CA Paris, Pôle 6 - ch. 3, 9 avril 2025, n° 21/04943
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRET DU 09 AVRIL 2025
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04943 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDZID
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Mai 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/11656
APPELANT
Monsieur [P] [F]
Né le 28 février 1979 à [Localité 9]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Judith KRIVINE, avocat au barreau de PARIS, toque : R260
INTIMEE
S.A.S. DIRECTOIRE BUSINESS [Localité 12], prise en la personne de son représentant légal
N° RCS Grasse : 413 898 693
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Julie LEPAGE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0442, avocat postulant et par Me Alexandra SCHULER-VALLERENT, avocat au barreau de GRASSE, toque : 120, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Février 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne ROUGE, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Fabienne ROUGE, présidente
Véronique MARMORAT, présidente
Christophe BACONNIER, président
Greffier, lors des débats : Madame Laetitia PRADIGNAC
ARRET :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Fabienne ROUGE, Présidente et par Laetitia PRADIGNAC, Greffière, présent lors de la mise à disposition.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société Directoire Business [Localité 12] exploite un centre d'affaire et propose la domiciliation, le secrétariat, la location de bureaux équipés et de salles de réunion.
Monsieur [P] [F] a été engagé par contrat à durée indéterminée, à compter du 1er septembre 2005 par la SARL société Centre d'Affaires La Défense, en qualité d'attaché de direction.
La convention collective applicable est celle des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire (IDCC2098). L'entreprise compte 4 salariés.
En janvier 2008, par avenant à son contrat de travail monsieur [F] a été promu au statut de cadre.
Le 1er juin 2010, le contrat de monsieur [F] a été transféré à la société mère Buro Premier avec une reprise d'ancienneté acquise à compter du 17 novembre 2003.
Le 30 août 2018, la société Directoire Finance Holding (ultérieurement Directoire Business [Localité 12]) a racheté l'intégralité des titres détenus par les gérants de la société qui exploitait d'autres centres d'affaires sous la marque commerciale Buro Club, transférant le contrat de travail de monsieur [F] à la société Directoire Business [Localité 12].
Le 17 octobre 2019, monsieur [F] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle, proposé lors d'un entretien préalable un mois avant.
Le 18 octobre 2019, après avoir été convoqué à un entretien préalable, monsieur [F] a été licencié pour raisons économiques par la société Directoire Business [Localité 12] par lettre indiquant les motifs suivants :
' La société DIRECTOIRE FINANCE HOLDING a racheté le 30 juin 2018 l'intégralité des titres détenus par Monsieur et Madame [R] dans la société BURO PREMIER (ultérieurement dénommée DIRECTOIRE BUSINESS [Localité 12]). Cette société exploite le centre d'affaires a l'enseigne commerciale BURO Club [Localité 12], sis à [Adresse 10] au sein duquel vous occupez Ie poste d'Attaché de direction avec une ancienneté reprise a compter du 17novembre 2003.
Depuis ce rachat intervenu il y a 15 mois, nous constatons une dégradation constante et
significative de plusieurs indicateurs économiques tie cette société, a savoir :
- son Excédent Brut d'Exploitation (EBE]
- son résultat d'exploitation
- sa capacité d'auto-financement (CAF)
En effet, les comptes annuels de l'exercice 2018 (exercice de 6 mois qui a débuté le 1er janvier 2018 et fini le 30 juin 2018) ainsi que le prévisionnel de l'exercice 2019 (exercice
de 12 mois ayant débuté le ler juillet 2018 et fini le 30 juin 2019) font apparaitre :
une insuffisance brute d'exploitation au niveau de l'entreprise qui s'établit a -28k' pour l'exercice 2018 et -19k' pour l'exercice 2019 ;
une perte d'exploitation qui s'établit à -28k' pour l'exercice 2018 et -61k' pour l'exercice 2019.
ce dernier exercice, la perte d'exploitation se serait élevée à 153k' si nous n'avions pas obtenu une franchise exceptionnelle de loyer d'une durée de 5 mois lors du renouvellement du bail commercial des locaux du 5éme étage (représentant une économie de 92k').
Cette dégradation constatée depuis début 2018 s'inscrit dans une tendance déjà engagée avant le rachat de la société puisque si l'on procede, sur l'exercice 2017, au retraitement du résultat d'exploitation de la franchise exceptionnelle de 6 mois de loyer obtenue par les anciens exploitants d'un montant de 113.000', ce résultat devient alors négatifa hauteur de -68k'.
une capacité d'autofinancement négative à hauteur de -18k' pour l'exercice 2018
et -40k' pour l'exercice 2019.
