Livv
Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-4, 3 avril 2025, n° 21/05407

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Malulane (SAS)

Défendeur :

Alternative Sport (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Chalbos

Conseillers :

Mme Vignon, Mme Martin

Avocats :

Me Cherfils, Me Moatti, Me Moreas, SELARL LX Aix En Provence, SELAS Challenges Avocats

T. com. Marseille, du 4 mars 2021, n° 20…

4 mars 2021

EXPOSE DU LITIGE

La SAS Alternative Sport est associée unique de la société Mondoramas, qui exerce une activité d'agence de voyage sur la commune de [Localité 3].

En début d'année 2018, la société Alternative Sport a souhaité céder sa filiale Mondoramas.

La société Malulane s'est déclarée intéressée par cette acquisition, par une première lettre d'intention ( LOI) du 16 avril 2018, en vertu de laquelle elle formulé une offre d'acquisition de la totalité des titres détenus par la société Alternative Sport à hauteur de 550.000 '.

Puis, par une seconde lettre d'intention signée le 28 septembre 2018, elle a offert une valeur d'entreprise revalorisée à 662.400 '.

Le 7 novembre 2018, les parties ont régularisé une convention de titres stipulant un prix provisoire fixé à 662.400 ' ainsi qu'un prix définitif à fixer en fonction des comptes de la société Malulane établis à la date de la cession.

Ainsi, l'article 8.1 de la convention ' prix provisoire' énonçait que ' La cession des titres est consentie et acceptée moyennant le prix provisoire de 662.400 '. Ce prix provisoire a été déterminé en considération de la somme des EBE 2014 normalisé, EBE 2015 normalisé, EBE 2016 normalisé, EBE 2017 normalisé et EBE 2018 normalisé divisée par 5 et multipliée par 4.

Cette évaluation du prix provisoire repose notamment sur les hypothèses suivantes:

- l'EBE 2014 normalisé est égal à 169.000 ',

- l'EBE 2015 normalisé est égal à 165.000 ',

- l'EBE 2016 normalisé est égal à 88.000 ',

- l'EBE 2017 normalisé est égal à 172.000 ', et

- l'EBE 2018 normalisé au moins égal à 210.600 '.

Il doit être révisé pour aboutir au prix définitif au vu des comptes de la société au jour de la date de cession qui devront être établis selon les principes comptables en vigueur et les méthodes en usage dans la société, à condition qu'ils soient conformes aux normes et principes comptables en vigueur, et qu'ils donnent une image fidèle et complète de la société à la date de leur arrêté. En effet, le prix provisoire sera confirmé ou infirmé par la réalisation d'une situation comptable dressée selon les principes habituels jusqu'au jour de la date de cession et sera ajusté de la dette financière nette intégralement payée à la date de cession.'

L'article 8.2 intitulé 'calcul prix définitif ' prévoyait que ' Si les comptes de la société arrêtés à la date de cession, selon les méthodes ci-avant décrites, font apparaître en sus des conditions ci-dessus au 8.1 et du remboursement du compte courant du cédant qui devra intervenir avant la date de cession, un EBE normalisé 2018 d'un montant au moins égal à 210.600 ', quel que soit son montant, le prix définitif de cession des titres sera égal au prix provisoire. En revanche, s'ils font apparaître un EBE normalisé 2018 d'un montant inférieur à 210.600 ' le prix définitif sera égal au prix provisoire diminué du montant de la différence entre 210.600 ' et le montant de l'EBE normalisé 2018 à la date de cession, le résultat devant être arrondi au centime d'euro le plus proche.'

La convention comportait également un article 3 ' définitions' stipulant que s'agissant de l'EBE, à savoir l'excédent brut d'exploitation, ' L'EBE a été ainsi déterminé selon la méthode ci-dessus pour la société au titre de l'exercice ouvert au 1er janvier 2018 et ce calcul sera arrêté à la date de la cession. Cette dernière somme sera divisée par 365 et multipliée par 284 et il lui sera ajouté une somme de 89.000 ' ( ci-après l'EBE 2018 normalisé) étant précisé que l'EBE normalisé devrait être égal à 234.000 ' ( à 23.400 ' près).'

Un contrat de garantie et une convention de séquestre étaient également établis à la date du 7 novembre 2018.

Par lettre recommandée en date du 14 janvier 2019, la société Alternative Sport a invité la société Malulane à lui régler un solde de 109.950 ' correspondant, selon elle, à la différence entre le prix définitif et le prix provisoire, tout en sollicitant la libération par le séquestre d'une somme de 50.000 '.

Face au refus qui lui été opposé par la société Malulane, la société Alternative Sport l'a fait assigner devant le tribunal de commerce de Marseille aux fins notamment de:

- dire et juger que la formule de calcul de l'EBE normalisé en 2018 a été inversée, aboutissant à proratiser cet EBE au lieu de l'annualiser,

- dire et juger que l'acte de cession est dès lors entaché d'une erreur manifeste de nature à dénaturer la volonté réelle des parties à l'acte de cession,

- dire et juger que le prix définitif de cession doit être ajusté de la dette financière nette négative de 109.950 ' conformément aux articles 8.1 et 8.2 de l'acte de cession du 7 novembre 2018,

En conséquence,

- condamner la société Malulane à payer à la société Alternative Sport une somme de 109.950 ' en règlement du solde du prix définitif,

- ordonner à la société Malulane de donner accord de main-levée de la somme de 50.000 ' séquestrée entre les mains du conseil du cédant, sous astreinte de 1.000 ' par jour de retard à l'issue d'un délai de quinze jours suivant la signification du jugement à intervenir.

