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Décisions

CA Bordeaux, 4e ch. com., 7 avril 2025, n° 23/01740

BORDEAUX

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Agendate (SASU)

Défendeur :

Wevii (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Franco

Conseillers :

Mme Masson, Mme Jarnevic

Avocats :

Me Janoueix, Me Lorcy, Me Firino Martell

T. com. Bordeaux, du 6 févr. 2023, n° 20…

6 février 2023

EXPOSE DU LITIGE

1 - La SASU Agendate est une entreprise de services numériques (ESN) plaçant du personnel qualifié auprès d'entreprises.

La SAS WEVII anciennement dénommée AFIB Services, spécialisée dans l'informatique, a conclu un contrat avec la société Agendate le 22 avril 2015, à durée indéterminée, complété par des avenants signés le 1er mars 2018 et le 1er août 2019 afin de favoriser, moyennant commission, des mises en relation entre la société WEVII et des sociétés intéressées.

Les parties sont entrées en désaccord quant à la révision du taux de commissionnement, la société Agendate refusant le taux proposé en octobre 2019 par la société WEVII.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 5 décembre 2019, la société WEVII a notifié à la société Agendate la résiliation du contrat pour faute grave, à effet immédiat, sans préavis ni indemnité au visa des articles L134-11 et L134-13 du code de commerce.

Par courrier du 30 janvier 2020, la société Agendate a pris acte de la rupture et a vainement mis en demeure la société WEVII d'établir un arrêté de compte comportant les affaires en cours et leur rémunération.

2 - Par acte du 19 février 2021, la société Agendate a assigné la société WEVII devant le tribunal de commerce de Bordeaux en paiement de commissions et pour la voir condamner à établir l'arrêté des comptes. L'affaire a été enrôlée sous le numéro RG 2021F00207.

Par jugement avant dire droit du 21 février 2022, le tribunal a ordonné à la société WEVII de produire le décompte de ses obligations contractuelles faisant référence au paiement des heures de deux salariés sous contrat pour la période couvrant le préavis, sous astreinte de 400 euros par jour dans la limite de 30 jours à compter de la signification du jugement, considérant que le contrat devait être qualifié de contrat d'apporteur d'affaires.

Le tribunal a sursis à statuer dans l'attente de la production du décompte.

Par requête du 21 février 2022, la société Agendate a sollicité du tribunal la 'rectification d'une omission de statuer' à propos du droit à commissions concernant la période postérieure à la fin du contrat. L'affaire a été enrôlée sous le numéro RG 2022F00413.

Par jugement du 26 juillet 2022, le tribunal a débouté la société Agendate de sa requête en rectification d'une omission de statuer et a pris acte que la société WEVII avait versé le décompte des heures, et a ordonné la réouverture des débats au 5 septembre 2022.

Par jugement du 6 février 2023, le tribunal de commerce de Bordeaux a :

- Ordonné la jonction des affaires enregistrées sous les numéros RG 2022F00413 et 2022F01446 ;

Au fond,

- Condamné la société WEVII SARL à payer à la société Agendate SASU la somme de 1'241,73 euros HT au titre du préavis contractuel d'un mois ;

- Condamné la société WEVII SARL à payer la somme de 2500 euros à la société Agendate SASU au titre de la rupture brutale du contrat ;

- Condamné la société WEVII SARL à payer à la société Agendate SASU la somme de 4000 euros au titre de la résistance abusive ;

- Débouté la société WEVII SARL de toutes ses demandes ;

- Condamné la société WEVII SARL à payer à la société Agendate SASU la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société WEVII SARL aux dépens.