Depuis le rachat de la société, nous avons pourtant mené diverses actions tendant :
- à améliorer le chiffre d'affaires de la société ( augmentation progressive des tarifs de commercialisation notamment pour les bureaux, encadrement des périodes d'engagement contractuel par la mise en place de période d'engagement ferme et la modification des conditions de résiliation, mise en place d'actions commerciales proactives, rationalisation de certains espaces notamment pour créer des espaces de convivialité et favoriser ainsi l'attractivité du centre, etc...)
- et à réduire le montant de nos charges fixes notamment à travers la renégociation des tarifs de plusieurs contrats : assurance (-26% 2019 vs 2017), nettoyage (-11% 2019 vs 2017), collecte du courrier,... et l'obtention d'une franchise de loyer d'une durée de 5 mois obtenue lors du renouvellement du bail commercial des locaux du 5éme étage.
Nonobstant la mise en place de ces actions, le chiffre d'affaires de la société n'a que peu
progressé sur l'exercice 2019 [972 k' de prévisionnel en 2019 vs 944 k' en 2017 et 479 k' en 2018 (sur 6 mois)) et certaines charges se sont quant a elles alourdies (augmentation
des provisions sur charges (+25k' 2019 vs 2017), des frais d'entretien et réparation et des
frais de marketing [+ 32,7% 2019 vs 2017).
La dégradation de la situation économique de la société a nécessité l'intervention de la Holding pour soutenir la trésorerie via la convention de trésorerie mise en place entre les
deux entités juridiques suite au rachat (apport de 350 k=' fin juin 2018).
Nous sommes donc contraints de constater que malgré la mise en place des différentes actions citées ci-dessus, nous devons poursuivre l'allegement de nos charges et notamment
la charge salariale.
En effet au regard de la compétitivité accrue qui regne sur le secteur de l'activité de centre
d'affaires, et pour la sauvegarde de cette compétitivité au sein de notre établissement, nous
devons aligner les gestions financiéres de nos établissements.
Or, nous sommes contraints de constater que le ratio masse salariale/ chiffre d'affaires du centre [Localité 12] (15,4%) dépasse ceux de nos trois autres centres de [Localité 5], [Localité 7] et [Localité 11] (cf. tableau comparatif ci-dessous).
COMPARATIF EFFECTIF / SUPERFICIE / MASSE SALARIALE / CHIFFRE
D'AFFAlRES/ RESULTAT D'EXPLOlTATlON/EBE
CENTRE D'AFFAlRES BURO CLUB - Exercice 2018/2019
Centres
Superficie(m²)
Effectif
Ratio
(salarié/m²)
CA
2018/2019
Masse Sal.
Brute
2018/12019
Ratio
MS/CA
Rés Exploitation
Prév
2018/2019
EBE"retraité"
Prév
2018/2019
[Localité 5]
1 360
4
340.00
1 102 019
120 026
10.9%
260 453
294 035
[Localité 7]
1 115
3
371.67
753 596
83 874
11.1%
5 987
34 773
[Localité 11]
1 800
3
600.00
1 035 043
94 942
9.2%
- 15 683
- 17 629
[Localité 12]
870
4
217.50
972 286
149 803
15.4%
- 125 246
- 111 060
Le choix de la suppression de votre poste s'impose car son contenu (tel qu'il ressort des
contrats de travail et avenants transmis lors du rachat) comprenant le 'suivi de Ia gestion 'nancière et administrative des sociétés AFC BURO, CALD et BSE ' et ' I'étude de dossiers techniques con'és par Mr [R] ', n'existe dans aucun des trois autres centres d'affaires que nous exploitons puisque ces prestations d'assistance administrative et financière sont fournies aux filiales par le personnel de la holding ( réglement, gestion courante au niveau des banques, relation avecl'administration fiscale, gestion des agréments prefectoraux, gestion de la formation, des mutuelles, relation avec l'expert- comptable...etc)
Par ailleurs, lorsque vous avez intégré en 2003 le poste d'Attaché de direction, vos fonctions portaient sur les trois sociétés détenues par les consorts [R] qui exploitaient alors les centres d'affaires BURO Club [Localité 12], BURO Club [Localité 6] et BURO Club [Localité 8].