Par jugement en date du 4 mars 2021, le tribunal de commerce de Marseille:

- constaté que la convention de cession de titres du 7 novembre 2018 est entachée d'une erreur matérielle,

- constaté que le prix définitif de la cession de titres Mondoramas est fixé à la somme de 772.350 ',

En conséquence,

- condamné la société Malulane à payer à la société Alternative Sport la somme de 109.950 ' en règlement du solde de prix définitif ainsi que la somme de 3.000 ' au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclaré irrecevable comme prématurée la demande de la société Alternative Sport tendant à ce que soit ordonnée sous astreinte à la société Malulane de donner son accord de mainlevée de la somme de 50.000 ' séquestrée entre les mains du conseil du cédant,

- débouté la société Malulane de ses demandes reconventionnelles,

- condamné la société Malulane aux dépens, toutes taxes comprises de la présente instance, étant précisé que les droits, taxes et émoluments perçus par le secrétariat- greffe de la présente juridiction sont liquidés à 74,18 ',

- ordonné pour le tout l'exécution provisoire,

- rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du présent jugement.

Pour statuer en ce sens, le tribunal a retenu que:

Sur le prix de cession

- la société Alternative Sports soutient qu'une erreur matérielle s'est glissée à l'article de l'acte de cession à l'article 3 consistant d'une part en l'inversion entre le dénominateur et numérateur à l'opération décrite et d'autre part, en l'emploi du nombre 284 au lieu et place du nombre 311, devant recenser correctement le nombre de jours entre le début de l'année 2018 et la date de signature,

- le nombre de 365 servant de numérateur à l'opération corrigée correspond effectivement au nombre de jours de l'année civile 2018, le nombre 284 du dénominateur correspond au nombre de jours entre le début d'année et la date initialement fixée pour la signature pour la signature de l'acte de cession, soit le 11 octobre 2018 et le nombre 311 du dénominateur rectifié correspond au nombre de jours entre le début de l'année et la date de la signature de l'acte de cession, soit le 7 novembre 2018,

- la rectification proposée conduit effectivement à projeter l'EBE du 7 novembre 2018 à la date du 31 décembre 2018,

- la clause 8.1 du contrat de cession portant sur le calcul du prix provisoire n'a de sens mathématique que si les valeurs des EBE concernés se rapportent à une période de temps identique, que pour les années 2014 à 2017 la période de temps est l'année, de sorte que l'EBE normalisé de 2018 doit se rapporter à l'année,

- la commune intention des parties consiste en l'évaluation de la société Mondoramas comme la multiplication par quatre de la moyenne annuelle de l'EBE normalisé sur la période 2014 à 2018, avec projection annuelle de l'EBE normalisé 2018,

- il y a donc lieu de constater que l'acte de cession est entaché d'une erreur matérielle,

- la situation comptable au 7 novembre 2018 fait ressortir une dette financière négative de 109.950 ',

- il ressort de l'article 8.2 de l'acte de cession qu'un EBE normalisé 2018 supérieur ou égal à 210.600 ' entraîne le maintien du prix provisoire comme prix définitif et que si ce même EBE normalisé 2018 est inférieur à 210.600 ' , le prix définitif est égal au prix provisoire diminué de la différence entre 210.600 ' et le montant de l'EBE normalisé 2018,

- au regard de l'erreur matérielle qui a entaché le calcul de l'EBE normalisé 2018 tel que prévu dans la convention litigieuse, le calcul corrigé fixe le montant de cet EBE normalisé à 229.709,26 ' soit une somme supérieure au seuil de 210.600 ',

- il convient donc de s'en remettre aux stipulations déterminant la valeur du prix provisoire, l'article 8.1 précisant qu'il sera ajusté de la dette financière nette payée à la date de la cession, de sorte qu' au prix provisoire susvisé, doit être soustrait la dette financière nette qui s'est trouvée négative,

- la soustraction de cette dette financière au prix de cession provisoire revient à augmenter ce dernier et le prix de cession définitif doit être fixé à la somme de 772.350 ', la société Alternative Sport étant par conséquent fondée à obtenir un complément de prix à hauteur de 109.950 ',

Sur la mise en oeuvre de la garantie de passif

- au titre du besoin de fonds de roulement:

* la situation comptable a été transmise le 7 décembre 2018, par courriel de l'expert-comptable de la société Mondorama au président de la société Malulane, qui était donc dès la réception de ce document en mesure d'apprécier l'exactitude des déclarations du cédant portant sur la détermination du BFR,

* la réclamation à ce titre effectuée par la société Malulane n'est intervenue que le 11 février 2019, soit au-delà du délai de réclamation fixé par le contrat de garantie, à savoir un délai de 15 jours,

- au titre de la découverte d'un passif antérieur à la date de cession:

* la société Malulane ne verse aux débats aucune correspondance adressée pour réclamation à la cédante, ni aucun justificatif permettant d'apprécier si la condition relative au délai de réclamation a été respectée,

- au titre du litige sur les droits de propriété intellectuelle:

* la société Malulane verse des courriels entre juin 2019 et septembre 2019 mais ne rapporte pas la preuve que l'origine du litige trouverait naissance préalablement à la date de cession des titres Mondoramas, condition pourtant essentielle de la mise en oeuvre du contrat de garantie.

