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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 6, 9 avril 2025, n° 23/04934

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

MMJ (SELARLU)

Défendeur :

M. P, Caisse régionale de crédit agricole mutuel d'Ile-de-France, Quatre K (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Braud

Président :

M. Bailly

Conseiller :

Mme Chaintron

Avocats :

Me Lugosi, Me Clément, Me Moisan, Me Surmont, Me Lefebvre, Me Hatem-Lefebvre

TJ Pontoise, du 22 mars 2022

22 mars 2022

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

[P] [X] a constitué en 1969 la société commerciale Byblos ayant pour objet la communication, notamment en matière politique.

Il a ultérieurement constitué la société civile Quatre K qui a pour objet l'acquisition, la gestion et plus généralement, l'exploitation d'un immeuble sis [Adresse 6], à [Localité 9] (Val-d'Oise).

Par acte notarié du 2 mars 1994, [P] [X] a consenti à ses quatre filles une donation-partage portant notamment sur la nue-propriété des parts qu'il détenait dans le capital de la société civile Quatre K.

Par acte authentique reçu le 4 octobre 2002, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de [Localité 11] et d'Île-de-France (ci-après dénommée CRCAM IDF) a consenti à la société civile Quatre K deux prêts in fine, d'un montant de 418 472 euros, ayant pour objet un rachat de compte courant :

' un prêt no 12074785 801 d'un montant de 200 000 euros remboursable sur une durée de 180 mois au taux d'intérêt EURIBOR 3 mois + 0,80 %,

' un prêt no 12074943 801 d'un montant de 218 472 euros remboursable sur une durée de 180 mois au taux d'intérêt de 5,15 % l'an, révisable et plafonné à 7,15 % l'an.

Le capital du prêt était garanti notamment par l'inscription d'une hypothèque par le prêteur sur le bien sis [Adresse 6], à [Localité 9], par un acte de [P] [X] de cautionnement solidaire des engagements souscrits par la société civile Quatre K (à concurrence de 200 000 euros en garantie du prêt no 12074785 801 et à concurrence de 218 472 euros en garantie du prêt no 12074943 801), et par le nantissement par [P] [X] d'un contrat d'assurance vie « Espace Gestion ».

Par jugement du 3 février 2012, le tribunal de commerce de Pontoise a prononcé la clôture de la procédure judiciaire ouverte à l'endroit de la société Byblos pour insuffisance d'actif.

La société civile Quatre K n'a pas procédé au remboursement de ses prêts à leur échéance, à savoir le 9 octobre 2017.

La banque a mis en demeure la société civile Quatre K, par lettre recommandée du 12 janvier 2018, de lui payer la somme de 404 838,08 euros, dans un délai de quinze jours, sous peine de déchéance du terme.

Par exploits en date des 15 et 16 novembre 2018, la société civile Quatre K a assigné en responsabilité devant le tribunal de grande instance de Paris [P] [X] et la CRCAM IDF sur le fondement des articles 1240 et suivants du code civil.

La banque ayant engagé le 27 février 2018 une procédure de saisie immobilière contre la société civile Quatre K, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Pontoise, par jugement d'orientation du 5 février 2019, a notamment :

' fixé la créance de la CRCAM IDF à la somme de 409 372,90 euros arrêtée au 12 février 2018, ' autorisé la vente amiable des biens et droits immobiliers sis à [Localité 9], un immeuble (comprenant deux corps de bâtiments, un hangar, un jardin) sis [Adresse 6], cadastré section AL no [Cadastre 3] d'une surface de 710 mètres carrés, sur la base d'un montant net vendeur minimal de 790 000 euros.

Par arrêt du 24 septembre 2020, la cour d'appel de Versailles a notamment :

' confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il a fixé la créance et autorisé la vente amiable, sauf en ce qu'il a statué sur le montant des indemnités forfaitaires contractuelles ;

' fixé les indemnités contractuelles à 9 179,54 euros pour le contrat de prêt no 1207485 801, et à 11 064,36 euros pour le contrat de prêt no 12074943 802.

Par jugement du 16 mars 2021, le tribunal judiciaire de Pontoise a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société civile Quatre K.

Par exploit en date du 17 mai 2021, [P] [X] a assigné en intervention forcée devant le tribunal judiciaire de Paris la société MMJ, prise en la personne de maître [M] [K], en qualité de mandataire judiciaire de la société civile Quatre K.

