CA Bordeaux, ch. soc. A, 19 mars 2025, n° 22/03319
BORDEAUX
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE - SECTION A
--------------------------
ARRÊT DU : 19 MARS 2025
PRUD'HOMMES
N° RG 22/03319 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MZH6
Madame [G] [K]
c/
S.A.S. BPCE ASSURANCES
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
à :
Me Alain LEBEAU, avocat au barreau de PARIS,
Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE
Me Marie-Haude NEDELEC, avocat au barreau de BORDEAUX
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 10 juin 2022 (R.G. n°19/01512) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 08 juillet 2022,
APPELANTE :
Madame [G] [K]
née le 29 juin 1977 à [Localité 3] de nationalité française Profession : Gestionnaire en assurance, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Marie-Haude NEDELEC, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
S.A.S. BPCE ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 2]
N° SIRET : 350 663 860
assistée de Me Alain LEBEAU, avocat au barreau de PARIS, représentée par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 janvier 2025 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie Hylaire, présidente, chargée d'instruire l'affaire,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvie Hylaire, présidente
Madame Sylvie Tronche, conseillère
Madame Laure Quinet, conseillère
Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,
lors du prononcé : Sandrine Lachaise
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [G] [K], née en 1977, a été engagée en qualité de gestionnaire de sinistre habitations par la société BPCE Assurances, devenue société BPCE Assurances IARD, ci-après dénommée société BPCE, par contrat de travail à durée déterminée à compter du 31 juillet 2007.
Par la suite, les parties ont conclu un contrat à durée indéterminée prenant effet le 2 janvier 2008.
En dernier lieu, Mme [K] occupait le poste de télégestionnaire indemnisation, classe 3, de la convention collective nationale des sociétés d'assurances.
Elle était notamment placée sous la responsabilité de Mme [V].
Au cours de la relation contractuelle, Mme [K] a bénéficié :
- d'un congé parental à temps plein en 2015 ;
- d'un temps partiel pour création d'entreprise de deux années (mai 2016 à mai 2018).
Au terme de son congé de création d'entreprise de 2 ans, fin mai 2018, Mme [K] a repris son activité à temps plein après avoir suivi une formation de 42,5 jours sur la période du 20 novembre 2017 au 4 décembre 2018.
Par courriel du 3 juillet 2018, Mme [E] a sollicité un « licenciement amiable »
Par courriers du 30 juillet et du 28 août 2018, la société BPCE Assurances a demandé à Mme [K] de justifier ses absences entre le 2 et 13 juillet 2018 et depuis le 30 juillet 2018.
Par lettre datée du 5 septembre 2018, Mme [K] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 17 septembre 2018.
Mme [K] a ensuite été licenciée pour faute grave par lettre datée du 27 octobre 2018 au motif de comportements fautifs et réitérés qui ont perturbé le bon fonctionnement de son service et d'absences injustifiées.
A la date du licenciement, Mme [K] avait une ancienneté de11 ans et deux mois et la société occupait à titre habituel plus de 10 salariés.
Par requête reçue le 24 octobre 2019, Mme [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités ainsi que des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour exécution déloyale du contrat de travail.
Par jugement rendu le 10 juin 2022, le conseil de prud'hommes a :
- constaté le bien fondé du licenciement pour faute grave de Mme [K],
- débouté Mme [K] de sa demande de requalification du licenciement,
- constaté l'irrecevabilité des demandes de rappel de salaire du mois de septembre 2018 ainsi que sur le solde de tout compte,
- débouté Mme [K] de sa demande de rappel de salaire du mois de septembre 2018,
- débouté Mme [K] de sa demande au titre du solde de tout compte,
- débouté Mme [K] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
- débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance (sic).