Par déclaration en date du 13 avril 2021, la société Malulane a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées et notifiées le 30 janvier 2025, la SAS Malulane demande à la cour de:

- réformer le jugement du tribunal de commerce de Marseille rendu le 4 mars 2021 en ce qu'il a:

* constaté que la convention de cession de titres du 7 novembre 2018 est entachée d'une erreur matérielle,

* constaté que le prix définitif de la cession de titres Mondoramas est fixé à la somme de 772.350 ',

* condamné la société Malulane à payer à la société Alternative Sport la somme de 109.950 ' en règlement du solde de prix définitif ainsi que la somme de 3.000 ' au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté la société Malulane de ses demandes reconventionnelles,

* condamné la société Malulane aux dépens,

Y faisant droit et statuant à nouveau,

- juger que le prix définitif de cession est de 634.085,83 ' conformément à l'article 8.2 de la convention de cession du 7 novembre 2018,

En conséquence,

- condamner la société Alternative Sport au paiement de la somme de 28.314, 17 ' correspondant au trop- perçu du prix de cession,

- ordonner la mainlevée de la somme de 28.314, 17 ' séquestrée entre les mains de Me Lionel Moatti et ainsi ordonner à la société Alternative Sport de donner son accord à mainlevée de la somme de 28.314, 17 ', le tout sous astreinte de 1.000 ' par jour de retard à l'issue d'un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir,

- ordonner à Me Lionel Moatti, séquestre désigné, de remettre la somme de 28.314,17 ' à la société Malulane,

- juger que la société Alternative Sport a fait une déclaration inexacte s'agissant du besoin en fonds de roulement en violation des articles 5.27 et 6.1 du contrat de garantie,

En conséquence,

- condamner la société Alternative Sport au paiement de la somme de 54.096 ' en réparation du préjudice subi de ce chef en application de l'article 9 du contrat de garantie,

- juger que la société Alternative Sport a fait une déclaration inexacte s'agissant d'un passif non comptabilisé en violation de l'article 6.1 du contrat de garantie,

En conséquence,

- condamner la société Alternative Sport au paiement des sommes suivantes en réparation du préjudice subi de ce chef en application de l'article 9 du contrat de garantie:

* 3.785,04 ' ( 7 factures du 5 juin 2018 au 30 octobre 2018 non comptabilisées)

* 12.665;50 ' ( créance de la SNCF du 11 mai 2015 non déclarée) sous réserve des explications et / ou du règlement de la créance litigieuse en cours d'instance,

- juger que la société Alternative Sport a fait une déclaration inexacte s'agissant des droits de propriété intellectuelle en violation des articles 5.13 et 6.1 du contrat de garantie,

En conséquence,

- condamner la société Alternative Sport au paiement de la somme de 5.220 ' en réparation du préjudice subi de ce chef en application de l'article 9 du contrat de garantie,

- débouter la société Alternative Sport de sa demande en paiement de la somme de 8.000 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de 15.000 ' au motif d'une résistance abusive,

- condamner la société Alternative Sport au paiement de la somme de 6.000 ' en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens et éventuels frais d'exécution, distraits au profit de la SELARL LX Aix-en-Provence, avocats associés aux offres de droit.

La société Alternative Sport, suivant ses dernières conclusions déposées et notifiées le 3 février 2025, demande à la cour de:

Vu les articles 1188,1103 et 1104 du code civil,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a:

* constaté que la convention de cession de titres du 7 novembre 2018 est entachée d'une erreur matérielle,

* constaté que le prix définitif de la cession de titres Mondoramas est fixé à la somme de 772.350 ',

* condamné la société Malulane à payer à la société Alternative Sport la somme de 109.950 ' en règlement du solde de prix définitif ainsi que la somme de 3.000 ' au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté la société Malulane de ses demandes reconventionnelles,

* condamné la société Malulane aux dépens, qui ont été fixés à la somme de 74,18 ' TTC,

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

* déclaré irrecevable comme prématurée la demande de la société Alternative Sport tendant à ce que soit ordonnée sous astreinte à la société Malulane de donner son accord de mainlevée de la somme de 50.000 ' séquestrée entre les mains du conseil du cédant,

En conséquence,

- condamner la société Malulane à payer à la société Alternative Sport une somme de 109.950 ' en règlement du solde du prix définitif,

- ordonner à la société Malulane de donner accord de main-levée de la somme de 50.000 ' séquestrée entre les mains du conseil du cédant, sous astreinte de 1.000 ' par jour de retard courant à l'issue d'un délai de quinze jours suivant la signification du jugement à intervenir,

- débouter la société Malulane de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner la société Malulane à payer à la société Alternative Sport une somme de 8.000 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Malulane aux dépens, distraits au profit de Me Lionel Moatti.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 4 février 2025.

MOTIFS

Sur le prix de cession

La société Malulane conteste la détermination du prix définitif telle que réclamée par la société Alternative Sports et retenue par le tribunal sur la base de deux variables d'ajustement prévues à l'acte de cession, à savoir:

- la variable de l'EBE normalisé 2018,

- la variable de la dette financière nette à la date de cession.

Sur l'existence d'une erreur dans la formule de calcul de l'EBE normalisé 2018

La société Malulane considère qu'aucune erreur dans le calcul de l'EBE normalisé tel que prévu à l'article 3 de la convention ne peut être retenue. Elle rappelle qu'en présence de clauses claires et précises, le contrat n'est pas susceptible d'interprétation, sauf à encourir un risque de dénaturation et qu'en l'espèce, il ressort des dispositions de l'acte de cession que le prix définitif est déterminé par référence à l'EBE normalisé 2018 calculé conformément aux prévisions de l'article 8.2 ainsi qu'à la clause ' définitions ' ( article 3).