Par jugement du 29 juin 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pontoise a constaté la suspension de la procédure de saisie immobilière en raison de la procédure judiciaire ouverte à l'égard de la société civile Quatre K.

Par jugement du 22 mars 2022, le tribunal judiciaire de Pontoise a converti la procédure de redressement judiciaire en procédure de liquidation judiciaire.

Par conclusions du 4 novembre 2022, maître [M] [K] est intervenu volontairement à l'instance en qualité de liquidateur de la société civile Quatre K.

Par jugement contradictoire en date du 13 février 2023, le tribunal judiciaire de Paris a :

' Déclaré sans objet la demande de jonction entre les deux instances RG 18/14746 et RG 21/06691, présentée par [P] [X] ;

' Déclaré recevables l'intervention volontaire de la société MMJ, prise en la personne de maître [M] [K], en qualité de liquidateur de la société civile Quatre K et la constitution de son avocat la société civile professionnelle [V], prise en la personne de maître [E] [V]-[S] ;

' Prononcé la mise hors de cause de maître [Z] [H], en qualité d'administrateur judiciaire de la société civile Quatre K ;

' Déclaré l'action initiée par la société civile Quatre K et reprise par la société MMJ, prise en la personne de maître [M] [K], en qualité de liquidateur de la société civile Quatre K, irrecevable en toutes ses demandes ;

' Déclaré irrecevable la demande reconventionnelle présentée par [P] [X] ;

' Rejeté toutes demandes plus amples ou contraires ;

' Débouté la société civile Quatre K et la société MMJ de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société civile Quatre K :

- la somme de 3000 euros allouée à la CRCAM IDF au titre des frais irrépétibles,

- la somme de 3000 euros allouée à [P] [X] au titre des frais irrépétibles,

- les dépens ;

' Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration du 10 mars 2023, la société MMJ prise en la personne de Maître [M] [K], en qualité de mandataire liquidateur de la société civile immobilière Quatre K a interjeté appel du jugement contre la société civile immobilière Quatre K, [P] [X] et la CRCAM IDF.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 3 novembre 2023, la société d'exercice libéral à responsabilité limitée MMJ, prise en la personne de maître [M] [K], en qualité de mandataire liquidateur de la société civile Quatre K, demande à la cour de :

- RECEVOIR la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de la SOCIETE CIVILE QUATRE K dans son appel et la DECLARER recevable et bien fondée.

Y FAIRE DROIT,

EN CONSEQUENCE,

SUR LA RECEVABILITE,

- INFIRMER le jugement frappé d'appel en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action initiée par la SOCIETE CIVILE QUATRE K et reprise par la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de ladite SOCIETE CIVILE QUATRE K,

ET, STATUANT A NOUVEAU,

- DEBOUTER Monsieur [P] [X] et la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF) de leur fin de non-recevoir tirée de la prescription de cette action initiée par la SOCIETE CIVILE QUATRE K et reprise par la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de ladite SOCIETE CIVILE QUATRE K,

- DECLARER la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de la SOCIETE CIVILE QUATRE K recevable à agir,

SUR LE FOND,

- DIRE ET JUGER que Monsieur [P] [X] et la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF) ont eu un comportement fautif, au préjudice de la SOCIETE CIVILE QUATRE K, qui engage leur responsabilité civile délictuelle, conformément aux dispositions des articles 1240 nouveau et suivants du Code civil,

- CONDAMNER in solidum Monsieur [P] [X] et la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF) à payer à la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de la SOCIETE CIVILE QUATRE K les sommes en principal suivantes :

' 218.472 ', à titre de dommages et intérêts, correspondant au montant du prêt in fine n°120074943 801 0002 détourné par Monsieur [P] [X] agissant de manière concertée et délibérée avec la complicité de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF),

' 200.000 ', à titre de dommages et intérêts, correspondant au préjudice financier subi par la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de la SOCIETE CIVILE QUATRE K, du fait du défaut de placement financier de la somme en principal de 218.472 ' (montant à parfaire),

- ORDONNER, conformément à l'article 1231-6 alinéa 1er nouveau du Code Civil, que les sommes en principal précitées soient augmentées des intérêts au taux légal, à compter du 8 juin 2018, date de la lettre de mise en demeure adressée par le Conseil de la SOCIETE CIVILE QUATRE K à Monsieur [P] [X] et à la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF),

