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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 9 avril 2025, n° 23/02550

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Vision Marketing (SARL)

Défendeur :

Lr Health & Beauty Systems (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Brun-Lallemand

Conseillers :

Mme Depelley, Mme Dallery

Avocats :

Me Boccon Gibod, Me Vecchioni, Me Guizard

T. com. Lyon, du 16 nov. 2021, n° 2019J0…

16 novembre 2021

FAITS ET PROCEDURE

La société Vision Marketing a pour activité la vente, la distribution et le courtage de tout type de produits et services.

La société LR Health & Beauty Systems (ci-après dénommée " LR Health ") a pour activité la vente de produits de bien-être cosmétiques.

Le 19 octobre 2011, la société Vision Marketing et la société LR Health ont conclu un contrat de vendeur à domicile indépendant (VDI) par lequel la société Vision Marketing a dû assurer la distribution des produits fournis par la société LR Health auprès d'une clientèle de particuliers, à domicile.

Ce contrat a été formé par le biais du parrainage de M. [S] [K], VDI de la société LR Health, afin que la société Vision marketing devienne elle-même VDI de la société LR Health.

Le 13 juillet 2012, les parties ont formé un contrat de " Leader d'Organisation ".

Par courrier du 30 juillet 2015, la société LR Health a résilié le contrat de VDI et le contrat de "Leader d'organisation", pour non-respect de la clause de non-concurrence et d'exclusivité, reprochant à la société Vision Marketing d'avoir tenté de détourner sa clientèle.

Par courrier du 15 septembre 2015, la société Vision Marketing a vainement mis en demeure la société LR Health d'avoir à lui régler la somme de 350 000 euros.

Par acte du 1er mars 2017, la société Vision Marketing a assigné la société LR Health devant le tribunal de commerce de Lyon pour obtenir réparation du préjudice résultant de la rupture brutale des relations commerciales établies et d'un détournement de clientèle.

Par ordonnance du 21 juillet 2017, l'affaire a été radiée du rôle du tribunal de commerce de Lyon.

Par courrier du 5 octobre 2017, la société Vision Marketing a sollicité le ré enrôlement de l'affaire.

Par décision du 5 novembre 2017, l'affaire a été de nouveau mise au rôle du tribunal de commerce de Lyon.

Par ordonnance de radiation du 15 décembre 2017, l'affaire a été radiée du rôle du tribunal de commerce de Lyon.

Par courrier du 26 avril 2019, la société Vision Marketing a sollicité le ré-enrôlement de l'affaire.

Par décision du 10 mai 2019, l'affaire a été réenrôlée.

Par jugement du 16 novembre 2021, le tribunal de commerce de Lyon a :

- Dit que l'exception de péremption d'instance soulevée par la société LR Health & Beauty Systems est fondée,

- Constaté la péremption d'instance,

- Condamné la société Vision marketing à payer à la société LR Health & Beauty Systems la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la société Vision Marketing aux entiers dépens d'instance

La société Vision Marketing a interjeté appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de Lyon le 14 décembre 2021.

Par ordonnance du 21 mars 2023, la Cour d'appel de Lyon a déclaré irrecevable l'appel de la société Vision Marketing.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 30 janvier 2023, la société Vision Marketing a interjeté appel du jugement du 16 novembre 2021 rendu par le tribunal de commerce de Lyon.

Par ordonnance du 21 mars 2023, la cour d'appel de Lyon a déclaré l'appel irrecevable pour défaut de pouvoir.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées par la voie électronique le 18 février 2025, la société Vision Marketing demande à la Cour de :

Vu l'article 1240 du code civil (anciennement l'article 1382 du code civil),

Vu l'ancien article l. 442-6-i-5° du code de commerce,

Vu les articles 386, 908, 960, 901, du code de procédure civile,

Vu l'article 388 du code de procédure civile,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu la jurisprudence,

Vu les faits et les pièces versées au débat ;

In limine litis,

Déclarer la société LR Health & Beauty Systems irrecevable en sa demande de péremption en application de l'article 388 du code de procédure civile,

Déclarer la demande de dommages et intérêts formée par la société LR Health & Beauty Systems au titre de l'atteinte à l'image irrecevable car prescrite,

Au principal,

Premièrement :

Déclarer recevable l'appel formé par la société Vision Marketing,

Deuxièmement :

Réformer le jugement entrepris en date du 14 décembre 2021 par le tribunal de commerce de Lyon en toute ses dispositions en ce qu'il :

- Dit que l'exception de péremption d'instance soulevée par la société LR Health & Beauty Systems est fondée,

- Constate la péremption de l'instance,

- Condamne la société Vision Marketing à payer à la société LR Health & Beauty Systems la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la société Vision Marketing aux entiers dépens de l'instance.

