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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 3 avril 2025, n° 20/00601

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Casal Sport (SAS)

Défendeur :

La Poste (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Renard

Conseillers :

Mme Soudry, Mme Prigent

Avocats :

Me Ingold, Me Minier

T. com. Paris, du 17 oct. 2019, n° 20180…

17 octobre 2019

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Sports loisirs « Casal sport » (ci-après la société Casal sport) est spécialisée dans la commercialisation d'articles de sport.

La société Itinsell est une société spécialisée dans le commerce de gros d'ordinateurs, d'équipements informatiques, périphériques et logiciels, qui a créé un logiciel, Itrack, permettant aux commerçants et vendeurs à distance de contrôler les expéditions, la gestion des incidents de livraison et les procédures administratives auprès des transporteurs.

Pour les besoins de son activité, la société Casal sport a confié à la société La Poste, par contrats du 23 septembre 2011 puis du 30 mai 2012, la prise en charge, l'acheminement et la diffusion de ses marchandises au domicile de ses clients, via les divers modes de livraison composant la gamme « colissimo entreprise ».

Par acte d'huissier du 17 octobre 2012, la société Itinsell, indiquant agir au nom de la société Casal sport, a saisi la société La Poste de l'ensemble de ses réclamations non traitées.

Le 7 mars 2013, la société Itinsell, indiquant agir au nom de ses clients dont la société Casal sport, a saisi le médiateur du groupe La Poste « de l'ensemble des réclamations ouvertes par leurs soins relatives aux colis expédiés antérieurement au 31 octobre 2012 et non clôturées à ce jour ».

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 29 mars 2013, le médiateur du groupe La Poste a classé la demande de médiation formée par la société Itinsell pour le compte de ses clients en invoquant une procédure judiciaire diligentée par la société Itinsell à l'encontre de la société La Poste.

La société Itinsell a contesté ce classement par lettre du 9 avril 2013 en indiquant que la procédure judiciaire en cours ne concernait pas l'indemnisation des préjudices subis par ses clients mais l'opposait directement à la société La Poste au titre des entraves subies dans l'exercice de son activité.

Par lettre du 16 avril 2013, le médiateur du groupe La Poste a confirmé l'irrecevabilité de la demande de médiation.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 29 mai 2013, la société Itinsell, indiquant agir au nom de ses clients, a saisi l'Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes (ARCEP), en vue d'obtenir le traitement des réclamations adressées à la société La Poste en vertu de l'article L 5-7-1 du code des postes et des communications électroniques.

Par lettre du 11 juin 2013, l'ARCEP a répondu qu'il n'entrait pas dans ses missions de se prononcer sur une décision d'irrecevabilité du médiateur du groupe La Poste ni de traiter plus de 700 000 réclamations groupées.

Par lettre du 12 juin 2013, la société Itinsell a, par l'intermédiaire de son conseil, contesté la décision d'irrecevabilité du médiateur du groupe La Poste.

Par arrêt du 14 juin 2013, la cour d'appel de Paris, saisie dans le cadre d'un litige opposant la société Itinsell agissant à titre personnel à l'encontre de la société La Poste, a infirmé le jugement du tribunal de commerce de Paris du 15 avril 2010 ayant débouté la société Itinsell de ses demandes, et, statuant à nouveau, a condamné la société La Poste à répondre aux réclamations émanant de la société Itinsell agissant dans le cadre d'un mandat donné par ses clients et dans les limites de ce mandat, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, et a condamné la société La Poste à payer à la société Itinsell une somme de 5.000 euros de dommages et intérêts outre une somme de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par lettre du 28 juin 2013, le médiateur du groupe La Poste, prenant acte de l'arrêt de la cour d'appel intervenu le 14 juin 2013 dans le litige opposant la société Itinsell à la société La Poste, a indiqué au conseil de la société Itinsell qu'il ne pourrait intervenir pour se prononcer sur la demande de médiation de la société Casal sport que lorsque le processus de traitement interne des réclamations non satisfaites serait achevé.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 16 octobre 2013, la société Casal sport a actualisé sa demande relative aux réclamations adressées et a mis en demeure la société La Poste, à titre principal, d'apporter une réponse aux 4.648 réclamations déposées concernant des colis expédiés entre le 23 avril 2012 et le 31 juillet 2013 et, à titre subsidiaire, de lui payer une somme de 46.421,61 euros à titre d'indemnisation.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 26 mars 2014, la société Casal sport a actualisé sa demande relative aux réclamations adressées et a mis en demeure la société La Poste, à titre principal, d'apporter une réponse aux 5.685 réclamations déposées concernant des colis expédiés entre le 23 avril 2012 et le 31 décembre 2013 et, à titre subsidiaire, de lui payer une somme de 61.138,98 euros à titre d'indemnisation.

Par acte du 7 juillet 2014, la société Casal sport a assigné la société La Poste devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de voir :

- dire et juger que la société La Poste n'a pas respecté les délais garantis prévus au contrat,

- dire et juger que la société La Poste a manqué à ses engagements contractuels en ne procédant pas à l'indemnisation des avaries, pertes et retards prévue au contrat,

- condamner la société La Poste au paiement d'une somme de 61.138,98 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 octobre 2013, au titre de 5.685 colis expédiés entre le 23 avril 2012 et le 31 décembre 2013 et livrés avec retard, perdus ou ayant subi des avaries,

- dire que la modification des conditions générales portant sur les bordereaux de dépôt crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties,

- dire que cette modification est inopposable à la société Casal sport,

- condamner la société La Poste au paiement à la société Casal sport d'une somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

- prononcer l'exécution provisoire.

Par conclusions déposées à l'audience du 17 octobre 2018, la société Casal sport a porté sa demande d'indemnisation à une somme de 102.172,68 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 octobre 2013, au titre de 14012 colis expédiés entre le 23 avril 2012 et le 1er juin 2017 et livrés avec retard, perdus ou ayant subi des avaries.

Par jugement du 17 octobre 2019, le tribunal de commerce de Paris a :

Débouté la société Casal sport de toutes ses demandes,

Débouté les parties de leurs demandes, autres plus amples ou contraires,

Condamné la société Casal sport aux dépens.

Par déclaration du 24 décembre 2019, la société Casal sport a interjeté appel du jugement en ce qu'il a :

- Débouté la société Casal sport de toutes ses demandes lesquelles tendent notamment à voir condamner la société La poste à lui verser la somme de 102 172,68 euros en réparation du préjudice subi du fait des avaries, pertes et retards avec intérêts au taux légal à compter de la première mise en demeure du 16 octobre 2013 et condamner la société La poste à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

- Condamné la société Casal sport aux dépens.

Par conclusions d'incident du 10 novembre 2021, la société Casal sport a saisi le conseiller de la mise en état afin qu'il soit sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport de la mesure d'expertise ordonnée dans le cadre de l'instance RG n°18/2255 opposant la société Institut de Recherche Biologique à la société La Poste.

Par ordonnance du 2 juin 2022, le conseiller de la mise en état a accueilli la demande de sursis à statuer.

Le rapport relatif à l'expertise ordonnée dans le cadre de l'instance RG n°18/2255 opposant la société Institut de Recherche Biologique à la société La Poste a été déposé.

