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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 2 avril 2025, n° 23/08547

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Manufacture de Produits d'Hygiène (SAS)

Défendeur :

Logistique Et Diffusion 'Logedif' (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Brun-Lallemand

Conseillers :

Mme Depelley, M. Richaud

Avocats :

Me Guerre, Me Montfort, Me Moisan, Me Bayle

T. com. Paris, du 24 avr. 2023, n° 20210…

24 avril 2023

FAITS ET PROCEDURE

La société Manufacture de produits d'hygiène (ci-après "la société MPH") a pour activité la fabrication de produits d'hygiène et d'articles de nettoyage.

La société Logistique et diffusion (ci-après "la société Logedif") était une plateforme logistique spécialisée dans l'achat et la distribution de produits d'entretien consommés dans les stations-services du réseau Total exploitées par la société Argedis. Par acte du 25 avril 2024, la société Logedif a été dissoute par anticipation avec transmission universelle de son patrimoine à son associé unique la société Argedis par application des dispositions de l'article 1844-5 alinéa 3 du code civil.

Depuis 2000, la société MPH était l'un des fournisseurs de la société Logedif pour ses besoins en papier d'essuyage, bobines et autres articles d'hygiène.

En 2014, la société Total Marketing Services a été mandatée par la société Argedis, agissant elle-même pour le compte de sa filiale Logedif pour lancer un appel d'offres relatif à la fourniture de produits et accessoires de nettoyage et d'entretien répartis en 4 lots, sacs poubelles (lot 1), papier hygiénique -bobines à dévidage central (lot 2), petits matériels de nettoyage (lot3) et produits d'entretien (lot4).

La société MPH a remporté l'appel d'offres du lot n°2.

Les sociétés MPH et Logedif ont signé un contrat de référencement le 25 janvier 2015, portant sur la fourniture de papier hygiénique et de bobines à dévidoir central pour une durée de 3 ans à effet du 1er avril 2015et jusqu'au 31 mars 2018, sans prorogation tacite ou renouvellement par tacite reconduction. Il était précisé à l'article 7.1 que " Le Fournisseur est par ailleurs parfaitement informé de ce que Logedif, au terme du contrat et de ses éventuelles prorogations, choisira son ou ses futurs fournisseurs référencés par voie d'appel d'offres. "

Par avenant du 2 mai 2018, les parties ont prolongé de deux années le contrat, soit jusqu'au 31 mars 2020.

Le 22 juillet 2019, la société MPH a été informée par la société Total Marketing France de l'organisation d'un nouvel appel d'offres relatif aux produits d'entretien pour les stations-services de la société Argedis pour la mise en place d'un contrat à compter du 1er avril 2020.

La société MPH a répondu à cet appel d'offres. Le 25 février 2020, elle était informée que son offre n'avait pas été retenue.

Par lettre du 20 mars 2020, la société Logedif a confirmé à la société MPH qu'elle n'était pas retenue pour l'appel d'offres et que le contrat prenait fin à son échéance au 31 mars 2020. Elle précisait toutefois que suite à leurs derniers échanges, elle acceptait de maintenir ses achats dans la limite de " ses besoins en papiers et gants " jusqu'au 30 septembre 2020.

Suite à de nouveaux échanges entre les parties, la société Logedif a proposé à la société MPH par lettre du 22 avril 2020 un avenant de prorogation du contrat pour une durée de 10 mois pour la période allant du 1er avril 2020 au 31 janvier 2021.

Par lettre du 27 avril 2020, la société MPH a refusé cette proposition considérant qu'elle devait pouvoir bénéficier d'un préavis de 18 mois au regard de l'ancienneté de leur relation commerciale établie, soit jusqu'au 26 septembre 2021.

Par lettre du 3 mai 2020, la société Logedif a rappelé que depuis de nombreuses années il était systématiquement procédé par voie d'appel d'offres pour choisir ses fournisseurs. Elle a pris acte du refus de la société MPH de proroger son contrat pour une durée supplémentaire de 10 mois, ce refus ayant pour conséquence de mettre un terme définitif à leurs relations commerciales à compter de la date de réception du courrier de cette dernière du 27 avril 2020.