Par déclaration au greffe du 7 avril 2023, la SASU Agendate a relevé appel du jugement énonçant les chefs expressément critiqués, intimant la SAS WEII.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

3 - Par dernières écritures notifiées par message électronique le 12 février 2025, la cour se réfère expressément, la société Agendate sollicite la révocation de l'ordonnance de clôture et demande à la cour de :

Vu les conclusions notifiées par la Société WEVII le 10 février 2025

- Révoquer l'ordonnance de clôture prononcée le 10 février 2025 et prononcer une nouvelle clôture au jour des plaidoiries

Vus les articles 1103 et s., 1193, 1226 et s. du code civil,

Vu l'article L134-1 du code de commerce,

Vu le contrat d'apporteur d'affaires, les moyens qui précèdent et les pièces versées aux débats,

- Déclarer la société AGENDATE recevable en l'ensemble de ses demandes. ;

- Débouter la société WEVII de son appel incident et de l'ensemble de ses demandes ;

- Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a limité la condamnation de la société WEVII à payer à la société AGENDATE la seule somme de 1241,73 euros HT au titre des commissions dues,

Statuant à nouveau :

- Condamner la société WEVII (anciennement AFIB SERVICES) :

à payer la somme de 8'049,90 euros HT correspondant aux arriérés de commissions depuis le 6 janvier 2020 compris jusqu'au 30 avril 2021 en ce qui concerne Mme [E], avec intérêt au taux légal depuis le première mise en demeure, avec les ajustements consécutifs aux évolutions salariales et tarif de vente ;

à payer la somme de 37'680,00 euros HT correspondant aux arriérés de commissions depuis le 6 janvier 2020 compris jusqu'au 31 janvier 2025 en ce qui concerne M. [J], avec intérêt au taux légal depuis le première mise en demeure, avec les ajustements consécutifs aux évolutions salariales et tarif de vente ;

à établir, sous astreinte de 400 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir, l'arrêté de compte conformément aux stipulations contractuelles ;

Le confirmer pour le surplus,

- Débouter la société WEVII (anciennement AFIB Services) de toutes ses demandes ;

- Condamner la société WEVII (anciennement AFIB Services) au paiement de la somme de 5000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

4 - Par dernières écritures notifiées par message électronique le 19 février 2025, auxquelles la cour se réfère expressément, la société WEVII sollicite la révocation de l'ordonnance de clôture et demande à la cour de :

Vu les articles 901 et 562 du code de procédure civile,

Vu les articles L134-1 et suivants du code de commerce,

Vu l'article 1231-1 du code civil,

Vu l'article 1353 du code civil,

Vu les articles 1210 et suivants du code civil,

- Faire droit à la demande de rebat de l'ordonnance de clôture au jour des plaidoiries ;

In limine litis :

- Déclarer irrecevable pour absence d'effet dévolutif les demandes présentées par

la société Agendate visant à ce que la société WEVII soit condamnée à remettre un arrêté de compte « conformément aux stipulations contractuelles » sous astreinte

de 400 euros par jour de retard ;

A titre principal :

- Réformer le jugement du 6 février 2023 en ce qu'il a condamné la société WEVII

à verser à la société Agendate la somme de 1'241,73 euros HT au titre de préavis

contractuel d'un mois ;

- Réformer le jugement du 6 février 2023 en ce qu'il a condamné la société WEVII

à verser à la société Agendate la somme de 2'500 euros au titre de rupture brutale du contrat ;

- Réformer le jugement du 6 février 2023 en ce qu'il a condamné la société WEVII

à verser à la société Agendate la somme de 4'000 euros au titre de résistance abusive ;

- Réformer le jugement du 6 février 2023 en ce qu'il a condamné la société WEVII

à verser à la société Agendate la somme de 3'000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

- Réformer le jugement du 6 février 2023 en ce qu'il a débouté la société WEVII de

ses demandes ;

Statuant à nouveau :

- Juger que les relations contractuelles doivent s'analyser comme étant un contrat

d'agent commercial et par conséquent, juger la société Agendate prescrite en toute demande indemnitaire ;

- Juger que la société Agendate a commis de fautes graves dans l'exécution du contrat ;

- Débouter la société Agendate de l'ensemble de ses demandes ;

- Condamner la société Agendate à verser à la société WEVII la somme de

10'000 euros pour concurrence déloyale ;

- Condamner la société Agendate à verser à la société WEVII la somme de 5'000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers

dépens de première instance ;

- Condamner la société Agendate à verser à la société WEVII la somme de 7'000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais

exposés en appel ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rabattue au jour des plaidoiries.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il est, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux derniers conclusions écrites déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande de la société Agendate tendant à la production d'un arrêté de compte sous astreinte

Moyens des parties

5 - La société Wevii soulève que la société Agendate n'est pas recevable à solliciter la production sous astreinte de 400 euros par jour de retard l'arrêté de comptes car l'acte d'appel était limité à certains chefs du jugement.