Prétentions et moyens des parties

Par ses dernières conclusions notifiées le 10 octobre 2024, la société Casal sport demande, au visa des articles 1134, 1147, 1152 anciens du code civil, 2224 et 2238 du code civil, L. 442-6 du code de commerce, L. 7 et suivants du code des postes et communications électroniques, de :

- Recevoir et juger bien fondé l'appel de la société Casal sport,

- Réformer dans son intégralité le jugement du 17 octobre 2019 par le tribunal de commerce de Paris (n°RG 2018/006819),

Statuant à nouveau,

- Rejeter l'exception d'irrecevabilité tirée de l'article L.10 du code des postes et des communications électroniques,

- Prononcer la nullité des articles 2.2, 11.1 et 17.1 des conditions générales de vente applicables en ce qu'ils créent un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties,

- A défaut,

- Déclarer inopposables à la société Casal sport les articles 2.2, 11.1 et 17.1 des conditions générales de vente applicables en ce qu'ils créent un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties,

- Juger qu'entre le 23 avril 2012 et le 31 décembre 2019, 15 887 réclamations ont été ouvertes pour des colis livrés avec retard, avaries ou pertes mais n'ont pas fait l'objet de traitement ni d'indemnisation prévue par les parties,

- Par conséquent,

- Condamner la société La Poste à payer à la société Casal sport la somme de 124 716,35 euros HT à titre de dommages et intérêts en application des pénalités prévues au contrat selon situation arrêtée au 31 décembre 2019, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 octobre 2013,

Sur l'appel incident de la société La Poste :

- Débouter la société La Poste de son appel incident et de toute demande reconventionnelle à l'encontre de la société Casal sport

En tout état de cause :

- Condamner la société La Poste à payer à la société Casal sport la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société La Poste aux entiers dépens de l'instance.

Par ses dernières conclusions notifiées le 24 septembre 2024, la société La Poste demande, au visa des articles 122, 564 du code de procédure civile, 1152 du code civil, L. 7, L. 8, L. 10 du code des postes et des communications électroniques, 19 de la convention postale universelle, de :

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 17 octobre 2019 en ce qu'il a déclaré non prescrites les demandes de la société Casal sport ;

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 17 octobre 2019 en ce qu'il a débouté la société La Poste de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts et de sa demande de condamnation de la société Casal sport au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 17 octobre 2019 en ce qu'il a débouté la société Casal sport de toutes ses demandes et l'a condamnée aux dépens de l'instance ;

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

- Juger irrecevables comme prescrites toutes les demandes de la société Casal sport :

* Les demandes de la société Casal sport invoquées dans son assignation et concernant des envois effectués avant le 6 juillet 2013 (pour les envois relevant d'une prescription d'un an) et avant le 6 janvier 2014 (pour les envois relevant de la CPU), pour un total de 4421/5578,

* Les demandes introduites dans ses conclusions du 17 octobre 2018 et qui concernent des colis déposés avant le 16 octobre 2017 (pour les envois relevant d'une prescription d'un an) et avant le 16 avril 2018 (pour les envois relevant d'une prescription de six mois), soit l'ensemble des 8214 réclamations concernées,

* Les demandes introduites dans ses conclusions d'appel du 23 mars 2020 concernant des colis déposés avant le 22 mars 2019 (pour les envois relevant d'une prescription d'un an) et avant le 22 septembre 2018 (pour les envois relevant d'une prescription de six mois) ;

- Juger irrecevables car nouvelles en cause d'appel les demandes de la société Casal sport introduites dans ses conclusions d'appel ;

- Juger irrecevable la demande de nullité des articles 2.2, 11.1 et 17.1 des conditions générales de vente car nouvelle en cause d'appel ;

A titre infiniment subsidiaire,

- Réduire la somme demandée par la société Casal sport à titre de clause pénale, comme manifestement excessive ;

En toute hypothèse,

- Débouter la société Casal sport de l'ensemble de ses demandes ;

- Condamner la société Casal sport au paiement de la somme de 10 000 euros au titre du préjudice subi par la société La Poste pour avoir dû traiter des dizaines de milliers de réclamations injustifiées présentées à de multiples reprises de façon identique ;

- Condamner la société Casal sport au paiement de la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour n'avoir pas hésité à engager une procédure concernant des demandes qu'elle savait pour l'essentiel prescrites et/ou infondées et qui a contraint la société La Poste à engager des frais de défense importants ;

- Condamner la société Casal sport aux dépens de l'instance.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 17 octobre 2024.

La cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

L'action de la société Casal sport tend à la fois à l'application des clauses pénales prévues aux conditions générales de vente de la société La Poste pour inexécution par cette dernière de ses engagements contractuels et à l'annulation ou à la déclaration d'inopposabilité de certaines clauses figurant aux conditions générales de vente de la société La Poste.

I. Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription

La société La Poste invoque l'irrecevabilité partielle des demandes d'indemnisation présentées à son encontre en raison de la prescription prévue à l'article L.10 du code des postes et communications électroniques pour les envois internes et à l'article 19 de la convention postale universelle pour les envois internationaux. A l'inverse de ce que soutient la société Casal sport, elle affirme que ces prescriptions sont applicables à chaque envoi postal et non à un ensemble de demandes comprises dans l'assignation ou des conclusions postérieures. Elle ajoute que l'article L.10 est applicable à une demande d'indemnisation au titre d'une clause pénale dès lors qu'une telle demande a pour objet l'indemnisation des « dommages directs causés par le retard dans la distribution d'un envoi postal » comme le prévoit l'article L.8 du code des postes et communications électroniques.

Elle exclut toute suspension ou interruption du délai de prescription. Elle estime qu'il appartient à l'appelante de justifier, pour chaque envoi postal, de la réalité des interruptions du délai de prescription. Elle relève que la société Casal sport, qui prétend avoir actualisé ses réclamations, ne justifie pas de demandes en justice au sens de l'article 2241 du code civil interruptives du délai de prescription. Ainsi elle considère que parmi les colis ayant fait l'objet de l'assignation du 7 juillet 2014, seuls 1157, pris en charge à compter du 7 juillet 2013, ne font pas l'objet d'une prescription, que parmi les colis ayant fait l'objet des conclusions du 17 octobre 2018, tous sont prescrits, que parmi les colis ayant fait l'objet de conclusions d'appel du 23 mars 2020 et du 12 octobre 2020, la plupart sont prescrits.

Elle fait valoir qu'à défaut pour la société Casal sport de rapporter la preuve que la société Itinsell agissait bien en vertu d'un mandat de sa part, les réclamations ou les actions en justice introduites par cette société n'ont pas pu avoir pour effet d'interrompre la prescription. Par ailleurs, elle soutient qu'il n'est pas démontré que les réclamations effectuées auprès du médiateur de la Poste concernaient les mêmes envois que ceux objets du litige. Elle affirme qu'en tout état de cause, la médiation n'a pu avoir d'effet interruptif qu'à l'égard des colis visés dans la saisine du médiateur, soit au maximum pour les colis envoyés du 13 mars 2012 au 31 décembre 2013.

Elle ajoute que le médiateur a déclaré la demande de médiation irrecevable de sorte que l'effet interruptif de prescription n'a pas pu jouer faute pour la médiation d'avoir pu commencer. Elle conteste l'application de la charte de la médiation de la Banque Postale à son égard.

Ensuite la société La Poste fait valoir que la saisine de l'ARCEP et les réclamations qui lui ont été adressées n'ont pas pu avoir d'effet interruptif ou suspensif de prescription ; les causes d'interruption ou de suspension de prescription étant limitativement énumérées aux articles 2233 et 2240 et suivants du code civil.

Elle dément toute déloyauté de sa part ayant empêché la société Casal sport d'agir en justice à son encontre et soutient que celle-ci a sciemment laissé expirer le délai d'action.

