros';

Statuant à nouveau,

- réputer non écrits l'article 8.1 alinéa 2 des conditions générales et les dispositions contraires à l'article L.112-1 du code monétaire et financier telles que stipulées à l'article « Clause de révision du loyer '' des conditions particulières, c'est-à-dire les seules stipulations visant à exclure l'indexation à la baisse et celles enfermant l'indexation dans une clause tunnel ;

- dire et juger que la clause est applicable pour le surplus ;

- constater que le loyer du bail renouvelé à effet du 1er juillet 2018 est de

163 935,60 euros HT/HC/an ;

- en conséquence,

- fixer les sommes dues par elle, SCI, à titre de remboursement des sommes trop perçues en exécution de la clause litigieuse, à 39 330,18 euros ;

- débouter la société Gifi de toutes demandes plus amples ou contraires';

- condamner la société Gifi aux entiers dépens ;

- condamner la société Gifi à lui payer la somme de 5 000 euros à titre d'indemnité de procédure.

La SCI revient sur l'étendue de l'illicéité de la clause d'indexation invoquée, précisant que seule la stipulation qui crée une distorsion, dès lors qu'elle est dissociable des autres dispositions de la clause, doit être réputée non écrite, et non la clause en son entier.

Elle précise que':

- il n'est aucunement stipulé que la disposition selon laquelle le loyer ne pourra être révisé à la baisse constitue une condition essentielle et déterminante du consentement des parties, et notamment du bailleur';

- si l'on constate, dans les conditions générales du bail, que l'insertion d'une clause d'indexation (article 8.5.b) constitue un élément essentiel de l'engagement du bailleur, force est de constater qu'une telle stipulation n'a pas été reprise dans les conditions particulières du contrat dans lesquelles ont été insérées les stipulations litigieuses, de sorte que la clause prévoyant un plancher n'a pas été déterminante du consentement du bailleur';

- la commune intention des parties a bien été d'assortir le bail d'une clause d'échelle mobile, mais l'insertion d'une clause selon laquelle le loyer ne pourra être révisé à la baisse n'a pas été érigée comme une condition essentielle et déterminante du consentement du bailleur';

- cette dernière stipulation est parfaitement dissociable du reste de la clause';

- la clause est divisible au sens de l'article 1217 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, applicable au cas d'espèce.

- il y a lieu d'appliquer la clause 8.5 b) des conditions générales et la « Clause de révision du loyer '' des conditions particulières dans toutes ses autres dispositions'; il en résulte que la clause d'échelle mobile doit être appliquée au loyer contractuellement convenu.

Elle revient sur les conséquences de la fixation du loyer du bail renouvelé au regard de la demande de répétition de l'indu de la partie adverse.

Elle observe que':

- le bail a été renouvelé à compter du 31 juillet 2018';

- l'accord amiable sur le renouvellement pourra être établi même en l'absence de la régularisation d'un nouveau bail écrit entre les parties et en dehors de tout accord sur le montant du nouveau loyer';

- de ce fait, si plus de deux ans s'écoulent après le renouvellement, celui-ci est acquis avec l'ancien loyer, dans les termes de la jurisprudence relative à la prescription de l'action en fixation';

- le prix du bail expiré s'entend du prix après application de la clause d'indexation, peu important que celle-ci ait été contestée a posteriori';

- dans ces conditions, le loyer du bail renouvelé, à effet au 31 juillet 2018, doit être définitivement fixé à la somme de 163 935,60 euros HT/HC/an correspondant au loyer pratiqué entre les parties le dernier jour du bail expiré.

Elle estime que':

- le tribunal n'a pas tiré toutes les conséquences de ses conclusions et a cru devoir la condamner à restituer la somme de 137 100,22 euros, faisant ainsi droit aux demandes subsidiaires de la société Gifi, mais tenant compte toutefois du fait que la demande en répétition de l'indu était prescrite pour la période antérieure à octobre 2015';

- si l'on tient compte du fait que la clause d'indexation, divisible, doit s'appliquer à la hausse comme à la baisse par application de l'indice des loyers commerciaux, d'une part, et du fait que le loyer du bail renouvelé à effet au 1er juillet 2018 est de 163 935,60 euros HT/HC/an, il convient de retenir que les sommes trop perçues pour la période du 27 octobre 2015 au 31 décembre 2022 représentent un total de 39 330,18 euros.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 29 mars 2024, la société Gifi demande à la cour de':

- débouter la SCI de toutes ses demandes ;

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions';

Y ajoutant,

- condamner la SCI à lui restituer les loyers perçus au-delà d'un montant de 162 491,48 euros HT au titre de l'année 2023, et toute sommes perçues au-delà d'un loyer annuel de 173 214,74 euros HT pour 2024

- condamner la SCI à lui payer la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle estime que la juridiction a tenu compte l'évolution de la position de la Cour de cassation entre sa décision de 2016, édictant que la totalité de la clause était illicite et donc réputée non écrite, et celle issue de sa décision de 2018, qui prévoit que seule la stipulation illicite est réputée non écrite. La juridiction n'a en l'espèce déclaré non écrite que la stipulation contraire à l'ordre public, et a tiré toutes les conséquences de la clause ainsi obtenue, en la faisant jouer tant à la hausse qu'à la baisse et en ordonnant les restitutions consécutives.

