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Décisions

CA Cayenne, ch. soc., 19 mars 2025, n° 24/00325

CAYENNE

Arrêt

Autre

CA Cayenne n° 24/00325

19 mars 2025

COUR D'APPEL DE CAYENNE

[Adresse 1]

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT N° 12 / 2025

N° RG 24/00325 - N° Portalis 4ZAM-V-B7I-BKSV

[M] [H] [Y]

G.I.E. [D] GESTION

C/

[M] [H] [Y]

G.I.E.. GIE [D] GESTION

ARRÊT DU 19 MARS 2025

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CAYENNE, décision attaquée en date du 01 Juillet 2024, enregistrée sous le n° F22/00086

APPELANTS :

Monsieur [M] [H] [Y]

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représenté par Me Saphia BENHAMIDA, avocat au barreau de GUYANE

G.I.E. [D] GESTION

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Sybille M'LANAO, avocat au barreau de GUYANE

INTIMES :

Monsieur [M] [H] [Y]

[Adresse 8]

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représenté par Me Saphia BENHAMIDA, avocat au barreau de GUYANE

G.I.E.. GIE [D] GESTION

[Adresse 9]

[Localité 3]

Représentée par Me Sybille M'LANAO, avocat au barreau de GUYANE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 février 2025 en audience publique et mise en délibéré au 19 Mars 2025, en l'absence d'opposition, devant :

M. Yann BOUCHARE, Président de chambre

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

M. Yann BOUCHARE, Président de chambre

Mme Sophie BAUDIS, Conseillère

Mme Patricia GOILLOT, Conseillère

qui en ont délibéré.

GREFFIER :

Mme Naomie BRIEU,Greffière, présente lors des débats et du prononcé

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE :

Par contrat à durée indéterminée en date du 28 juillet 2021, prenant effet le 4 octobre 2021, la société G.I.E [D] GESTION (SIRET [XXXXXXXXXX02]) a embauché à temps plein, pour 39 h hebdomadaires, Monsieur [J] [Y] en qualité de Directeur d'agences (SORELOC - GALAMAU - GTM SERVICES - GTM DISTRIBUTION) appartenant au groupe [B], avec un statut cadre pour une rémunération forfaitaire mensuelle brute de 8.500 euros.

Selon ledit contrat, une période d'essai d'une durée de 4 mois était prévue.

Par courrier daté du 03 février 2022, la société G.I.E [D] GESTION a indiqué à Monsieur [J] [Y] la fin de sa période d'essai et sa dispense d'effectuer le mois de préavis en découlant.

Par requête déposée au Tribunal Judiciaire de Cayenne le 11 juillet 2022, sous le numéro RG 22/00086, Monsieur [Y] a saisi le Conseil des prud'hommes de Cayenne de demandes dirigées contre le G.I.E [D] GESTION aux fins de le voir condamné au paiement de diverses sommes et remise de documents.

Les parties ont été convoquées à l'audience devant le bureau de conciliation et d'orientation en date du 21 novembre 2022 lors de laquelle l'affaire a été renvoyée au 02 janvier 2023 pour communication des pièces.

Suite à un échec de conciliation, les parties ont été convoquées devant le bureau de jugement en date du 06 février 2023 puis l'affaire a fait l'objet de plusieurs renvois.

L'affaire a finalement été retenue à l'audience du 04 décembre 2023.

Monsieur [J] [Y], comparant et assisté par son conseil, a déposé des conclusions en date du 4 décembre 2023 auxquelles il s'est référé oralement à l'audience et aux termes desquelles il demandait de :

Sur l 'exécution du contrat de travail :

' Condamner le G.I.E [D] GESTION à payer à Monsieur [Y] la somme de 4519.73 euros au titre des heures supplémentaires réalisées du mois d'octobre 2021 au mois de janvier 2022 outre la somme de 451.97 euros à titre de congés payés y afférents ;

' Fixer le salaire de référence de Monsieur [Y] à la somme de 12 101.71 euros ;

' Condamner le G.I.E [D] GESTION à payer à Monsieur [Y] la somme de 72 610.26 euros à titre d'indemnité forfaitaire de travail dissimulé ;

Au titre de la rupture du contrat de travail,

' Dire et juger que la rupture du contrat de travail à durée indéterminée de Monsieur [Y] du 4 février 2022 est abusive et s 'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence

' Condamner le G.I.E [D] GESTION à payer à Monsieur [Y] les sommes de :

' 36 305.13 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

' 3 630.51 euros à titre de congés payés y afférents ;

' 12 101.71 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

' 12 101.71 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral résultant des conditions humiliantes et vexatoires de la rupture de son contrat de travail ;

' Condamner le G.I.E [D] GESTION à remettre à Monsieur [Y] une attestation Pôle Emploi rectifiée, un certificat de travail et un bulletin de salaire pour le mois de mai 2022 conformes aux demandes, sous astreinte de 150 euros par jour et par document passé le délai d'un mois après la signification du jugement à intervenir ;

' Assortir les créances salariales et assimilées d'un intérêt au taux légal à compter du jour de la première présentation de la lettre le convoquant devant le Bureau de conciliation et pour les créances indemnitaires à compter du jugement qui les accorde dans le mois de sa signification ;

' Ordonner la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1343-2 du Code civil ;

' Prononcer l'exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant appel et sans constitution de garantie, en application de l'article 515 du Code de procédure civile ;

' Condamner le G.I.E [D] GESTION à payer à Monsieur [Y] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

' Condamner le G.I.E [D] GESTION aux entiers dépens de l'instance.

En premier lieu, Monsieur [Y] sollicitait le paiement d'heures supplémentaires non rémunérées au cours de toute la période d'essai (du 04 Octobre 2021 au 04 Février 2022) invoquant l'article L.1222-1 du code du travail qui rappelle l'obligation des parties à exécuter le contrat de bonne foi. Il rappelait à cet effet, que la durée légale du travail est fixée à 35h et que toute heure effectuée au-delà de ces 35h donnait lieu à majoration. Il s'appuyait sur les articles L.3171-4 du code du travail concernant la charge de la preuve et invoquait l'article 1.09 de la convention collective qu'il estimait applicable en l'espèce. Il y est également fait état de l'article 4.04 de la même convention collective concernant les aménagements propres aux cadres évoquant l'organisation individuelle du travail en référence à l'article I .09 pour l'application d'un forfait.