Pour s'opposer à la fin de non-recevoir soulevée par la société La Poste, la société Casal sport affirme que l'article L.10 du code des postes et des communications électroniques n'est pas applicable dès lors que son action ne tend pas à obtenir l'indemnisation des « dommages directs causés par le retard dans la distribution d'un envoi postal » comme le prévoit l'article L.8 du code des postes et télécommunications mais vise à obtenir l'indemnité convenue au contrat au titre de la clause pénale qui ne peut être analysée comme un dommage direct. En outre, la société Casal sport soutient que l'article L.8 s'applique uniquement pour la réparation des dommages directs causés par la distribution d'un seul envoi postal et non pour l'indemnisation des dommages causés par l'accumulation et la répétition des retards dans l'acheminement de milliers d'envois postaux s'inscrivant dans une relation contractuelle globale avec un partenaire qui utilise les services de la Poste à grande échelle de manière industrielle. Enfin elle prétend que l'article L.8 n'a pas pour objet l'indemnisation du préjudice causé par le refus de la Poste de traiter les réclamations qui lui ont été adressées.

La société Casal sport fait valoir à titre subsidiaire au soutien de la recevabilité de son action que les démarches amiables entreprises auprès de la société La Poste ont eu pour effet de suspendre le délai de prescription en vertu de l'article 2238 du code civil et de la charte de la médiation de la Banque Postale. Elle explique avoir valablement saisi, par l'intermédiaire de son mandataire, la société Itinsell, le médiateur du groupe La Poste le 7 mars 2013, puis l'ARCEP le 30 mai 2013. Elle affirme prouver par les pièces versées aux débats que la saisine du médiateur portait sur les colis pour lesquels elle sollicite une indemnisation dans le cadre de la présente instance. Elle invoque les dispositions de l'article 2238 alinéa 2 du code civil et estime que faute pour le médiateur d'avoir déclaré la médiation terminée, le délai de prescription était toujours suspendu au moment de la délivrance de l'assignation le 7 juillet 2014. Elle estime en outre que la procédure engagée devant le tribunal de grande instance de Paris le 12 février 2009 par son mandataire, la société Itinsell, en vue de voir enjoindre à la société La Poste de répondre aux réclamations amiables qui lui avaient été adressées a suspendu le délai de prescription jusqu'au 14 juin 2013, date de l'arrêt de la cour d'appel de Paris.

Elle allègue en tout état de cause la déloyauté de la société La Poste qui soulève la prescription de l'action alors qu'elle a fait obstacle au déroulement de la procédure amiable en bloquant les réclamations adressées à son service client de sorte que le jeu de la courte prescription doit être écarté.

Selon l'article L.7 du code des postes et communications électroniques dans sa version applicable au litige, « La responsabilité des prestataires de services postaux au sens de l'article L.1 est engagée dans les conditions prévues par les articles 1134 et suivants et 1382 et suivants du code civil à raison des pertes et avaries survenues lors de la prestation.

Toutefois, cette responsabilité tient compte des caractéristiques des envois et des tarifs d'affranchissement selon des modalités fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine des plafonds d'indemnisation. »

Par ailleurs, l'article L.8 du code des postes et communications électroniques dans sa version applicable au litige, prévoit que : 'Pour les dommages directs causés par le retard dans la distribution d'un envoi postal, la responsabilité des prestataires des services postaux au sens de l'article L. 1 est engagée dans les conditions prévues par les articles 1134 et suivants et 1382 et suivants du code civil, si le prestataire a souscrit un engagement portant sur le délai d'acheminement de cet envoi postal.

Toutefois, cette responsabilité tient compte des caractéristiques des envois et des tarifs d'affranchissement selon des modalités fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine des plafonds d'indemnisation'.

En outre, l'article L.10 du code des postes et communications électroniques dispose que : « Les actions en responsabilité pour avaries, pertes ou retards engagées au titre des articles L. 7 et L. 8 sont prescrites dans le délai d'un an à compter du lendemain du jour du dépôt de l'envoi. »

Enfin l'article 19 de la Convention postale universelle adoptée à Doha le 11 octobre 2012 prévoit que : « Chaque opérateur désigné est tenu d'accepter les réclamations concernant les colis et les envois recommandés ou avec valeur déclarée, déposés dans son propre service ou dans celui de tout autre opérateur désigné, pourvu que ces réclamations soient présentées dans un délai de six mois à compter du lendemain du jour du dépôt de l'envoi. Les réclamations sont transmises par voie recommandée prioritaire, par EMS ou par des moyens électroniques. »

a. Sur l'application des articles L. 8 et L.10 du code des postes et communications électroniques

Contrairement à ce que soutient la société Casal sport, les articles L.8 et L.10 du code des postes et communications électroniques sont bien applicables à son action visant à voir appliquer à la société La Poste les pénalités contractuelles prévues au contrat en cas de retard.

En effet, la clause pénale a notamment pour objet de fixer par avance le montant des dommages-intérêts dus par l'une des parties en cas d'inexécution de ses obligations contractuelles.

Ainsi, lorsqu'elle agit en application des clauses pénales prévues au contrat en cas de retard des colis, la société Casal sport agit bien en responsabilité pour demander l'indemnisation du préjudice subi au titre des retards qu'elle allègue.

b. Sur la suspension du délai de prescription

La société Casal sport se prévaut des dispositions de la charte de la médiation de la Banque postale ainsi que de l'article 2238 du code civil pour soutenir que le délai de prescription a été suspendu. La société La Poste répond que ces dispositions ne sont pas applicables au litige.

Tout d'abord, l'article 7 de la charte de la médiation de la Banque postale (version octobre 2013) prévoit que : « Le Médiateur de La Banque Postale est tenu de statuer dans les deux mois à compter de sa saisine. (') La prescription des actions relatives au litige porté à la connaissance du Médiateur de La Banque Postale est suspendue à compter de la saisine et ne recommence à courir qu'à compter de l'avis rendu par le Médiateur de La Banque Postale. (...) ».

Toutefois aux termes de son article 1er, ladite charte précise que : « La Banque Postale propose gratuitement à ses clients un service de médiation pour le règlement des désaccords qui n'auraient pas trouvé de solution auprès de ses services. La médiation bancaire est une procédure légale régie par le code monétaire et financier (...) ».

Il s'en déduit que la société Casal sport ne peut se prévaloir des dispositions susvisées dès lors que le présent litige ne l'oppose pas à la Banque Postale mais à La Poste, qui sont deux entités juridiques distinctes.

Par ailleurs, l'article 2238 du code civil dispose que : « La prescription est suspendue à compter du jour où, après la survenance d'un litige, les parties conviennent de recourir à la médiation ou à la conciliation ou, à défaut d'accord écrit, à compter du jour de la première réunion de médiation ou de conciliation. (') Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter de la date à laquelle soit l'une des parties ou les deux, soit le médiateur ou le conciliateur déclarent que la médiation ou la conciliation est terminée. (...) ».

En l'espèce, il est établi que la société Casal sport a, par l'intermédiaire de son mandataire, la société Itinsell, saisi le médiateur du groupe La Poste par lettre du 7 mars 2013.

Il convient de relever que dans la mesure où, dans cette lettre, la société Itinsell a indiqué agir en qualité de mandataire de certains clients dont elle donnait la liste et que dans cette liste figurait la société Casal sport, la société La Poste n'est pas fondée à mettre en doute l'existence dudit mandat qui concerne les rapports entre la société Casal sport et la société Itinsell. Cette saisine écrite du médiateur institutionnel du groupe La Poste, par l'intermédiaire du mandataire de la société Casal sport, doit donc être considérée comme marquant le début de la suspension du délai de prescription conformément aux dispositions susvisées. En effet, la saisine du médiateur du groupe La Poste par la société Casal sport consacre la volonté des parties de recourir à une mesure de médiation. En outre, si le médiateur a, par lettre du 29 mars 2013, décidé de « classer » cette demande de médiation, prétextant la procédure judiciaire diligentée à l'encontre de la société La Poste, et , par lettre du 16 avril 2013, confirmé l'irrecevabilité de la demande de médiation, il a, dans une lettre du 28 juin 2013, reporté son intervention à l'issue du traitement des réclamations par la société La Poste de sorte que la mesure de médiation n'a pu se mettre en place du fait du médiateur. Dans ces conditions, le délai de prescription a été suspendu entre le 7 mars 2013 et le 7 juillet 2014, date de l'assignation de la société Casal sport en justice manifestant la volonté de cette dernière de mettre un terme à la médiation.