Or, suite a la faillite des centres de [Localité 6] et de [Localité 8], l'activité s'est poursuivieuniquement sur le site de [Localité 12] réduisant de cefait1'étendue de vos fonctions.
En dépit des recherches que nous avons effectuées au sein de l'entreprise et de l'ensemble
du Groupe DIRECTOIRE FINANCE HOLDING, conformément a l'article L. 1233-4 du code du travail, nous n'avons pas trouvé de poste de reclassement de catégorie équivalente a vous proposer. En effet, le seul poste vacant actuellement est celui de ' Responsable maintenance' au sein de la filiale POLY SERVICE GESTION, société de facility management, a pourvoir sur le département des Alpes Maritimes, a des conditions de rémunération trés inférieures a celles dont vous bénéficiez et nécessitant des qualifications tres éloignées des votres.
Nous avons également tenté de trouver une solution de reclassement en adressant a deux
reprises un courrier a [S] [E], Président de la société BURO Club France, afin de
savoir si un poste équivalent au votre était disponible au sein de sa société ou d'une autre
société membre du réseau BURO Club. Mais en vain.
Au cours del'entretient préalable, nous vous avons proposé le bénéfice d'un Contrat de
Sécurisation Professionnelle (CSP).
Vous disposez d'un délai de 21 jours à compter de la remise dela proposition CSP pour
nous faire part de votre décision d'adherer ou non au dispositif. Passéce délai, vous êtes supposé l'avoir refusé.
En cas d'acceptation du dispositif CSP, votre contrat de travail sera réputé rompu d'un commun accord a la date d'expiration de ce délai de ré'exion, soit le 21 octobre 2019 a minuit.
N'ayant pas encore reçu votrer éponse à ce sujet, nous vous signifions à titre conservatoire votre licenciment pour motifs économiques exposés plus haut.
Votre préavis d'une durée de trois mois,que nous vous demandons d'exécuter, débutera à la date de la première présentation de ce courrier.
Au terme de votre contrat, nous tiendrons à votre disposition votre certificat de travail, votre reçu pour solde de tout compte et votre attestation Pôle emploi.
Vous pouvez faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présentte lettre, dans les quinze jours suivant sa notification par lettre recommandée avec avis de reception ou remise contre récépissé. Nous avons la faculté d'y donner suite dans un délai de quinze jours par lettre recommandée avec avis de reception ou remise contre récépissé. Nous pouvons également, le cas échéant et dans les mêmes formes, prendre l'initiative d'apporter des précisons à ces motifs dans un délai de quinze jours suivant la notification du licenciment.
Vous pouvez bénéficier d'une priorité de réembauche pendant une duréed'un an à compter de ladate de prise d'effet de votre licenciment, si vous en faites la demande par écrit dans ce ême délai...'.
Le 31 décembre 2019, monsieur [F] a saisi le Conseil de prud'hommes de Paris en contestation de son licenciement et en paiement de diverses sommes.
Par jugement du 03 mai 2021, le Conseil de prud'hommes de Paris a :
- Débouté monsieur [P] [F] de sa demande de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse
- Dit que l'employeur n'a pas respecté l'ordre des licenciements économiques
- Condamné la société Directoire Business [Localité 12] à verser à monsieur [P] [F] les sommes suivantes :
3 890 euros au titre du non-respect des critères d'ordre du licenciement ;
Avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement ;
1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Débouté monsieur [P] [F] du surplus de ses demandes ;
- Débouté la société Directoire Business [Localité 12] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne aux dépens.
Monsieur [F] a interjeté appel de ce jugement le 1er juin 2021.
Par conclusions récapitulatives déposées par RPVA le 19 janvier 2024 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, monsieur [F], demande à la Cour de :
- Infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et limité l'indemnité réparant le préjudice résultant du non respect des critères d'ordre du licenciement à 3 890 euros.
- Confirmer le jugement du Conseil des prud'hommes du 3 mai 2021 en ce qu'il a condamné la société pour non-respect des critères d'ordres. Et statuant de nouveau,
- Dire Et Juger que le licenciement de monsieur [P] [F] est sans cause réelle et sérieuse,
- Condamner la société Directoire Business [Localité 12] à payer à monsieur [F] la somme de 50 570,00 euros au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- Condamner la société Directoire Business [Localité 12] à payer à monsieur [F] la somme de 11 670,00 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 1 167,00 euros au titre des congés payés afférents.
