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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 2 avril 2025, n° 24/10233

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Webasto Roof & Components SE (Sté)

Défendeur :

Société de peinture de pièces plastiques (SAS), IP3 Vendée (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Brun-Lallemand

Conseillers :

Mme Depelley, M. Richaud

Avocats :

Me Moisan, Me Paetzold, Me Betoulle, Me Jarry, Me Regnier, Me Bado

T. com. Rennes, du 9 avr. 2024, n° 2022R…

9 avril 2024

FAIT ET PROCÉDURE

La société Webasto, société de droit allemand, est un équipementier automobile qui, notamment, développe et produit des systèmes de toiture pour les véhicules.

La société IP3 Vendée fabrique, principalement, des pièces et sous-ensembles par injection plastiques pour tous les secteurs d'activité, mais essentiellement pour le secteur automobile.

La société S.P.P.P., a pour activité la décoration et le revêtement de pièces plastiques et composites.

Depuis 2007, la société Webasto confie à la société IP3 Vendée la fabrication de pièces de série.

A compter du 13 décembre 2018, à la suite d'un appel d'offres remporté par la société IP3 Vendée, la société Webasto lui a donné à fabriquer en série une pièce dite " V1 " (du " projet LR 460/461 ") destinée à faire partie d'un système de toiture pour le constructeur Jaguar Land Rover dans le cadre d'une production de plusieurs véhicules de ce constructeur.

La société IP3 Vendée a, par la suite, confié la peinture de la pièce V1 à la société S.P.P.P.

Le bon de commande de l'outillage émis par Webasto le 23 aout 2019 précise, outre les caractéristiques du produit, les quantités de pièces à produire par année de production (le total s'élevant à 4 308 480 pièces et 1 768 852 couvercles de galerie de toit pour 8 ans), et mentionne : "toutes les capacités ci-dessus DOIVENT être livrées en 15 quarts de travail sur 5 jours conformément au contrat. Les heures supplémentaires et les équipes de week-end ne sont pas autorisées pour livrer le volume ci-dessus".

Le bon de commande du 4 novembre 2020 contient les mêmes indications, ainsi que les "prix pièces" au 10 septembre 2020, 10 septembre 2021, 10 août 2022 et 10 août 2023 (prix respectivement de 200, 5 euros/100 pièces puis 192, 48 ; 184, 78 et 177, 39 euros/ 100 pièces).

Ultérieurement, les sociétés Webasto et IPS3 Vendée ont conclu un contrat-cadre, prenant effet au 8 mars 2021 et pour une durée de 5 ans (article 5).

Par mail du 10 septembre 2021, soit cinq mois après, la société Webasto a informé la société IP3 Vendée que la pièce ne nécessitait plus d'être peinte et qu'un autre fournisseur (localisé en Grande-Bretagne) plus favorable en termes de prix (en raison d'une réduction des coûts logistiques) avait été retenu pour en assurer la production.

Le 19 octobre 2021, elle lui a envoyé une lettre confirmant cette " mauvaise nouvelle " due à la " fin de vie de la galerie de toit peinte L. 46/L461, suite à une demande client et un changement de la pièce " (dénommée désormais " V2 ").

La société IP3 Vendée a, par voie de conséquence, mis un terme à son contrat de sous-traitance avec la société S.P.P.P.

Le 5 novembre 2021, la société S.P.P.P., a, par courrier d'avocat adressé à la société IP3 Vendée, sollicité une indemnisation de son préjudice causé par la rupture brutale de leur relation commerciale.

Par courrier du 4 janvier 2022, la société IP3 Vendée a demandé à la société Webasto de prendre en charge le préjudice invoqué par la société S.P.P.P. à hauteur de 349 489 euros et de l'indemniser de ses propres préjudices liés au non-respect de ses engagements à hauteur de 1 491 456,12 euros.

Par courriel du 20 janvier 2022, la société Webasto a contesté la pertinence de l'ensemble des demandes.

C'est dans ces circonstances que, par acte d'huissier du 11 mai 2022, la société S.P.P.P. a assigné la société IP3 Vendée devant le juge des référés du tribunal de commerce de Rennes, au visa de l'article L. 442-1 du code de commerce, afin qu'elle soit à titre principal condamnée à lui payer par provision la somme de 103 673, 15 euros correspondant au préjudice lié à la rupture brutale des relations commerciales établies.

Par exploit du 3 août 2022, la société IP3 Vendée a assigné la société Webasto en garantie ainsi qu'en demande de dommages et intérêts au titre de ses manquements contractuels et subsidiairement au titre de la rupture brutale de leur relation commerciale établie.

Les deux dossiers ont fait l'objet d'une jonction le 4 octobre 2022.