6 - La société Agendate réplique que l'effet dévolutif de l'appel saisit la cour de l'ensemble du litige et que la demande d'infirmation du jugement conduit à statuer sur les demandes écartées par le tribunal de commerce.

Réponse de la cour

7 - Aux termes de l'article 562 code de procédure civile :

'L'appel défère à la cour la connaissance des chefs du dispositif de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

Toutefois, la dévolution opère pour le tout lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement.'

8 - Dans son dispositif, le jugement du tribunal de commerce a reçu partiellement les demandes de la société Agendate mais ne l'a pas déboutée du surplus de ses de mandes.

La déclaration d'appel de la société Agendate indique : 'L'appel tend à l'annulation ou à défaut la réformation du jugement déféré à la cour en ce qu'il a limité la condamnation de la société Wevii au paiement à la société Agendate au titre du rappel de commission à la somme de 1241,73 HT au titre de la période de préavis contractuel d'un mois.'

Or dans ses prétentions de première instance figurait la demande de production de l'arrêté de compte sous astreinte.

La société Agenda critique le jugement en ce qu'il a limité la condamnation de la société Wevii au paiement des commissions pour la durée du préavis.

La demande de production de l'arrêté de compte est liée à la demande en paiement des commissions jusqu'à la fin du contrat des salariés concernés.

9 - Dès lors, la cour est bien saisie de la demande de la société Agendate, laquelle sera déclarée recevable.

Sur la prescription de l'action de la société Agendate

Moyens des parties

10 - La société Wevii fait valoir qu'en application de l'article L 134-12 du code de commerce, l'action de la société Agendate est prescrite, s'agissant d'un contrat d'agent commercial.

11 - La société Agendate soutient qu'il s'agit d'un contrat d'apporteur d'affaires et que son action n'est pas prescrite.

Réponse de la cour

12 - Aux termes de l'article L134-1 du code de commerce, dans sa version applicable au litige :

'L'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux. Il peut être une personne physique ou une personne morale.

Ne relèvent pas des dispositions du présent chapitre les agents dont la mission de représentation s'exerce dans le cadre d'activités économiques qui font l'objet, en ce qui concerne cette mission, de dispositions législatives particulières.'

Aux termes de l'article L134-12 du code de commerce :

'En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

L'agent commercial perd le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits.'

Il est constant en droit que l'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux.

La négociation résulte de deux éléments constitutifs : d'une part, la possibilité de modifier les clauses contractuelles initialement envisagées par le mandant et d'une part, la permanence de ce pouvoir.

13 - Le contrat conclu le 22 avril 2015 s'intitule 'contrat d'apporteur d'affaires'. Les deux avenants de 2018 et 2019 ont conservé cette dénomination. Toutefois, l'application d'un statut ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties dans le contrat ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions dans lesquelles l'activité est effectivement exercée.

L'objet du contrat est de 'définir les termes d'un accord d'apporteur d'affaire entre les deux parties signataires'.

Il est précisé à l'article 2 de l'avenant du 1er août 2019 que 'l'apporteur a pour unique mission d'exploiter son réseau de contacts afin de favoriser les mises en relation entre le donneur d'ordres et des sociétés intéressées par ses offres de service et ses produits'.

(...)

Le donneur d'ordres 'se réserve le droit de refuser les mises en relation de l'apporteur. Aucune commission ne sera due à l'apporteur au titre d'un apport refusé par le donneur d'ordres'.