Elle fait grief au tribunal d'avoir dénaturé les termes pourtant clairs et précis de la convention liant les parties et en retenant des motifs inopérants en ce qu'il s'est abstenu de se référer aux éléments tirés de la négociation qui a précédé la conclusion du contrat. Elle relève que la lettre d'intention du 28 septembre 2018 et la convention de cession du 7 novembre 2018 retiennent une définition strictement identique de l'EBE normalisé 2018 avec un dénominateur fixé à 365 et un numérateur s'établissant à 284. Elle souligne que chacune des parties étaient assistée d'un conseil dans le cadre des négociations puis de la convention définitive, de sorte que leur consentement était parfaitement libre et éclairé.

La société Alternative Sport, pour sa part, sollicite la confirmation du jugement querellé en ce qu'il a retenu que l'acte de cession comportait une erreur dans la formule de calcul de l'EBE normalisé 2018 telle que définie à, l'article 3 en ce que:

- la volonté des parties étaient d'annualiser l'EBE arrêté à la date de cession, en l'occurrence le 7 novembre 2018, et ce afin d'obtenir un EBE annualisé pouvant être ajouté aux EBE des exercices précédents et à l'EBE normalisé cible de 210.600 ' tel que mentionné à l'article 8.2,

- la formule consistant à diviser par 365 l'EBE au 7 novembre 2018 puis à le multiplier par 285 est erronée en ce que ce calcul aboutit à proratiser l'EBE 2018 à la date du 30 août 2018 au lieu de le projeter pour l'annualiser, ce qui n'a aucun sens,

- il en est de même du nombre de jours retenu qui est 311 et non 284 puisque la signature a été décalée du 11octobre au 7 novembre 2018, à la demande de l'appelante.

Elle s'appuie également sur les projections utilisées par les parties pour calculer le prix de cession ainsi que sur un courrier de la société Malulane du 3 juillet 2018 confirmant la méthode d'évaluation de la société Mondoramas comme la multiplication par quatre de l'EBE annuel.

Elle ajoute que l'objet de la règle de trois utilisée était simplement de procéder à une projection annuelle du résultat à la date de cession afin de la comparer à la projection annuelle minimale du résultat 2018 ( 210.600 ') qui avait été utilisée par l'appelante pour valoriser son prix d'acquisition provisoire.

Selon l'article 1188 du code civil, le contrat s'interprète d'après la commune intention des parties plutôt qu'en s'arrêtant au sens littéral de ses termes. Lorsque cette intention ne peut être décelée, le contrat s'interprète selon le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation.

L'article 1189 dispose que toutes les clauses d'un contrat s'interprètent les unes par rapport aux autres, en donnant à chacune le sens qui respecte la cohérence de l'acte tout entier.

Les juges du fond peuvent ainsi refuser d'appliquer littéralement une clause claire et précise lorsque celle-ci semble être le résultat d'une erreur manifeste et est en contradiction avec l'intention commune et certaine des parties, étant relevé que ni le recours à un conseil rompu au droit des affaires, ni la circonstance qu'un avenant ait été conclu ne présument la commune intention des parties et interdirait qu'une clause litigieuse soit interprétée par le juge.

En l'espèce, conformément à l'acte de cession, il était convenu que l'EBE normalisé 2018 serait calculé de la manière suivante ' L'EBE a été ainsi déterminé selon la méthode ci-dessus pour la société au titre de l'exercice ouvert au 1er janvier 2018 et ce calcul sera arrêté à la date de la cession. Cette dernière somme sera divisée par 365 et multipliée par 284 et il lui sera ajoutée une somme de 89.000 ' ( ci-après l'EBE 2018 normalisé) étant précisé que l'EBE normalisé devrait être égal à 234.000 ' ( à 23.400 ' près)'.

Or, cette formule de calcul est manifestement erronée à double titre.

La premier erreur tient, en effet, à l'inversion des opérations, à savoir qu'il aurait fallu multiplier par 365 au lieu de diviser par 365. Il convient de rappeler à ce titre que la volonté des parties était par le biais d'un traitement mathématique de l'EBE , d'obtenir une projection annuelle et un indicateur pour l'ensemble de l'année 2018. Plus particulièrement, il s'agissait, pour les parties, d'annualiser l'EBE arrêté à la date de cession et ce, afin d'obtenir un EBE annualisé pouvant être ajouté aux EBE des exercices précédents et à l'EBE normalisé cible de 210.600 ' tel que mentionné aux articles 8.1 et 8.2 de l'acte de cession et tels que reproduits plus haut.

La formule consistant à diviser par 365 l'EBE au 7 novembre 2018 au lieu de le multiplier par 365 ( qui correspond effectivement au nombre de jours de l'année civile 2018), a pour conséquence de proratiser l'EBE 2018 à la date du 30 août 2018, soit une diminution non expliquée de 33% de l'EBE annuel, au lieu de le projeter pour l'annualiser, ce qui n'a pas de sens au regard des autres clauses du contrat de cession et notamment l'article 8.1 qui stipule que le prix provisoire ' a été déterminé en considération de la somme des EBE 2014 normalisé, EBE 2015 normalisé, EBE 2016 normalisé, EBE 2017 normalisé et EBE 2018 normalisé divisée par 5 et multipliée par 4.