Par jugement du 5 octobre 2022, le tribunal de commerce de La-Roche-sur-Yon a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société IP3 Vendée puis, par jugement du 6 décembre 2023, il a désigné la SELARL AJIRE, prise en la personne de Me [K] [V], en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de cette société.

Par ordonnance du 4 mai 2023 rendue au visa de l'article 873 du code de procédure civile, le juge des référés du tribunal de commerce de Rennes s'est déclaré incompétent et a enjoint les parties à se présenter à l'audience au fond du 22 juin 2023.

Par jugement du 9 avril 2024, le tribunal de commerce de Rennes a :

- Jugé la société S.P.P.P. recevable et bien fondée dans sa demande ;

- Jugé le tribunal de commerce de Rennes compétent pour connaître du litige opposant la société IP3 Vendée à la société Webasto et du litige opposant la société S.P.P.P. à la société Webasto ;

- Débouté la société Webasto de l'ensemble de ses demandes formulées à titre subsidiaire ;

- Renvoyé les parties afin de conclure sur le fond.

Il a considéré qu' 'il était de bonne justice que le responsable (de la rupture brutale de la relation commerciale) soit attrait à la cause par le défendeur, la société IP3" et que "la société S.P.P.P n'ayant aucun contrat avec la société Webasto et restant premier demandeur, il serait inéquitable que la société Webasto l'oblige à ce que l'affaire dont il est le demandeur soit traitée par la juridiction de Munich".

La société Webasto a interjeté appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la Cour le 11 juin 2024.

Par ordonnance du 3 septembre 2024 la Cour a autorisé la société Webasto à assigner à jour fixe les sociétés IP3 Vendée, AJIRE et S.P.P.P pour l'audience du 8 janvier 2025.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées par la voie électronique le 7 janvier 2025, la société Webasto demande à la Cour de :

Vu le règlement UE n° 1215/2012,

Vu la jurisprudence citée,

Vu le contrat-cadre,

Infirmer le jugement en date du 9 avril 2024 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

- Déclarer le tribunal de commerce de Rennes incompétent au profit des tribunaux de Munich (Allemagne) pour statuer sur les demandes formées par la société IP3 Vendée à l'encontre de la société Webasto :

. fondées sur une prétendue inexécution contractuelle ;

. fondées sur une prétendue rupture brutale de relations commerciales établies ;

. d'avoir à la garantir des éventuelles condamnations qui pourraient être ordonnées à l'encontre d'IP3 Vendée au titre de la prétendue rupture brutale des relations commerciales établies, ainsi que réclamées par S.P.P.P. :

- Déclarer le tribunal de commerce de Rennes incompétent au profit des tribunaux de Birmingham (Royaume-Uni) pour statuer sur les demandes de la société S.P.P.P. à l'encontre de la société Webasto ;

- Débouter les intimées de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;

- Condamner les sociétés IP3 Vendée et S.P.P.P. chacune au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la société Webasto, ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées par la voie électronique le 6 janvier 2025, les sociétés IP3 Vendée et AJIRE demandent à la Cour de :

Vu l'article 873-1 du code de procédure civile,

Vu l'article 73 du code de procédure civile,

Vu le Règlement Bruxelles 1 bis,

Vu l'article 367 du code de procédure civile,

Déclarer la société Webasto mal fondée en son appel ;

L'en débouter,

Déclarer la société IP3 Vendée recevable et bien fondée en son appel incident ;

Y faisant droit ;

A titre principal,

- Constater que l'exception d'incompétence avait déjà été jugée par le juge des référés du tribunal de commerce de Rennes, qui suivant ordonnance du 4 mai 2023 déclarait le tribunal de commerce de Rennes compétent, et lui confiait l'affaire par le jeu de la " passerelle ", décision à l'encontre de laquelle la société Webasto n'a pas interjeté appel ;

- Par conséquent, infirmer le jugement dont appel, et statuant à nouveau,

- Juger que la société Webasto était irrecevable à soulever une exception d'incompétence devant le tribunal de commerce de Rennes, n'ayant pas interjeté appel de l'ordonnance de référé du 4 mai 2023 et qu'elle est donc mal fondée en son appel ;

A titre subsidiaire,

- Confirmer le jugement dont appel, qui a retenu que le tribunal de commerce de Rennes était compétent pour statuer sur le litige opposant la société IP3 à la société Webasto et du litige opposant la société S.P.P.P. à la société Webasto ;

- Par conséquent, débouter la société Webasto de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire encore,

- Constater que la société Webasto produit en cause d'appel une traduction assermentée de la seule clause attributive de juridiction dont elle se prévaut pour soulever l'incompétence du tribunal de commerce de Paris ;

- Juger que la clause litigieuse est symétrique au profit de la société Webasto et manifestement imprécise ;