Toutefois l'effet suspensif de prescription n'a pu avoir lieu qu'à l'égard des réclamations portées à la connaissance du médiateur et n'étant pas prescrites au moment de sa saisine. Or il sera observé que la société Casal sport ne rapporte pas la preuve que les réclamations objet de la présente instance sont, même partiellement, les mêmes que celles ayant fait l'objet de la saisine du médiateur.

A cet égard, il sera souligné que le courrier du 7 mars 2013 adressé au médiateur fait état d'une annexe 5 correspondant au dossier numérique contenant l'ensemble de l'historique des réclamations des autres comptes ColiPoste (dont faisait partie la société Casal sport). Or cette annexe n'est pas produite aux débats. La pièces 22-2 versée aux débats par la société Casal sport qui recense les colis ayant fait l'objet de la saisine du médiateur est une pièce établie par la société Casal sport qui n'a aucune valeur probante.

Dans ces conditions, il convient de constater que la société Casal sport ne rapporte pas la preuve que des réclamations concernant des colis non atteints par la prescription à la date du 7 mars 2013 ont été soumises au médiateur et font également l'objet de la présente instance de sorte qu'aucune suspension du délai de prescription n'est applicable. Il sera encore rappelé que la saisine de l'ARCEP, qui n'est pas un médiateur, ne saurait avoir eu un effet suspensif de prescription.

c. Sur l'interruption du délai de prescription

En application de l'article 2241 du code civil, seule la demande en justice a pu interrompre la prescription.

En vertu de l'article L.10 du code des postes et communications électroniques, « Les actions en responsabilité pour avaries, pertes ou retards engagées au titre des articles L. 7 et L. 8 sont prescrites dans le délai d'un an à compter du lendemain du jour du dépôt de l'envoi. » Ces dispositions sont applicables aux envois nationaux.

L'article 19 de la Convention postale universelle adoptée à Doha le 11 octobre 2012 prévoit que : « Chaque opérateur désigné est tenu d'accepter les réclamations concernant les colis et les envois recommandés ou avec valeur déclarée, déposés dans son propre service ou dans celui de tout autre opérateur désigné, pourvu que ces réclamations soient présentées dans un délai de six mois à compter du lendemain du jour du dépôt de l'envoi. Les réclamations sont transmises par voie recommandée prioritaire, par EMS ou par des moyens électroniques. » Ces dispositions sont applicables aux envois internationaux.

Les réclamations faisant l'objet de la présente instance concernent des colis envoyés entre le 23 avril 2012 et le 31 décembre 2019.

Néanmoins l'assignation du 7 juillet 2014 ne contenait des demandes que concernant 5.685 expédiés entre le 23 avril 2012 et le 31 décembre 2013.

Dans ces conditions, il convient de dire irrecevables comme prescrites les demandes contenues dans l'assignation du 7 juillet 2014 pour des colis envoyés entre le 23 avril 2012 et le 6 juillet 2013 pour les envois relevant de la prescription d'un an et de déclarer également irrecevables les demandes contenues dans l'assignation du 7 juillet 2014 portant sur les colis relevant de la prescription de six mois, dont la prescription était acquise au moment de la délivrance de l'assignation.

Par ailleurs, la société Casal sport a formé, en première instance, de nouvelles demandes en justice, par conclusions du 17 octobre 2018, pour des colis envoyés entre le 23 avril 2012 et le 1er juin 2017, soit postérieurement à l'expiration du délai de prescription d'un an ou de six mois.

Or ces nouvelles demandes en justice n'étaient pas virtuellement comprises dans l'assignation dès lors qu'elles concernent des manquements contractuels distincts et procèdent d'un but distinct dans la mesure où elles tendent à la réparation de préjudices distincts.

Il convient en conséquence de déclarer irrecevables ces demandes sous réserve qu'elles ne portent pas sur des colis visés dans l'assignation du 7 juillet 2014.

d. Sur la déloyauté de la société La Poste

Les pièces produites et les éléments des débats n'établissent aucune déloyauté de la part de la société La Poste ayant empêché la société Casal sport d'agir en justice.

II. Sur la fin de non-recevoir tirée du caractère nouveau de la demande d'indemnisation en appel

L'article 564 du code de procédure civile prévoit que : « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »

L'article 566 du même code dispose que : « Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. »

s

La société Casal sport a sollicité en appel des demandes d'indemnisation au titre de colis qui n'étaient pas visés en première instance étant rappelé que les demandes d'indemnisation formulées dans son assignation en première instance portaient sur un montant de 61.138,98 euros et concernaient 5 685 colis envoyés entre le 23 avril 2012 et le 31 décembre 2013. En outre, dans ses conclusions d'appel du 23 mars 2020 ainsi que dans ses dernières conclusions d'appel du 10 octobre 2024, la société Casal sport revendique l'indemnisation, à concurrence d'un montant de 124.716,35 euros, au titre de 15 887 colis envoyés entre le 23 avril 2012 et le 31 décembre 2019.

La société La Poste invoque l'irrecevabilité de ces demandes nouvelles en appel.

Il résulte des conclusions et des pièces de la société Casal sport que ces demandes d'indemnisation en appel portent pour partie sur des nouveaux colis pour lesquels aucune demande d'indemnisation n'avait été formée en première instance. Ces demandes d'indemnisation doivent être qualifiées de nouvelles en ce qu'elles ne sont ni l'accessoire, ni la conséquence ni encore le complément nécessaire des demandes formées en première instance.

Par conséquent, elles seront déclarées irrecevables.

Au total, seules sont recevables les demandes d'indemnisation de la société Casal sport contenues dans l'assignation du 7 juillet 2014 et maintenues depuis, et relatives à des colis déposés entre le 7 juillet 2013 et le 31 décembre 2013, pour les envois relevant d'une prescription d'un an.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

III. Sur la recevabilité de la demande de nullité des clauses contractuelles pour déséquilibre significatif

La société Casal sport demande en appel de voir prononcer la nullité des articles 2.2, 11.1 et 17.1 des conditions générales de vente, dans leurs versions de 2011 et 2012, en ce qu'ils créent un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties. A l'appui de sa demande, elle invoque les dispositions de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce.

La société La Poste soulève l'irrecevabilité de la demande de nullité comme étant nouvelle en appel.

L'article 564 du code de procédure civile prévoit que : « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »

L'article 566 du même code dispose que : « Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. »

Il sera relevé qu'en première instance, la société Casal sport sollicitait du tribunal de « dire que la modification des conditions générales portant sur les bordereaux de dépôt crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et dire que cette modification est inopposable à la société Casal sport ».

Or une demande tendant à l'inopposabilité de certaines clauses à l'égard d'une partie, telle que formulée en première instance, correspond à une fin différente de celle tendant à la nullité, erga omnes, desdites clauses, telle que formulée en appel. Cette demande de nullité doit dès lors être qualifiée de nouvelle en ce qu'elle n'est ni l'accessoire, ni la conséquence ni encore le complément nécessaire des demandes formées en première instance.

Par conséquent, elle sera déclarée irrecevable.

