CA Grenoble, 1re ch., 8 avril 2025, n° 23/02673
GRENOBLE
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Central Motor (SASU)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Clerc
Conseillers :
Mme Blatry, Mme Lamoine
Avocats :
Me Sadon, Me Gardon, Me Duchatel, SELAS AGIS, SELARL Gardon Avocats, SCP Dunner-Carret-Duchatel-Escallier
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTION DES PARTIES
Le 18 décembre 2020, M. [W] [V] et son épouse, Mme [X] [V], on fait l'acquisition auprès de la société DERUAZ AUTO, concessionnaire de la marque automobile HYUNDAI, d'un véhicule neuf de marque et de type HYUNDAI TUCSON NG TGDI 150 cv boîte de vitesses manuelle, d'un poids total de 1600 kg, moyennant le prix de 31. 953,88 ' payé en partie par la reprise de leur ancien véhicule pour un montant de 13. 353,88 '.
Très rapidement les acquéreurs se sont plaints d'un manque de puissance à l'accélération et d'une surconsommation d'essence.
Le diagnostic effectué le 1er février 2021 par la société DERUAZ AUTO a mis en évidence que le véhicule manquait de puissance à l'accélération et en reprise, le même phénomène étant constaté après un essai routier pratiqué avec un véhicule identique appartenant à la concession.
Se prévalant d'une non-conformité, les acquéreurs ont mis en vain la société DERUAZ AUTO en demeure de procéder à l'échange du véhicule avec un véhicule équivalent par lettre recommandée du 2 février 2021.
Le 6 mai 2021, la société DERUAZ AUTO a proposé à titre commercial aux époux [V] l'échange de leur véhicule contre un véhicule d'une gamme supérieure équipée d'une boîte automatique moyennant un surcoût à leur charge.
Cette offre a été refusée par les acquéreurs, qui par lettre recommandée du 11 mai 2021, restée sans réponse, ont mis une nouvelle fois en demeure la société DERUAZ AUTO d'accepter la résolution de la vente sur le fondement de la garantie légale de conformité.
À la demande de l'assureur des acquéreurs une première expertise amiable non contradictoire a été réalisée le 2 juin 2021 par M. [H], qui a estimé que le véhicule présentait un désagrément de conduite et un manque significatif de puissance du moteur à bas régime.
Une seconde expertise amiable a été organisée le 5 juillet 2021 au contradictoire de toutes les parties, à l'issue de laquelle les deux experts présents ont notamment constaté un phénomène de manque de puissance à bas régime et lors de reprise à bas régime, essentiellement lors des trois premiers rapports à tous les modes de conduite, mais moins flagrant en mode sport.
C'est dans ce contexte que par acte d'huissier du 15 novembre 2021, M. et Mme [V] ont fait assigner la société DERUAZ AUTO devant le tribunal judiciaire de Vienne aux fins d'entendre :
prononcer la résolution de la vente intervenue entre les parties le 18 décembre 2020 sur le fondement de la garantie légale de conformité et subsidiairement sur celui de la garantie légale des vices cachés,
condamner la société défenderesse à leur rembourser le prix de vente de 31.953,88 ' avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 2 février 2021,
dire que le véhicule sera enlevé à leur domicile et restitué aux frais exclusifs de la société DERUAZ AUTO,
condamner la société DERUAZ AUTO à leur payer à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 1er février 2021, la somme de 15 ' par jour à compter du 1er février jusqu'à la restitution du prix de vente en réparation de leur préjudice de jouissance,
condamner la société DERUAZ AUTO à leur payer une indemnité de 3.000 ' pour frais irrépétibles.
La société DERUAZ AUTO, devenue CENTRAL MOTOR [Localité 6], s'est opposée à l'ensemble de ces demandes en faisant valoir que le véhicule, qui ne présente aucune dangerosité, est conforme à ce qui a été vendu, que le « ressenti » des acquéreurs ne constitue pas un défaut de conformité, ni un vice caché en l'absence d'impropriété à la destination du bien, et qu'il n'était justifié d'aucun préjudice de jouissance dès lors que le véhicule pouvait être utilisé dans des conditions normales de sécurité.