A titre principal Condamner la société Directoire Business [Localité 12] à payer à monsieur [F] la somme de 3 890 euros en réparation du préjudice résultant de l'absence d'application des critères d'ordre du licenciement
Et, à titre subsidiaire si le licenciement était considéré comme reposant sur une cause réelle et sérieuse,
condamner la société à la somme de 50 520,00 euros en réparation du préjudice résultant de l'absence d'application des critères d'ordre du licenciement
- Condamner la société Directoire Business [Localité 12] au paiement de la somme de 3 600,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Et Débouter la société de sa demande reconventionnelle à ce titre.
- Condamner la Société Directoire Business [Localité 12] aux entiers dépens en ce compris les sommes découlant de l'article A 444-32 du code de commerce et qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions récapitulatives déposées par RPVA le 20 octobre 2021 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société Directoire Business [Localité 12] demande à la Cour de
Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
- Jugé le licenciement de monsieur [F] fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
- Dit que l'employeur a respecté son obligation de reclassement
- Débouté monsieur [F] de ses demandes au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- Débouté monsieur [F] de sa demande au titre du préavis et des congés payés afférents ;
Infirmer le jugement en ce qu'il a
- Jugé qu'il existait un manquement au respect des critères d'ordre du licenciement ;
- Condamné la société Directoire Business [Localité 12] à payer à monsieur [F] une somme de 3890 euros à titre de dommages et intérêts ;
- Dire et juger que le critère d'ordre des licenciements a été respecté et que monsieur [F] n'a pas demandé de précision à ce titre ;
- Débouter monsieur [F] de sa demande de dommages et intérêts formulés à ce titre ;
- Dire et juger qu'il n'y avait pas lieu à la condamnation de la société Directoire Business [Localité 12] au titre de l'article 700du du code de procédure civile
En revanche, en cause d'appel,
- Condamner monsieur [F] à payer à la société Directoire Business [Localité 12] la somme de 3600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner monsieur [F] aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 décembre 2024 et l'audience de plaidoiries a été fixée au 17 février 2025.
La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
MOTIFS
I - Sur le licenciement
Dans sa rédaction actuelle, applicable à l'espèce l'article L. 1233-3 prévoit que :
' Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par lesalarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :
1 à des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.
Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à :
a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;
b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;
c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;
d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;
2 A des mutations technologiques ;
3 A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;
4 A la cessation d'activité de l'entreprise.
La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise.
Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.'.
Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L.233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.
Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché ».
La lettre de licenciement rappelle le rachat de la société Directoire Business [Localité 12] par la société Directoire Finance Hoding ainsi que des recherches de reclassement au sein du groupe Directoire Finance Hoding mais elle ne répond pas sur la situation du secteur d'activité du groupe et ne fournit aucun élément permettant de déterminer si le secteur d'activité des autres sociétés du groupe connaissent les mêmes difficultés économiques que celles invoquées pour la société directoire Buisnes [Localité 12].
Il sera rappelé que c'est à l'employeur de justifier des éléments nécessaires à la détermination du secteur d'activité du groupe et d'établir la réalité du motif économique au niveau de ce secteur d'activité.
En l'absence de tout élément donné par l'employeur sur le secteur d'activité du groupe, il ne peut être déterminé la consistance du secteur d'activité ni vérifier en quoi était caractérisée l'existence, au niveau du secteur d'activité du groupe auquel la société appartient, de difficultés économiques ou d'une menace pesant sur la compétitivité de ce secteur.
Dès lors le caractère économique du licenciement n'est pas établi, le licenciement de monsieur [F] est sans cause réelle et sérieuse, le jugement sera infirmé.
Il sera fait droit à la demande en paiement de sa demande d'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 50 570 euros compte tenu de son ancienneté de 15 ans et à l'indemnité compensatrice de préavis de 3 mois compte tenu de son statut de cadre soit 11 670 euros et 1167 euros au titre des congés payés y afférents
Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse il n'y a pas lieu d'examiner le non respect des critères d'ordre.
La société Directoire Business [Localité 12] succombant, elle sera condamné au paiement de la somme de 2500 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile,
INFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
CONDAMNE la société Directoire business [Localité 12] à payer à monsieur [F] les sommes de :
- 50 570 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 11 670 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 167 euros au titre des congés payés y afférents ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Directoire Business [Localité 12] à payer à monsieur [F] en cause d'appel la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE les parties du surplus des demandes.
LAISSE les dépens à la charge de la société Directoire Business [Localité 12].