- Déclarer nulle et de nul effet la clause attributive de juridiction asymétrique car contraire à l'article 25 du règlement Bruxelles I bis ;

- Par conséquent, confirmer le jugement dont appel, qui a retenu que le tribunal de commerce de Rennes était compétent pour statuer sur le litige opposant la société IP3 à la société Webasto et du litige opposant la société S.P.P.P à la société Webasto ;

A titre infiniment subsidiaire,

- Surseoir à statuer le temps de connaitre les réponses qu'apportera la Cour de Justice de l'Union européenne sur les questions préjudicielles sur les clauses attributive de juridiction asymétriques qui lui ont été posées par la Cour de cassation suivant arrêts Duy 13/03/2024, n°22-24.034 et n°22-12.965, la Cour d'appel n'ayant la faculté de la prononcer d'office ;

En tout état de cause sur les frais irrépétibles,

- Condamner la société Webasto à payer à la société IP3 Vendée de la somme de 7 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la société Webasto aux entiers dépens, ce compris le timbre fiscal de 250 euros.

Aux termes de ses conclusions, déposées et notifiées par la voie électronique le 7 janvier 2025, la société S.P.P.P demande à la Cour de :

Vu les articles 74 et 75 du code de procédure civile,

Vu les articles 4 et 7-1-b du Règlement 125/2015,

Vu l'article 4-1 du Règlement 593/2008,

- Déclarer la société Webasto irrecevable en son exception d'incompétence et infirmer le jugement en ce sens ;

- à défaut, confirmer le jugement du tribunal de commerce de Rennes en ce qu'il a retenu sa compétence pour connaitre du litige opposant la société IP3 Vendée à la société Webasto et du litige opposant la société S.P.P.P à la société Webasto ;

- Condamner la société Websto et tout succombant à verser à la société S.P.P.P la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

- Condamner la société Webasto au paiement des entiers dépens.

La Cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

*

* *

MOTIVATION

- Sur la recevabilité de l'exception d'incompétence

Moyens des parties

Les sociétés IP3 Vendée et AJIRE font valoir, au visa des articles 79 et 873-1 du code de procédure civile, que la société Webasto est irrecevable à soulever une énième fois l'incompétence du juge français, cette dernière n'ayant pas fait appel de l'ordonnance rendue par le juge des référés de sorte que sa décision est désormais revêtue de l'autorité de la chose jugée.

Elles ajoutent, sur le fondement des articles 73 et 74 du code de procédure civile, que la société Webasto n'a pas soulevé l'exception d'incompétence in limine litis puisque l'instance au fond n'est pas nouvelle, mais la poursuite de celle initiée devant le juge des référés, lequel a fait usage de la passerelle de l'article 873-1 du code de procédure civile (le n° d'inscription au répertoire général ayant au demeurant été conservé).

La société Webasto répond que l'article 79 du code de procédure civile ne s'applique que dans les cas où pour déterminer sa compétence, le juge doit obligatoirement statuer sur une question de fond. Elle ajoute qu'une ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée.

Elle soutient, ensuite, avoir soulevé dans ses conclusions, in limine litis, l'incompétence territoriale du président du tribunal de commerce de Rennes au profit des tribunaux de Munich en Allemagne. Elle ajoute, citant deux décisions de la Cour de cassation en ce sens, qu'il est admis que la compétence de la juridiction saisie au fond puisse être contestée, bien que le défendeur se soit abstenu de soulever l'incompétence du juge des référés, jurisprudence qui vaut également selon elle en cas de passerelle.

La société S.P.P.P estime que faute pour Webesto d'avoir concentré ses exceptions dès ses premières écritures, elle n'est ainsi plus recevable à saisir le tribunal de commerce d'une nouvelle exception d'incompétence territoriale. L'usage de la procédure dite de la passerelle ne peut remettre en cause les actes de procédure régularisés en amont, le juge du fond étant saisi des écritures des parties telles qu'elles ont été initialement notifiées devant le juge des référés.

Réponse de la Cour

En application de l'article 873-1 de code de procédure civile, le président saisi en référé peut, à la demande de l'une des parties et si l'urgence le justifie, renvoyer l'affaire à une audience dont il fixe la date pour qu'il soit statué au fond.

L'alinéa 1 de l'article 488 du code de procédure civile dispose que les ordonnance de référé n'ont pas, au principal, l'autorité de chose jugée. Ainsi, le juge du fond ne saurait considérer comme définitive la solution donnée par l'ordonnance et en admettre l'autorité.

Le moyen consistant à contester la compétence internationale des juridictions françaises constitue une exception de procédure entrant dans les prévisions de l'article 74 du code de procédure, et non une fin de non-recevoir, de sorte que cette exception doit, à peine d'irrecevabilité, être soulevée in limine litis (en ce sens Cass. 1ere Civ, 23 mai 2012, n°11-26.188).