Par lettre du 14 mai 2020 de son conseil, s'estimant victime d'une rupture brutale de la relation commerciale, la société MPH a mis en demeure la société Logedif soit de reprendre immédiatement les relations commerciales, ou, à défaut, de lui verser une indemnité d'un montant de 479.434 euros et de racheter les stocks dédiés.

Le 28 mai 2020, la société Logedif a contesté la présentation des faits et l'analyse juridique faites par le conseil de la société MPH.

En application du contrat signé le 25 janvier 2015, la société MPH a saisi le Centre de médiation et d'arbitrage de la chambre de commerce et d'industrie de Paris. Le 12 juillet 2021, le médiateur désigné constatait l'échec de la médiation.

C'est dans ces circonstances que, par acte d'huissier du 24 novembre 2021, la société MPH a assigné la société Logedif devant le tribunal de commerce de Paris pour obtenir réparation de la rupture brutale de la relation commerciale.

Par jugement du 24 avril 2023, le tribunal de commerce Paris a :

- Dit que la SARL à associé unique Logistique Et Diffusion "Logedif" n'a pas engagé sa responsabilité dans la rupture de ses relations avec la SAS Manufacture De Produits D'hygiène, au sens de l'article L 442-1- Il du code de commerce,

- Débouté la SAS Manufacture De Produits D'hygiène de sa demande d'indemnisation formée à l'encontre de la SARL à associé unique Logistique Et Diffusion " Logedif "' en paiement de la somme de 497 665 ' à titre de dommages et intérêts ;

- Condamné la SAS Manufacture De Produits D'hygiène à payer à la SARL à associé unique Logistique Et Diffusion " Logedif " la somme de 4 000 ', au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

- Condamné la SAS Manufacture De Produits d'hygiène aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 70,86 ' dont 11,60 ' de TVA.

La société MPH a interjeté appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la Cour le 9 mai 2023, intimant la société Logistique et Diffusion "Logedif".

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées par la voie électronique le 31 janvier 2025, la société MPH demande à la Cour de :

Vu l'article L. 442-1 du Code de commerce,

Vu l'article 1231-1 du Code civil,

Vu la jurisprudence citée

Vu les pièces produites,

Infirmer le jugement du 24 avril 2023 en ce qu'il a :

- "Dit que la SARL à associé unique Logistique Et Diffusion " Logedif" n'a pas engagé sa responsabilité dans la rupture de ses relations avec la SAS Manufacture De Produits D'hygiène, au sens de l'article L. 442-1-II du code de commerce,

- Déboute la SAS Manufacture De Produits D'hygiène de sa demande d'indemnisation formée à l'encontre de la SARL à associé unique Logistique Et Diffusion " Logedif " en paiement de la somme de 497 665 ' à titre de dommages et intérêts ;

- Condamne la SAS Manufacture De Produits D'hygiène à payer à la SARL à associé unique Logistique Et Diffusion "Logedif" la somme de 4 000 ', au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

- Condamne la SAS Manufacture De Produits D'hygiène aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 70,86 ' dont 11,60 ' de TVA."

Et statuant à nouveau,

Déclarer recevables et bien fondée les demandes, fins, conclusions et moyens de MP Hygiène ;

Rejeter les demandes, fins, moyens et conclusions de Logedif ;

Juger que le préavis aurait dû être de 18 mois minimum - soit jusqu'au 26 septembre 2021 et, qu'en conséquence la société MP Hygiène a été privée de 17 mois de préavis ;

Condamner la société Logedif à verser à la société MP Hygiène 497.665 ' de dommages et intérêts au titre de la rupture brutale de ses relations commerciales établies ;

Condamner Logedif aux entiers dépens de l'instance ainsi qu'à verser à la société MP Hygiène la somme de 25.0000 ' au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées par la voie électronique le 6 février 2025, la société Argedis demande à la Cour de :

Vu les articles 15, 16 et 803 du code de procédure civile,

Vu l'article 1844-5 du code civil,

Vu l'article L 442-1 du code de commerce,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces produites,

A titre liminaire, il est demandé à la Cour de :

Révoquer l'ordonnance de clôture et admettre aux débats les présentes conclusions récapitulatives de la société Argedis ou à défaut rejeter des débats les conclusions de la MPH signifiées le 31 janvier ;

Il est demandé à la cour d'appel de Paris de :

1°) Recevoir la société Argedis venant aux droits de la société Logedif dissoute par anticipation avec transmission universelle de son patrimoine en son intervention volontaire et ses demandes et l'y déclarant bien fondée,

2°) Confirmer la décision entreprise,

En conséquence,

Débouter la société MPH de toutes ses demandes à l'égard de la société Logedif,

Y ajoutant,

Condamner la société MPH à payer à la société Argedis la somme de 10.000 ' au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

L'ordonnance de clôture rendue le 5 février 2025 a été révoquée et une nouvelle clôture a été prononcée par ordonnance du 25 février 2025.