Cette évaluation du prix provisoire repose notamment sur les hypothèses suivantes:

- l'EBE 2014 normalisé est égal à 169.000 ',

- l'EBE 2015 normalisé est égal à 165.000 ',

- l'EBE 2016 normalisé est égal à 88.000 ',

- l'EBE 2017 normalisé est égal à 172.000 ', et

- l'EBE 2018 normalisé au moins égal à 210.600 ' (...)'

A la lecture de cette clause, la division par cinq de la somme de cinq EBE normalisés annuels de 2014 à 2018 qui conduit à déterminer une valeur moyenne ne peut se concevoir que si les valeurs des EBE concernés se rapportent à la même période de terme, à savoir l'année civile, de sorte l'EBE normalisé 2018 doit également se rapporter à l'année, conduisant nécessairement à une multiplication par 365 pour obtenir ce résultat.

La seconde erreur affectant la formule de calcul telle qu'énoncée à l'article 3 a trait au nombre de jours retenu, en l'occurrence 284, au lieu de 311. A cet égard, le nombre de 284 correspond au nombre de jours entre le 1er janvier 2018 et la date initialement fixée pour la signature de l'acte de cession, soit le 11 octobre 2018. Il est néanmoins établi que cette signature a été décalée au 7 novembre 2018 et que le nombre 311 correspond bien au nombre de jours entre le début de l'année 2018 et le 7 novembre 2018, date effective de la signature de l'acte de cession.

Par voie de conséquence, la rectification de la règle de trois telle que figurant à l'article 3 de ladite convention consistant à multiplier par 365 et à diviser par 311, au lieu de diviser par 365 et de multiplier par 284, conduit bien à projeter l'EBE du 7 novembre 2018 à la date du 31 décembre 2018 et par là à l'annualiser.

La société Alternative Sport communique, par ailleurs, en pièce 13, un tableau excel intitulé ' BP Mondoramas Grouptour 2014 15 16 17 18" comportant les différentes projections utilisées pour calculer le prix de cession, mettant en évidence la volonté des parties de projeter au 31 décembre 2018, l'EBE arrêté à la date de cession, en ce que le montant de l'EBE 2018 indiqué de 210.600 ' est bien une projection annuelle sur l'exercice indépendamment de la date de cession qui n'était pas encore fixée.

Enfin, comme le souligne à juste titre, la société Alternative Sport, si l'intention des parties avait été de prendre le résultat à la date de cession et non pas de procéder à une projection annuelle du résultat à la date de la cession, il n'aurait pas été nécessaire d'utiliser une règle de trois, laquelle ne se conçoit justement que par la volonté des parties de procéder à une projection annuelle du résultat à la date effective de la cession afin de la comparer avec la projection annuelle minimale 2018, 210.600 ', utilisée pour valoriser le prix provisoire dans l'acte de cession, montant qui devait être additionné aux quatre autres EBE annuels ( 2014 à 2017) pour obtenir une moyenne sur les cinq dernières années.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a retenu qu'une erreur matérielle entache la formule de calcul de l'EBE 2018 normalisé telle qu'énoncée à l'article 3 de l'acte de cession.

Sur la base de ce calcul, on obtient un EBE normalisé 2018 comme suit:

- EBE au 7 novembre 2018: 119. 892: 311X 365= 140.709,25 +89.000= 229.709,25 ', soit un EBE supérieur au seuil de 210.600 ' figurant à l'article 8.2 de l'acte de cession.

Concernant l'ajustement à la hausse du prix de cession

La société appelante critique le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que le prix définitif était égal au prix provisoire ( 662.400 ') lequel devait être ajusté de la dette financière nette négative à hauteur de 109.950 ', dénaturant par là les termes de l'article 8.2 du contrat de cession, envisageant exclusivement un maintien à une somme égale ou une révision à la baisse du prix provisoire pour fixer le montant définitif.

La société Alternative Sport rappelle pour sa part qu'aux termes de l'article 8.2 de l'acte de cession, le prix définitif est calculé sur la base du prix provisoire, ce dernier étant calculé sur la base des dispositions de l'article 8.1 prises dans leur ensemble, tenant notamment à l'ajustement du prix provisoire avec la dette financière nette. Elle relève qu'aucune interprétation n'est requise dès lors que cela ressort des termes clairs et précis des articles 8.1 et 8.2. Elle en conclut que lorsque l'article 8.2 fait référence au prix provisoire, il faut déterminer ce dernier en se référant à l'article 8.1 avec en particulier la variable d'ajustement de la dette financière nette.

Il convient de rappeler que:

- l'article 8.1 de la convention ' prix provisoire' énonçait que ' La cession des titres est consentie et acceptée moyennant le prix provisoire de 662.400 '. Ce prix provisoire a été déterminé en considération de la somme des EBE 2014 normalisé, EBE 2015 normalisé, EBE 2016 normalisé, EBE 2017 normalisé et EBE 2018 normalisé divisée par 5 et multipliée par 4.

Cette évaluation du prix provisoire repose notamment sur les hypothèses suivantes (...)

Il doit être révisé pour aboutir au prix définitif au vu des comptes de la société au jour de la date de cession qui devront être établis selon les principes comptables en vigueur et les méthodes en usage dans la société, à condition qu'ils soient conformes aux normes et principes comptables en vigueur, et qu'ils donnent une image fidèle et complète de la société à la date de leur arrêté. En effet, le prix provisoire sera confirmé ou infirmé par la réalisation d'une situation comptable dressée selon les principes habituels jusqu'au jour de la date de cession et sera ajusté de la dette financière nette intégralement payée à la date de cession.'