Il est établi qu'au cas présent, la société Webasto a dans ses premières conclusions devant le juge des référés, le 28 février 2003, soutenu que le juge français ne pouvait connaitre de la demande (pièce n°18, p. 5, partie " in limine litis, sur la compétence territoriale " entendant démontrer que tout litige entre IP3 Vendée et Webasto relève de la compétence des tribunaux de Munich en Allemagne).

Le premier moyen d'irrecevabilité soulevé, tenant à la nature d'exception de procédure de la contestation de la compétence des juridictions françaises, ne peut donc être accueilli.

Le juge des référés de Rennes a, dans le jugement du 4 mai 2023, déclaré le tribunal de commerce de Rennes compétent pour juger du litige et, au visa de l'article 873-1 du code de procédure civile, opté pour la procédure dite de la passerelle, puis le juge du fond, qui n'était pas lié par le dispositif de de la décision du juge des référés, a à son tour, dans la décision frappée du présent appel, retenu sa compétence après discussion.

Il s'ensuit que le second moyen d'irrecevabilité soulevé, tiré de l'autorité de la chose jugée alléguée de la décision du juge des référés, méconnait le caractère provisoire de cette décision, et n'est pas fondé.

L'exception d'incompétence est donc recevable.

- Sur l'exception d'incompétence soulevée

Moyens des parties

La société Webasto fait valoir qu'en présence de plusieurs demandes distinctes et de natures différentes, lorsqu'une partie soulève une exception d'incompétence, il incombe au juge d'étudier chaque demande séparément et que par voie de conséquences, même si les demandes sont connexes ou liées d'une quelconque manière, la juridiction saisie peut se déclarer compétente ou non sur certaines demandes uniquement (CJCE., 27 sept. 1988, aff. 189/87 [O] [B] c/ Banque Schröder).

S'agissant des demandes de la société IP3 Vendée en responsabilité contractuelle, elle affirme, sur le fondement de l'article 25 § 1 du règlement Bruxelles I Bis, que les tribunaux allemands sont exclusivement compétents en vertu de la clause attributive de juridiction stipulée à l'article 9 du contrat-cadre conclu par les parties en mars 2021. Elle fait, en outre, valoir qu'en matière internationale, la connexité ne peut faire échec à une clause attributive de juridiction et que l'article 25 du règlement Bruxelles I Bis prime l'article 8 § 1 de ce même règlement (Cass. Civ. 1ère, 13 déc. 2017, n° 16-22.412 et dans le même sens : Cass. Civ. 1ère, 14 mars 2018, n° 16-28.302). Elle ajoute qu'il en va de même de la jonction, qui est, selon elle, sans incidence sur la compétence exclusive des juridictions allemandes (CA Paris. Ch. 5-16, 16 févr. 2024, RG N° 23/07436).

S'agissant des demandes en garantie, elle rappelle que la jurisprudence française écarte, pour les litiges d'ordre international, l'application de l'article 333 du code de procédure civile. Elle se prévaut, également, des deux clauses attributives de juridiction stipulées dans les conditions générales de vente et dans le contrat-cadre, respectivement aux articles 9 et 24.3. Elle estime que la rédaction de ces clauses est assez large pour s'appliquer à la demande en garantie de la société IP3 Vendée puisqu'elle est directement liée au contrat-cadre et à sa rupture.

S'agissant des demandes fondées sur la rupture brutale des relations commerciales établies, elle allègue qu'il est constant qu'elles relèvent, au sens de règlement Bruxelles I Bis, de la matière contractuelle et non délictuelle (CJUE., 14 juill. 2016, Granarolo C-196/15) et qu'il convient, par voie de conséquences de faire application, là encore, de l'article 25 du règlement Bruxelles I Bis.

S'agissant de l'action directe de la société S.P.P.P. à son encontre, la société Webasto soutient que conformément à la jurisprudence de la Cour de justice qui considère que des actions en responsabilité civile de nature délictuelle en droit national doivent être considérées comme relevant de la matière contractuelle si le comportement reproché peut être considéré comme un manquement aux obligations contractuelles (CJUE., 13 mars 2014, aff. C-548/12 [H] [N]), l'action dirigée par la société S.P.P.P. relève nécessairement de la matière contractuelle puisqu'elle repose sur un prétendu manquement à ses obligations contractuelles envers la société IP3 Vendée et/ou une rupture brutale de ses relations commerciales. Elle en déduit qu'en vertu de l'article 7 du règlement Bruxelles I Bis qui prévoit qu'en matière contractuelle, une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite dans un autre Etat membre devant la juridiction du lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande, en l'espèce l'obligation prise par elle à l'égard d'IP3 Vendée concernant la fabrication de la pièce V1, découlant de leur contrat et le lieu d'exécution, pour la vente de marchandises est le lieu où elles ont été ou auraient dû être livrées, à savoir, le Royaume-Uni.