IV. Sur la demande d'inopposabilité de clauses contractuelles pour déséquilibre significatif

La société Casal sport a maintenu en appel sa demande tendant à voir juger que la modification en 2014 des conditions générales portant sur les bordereaux de dépôt crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et demande que les articles 2.2, 11.1 et 17.1 des conditions générales de vente lui soient déclarées inopposables.

Elle soutient que ces dispositions créent, au sens de l'article L.442-6, I, 2° du code de commerce, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. Elle affirme que les dispositions critiquées ont pour effet de permettre à la société La Poste de jouer discrétionnairement sur le point de départ du délai contractuel d'acheminement. Elle ajoute que ces clauses ont pour effet de vider de sa substance l'engagement de respect des délais pris par la société La Poste et doivent en tout état de cause être réputées non écrites.

La société La Poste réplique que les stipulations critiquées qui permettent le recours aux éléments de flashage sont favorables au client et ne créent pas un déséquilibre à son détriment puisqu'ils permettent le traitement industriel d'une multitude de colis à un prix concurrentiel.

L'article L.442-6 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige dispose que :

« I.-Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :

(...)

2° De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;

III.-L'action est introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par toute personne justifiant d'un intérêt, par le ministère public, par le ministre chargé de l'économie ou par le président de l'Autorité de la concurrence lorsque ce dernier constate, à l'occasion des affaires qui relèvent de sa compétence, une pratique mentionnée au présent article.

Lors de cette action, le ministre chargé de l'économie et le ministère public peuvent demander à la juridiction saisie d'ordonner la cessation des pratiques mentionnées au présent article. Ils peuvent aussi, pour toutes ces pratiques, faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites et demander la répétition de l'indu. Ils peuvent également demander le prononcé d'une amende civile dont le montant ne peut être supérieur à 2 millions d' euros. Toutefois, cette amende peut être portée au triple du montant des sommes indûment versées. La réparation des préjudices subis peut également être demandée. Dans tous les cas, il appartient au prestataire de services, au producteur, au commerçant, à l'industriel ou à la personne immatriculée au répertoire des métiers qui se prétend libéré de justifier du fait qui a produit l'extinction de son obligation.

La juridiction peut ordonner la publication, la diffusion ou l'affichage de sa décision ou d'un extrait de celle-ci selon les modalités qu'elle précise. Elle peut également ordonner l'insertion de la décision ou de l'extrait de celle-ci dans le rapport établi sur les opérations de l'exercice par les gérants, le conseil d'administration ou le directoire de l'entreprise. Les frais sont supportés par la personne condamnée.

La juridiction peut ordonner l'exécution de sa décision sous astreinte.

Les litiges relatifs à l'application du présent article sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret. (') »

Si l'article L.442-6 I du code de commerce mentionne uniquement l'engagement de la responsabilité civile de l'auteur de la pratique, cette disposition spéciale n'interdit pas à la victime d'une pratique visée par ce texte de demander que la clause contraire à l'ordre public lui soit déclarée inopposable.

La caractérisation de la pratique prohibée par les dispositions susvisées suppose d'une part, de démontrer une tentative de soumission ou d'une soumission du partenaire commercial à une clause et d'autre part, d'établir que cette clause est constitutive de déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Tout d'abord, l'élément de soumission ou de tentative de soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration de l'absence de négociation effective ou l'usage de menaces ou de mesures de rétorsion visant à forcer l'acceptation impliquant cette absence de négociation effective.

En l'espèce, il est établi que les clauses litigieuses sont insérées dans les conditions générales de vente de la société La Poste et qu'elles sont quasiment identiques dans les contrats conclus par la société Casal sport en 2011 et 2012 et se retrouvent sans modification possible dans l'ensemble des contrats souscrits par des entreprises avec la société La Poste.

Dès lors, en l'absence de négociation effective desdites clauses, la première condition d'applicabilité du texte est remplie.

Ensuite, l'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif peut notamment se déduire d'une absence totale de réciprocité ou de contrepartie à une obligation, ou encore d'une disproportion importante entre les obligations respectives des parties.

Les clauses sont appréciées dans leur contexte, au regard de l'économie de la relation contractuelle.

Il appartient à la société qui se prétend victime d'apporter la preuve du déséquilibre qu'elle subit. Toutefois en présence d'une asymétrie créée par certaines clauses, il appartient au défendeur de prouver l'éventuel rééquilibrage par d'autres clauses du contrat.

Pour caractériser l'existence d'un déséquilibre significatif à son détriment dans les droits et obligations des parties, la société Casal sport se prévaut des articles 2.2, 11.1 et 17.1 des conditions générales de vente de la société La Poste qui imposent un système de flashage, purement interne et discrétionnaire primant sur les bordereaux de dépôt.

L'article 2.2 desdites conditions générales de vente est ainsi rédigé :

« 2.2 Délais de distribution

Pour connaître les délais de distribution et leur nature (indicatif ou garanti), le Client se reporte à la Fiche correspondante.

Ces délais courent à compter du lendemain du jour de prise en charge des colis par La Poste jusqu'au jour de leur distribution.

Le colis est pris en charge par La Poste à compter de l'enregistrement de la première saisie postale dans le système d'information de La Poste (flashage).

Le colis est réputé distribué :

- pour les envois à distribuer à domicile sans rendez-vous, dès sa première présentation à l'adresse indiquée par l'expéditeur ou à défaut dès sa première notification au destinataire pour les colis ne faisant pas l'objet d'une première présentation ;

- pour les envois à distribuer à domicile avec rendez-vous, dès sa première notification au destinataire ;

- pour les envois à distribuer hors domicile, dès sa première notification au destinataire.

Les différentes informations fournies par le système d'information de La Poste issues des flashages des colis par La Poste font foi.

(') ».

L'article 10 intitulé « Dépôt ' Collecte » stipule que :

« Il existe deux modalités de remise des envois dans le réseau postal. Le choix du Client est précisé dans les conditions particulières.

10.1 Principe : Dépôt

Le client dépose lui-même directement ses colis dans l'établissement postal indiqué dans les conditions particulières. Le dépôt est fait entièrement aux frais du client.

La Poste attire l'attention du client sur son fonctionnement industriel et par conséquent le caractère de traitement en masse des dépôts sur ses sites.

Le dépôt de colis ne donne pas systématiquement lieu à établissement d'un bordereau visé. Il est matérialisé par sa prise en charge qui s'effectue lors de l'enregistrement de la première saisie postale dans le système d'information de la Poste (flashage).

Toutefois, lorsque le nombre de colis déposé par jour via un ou plusieurs dépôts est inférieur à 50 colis cumulés/jour sur un même établissement postal, le client peut demander le visa par un agent de la Poste du bordereau de dépôt qu'il aura établi en 2 exemplaires et qui comporte la liste des numéros des colis déposés ce même jour.

Ce bordereau de dépôt visé vaut dans ces conditions reconnaissance de l'existence d'un dépôt ainsi que du nombre de colis, mais pas du détail de ce dépôt, notamment en ce qui concerne les caractéristiques propres à chacun des colis (poids, date de remise, non mécanisable, contre-remboursement, etc) - Celui-ci est régi par l'article 11 des présentes. »

L'article 11 relatif aux contrôles effectués par la société La Poste prévoit que :

« Contrôle du nombre d'envois par La Poste

La Poste procède au contrôle du nombre d'envois. Les résultats ainsi obtenus feront foi entre les Parties et serviront de base à la facturation.

11.1 Dispositions communes

Les Parties conviennent que, sous réserve et dans la limite des dispositions de l'article 10.1 en cas d'établissement d'un bordereau de dépôt visé, les informations issues du système d'information de La Poste et liées à la prise en charge, à l'acheminement, à la notification et à la distribution le cas échéant remontées par flashage des colis lors de leur prise en charge, acheminement, la notification et distribution font foi.

