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Décisions

CA Lyon, 3e ch. A, 8 avril 2025, n° 24/08613

LYON

Ordonnance

Autre

PARTIES

Demandeur :

HPL Groupe (SARL)

Défendeur :

Zoo Unltd (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dumurgier

Avocats :

Me Barrie, Me Sliti Bitam, Me Hourse

T. com. Lyon, du 22 oct. 2024, n° 2022j1…

22 octobre 2024

Par jugement contradictoire rendu le 22 octobre 2024, le tribunal de commerce de Lyon, saisi par acte du 3 octobre 2022 délivré par la SARL Zoo Unlimited, a :

- débouté la société HPL Groupe de sa demande de communication de pièces,

- condamné la société HPL Groupe à payer à la société Zoo Unltd la somme de 265 731 euros HT correspondant au solde de la première échéance du contrat de prestation conclu entre elles le 13 mai 2022, avec intérêts au taux conventionnel correspondant à trois fois l'intérêt légal, conformément à l'article 3.1 de la convention, à compter de la signification de l'assignation en référé,

- rejeté la demande de la société Zoo Unltd en paiement des sommes de 264 177 euros HT au titre de l'échéance du 21 mai 2022 et de la somme de 155 449 euros HT au titre de l'échéance du 21 juin 2022,

- jugé que la résiliation à l'initiative de la société HPL Groupe est fautive,

- condamné la société HPL Groupe à payer à la société Zoo Unltd la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résiliation fautive,

- débouté la société HPL Groupe de sa demande reconventionnelle,

- condamné la société HPL Groupe aux entiers dépens et au paiement d'une somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Cette décision a été signifiée le 5 novembre 2024 à la société HPL Groupe, qui en a relevé appel par déclaration reçue au greffe le 14 novemre 2024, portant sur l'ensemble des chefs de jugement expressément critiqués, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de la société Zoo Unltd en paiement des sommes de 264 177 euros HT au titre de l'échéance du 21 mai 2022 et de la somme de 155 449 euros HT au titre de l'échéance du 21 juin 2022,

L'intimée a constitué avocat le 5 décembre 2024.

La société appelante a remis ses conclusions au greffe et les a notifiées à l'intimée le 13 février 2025.

Le 10 décembre 2024, la société Zoo Unltd a notifié des conclusions saisissant le conseiller de la mise en état d'un incident aux fins de voir, au visa des articles 901, 514 et 524 du code de procédure civile :

- déclarer nulle la déclaration d'appel de la société HPL Groupe du 14 novembre 2024,

- ordonner la radiation du rôle de l'appel enregistré sous le n° RG 24/8613,

- condamner la société HPL Groupe aux entiers dépens de l'instance et à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au terme de conclusions d'incident n°2 notifiées le 11 mars 2025, l'appelante demande au conseiller de la mise en état de :

Rejetant toutes demandes, fins, moyens et conclusions contraires,

- rejeter la demande de nullité de la déclaration d'appel du 14 novembre 2024,

- rejeter la demande de radiation du rôle de l'appel enregistré sous le numéro RG 24/08613,

- condamner la société Zoo Unltd aux entiers dépens de l'instance, outre la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'affaire a été retenue à l'audience du 11 mars 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité de la déclaration d'appel

La société Zoo Unltd excipe en premier lieu de la nullité de la déclaration d'appel qui ne comporte pas l'indication de son actuel siège social en violation de l'article 901 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que l'appelante a mentionné dans sa déclaration d'appel son adresse lyonnaise qui n'est plus d'actualité depuis six mois.

L'appelante objecte que la mention de son ancien siège social dans sa déclaration d'appel ne relève que d'une simple erreur qui n'a causé aucun grief à la société intimée qui a pu conclure devant la juridiction du premier président, devant la cour d'appel et le conseiller de la mise en état et qui a pu procéder à des mesures d'exécution forcée à son encontre.

Selon l'article 901 du code de procédure civile, dans sa version issue du décret du 29 décembre 2023, « La déclaration d'appel, qui peut comporter une annexe, est faite par un acte contenant, à peine de nullité :

1° Pour chacun des appelants :

a) Lorsqu'il s'agit d'une personne physique, ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

b) Lorsqu'il s'agit d'une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement ;

(') ».

L'article 114 du code de procédure civile énonce « qu'aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public ».

Or, l'indication dans la déclaration d'appel du siège social inexact d'une personne morale est constitutive d'une irrégularité de forme et, en l'espèce, la société intimée ne précise pas le grief que lui cause la mention de l'ancien siège social de l'appelante situé à [Localité 5], et modifié le 22 avril 2024, alors que, par ailleurs, le nouveau siège social de celle-ci est mentionné dans ses écritures d'incident et qu'elle a pu pratiquer une mesure d'exécution forcée à son encontre.

En l'absence de grief invoqué et démontré, l'exception de nullité soulevée par la société Zoo Unltd sera rejetée.

Sur la radiation de l'affaire du rôle pour inexécution de la décision assortie de l'exécution provisoire

Selon l'article 524 du code de procédure civile, lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

La société appelante ne conteste pas ne pas avoir exécuté la décision dont elle a fait appel, qui est assortie de l'exécution provisoire.