Les sociétés IP3 Vendée et AJIRE soutiennent en réponse, sur le fondement de la jurisprudence dite Boot'shop du 15 décembre 2011 (pourvoi n° 10-17.691) confirmée par l'arrêt société sucrerie de Bois rouge rendu par la Cour de cassation en assemblée plénière le 13 janvier 2020 (pourvoi n° 17-19.963) selon laquelle un tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage, que peu importe le fondement de son action à l'encontre de la société Webasto puisque le dommage causé au tiers, à savoir la société S.P.P.P. est extra contractuel. Elles ajoutent qu'en raison de la relation tripartie qui existe entre les parties, la faute de la société Webasto à son égard a occasionné un préjudice à la société S.P.P.P. à laquelle il est impossible d'opposer une clause attributive de compétence qu'elle n'a pas acceptée. Elles en déduisent que les conséquences des fautes commises par Webasto à l'encontre de la société S.P.P.P. ne peuvent être appréciées sans que les fautes commises à son égard ne soient préalablement examinées et qu'ainsi, la connexité entre ces deux affaires est telle que l'une ne peut être examinée sans l'autre.

Elles contestent, par ailleurs, la traduction des clauses attributives de juridiction du contrat-cadre produit par la société Webasto et sollicitent son rejet.

Selon elles, il s'agit d'une clause attributive de juridiction unilatérale ou asymétrique, contraignante que pour une seule partie puisque la société Webasto a le choix de la saisine de tel ou tel tribunal (soit du lieu de son siège social soit de celui du siège du "fournisseur"), alors qu'IP3, le fournisseur, n'a pas ce choix. Or, plusieurs critères de validité d'une telle clause feraient défaut, notamment la précision et l'équilibre ainsi que les conditions de prévisibilité et de sécurité juridique. Elles estiment cette clause particulièrement imprécise et en cela contraire à l'article 25 du règlement Bruxelles I bis.

Subsidiairement encore, elles sollicitent un sursis à statuer en l'attente d'une décision de la CJUE en réponse à trois questions préjudicielles posées par la Cour de cassation concernant les clauses attributives de juridiction asymétriques.

La société S.P.P.P, qui sollicite la confirmation de la décision attaquée, fait valoir, tout d'abord, que la juridiction doit être recherchée sur le fondement du Règlement Bruxelles 1 bis n°1215/2012, étant entendu que les travaux de production et de peinture ont été confiés par la société Webasto à IP3, société de droit français, qui en a sous-traité la réalisation à la S.P.P.P, société de droit français, l'une et l'autre devant procéder aux travaux de production dans ses entrepôts situés en France. Elle en déduit qu'il y a lieu d'appliquer l'article 7-1-b qui dispose qu'une personne domiciliée sur un Etat membre peut être attraite devant la juridiction de l'Etat membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis.

Elle se réfère ensuite aux arrêts de la Cour de cassation Bootshot du 6 octobre 2006 et PIP du 25 mai 2023 selon lesquels l'effet relatif des contrats n'interdit pas aux tiers d'invoquer la situation de fait créée par les conventions auxquelles ils n'ont pas été partie, dès lors que cette situation leur cause un préjudice de nature à fonder une action en responsabilité délictuelle.

Réponse de la Cour

Il ressort des débats que la Cour est saisie :

- d'une demande de réparation de la rupture brutale des relations commerciales établies entre S.P.P.P et IP3 Vendée en raison de la non-poursuite de la prestation de peinture de la pièce V1 confiée en sous-traitance (demande originaire) ;

- d'une demande formée par IP3 Vendée à l'encontre de Webasto contre toutes les condamnations qui pourraient être ordonnées à son encontre au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies entre S.P.P.P et IP3 Vendée (demande en garantie) ;

- d'une demande d'IP3 Vendée fondée sur l'inexécution contractuelle de Webasto (demande complémentaire formulée à l'occasion de l'appel en garantie) ;

- de demandes de la société S.P.P.P a formulé à l'encontre de la société Webasto tendant à la voir condamnée au titre du préjudice par elle subi en raison de la rupture des engagements contractuels de Webasto à l'égard de IP3 Vendée et de la rupture brutale des relations commerciales établies entre Webasto et IP3 Vendée (demandes formulées suite à l'appel en garantie).

La détermination du juge compétent doit être appréciée pour chacune de ces demandes.