- CONDAMNER in solidum Monsieur [P] [X] et la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF) à payer à la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de la SOCIETE CIVILE QUATRE K, la somme en principal de 25.000 ' à titre de dommages et intérêts, pour résistance abusive et injustifiée, conformément à l'article 1231-6 alinéa 3 nouveau du Code Civil,

- ORDONNER, conformément à l'article 1231-7 alinéa 1 er nouveau du Code Civil, que la somme en principal précitée soit augmentée des intérêts au taux légal à compter de la date délivrance des deux assignations introductives d'instance, soit le 16 novembre 2018,

- ORDONNER la capitalisation des intérêts légaux précités conformément aux dispositions de l'article 1343-2 nouveau du Code Civil,

- INFIRMER le jugement frappé d'appel en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la SOCIETE CIVILE QUATRE K les sommes de 3.000 ' allouées à Monsieur [P] [X] et la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF) au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les dépens de l'article 699 de ce même Code de procédure civile,

ET, STATUANT A NOUVEAU,

- DEBOUTER Monsieur [P] [X] et la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF) de leurs demandes de condamnations au paiement, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, des frais irrépétibles de première instance,

- INFIRMER également le jugement frappé d'appel en ce qu'il a débouté la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de la SOCIETE CIVILE QUATRE K de sa demande de condamnation de Monsieur [P] [X] et de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF) à lui payer la somme de 15.000 ' sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

ET, STATUANT A NOUVEAU,

- CONDAMNER Monsieur [P] [X] et la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF) à lui payer, au titre des frais irrépétibles de première instance, la somme de 15.000 ' sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- INFIRMER le jugement frappé d'appel en ce qu'il a condamné la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de la SOCIETE CIVILE QUATRE K aux dépens de première instance,

ET, STATUANT A NOUVEAU,

- CONDAMNER in solidum Monsieur [P] [X] et la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF) au paiement des entiers dépens de première instance,

- CONFIRMER le jugement frappé d'appel en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande reconventionnelle de Monsieur [P] [X] tendant à voir condamner la SOCIETE CIVILE QUATRE K au paiement de la somme de 200.000 ' au titre du remboursement de son compte courant d'associé,

- DEBOUTER Monsieur [P] [X] et la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF) de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires, en ce compris la demande parfaitement irrecevable et, subsidiairement, mal fondée formée par Monsieur [P] [X] de voir condamner la SOCIETE CIVILE QUATRE K au paiement de la somme de 200.000 ' au titre du remboursement de son compte courant d'associé,

SI, PAR EXTRAORDINAIRE, la Cour d'Appel de céans jugeait Monsieur [P] [X] recevable à agir du chef de sa demande reconventionnelle tendant à voir condamner la SOCIETE CIVILE QUATRE K au paiement de la somme de 200.000 ', sachant que cette demande est dépourvue de tout fondement et sera rejetée, alors, dans cette hypothèse, CONDAMNER Monsieur [P] [X] à payer, à la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de la SOCIETE CIVILE QUATRE K, la somme en principal de 57.536,11 ' correspondant au solde débiteur de son compte courant d'associé,

SI, PAR EXTRAORDINAIRE EGALEMENT, une condamnation pécuniaire était prononcée à l'encontre de la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de la SOCIETE CIVILE QUATRE K alors, dans cette hypothèse, ORDONNER une compensation entre cette condamnation et celle qui sera mise à la charge de Monsieur [P] [X],

Y AJOUTANT,

- CONDAMNER in solidum Monsieur [P] [X] et la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF) à payer à la SELARLU MMJ prise en la personne de Maître [M] [K] ès-qualité de Mandataire Liquidateur de la SOCIETE CIVILE QUATRE K la somme de 20.000 ' au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- CONDAMNER in solidum Monsieur [P] [X] et la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 11] ET D'ILE-DE-FRANCE (CRCAM IDF), aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Maryline LUGOSI, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 24 juillet 2023, la société coopérative à capital et personnel variables Caisse régionale de crédit agricole mutuel de [Localité 11] et d'Île-de-France (CRCAM IDF) demande à la cour de :