Elle ajoute que seule demeure maintenant la question des conséquences de la sanction de l'illicéité de la clause, précisant que':

- les sommes à restituer sont les sommes résultant entre la différence entre le loyer calculé tel que ci-dessus et le loyer versé, soit un montant de 137 110,22 euros pour le tribunal';

- la différence entre le montant retenu par le tribunal et son décompte récapitulatif provient de ce que le tribunal ne fait courir les restitutions qu'à compter du mois d'octobre 2015 (soit 5 ans avant l'assignation), ce qui doit être approuvé';

- la position du bailleur, suivant laquelle à partir du renouvellement, il y a lieu d'appliquer le loyer « illicite », réduisant ainsi le montant des restitutions à la somme de 39 330,18 euros, n'est pas logique puisque cette position revient à appliquer la stipulation illicite.

MOTIVATION

En bail commercial, une clause d'indexation est susceptible d'être réputée non écrite soit en application du deuxième alinéa de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier, soit en application de l'article L. 145-39 du code de commerce.

L'article L.112-1 du code monétaire et financier dispose en effet qu'est réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive, et notamment des baux et locations de toute nature, prévoyant la prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision, tandis que l'article L. 145-39 du code de commerce dispose que, par dérogation à l'article L. 145-38, si le bail est assorti d'une clause d'échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus d'un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire. La variation de loyer qui découle de cette révision ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l'année précédente.

Par un arrêt publié du 12 janvier 2022 (3e Civ., 12 janvier 2022, pourvoi n° 21-11.169), la troisième chambre civile a tranché en ce sens que la clause d'indexation du loyer ne jouant qu'en cas de variation à la hausse de l'indice de référence doit être réputée non écrite sur le fondement de l'article L. 145-39 du code de commerce, et non de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier, en énonçant que « d'une part, le propre d'une clause d'échelle mobile est de faire varier à la hausse et à la baisse, de sorte que la clause figurant au bail et écartant toute réciprocité de variation, si elle ne crée pas la distorsion prohibée par l'article L. 112-1 du code monétaire et financier, fausse le jeu normal de l'indexation », et que, « d'autre part, la neutralisation des années de baisse de l'indice de référence a mathématiquement pour effet de modifier le délai d'atteinte du seuil de variation du quart, conditionnant la révision du loyer, tel qu'il résulterait de l'évolution réelle de l'indice.'»

Il est désormais établi en jurisprudence que seules les stipulations de la clause d'indexation qui créent la distorsion prohibée sont réputées non écrites, que le fondement soit le code monétaire et financier ou le code de commerce sans que soient anéantis, , d'une part, la clause dans son entier ( 3e Civ., 4 mai 2006, pourvoi n° 05-15.151, Bull 110 3e Civ., 29 novembre 2018, pourvoi n° 17-23.058, publié ; 3e Civ., 6 février 2020, pourvoi n° 18-24.599, publié ; 3e Civ., 30 juin 2021, pourvoi n° 20-11.685'; 3e Civ., 30 juin 2021, pourvoi n° 19-23.038, publié ; pourvoi n° 21-11.169, publié 3e Civ., 12 janvier 2022), d'autre part, le principe même de l'indexation des loyers, sauf en cas d'indivisibilité, lorsque la stipulation prohibée ne peut être retranchée de la clause d'indexation sans porter atteinte à la cohérence de celle-ci (Com., 29 mai 2024, pourvoi n° 22-13.158'; 1re Civ., 13 mars 2019, pourvoi n° 17-23.169, publié ).

La demande tendant à voir réputer non écrite une clause ne s'analyse pas en une demande en nullité, s'agissant de deux notions distinctes, et la singularité de l'action tendant à voir réputée non écrite une clause est qu'elle n'est pas soumise à prescription (3e Civ., 18 mars 2021, pourvoi n° 20-12.551 ; 3e Civ., 8 février 2024, pourvoi n° 22-16.422, publié).

Il n'en demeure pas moins que toute prescription n'est pas évincée puisque se pose la question de la prescriptibilité de l'action en restitution des sommes perçues sur le fondement d'une clause réputée non écrite.