- S'agissant de la demande originaire en réparation de la rupture brutale des relations commerciales établies entre S. P.P.P et IP3 Vendée

Le tribunal de commerce de Rennes a été saisi initialement, le 11 mai 2022, d'une demande de réparation de la rupture brutale des relations commerciales établies entre S.P.P.P et IP3 Vendée en raison de la non-poursuite de la prestation de peinture de la pièce V1 qui lui avait été confiée en sous-traitance.

Ce tribunal a été saisi en application :

- de l'article 46 du code de procédure civile qui dispose que le demandeur peut, notamment, saisir la juridiction du lieu où demeure le défendeur ;

- l'article 43 du code de procédure civile, selon lequel ce lieu s'entend, s'il s'agit d'une personne morale, du lieu où celle-ci est établie, soit celui de son siège social ;

- des articles L. 442-4, III et D.442-3 du code de commerce et de l'annexe 4-2-1 du même code relatifs aux juridictions spécialisées en matière de pratiques restrictives de concurrence.

Dans ces circonstances, la demande introductive d'instance a donc au cas présent, de manière fondée, été formée par S.P.P.P. devant le tribunal de commerce de Rennes, juridiction compétente en considération du lieu du siège social du défendeur, la société IP3 Vendée, sis à Herbiers (85).

- S'agissant de la demande en garantie formée par IP3 Vendée à l'encontre de Webasto

Le tribunal de commerce de Rennes a postérieurement, le 3 aout 2022, suite à assignation en garantie, été saisi d'une demande formée par la société IP3 Vendée à l'encontre de Webasto visant à la garantir contre toutes les condamnations qui pourraient être ordonnées à son encontre au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies entre S.P.P.P et IP3 Vendée.

Cette action en garantie revêt un caractère européen pour opposer une société de droit français à une société de droit allemand. Il relève, comme tel, des dispositions du Règlement (UE) n° 1215/2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, dit Bruxelles I bis.

L'article 8, 2) de ce règlement dispose qu'une personne domiciliée sur le territoire d'un État membre peut être attraite, s'il s'agit d'une demande en garantie ou d'une demande en intervention, devant la juridiction saisie de la demande originaire, à moins qu'elle n'ait été formée que pour traduire celui qui a été appelé hors du ressort de la juridiction compétente.

L'action en garantie est l'action intentée contre un tiers par le défendeur en vue d'être tenu indemne des conséquences de ce procès (CJUE, 26 mai 2005, C-77/04, point 28), étant relevé que l'existence d'un lien entre les deux demandes en cause au principal est inhérente à la notion même de demande en garantie (même arrêt, point 30).

Il s'en infère qu'au cas présent la compétence, s'agissant de la demande en garantie formée, de la juridiction de Rennes saisie de la demande originaire en rupture brutale des relations commerciales établies, ne peut être écartée que s'il y a détournement de for, qu'il appartient au défendeur d'établir.

Webasto se prévaut de deux clauses attribuant compétence aux juridictions allemandes contenues d'une part dans les conditions générales d'achat du groupe Webesto de juillet 2020 (pièce Webasto n°6), d'autre part dans le contrat-cadre fournisseur de Webasto signé par IP3 Vendée le 10 mars 2021 (pièce Webasto n°3), et qui sont formulées tant l'une que l'autre dans les termes suivants : " Webasto and the supplier submit to the exclusive juridiction of the courts at le seat of business of the Webasto entity placing the order for any disputes arising in connection with a delivery agreement "(traduction libre : " Webasto et le fournisseur conviennent que la juridiction pour tous les litiges liés à un contrat de fourniture sera déterminée exclusivement par le lieu du siège social de l'entitée Webasto qui passe la commande "), lequel lieu est, au regard des pièces versées aux débats, Stockdorf, sis dans le ressort des juridictions de Munich.

Cependant, il doit être constaté que :

- s'agissant des conditions générales d'achat de Webesto, elles entrent en contradiction avec les conditions générales de vente d'IP3 Vendée reproduites au verso des factures de cette société (lesquelles sont produites par Webesto sous le n°10), qui contiennent la clause suivante : "CONTESTATIONS - Tout litige, quelle qu'en soit la nature ou la cause, sera soumis à la juridiction des tribunaux compétents du lieu de notre siège social. Les acceptations, traites, mandats, n'apportent ni novation, ni dérogation à cette clause attributive de juridiction.