- l'article 8.2 intitulé 'calcul prix définitif ' prévoyait que ' Si les comptes de la société arrêtés à la date de cession, selon les méthodes ci-avant décrites, font apparaître en sus des conditions ci-dessus au 8.1 et du remboursement du compte courant du cédant qui devra intervenir avant la date de cession, un EBE normalisé 2018 d'un montant au moins égal à 210.600 ', quel que soit son montant, le prix définitif de cession des titres sera égal au prix provisoire. En revanche, s'ils font apparaître un EBE normalisé 2018 d'un montant inférieur à 210.600 ' le prix définitif sera égal au prix provisoire diminué du montant de la différence entre 210.600 ' et le montant de l'EBE normalisé 2018 à la date de cession, le résultat devant être arrondi au centime d'euro le plus proche.'

Il ressort des dispositions combinées de ces deux articles que:

- le prix définitif prévu à l'article 8.2 est calculé, notamment, sur la base des conditions prévues à l'article 8.1 comme l'atteste l'emploi de la formule suivante ' en sus des conditions ci-dessus au 8.1"

- parmi ces conditions, il est clairement indique le prix provisoire doit être ' ajusté de la dette financière nette intégralement payée à la date de cession', étant souligné que le terme ' ajusté' signifie que, contrairement à ce que prétend l'appelante, le prix peut être revu à la baisse ou la hausse, aucun ajustement uniquement à la baisse ne figurant dans les dispositions précitées.

Ainsi la société Malulane n'est pas fondée à s'appuyer uniquement sur l'article 8.2 de l'acte de cession en faisant abstraction de manière erronée de l'article 8.1, auquel l'article 8.2 renvoie pourtant expressément pour permettre d'envisager l'intégralité des paramètres nécessaires à l'évaluation du prix de cession, et notamment, la prise en compte de la dette financière nette.

L'article 3 de la convention de cession définit la dette financière nette comme suit ' désigne le résultat des opérations suivantes constitué par les postes comptables suivants (tel que défini par les normes comptables applicables en France): dettes financières+ comptes courants d'associés- trésorerie.'

Comme l'a noté à juste titre le tribunal, le résultat de cette opération peut se trouver négatif et en l'espèce, la situation comptable au 7 novembre 2018 fait ressortir une dette financière négative de 109.950 ', montant qui n'est pas contesté par la société Malulane.

Par voie de conséquence, l'EBE normalisé 2018 étant supérieur à 210.600 ', le prix définitif de cession est égal au prix provisoire, soit 662.400 ' lequel doit être ajusté de la dette financière nette, qui en l'occurrence est négative, de sorte que la soustraction de cette dette au prix de cession provisoire revient à augmenter ce dernier de 109.950 '. Le prix définitif s'établissant à 772.350 ' , la SAS Alternative Sports est fondée à obtenir la condamnation de la société Malulane à lui payer la somme de 109.950 ' en règlement du solde définitif, le jugement entrepris étant ainsi confirmé sur ce point.

Il convient toutefois, à la demande de l'intimée, d'ordonner à la société appelante de donner son accord de main-levée de la somme de 50.000 ' séquestrée entre les mains de Me Lionel Moatti, conseil de la cédante, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette mesure d'une astreinte. En effet, l'article 4 de la convention prévoit que les fonds séquestrés pourront être libérés une fois la contestation définitivement résolue par voie amiable ou judiciaire, ce qui est le cas avec le présent arrêt de cette cour.

Sur les demandes d'indemnisation formées par la société Malulane au titre du contrat de garantie

Dans le cadre de la cession de titres de la société Mondoramas, les parties ont également régularisé le même jour une convention de garantie.

L'article 6 ' Etendue et limites des garanties' énonce notamment que ' Le cédant s'engage à désintéresser le cessionnaire de tout préjudice qu'il subirait :

- soit en raison d'inexactitude ou d'omission dans une ou plusieurs des déclarations et attestations faites sous l'article 5, à condition que le préjudice trouve son origine ou sa cause dans un événement, un fait ou une opération antérieur à la date de réalisation,

- soit en raison de la non-exécution des engagement souscrits par eux sous le même article et qui les complètent,

- soit en cas de survenance de tout passif nouveau non comptabilisé ou de tout passif supplémentaire excédant celui figurant dans les comptes de référence, dès lors que ce passif nouveau ou excédentaire aurait une cause ou une origine imputable à des faits antérieurs à la date des comptes de référence quelle qu'en soit la cause,

- soit en cas de redressements ou rappels d'impôts au titre des exercices postérieurs aux comptes de référence et fondés sur des erreurs comptables antérieures à la date de ces comptes de référence.'

Par ailleurs, l'article 7 relatif à l'exécution des garanties prévoit que:

' La mise en oeuvre des garanties implique que le cédant, après avoir reçu une information préalable, ait la faculté de faire valoir ses observations et de défendre ses intérêts.

L'exercice de ces droits aura lieu selon les modalités suivantes.

Le cessionnaire devra associer le cédant ou lui proposer de l'associer à toute vérification, décision, négociation, instance ou procédure pouvant avoir une incidence sur le montant de son éventuelle dette à son égard.

Le cédant devra avoir accès aux documents sociaux pour faire vérifier la sincérité ou la légitimité des réclamations. Il aura la faculté de se faire assister par tout conseil de son choix, afin de participer à la défense de la société, à ses frais.