L'article 5 indique que 'le donneur d'ordres disposera d'une liberté entière pour fixer les montants des produits, des services et des commandes, et pour accorder toute ristourne ou rabais qu'elle estimera opportun, sans que l'apporteur ne puisse, d'une manière quelconque, contester ses décisions.'

14 - S'agissant des modalités d'exécution concrètes du contrat litigieux, les échanges de mails entre les parties font ressortir que la société Agendate a fait profiter à la société Wevii de son carnet d'adresses et ne pouvait négocier les conditions de vente.

La mise à disposition d'une adresse mail au profit de la société Agendate ne suffit pas à établir la réalité d'un pouvoir de négociation.

La société Wevii ne rapporte pas la preuve, via la production d'actes passés, que la société Agendate pouvait modifier les stipulations contractuelles initialement prévues.

Il apparaît ainsi que le rôle de la société Agendate se limitait exclusivement à présenter à la société Wevii du personnel qualifié.

15 - Dès lors, il n'est pas établi par la société Wevii que la société Agendate ait eu un pouvoir effectif de négociation et ait agi au nom et pour le compte de son mandant et aurait disposé à cet effet du pouvoir de négocier les modalités du contrat.

En conséquence, le contrat litigieux est un contrat d'apporteur d'affaires et l'action de la société Agendate n'est pas prescrite.

Sur le montant du droit à commission de la société Agendate

- Sur l'existence de fautes graves

Moyens des parties

16 - La société Agendate fait valoir que la rémunération est due même si le contrat prend fin, au regard des stipulations contractuelles. Elle relève que son droit à commission est établi pour Mme [E] jusqu'en avril 2021 et pour M. [J] jusqu'au 31 janvier 2025. Elle ajoute que l'établissement de l'arrêté de compte pour chaque salarié est de nature à établir précisément le montant dû pour chacun d'eux.

17 - La société Wevii réplique que la société Agendate a commis des fautes graves justifiant une rupture sans préavis ni indemnité.

Réponse de la cour

- En vertu des dispositions de l'article 1103 du code civil :

'Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.'

En vertu des dispositions de l'article 1104 du code civil :

'Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

Cette disposition est d'ordre public.'

18 - Selon l'article 11 de l'avenant du 1er août 2019 'Arrêtés de comptes' : 'Aux termes du présent contrat, soit par expiration normale, soit par résiliation pour quelque cause que ce soit, les parties s'engagent à établir un arrêté des comptes qui sera signé pour accord des deux parties, étant précisé que ce document devra contenir toutes les affaires en cours traitées grâce à l'apport de l'apporteur et pour lesquelles il devra en conséquence être rémunéré jusqu'à la fin normale desdites affaires.'

L'article 5 relatif à la détermination de la durée des commissions précise que 'les différentes commissions indiquées seront calculées et dues jusqu'à la fin de la période de la proposition tant que la ou les prestations sont facturées au client final.'

L'article 10 prévoit que chaque partie peut mettre fin au contrat à tout moment sans avoir à justifier sa décision mais à condition de respecter un préavis de rupture d'un mois avant la cessation effective des relations contractuelles courant à compter de la réception de la notification de la résiliation adressée par courriel.

L'article 9 de l'avenant du 1er août 2019 prévoit une clause de confidentialité à la charge de l'apporteur pour les informations qui lui ont été communiquées par le donneur d'ordre dans le cadre de l'exécution du contrat.

19 - En l'espèce, la société Wevii a rompu le contrat par courrier en date du 5 décembre 2019 'avec effet immédiat, sans préavis ni indemnités'.

20 - La société Wevii soutient que la société Agendate a manqué à son obligation de loyauté en détournant un client pour son propre compte, en utilisant une adresse de messagerie électronique prêtant à confusion et en cherchant à recruter un salarié en poste au sein de la société Wevii.

Il ressort des pièces produites que M. [U], avant d'être le dirigeant de la société Agendate, a travaillé pour la société GFI Informatique. Dans ce cadre, il s'est trouvé en relation avec la société SQLI dès 2012 puis a signé des contrats avec la société SQLI dès 2014, au nom de sa propre société, la société Stsourcing faisant partie du groupe Agendate.