Et statuant à nouveau :

In limine litis,

Juger que l'exception de péremption d'instance soulevée par la société LR Health & Beauty Systems est mal fondée,

Constater les diligences effectuées par les soins de la société Vision Marketing,

Rejeter la demande de péremption de l'instance au visa de l'article 386 du code de procédure civile,

Déclarer recevable l'exposition des prétentions de la société Vision Marketing,

Au fond :

Juger qu'une relation commerciale établie de trois ans et dix mois a existé entre les sociétés LR Health & Beauty Systems et Vision Marketing,

Juger qu'aucune man'uvre de détournement de clientèle n'a été diligentée par la société Vision Marketing,

Juger que la brutalité de la cessation des relations commerciales n'a pu que générer une désorganisation de la société Vision Marketing,

Juger que la société Vision Marketing était distributrice de produits de marque LR,

Juger que le préavis d'une semaine fixé par la société LR Health & Beauty Systems ne tenait pas compte de la durée de la relation commerciale et respectait pas la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce,

Juger que la société LR Health & Beauty Systems a procédé à une rupture brutale et sans fondement de sa relation commerciale établie avec la société Vision Marketing,

Juger que la société LR Health & Beauty Systems s'est accaparé le réseau de client,

Juger que le détournement de la clientèle de la société Vision Marketing a entrainé une perte de chiffre d'affaires,

Juger que le détournement de la clientèle de la société Vision Marketing a entrainé une perte de gains manqué,

Juger que le détournement de la clientèle de la société Vision Marketing a entrainé un préjudice moral,

En conséquence :

Condamner la société LR Health & Beauty Systems à payer la somme de 152 868,8 euros à la société Vision Marketing en réparation du préjudice découlant de la rupture abusive de la relation commerciale établie entre ces deux sociétés,

Condamner la Société LR Health & Beauty Systems à payer la somme de 303 952,8 euros à la société Vision Marketing en réparation du préjudice économique découlant du détournement de sa clientèle,

Condamner la société LR Health & Beauty Systems à payer la somme de 50 000 euros à la société Vision Marketing en réparation du préjudice moral découlant du détournement de sa clientèle,

Ordonner que les sommes auxquelles la société LR Health & Beauty Systems sera condamnée porteront intérêts au taux légal à compter de la signification de l'assignation,

Ordonner la capitalisation des intérêts,

Déclarer que la Cour n'est pas valablement saisie de l'appel incident formé par la société LR Health & Beauty Systems et

Dire n'y avoir lieu à statuer sur les demandes de condamnations formées par elle,

En tout état de cause,

Débouter la société LR Health & Beauty Systems de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Condamner la société LR Health & Beauty Systems à payer la somme de 5 000 euros à la société Vision Marketing au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la société LR Health & Beauty Systems aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL LX [Localité 6]-Versailles Reims.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées et notifiées par la voie électronique le 17 février 2025, la société LR Health demande à la Cour de :

Vu le jugement rendu le 16 novembre 2021 par le tribunal de commerce de Lyon,

Vu l'ordonnance rendue le 21 Mars 2023 par le Conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Lyon,

Vu l'article 911-1 du code de procédure civile,

Vu l'article 2 du code de procédure civile,

Vu l'article 386 du code de procédure civile,

Vu l'article 392 du code de procédure civile,

Vu l'article 369 du code de procédure civile,

Vu l'article 370 du code de procédure civile,

Vu l'article 383 du code de procédure civile,

Vu les articles L 442-6 et L 442-6-5 du code de commerce (dans leur rédaction en vigueur du 1er juillet 2016 au 26 avril 2019),

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

A titre principal, in limine litis :

Déclarer la société à responsabilité limitée Vision Marketing mal fondée en son appel, et l'en débouter,

In limine litis, confirmer purement et simplement la décision du tribunal de commerce de Lyon en ce qu'elle a prononcé la péremption de l'instance,

A titre subsidiaire au fond :

Si par extraordinaire, la Cour de céans ne confirmait pas la décision du tribunal de commerce de Lyon sur la péremption de l'instance et infirmait, en conséquence, le jugement déféré :

Déclarer la société Vision Marketing recevable mais mal fondée en son appel, et l'en débouter,

Condamner la société Vision Marketing à payer à la société LR Health & Beauty Systems la somme de 25 000 euros en vertu de la clause pénale prévue par l'article 10 du contrat de leader d'organisation,

Condamner la société Vision Marketing à payer à la société LR Health & Beauty Systems la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice d'image subi par elle,

En tout état de cause :

Débouter la société Vision Marketing de l'ensemble de ses prétentions, fins et conclusions contraires,

Confirmer la décision du tribunal de commerce de Lyon en ce qu'il a condamné la société Vision Marketing à payer à la société LR Health & Beauty Systems la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 en première instance,

Condamner la société à responsabilité limitée Vision Marketing à payer à la société LR Health & Beauty Systems la somme supplémentaire de 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

Condamner la société à responsabilité limitée Vision Marketing aux entiers dépens de première instance et d'appel lesquels seront recouvrés par la SELARL Guizard et Associes par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 février 2025.