Monsieur [Y] considérait ainsi que son employeur s'était autorisé à forfaitiser ses heures supplémentaires en dépit des dispositions de l'article 1.09 de la convention collective prévoyant le paiement d'un complément de salaire, à défaut d'avoir mis en place l'annualisation des horaires conformément aux dispositions de l'article 4.04 et à l'article 3 de l'annexe 2-3 de ladite convention, et à défaut d'avoir prévu l'attribution de jours de repos spécifiques. Indiquant produire des feuilles de présence suffisamment détaillées, Monsieur [Y] rappelait qu'il appartenait à l'employeur de s'assurer du contrôle des heures de travail effectuées par ses salariés.

En second lieu, le demandeur soulevait, au visa des articles L 8221-1, L 8223-1 et L 8221-5 du code du travail, avoir été soumis à du travail dissimulé de la part de l'employeur indiquant notamment que le G.I.E [D] GESTION a intentionnellement omis des heures de travail sur les bulletins de salaires. Pour étayer le caractère intentionnel du travail dissimulé, il exposait avoir communiqué ses feuilles de présence à son employeur, et reprenait ses arguments concernant le non-paiement des heures supplémentaires exposés ci-dessus. Il ajoutait que l'attestation pôle emploi minorait également les heures de travail prises en compte.

Au soutien de ses demandes indemnitaires au titre de la rupture du contrat de travail, Monsieur [Y] exposait, au visa des articles L 1221-20, L 1221-25 et L 1231-1 du code du travail et au visa de l'article 4.03 de la convention collective applicable, que la rupture du contrat était intervenue après le terme de la période d'essai, fixée au 03 février 2022 et non au 04 février comme s'en prévalait à tort l'employeur. S'il admettait que la rupture de la période d'essai n'imposait aucun formalisme, il rappelait qu'il appartenait à chaque partie de démontrer les faits qu'elle alléguait conformément aux articles 6 et 9 du code de procédure civile, et que l'employeur ne démontrait pas avoir notifié ladite rupture le 03 février 2022 en main propre, à défaut de contre signature du salarié, mais le 04 février 2022, date que Monsieur [Y] demandait au tribunal de retenir comme terme de la période d'essai.

Monsieur [Y] exposait qu'outre une rupture tardive, il avait subi une rupture brutale justifiant une indemnisation, l'employeur lui ayant indiqué le renouvellement de sa période d'essai, jusqu'au 04 juin 2022, la veille de la fin de la période d'essai.

Rappelant les termes de l'article L 1221-20 du code du travail, Monsieur [Y] estimait que la rupture du 04 février 2022 s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse celui-ci se voyant appliquer les règles de l'article L 1231-1 dudit code, l'employeur devant dès lors indiquer le motif de la rupture du contrat de travail.

Il concluait qu'il était fondé à solliciter une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents outre indemnisation pour licenciement abusif. Appliquant les dispositions légales et conventionnelles au licenciement intervenu après la fin de la période d'essai, Monsieur [Y] indiquait bénéficier d'un préavis de licenciement de 3 mois et sollicitait l'indemnisation de ce délai de préavis non respecté par l'employeur.

Il s'appuyait sur l'article L 1235-3 du code du travail pour solliciter l'indemnisation de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, indiquant bénéficier d'une ancienneté de 7 mois, d'une rémunération brute moyenne de 12 101,71 € et exposant sa situation personnelle et ses possibilités de réinsertion professionnelle.

Monsieur [Y] évoquait au surplus des conditions humiliantes et vexatoires de la rupture du travail et sollicitait, au visa de l'article L 1231-1 du code civil, l'indemnisation de ce préjudice. Convenant justifier d'un préjudice distinct du seul préjudice lié au caractère abusif du licenciement, le salarié rappelait que cette indemnisation, si elle était justifiée, était cumulable avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il invoquait la faute de l'employeur dans la rupture du contrat de travail tant par son caractère brutal, sans ménagement, que par son caractère soudain et imprévu compte tenu de l'existence d'une proposition de renouvellement de sa période d'essai et la fixation de rendez-vous professionnels au-delà de la période d'essai. Il ajoutait que cette situation avait eu un impact sur sa santé et avait généré une perte importante de confiance en lui, faisant état d'une attitude des responsables à son égard « à forte connotation dégradante ».

Le G.I.E [D] GESTION , représenté par son conseil, a déposé des conclusions en date du 4 décembre 2023 auxquelles il s'est réfère oralement à l'audience et aux termes desquelles il demandait de :

' Juger que les éléments rédigés et établis par Monsieur [Y] lui-même, sont imprécis et inopérants à la démonstration de l 'existence d'heures supplémentaires non rémunérées ;

' Juger que l'infraction de travail dissimulé invoquée par Monsieur [Y] à l'égard du G.I.E [D] GESTION n 'est aucunement caractérisée ;

' Juger que la notification par courrier datée du 03 février 2022, de la rupture de la période d'essai de Monsieur [Y] par le G.I.E [D] GESTION est parfaitement valide ;

' Débouter Monsieur [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

' Condamner Monsieur [Y] au paiement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

' Condamner Monsieur [Y] aux entiers dépens de l'instance.

A titre liminaire, la société G.I.E [D] GESTION soulevait l'inapplicabilité de la convention collective nationale du commerce et de réparation de l'automobile, du cycle et du motocycle et des activités connexes (IDDC 1090). Pour l'écarter, elle expliquait que cette convention ne relevait pas de son champ d'activité laquelle relevait de « services administratifs combinés de bureau » (APE 82.1 IZ) et qu'en tout état de cause elle n'appliquait aucune convention collective au sein de ses établissements.