Par déclaration communiquée par voie électronique le 8 juillet 2022, Mme [K] a relevé appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 9 janvier 2025, Mme [K] demande à la cour :
- d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il :
* a constaté le bien fondé de son licenciement pour faute grave,
* l'a déboutée de sa demande de requalification du licenciement,
* a constaté l'irrecevabilité des demandes de rappel de salaire du mois de septembre 2018 ainsi que sur le solde de tout compte,
* l'a déboutée de ses demandes de rappel de salaire du mois de septembre 2018, au titre du solde de tout compte et de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
* a débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.
Statuant à nouveau sur le fond, de :
Sur le licenciement,
- à titre principal, condamner la société BCPE Assurances au paiement des sommes
suivantes :
* 6.559,27 euros à titre d'indemnité de licenciement,
* 4.070,56 euros au titre du préavis,
* 407,05 euros à titre de congés payés sur préavis,
* 28.500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- à titre subsidiaire, condamner la société BCPE Assurances au paiement des sommes suivantes :
* 6.559,27 euros à titre d'indemnité de licenciement,
* 4.070,56 euros au titre du préavis,
* 407,05 euros à titre de congés payés sur préavis,
Sur les autres demandes,
- condamner la société BCPE Assurances au paiement des sommes suivantes :
* 3.112,32 euros au titre du solde de tout compte,
* 2.118,58 euros à titre de rappel de salaire sur le mois de septembre 2018, * 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
En tout état de cause,
- dire que les sommes octroyées porteront intérêt au taux légal depuis la saisine,
- condamner la société BCPE Assurances au paiement de la somme de 2.000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 13 janvier 2025, la société BPCE demande à la cour de la déclarer recevable et bien fondée en ses écritures et, y faisant droit, de déclarer Mme [K] mal fondée en son appel et l'en débouter, et de :
A titre principal :
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bordeaux en date du 10 juin 2022,
A titre subsidiaire :
- fixer la rémunération moyenne de référence à 2.035,28 euros brut,
- limiter le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et
sérieuse à 3 mois de salaire, soit 6.105,84 euros brut,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bordeaux pour le surplus,
En tout état de cause, statuant à nouveau, condamner Mme [K] à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 janvier 2025 et l'affaire a été fixée à l'audience du 28 janvier 2025.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la rupture du contrat de travail
La lettre de licenciement adressée le 26 octobre 2018 à Mme [K] est ainsi rédigée :
« [...]
En application des dispositions de l'articlre 90 de la convention collective des sociétés d'assurances, par courrier remis en main propre contre décharge en date du 24 septembre 2018, nous vous avons convoquée à la réunion du Conseil fixée au 18 octobre 2018 à laquelle vous ne vous êtes pas présentée.
A l'issue de la réunion du Conseil qui a fait l'objet d'un procès-verbal qui vous a été communiqué par courrier recommandé avec accusé de réception le 22 octobre 2018, les membres du Conseil ont exprimé leur avis sur la mesure de licenciement envisagée.
Par la présente, nous sommes au regret de vous notifier notre décision de vous licencier pour faute grave en raison de vos absences injustifiées.
En effet, nous avons constaté plusieurs absences pour lesquelles vous n'avez à aucun moment ourni de justificatifs:
- 2 au 13 juillet 2018, vous étiez absente à votre poste de travail sans en avoir informé votre manager et sans n'avoir fourni de justification.
- du 30 juillet au 26 août 2018, vous étiez absente à votre poste de travail sans en avoir informé votre manager et sans n'avoir fourni de justification.
- Le 31 août 2018, vous étiez absente à votre poste de travail sans en avoir informé votre manager et sans n'avoir fourni de justification.
- Les 6 et 7 septembre 2018, vous étiez absente à votre poste de travail sans en avoir informé votre manager et sans n'avoir fourni de justification.
- Les 15 et 24 septembre 2018, vous étiez absente à votre poste de travail sans en avoir informé votre manager et sans n'avoir fourni de justification.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 30 juillet 2018, nous vous avons demandé de justifier vos absences. Sans réponse et sans justification de votre part, le 28 août 2018, nous vous avons mis en demeure par courrier avec accusé de réception de justifier à nouveau, vos absences et/ou de reprendre le travail dans les meilleurs délais.