Par jugement en date du 11 mai 2023, le tribunal judiciaire de Vienne :
a prononcé la résolution de la vente intervenue entre les parties le 18 décembre 2020 en application de la garantie légale de conformité,
a condamné en conséquence la société CENTRAL MOTOR [Localité 6] à restituer à M. et Mme [V] la somme de 31. 953,88 ' avec intérêts au taux légal à compter du 2 février 2021,
a dit qu'en contrepartie le véhicule sera enlevé au domicile des époux [V] et restitué à la société CENTRAL MOTOR [Localité 6] aux frais exclusifs de cette dernière,
a condamné la société CENTRAL MOTOR [Localité 6] à payer aux époux [V] la somme de 15 ' par jour à compter du 1er février 2021 jusqu'au jour de la restitution du prix de vente en réparation de leur préjudice de jouissance,
a condamné la société CENTRAL MOTOR [Localité 6] à payer aux demandeurs une indemnité de 2.000 ' en application de l'article 700 du code de procédure civile,
a dit que l'exécution provisoire était compatible avec la nature du litige,
a condamné la société CENTRAL MOTOR [Localité 6] aux dépens.
Le tribunal a considéré en substance :
que si le véhicule n'était pas affecté d'un vice caché, il n'était pas conforme aux spécifications contractuelles au sens de l'article L. 217-4 du code de la consommation alors que les acquéreurs étaient en droit d'attendre d'un véhicule neuf qu'il présente une montée en régime normal au démarrage sans effet de latence, de trou ou de manque de puissance,
que ce défaut de conformité n'était pas mineur dans la mesure où le manque de puissance pouvait augmenter le risque d'accident provoqué par un autre véhicule surpris par ce manque de reprise,
que la réparation étant impossible de l'aveu même du vendeur, il convenait de prononcer la résolution du contrat.
La SAS CENTRAL MOTOR [Localité 6] a relevé appel de cette décision selon déclaration reçue le 13 juillet 2023 aux termes de laquelle elle critique le jugement en toutes ses dispositions.
Par conclusions n°2 déposées le 27 janvier 2025, la SAS CENTRAL MOTOR [Localité 6] demande à la cour, par voie d'infirmation du jugement :
de débouter les consorts [V] de l'ensemble de leurs demandes,
d'ordonner la restitution par ces derniers de la somme totale de 50.577,10 ', outre intérêts au taux légal, qu'ils ont reçue en exécution du jugement,
de condamner M. et Mme [V] à la reprise du véhicule à leurs frais et au paiement d'une somme journalière de 15 ' au titre des frais de gardiennage du véhicule à compter de son enlèvement et jusqu'à sa reprise,
de condamner solidairement M. et Mme [V] à lui payer une indemnité de 5.000 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir :
qu'il appartient à l'acheteur de prouver que le vendeur n'a pas délivré une chose conforme aux spécifications contractuelles ou à la loi,
qu'en l'espèce, aucun des deux experts n'a considéré que le véhicule n'était pas conforme à la réglementation applicable, tandis que ses caractéristiques techniques sont celles convenues entre les parties et figurant sur la carte grise (véhicule neuf HYUNDAI TUCSON NG TGDI 150 cv boîte de vitesses manuelle, d'un poids total de 1600 kg),
que le phénomène de faible puissance lors des passages des trois premiers rapports résulte du poids du véhicule et de la boîte de vitesses manuelle,
que les experts ont toutefois relevé que ce phénomène ne se manifestait pas lorsque le véhicule était configuré en mode sport permettant d'utiliser instantanément la totalité de la puissance, de sorte qu'il était loisible aux acquéreurs de choisir ce mode de conduite, plutôt que le mode économique,
que s'il est possible de trouver sur Internet des avis faisant état d'une motorisation manquant de couple à bas régime, les époux [V] ne démontrent pas que ce manque de puissance est dénoncé par de nombreux propriétaires alors que les avis dont ils font état mentionnent d'autres difficultés,
que reconnaissant que le véhicule est conforme à leurs besoins et qu'ils l'utilisent sans désagrément ni difficulté particulière depuis le mois de février 2021, les acquéreurs ne sont pas fondés à solliciter la résolution de la vente,
que ne démontrant pas avoir été dans l'obligation de louer un autre véhicule, les époux [V] ne justifient pas du préjudice de jouissance allégué,
qu'elle a procédé au règlement de l'intégralité des frais d'huissier, tandis que le cas échéant elle s'engage à procéder sans délai à l'enlèvement du véhicule,
qu'elle n'a nullement résisté abusivement aux demandes infondées des acquéreurs.