Concernant la demande en paiement d'heures supplémentaires, l'entreprise indiquait qu'il appartenait en premier lieu au salarié d'apporter des éléments suffisamment précis quant aux heures effectuées afin de lui permettre d'y répondre. Il rappelait qu'en vertu de l'article 1363 du code civil « nul ne peut se constituer de preuve à soi-même ». Se référant aux seuls termes du contrat, la société G.I.E [D] GESTION rappelait que Monsieur [Y] devait effectuer 39h hebdomadaires, soit 169 h mensuelles pour une rémunération brute forfaitaire de 8500 € incluant les heures supplémentaires effectuées entre le 36e et la 39e heure figurant distinctement sur le bulletin de salaire. Elle indiquait avoir satisfait à son obligation de prendre en compte et rémunérer ces heures.

Concernant les heures supplémentaires au-delà de la 39e heure, la société indiquait n'avoir jamais été destinataire des feuilles de présence produites par son ex-salarié au soutien de ses demandes, et précisait n'avoir jamais sollicité Monsieur [Y] pour effectuer de telles heures supplémentaires outre le fait que celui-ci étant directeur, disposait de la libre organisation de son planning de travail.

L'entreprise sollicitait de voir écarter l'attestation du salarié versée par le demandeur comme non conforme aux dispositions légales des articles 200 à 203 du code de procédure civile, ajoutant qu'elle était de pure complaisance et avait manifestement été dictée.

Le G.I.E [D] GESTION contestait la variabilité des heures effectuées, considérait les éléments qui y figuraient comme imprécis faute d'indiquer quand avaient été réparties les 2 heures supplémentaires par jour indiquées par lui.

Enfin il notait que le salarié lui-même avait mentionné « 0 HS » en observation de ses feuilles de présence et que ses calculs étaient faussés puisque les bulletins de paie prenaient en compte une période mensuelle non pas calendaire mais du 23 du mois précédent au 22 du mois en cours. Le G.I.E [D] GESTION relevait que Monsieur [Y] n'avait formulé aucune demande au titre d'heures supplémentaires au cours de sa période d'essai avant d'introduire la présente instance.

Pour contester l'existence du travail dissimulé, l'employeur soutenait, au visa de l'article L.822-5 du code du travail, que tant l'élément matériel que l'élément intentionnel faisaient défaut. Il rappelait avoir distinctement mentionné aux bulletins de salaire les heures de base (jusqu'à 35h) et les heures au-delà de la 35e heure, contestant avoir omis ou dissimulé des heures effectuées mais contestant également avoir forfaitisé le temps de travail de Monsieur [Y]. Faute d'heures supplémentaires impayées, le G.I.E [D] GESTION demandait le rejet de cette demande.

Concernant la rupture de la période d'essai, le G.I.E [D] GESTION indiquait que Monsieur [Y] avait été absent 8 jours sur sa période d'essai et que, compte tenu de ces absences, la période d'essai de Monsieur [Y] n'expirait pas au 03 février 2022 mais le 12 février 2022 conformément à l'article L 1221-20 du code du travail et aux dispositions contractuelles.

En outre, le G.I.E [D] GESTION contestait que le salarié n'avait pas contresigné la notification de la rupture de la période d'essai. Bien qu'elle admettait que la signature soit datée du 04 février 2022, elle estimait que ce décalage était sans effet compte tenu du décalage de la période au d'essai au 12 février 2022. Concernant le respect du délai de prévenance, il évoquait l'article L 1221-25 du code du travail pour rappeler que le délai de prévenance ne décalait pas le terme de la période d'essai et qu'en tout état de cause, le non-respect du délai de prévenance était sanctionné par une indemnisation et non pas la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il indiquait avoir versé l'indemnité due au titre du délai de prévenance équivalente à un mois de salaire dans le respect des droits de Monsieur [Y] outre indemnité de congés payés non pris.

Concernant la rupture vexatoire qu'évoquait le demandeur, la société G.I.E [D] GESTION faisait valoir, au visa de l'article L 1231-1 alinéa 2 du code du travail, que les règles relatives à la rupture du contrat de travail ne s'appliquaient pas à la période d'essai pendant laquelle les parties pouvaient discrétionnairement résilier le contrat, sans avoir l'obligation d'invoquer un motif ni donner droit à indemnité du seul fait de cette rupture. Elle rappelait les conditions limitatives pouvant donner lieu au renouvellement de la période d'essai les excluant toutes en l'espèce. Malgré l'absence d'obligation de motiver la rupture de la période d'essai, et confirmant avoir fait une proposition de renouvellement de celle-ci le 02 février 2022, l'employeur indiquait que la discussion sur la stratégie managériale intervenue le même jour à démontrer des divergences importantes sur les pratiques managériales de Monsieur [Y]. A l'appui de doléances de salariés de l'entreprise, la société G.I.E [D] GESTION indiquait une décision fondée sur des éléments objectifs. Pour contester tout préjudice financier, l'employeur indiquait que Monsieur [Y] avait d'autres activités de gérance/direction et qu'il ne produisait aucun élément sur sa situation financière. L'entreprise contestait la force probante du suivi psychologique invoqué par Monsieur [Y] qui correspondrait à un simple devis pour une thérapie de couple.

Enfin le G.I.E [D] GESTION demandait au conseil des prud'hommes d'écarter l'exécution provisoire considérant les demandes particulièrement infondées.

Par jugement contradictoire rendu en premier ressort le 1er juillet 2024 (RG 22/00086), le conseil de prud'hommes de Cayenne a :

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme de 4489, 18 € au titre des heures supplémentaires ainsi que la somme de 448,91 € au titre des congés payés y afférents ;

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme 52 122,30 €, correspondant à 6 mois de salaire, au titre de sa demande de condamnation au titre du travail dissimulé ;

débouté Monsieur [J] [Y] de sa demande de requalification de la rupture de la période d'essai en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

débouté Monsieur [J] [Y] de ses demandes de dommages et intérêts pour l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité de congés sur préavis ;

débouté Monsieur [J] [Y] de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant des conditions humiliantes et vexatoires de la rupture du contrat de travail ;

ordonné la remise de documents rectifiés par le G.I.E [D] GESTION, à savoir l'attestation Pôle Emploi, le certificat de travail et le bulletin de salaire pour le mois de février 2022, et ce, sous astreinte provisoire d'un montant de 15 € par jour de retard et par document, à défaut de remise dans le mois suivant la signification de la présente décision ;

dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2022 ;

dit que les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2024 ;

débouté Monsieur [J] [Y] de sa demande de capitalisation des intérêts ;

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

condamné le G.I.E [D] GESTION aux dépens de l'instance ;

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté le G.I.E [D] GESTION de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

ordonné l'exécution provisoire de la présente décision concernant la remise des documents de fin de contrat et des créances salariales dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire ;

rappelé pour le surplus que les décisions du conseil de prud'hommes ne sont pas exécutoires de droit à titre provisoire.