Sur le fondement de la répétition de l'indu, prévu par l'article 1376 ancien du code civil, devenu l'article 1235 de ce code, la Cour de cassation a jugé que le locataire à bail commercial qui a acquitté un loyer indexé en vertu d'une clause d'indexation ultérieurement réputée non écrite peut agir en paiement des sommes indûment versées dans les 5 ans précédant sa demande en justice (3e Civ., 23 janvier 2025, pourvoi n° 23-18.643).

Elle a, par ailleurs, précisé, dans le même arrêt, que la créance de restitution de l'indu doit être calculée sur la base du montant du loyer qui aurait été dû à défaut d'application de la stipulation réputée non écrite, dès lors que cette dernière est censée n'avoir jamais existé.

En l'espèce, des stipulations du bail commercial conclu le 22 juin 2009 et ayant commencé à courir le 31 juillet 2009, on peut retenir'que :

- le bail est «'consenti aux conditions générales du bail prévues au titre I et sous les conditions particulières ci-après qui viennent compléter les conditions générales ou y déroger selon les cas. En cas de contradiction, les conditions particulières prévalent sur les conditions générales'»';

- l'article 8 des conditions générales du bail, relatif au loyer, précisant que «'le présent bail commercial est consenti et accepté moyennant le loyer visé aux conditions particulières'; il est expressément convenu que le loyer sera révisé conforment à l'article «'Clause de révision du loyer'», mais ne pourra être inférieur au loyer de base fixé ci-dessus'»';

- l'article 8-5, intitulé Clause de révision du loyer, stipule que'«'le loyer variera automatiquement, de plein droit et sans formalité, à l'expiration de chaque période annuelle proportionnellement aux variations de l'indice du coût de la construction publié trimestriellement par l'INSEE. Le réajustement du loyer se fera en vertu de la présente clause tous les ans au 1er janvier, et pour la première fois, le 1er janvier qui suit la prise d'effet du bail et l'indice de calcul sera le dernier indice connu au jour de l'indexation ('). Le bailleur déclare que les stipulations relatives à la révision conventionnelle du loyer constituent pour lui un motif déterminant de la conclusion du présent contrat, sans lesquelles il n'aurait pas contracté, ce qui est expressément accepté par le preneur'»';

- au paragraphe des conditions particulières intitulé Clause de révision du loyer, qu' «'à titre de condition particulière, les parties conviennent de supprimer l'article 8.5 a) relatif à la clause d'actualisation.

Par dérogation à l'article 8-5 b) des conditions générales, les parties conviennent que l'indexation du loyer aura lieu sur la variation de l'indice des loyers commerciaux.

Indice de basse': Dernier indice connu au jour de la prise d'effet du bail.

L'indexation appliquée devra toujours être au minimum de 2% et au maximum de 4% selon la formule suivante': [']

' ILC = variation annuelle de l'ILC au 01/01 de l'année n = indice ILC 2éme trimestre n-1 / indice ILC 2éme trimestre n-2

Loyer indexé au 01/01 de l'année n = loyer n-1 x ' ILC

Etant ici rappelé que :

* 0,02 # ' ILC # 0,04

* Si ILC est inférieur à 0,02 alors loyer N = loyer N-1 x 1,02

* Si ILC est supérieur à 0,04 alors loyer N = loyer N-1 x 1,04

* la première année suivant la prise d'effet du bail, l'indice de base sera celui connu au jour de la prise d'effet du bail ».

Premièrement, le premier juge, par de justes motifs que la cour adopte, a justement fait ressortir la contrariété des stipulations précitées, les réputant non écrites, et a déterminé avec justesse l'étendue de cette sanction, ce dont ne disconvient pas la SCI dans les motifs de ses écritures, en dépit de sa demande d'infirmation générale figurant dans le dispositif de ses écritures.

Les parties s'accordent désormais sur le fait, d'une part, que les stipulations de l'article 8-1 prévoyant une indexation à la hausse uniquement ainsi que celles de l'articles 8-5 figurant aux clauses particulières, édictant une variation encadrée, par des pourcentages, et plus particulièrement une impossibilité d'appliquer une indexation inférieure à 2 %, soient entachées d'illicéité.

En outre, le premier juge a, par des motifs appropriés, fait le départage entre les stipulations atteintes par la sanction du «'réputé non écrit'», et celles relatives à la clause d'échelle mobile, notamment sur la suppression de la clause d'actualisation et sur l'accord des parties sur le choix de l'indice, qui doivent être maintenues et ont vocation à s'appliquer au loyer convenu contractuellement, compte tenu de leur caractère divisible et licite, ce qui doit être approuvé.

Les chefs de la décision relatifs au «'réputé non écrit'» et à sa portée sont donc confirmés.

Deuxièmement, les parties diffèrent, en réalité, sur les conséquences de cette sanction, et plus particulièrement sur le fait que les effets de cette sanction puissent aboutir à une remise en cause des sommes perçues au titre du bail, en application de ces clauses, depuis l'origine, quand bien même le bail aurait été renouvelé aux mêmes clauses et conditions.