Le Greffier La Présidente
délivrées le :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRET DU 09 AVRIL 2025
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04943 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDZID
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Mai 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/11656
APPELANT
Monsieur [P] [F]
Né le 28 février 1979 à [Localité 9]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Judith KRIVINE, avocat au barreau de PARIS, toque : R260
INTIMEE
S.A.S. DIRECTOIRE BUSINESS [Localité 12], prise en la personne de son représentant légal
N° RCS Grasse : 413 898 693
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Julie LEPAGE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0442, avocat postulant et par Me Alexandra SCHULER-VALLERENT, avocat au barreau de GRASSE, toque : 120, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Février 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne ROUGE, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Fabienne ROUGE, présidente
Véronique MARMORAT, présidente
Christophe BACONNIER, président
Greffier, lors des débats : Madame Laetitia PRADIGNAC
ARRET :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Fabienne ROUGE, Présidente et par Laetitia PRADIGNAC, Greffière, présent lors de la mise à disposition.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société Directoire Business [Localité 12] exploite un centre d'affaire et propose la domiciliation, le secrétariat, la location de bureaux équipés et de salles de réunion.
Monsieur [P] [F] a été engagé par contrat à durée indéterminée, à compter du 1er septembre 2005 par la SARL société Centre d'Affaires La Défense, en qualité d'attaché de direction.
La convention collective applicable est celle des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire (IDCC2098). L'entreprise compte 4 salariés.
En janvier 2008, par avenant à son contrat de travail monsieur [F] a été promu au statut de cadre.
Le 1er juin 2010, le contrat de monsieur [F] a été transféré à la société mère Buro Premier avec une reprise d'ancienneté acquise à compter du 17 novembre 2003.
Le 30 août 2018, la société Directoire Finance Holding (ultérieurement Directoire Business [Localité 12]) a racheté l'intégralité des titres détenus par les gérants de la société qui exploitait d'autres centres d'affaires sous la marque commerciale Buro Club, transférant le contrat de travail de monsieur [F] à la société Directoire Business [Localité 12].
Le 17 octobre 2019, monsieur [F] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle, proposé lors d'un entretien préalable un mois avant.
Le 18 octobre 2019, après avoir été convoqué à un entretien préalable, monsieur [F] a été licencié pour raisons économiques par la société Directoire Business [Localité 12] par lettre indiquant les motifs suivants :
' La société DIRECTOIRE FINANCE HOLDING a racheté le 30 juin 2018 l'intégralité des titres détenus par Monsieur et Madame [R] dans la société BURO PREMIER (ultérieurement dénommée DIRECTOIRE BUSINESS [Localité 12]). Cette société exploite le centre d'affaires a l'enseigne commerciale BURO Club [Localité 12], sis à [Adresse 10] au sein duquel vous occupez Ie poste d'Attaché de direction avec une ancienneté reprise a compter du 17novembre 2003.
Depuis ce rachat intervenu il y a 15 mois, nous constatons une dégradation constante et
significative de plusieurs indicateurs économiques tie cette société, a savoir :
- son Excédent Brut d'Exploitation (EBE]
- son résultat d'exploitation
- sa capacité d'auto-financement (CAF)
En effet, les comptes annuels de l'exercice 2018 (exercice de 6 mois qui a débuté le 1er janvier 2018 et fini le 30 juin 2018) ainsi que le prévisionnel de l'exercice 2019 (exercice
de 12 mois ayant débuté le ler juillet 2018 et fini le 30 juin 2019) font apparaitre :
une insuffisance brute d'exploitation au niveau de l'entreprise qui s'établit a -28k' pour l'exercice 2018 et -19k' pour l'exercice 2019 ;
une perte d'exploitation qui s'établit à -28k' pour l'exercice 2018 et -61k' pour l'exercice 2019.
ce dernier exercice, la perte d'exploitation se serait élevée à 153k' si nous n'avions pas obtenu une franchise exceptionnelle de loyer d'une durée de 5 mois lors du renouvellement du bail commercial des locaux du 5éme étage (représentant une économie de 92k').
Cette dégradation constatée depuis début 2018 s'inscrit dans une tendance déjà engagée avant le rachat de la société puisque si l'on procede, sur l'exercice 2017, au retraitement du résultat d'exploitation de la franchise exceptionnelle de 6 mois de loyer obtenue par les anciens exploitants d'un montant de 113.000', ce résultat devient alors négatifa hauteur de -68k'.
une capacité d'autofinancement négative à hauteur de -18k' pour l'exercice 2018
et -40k' pour l'exercice 2019.