S'agissant des adresses de courriels utilisées par la société Agendate, la société Wevii ne démontre pas la réalité de la confusion prétendument opérée par la société Agendate entre son adresse propre et celle se terminant par @afib.fr, ni quelles ont été les incidences dans le cadre de leurs relations commerciales, en terme de concurrence déloyale.

S'agissant du recrutement de M. [P], la société Wevii produit un mail et une attestation de l'intéressé, qui s'avère être l'un de ses salariés. Par ailleurs, il n'est pas précisé à quelle date M. [U] lui aurait proposé un poste au sein de la société Stsourcing. Au regard du lien de subordination, cette pièce, non corroborée par d'autres éléments, n'est pas suffisamment probante.

Enfin, s'agissant de la baisse des relations commerciales entre les parties constatée en 2019, la société Wevii ne démontre pas qu'elle soit due à un manque d'investissement de la société Agendate.

21 - Dès lors, il n'est pas démontré que la société Agendate a manqué à ses obligations contractuelles. Ainsi, en l'absence de faute grave, le préavis d'un mois devait être respecté.

- Sur le calcul de l'indemnité

Moyens des parties

22 - La société Agendate sollicite le paiement de la commission jusqu'au terme du placement des salariés.

23 - La société Wevii soutient, au visa de l'article 1210 du code civil, que les engagements perpétuels sont prohibés et que les effets du contrat ne peuvent se poursuivre après la résiliation.

Réponse de la cour

24 - L'article 5 de l'avenant du 1er août 2019, relatif à la durée des commissions, prévoit que 'le paiement des commissions durera :

* tant que contrat entre Afib services et l'apporteur est maintenu ;

Et

* tant que les prestations concernées seront actives'.

L'article 11 relatif à l'arrêté de comptes indique que la société Wevii est tenue de payer une commission 'jusqu'à la fin normales desdites affaires'. L'expression doit s'entendre jusqu'à la fin du placement des salariés concernés.

L'article 11 reprend ainsi une des deux conditions cumulatives du paiement des commissions posées par l'article 5. Il convient ainsi que le contrat entre parties soit au premier chef maintenu pour que l'apporteur d'affaires puisse toucher des commissions.

Or en l'espèce, il a été résilié par la société Wevii le 5 décembre 2019.

25 - Dès lors, en application des stipulations contractuelles, la société Agendate est fondée à solliciter des commissions mais uniquement dans la limite du préavis, soit du 5 décembre 20189 au 5 janvier 2020.

La décision du tribunal de commerce sera donc confirmée de ce chef.

26 - Par suite, la demande de production de l'arrêté de comptes sous astreinte est sans objet.

Sur la rupture brutale du contrat

Moyens des parties

27 - La société Wevii relève que la société Agendate a commis des fautes graves dans le cadre de l'exécution du contrat, ce qui justifiait que la résiliation soit prononcée immédiatement. Elle évoque ainsi la concurrence opérée par la société Agendate, qui aurait profité des relations de la société Wevii pour signer directement des contrats avec la société SQLI. Elle indique également que la société Agendate a opéré une confusion entre l'adresse e-mail fournie en qualité d'agent commercial et l'adresse @stsourcing. Elle évoque enfin un tentative de recrutement de l'un de ses salariés.

28 - La société Agendate conteste toute fayute dans l'exécution du contrat. Elle indique qu'elle était en relation commerciale avec la société SQLI depuis 2012 et qu'aucune clause d'exclusivité ne la liait à la société Wevii. Elle souligne qu'elle n'a violé aucune clause de confidentialité. Elle fait avoir que l'utilisation des deux adresses mail ne crée aucune confusion. Elle observe que le courriel litigieux de M. [P] émane d'un salarié de la société Wevii. Elle explique enfin que les problèmes de santé du gérant de la société l'ont empêché de travailler normalement.

Réponse de la cour

29 - Aux termes de l'article 1217 du code civil, « La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :

- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;

- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;

- obtenir une réduction du prix ;

- provoquer la résolution du contrat ;

- demander réparation des conséquences de l'inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.».