***

La Cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

I- Sur l'intervention volontaire de la société Argedis

La société Argedis justifie (pièce n°20) que par acte du 25 avril 2024, la société Logedif a été dissoute sans liquidation avec transmission universelle de son patrimoine à son associé unique la société Argedis par application des dispositions de l'article 1844-5 alinéa 3 du code civil.

Il convient dès lors de déclarer recevable l'intervention volontaire de la société Argedis venant aux droits de la société Logistique et Diffusion " Logedif ".

II- Sur la rupture de la relation commerciale

L'article L.442-1 II du code de commerce dispose qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l'absence d'un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels.

- Sur le caractère établi de la relation

Exposé des moyens

A l'appui de son appel, la société MPH expose que la relation commerciale entre les parties a été stable, habituelle et sans interruption depuis 2000 et suivants des volumes substantiels et croissants. Elle indique que l'appel d'offres décidé par la société Logedif en 2015 a été un événement isolé qu'elle a remporté en sa qualité de fournisseur historique. Elle précise que l'absence de récurrence de la procédure d'appel d'offres a été confirmée par la signature entre les parties d'un avenant, sans procédure préalable d'appel d'offres, ayant pour objet la prorogation du contrat signé en 2015 sans mention d'une éventuelle future mise en concurrence et qui n'est pas de nature à remettre en cause le caractère établi de la relation. Selon elle, l'organisation de deux appels d'offres en 20 ans de relation n'est pas de nature à remettre en cause le caractère établi de la relation commerciale nouée entre les parties depuis 20 ans. Elle estime légitime d'avoir cru en la pérennité de ces relations compte tenu de leur durée, de leur poursuite au-delà du terme contractuellement fixé, de la signature d'un avenant sans procédure préalable d'appel d'offres et de l'absence de mention à un prochain appel d'offres dans cet avenant.

En réponse, la société Argedis conteste la qualification de relation commerciale établie entre les parties au sens des dispositions de l'article L.442-1 du code de commerce selon une jurisprudence constante retenant que le recours à un appel d'offres et par voie de conséquence à une mise en concurrence prive la relation commerciale de tout caractère établi. Elle expose que le contrat de référencement signé entre les parties le 25 février 2025 manifestait clairement, notamment à l'article 7.1, la volonté de la société Logedif de ne pas s'engager durablement, en écartant toute reconduction tacite du contrat, le choix de son futur fournisseur devant systématiquement faire l'objet d'un appel d'offres. De plus, selon elle, la décision de la société MPH de participer à l'appel d'offres lancé en juillet 2019, d'être à nouveau mise en concurrence et de signer éventuellement un nouveau contrat étaient autant de circonstances qui prouvent le caractère précaire de la relation. Elle ajoute que la signature de l'avenant avait essentiellement pour objet de proroger le contrat de référencement de deux années supplémentaires sans autre modification de l'article 7-1 du contrat avec lequel il formait un tout.

Réponse de la Cour

La relation commerciale, pour être établie au sens des dispositions susvisées, doit présenter un caractère suivi, stable et habituel. Le critère de la stabilité s'entend de la stabilité prévisible, de sorte que la victime de la rupture devait pouvoir raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaires avec son partenaire commercial.

En effet, pour être qualifiée d'établie au sens de l'article L.442-1 du code de commerce, une relation commerciale doit faire naître, dans l'esprit des parties, une croyance légitime en sa poursuite (en ce sens Com., 18 mai 2010, pourvoi n° 08-21.681, Bull. 2010, IV, n° 89 ; Com., 27 mars 2019, pourvoi n° 17-18.047). Aussi le recours systématique à un appel d'offres est exclusif de toute relation stable, dès lors qu'un concurrent soumis à la même demande peut être choisi et, qu'au lieu de stabiliser les relations commerciales, un tel mécanisme en consacre au contraire la précarité (en ce sens Com., 18 octobre 2017, pourvoi n° 16-15.138 ; Com., 7 décembre 2022, pourvoi n° 21-15.649 ; Com., 11 janvier 2023, pourvoi n° 21-18.299).