Par déclaration d'appel en date du 17 juillet 2024 enregistrée au greffe le 18 juillet 2024 (affaire référencée sous le RG°24/00325), le G.I.E [D] GESTION a relevé appel de la décision rendue le 1er juillet 2024 (RG n°22/00086) par le conseil de prud'hommes - en formation paritaire de Cayenne en qu'il a :

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme de 4489,18 € au titre des heures supplémentaires ainsi que la somme de 448,91 € au titre des congés payés y afférents ;

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme de 52 122,30 €, correspondant à 6 mois de salaire, au titre de sa demande de condamnation au titre du travail dissimulé ;

ordonné la remise des documents rectifiés par le G.I.E [D] GESTION, à savoir l'attestation Pôle Emploi, le certificat de travail et le bulletin de salaire pour le mois de février 2022, et ce, sous astreinte provisoire d'un montant de 15 € par jour de retard et par document, à défaut de remise dans le mois suivant la signification de la présente décision ;

dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2022 ;

dit que les créances indemnitaires porteront interdits au taux légal à compter du 1er juillet 2024 ;

condamné le G.I.E [D] GESTION aux dépens de l'instance ;

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté le G.I.E [D] GESTION de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Plus généralement, l'appel porte sur toute disposition non visée au dispositif faisant grief à l'appelant, selon les moyens qui seront développés dans ses conclusions étant précisé qu'il y reprendra l'intégralité de ses moyens et demandes présentées en première instance et tels qu'énumérés dans la décision entreprise.

Par déclaration d'appel en date du 31 juillet 2024, enregistrée au greffe le 1er août 2024 (affaire référencée sous le RG°24/00354), Monsieur [J] [Y] a interjeté appel de la décision, limités aux chefs de jugement ci-après :

' 1er chef de jugement critiqué : en ce que le jugement a débouté Monsieur [J] [Y] de sa demande de requalification de la rupture de la période d'essai en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

' 2ème chef de jugement critiqué : en ce que le jugement a débouté Monsieur [J] [Y] de ses demandes de dommages et intérêts pour l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité de congés payés sur préavis ;

' 3ème chef de jugement critiqué : en ce que le jugement a débouté Monsieur [J] [Y] de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant des conditions humiliantes et vexatoires de la rupture du contrat de travail ;

' 4ème chef de jugement critiqué : en ce que le jugement a débouté Monsieur [M] [H] [Y] de sa demande de capitalisation des intérêts.

La notification de la déclaration d'appel est intervenue en date du 18 juillet 2024 s'agissant de l'affaire référencée sous le RG°24/00325 et le 1er août 2024 s'agissant de l'affaire référencée sous le RG°24/00354.

En date du 29 juillet 2024, Monsieur [J] [Y] a constitué avocat en qualité d'intimé dans la procédure enrôlée sous le numéro de RG°24/00325.

En date du 28 août 2024, le G.I.E [D] GESTION a constitué avocat en qualité d'intimé dans la procédure enrôlée sous le numéro de RG°24/00354.

A l'audience de mise en état du 03 novembre 2024, les parties ont toutes deux sollicité la jonction des affaires susvisées (RG°24/00325 et RG°24/00354).

Par conclusions incidentes transmises par RPVA en date du 14 août 2024, au visa des articles 367 et 952 du code de procédure civile, des affaires instruites sous le numéro de répertoire général 23/00325 et 23/00354, des articles L412-3, L412-4, L412-6 à L412-8 du code des procédures civiles d'exécution et des pièces versées aux débats, Monsieur [J] [Y] a sollicité que le président de la chambre sociale, chargé de la mise en état :

Ordonne la jonction des affaires instruites sous le numéro de répertoire général 24/00325 et 24/00354 ;

Dise et Juge que l'affaire sera désormais sous le numéro de répertoire général le plus ancien soit 24/00325 ;

Dise et juge que les dépens suivront le sors de ceux de l'instance principale.

Au soutien de ses prétentions il faisait valoir que ces procédures présentaient un lien entre elles et qu'il était de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.

Par conclusions transmises par RPVA le 02 septembre 2024 en réponse aux conclusions incidentes aux fins de jonction, le G.I.E [D] GESTION, au visa de l'article 367 et 368 du code de procédure civile et des pièces versées aux débats, a demandé au président de la chambre sociale, chargé de la mise en état de :

Ordonner la jonction des affaires instruites sous le numéro de répertoire général 24/00325 et 24/00354 ;

Dire et Juger que l'affaire sera désormais sous le numéro de répertoire général le plus ancien soit 24/00325 ;

Dire et Juger que les dépens suivront le sort de ceux de l'instance principale.

Au soutien de ses prétentions, il faisait valoir qu'il n'émettait aucune objection à la jonction des affaires dont le lien était avéré.

Par ordonnance contradictoire et en dernier ressort en date du 07 octobre 2024, le Président de la chambre sociale en charge de la mise en état a :

ordonné la jonction des instances répertoriées sous les numéros RG°24/00325 et RG°24/00354 qui se poursuivront sur le numéro le plus ancien (RG°24/00325) ;

dit que les dépens suivront le sort de ceux de l'instance principale.