Toute réclamation, tout fait ou événement susceptible d'entraîner la mise en jeu des garanties sera porté, avec les justifications de la réclamation, à la connaissance du garant par le cessionnaire au plus tard dans les 15 jours suivant celui où il en aura lui-même pris connaissance, sauf si la procédure exige un délai de notification plus court.

En outre, le cessionnaire informera le cédant dans le délai de 15 jours suivant leur réception, de tout avis de vérification fiscale, douanière et sociale de la société et de toute assignation, dont celui-ci n'aurait pas connaissance, sauf si la procédure exige un délai de notification plus court.

Toutefois le non-respect de ces délais n'aura pour effet d'entraîner la déchéance des droits du cessionnaire à indemnisation au titre des garanties conférées sous les articles 5 et 6, que dans la mesure où il aura privé le cédant de l'exercice d'un droit ou d'un recours quelconque dans les délais raisonnables.'

Sur la réclamation en raison d'une déclaration inexacte au titre du besoin en fonds de roulement

La société Malulane se prévaut de l'article 5.27 du contrat de garantie qui indique que ' Le besoin en fonds de roulement de la société est négatif à la date de cession.' alors qu'elle justifie, au contraire, qu'au 7 novembre 2018, le besoin en fonds de roulement de la société était positif et ressortait à 54.096 '. Elle sollicite ainsi la condamnation de la société cédante à lui verser une somme de 54.096 ' en indemnisation du préjudice subi du fait de cette déclaration inexacte.

Conformément à l'article 6 de la convention, pour que le cessionnaire soit indemnisé au titre de cette garantie, il est nécessaire d'établir l'existence d'un préjudice consécutif à une éventuelle déclaration inexacte de la part du cédant.

En l'occurrence, le besoin en fonds de roulement reste un indicateur ou une donnée qui par définition est susceptible d'évoluer mais qui ne peut constituer en soi un préjudice indemnisable. En effet, il ne s'agit ni d'un coût certain, ni d'une dette supplémentaire, ni d'une charge irrémédiable.

Au demeurant, il y a lieu de relever que la société intimée établit que la déclaration concernant le besoin en fonds de roulement négatif était exacte au 30 septembre 2018, date à laquelle la situation avait été initialement arrêtée dans la perspective de la conclusion initiale de la cession de titre qui devait intervenir le 11 octobre 2018. Le fait que le besoin en fonds de roulement soit devenu positif au 7 novembre 2018, date de la signature effective de la cession, confirme bien qu'il s'agit d'une donnée par essence fluctuante, sans que pour autant cela ne caractérise une perte effective et, par là, un préjudice indemnisable.

Par voie de conséquence, la société Malulane sera déboutée de sa demande d'indemnisation à ce titre.

Sur la réclamation résultant de la survenance d'un passif dont l'origine est antérieur à la cession

S'appuyant sur les dispositions de l'article 6 du contrat de garantie, la société Malulane sollicite le règlement d'une somme de 3.785, 05 ' correspondant à six factures non comptabilisées dans les comptes de référence alors qu'elles ont une cause ou une origine imputable à des faits antérieurs au 7 novembre 2018.

Comme le souligne à juste titre la société Alternative Sports, la société appelante n'a pas jugé opportun d'informer la cédante de la moindre difficulté, ni n'a formulé la moindre réclamation dans un délai raisonnable sur l'existence de telles factures alors que le contrat de garantie lui impose un délai de quinze jours pour notifier toute éventuelle réclamation à compter du jour où elle a eu connaissance de l'événement.

La société Malulane ne peut pas se retrancher derrière les dispositions de l'article 7 de la garantie qui précisent que ' Toutefois le non-respect de ces délais n'aura pour effet d'entraîner la déchéance des droits du cessionnaire à indemnisation au titre des garanties conférées sous les articles 5 et 6, que dans la mesure où il aura privé le cédant de l'exercice d'un droit ou d'un recours quelconque dans les délais raisonnables' alors que précisément elle ne justifie d'aucune correspondance adressée pour réclamation, la lettre du 11 février 2019 dont elle se prévaut ne fait état que d'une réclamation au titre du besoin en fonds de roulement.

De même, elle prétend avoir formé une telle demande par voie judiciaire, dans un délai raisonnable, à savoir dans ses conclusions devant le tribunal de commerce pour l'audience du 6 juin 2019, alors que lesdites conclusions qu'elle produit, sont muettes sur l'existence de ces factures et encore une fois, au titre d'une éventuelle garantie, ne font état que d'une difficulté au titre du besoin en fonds de roulement.

Dans ces conditions, la cessionnaire n'est même pas en mesure d'établir à quelle date l'information relative à un tel sinistre a été délivrée à la cédante et dans quelles conditions, plus particulièrement s'il a été permis à la société intimée de présenter ses observations, conformément à l'article 7.

Concernant cette réclamation, la procédure relative à la mise en oeuvre de la garantie a été totalement ignorée par la société Malulane, ce qui a nécessairement privé la cédante de l'exercice d'un droit ou d'un recours quelconque dans les délais raisonnables.

Le jugement entrepris en ce qu'il a débouté cette dernière de ce chef de demande sera également confirmé.

En cause d'appel, la société Malulane soutient avoir découvert un nouveau sinistre et produit un courrier recommandé en date du 12 juillet 2021, adressé à la SAS Alternative Sports, concernant un double paiement allégué de la SNCF pour un montant de 12.565,50 ' qui aurait été effectué le 8 juillet 2015 et le 6 août 2015. A cette réclamation, étaient joints les justificatifs correspondants.