En l'espèce, il n'est pas sérieusement contesté par la société Argedis venant aux droits de la société Logedif qu'une relation commerciale s'est nouée entre cette dernière et la société MPH à compter de l'année 2000 ayant généré le volume d'affaires suivant :

- 2000 : 43 377 '

- 2001 : 158 836 '

- 2002 : 158 272 '

- 2003 : 106 745 '

- 2004 : 70 899 '

- 2005 : 71 632 '

- 2006 : 60 610 '

- 2007 : 53 585 '

- 2008 : 92 652 '

- 2009 : 88 008 '

- 2010 : 66 344 '

- 2011 : 7 514 '

- 2012 : 8 010 '

- 2013 : 8 168 '

- 2014 : 8 351 '

- 2015 : 524 518 '

- 2016 : 587 080 '

- 2017 613 593 '

- 2018 : 754 564 '

- 2019 : 735 661 '

- 2020 : 217 041 '

- 2021 : 0 '

La Cour observe que le flux d'affaires entre les parties a généré pour la société MPH un chiffre d'affaires annuel moyen de 88 269 euros entre 2000 et 2010, puis a significativement baissé entre 2011 et 2014 pour ne générer qu'un chiffre d'affaires annuel moyen de 8010,75 euros pour la société MPH. Ensuite, à compter de la signature du contrat de référencement, le flux d'affaires a substantiellement augmenté pour générer au profit de la société MPH un chiffre d'affaires annuel moyen de 484 014 euros.

La Cour observe par ailleurs que le chiffre d'affaires global de la société MPH était le suivant pour les années précédant la rupture de la relation commerciale :

- 2019 : 100 M'

- 2020 : 194 M'

- 2021 : 137 M'

Au moment de la rupture de la relation commerciale, le flux d'affaires avec la société Logedif représentait moins de 1% du chiffre d'affaires global de la société MPH.

Il est donc constant qu'avant 2015, le flux d'affaires entre les parties a été variable pour générer un chiffre d'affaires de 158 272 euros en 2002, puis 60 610 euros en 2006, 92 652 euros en 2008, puis un chiffre d'affaires ne dépassant pas 10 000 euros pendant quatre années de 2011 à 2014. Ce n'est qu'à compter de la signature du contrat de référencement que la relation commerciale entre les parties a représenté un volume substantiel générant un chiffre d'affaires de 524 518 euros à 735 661 euros pour la société MPH.

Or, il est expressément indiqué au préambule du contrat de référencement signé entre les parties le 25 février 2015 que celui-ci fait suite à un appel d'offres dans le cadre duquel la société MPH a été consultée et a remis le 2 décembre 2014 une offre concernant le lot n°2- Papier hygiénique -Bobines à dévidage central- et qui a été retenue.

En outre l'article 7.1de ce contrat intitulé " Durée " stipule clairement que :

"Le contrat est conclu pour une durée déterminée de trois (3) années et prend effet à compter du 1er avril 2015 pour se terminer le 31 mars 2018, date à laquelle il prendra fin automatiquement et sans formalité.

Le contrat ne pourra en aucun cas faire l'objet d'une prorogation tacite ou d'un renouvellement par tacite reconduction.

Le Fournisseur est par ailleurs parfaitement informé de ce que Logedif, au terme du contrat et de ses éventuelles prorogations, choisira son ou ses futurs fournisseurs référencés par voie d'appel d'offres."

Le 2 mai 2018, les sociétés Logedif et MPH ont signé un avenant n°1 au contrat de fourniture de papier hygiénique et bobines à dévidoir central. Au préambule de cet avenant, il est indiqué qu'avant l'échéance du contrat de fourniture, les parties se sont rapprochées et ont convenu la signature de l'avenant ayant notamment pour objet de modifier l'article 7 Durée-Résiliation du Contrat comme suit :

"La durée du Contrat est prolongée de deux (2) années, soit jusqu'au 31 mars 2020.