Elle s'oppose toutefois à la demande de radiation de son appel au motif que l'exécution des condamnations mises à sa charge à hauteur de 283 731 euros par le jugement déféré entrainerait des conséquences manifestement excessives et qu'elle la placerait notamment en état de cessation des paiements.

Elle prétend, d'une part, que sa santé financière dépend fortement de la société Alila qui a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Lyon du 24 octobre 2024, le solde de son compte bancaire s'élevant à 90,95 euros au 11 mars 2025.

Elle affirme, d'autre part, que la capacité de remboursement de la société intimée, dans l'hypothèse d'une infirmation du jugement déféré, fait défaut, une assemblée générale ayant dû se tenir en raison des comptes du dernier exercice clos laissant apparaître des capitaux propres inférieurs à la moitié du capital social.

Elle ajoute que la preuve d'une amélioration de la situation financière de la société Zoo Unltd depuis cette date n'est pas rapportée, les associés n'ayant pas reconstitué les capitaux propres et la société ayant cessé de déposer ses comptes depuis la fin de l'exercice 2021.

Elle estime qu'il est illusoire de penser que la société intimée dispose des facultés de remboursement d'une somme représentant le tiers de son chiffre d'affaire annuel, compte tenu des difficultés qu'elle rencontre.

La société Zoo Unltd objecte que la société appelante est une holding qui contrôle près de 300 SCI et autres structures et qui organise son insolvabilité, le commissaire de justice qu'elle a mandaté pour poursuivre l'exécution des condamnations mises à sa charge n'ayant pu recouvrer que la somme de 1 011,96 euros.

Elle relève que la presse indique le couple [C] qui dirige la société HPL Groupe perçoit des rémunérations personnelles à hauteur de 4 500 000 euros par an et fait par ailleurs état d'abus de biens sociaux spectaculaires avec des dépenses somptuaires au profit du couple.

La société HPL Groupe qui prétend rencontrer des difficultés de trésorerie qui ne lui permettent pas de régler le montant des condamnations mises à sa charge, s'élevant à 283 731 euros, ne produit aucun bilan comptable au soutien de ses allégations, ainsi que l'avait déjà relevé la juridiction du premier président.

Elle se contente de verser aux débats un extrait de son compte courant d'entreprise arrêté au 10 mars 2025, mentionnant les opérations enregistrées entre le 24 février 2025 et le 10 mars 2025 et présentant un solde créditeur de 90,95 euros, qui ne saurait à lui seul refléter l'état de sa situation financière et notamment de sa trésorerie.

En l'absence de production des derniers bilans de la société, la juridiction saisie n'est pas en mesure de vérifier le patrimoine dont dispose la société et notamment les disponibilités qu'elle peut détenir sur d'éventuels autres comptes bancaires ou ses valeurs mobilières de placement ou immobilisations financières qui lui permettraient de régler les condamnations mises à sa charge, et il n'est donc pas démontré que l'exécution du jugement déféré la placerait en état de cessation des paiements.

D'autre part, la société appelante ne démontre pas le risque de non recouvrement des sommes avancées au titre de l'exécution provisoire qu'elle allègue en se contentant de produire le procès-verbal des délibérations de l'assemblée générale extraordinaire de la société Zoo Unltd daté du 30 juin 2021 et le compte d'exploitation de la société au 13 juin 2022, qui sont des éléments trop parcellaires et trop anciens pour démontrer que la société intimée serait dans l'incapacité de restituer les sommes versées au titre de l'exécution provisoire, dans l'hypothèse d'une infirmation du jugement

Ces éléments ne sont donc pas de nature à caractériser les conséquences manifestement exessives qui résulteraient de l'exécution provisoire de la condamnation mise à sa charge.

Si la radiation de l'appel est une simple faculté pour le juge qui doit s'assurer de la proportionnalité de la mesure au regard de l'exercice du droit d'appel, en l'espèce, au vu du montant de la condamnation prononcée en faveur de la société Zoo Unltd et de l'absence de tout règlement par la société débitrice, la radiation du rôle de l'affaire n'est pas une mesure disproportionnée au regard des buts poursuivis qui sont d'assurer la protection du créancier, d'éviter les appels dilatoires et d'assurer la bonne administration de la justice, ni au regard du droit d'accès au juge reconnu par l'article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'appelante ayant la faculté de solliciter la réinscription de l'affaire au rôle en justifiant de l'exécution, au moins partielle, de la condamnation mise à sa charge.

Dans ces circonstances, il sera fait droit à la demande de radiation de l'affaire du rôle.

Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, les dépens doivent être mis à la charge de la société HPL Groupe.

Les conditions d'application de l'article 700 du code de procédure civile sont réunies en faveur de la société Zoo Unltd à laquelle il sera alloué une indemnité de procédure de 1 000 euros.

PAR CES MOTIFS

Rejetons l'exception de nullité de la déclaration d'appel soulevée par la société Zoo Unltd,

Ordonnons la radiation du rôle de l'affaire enregistrée sous le n° de RG 24 /8613,

Disons que, sous réserve de la péremption, l'affaire pourra être réinscrite au rôle notamment sur justification de l'exécution de la décision dont appel ou de l'octroi de délais de paiement par le juge de l'exécution,

Condamnons la société HPL Groupe aux dépens,

Condamnons la société HPL Groupe à payer à la société Zoo Unltd la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

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