En aucun cas le visa du bordereau de dépôt tel que précisé ci-dessus à l'article 10.1 ne vaut validation des caractéristiques propres aux colis (poids, data de remise, non mécanisable,

contra-remboursement, etc.) déclaré par le Client, via l'annonce sous format électronique ou informatisé.

La Poste peut a posteriori, lors du contrôle des colis modifier ces données si elles s'avèrent inexactes ou incomplètes.

En toute hypothèse, les Parties conviennent que les modifications apportées par La Poste et intégrées dans le système d'information de La Poste font foi entre les Parties. »

L'article 17 stipule que :

« Article 17 - Responsabilité

17.1 Les différents cas de responsabilité de La Poste

La responsabilité de La Poste est engagée conformément au régime de responsabilité applicable aux prestataires de services postaux, défini par les articles 1382 et 1134 du code civil, L. 7 et L. 8 du code des Postes et communications électroniques.

Pour les colis de la gamme Colissimo Entreprise, qui font l'objet d'un suivi jusqu'à leur destination, les différentes informations fournies par le système d'information de La Poste issues des flashages des colis lors des différentes étapes d'acheminement (prise en charge, transport, notification au destinataire, le cas échéant, et distribution) font foi entre les Parties pour déterminer l'occurrence ou non d'un retard (en cas d'engagement de délai) ou d'une perte ou avarie. (') »

Il ressort des dispositions litigieuses que pour les dépôts de plus de 50 colis, pour lesquels il n'est plus prévu de bordereau, le système d'information de la société La Poste prévaut sur tout autre élément de preuve que son cocontractant pourrait vouloir apporter et qui pourrait contredire les informations qui y sont contenues alors même qu'en dépendent la mise en jeu de la responsabilité contractuelle de la société La Poste et l'indemnisation en résultant. En outre, les dispositions critiquées font dépendre le point de départ du délai d'acheminement d'un colis exclusivement de son enregistrement dans le système d'information de La Poste alors même que la société La Poste s'engage au respect de délais d'acheminement minimum.

Ces clauses créent donc au détriment de la société cocontractante de la société La Poste un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties sans que la société La Poste ne rapporte la preuve de la compensation de ce déséquilibre par d'autres clauses du contrat.

Il sera à cet égard relevé que le traitement à grande échelle de la distribution de colis et la maîtrise des coûts induits par un tel type de traitement ne peuvent justifier que le système d'information permettant un tel traitement puisse être seul retenu à titre de preuve.

De plus, si un tel système probatoire était admis, il en résulterait que celui sur lequel pèsent les obligations de résultat de ponctualité et de délivrance des colis contrôlerait seul le respect de ses propres obligations.

En conséquence, il convient de déclarer inopposables à la société Casal sport les clauses suivantes des articles 2.2, 11.1 et 17.1 des conditions générales de vente de la société La Poste :

Article 2.2 :

« Le colis est pris en charge par La Poste à compter de l'enregistrement de la première saisie postale dans le système d'information de La Poste (flashage). »

« Les différentes informations fournies par le système d'information de La Poste issues des flashages des colis par La Poste font foi. »

Article 11.1 :

« Les Parties conviennent que, sous réserve et dans la limite des dispositions de l'article 10.1 en cas d'établissement d'un bordereau de dépôt visé, les informations issues du système d'information de La Poste et liées à la prise en charge, à l'acheminement, à la notification et à la distribution le cas échéant remontées par flashage des colis lors de leur prise en charge, acheminement, la notification et distribution font foi. »

Article 17.1 :

« Pour les colis de la gamme Colissimo Entreprise, qui font l'objet d'un suivi jusqu'à leur destination, les différentes informations fournies par le système d'information de La Poste issues des flashages des colis lors des différentes étapes d'acheminement (prise en charge, transport, notification au destinataire, le cas échéant, et distribution) font foi entre les Parties pour déterminer l'occurrence ou non d'un retard (en cas d'engagement de délai) ou d'une perte ou avarie. »

V. Sur la responsabilité contractuelle

La société Casal sport revendique l'engagement de la responsabilité de la société La Poste, faute pour cette dernière d'avoir respecté ses engagements contractuels. Elle prétend ainsi que, sur la période du 23 avril 2012 au 31 décembre 2019, 15 887 retards, avaries ou pertes de colis ont fait l'objet de réclamations. Elle estime justifier des manquements invoqués par l'utilisation d'un fichier Excell (pièce n°20). Elle considère être fondée à rapporter la preuve de l'envoi des colis par le bordereau de dépôt qu'elle établit à chaque envoi. En conséquence, la société Casal sport demande le paiement de la clause pénale contenue dans le contrat pour un montant de 124.716,35 euros HT. La société Casal sport s'oppose à toute réduction de la clause pénale, faute pour la société intimée de rapporter la preuve d'une disproportion manifeste entre la demande en paiement au titre de la clause pénale et le préjudice subi. Elle observe que la société La Poste a elle-même fixé le montant de ladite clause dans ses conditions générales.

La société La Poste soutient que la société Casal sport ne rapporte pas la preuve des manquements contractuels allégués. Elle conteste tout d'abord le tableau fourni à ce titre par la société appelante en l'absence d'élément garantissant la fiabilité du système de prélèvement d'informations créé par la société Itinsell. Elle s'oppose à toute mesure d'expertise dès lors qu'une telle mesure ne saurait être destinée à suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve. En ce qui concerne les colis perdus, elle fait valoir que la société Casal sport demande une indemnisation pour la perte de colis qui ont été livrés. Elle conteste les demandes d'indemnisation formées au titre des demandes d'enquête alors qu'elle estime avoir répondu aux demandes d'explications de la société Casal sport. En ce qui concerne les colis en retard, elle estime qu'elle ne s'est engagée au respect d'aucun délai et que les délais indiqués au contrat sont seulement indicatifs. Elle ajoute qu'elle s'est engagée à une obligation de moyen pour respecter certains délais au titre d'une qualité de service à ses clients. Elle considère que la date à prendre en compte pour le point de départ du délai de livraison est le flashage des colis. Elle dénie toute force probante au bordereau de dépôt des colis dès lors que ce bordereau est établi par la société Casal sport de manière non contradictoire. En outre, elle se prévaut d'un constat d'huissier daté du 27 février 2014 qui démontre qu'une de ses clientes édite des bordereaux à une date donnée mais ne dépose en réalité les colis que plusieurs jours après. Elle ajoute que la date de fin du délai à prendre en compte pour le calcul des pénalités de retard doit être celle de la première présentation au destinataire conformément aux conditions générales de vente et non celle de la remise effective du colis au destinataire comme le fait la société Casal sport.

Elle dénie par ailleurs tout préjudice résultant des retards allégués.

A titre subsidiaire, elle revendique la réduction de la clause pénale en raison de la disproportion existant entre les sommes réclamées en application de cette clause et le préjudice effectivement subi par la société Casal sport.

Il appartient à celui qui se prévaut d'une inexécution contractuelle d'en rapporter la preuve.

En l'espèce, la société Casal sport se plaint de retards, d'avaries et de pertes de colis.

a. Sur les retards

Selon les conditions générales de la société La Poste, il convient de distinguer les retards pour lesquels la société La Poste s'est engagée au respect de délais impératifs et les retards pour lesquels la société La Poste s'est engagée au respect de délais indicatifs faisant l'objet d'une indemnisation au titre du service qualité dès lors que l'indemnisation desdits retards est différente.

Les parties s'opposent quant à la computation des délais de distribution et à leur preuve.