30 - D'une part, il ressort des pièces versées au dossier que M. [U] était en relations d'affaires dès 2012 avec la société SQLI.

D'autre part, la société Wevii ne démontre pas la confusion qui résulterait de l'utilisation des deux adresses mails.

Enfin, M. [P] est salarié de la société Wevii : son courriel n'est pas probant compte tenu du lien de subordination, à défaut d'être corroboré par d'autres éléments.

Ainsi, la société Wevii échoue à démontrer que la société Agendate a commis des fautes graves dans l'exécution du contrat.

Or la société Wevii a résilié unilatéralement le contrat sans préavis ni indemnité après 4 ans de relations contractuelles, privant la société Agandate d'un courant d'affaires et de commissions potentielles.

31 - Le tribunal de commerce a alloué à la société Agendate la somme de 2 500 euros de dommages et intérêts. Sa décision sera confirmée de ce chef.

Sur la résistance abusive

Moyens des parties

32 - La société Wevii fait valoir que la société Agendate a toujours refusé les arrêtés de comptes qu'elle lui a présentés. Elle invoque le principe de l'estoppel, expliquant que la société Agendate se contredit en demandant un arrêté de comptes et en soutenant que les relations contractuelles ne sont pas terminées.

33 - La société Agendate réplique qu'elle était en relation commerciale avec la société SQLI depuis 2012 et qu'aucune clause d'exclusivité ne la liait à al société Wevii. Elle souligne que

Réponse de la cour

34 - Aux termes de l'article 1240 du code civil, « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

La résistance abusive désigne un comportement du débiteur tendant à refuser avec persistance à exécuter son obligation. Elle ne se traduit pas par une simple résistance. Il en résulte que l'octroi de dommages-intérêts sur le fondement de la résistance abusive et injustifiée suppose que soient caractérisés l'existence d'un abus dans l'exercice du droit de résister ainsi que d'un préjudice subi en conséquence de cet abus.

35 - En l'espèce, il ressort des pièces versées au dossier et des échanges entre les parties que M. [U] a sollicité à plusieurs reprises un arrêté de comptes. Le tribunal de commerce, par jugement avant-dire-droit du 21 février 2022, a ordonné à la société Wevii la production d'un décompte des heures des deux salariés concernés.

Toutefois, la société Agendate ne justifie pas d'un préjudice.

36 - Le tribunal de commerce a alloué la somme de 4 000 euros de dommages et intérêts. Sa décision sera infirmée de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts au titre de la concurrence déloyale

Moyens des parties

37 - L'intimée indique que la société Agendate a profité des relations de la société Wevii pour son propre intérêt et qu'elle a tenté de débaucher des salariés.

38 - La société Agendate réplique qu'elle n'a commis aucune faute.

Réponse de la cour

39 - L'article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

40 - Aucune faute dans l'exécution du contrat n'a été retenue à l'encontre de la société Agendate.

La société Wevii ne démontre pas la réalité des actes de non-concurrence et des agissements parasitaires qu'elle allègue. Sa demande de dommages et intérêts est dès lors mal fondée. La décision du tribunal de commerce sera confirmée de ce chef.

Sur les demandes accessoires

41 - Chacune des parties conservera ses dépens d'appel et il n'y pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,

Révoque l'ordonne de clôture,

Dit qu'elle sera fixée au jour des plaidoiries,

Dit que la demande de la société Agendate tendant à la production d'un arrêté de compte sous astreinte est recevable,

Dit que l'action en paiement de la société Agendate est non prescrite,

Infirme le jugement du tribunal de commerce du 6 février 2023 en ce qu'il a condamné la société Wevii à payer à la société Agendate la somme de 4 000 euros au titre de la résistance abusive,

Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Rejette la demande de la société Agendate au titre de la résistance abusive,

Rejette le surplus des demandes de la société Agendate,

Rejette le surplus des demandes de la société Wevii,

Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu à statuer au titre des frais irrépétibles.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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