Principalement,

' Dire et juger la SELARLU MMJ, Mandataire Liquidateur prise en la personne de Maître [M] [K], irrecevable en ses demandes d'appel,

' Dire et juger irrecevable l'action initiée par la SOCIETE CIVILE QUATRE K et reprise par la SELARLU MMJ, Mandataire Liquidateur prise en la personne de Maître [M] [K], tendant à voir condamner la CRCAM IDF à des dommages et intérêts,

' Dire et juger que l'action en responsabilité et en dommages et intérêts de la SOCIETE CIVILE QUATRE K, reprise par la SELARLU MMJ, Mandataire Liquidateur prise en la personne de Maître [M] [K], à l'encontre de la CRCAM IDF est prescrite depuis le 19 juin 2013 en application de l'article 2224 du code civil.

' En conséquence, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action initiée par la SOCIETE CIVILE QUATRE K et reprise par la SELARLU MMJ, Mandataire Liquidateur prise en la personne de Maître [M] [K],

Subsidiairement,

' Dire et juger la SELARLU MMJ, prise en la personne de Maître [M] [K], es-qualités de mandataire liquidateur de la SCI QUATRE K mal fondée en son action en responsabilité,

' Dire et juger que la SELARLU MMJ, prise en la personne de Maître [M] [K], es-qualités de mandataire liquidateur de la SCI QUATRE K, ne justifie ni d'une faute de la CRCAM IDF, ni d'un préjudice,

' En conséquence, débouter la SELARLU MMJ, prise en la personne de Maître [M] [K], es-qualités de mandataire liquidateur de la SCI QUATRE K de toutes ses demandes, fins et prétentions dirigées à l'encontre de la CRCAM IDF,

Très subsidiairement,

' Dire et juger que les dommages et intérêts qui pourraient être mis à la charge de la CRCAM IDF solidairement avec Mr [P] [X] ne pourront tout au plus s'élever qu'à la somme de 218.472 ',

' Dire qu'en tout état de cause les dommages et intérêts qui pourraient être mis à la charge de la CRCAM IDF viendront en compensation avec la créance détenue par la CRCAM IDF à l'encontre de la SELARLU MMJ, prise en la personne de Maître [M] [K], es-qualités de mandataire liquidateur de la SCI QUATRE K.

En tout état de cause :

' Fixer au passif de la liquidation de la SCI QUATRE K :

- la somme de 5.000 ' au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit de la CRCAM IDF,

- les dépens de 1ère instance et d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 6 janvier 2025, [P] [X] demande à la cour de :

A titre principal :

- Confirmer le jugement rendu le 13 février 2023 par le tribunal judiciaire de Paris (9ème chambre, 1ère section RG n°18/14746) en ce qu'il a (i) déclaré l'action initiée par la SCI Quatre K et reprise par la Selarlu MMJ prise en la personne de Maître [M] [K], ès qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Quatre K irrecevable en toutes ses demandes, et en conséquence (ii) débouté celle-ci de « toutes demandes plus amples et contraires », celles-ci étant irrecevables et subsidiairement dénuées de fondement,

- Infirmer le jugement rendu le 13 février 2023 par le tribunal judiciaire de Paris (9ème chambre, 1ère section RG n°18/14746) en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande reconventionnelle formée par M. [P] [X],

Et, statuant à nouveau :

o Fixer le montant de la créance de Monsieur [P] [X]au passif de la SCI Quatre K représentée par la Selarlu MMJ prise en la personne de Maître [M] [K], ès qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Quatre K, au titre du préjudice subi par ce dernier du fait du non-remboursement de son compte courant d'associé à un montant de 200.000 euros ;

o Débouter laSelarlu MMJ prise en la personne de Maître [M] [K], ès qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Quatre K de toutes ses demandes, fins et conclusions, en ce compris les demandes de capitalisation d'intérêts, celles-ci étant irrecevables et subsidiairement dénuées de fondement,

o Ordonner la compensation entre toute somme qui serait mise à la charge de M. [P] [X] à titre de dommages et intérêts avec la créance que ce dernier détient sur la SCI Quatre K au titre du non-remboursement de son compte courant d'associé à hauteur de 200.000 euros.