Aux termes de ses conclusions d'appelant et d'intimé transmises par RPVA le 2 décembre 2024, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, le G.I.E [D] GESTION demande à la cour, au visa des articles L.3121-56, L.3121-55, L.1221-20, L.3111-2, L.3171-4, L. 1221-25, L.1231-1 du code du travail, de la jurisprudence et des pièces versées aux débats, de :

infirmer le jugement rendu le 1er juillet 2024 par le Tribunal judiciaire de Cayenne statuant en matière prud'homale, en ce qu'il a :

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme de 4 489,18 € au titre des heures supplémentaires et ainsi que la somme de 448,91 € au titre des congés payés y afférents ;

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme de 52 122,30 € correspondant à 6 mois de salaire, au titre de sa demande de condamnation au titre du travail dissimulé ;

ordonné la remise des documents rectifiés par le G.I.E [D] GESTION, à savoir l'attestation Pôle Emploi, le certificat de travail et le bulletin de salaire pour les mois de février 2022, et ce, sous astreinte provisoire d'un montant de 15 € par jour de retard et par document, à défaut de remise dans le mois suivant la signification de la décision de première instance,

dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2022 ;

dit que les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légale à compter du 1er juillet 2024 ;

condamné le G.I.E [D] GESTION aux dépens de l'instance ;

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté le G.I.E [D] GESTION de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

ordonné l'exécution provisoire de la décision de première instance concernant la remise des documents de fin de contrat et des créances salariales dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaires.

confirmer le jugement rendu le 1er juillet 2024 par le Tribunal judiciaire de Cayenne statuant en matière prud'homale, en ce qu'il a :

débouté Monsieur [J] [Y] de sa demande de requalification de la rupture de la période d'essai en licenciement sans cause réelle et sérieuses ;

débouté Monsieur [J] [Y] de ses demandes de dommages et intérêts pour l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité de congés sur préavis ;

débouté Monsieur [J] [Y] de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant des conditions humiliantes et vexatoires de la rupture du contrat de travail ;

débouté Monsieur [J] [Y] de sa demande de capitalisation des intérêts ;

Statuant à nouveau, il est demandé à la Cour d'appel de Cayenne de :

juger que les bulletins de salaire de Monsieur [J] [Y] sont entachés d'une erreur matérielle indiquant une durée de travail mensuelle de base de 169 heures au lieu de 151,67 heures, liée à une erreur de paramétrage du logiciel de gestion de la paie du G.I.E [D] GESTION ;

juger que cette erreur matérielle, sans causer de préjudice à Monsieur [J] [Y], a conduit à une surévaluation du quantum des heures figurant sur les fiches de salaires de Monsieur [J] [Y] dès lors que les 17,33 heures supplémentaire déclarées entre la 36e et la 39 heures se sont ajoutées à la base mensuelle erronée de 169 heures ;

juger qu'en dépit de cette erreur matérielle, les bulletins de salaires de Monsieur [J] [Y] distinguent entre la durée légale de travail mensuelle de base et les heures réalisées au-delà de la durée légale ;

juger que les éléments rédigés et établis par Monsieur [J] [Y] lui même, sont imprécis et inopérants à la démonstration de l'existence d'heures supplémentaires non-rémunérées ;

juger que l'infraction de travail dissimulé invoquée par Monsieur [J] [Y] à l'égard du G.I.E [D] GESTION n'est aucunement caractérisée ;

juger que la notification par courrier daté du 3 février 2022, de la rupture de la période d'essai de Monsieur [J] [Y] par le G.I.E [D] GESTION est parfaitement valide ;

juger que le G.I.E [D] GESTION n'a commis aucun abus de droit dans l'exercice de son droit de rompre la période d'essai de Monsieur [J] [Y] ;

débouter Monsieur [J] [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

condamner Monsieur [J] [Y] au paiement d'une somme de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner Monsieur [J] [Y] aux entiers dépens de l'instance.

Au soutien de ses prétentions, le G.I.E [D] GESTION conteste le caractère probant des pièces produites par l'ancien salarié et sollicite l'infirmation partielle du jugement s'agissant des heures supplémentaires dont se prévaut Monsieur [Y]. Il indique que les fiches de paie ont été mal éditées et qu'au cours du contrat les heures supplémentaires n'ont jamais fait l'objet d'une contestation.

S'agissant de la rupture contractuelle, le G.I.E [D] GESTION expose que le terme de la période d'essai a été reporté en raison d'une prolongation de la période résultant des huit jours d'absences de Monsieur [Y] en décembre et ajoute que les pièces de ce dernier reprennent ces mêmes dates de sorte que ces périodes de suspension du contrat sont établies.

Aux termes de ses conclusions d'appelant et d'intimé transmises par RPVA le 30 octobre 2024, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, Monsieur [J] [Y] demande à la cour, au visa des articles L 1222-1, L 1221-20, L 1221-25, L 1235-3, L 3171-4, L 8221-1, L 8221-5, L 8223-1 et L 8223-5 du Code du travail, de la jurisprudence précitée, du contrat de travail avec effet au 4 octobre 2021 et des pièces versées aux débats, de :

infirmer partiellement le jugement déféré rendu entre les parties le 1er juillet 2024 par le Tribunal judiciaire de Cayenne statuant en matière prud'homale en ce qu'il a débouté Monsieur [J] [Y] de sa demande de requalification de la rupture de la période d'essai en licenciement sans cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a débouté Monsieur [J] [Y] de ses demandes de dommages et intérêts pour l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité de congés payés sur préavis, en ce qu'il a débouté Monsieur [J] [Y] de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant des conditions humiliantes et vexatoires de la rupture du contrat de travail, en ce qu'il a débouté Monsieur [J] [Y] de sa demande de capitalisation des intérêts ;

Et statuant à nouveau et y ajoutant,

dire et juger que la rupture du contrat de travail à durée indéterminée de Monsieur [Y] du 4 février 2022 est abusive et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

condamner le G.I.E [D] GESTION à payer à Monsieur [Y] les sommes de :

30 145,08 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

3 014,50 € à titre de congés payés y afférents ;

10 048,36 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

10 048,36 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral résultant des conditions humiliantes et vexatoires de la rupture de son contrat de travail ;

assortir les créances salariales et assimilées d'un intérêt au taux légal à compter du jour de la première présentation de la lettre le convoquant devant le Bureau de conciliation et pour les créances indemnitaires à compter du jugement qui les accorde dans le mois de sa signification ;

ordonner la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1231-7 du code civil à compter de l'arrêt à intervenir ;

débouter le G.I.E [D] GESTION de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

confirmer le jugement pour le surplus ;

condamner le G.I.E [D] GESTION à payer à Monsieur [Y] la somme de 5000,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

condamner le G.I.E [D] GESTION aux entiers dépens de l'instance.