***

La Cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'invocation préalable de la péremption d'instance

Exposé du moyen

La société Vision Marketing soutient que la société LR Health n'est pas recevable à soulever la péremption d'instance dès lors qu'elle a soulevé, au préalable, une exception d'incompétence, devant la cour d'appel de Lyon.

Réponse de la Cour

Selon l'article 388 du code de procédure civile, la péremption doit à peine d'irrecevabilité être présentée avant tout autre moyen.

En l'espèce, la circonstance que la société L.R. Health ait soulevé l'incompétence de la cour d'appel de Lyon devant laquelle la société Vision Marketing avait interjeté appel du jugement, est sans emport sur la recevabilité du débat sur la péremption d'instance, puisqu'en effet cette dernière est appelante du jugement qui a retenu la péremption d'instance.

L'irrecevabilité alléguée est rejetée.

Sur la péremption d'instance

Exposé des moyens

Au soutien de son appel, la société Vision Marketing soutient qu'elle a accompli des diligences interruptives de péremption dans le délai de deux ans.

A cet égard, elle demande à la Cour de faire application du revirement de jurisprudence intervenu dans l'arrêt du 7 mars 2024 rendue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (Cass. Civ. 2ème., 7 mars 2024, n°21-19.475) selon laquelle la péremption ne court plus à l'encontre des parties ayant accompli toutes les charges leur incombant, sauf si le conseiller de la mise en état fixe un calendrier ou leur enjoint d'accomplir une diligence particulière.

Elle fait ainsi valoir que, entre le 2 mai 2017, date de fixation du point de départ du délai de péremption retenue par le tribunal correspondant à la date de signification des conclusions du défendeur, et le 24 octobre 2019, date de signification de ses conclusions, elle a accompli des diligences interruptives de péremption pour avoir déposé une requête en mesures conservatoires le 28 avril 2017, participé activement aux audiences d'une procédure de médiation entre juin et octobre 2017, demandé l'exécution d'une ordonnance de saisie conservatoire en juillet 2017, sollicité le ré-enrôlement de l'affaire par courrier du 5 octobre 2017, payé les frais de greffe afférents, sollicité à nouveau le ré-enrôlement de l'affaire par courrier du 26 avril 2019, et payé une nouvelle fois les frais de greffe afférents.

Elle estime avoir ainsi toujours démontré sa volonté de maintenir la procédure et avoir accompli l'ensemble des diligences nécessaires requises en attendant qu'une date de fixation lui soit communiquée.

Elle ajoute que du fait de l'oralité de la procédure, les diligences peuvent être effectuées par simple déclaration et que " le juge de la mise en état " ne lui a pas enjoint d'accomplir une diligence particulière. Elle en déduit que le délai de péremption prévu à l'article 386 du code de procédure civile n'était pas acquis au jour où elle a signifié ses conclusions de première instance, le 24 octobre 2019.

S'agissant de ses demandes de ré-enrôlement de l'affaire et les paiements de frais de greffe, elle soutient que ces démarches correspondent à des diligences interruptives de péremption dès lors qu'elles ont pour but de faire avancer le litige vers sa conclusion (Cass. Civ. 2ème., 1er septembre 2016, n°15-20328). Également, elle affirme que le courrier par lequel elle sollicite le ré-enrôlement de l'affaire vaut constitution, acte considéré par la jurisprudence comme étant interruptif de péremption (Cass. Civ. 2ème., 22 février 2007, n°06-15.425). En outre, elle souligne que si la juridiction de premier degré estimait que la péremption était acquise au 2 mai 2019, alors elle n'aurait pas accepté le rétablissement de l'affaire le 10 mai 2019.