A titre subsidiaire :

- Confirmer le jugement rendu le 13 février 2023 par le tribunal judiciaire de Paris (9ème chambre, 1ère section RG n°18/14746) en toutes ses dispositions,

En tout état de cause et y ajoutant :

- Débouter la Selarlu MMJ prise en la personne de Maître [M] [K], ès qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Quatre K de toutes ses demandes, fins et conclusions, en ce compris les demandes de capitalisation d'intérêts, celles-ci étant irrecevables et subsidiairement dénuées de fondement,

- Ordonner la compensation entre toute somme qui serait mise à la charge de M. [P] [X] à titre de dommages et intérêts ou autre avec la créance que ce dernier détient sur la SCI Quatre K au titre du non-remboursement de son compte courant d'associé à hauteur de 200.000 euros.

- Condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de [Localité 11] et d'île de France (CRCAM IDF) à relever et garantir M. [P] [X] de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son égard et la condamner in solidum au paiement des sommes mises à la charge de la Selarlu MMJ prise en la personne de Maître [M] [K], ès qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Quatre K au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la Selarlu MMJ prise en la personne de Maître [M] [K], ès qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Quatre K à verser à M. [P] [X] une somme de 20.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Fixer à 20.000 euros la créance de M. [X]sur la SCI Quatre K au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et condamner la Selarlu MMJ prise en la personne de Maître [M] [K], ès qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Quatre K au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés en frais privilégiés de la liquidation judiciaire.

La déclaration d'appel et les conclusions d'appelant ont été signifiées à personne par exploits en date du 20 avril 2023 et du 15 juin 2023 à la société civile immobilière Quatre K, qui n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 janvier 2025 et l'audience fixée au 11 février 2025.

CELA EXPOSÉ,

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en responsabilité :

L'appelante critique le point de départ du délai de prescription retenu par les premiers juges, à savoir le jour où la société Quatre K a eu connaissance de l'absence de nantissement de son contrat d'assurance vie par [P] [X], soit le 3 décembre 2004. Elle soutient que la prescription n'a pu courir que du jour où la société Quatre K a eu connaissance de l'absence de contrat d'assurance vie par suite du détournement des fonds qui devaient y être placés, ou par suite du dénouement du contrat à la demande de [P] [X], soit le 20 octobre 2017, date d'un rendez-vous de la gérante de la société Quatre K avec la CRCAM IDF.

Le tribunal a néanmoins retenu à raison que la société Quatre K a été informée dès le 3 décembre 2004 par la CRCAM IDF de l'absence de nantissement du contrat d'assurance vie souscrit par [P] [X]. Il n'est en effet pas sérieusement contesté que le conseil de la société Quatre K a reçu de l'établissement de crédit la réponse suivante :

« Il est exact qu'un virement de 218 472 euros a été effectué du compte de la SCI sur le compte de Monsieur [X]. Contrairement à ce que vous nous indiquez, nous n'avons pas encaissé cette somme qui devait revenir à ce dernier conformément à l'objet du prêt (rachat de son compte courant d'associé). En tout état de cause nous n'avions juridiquement pas la faculté de nous substituer à Monsieur [X] pour apporter la garantie prévue.

« Cette opération a permis à celui-ci de procéder à la souscription d'un contrat d'assurance-vie. Toutefois, postérieurement, contrairement à l'engagement figurant dans le contrat de prêt accordé à la SCI dans la rubrique Garanties, aucun contrat d'assurance-vie n'a jamais été nanti à notre profit.

« Malgré nos demandes réitérées Monsieur [X] a toujours refusé de nous accorder la garantie que nous lui demandions et nous a même demandé de procéder au rachat de son contrat. » (pièce no 10 de [P] [X])

Quoi qu'il en soit, l'appelante admet que l'utilisation de la somme de 218 472 euros à une autre fin que la garantie des emprunts en cause fut révélée à la société Quatre K par une attestation de la CRCAM IDF du 28 juin 2005 (pièce no 13 de l'appelante) concernant un protocole d'accord transactionnel conclu le 25 avril 2005 avec [P] [X] (pièce no 2 de [P] [X]), attestation dont la société Quatre K n'aurait eu connaissance que « très tardivement », « très longtemps après sa rédaction ». L'appelante expose qu'en exécution de ce protocole, la CRCAM IDF a accepté :

' d'une part, de libérer [P] [X] de ses engagements de caution moyennant le payement d'une somme globale, forfaitaire et définitive de 100 000 euros provenant du contrat d'assurance vie souscrit avec les fonds du second prêt in fine de 218 472 euros,

' d'autre part, de lever le nantissement dudit contrat d'assurance vie afin de permettre à [P] [X] de payer l'indemnité transactionnelle précitée de 100 000 euros et de détourner à son profit le solde de 118 472 euros.