Au soutien de ses prétentions, Monsieur [Y] sollicite l'infirmation partielle du jugement s'agissant des sommes allouées par le juge au titre des heures supplémentaires impayées. Il conteste bénéficier du statut de cadre dirigeant au sens de l'article L. 3111-2 du code du travail en exposant qu'il exerçait ses attributions sous l'autorité et dans le cadre des instructions données par son supérieur hiérarchique direct ; qu'il ne disposait d'aucune délégation de pouvoirs et de responsabilité de chef d'entreprise, ne participait pas à la direction de l'entreprise et n'avait aucun pouvoir disciplinaire sur les personnes qu'il supervisait. Il assure avoir effectué 45 heures pendant neuf semaines et sollicite la condamnation du G.I.E [D] GESTION au paiement de la somme de 3 009,30 euros à titre des heures supplémentaires, outre 300,93 euros au titre des congés payés afférents, déduction faite des sommes versées par la société au titre des heures supplémentaires mais également une indemnité au titre de travail dissimulé égale à six mois de salaire.

S'agissant de la rupture contractuelle, il conteste les périodes d'absences évoquées par le G.I.E [D] GESTION et sollicite la requalification de la rupture de la période d'essai en licenciement sans cause réelle et sérieuse en ce que la rupture a été effectuée à l'expiration du terme de la période d'essai qui doit être fixé au 3 février 2022 ; et sollicite diverses sommes en conséquence.

Au surplus, il expose que la rupture a été brutale et humiliante de sorte qu'elle lui avait causé un préjudice moral, il indique bénéficier d'un suivi psychologique et sollicite des sommes au titre de ce préjudice distinct de celles sollicitées pour son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par ordonnance du 4 février 2025, la clôture a été fixée au 7 février 2025.

L'affaire a été mise en délibéré au 19 mars 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre préliminaire

II est rappelé, à titre liminaire, que les prétentions des parties formulées dans leurs dernières conclusions d'appel sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnées et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

Ainsi, bien que Monsieur [Y] sollicite dans ses dernières conclusions à l'occasion de son argumentation « la condamnation du G.I.E [D] GESTION au paiement de la somme de 3 009,30 euros à titre des heures supplémentaires, outre 300,93 euros au titre des congés payés afférents, déduction faite des sommes versées par la société au titre des heures supplémentaires », cette prétention ne figurant pas au dispositif de ses dernières conclusions, elle ne sera pas retenue par la cour.

Sur les heures supplémentaires

Il résulte de la lecture combinée des articles L.3121-55 à L.3121-56 du code du travail qu'une convention individuelle de forfait en heures sur la semaine ou le mois peut être conclue avec tout salarié dès lors que son horaire de travail comporte l'accomplissement régulier d'heures supplémentaires.

La validité d'une telle convention individuelle de forfait suppose la réunion de trois conditions cumulatives, à savoir, qu'un écrit soit établi et que l'accord du salarié ait été recueilli ; que le nombre d'heures correspondant au forfait soit déterminé et enfin que la rémunération du salarié soit au moins égale à la rémunération minimale applicable dans l'entreprise pour le nombre d'heures correspondant à son forfait, augmentée des majorations pour heures supplémentaires.

Pour autant, il est constant que si des heures sont accomplies au-delà du nombre d'heures correspondant au forfait, elles sont constitutives d'heures supplémentaires rémunérées au taux majoré en sus du salaire forfaitaire.

Ainsi, en application des dispositions de l'article L. 3121-28 du code du travail, l'accomplissement d'heure au-delà de la durée légale hebdomadaire ou équivalente constitue une heure supplémentaire qui donne lieu à une majoration salariale ou un repos compensateur.

Par ailleurs, selon les dispositions de l'article L.3171-2 du code du travail, l'employeur est soumis à une obligation d'établir des documents nécessaires au décompte de la durée du travail et des repos compensateurs. Il est également le garant de l'effectivité de leur prise pour chacun des salariés.

En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

L'article 6. REMUNERATION du contrat de travail de Monsieur [Y], stipule qu'il percevra une rémunération forfaitaire mensuelle de 8500 € et que cette dernière « inclut la majoration pour les heures supplémentaires effectuées entre la 36ème et la 39ème heure ».

En l'espèce, il est acquis que les parties ont convenu d'une convention individuelle de forfait en heures sur la semaine prévoyant l'accomplissement de 39 heures hebdomadaires, soit 169 heures, en contrepartie de 8 500 euros. Pourtant, il apparaît que les fiches de paie du salarié (p) comportent la mention de l'accomplissement d'un total de 186,33 heures pour les mois d'octobre et novembre, puis 78,48 heures pour le mois de décembre et 180,24 heures pour le mois de janvier alors que la rémunération retenue correspond à une base horaire de 169 heures.

Monsieur [Y], produit des feuilles de présence mensuelles dans lesquelles il rapporte avoir effectué 45 heures de temps de travail effectif sur 9 semaines au cours de son contrat de travail et verse aux débats une attestation sur l'honneur de Madame [S] [E] attestant que les relevés d'heures étaient transmis à la direction pour l'établissement des fiches de paie.

En réponse, le G.I.E [D] GESTION, conteste l'accomplissement de ces heures supplémentaires et expose d'une part, que le paramétrage du logiciel de comptabilité était erroné et qu'en conséquence les fiches de paie éditées comportaient une erreur matérielle en ce qu'elles indiquent une base horaire de 169 heures mensuelles au lieu de 151,67 heures, auxquelles s'ajoutent 17,33 heures supplémentaires majorées au taux de 25%, correspondant aux heures réalisées au-delà de la durée légale de travail. D'autre part, le G.I.E [D] GESTION indique que l'employeur n'a jamais sollicité que le salarié réalise des heures de travail supplémentaires au-delà de la durée de travail hebdomadaire stipulée au sein du contrat de travail.