Depuis le rachat de la société, nous avons pourtant mené diverses actions tendant :
- à améliorer le chiffre d'affaires de la société ( augmentation progressive des tarifs de commercialisation notamment pour les bureaux, encadrement des périodes d'engagement contractuel par la mise en place de période d'engagement ferme et la modification des conditions de résiliation, mise en place d'actions commerciales proactives, rationalisation de certains espaces notamment pour créer des espaces de convivialité et favoriser ainsi l'attractivité du centre, etc...)
- et à réduire le montant de nos charges fixes notamment à travers la renégociation des tarifs de plusieurs contrats : assurance (-26% 2019 vs 2017), nettoyage (-11% 2019 vs 2017), collecte du courrier,... et l'obtention d'une franchise de loyer d'une durée de 5 mois obtenue lors du renouvellement du bail commercial des locaux du 5éme étage.
Nonobstant la mise en place de ces actions, le chiffre d'affaires de la société n'a que peu
progressé sur l'exercice 2019 [972 k' de prévisionnel en 2019 vs 944 k' en 2017 et 479 k' en 2018 (sur 6 mois)) et certaines charges se sont quant a elles alourdies (augmentation
des provisions sur charges (+25k' 2019 vs 2017), des frais d'entretien et réparation et des
frais de marketing [+ 32,7% 2019 vs 2017).
La dégradation de la situation économique de la société a nécessité l'intervention de la Holding pour soutenir la trésorerie via la convention de trésorerie mise en place entre les
deux entités juridiques suite au rachat (apport de 350 k=' fin juin 2018).
Nous sommes donc contraints de constater que malgré la mise en place des différentes actions citées ci-dessus, nous devons poursuivre l'allegement de nos charges et notamment
la charge salariale.
En effet au regard de la compétitivité accrue qui regne sur le secteur de l'activité de centre
d'affaires, et pour la sauvegarde de cette compétitivité au sein de notre établissement, nous
devons aligner les gestions financiéres de nos établissements.
Or, nous sommes contraints de constater que le ratio masse salariale/ chiffre d'affaires du centre [Localité 12] (15,4%) dépasse ceux de nos trois autres centres de [Localité 5], [Localité 7] et [Localité 11] (cf. tableau comparatif ci-dessous).
COMPARATIF EFFECTIF / SUPERFICIE / MASSE SALARIALE / CHIFFRE
D'AFFAlRES/ RESULTAT D'EXPLOlTATlON/EBE
CENTRE D'AFFAlRES BURO CLUB - Exercice 2018/2019
Centres
Superficie(m²)
Effectif
Ratio
(salarié/m²)
CA
2018/2019
Masse Sal.
Brute
2018/12019
Ratio
MS/CA
Rés Exploitation
Prév
2018/2019
EBE"retraité"
Prév
2018/2019
[Localité 5]
1 360
4
340.00
1 102 019
120 026
10.9%
260 453
294 035
[Localité 7]
1 115
3
371.67
753 596
83 874
11.1%
5 987
34 773
[Localité 11]
1 800
3
600.00
1 035 043
94 942
9.2%
- 15 683
- 17 629
[Localité 12]
870
4
217.50
972 286
149 803
15.4%
- 125 246
- 111 060
Le choix de la suppression de votre poste s'impose car son contenu (tel qu'il ressort des
contrats de travail et avenants transmis lors du rachat) comprenant le 'suivi de Ia gestion 'nancière et administrative des sociétés AFC BURO, CALD et BSE ' et ' I'étude de dossiers techniques con'és par Mr [R] ', n'existe dans aucun des trois autres centres d'affaires que nous exploitons puisque ces prestations d'assistance administrative et financière sont fournies aux filiales par le personnel de la holding ( réglement, gestion courante au niveau des banques, relation avecl'administration fiscale, gestion des agréments prefectoraux, gestion de la formation, des mutuelles, relation avec l'expert- comptable...etc)
Par ailleurs, lorsque vous avez intégré en 2003 le poste d'Attaché de direction, vos fonctions portaient sur les trois sociétés détenues par les consorts [R] qui exploitaient alors les centres d'affaires BURO Club [Localité 12], BURO Club [Localité 6] et BURO Club [Localité 8].