Le fait que le bail ait été renouvelé, le renouvellement s'opérant aux conditions et clauses du bail expiré, ne modifie en rien la possibilité pour une partie de faire juger que les clauses contreviennent aux dispositions de l'article L. 112-1 du code monétaire, la demande visant à réputer non écrite les stipulations litigieuses étant perpétuelle.

De manière pertinente le premier juge a cantonné la demande de restitution de la société Gifi aux sommes indûment perçues non atteintes par la prescription, soit dans la limite des 5 années précédant sa demande en justice, formée par assignation du 27 octobre 2020, ce que concède la société Gifi en cause d'appel.

Troisièmement, le bail, tant initial que renouvelé, se trouve alors rescindé des clauses réputées non écrites, qui sont censées n'avoir jamais existé.

A juste titre, le premier juge a donc rappelé que la clause d'échelle mobile, dont la validité n'est pas contestable, devait être appliquée au loyer contractuellement fixé lors de la conclusion du bail et a rejeté la demande du preneur visant à voir fixer le loyer à 135'000 euros, ce qu'admet la société Gifi en cause d'appel.

Par contre, c'est de manière erronée que le bailleur prétend que, faute de saisine du juge des loyers dans le délai de deux ans impartis et compte tenu du renouvellement du bail, le prix de l'ancien bail continue à courir tel qu'il avait été fixé en application des clauses du contrat initial, «'le prix du bail s'entendant du prix après application de la clause d'indexation peu importe que celle-ci ait été contestée a postériori.'»

En effet, suivre le raisonnement du bailleur reviendrait, dès lors qu'un renouvellement du bail a eu lieu aux clauses et conditions du bail initial, à faire produire effet à la clause, pourtant réputée non écrite et donc censée n'avoir jamais existé.

Très justement, le premier juge a donc écarté la méthode de calcul retenue par la SCI pour déterminer les sommes indûment perçues et rejeté la demande de la SCI visant à fixer les sommes dues au titre de la répétition de l'indu au montant de 39'330, 18 euros.

Compte tenu des stipulations licites de la clause d'échelle mobile appliquées au prix du bail depuis l'origine et variant à la hausse comme à la baisse, le preneur a déterminé l'évolution du loyer de base depuis l'origine et a calculé la différence entre ce montant et les loyers annuellement facturés par le bailleur et honorés par ses soins, limitant sa demande de restitution à la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2022, à laquelle, en cause d'appel, il a ajouté une demande correspondant aux sommes trop payées au titre des années 2023 et 2024.

Cette méthode doit être approuvée et les quanta arrêtés par le preneur ne font l'objet d'aucune critique de la part du bailleur.

Cependant, c'est de manière totalement justifiée que le premier juge a enlevé du montant global réclamé par le preneur les sommes indûment réglées pour la période du 1er janvier 2015 au 27 octobre 2015, la demande au titre de cette période étant atteinte par la prescription quinquennale.

Dès lors, la décision entreprise doit être confirmée en ce qu'elle a accordé au preneur le montant de 137 110, 25 euros au titre des sommes trop perçues pour les loyers échus entre le mois d'octobre 2015 et le mois de décembre 2022.

Par ailleurs, la demande du preneur relative aux sommes trop perçues au titre des loyers échus, et dont nul ne conteste qu'ils aient été réglés conformément au montant appelé par le bailleur, pour les années 2023 et 2024, est fondée.

Il convient donc d'ajouter à la décision entreprise, en condamnant le bailleur à restituer les loyers perçus au-delà de la somme de 162'491, 48 euros au titre de l'année 2023 et les sommes perçues au-delà du loyer annuel de 173'214, 74 euros au titre de l'année 2024.

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, la SCI succombant en ses prétentions, il convient de la condamner aux dépens d'appel.

Les chefs de la décision entreprise relatifs aux dépens et à l'indemnité procédurale sont confirmés.

La SCI supportant la charge des dépens, il convient de la condamner à payer à la société Gifi la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et de la débouter de sa demande d'indemnité procédurale.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Dunkerque du 11 septembre 2023 en toutes ses dispositions';

Y ajoutant,

CONDAMNE la SCI Route de Bergues à restituer à la société Gifi mag les loyers perçus au-delà de du loyer annuel de 162'491, 48 euros au titre de l'année 2023 et les sommes perçues au-delà du loyer annuel de 173'214, 74 euros au titre de l'année 2024';

CONDAMNE la SCI Route de Bergues aux dépens d'appel';

CONDAMNE la SCI Route de Bergues à payer à la société Gifi mag la somme de 5'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile'au titre de la procédure d'appel';

DEBOUTE la SCI Route de Bergues de sa demande d'indemnité procédurale.

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