Or, l'examen attentif des pièces produites par Monsieur [Y] révèle qu'elles comportent des incohérences manifestes. La totalité des colonnes heures supplémentaires comporte la mention « sans objet » et Monsieur [Y] indique ne pas avoir pris de jours de congé au cours de son contrat alors que le total mensuel des heures de travail effectuées du mois d'octobre et de décembre 2021 sont en-deçà des 169 heures minimales mensuelles qu'il aurait dues effectuer, qui plus est, aucun temps de travail n'est renseigné les 13 décembre 2021 et 29 octobre 2021 mais la colonne absence est dépourvue de toute mention.

Par ailleurs, s'agissant de la preuve que ces documents ont été transmis à son employeur, seules les trois dernières sont signées mais uniquement par Monsieur [Y] et ce sans que la preuve de la transmission de ces éléments ne puisse être établie, les déclarations de Madame [E] ne justifiant pas des modalités d'envoi de ces « relevés d'heures ». A cet égard, de nouvelles incohérences peuvent être constatées, notamment au mois de novembre, où il est mentionné « état transmis le 23/11-2021 » alors que 9 heures de travail sont renseignées pour les jours suivants à savoir du 24 au 30 novembre 2021 ; c'est également le cas pour la feuille de décembre dans laquelle 9 heures de travail sont renseignées pour les 22 et 23 décembre alors qu'il y est mentionné « état transmis le 21/12-2021 ».

Dès lors, le caractère probant des éléments relatifs aux heures supplémentaires effectuées par l'ancien salarié n'étant pas suffisant, c'est à juste titre que le juge de première instance a retenu que « Monsieur [Y] n'établ{issait} pas avec suffisamment de précision les heures supplémentaires dont il se prévaut. ». D'autant plus qu'il n'est pas démontré que Monsieur [Y] ait été sollicité par son employeur pour la réalisation d'heures supplémentaires ni du caractère impératif de l'accomplissement des heures supplémentaires alléguées au vu des tâches confiées ou des besoins de l'entreprise.

Au demeurant, même si des heures supplémentaires sont indiquées sur les fiches de paie, leur total mensuel correspond systématiquement aux heures fixées par la convention de forfait en tant qu'heures supplémentaires régulières et il ressort desdites fiches que les heures supplémentaires sont renseignées sous la mention « Hres SUPP. DE BASE 25% » ou « Hres SUPP. HOR A 25% » de sorte qu'il est possible de présumer que les heures supplémentaires de base correspondent bien à celles comprises dans le forfait et non à des heures effectuées au-delà ce qui est de nature à constituer une présomption selon laquelle les fiches comportent une erreur matérielle.

En conséquence, en l'absence d'éléments permettant d'établir les horaires réels effectués par Monsieur [Y], voire la réalisation d'heures supplémentaires par ce dernier et l'incertitude quant à la détermination des heures effectuées au titre de la convention de forfait en regard aux fiches de paie versées aux débats, le jugement déféré sera infirmé et l'appelant débouté de ses prétentions à ce titre, en ce compris ses demandes au titre de l'indemnité de travail dissimulé par voie de conséquence, car faute de justifier de l'accomplissement d'heures supplémentaires, l'élément matériel du travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié ne peut être établi.

Sur la rupture du contrat de travail

Aux termes de l'article L. 1231-1 du code du travail, les dispositions régissant la rupture du contrat de travail ne sont pas applicables pendant la période d'essai, et chacune des parties dispose, en principe, d'un droit de résiliation discrétionnaire sans avoir à alléguer des motifs justifiant la rupture.

Aux termes de l'article L. 1221-25 du code du travail, lorsqu'il est mis fin, par l'employeur, au contrat au cours de la période d'essai, le salarié présent depuis plus de trois mois est prévenu dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois.

Lorsque ce délai de prévenance n'a pas été respecté, son inexécution ouvre droit pour le salarié à une indemnité compensatrice égale au montant des salaires et avantages qu'il aurait perçus s'il avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du délai de prévenance, indemnité compensatrice de congés payés comprise.

En revanche, lorsque les circonstances de la rupture sont de nature à caractériser une faute de l'employeur ou du salarié, la rupture abusive justifie l'octroi de dommages et intérêts au titre du préjudice subi.

A ce titre, la preuve de l'abus de droit incombe au salarié qui se prévaut d'une faute imputable à l'employeur, et en cas de litige, le juge apprécie l'ensemble de la situation, et non la seule motivation invoquée ou le caractère précipité de la rupture.

S'agissant de la durée de la période d'essai, il est constant que toute suspension du contrat de travail entraîne une prolongation en temps équivalent de la période d'essai, à l'exception de la suspension dont l'origine est imputable à l'employeur. A cet égard, les congés payés, RTT, congés sans solde pris par le salarié peuvent justifier une prolongation équivalente de la période d'essai, son terme étant ainsi reporté.

Les stipulations du contrat de travail en présence prévoient une période d'essai à 4 mois, comprise entre le 4 octobre 2021 et le 4 février 2022, étant précisé que « la durée des suspensions qui interviendrait prolongera d'autant la période d'essai ».

1) Sur le terme de la période d'essai

En l'espèce, les parties se querellent quant au terme de la période d'essai, le G.I.E [D] GESTION exposant que des périodes de suspension du contrat ont conduit à proroger le terme de la période d'essai au 11 février alors que Monsieur [Y] conteste les absences invoquées par l'ancien employeur et retient la date du 3 février 2022 à titre d'expiration de la période d'essai.

Or, selon les fiches de présence établies par Monsieur [Y] et les fiches de paie produites par le G.I.E [D] GESTION, huit jours d'absences peuvent être comptabilisés, il apparaît que Monsieur [Y] a inscrit dans sa fiche de présence du mois de décembre 2021 deux périodes d'absences, le 13 décembre 2021, case surlignée en jaune et accompagnée de la mention « absence sans solde pour motif médical familial » et du 23 décembre 2021 au 3 janvier 2022 (hors week-end), cases surlignées en orange et accompagnées de la mention « congés payés ' accord vu avec Mr [B] à embauche », ces éléments étant par ailleurs repris dans l'encadré « observations » pour les mois de décembre et janvier. Ces éléments sont par ailleurs corroborés par les fiches de paie qui reprennent les mêmes périodes.