Or, suite a la faillite des centres de [Localité 6] et de [Localité 8], l'activité s'est poursuivieuniquement sur le site de [Localité 12] réduisant de cefait1'étendue de vos fonctions.
En dépit des recherches que nous avons effectuées au sein de l'entreprise et de l'ensemble
du Groupe DIRECTOIRE FINANCE HOLDING, conformément a l'article L. 1233-4 du code du travail, nous n'avons pas trouvé de poste de reclassement de catégorie équivalente a vous proposer. En effet, le seul poste vacant actuellement est celui de ' Responsable maintenance' au sein de la filiale POLY SERVICE GESTION, société de facility management, a pourvoir sur le département des Alpes Maritimes, a des conditions de rémunération trés inférieures a celles dont vous bénéficiez et nécessitant des qualifications tres éloignées des votres.
Nous avons également tenté de trouver une solution de reclassement en adressant a deux
reprises un courrier a [S] [E], Président de la société BURO Club France, afin de
savoir si un poste équivalent au votre était disponible au sein de sa société ou d'une autre
société membre du réseau BURO Club. Mais en vain.
Au cours del'entretient préalable, nous vous avons proposé le bénéfice d'un Contrat de
Sécurisation Professionnelle (CSP).
Vous disposez d'un délai de 21 jours à compter de la remise dela proposition CSP pour
nous faire part de votre décision d'adherer ou non au dispositif. Passéce délai, vous êtes supposé l'avoir refusé.
En cas d'acceptation du dispositif CSP, votre contrat de travail sera réputé rompu d'un commun accord a la date d'expiration de ce délai de ré'exion, soit le 21 octobre 2019 a minuit.
N'ayant pas encore reçu votrer éponse à ce sujet, nous vous signifions à titre conservatoire votre licenciment pour motifs économiques exposés plus haut.
Votre préavis d'une durée de trois mois,que nous vous demandons d'exécuter, débutera à la date de la première présentation de ce courrier.
Au terme de votre contrat, nous tiendrons à votre disposition votre certificat de travail, votre reçu pour solde de tout compte et votre attestation Pôle emploi.
Vous pouvez faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présentte lettre, dans les quinze jours suivant sa notification par lettre recommandée avec avis de reception ou remise contre récépissé. Nous avons la faculté d'y donner suite dans un délai de quinze jours par lettre recommandée avec avis de reception ou remise contre récépissé. Nous pouvons également, le cas échéant et dans les mêmes formes, prendre l'initiative d'apporter des précisons à ces motifs dans un délai de quinze jours suivant la notification du licenciment.
Vous pouvez bénéficier d'une priorité de réembauche pendant une duréed'un an à compter de ladate de prise d'effet de votre licenciment, si vous en faites la demande par écrit dans ce ême délai...'.
Le 31 décembre 2019, monsieur [F] a saisi le Conseil de prud'hommes de Paris en contestation de son licenciement et en paiement de diverses sommes.
Par jugement du 03 mai 2021, le Conseil de prud'hommes de Paris a :
- Débouté monsieur [P] [F] de sa demande de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse
- Dit que l'employeur n'a pas respecté l'ordre des licenciements économiques
- Condamné la société Directoire Business [Localité 12] à verser à monsieur [P] [F] les sommes suivantes :
3 890 euros au titre du non-respect des critères d'ordre du licenciement ;
Avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement ;
1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Débouté monsieur [P] [F] du surplus de ses demandes ;
- Débouté la société Directoire Business [Localité 12] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne aux dépens.
Monsieur [F] a interjeté appel de ce jugement le 1er juin 2021.
Par conclusions récapitulatives déposées par RPVA le 19 janvier 2024 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, monsieur [F], demande à la Cour de :
- Infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et limité l'indemnité réparant le préjudice résultant du non respect des critères d'ordre du licenciement à 3 890 euros.
- Confirmer le jugement du Conseil des prud'hommes du 3 mai 2021 en ce qu'il a condamné la société pour non-respect des critères d'ordres. Et statuant de nouveau,
- Dire Et Juger que le licenciement de monsieur [P] [F] est sans cause réelle et sérieuse,
- Condamner la société Directoire Business [Localité 12] à payer à monsieur [F] la somme de 50 570,00 euros au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- Condamner la société Directoire Business [Localité 12] à payer à monsieur [F] la somme de 11 670,00 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 1 167,00 euros au titre des congés payés afférents.