Elle soutient que la péremption ne peut être opposée aux parties lorsqu'un mode de règlement alternatif des différends est mis en place, puisque celles-ci perdent la direction du procès (Cass. Civ. 3ème., 26 janvier 2011, n°09-71.734) et qu'en l'occurrence, la direction du procès lui a échappé lorsque le tribunal a décidé de mettre en place une procédure de médiation entre les parties. En outre, elle affirme qu'il a existé un lien de dépendance direct et nécessaire entre les deux procédures, impliquant alors qu'un acte intervenu dans la procédure de médiation interrompe le délai de péremption de l'autre procédure. Elle ajoute que sa représentante s'est rendue aux convocations dans le cadre de la procédure de médiation donnant ainsi une impulsion personnelle que la jurisprudence considère comme un acte interruptif de péremption (Cass. Civ. 2ème., 28 juin 2012, n°11-17.873).

Enfin, s'agissant du point de départ du délai de péremption, elle conteste la fixation de ce point de départ au 2 mai 2017, date de la signification des conclusions de la société LR Health. Elle estime possible de fixer ce point de départ au 9 octobre 2017, date d'enregistrement de sa demande de ré-enrôlement formulée le 5 octobre 2017, ou encore de la date de la nouvelle demande du 12 octobre 2017, voire au 2 septembre 2017, date de fin de la procédure de médiation.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, elle affirme que ses conclusions déposées le 24 octobre 2019 doivent être reconnues comme recevables.

En réplique, la société LR Health expose que les ordonnances de radiation rendues par le tribunal de commerce de Lyon ont eu pour effet de suspendre l'instance, sans pour autant interrompre le délai de péremption, conformément aux articles 377 et 392, dans sa version en vigueur du 30 décembre 1976 au 1er janvier 2020, du code de procédure civile. Aussi, elle soutient que le délai de péremption a couru à compter de la dernière diligence interruptive de péremption accomplie par les parties, à savoir son dépôt de conclusions de première instance, le 2 mai 2017. Elle soutient ainsi que la société Vision Marketing, pendant les 2 ans qui ont suivi cette diligence, ponctués par des audiences de formalités, n'a accompli aucune diligence susceptible d'interrompre le délai de péremption, laissant ainsi l'instance se périmer le 2 mai 2019.

Elle ajoute que le revirement de jurisprudence invoqué par la société Vision Marketing n'est pas applicable au cas d'espèce en ce qu'il ne concernerait que les procédures devant les cours d'appel avec représentation obligatoire. Elle indique que cette solution vise à protéger les parties contre la péremption d'instance lorsque les retards sont dus à des contraintes institutionnelles, et non à leur propre inaction. Elle soutient qu'en l'espèce, la péremption est acquise du fait de l'inaction devant le tribunal en procédure orale, de la société Vision Marketing qui n'a pas accompli de diligences interruptives dans un délai de 2 ans courant à compter du 2 mai 2017.

Elle précise que les demandes de ré-enrôlement ne sont pas des diligences interruptives de péremption (Cass. Civ. 2ème., 8 novembre 2001, n°99-20.159 ; pièce n°13 de LR Health). Elle explique que les jurisprudences évoquées par la société Vision Marketing sont développées sur la base de faits d'espèces différents, ne tenant notamment pas compte de l'oralité de la procédure par devant le tribunal de commerce. Dès lors, elle soutient ensuite qu'un courrier simple envoyé au greffe ne peut, au regard de l'article 383 du code de procédure civile, permettre d'interrompre le délai de péremption d'instance, dès lors qu'il ne s'agit pas d'un acte de procédure susceptible de faire avancer l'instance dans le cadre d'une procédure orale. Elle ajoute que le paiement des frais du greffe lors du ré-enrôlement de l'affaire n'est pas non plus une diligence interruptive de péremption puisqu'une telle diligence ne témoigne pas d'une volonté de donner impulsion à l'instance. A ce titre, elle fait valoir que, dans le cadre d'une procédure orale, après une ordonnance de radiation, la seule diligence susceptible d'être dotée d'un effet interruptif est une demande de fixation de l'affaire (Cass. Civ. 2ème., 2 juin 2016, n°15-17.354). Or, elle souligne que la société Vision Marketing ne démontre pas avoir accompli une telle diligence.

Elle soutient aussi que la participation à une réunion de médiation n'est pas susceptible d'interrompre la péremption d'instance, étant donné que les articles 369 et 370 du code de procédure ne mentionnent pas un tel cas de figure. Elle précise sur ce point que la tentative de règlement amiable du différend ne résulte aucunement d'une décision ordonnée par le tribunal mais d'une initiative prise par les parties en parallèle de l'instance au fond pendante devant le tribunal. Au surplus, elle indique que la société Vision Marketing ne s'est présentée qu'à une seule réunion de médiation.

Enfin, s'agissant du point de départ du délai de péremption, elle soutient que la date du 2 mai 2017, date de dépôt de ses conclusions de première instance, dernière diligence interruptive, doit être retenue.