Sur les délais de distribution imparti à la société La Poste, l'article 2.2 des conditions générales de vente relatif au délais de distribution dispose que : « Pour connaître les délais de distribution et leur nature (indicatif ou garanti), le client se reporte à la fiche correspondante. Ces délais courent à compter du lendemain du jour de prise en charge des colis par La Poste jusqu'au jour de leur distribution. Le colis est pris en charge par La Poste à compter de l'enregistrement de la première saisie postale dans le système d'information de La Poste (flashage).

Le colis est réputé distribué :

- pour les envois à distribuer à domicile sans rendez-vous, dès sa première présentation à l'adresse indiquée par l'expéditeur ou à défaut dès sa première notification au destinataire pour les colis ne faisant pas l'objet d'une première présentation ;

- pour les envois à distribuer à domicile avec rendez-vous, dès sa première notification au destinataire ;

- pour les envois à distribuer hors domicile, dès sa première notification au destinataire. »

Selon les conditions générales de vente, il existe deux modalités de prise en charge des colis du client par la société La Poste : le dépôt directement dans l'établissement postal indiqué ou la collecte par la société La Poste chez le client.

Aux termes des conditions particulières la liant à la société La Poste, la société Casal sport a choisi la remise par collecte en vertu d'un contrat de collecte comme modalité de remise dans le réseau postal.

Ainsi qu'il a été énoncé ci-dessus, la clause des conditions générales de vente faisant débuter la prise en charge d'un colis par la société La Poste exclusivement à compter de l'enregistrement de la première saisie postale dans le système d'information de La Poste (flashage) est inopposable à la société Casal sport.

Il sera en outre relevé que la société Casal sport établit que le flashage des colis effectué par la société La Poste n'intervient pas au moment de la collecte des colis auprès de l'entreprise cocontractante de sorte qu'il peut se passer plusieurs jours entre la remise des colis par l'entreprise et leur flashage par la société La Poste.

En conséquence, le flashage des colis ne peut servir de seule référence pour rapporter la preuve de la remise du colis dans le réseau postal.

En revanche, la société Casal sport ne pouvant se constituer de preuve à elle-même ne peut prendre comme point de départ du délai de prise en charge de ses colis par la société La Poste la date du bordereau de dépôt, dès lors que ce bordereau n'a pas été contresigné soit par le transporteur de la société La Poste, soit par la société La Poste.

Il sera observé que la société Casal sport est à même de verser aux débats notamment les documents afférents à la remise des colis au transporteur affrété par la société La Poste ainsi que le contrat de collecte la liant à cette dernière.

Dans l'hypothèse où la société Casal sport ne produirait pas, au cours de l'expertise, de tels documents et ne justifierait pas que les colis au titre desquels elle se prévaut de retards ont été remis antérieurement à leur flashage par la société La Poste, il conviendra de retenir cette date de flashage par la société La Poste comme point de départ du délai de distribution dès lors qu'il s'agit de la seule date certaine de passage du colis entre les mains de la société La Poste.

Par ailleurs, en ce qui concerne l'achèvement du délai de livraison, la société Casal sport ne peut pas, contrairement à ce qui ressort des pièces versées aux débats et en violation des stipulations contractuelles, retenir la date de remise du colis à son destinataire alors que le colis a été mis en instance après une première présentation à l'adresse indiquée par l'expéditeur.

Enfin, aux termes de l'article 2.2 des conditions générales, il est indiqué que :

« Ces délais sont calculés :

- hors interdictions de circuler,

- rétention en douane,

- cas de force majeure, circonstances exceptionnelles.

De plus, les faits suivants sont non imputables ou indépendants de la volonté de La Poste notamment :

- la réexpédition des colis,

- tout fait imputable au Client, en particulier,

Toute non-conformité aux CGV, notamment

Celles donnant lieu à application d'un supplément au titre des articles 14.3.5, 14.3.6 et 14.3.8.

L'absence de mentions nécessaires à la distribution sur l'étiquette ou d'informations incomplètes, incohérentes ou erronées,

L'absence de transmission des données de contact du destinataire (adresse électronique ou numéro de téléphone portable ou à défaut numéro de téléphone fixe) ou de données incomplètes, incohérentes ou erronées,

Le non-respect des conditions d'éligibilité aux modes de livraison (notamment poids, dimension et emballage),

Le non-respect du cahier des charges étiquettes,

Ne permettant pas le calcul des délais de distribution dans les conditions susvisées.

Dans tous ces cas, le client ne bénéficiera pas du versement d'une quelconque somme pour dépassement du délai indicatif ou retard en cas d'engagement de délai.

Les délais de distribution des colis à livrer en boite postale et/ou pour lesquels le service optionnel AR du Colissimo Expert I a été souscrit et pour le retour de colis non distribuables ou refusés sont toujours plus longs que les délais indiqués sur la Fiche correspondante sans que cela ouvre droit ni à indemnisation, ni au versement d'une autre somme quelconque. »

La société La Poste se prévaut de l'existence de tels événements pour justifier du non-respect des délais de distribution qui lui étaient impartis. Toutefois il lui appartient d'en rapporter la preuve.

En l'espèce, les éléments produits aux débats de part et d'autre portant sur plusieurs centaines de colis ne permettent pas à la cour de statuer en l'état au regard du volume considérable des demandes.

Une mesure d'expertise s'avère nécessaire afin de vérifier le respect des règles ci-dessus posées et de déterminer, le cas échéant, et si besoin en procédant par sondage, le nombre ou le pourcentage de colis en retard au regard des règles ci-dessus posées et le nombre ou le pourcentage de ces colis relevant de tel ou tel taux d'indemnisation.

Il sera dès lors ordonné, avant dire droit sur la responsabilité de la société La Poste, une mesure d'expertise dans les termes précisés au dispositif du présent arrêt.

b. Sur les pertes et avaries

En matière de perte ou d'avarie, l'article 17.1.2 des conditions générales précise que :

« En cas de dommage justifié résultant de la perte, ou de l'avarie du colis avéré par la Poste, l'expéditeur peut bénéficier sur demande d'une indemnisation dont les modalités sont précisées ci-après, si la responsabilité de la Poste est établie, sauf faute de l'expéditeur ou du destinataire, vice propre du contenu de l'envoi, de son conditionnement ou de son emballage, ou en cas de force majeure ou de tout autre élément non imputable à La Poste.

(...)

Indemnisation standard

L'indemnité standard versée au client serait égale :

- Dans le cas d'un colis d'un poids inférieur ou égal à 1kg : à 23 euros par kilo, au prorata du poids réel du colis de la gamme Colissimo Entreprise étant entendu que seul le poids relevé par La Poste fait foi.

- Dans le cas d'un colis d'un poids strictement supérieur à 1kg : à la valeur du contenu du colis de la gamme Colissimo Entreprise telle qu'attestée par la facture d'achat ou d'inventaire de la marchandise transportée, dans la limite d'un montant calculé au prorata du poids réel du colis, sur la base de 23 euros par kilo et dans la limite de 690 ', étant entendu que seul le poids relevé par La Poste fait foi.

- En l'absence de document attestant de la valeur d'achat ou d'inventaire du contenu, le client pourra être indemnisé à hauteur de 70% de la valeur de vente du contenu telle qu'attestée par la facture commerciale de la vente de la marchandise transportée dans la limite d'un montant calculé au prorata du poids réel du colis, sur la base de 23 euros par kilo et dans la limite de 690 euros

En l'absence de ces documents, aucune indemnité ne pourra être versée ».

En l'espèce, il appartient à la société Casal sport de rapporter la preuve de la remise des colis à la société La Poste au titre des colis perdus ou encore de la détérioration des colis dont elle se prévaut.