A titre principal Condamner la société Directoire Business [Localité 12] à payer à monsieur [F] la somme de 3 890 euros en réparation du préjudice résultant de l'absence d'application des critères d'ordre du licenciement
Et, à titre subsidiaire si le licenciement était considéré comme reposant sur une cause réelle et sérieuse,
condamner la société à la somme de 50 520,00 euros en réparation du préjudice résultant de l'absence d'application des critères d'ordre du licenciement
- Condamner la société Directoire Business [Localité 12] au paiement de la somme de 3 600,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Et Débouter la société de sa demande reconventionnelle à ce titre.
- Condamner la Société Directoire Business [Localité 12] aux entiers dépens en ce compris les sommes découlant de l'article A 444-32 du code de commerce et qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions récapitulatives déposées par RPVA le 20 octobre 2021 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société Directoire Business [Localité 12] demande à la Cour de
Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
- Jugé le licenciement de monsieur [F] fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
- Dit que l'employeur a respecté son obligation de reclassement
- Débouté monsieur [F] de ses demandes au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- Débouté monsieur [F] de sa demande au titre du préavis et des congés payés afférents ;
Infirmer le jugement en ce qu'il a
- Jugé qu'il existait un manquement au respect des critères d'ordre du licenciement ;
- Condamné la société Directoire Business [Localité 12] à payer à monsieur [F] une somme de 3890 euros à titre de dommages et intérêts ;
- Dire et juger que le critère d'ordre des licenciements a été respecté et que monsieur [F] n'a pas demandé de précision à ce titre ;
- Débouter monsieur [F] de sa demande de dommages et intérêts formulés à ce titre ;
- Dire et juger qu'il n'y avait pas lieu à la condamnation de la société Directoire Business [Localité 12] au titre de l'article 700du du code de procédure civile
En revanche, en cause d'appel,
- Condamner monsieur [F] à payer à la société Directoire Business [Localité 12] la somme de 3600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner monsieur [F] aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 décembre 2024 et l'audience de plaidoiries a été fixée au 17 février 2025.
La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
MOTIFS
I - Sur le licenciement
Dans sa rédaction actuelle, applicable à l'espèce l'article L. 1233-3 prévoit que :
' Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par lesalarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :
1 à des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.
Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à :
a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;
b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;
c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;
d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;
2 A des mutations technologiques ;
3 A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;
4 A la cessation d'activité de l'entreprise.
La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise.
Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.'.
Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L.233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.
Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché ».
La lettre de licenciement rappelle le rachat de la société Directoire Business [Localité 12] par la société Directoire Finance Hoding ainsi que des recherches de reclassement au sein du groupe Directoire Finance Hoding mais elle ne répond pas sur la situation du secteur d'activité du groupe et ne fournit aucun élément permettant de déterminer si le secteur d'activité des autres sociétés du groupe connaissent les mêmes difficultés économiques que celles invoquées pour la société directoire Buisnes [Localité 12].
Il sera rappelé que c'est à l'employeur de justifier des éléments nécessaires à la détermination du secteur d'activité du groupe et d'établir la réalité du motif économique au niveau de ce secteur d'activité.
En l'absence de tout élément donné par l'employeur sur le secteur d'activité du groupe, il ne peut être déterminé la consistance du secteur d'activité ni vérifier en quoi était caractérisée l'existence, au niveau du secteur d'activité du groupe auquel la société appartient, de difficultés économiques ou d'une menace pesant sur la compétitivité de ce secteur.
Dès lors le caractère économique du licenciement n'est pas établi, le licenciement de monsieur [F] est sans cause réelle et sérieuse, le jugement sera infirmé.
Il sera fait droit à la demande en paiement de sa demande d'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 50 570 euros compte tenu de son ancienneté de 15 ans et à l'indemnité compensatrice de préavis de 3 mois compte tenu de son statut de cadre soit 11 670 euros et 1167 euros au titre des congés payés y afférents
Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse il n'y a pas lieu d'examiner le non respect des critères d'ordre.
La société Directoire Business [Localité 12] succombant, elle sera condamné au paiement de la somme de 2500 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile,
INFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
CONDAMNE la société Directoire business [Localité 12] à payer à monsieur [F] les sommes de :
- 50 570 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 11 670 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 167 euros au titre des congés payés y afférents ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Directoire Business [Localité 12] à payer à monsieur [F] en cause d'appel la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE les parties du surplus des demandes.
LAISSE les dépens à la charge de la société Directoire Business [Localité 12].
Le Greffier La Présidente