Réponse de la Cour

L'article 386 du code de procédure civile dispose :

"L'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans".

En l'espèce, il est constant que la société L R Health à la suite de l'assignation devant le tribunal de commerce de Lyon qui lui a été délivrée par la société Vision Marketing, a conclu le 2 mai 2017 et que cette dernière a conclu en réplique le 24 octobre 2019, soit plus de deux ans plus tard.

Selon la société appelante du jugement qui a retenu la péremption d'instance, ses demandes successives de remise au rôle de l'affaire par courriers simples des 5 octobre 2017 et 26 avril 2019, à la suite des décisions de radiation de l'affaire ainsi que le paiement des frais de greffe (ses pièces 21, 22 et 23) ont interrompu la péremption.

La radiation de l'affaire qui sanctionne le défaut de diligences des parties conformément à l'article 381 du code de procédure civile, n'a pour effet que de suspendre l'instance sans priver les parties de la faculté d'accomplir les diligences interruptives de la péremption, de telles diligences consistent en des actes se rapportant à l'instance, manifestant la volonté des parties d'en faire avancer le cours (Civ. 2e, 6 déc. 2018, no 17-10.225., notamment), de nature à faire progresser l'affaire, à donner une impulsion processuelle à l'affaire (Civ. 1re, 2 juill. 2014, no 13-18.649 ).

En l'espèce, les demandes successives de réinscription au rôle de l'affaire sans nouvelles conclusions au fond, et le paiement des frais de greffe du tribunal de commerce, n'étaient de nature à faire progresser l'affaire et constituer une diligence au sens de l'article 386 du code de procédure civile (en ce sens Civ. 2e, 2 juin 2016, no 15-17.354 ; Civ. 2e, 8 nov. 2001, no 99-20.159)

Il sera ajouté, que la seule comparution à une audience au cours de laquelle l'examen de l'affaire est renvoyé ne constitue pas, par elle-même, une diligence au sens de l'article 386 du code de procédure civile (Civ. 2e, 25 sept. 2014, no 13-19.583).

Par conséquent, la seule présence de la partie à des audiences de procédure n'est pas de nature à interrompre le délai de péremption.

La Cour relève à cet égard l'absence de justification d'une demande de fixation de l'affaire et l'absence de conclusions en réplique à celles du défendeur du 2 mai 2017 avant l'expiration du délai de péremption de deux ans.

S'agissant de la mesure de médiation invoquée, il n'est pas justifié d'une telle mesure ordonnée par le tribunal de commerce, de sorte la volonté des parties en marge du litige de tenter de trouver un rapprochement même sous l'impulsion d'un juge de la juridiction, ne peut être constitutive d'une diligence au sens du texte précité.

L'existence d'une requête en injonction de payer déposée au mois d'avril 2016 devant le tribunal de commerce de Lyon, avant la délivrance de l'assignation ayant donné lieu à une ordonnance de rejet du 9 mai 2016 est, à cet égard, indifférente.

Également, l'appelante n'explique pas en quoi le dépôt d'une requête en mesures conservatoires le 28 avril 2017, tout comme la tentative d'exécution de l'ordonnance de saisie conservatoire le 20 juillet 2017 auraient été de nature à faire progresser l'affaire.

Enfin, s'agissant du point de départ du délai de péremption qui est déterminé par la dernière diligence de l'une ou l'autre des parties, c'est vainement que la société tente de retenir la date d'enregistrement de l'acceptation de sa demande de ré-enrôlement le 9 octobre 2017 ou le 26 avril 2019, la date de la dernière audience de médiation le 12 octobre 2017, ou encore la date du 2 septembre 2017, en ajoutant la durée de 5 mois de la mesure de médiation à la date du 2 mai 2017, ces évènements n'étant pas constitutifs de diligences ainsi qu'il a été dit.

Par conséquent le jugement est confirmé en ce qu'il a retenu la péremption de l'instance faute de diligences dans un délai de deux ans à compter du 2 mai 2017, date des conclusions du défendeur.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La société appelante, partie perdante, est condamnée aux dépens d'appel, le jugement étant confirmé en ce que le tribunal a mis les dépens de première instance à sa charge.

Le jugement est de même confirmé en ce que le tribunal a condamné la société Vision Marketing au paiement d'une indemnité au titre de de l'article 700 du code de procédure civile.

En cause d'appel, cette dernière est condamnée à payer à la société LR Health la somme supplémentaire de 4 000 ' sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement en ses dispositions qui lui sont soumises ;

Y ajoutant,

Condamne la société Vision Marketing aux dépens d'appel et à payer à la société LR Health & Beauty Systems la somme de 4 000 ' sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

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