Toutes clauses précisées dans les lettres ou bon de commande de nos clients, et contraire aux clauses ci-dessus ne peuvent nous être imputées si elles n'ont fait l'objet d'un accord préalable par écrit de notre part." ;

- s'agissant du contrat-cadre fournisseur, il n'a pris effet que le 8 mars 2021 et ne contient aucune disposition prévoyant une application rétroactive d'une de ses clauses ;

- ce contrat-cadre fournisseur porte exclusivement sur " les conditions de production, de l'approvisionnement, de la livraison, de la performance et/ou de l'achat de produits (') dans le but de produire des produits Webasto "(l'article 1er faisant référence, s'agissant du périmètre du contrat, aux "commandes, appels d'offre et acceptation des articles livrables"). Il s'en déduit que le champ des différents nés et à naître sur lequel les parties se sont accordées pour désigner la juridiction du lieu du siège social de l'entité Webasto passant commande ne comprend pas l'ensemble des litiges susceptibles de naitre et notamment les éventuelles actions en garantie.

Il n'est donc pas démontré, dans ces circonstances, que la demande en garantie formulée par IP3 Vendée ne l'a été que pour attraire le défendeur en garantie hors de la juridiction qui aurait dû être saisie sur le fondement des clauses attribuant compétence aux juridictions de Munich, dont dépend l'entitée Webasto qui passe la commande relève.

Cette demande a donc été régulièrement formée devant le tribunal de commerce de Rennes, juridiction saisie de la demande originaire.

- S'agissant de la demande d'IP3 Vendée fondée sur l'inexécution contractuelle de Webasto

L'assignation en intervention et en garantie que la société IP3 Vendée a fait délivrer le 3 août 2022 à la société Webasto (pièce Webesto n°13) vise aussi :

- à faire constater que la société Webasto s'étant engagée à son égard pour une durée de 8 ans, d'une part, et pour une quantité de pièces totale s'élevant 4 308 480, d'autre part, par commandes de Webasto sis à [Localité 11] intervenues les 23 aout 2019 et 4 novembre 2020 (pièces IP3 Vendée n°6 et 8 décrites dans l'exposé des faits) et à solliciter en réparation du préjudice causé par l'inexécution contractuelle alléguée la somme de 7 764 328, 21 euros,

- à titre subsidiaire, à faire condamner Webasto sur le fondement de la rupture brutale des relations commerciales établies.

La CJUE a énoncé, dans l'arrêt du 14 juillet 2016, C-196/15 Granarolo, qu'une action en rupture brutale de relations commerciales établies était de nature contractuelle lorsqu'est démontrée l'existence d'une relation contractuelle tacite entre les parties. Cette solution a été reprise par la Cour de cassation, à l'occasion d'un litige entre une société française et une société belge pour lequel le Règlement (UE) n°1215/2012 du 12 décembre 2012 précité était applicable (Com., 20 septembre 2017, n°16-14.812).

En l'espèce, il ressort que la société Webasto et la société IP3 Vendée ont entretenu depuis 2019 un flux d'affaires important, reposant sur des bons de commandes, des conditions générales et un contrat-cadre, en sorte que l'action indemnitaire fondée sur la rupture brutale de la relation commerciale relève bien de la matière contractuelle au sens des dispositions précitées, lesquelles doivent être interprétées de manière autonome.

La demande d'IP3 Vendée relève donc, en toute ses branches, de cette matière.

L'article 7, 1) du Règlement (UE) n°1215/2012 du 12 décembre 2012 précité dispose qu'une personne domiciliée sur le territoire d'un État membre peut être attraite dans un autre État membre en matière contractuelle devant la juridiction du lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande.

Aux fins de l'application de la présente disposition, et sauf convention contraire, le lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande est :

- pour la vente de marchandises, le lieu d'un État membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées,

- pour la fourniture de services, le lieu d'un État membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis ;

étant entendu que les contrats dont l'objet est la livraison de marchandises à fabriquer ou à produire, y compris lorsque l'acheteur a formulé certaines exigences concernant l'obtention, la transformation et la livraison des marchandises, sans que les matériaux aient été fournis par celui-ci, et que le fournisseur est responsable de la qualité et de la conformité au contrat de la marchandise, doivent être qualifiés de "vente de marchandises'(CJUE, 25 février 2010, C-381/08).

L'article 25 § 1 du Règlement (UE) n°1215/2012 du 12 décembre 2012 prévoit par ailleurs que si les parties, sans considération de leur domicile, sont convenues d'une juridiction ou de juridictions d'un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont compétentes, sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet État membre. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties.

L'article 8 1) du Règlement (UE) n°1215/2012 du 12 décembre 2012 dispose enfin qu'une personne domiciliée sur le territoire d'un État membre peut être attraite, s'il y a plusieurs défendeurs, devant la juridiction du domicile de l'un d'eux, à condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu'il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d'éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément.