Force est de constater que si Monsieur [Y] produit d'autres éléments en vue de justifier du caractère professionnel du voyage de décembre ; compte tenu de l'illisibilité de la page d'agenda produite et de l'absence de mention relative à un quelconque voyage professionnel sur les documents de voyage fournis, Monsieur [Y] n'apportent aucun élément afin de justifier ses allégations. D'autant plus que dans l'émail échangé le 14 février 2022, produit par le G.I.E [D] GESTION (p), il est certes fait état du paiement d'un billet d'avion pour le mois de décembre, mais l'employeur indique que le paiement du billet relève d'un « geste » de sa part, sans mentionner que Monsieur [Y] aurait été sollicité en ce sens par l'employeur qui questionne Monsieur [Y] sur les entretiens professionnels réalisés car ce dernier aurait été en voyage.

A tout le moins, en dépit des contestations de l'intéressé, celui-ci ne justifie par d'avoir travaillé le 13 décembre 2022 et verse des éléments de preuve dans le sens contraire de sorte que cette absence à elle seule permet d'établir que la période d'essai avait vocation à se prolonger à minima d'un jour, soit le 4 février 2022, date de la remise de la lettre de rupture.

Dès lors, il est incontestable que la rupture en date du 4 février 2022 est intervenue avant l'expiration du terme de la période d'essai qui avait été prorogée au 11 février 2022 en raison des huit jours d'absence de Monsieur [Y], la rupture étant donc intervenue dans les délais impartis.

En conséquence, la cour confirmera ce chef de jugement et déboutera Monsieur [Y] de ses prétentions s'y rapportant, en ce compris les demandes indemnitaires sur le fondement du licenciement sans cause réelle et sérieuse dont il ne peut se prévaloir ayant été débouté de la requalification de la rupture de la période d'essai en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2) Sur les circonstances de la rupture

En l'espèce, Monsieur [Y] conclut que la proposition de renouvellement suivie de la rupture de la période d'essai le 4 février 2022 constituent une rupture brutale et humiliante et se prévaut d'un préjudice moral.

Toutefois, il ressort de l'analyse des mails du 1er au 4 février 2022 produits par l'ensemble des parties qu'elles conviennent toutes deux de désaccords quant aux méthodes managériales de Monsieur [Y]. S'agissant du plan pour l'année 2022 proposé, dans ces échanges, d'une part, Monsieur [Y] indique que sans « les ajustements » qu'il propose sa « présence même n'a plus de sens » et d'autre part, il y a également des divergences présentées par M. [B] quant au positionnement de Monsieur [Y] en tant qu'acteur de l'entreprise et s'ajoute à cela les réserves émises par M. [B] sur certains aspects du plan proposé ou tout du moins une adhésion incertaine.

Dès lors, en l'absence d'élément suffisamment pertinent en vue de démontrer le caractère vexatoire et humiliant de la rupture, le jugement déféré sera confirmé et Monsieur [Y] sera débouté de l'ensemble de ses prétentions.

Sur les documents de fins de contrat

Il résulte de la lecture combinée des articles L.3243-2, L. 1234-9, L. 1234-20 et R.1234-9 du code du travail, que l'employeur est tenu de délivrer au salarié un bulletin de paie lors du paiement de salaire ainsi que les attestations et justificatifs permettant d'exercer son droit aux prestations sociales, le certificat de travail et le reçu de solde de tout compte, à l'expiration ou lors de la rupture du contrat de travail.

En l'espèce, il est acquis que les documents de fin contrat ont été remis à Monsieur [Y], cependant, compte tenu de la décision à intervenir, en l'état, les documents comportent des erreurs manifestes qu'il conviendra de rectifier.

En conséquence, la rectification de l'attestation Pôle Emploi, du certificat de travail et des fiches de paie sera ordonnée.

Sur les demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Au regard de la solution apportée au règlement du litige en cause d'appel, Monsieur [Y] sera condamné à payer au G.I.E [D] GESTION la somme de 3 000 euros (trois mille euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance et à hauteur d'appel.

Monsieur [Y], succombant, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi et en dernier ressort, par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe :

INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Cayenne en date du 1er juillet 2024 (RG°22/00086) en ce qu'il a :

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme de 4489, 18 € au titre des heures supplémentaires et ainsi que la somme de 448,91 € au titre des congés payés y afférents ;

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme 52 122,30€, correspondant à 6 mois de salaire, au titre de sa demande de condamnation au titre du travail dissimulé ;

ordonné la remise de documents rectifiés par le G.I.E [D] GESTION, à savoir l'attestation Pôle Emploi, le certificat de travail et le bulletin de salaire pour le mois de février 2022, et ce, sous astreinte provisoire d'un montant de 15 € par jour de retard et par document, à défaut de remise dans le mois suivant la signification de la présente décision ;

dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2022 ;

dit que les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2024 ;

condamné le G.I.E [D] GESTION aux dépens de l'instance ;

condamné le G.I.E [D] GESTION à verser à Monsieur [J] [Y] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONFIRME pour le surplus ;

Et statuant à nouveau,

DEBOUTE Monsieur [J] [Y] de l'ensemble de ses prétentions ;

CONSTATE que la période d'essai du contrat de travail de travail conclu en date du 28 juillet 2021, entre le G.I.E [D] GESTION et Monsieur [J] [Y] a débuté le 4 octobre 2021 et a pris fin le 4 février 2022, soit huit jours avant l'expiration du terme de la période de préavis qui avait été prorogée au 11 février en raison de huit jours d'absence de Monsieur [J] [Y] ;

ORDONNE la rectification des documents de fins de contrat de Monsieur [J] [Y], à savoir l'attestation Pôle Emploi, le certificat de travail et des bulletins de salaire selon les dispositions du présent arrêt ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Y ajoutant,

DEBOUTE Monsieur [J] [Y] de ses demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel ;

CONDAMNE Monsieur [J] [Y] à verser au G.I.E [D] GESTION la somme de 3 000 € (trois mille euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance et en appel ;

CONDAMNE Monsieur [J] [Y] aux dépens de première instance et d'appel.

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président de chambre et la Greffière.

La Greffière Le Président de chambre

Naomie BRIEU Yann BOUCHARE

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