Pour autant, les documents produits aux débats portant sur plusieurs centaines de colis ne permettent pas à la cour de statuer en l'état.

Il convient dans ces conditions d'ordonner, avant dire droit sur la responsabilité de la société La Poste, une mesure d'expertise dans les termes précisés au dispositif du présent arrêt.

VI. Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Il sera sursis à statuer sur ce chef de demande dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.

VII. Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de surseoir à statuer de ces chefs dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement entrepris ;

Déclare recevables les demandes d'indemnisation de la société Casal sport contenues dans l'assignation du 7 juillet 2014 et maintenues depuis, et relatives à des colis déposés entre le 7 juillet 2013 et le 31 décembre 2013 pour les envois relevant d'une prescription d'un an ;

Déclare irrecevables les autres demandes d'indemnisation de la société Casal sport ;

Déclare irrecevable la demande de la société Casal sport en nullité des articles 2.2, 11.1 et 17.1 des conditions générales de vente ;

Déclare inopposables à la société Casal sport les clauses suivantes des articles 2.2, 11.1 et 17.1 des conditions générales de vente de la société La Poste :

Article 2.2 :

« Le colis est pris en charge par La Poste à compter de l'enregistrement de la première saisie postale dans le système d'information de La Poste (flashage). »

« Les différentes informations fournies par le système d'information de La Poste issues des

flashages des colis par La Poste font foi. »

Article 11.1 :

« Les Parties conviennent que, sous réserve et dans la limite des dispositions de l'article 10.1 en cas d'établissement d'un bordereau de dépôt visé, les informations issues du système d'information de La Poste et liées à la prise en charge, à l'acheminement, à la notification et à la distribution le cas échéant remontées par flashage des colis lors de leur prise en charge, acheminement, la notification et distribution font foi. »

Article 17.1 :

« Pour les colis de la gamme Colissimo Entreprise, qui font l'objet d'un suivi jusqu'à leur destination, les différentes informations fournies par le système d'information de La Poste issues des flashages des colis lors des différentes étapes d'acheminement (prise en charge, transport, notification au destinataire, le cas échéant, et distribution) font foi entre les Parties pour déterminer l'occurrence ou non d'un retard (en cas d'engagement de délai) ou d'une perte ou avarie. »

Avant dire droit sur la demande tendant à l'engagement de la responsabilité contractuelle de la société La Poste, ordonne une mesure d'expertise :

Commet pour y procéder :

[L] [C]

[Adresse 2]

[Localité 5]

lequel pourra prendre l'initiative de recueillir l'avis d'un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne,

Et aura pour mission de :

- se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement

de sa mission et notamment se faire remettre par la société Casal sport :

* un fichier Excel recensant, par ordre d'envoi, les colis visés dans l'assignation 7 juillet 2014, pour lesquels elle formule une demande d'indemnisation maintenue depuis lors, et déposés entre le 7 juillet 2013 et le 31 décembre 2013 pour les envois relevant d'une prescription d'un an,

* un fichier Excel classant les mêmes colis par ordre d'envoi en différenciant, au sein d'onglets distincts, les colis faisant l'objet d'une demande d'indemnisation pour perte, les colis faisant l'objet d'une demande d'indemnisation pour avarie et les colis faisant l'objet d'une demande d'indemnisation pour retard ; chaque ligne correspondant à un colis devra mentionner, dans des colonnes séparées, le numéro de colis, le destinataire, la formule (colis So colissimo, colissimo Expert F, colissimo Access F, Colissimo Expert OM, Colissimo Expert I...), les frais d'envoi HT, dans l'onglet relatif aux colis faisant l'objet d'une demande d'indemnisation pour retard, la société Casal sport devra en outre indiquer, pour chaque colis, dans des colonnes séparées : 1/ la date de point de départ du délai de distribution qu'elle retient rattachée par un lien hypertexte aux justificatifs apportés, 2/ la date de flashage par la Poste, 3/ la date d'échéance du délai de distribution qu'elle retient en précisant s'il s'agit de sa première présentation à l'adresse indiquée par l'expéditeur ou s'il s'agit de la première notification au destinataire, 4/le nombre de jours de retard retenu (J+3, J+4, J+5 ou > J+5) et l'indemnisation réclamée ;

* dans les onglets relatifs aux colis faisant l'objet d'une demande d'indemnisation pour perte ou pour avarie, la société Casal sport devra en outre indiquer, pour chaque colis, dans des colonnes séparées : 1/ le poids du colis avec un lien hypertexte renvoyant aux justificatifs apportés sur la valeur du contenu du colis en cas de colis d'un poids supérieur à 1 kg, 2/ l'indemnisation réclamée avec un lien hypertexte renvoyant aux justificatifs apportés pour démontrer la perte ou l'avarie ;

* s'il est procédé par voie de sondage, sur la base des fichiers fournis par la société Casal sport, définir un échantillon représentatif et effectuer un premier sondage en vue de vérifier la conformité des données extraites aux prescriptions posées ci-dessus,

* puis définir un nouvel échantillon représentatif concernant les colis faisant l'objet d'une demande d'indemnisation pour retard, et déterminer sur cet échantillon, le pourcentage de colis à J+3, J+4, J+5 ou > J+5 étant précisé que J correspond à la date de flashage par la Poste sauf à la société Casal sport à rapporter la preuve d'une remise antérieure à ce flashage ;

- effectuer toutes observations utiles à sa mission ;

- fournir tout élément technique et de fait de nature à permettre à la cour de déterminer les responsabilités encourues et les préjudices invoqués par les parties et notamment quant à la fiabilité des systèmes de traçabilité utilisés et des données qui y sont enregistrées ;

DIT que pour procéder à sa mission l'expert devra :

- convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise ;

- à l'issue de la première réunion d'expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations ; l'actualiser ensuite dans le meilleur délai :

* en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations,

* en les informant de l'évolution de l'estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant des demandes de consignation complémentaire sur le fondement de l'article 280 du code de procédure civile,

* en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse,

- au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s'expliquera dans son rapport (par ex : réunion de synthèse, communication d'un projet de rapport), et y arrêter le calendrier impératif de la phase conclusive de ses opérations, compte tenu des délais octroyés devant rester raisonnables,

* en fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse,

* en rappelant aux parties, au visa de l'article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu'il n'est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà de ce délai ;

Fixe à la somme de 10.000 euros le montant de la provision à valoir sur les honoraires de l'expert que la société Casal sport devra consigner entre les mains du régisseur d'avances et de recettes de la cour d'appel de Paris, 34 quai des Orfèvres, 75055, Paris Cedex, au plus tard le 5 juin 2025 ;

Dit que faute de consignation de la présente provision initiale dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l'expert sera aussitôt caduque et de nul effet, sans autre formalité requise, conformément aux dispositions de l'article 271 du code de procédure civile ;

Dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu'il déposera l'original de son rapport au greffe de la cour avant le 15 janvier 2026, en un original et une copie, après en avoir envoyé un exemplaire à chaque partie, sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée ;

Dit que l'affaire reviendra à l'audience de la mise en état du 7 mai 2026 pour conclusions des parties à la suite du dépôt du rapport ;

Dit que la mesure sera suivie par Christine Soudry, magistrat chargé de contrôler l'exécution des mesures d'instruction, et, à défaut, par tout magistrat de la chambre désigné à cette fonction ;

Dit que l'expert devra adresser ses courriers au magistrat chargé du contrôle de l'exécution des mesures d'instruction de la chambre 5-5, 34 quai des Orfèvres, 75055 Paris Cedex 01, en mentionnant le numéro de répertoire général ;

Sursoit à statuer sur les autres demandes des parties et sur les dépens dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.

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