Par conclusions récapitulatives n°2 déposées le 3 février 2025, M. et Mme [V] sollicitent la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et demandent additionnellement à la cour de condamner la société CENTRAL MOTOR [Localité 6] à leur payer les sommes supplémentaires de 623,86 ' au titre des frais d'exécution forcée, de 984,50 ' au titre du droit proportionnel de l'huissier, de 1.112,52 ' au titre des frais d'assurance acquittés depuis le jugement déféré, de 5.000 ' à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et de 8.000 ' en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils font valoir :
que s'ils ne remettent pas en cause la conformité réglementaire et administrative du véhicule, ils affirment que le véhicule n'est pas conforme en ce qu'il n'est pas en mesure de circuler dans des conditions normales de sécurité en raison d'un défaut majeur de manque de puissance,
que le phénomène litigieux, qui a été mis en évidence contradictoirement par les experts et qui se manifeste par un effet de latence et de trou à l'accélération lors du passage des trois premiers rapports quel que soit le mode de conduite utilisé (économique ou sport), ne constitue nullement un « ressenti », puisqu'il nécessite une conduite spécifique entraînant une surconsommation de carburant pour compenser le manque de puissance,
que la société DERUAZ AUTO reconnaît elle-même l'existence d'un défaut de conformité résultant de la conception du véhicule et techniquement impossible à corriger,
que la non-conformité fonctionnelle du véhicule, qui ne leur a évidemment pas été signalée lors de l'achat, justifie la demande de résolution de la vente sur le fondement des articles L. 217- 4 et suivants du code de la consommation aux termes desquels le vendeur est tenu de délivrer un véhicule conforme au contrat conclu, c'est-à-dire propre à l'usage habituellement attendu d'un bien semblable, et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance,
qu'il appartient à l'acquéreur d'apporter la preuve de l'existence du défaut, qui est en l'espèce présumé exister depuis la délivrance comme s'étant manifesté moins d'un mois après la vente, mais pas de sa cause,
que la société DERUAZ AUTO a tenté d'éluder sa responsabilité en leur conseillant de s'adresser au constructeur, contre lequel ils ne pouvaient cependant agir puisque la garantie légale de conformité ne peut être invoquée que contre le vendeur, à charge pour lui de se retourner contre le fabricant,
que la société DERUAZ AUTO a tenté en vain à plusieurs reprises de remédier aux désordres avec le concours du constructeur et leur a adressé des propositions commerciales inacceptables comme nécessitant de leur part une participation financière trop importante,
que la responsabilité de la société CENTRAL MOTOR [Localité 6] est par conséquent pleinement engagée sur le fondement de la garantie légale de conformité et subsidiairement sur celui de la garantie légale des vices cachés des articles 1641 et suivants du Code civil,
qu'outre la résolution de la vente et la restitution du prix versé, ils sont fondés à solliciter l'indemnisation de leurs préjudices connexes en application des articles L. 217- 11 du code de la consommation et 1645 du code civil,
que les désagréments qu'ils ont subis et l'incapacité du véhicule à circuler dans des conditions normales de sécurité leur ont causé un préjudice de jouissance dès lors qu'ils ont dû faire une utilisation réduite du véhicule en raison des nombreuses interventions depuis le 1er février 2021 et de la nécessité d'adopter une conduite spécifique et inhabituelle, qu'ils résident en zone rurale et qu'il s'agit de leur unique véhicule qu'ils sont donc obligés d'utiliser pour leurs déplacements professionnels,
que si la réparation sollicitée au titre de leur préjudice de jouissance est aujourd'hui importante (12.600' au jour du jugement), ce n'est pas en raison de l'indemnité journalière réclamée ( un demi millième de la valeur vénale du véhicule), mais du fait du temps écoulé et du refus de la société venderesse de faire face à ses obligations et de procéder à l'enlèvement du véhicule,
qu'ils ont rencontré les plus grandes difficultés pour faire exécuter le jugement assorti de l'exécution provisoire, alors notamment qu'ils ont dû prendre des mesures d'exécution forcée pour obtenir le règlement des sommes dues et que le véhicule n'étant pas repris, ils ont dû maintenir son assurance.
L'instruction a été clôturée par une ordonnance rendue le 11 février 2025.
MOTIFS
Si dans le dispositif de leurs conclusions d'appel, M. et Mme [V] visent exclusivement les articles L. 217 - 4 et suivants du code de la consommation, ils fondent également dans le corps de leurs écritures ( page 10) leur demande de résolution de la vente sur les dispositions des articles 1641 et suivants du code civil relatives à la garantie légale des vices cachés.
Selon la société DERUAZ AUTO, qui a réalisé un premier diagnostic le 1er février 2021, le véhicule manque de puissance à l'accélération et en reprise, le même phénomène étant constaté après un essai routier pratiqué avec un véhicule identique appartenant à la concession.
À la demande de l'assureur des acquéreurs, une première expertise amiable non contradictoire a été réalisée le 2 juin 2021 par l'expert [H], qui a estimé à cette date que le véhicule présentait un désagrément de conduite et un manque significatif de puissance du moteur à bas régime, ce qui constituait selon lui des désordres anormaux pour un véhicule neuf.