La société Alternative Sports lui a répondu, par lettre recommandée du 2 août 2021, contestant cette réclamation, invoquant tour à tour:

- le caractère tardif de cette réclamation formulée le 12 juillet 2021 alors que la SNCF a notifié sa demande le 17 mai 2021, soit deux mois après au lieu du délai de 15 jours prévu par l'article 7.1 de la garantie,

- le caractère prescrit de cette réclamation au regard de l'article 224 du code civil,

- la nécessité de déduire les réintégrations de provisions intervenues depuis la cession sur les créances provisionnées.

Or, il ressort de la réponse apportée par l'appelante le 19 août 2021, que celle-ci a régularisé dans l'intervalle la situation auprès de la SNCF en faisant le choix de régler directement le montant réclamé par cette dernière.

Comme le rappelle l'intimée, l'article 7.3 du contrat de garantie stipule toutefois que s'agissant des procédures contentieuses de nature autre que fiscale, douanière ou sociale ' La décision d'engager un contentieux ou de conclure une transaction reste en toute hypothèse, une décision de la société, sous réserve de l'acceptation préalable du garant. A ce titre le cessionnaire, agissant tant en son nom personnel que pour le compte de la société, dont il se porte fort, s'interdit de composer, transiger, acquiescer, recourir à un arbitrage sur des questions susceptibles de mettre en cause la garantie du garant au titre de la présente, sans l'autorisation préalable du garant, laquelle devra être exprimée par écrit sous 20 jours à compter de sa sollicitation (...)'

En l'espèce, la société Malulane a spontanément réglé la SNCF sans avoir obtenu l'accord préalable de la cédante, laquelle avait, au contraire, exprimé son désaccord en le motivant. L'appelante ne peut justifier le non respect des prescriptions de la convention de garantie au regard d'une prétendue inconsistance des arguments présentés par la société Alternative Sport, ce que ne prévoit pas la convention et alors qu'il était légitime de la part de la cédante de s'interroger sur la prescription encourue de la créance de la SNCF, le double paiement ayant été effectué au cours de l'été 2015 pour une première réclamation adressée en mai 2021.

La société Malulane sera par conséquent déboutée de sa demande d'indemnisation au titre du litige SNCF.

Sur la réclamation résultant d'une déclaration inexacte s'agissant des droits de propriété intellectuelle

La société Malulane soutient avoir été alertée concernant un litige relatif à l'utilisation abusive et non autorisée par la cédante sur des sites internet ( mondoramas.com et groupetour.fr) de photographies couvertes par des droits de propriété intellectuelle, appartenant à l'Agence France Presse ( AFP).

Elle communique des courriels de contestation qui lui ont été adressés par PcRighnts Europe GmbH au nom de l'AFP entre juin 2019 et septembre 2019.

Comme l'a relevé à juste titre le tribunal, la société Malulane ne rapporte pas la preuve que l'origine du litige trouverait naissance préalablement à l'acte de cession de titres du 7 novembre 2018, qui est pourtant une condition essentielle de la mise en oeuvre de la garantie, étant précisé que:

- la capture d'écran de juin 2017 sur le site mondoramas d'une photographie de l'avant d'un bateau ne démontre rien, et en tout cas pas qu'il s'agit d'une des photos dont fait état l'AFP dans son courrier récapitulatif du 23 septembre 2019 qui comporte des photocopies en noir et blanc de très mauvaise qualité sans que l'on puisse reconnaître l'image en question,

- les factures et échanges de mails avec la société Serenity en janvier 2019 concernant la création du nouveau site Mondoramas ( pièce 30) ainsi qu'un historique d'achats dans le cadre d'un abonnement à compter de mai 2019, concernant des licences permettant de publier des photos sur le site, sans que l'on sache lesquelles, ( pièce 31), ne permettent pas de démontrer que la réclamation porte sur un litige qui trouve son origine antérieurement à la cession.

Quant à l'attestation d'un certain [X] [M] qui ne répond pas aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile, faute de production de la copie de la pièce d'identité de son auteur, elle n'a qu'une valeur probatoire limitée en ce qu'une part celui-ci invoque uniquement la création du site grouptour.fr et sans mention du site mondoramas, et d'autre part, il ne mentionne aucune date quant à la réalisation dudit site.

En considération de ces éléments, c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté la réclamation formée de ce chef par la société Malulane.

Dans le corps de ses écritures la société intimée sollicite des dommages et intérêts pour résistance abusive. Or, elle en reprend pas cette prétention dans le dispositif de ses écritures qui pourtant seul lie la cour, en vertu de l'article 954 du code de procédure civile. La cour n'en est donc pas saisie.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Marseille déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prématurée la demande de la société Alternative Sport tendant à ce que soit ordonnée sous astreinte à la société Malulane de donner son accord de mainlevée de la somme de 50.000 ' séquestrée entre les mains du conseil du cédant,

Statuant à nouveau sur ce point,

Ordonne à la société Malulane de donner son accord de main-levée de la somme de 50.000 ' séquestrée entre les mains de Me Lionel Moatti, conseil de la cédante, dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt,

Dit n'y avoir lieu à assortir cette mesure d'une astreinte,

Y ajoutant,

Déboute la société Malulane de sa réclamation au titre du double paiement allégué de la SNCF,

Condamne la société Malulane à payer à la société Alternative Sport la somme de 5.000 ' sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Malulane aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site