Il n'y aura pas de tacite reconduction au-delà de cette date.".

Et l'article 7 de l'avenant précisant que " Les autres stipulations du Contrat, non modifiées par l'Avenant n°1, sont expressément maintenues. Le Contrat ainsi que l'Avenant forment un tout indivisible qui lie les Parties. "

Par courriel du 22 juillet 2019, soit huit mois avant l'échéance du contrat au 31 mars 2020, la société MPH a été informée que la société Total Marketing France s'apprêtait à lancer un appel d'offres relatif aux produits d'entretien pour ses stations-services Argedis et ce avec l'indication du calendrier suivant (pièce MPH 9.1) :

- Lancement de l'Appel d'offres : semaine 31

- Restitution de l'offre : lundi 14 octobre 2019 à 12 heures

- Soutenances : du 28 au 31 novembre 2019

- Choix final fournisseur : février-mars 2020

- Contrat - mise en place : 1er avril 2020

Ainsi, la société MPH a été invitée, en même temps que d'autres entreprises, à répondre à l'appel d'offres (pièces MPH n°9.2 à 9.4) le 31 juillet 2019. Le 14 octobre 2019, la société MPH a déposé son offre. L'analyse des offres a conduit la société Logedif à organiser trois tours de sélection pour le choix de son fournisseur (pièce Argedis n°9). Au cours du mois de février 2020 la société MPH a été informée que sa dernière offre du 3 février 2020 n'avait pas été retenue, confirmée ensuite par lettre de la société Logedif du 20 mars 2020 rappelant l'échéance du contrat au 31 mars 2020.

De l'ensemble, il ressort que la relation commerciale nouée entre les parties pour un volume d'affaires significatif à partir de 2015 résultait d'une mise en concurrence à laquelle la société MPH a participé en répondant à l'appel d'offres de 2014. Puis à l'échéance du contrat de référencement prorogé jusqu'au 31 mars 2020, la société MPH a de nouveau été mise en concurrence par une nouvelle procédure d'appel d'offres à laquelle la société MPH a participé, et ce conformément aux stipulations du contrat signé le 25 février 2015 aux termes duquel la société Logedif a clairement fait connaître son intention de recourir systématiquement à une procédure d'appel d'offres pour choisir son fournisseur au terme du contrat et de ses éventuels prorogations (article 7.1). L'avenant qui n'avait que pour objet de proroger la durée du contrat n'a pas modifié les autres stipulations de l'article 7.1. Aussi, la procédure d'appel d'offres introduite en 2014 et qui a permis une augmentation substantielle du volume d'affaires a modifié la nature de la relation entre les parties à compter de 2015 en la rendant précaire, introduisant dans cette relation un aléa résultant de la mise en concurrence qui ne permettait pas à la société MPH d'avoir une croyance légitime dans sa pérennité. Il s'ensuit qu'au moment de la rupture, la relation commerciale entretenue entre les parties n'était pas établie au sens des dispositions de l'article L.442-1 du code de commerce.

Dans ces conditions, c'est sans engager sa responsabilité sur le fondement de l'article L.442-1 du code de commerce, que la société Logedif aux droits de laquelle vient la société Argedis, a pu mettre fin à la relation d'affaires en avril 2020 dès lors que la société MPH n'avait pas été retenue à la suite de l'appel d'offres notifié en juillet 2019.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité de la société Logedif dans la rupture de ses relations avec la société MPH au sens de l'article L.442-1 II du code de commerce et a débouté la société MPH de sa demande de 497 665 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale.

III- Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société MPH aux dépens de première instance et à payer à la société Logedif la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société MPH, succombant en son appel, sera condamnée aux dépens d'appel.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, la société MPH sera déboutée de sa demande et condamnée à verser à la société Argedis venant aux droits de la société Logedif, la somme de 10 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Déclare recevable l'intervention volontaire de la société Argedis venant aux droits de la société Logistique et Diffusion "Logedif" ;

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la Cour ;

Et y ajoutant,

Condamne la société Manufacture de Produits d'Hygiène aux entiers dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Manufacture de Produits d'Hygiène et la condamne à payer à la société Argedis la somme de 10 000 euros

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