L'expertise amiable réalisée contradictoirement le 5 juillet 2021 en présence de toutes les parties a mis en évidence que le véhicule manquait de puissance à bas régime lors du passage des trois premiers rapports à tous les modes de conduite, mais de façon moins flagrante en mode sport. Les experts ont constaté « un effet de latence et trou à l'accélération » et ont indiqué que ce phénomène devait être compensé par une accélération et par la sollicitation du patinage de l'embrayage et des différents modes de conduite, ce qui augmentait la consommation instantanée.
Dans un premier temps, à l'issue de ces constatations contradictoires, l'expert [H] désigné par l'assureur des acquéreurs a conclu que « à l'appréciation de M. [V] le véhicule présentait un danger au risque de générer un accident de la circulation ».
Ce n'est que dans un deuxième temps, le 26 août 2021, que cet expert a écrit que le véhicule présente « un défaut majeur de manque de puissance à bas régime' et qu'en l'état il n'est pas en mesure de circuler dans des conditions normales de sécurité ».
Pour sa part l'expert mandaté par l'assureur du vendeur a conclu en ces termes le 23 novembre 2021 : « au vu de nos constatations, nous pouvons indiquer que le véhicule est dans un état conforme à ce qui a été vendu et il n'existe pas de rappel ou d'amélioration technique sur ce type de véhicule permettant de supprimer ce ressenti. Ce ressenti n'entraîne pas d'immobilisation ou dangerosité lors de l'utilisation du véhicule ».
Les deux experts ne s'accordent donc pas sur la gravité et les conséquences en matière de sécurité du phénomène non contesté de manque de puissance à bas régime dans les trois premiers rapports en mode économique, et il sera observé que ce n'est pas spontanément après l'essai routier contradictoire que l'expert des acquéreurs a confirmé l'opinion de ses mandants quant à la dangerosité potentielle du véhicule.
En l'état de ces constatations et conclusions techniques, le défaut litigieux, que l'expert du concessionnaire qualifie de « ressenti », relève de la conception même du véhicule, n'est pas remédiable et n'a donné lieu à aucune campagne de rappel à l'initiative du constructeur, lequel n'a donc pas considéré qu'il créait un risque pour les utilisateurs, étant observé qu'il n'est pas fait état de la survenance d'accidents de la circulation en relation avec un manque de puissance à bas régime.
La preuve n'est dès lors pas rapportée de ce que l'insuffisance de reprise du moteur à bas régime lors du passage des trois premiers rapports rend le véhicule impropre à son usage normal, de sorte que ce phénomène ne constitue pas un vice caché au sens de l'article 1641 du code civil, et ne saurait dès lors conduire à la résolution de la vente sur ce fondement juridique.
Aux termes des articles L217-4 à L217-14 du code de la consommation relatifs à la garantie légale de conformité dans leur rédaction de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 applicable aux faits de l'espèce :
le vendeur livre un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance.
le bien est conforme au contrat :
1 . S'il est propre à l'usage habituellement attendu d'un bien semblable et, le cas échéant :
s'il correspond à la description donnée par le vendeur et possède les qualités que celui-ci a présentées à l'acheteur sous forme d'échantillon ou de modèle ;
s'il présente les qualités qu'un acheteur peut légitimement attendre eu égard aux déclarations publiques faites par le vendeur, par le producteur ou par son représentant, notamment dans la publicité ou l'étiquetage ;
Ou s'il présente les caractéristiques définies d'un commun accord par les parties ou est propre à tout usage spécial recherché par l'acheteur, porté à la connaissance du vendeur et que ce dernier a accepté.
les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de vingt-quatre mois à partir de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire.
l'acheteur est en droit d'exiger la conformité du bien au contrat. Il ne peut cependant contester la conformité en invoquant un défaut qu'il connaissait ou ne pouvait ignorer lorsqu'il a contracté.
en cas de défaut de conformité, l'acheteur choisit entre la réparation et le remplacement du bien.
Si la réparation et le remplacement du bien sont impossibles, l'acheteur peut rendre le bien et se faire restituer le prix ou garder le bien et se faire rendre une partie du prix.
la résolution de la vente ne peut toutefois être prononcée si le défaut de conformité est mineur.
l'application des dispositions des articles L. 217-9 et L. 217-10 a lieu sans aucun frais pour l'acheteur et ne font pas obstacle à l'allocation de dommages et intérêts.
les dispositions relatives à la garantie légale de conformité ne privent pas l'acheteur du droit d'exercer l'action résultant des vices rédhibitoires telle qu'elle résulte des articles 1641 à 1649 du code civil ou toute autre action de nature contractuelle ou extracontractuelle qui lui est reconnue par la loi.