Il ne ressort pas du libellé de ces dispositions que l'identité des fondements juridiques des actions introduites contre les différends défendeurs fassent partie des conditions de leur application (CJUE, 11 avril 2013, C-645/11, point 44)

Au cas présent la Cour observe, en premier lieu, ensuite de ce qui a déjà été exposé, que:

- les conditions générales d'achat de Webasto (qui sont évoquées par renvoi dans les bons de commande et les accusé réception de la commande) et les conditions générales de vente de IP3 Vendée (reproduites in extenso au verso de chaque facture) contiennent des clauses attributives de juridiction à la teneur opposée ;

- Le contrat-cadre signé entre Webasto et IP3 Vendée contenant une clause désignant la juridiction du lieu du siège social de l'entité Webasto qui passe la commande n'a été signé entre les parties qu'en 2021 et n'est pas applicable aux commandes des 23 aout 2019 et 4 novembre 2020.

Dans ces circonstances, la Cour retient que la clause attributive de juridiction invoquée par la société Webasto n'est pas opposable à la société IP3 Vendée en application de l'article 25 du Règlement (UE) n°1215/2012 du 12 décembre 2012.

La Cour constate, en deuxième lieu, que la relation entre la société Webasto et IP3 Vendée se caractérise par une succession de contrats de vente relevant de la catégorie de vente de marchandises. En application de l'article 7, point 1, sous b), premier tiret, la juridiction compétente est donc celle du lieu de l'Etat membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées.

La Cour observe que les bons de commande des 23 aout 2019 et 4 novembre 2020 (d'outillage et convenant de spécifications techniques et d'un prix par pièce) mentionnent "Incoterms : FCA [Localité 9]".

Webesto se prévaut certes (pièces n°10) de bons de commande et d'accusés de réception de commande qu'elle a émis et qui mentionnent dans certains cas, une adresse de livraison à [Localité 12] (Royaume Uni), ainsi que de formulaires remplis de manière manuscrite par IP3 Vendée mentionnant comme destinataire Webasto Royaume Uni (la mention " reçu les marchandises ci-dessus en bon état " restant vierge). Cependant, Webesto les produit sans les recenser, en préciser la teneur et sans procéder à un suivi (date et n° de la commande, facture émise par IP3 mentionnant ce même numéro), si bien que ces documents ne sont pas exploitables.

Dans ces circonstances, la Cour retient, en cet état, que le lieu de État membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées, se situe aux [Localité 6] (85).

En troisième lieu et à titre surabondant, la Cour retient enfin que la demande d'IP3 Vendée fondée sur l'inexécution contractuelle de Webasto est liée aux demandes précédentes par un rapport si étroit, au sens de l'article 8 1) du Règlement (UE) n°1215/2012 du 12 décembre 2012 précité, qu'il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps, afin d'éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément.

Cette demande a donc été régulièrement formulée devant le tribunal de commerce de Rennes.

- S'agissant de la demande déclarer le tribunal de commerce de Rennes incompétent pour statuer sur les demandes de la société S.P.P.P. à l'encontre de la société Webasto

La société S.P.P.P a formulé en dernier lieu une demande directe à l'encontre de la société Webasto tendant à la voir condamnée à lui verser la somme de 103 673, 15 euros au titre du préjudice par elle subi de la rupture des engagements contractuels de Webasto à l'égard de IP3 Vendée et de la rupture brutale des relations commerciales établies entre Webasto et IP3 Vendée.

La CJUE a jugé, dans un arrêt du 8 mars 2018, C-64/17, Saey Home & Garden, qu' "il importe de vérifier que la clause attributive de juridiction en cause au principal concerne ce rapport de droit. En effet, une clause attributive de juridiction insérée dans un contrat ne peut, en principe,

produire ses effets que dans les rapports entre les parties qui ont donné leur accord à la conclusion de ce contrat (arrêt du 7 février 2013, Refcomp, C-543/10, point 29). "

Dans ces circonstances, la clause attribution de juridiction invoquée par la société Webasto ne peut être opposée à la société S.P.P.P.

La Cour retient que cette demande est liée aux demandes précédentes par un rapport si étroit, au sens de l'article 8 1) du Règlement (UE) n°1215/2012 du 12 décembre 2012, qu'il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps, afin d'éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément.

Elle a donc été régulièrement formulée devant le tribunal de commerce de Rennes.

Le jugement attaqué, qui a jugé le tribunal de commerce de Rennes compétent pour connaître du litige opposant la société IP3 Vendée à la société Webasto et du litige opposant la société S.P.P.P. à la société Webasto, est confirmé en toutes ses dispositions par ces motifs substitués.

- Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens

Succombant, la société Webasto, dont la demande au titre des frais irrépétibles sera rejetée, sera condamnée à supporter les entiers dépens d'appel, ainsi qu'à payer aux sociétés S.P.P.P. et IP3 Vendée la somme de 3 500 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Webasto à payer à la société IP3 Vendée la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Webasto à payer à la société S.P.P.P la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Webasto à supporter les entiers dépens d'appel.

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