Or, [P] [X] prouve que la société Quatre K s'est vue remettre l'attestation précitée du 28 juin 2005 au plus tard le 15 mars 2006, lors d'une communication de pièce dans une autre procédure (pièce no 18 de [P] [X] : bordereau de communication de pièces).

Même en faisant courir la prescription de l'action de la société Quatre K à partir de cette dernière date, le délai était expiré le 19 juin 2013. En définitive, il n'est pas produit en appel de nouvel argument ou de nouvelles pièces de nature à remettre en cause les motifs exacts et pertinents par lesquels le tribunal a déclaré irrecevable comme prescrite l'action introduite par la société Quatre K.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive :

Outre que la société MMJ n'invoque dans sa discussion aucun moyen au soutien de sa prétention tendant à la condamnation in solidum de [P] [X] et de la CRCAM IDF à lui payer la somme en principal de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée, la défense des parties intimées ne revêt pas de caractère abusif puisque la fin de non-recevoir qu'elles opposent à l'appelante est fondée. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il rejette ce chef de demande.

Sur la recevabilité de la demande reconventionnelle de [P] [X] :

L'article 70 du code de procédure civile dispose :

« Les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

« Toutefois, la demande en compensation est recevable même en l'absence d'un tel lien, sauf au juge à la disjoindre si elle risque de retarder à l'excès le jugement sur le tout. »

À la suite du tribunal, la cour estime que la demande reconventionnelle de [P] [X] de fixation de sa créance au passif de la société Quatre K au titre du préjudice qu'il a subi du fait du non-remboursement de son compte courant d'associé, ne se rattache pas par un lien suffisant aux prétentions originaires de la société Quatre K tendant à la condamnation de [P] [X] au payement de dommages et intérêts pour n'avoir pas constitué la garantie prévue par les contrats de prêt du 4 octobre 2002. En effet, le fait que ces contrats aient eu pour objet le remboursement du compte courant d'associé de [P] [X] ne suffit pas à créer un tel lien entre la faute délictuelle qui lui est reprochée et la dette de la société à son égard. Aussi bien conteste-t-il formellement que la somme à verser sur un contrat d'assurance vie nanti ait dû servir à rembourser le capital des prêts in fine, faisant valoir d'une part, que la capitalisation de l'assurance vie n'était qu'éventuelle, d'autre part que celle-ci ne pouvait qu'accroître la garantie de la CRCAM IDF, les sommes placées sur l'assurance vie ayant vocation à l'arrivée à échéance des prêts à être acquises à [P] [X] qui en retrouvait la libre disposition.

Dès lors que les sociétés Quatre K et MMJ sont irrecevables en leurs demandes de condamnation de [P] [X] à dommages et intérêts, la demande de compensation présentée par celui-ci devient sans objet, et ne peut fonder la recevabilité de sa demande reconventionnelle en fixation de créance. Le jugement querellé sera confirmé de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. L'appelante en supportera donc la charge.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :

1o À l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

2o Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent.

La somme allouée au titre du secundo ne peut être inférieure à la part contributive de l'État majorée de 50 %.

L'appelante et l'intimé étant jugés irrecevables en leurs demandes réciproques, chacun conservera la charge de ses frais irrépétibles d'appel.

En revanche, la société MMJ sera condamnée ès qualités à payer à la CRCAM IDF la somme de 3 000 euros au titre de ces frais irrépétibles.

LA COUR, PAR CES MOTIFS,

CONFIRME le jugement ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la société MMJ en qualité de mandataire liquidateur de la société civile Quatre K à payer la somme de 3 000 euros à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de [Localité 11] et d'Île-de-France sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société MMJ en qualité de mandataire liquidateur de la société civile Quatre K aux dépens de l'appel exposés par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de [Localité 11] et d'Île-de-France ;

LAISSE à la charge de [P] [X] et de la société MMJ en qualité de mandataire liquidateur de la société civile Quatre K les dépens par eux exposés en appel ;

REJETTE toute autre demande plus ample ou contraire.

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