Il est de principe que la garantie légale de conformité régie par les articles susvisés englobe non seulement la délivrance non conforme aux spécifications de la commande, mais aussi les vices cachés rendant la chose impropre à l'usage auquel elle est destinée, et qu'il appartient à la juridiction saisie d'apprécier concrètement toute éventuelle non-conformité.
En l'espèce la preuve n'étant pas rapportée de ce que le véhicule est impropre à son usage normal du fait de l'insuffisance de reprise du moteur à bas régime, l'existence d'un vice caché n'est pas caractérisée.
Le véhicule livré, dont le modèle, le type et la motorisation sont conformes à la commande, correspond par ailleurs à la description donnée par le vendeur et aux spécifications du bon de commande.
Il n'est par ailleurs pas établi, ni même allégué, que l'insuffisance de couple moteur à bas régime enfreindrait une norme technique, ni que les performances contractuellement garanties par le constructeur ne pourraient être réalisées, ni même que la motorisation ne serait pas conforme aux caractéristiques techniques figurant dans la notice qui a nécessairement été remise aux acquéreurs.
Aucune anomalie n'a, en effet, été constatée, particulièrement quant au temps mis par le véhicule pour atteindre la vitesse de 100 km/h ou pour parcourir 1000 m départ arrêté.
Surtout les experts n'ont pas relevé que le couple maximum, qui traduit le régime moteur où l'accélération est la plus forte, ne correspondrait pas aux caractéristiques annoncées par le constructeur.
En présence d'un phénomène relevant d'une appréciation purement subjective de l'utilisateur et ne causant qu'un désagrément de conduite insusceptible de créer un risque supplémentaire d'accident, puisque tout conducteur doit régler sa vitesse sur celle du véhicule qui le précède, aucune impropriété à l'usage habituellement attendu d'un bien semblable n'est donc caractérisée au sens des articles L. 217-4 et L. 217- 5 du code de la consommation.
Au demeurant la cour estime que les acquéreurs ne pouvaient ignorer le défaut dont ils se plaignent alors qu'il leur appartenait de procéder avant de s'engager à un essai routier avec un véhicule présentant les mêmes caractéristiques, comme il est d'usage.
Le jugement sera par conséquent infirmé en ce qu'il a retenu que la société venderesse devait sa garantie au titre de la non-conformité du véhicule au sens des dispositions susvisées du code de la consommation, ce qui conduit au rejet de l'ensemble des demandes en résolution du contrat de vente et en réparation formée par les époux [V].
En cas d'infirmation d'un jugement assorti de l'exécution provisoire les sommes acquittées nonobstant appel sont restituables de plein droit et les parties doivent de la même façon être remises dans l'état où elles se trouvaient avant exécution.
Il n'y a donc pas lieu de statuer à ce stade sur la demande de la société CENTRAL MOTOR [Localité 6] en restitution de la somme de 50.577,10 ' qu'elle a acquittée ni sur la demande de condamnation de M. et Mme [V] à reprendre possession à leurs frais du véhicule.
La demande en paiement de frais de gardiennage formée par la venderesse sera en revanche rejetée dès lors que du fait de l'exécution provisoire attachée au jugement ayant prononcé la résolution de la vente la société CENTRAL MOTOR est censée avoir recouvré la propriété du véhicule entre le jugement et l'arrêt infirmatif et donc avoir assuré le gardiennage de son bien ; elle n'est pas non plus fondée à réclamer paiement de tels frais pour la période à venir jusqu'à la reprise du véhicule, étant elle-même tenue de restituer le véhicule aux acheteurs du fait de l'infirmation de la décision de résolution de vente.
Sur les mesures accessoires
Parties succombantes, M.et Mme [V] sont condamnés aux dépens de première instance et d'appel et conservent la charge de leurs frais irrépétibles, y compris de première instance.
L'équité ne commande pas de faire application en cause d'appel de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'appelante.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement contradictoirement
Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau :
Déboute M. [W] [V] et Mme [X] [V] de l'ensemble de leurs demandes en résolution de la vente conclue entre les parties le 18 décembre 2020 et en paiement de dommages et intérêts,
Dit n'y avoir lieu de statuer sur la demande de la société CENTRAL MOTOR [Localité 6] en restitution de la somme de 50.577,10 ' qu'elle a acquittée en exécution du jugement déféré, ni sur sa demande de condamnation des acquéreurs à reprendre possession à leurs frais du véhicule et à payer des frais de gardiennage,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties, y compris en cause d'appel,
Condamne M. [W] [V] et Mme [X] [V] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de la procédure civile,