Nous vous avons rappelé à plusieurs reprises les dispositions de notre règlement intérieur, qui prévoient que toute absence doit être justifiée dans les 48 heures maximales, sauf cas de force majeure (art 8.2 et art.8.3).
Nous n'avons à ce jour, reçu aucun justificatif faisant suite à vos absences.
En sus de contrevenir aux dispositions de notre règlement intérieur, vos absences ont eu pour conséquence de perturber particulièrement le bon fonctionnement du service et la bonne marche de l'entreprise, dès lors que vos absences étaient imprévisibles.
Les explications recueillies auprès de vous lors de notre entretien n'ont pas permis de modifier notre décision de vous licencier,
Pour ces raisons et dès aujourd'hui, la poursuite de notre collaboration n'est plus envisageable et nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave.
Le licenciement prendra donc effet immédiatement à la date de première présentation de cette lettre et votre solde de tout compte sera arrêté à cette date, sans indemnité de préavis ni de licenciement.
[...] ».
Pour voir infirmer le jugement déféré, Mme [K] invoque le climat délétère ayant entouré sa formation de Responsable Qualité Sécurité Environnement, sa demande à ce titre ayant été considérée manifestement comme malvenue par sa hiérarchie et ayant conduit à de nombreux dysfontionnements tels que :
- des erreurs sur le nombre d'heures de son compteur du CPF,
- le non-paiement de ses heures de formation,
- une augmentation indue de son salaire malgré ses alertes,
- des disparitions des fichiers RH (contrat apparaissant comme suspendu),
- des accès refusés à la boîte courriel et aux logiciels;
- des erreurs récurrentes de planning,
- l'absence de tenue d'entretien individuel,
- l'établissement de plannings sans prise en compte des dates de formation,
- Etc [sic].
Selon l'appelante, ces difficultés seraient attestées par trois collègues de travail, Mesdames [C] et [M] et M. [R].
Mme [K] ajoute qu'un climat d'intimidations et de menaces s'est instauré à son égard et ce, malgré ses doléances tant auprès de l'employeur que des représentants du personnel ou encore de la responsable des ressources humaines et, enfin, du médecin du travail, notamment lors de la visite du 28 mai 2018.
Mme [K] fait ensuite valoir que ses arrêts de travail étaient motivés par son état d'épuisement professionnel, son médecin traitant attestant de la dégradation de son état de santé en lien avec ses conditions de travail.
Elle ajoute qu'une 'réelle problématique' des conditions de travail était présente sur le site de [Localité 4] avec notamment un taux d'absentéisme très élévé et d'autres salariés en situation de souffrance au travail.
Elle souligne enfin, ainsi que l'a relevé le conseil de prud'hommes, qu'elle n'a obtenu aucune réponse à ses nombreux courriels, l'absence de démarche du directeur des ressources humaines ainsi que la défaillance de ce service pour ne pas avoir pris en compte le sérieux de la situation.
Mme [K] en déduit que l'employeur a manqué à ses obligations légales de bonne foi et d'exécution loyale du contrat de travail et, en particulier, à son obligation de prévention et de sécurité et que ses absences ne sont pas injustifiées car elles étaient imputables au contexte relationnel.
* La société intimée conclut à la confirmation du jugement déféré exposant que les absences injustifiées de Mme [K] sont à l'origine de son licenciement et soulignant que ses nombreux courriers invitant la salariée à justifier de ses absences sont restés sans réponse.
Elle conteste notamment les accusations portées à son encontre par Mme [K] quant à des comportements de la direction qui auraient engendré la dégradation de son état de santé, soulignant que la salariée s'est contentée de s'absenter sans motif valable, ses déclarations faites auprès du médecin du travail en mai 2018, soit près de 5 mois avant la notification de son licenciement ne pouvant caractériser un manquement de l'employeur à ses obligations, d'autant que le médecin du travail ne lui a adressé aucun signalement suite à cette visite du 28 mai 2018.
La société ajoute que les absences de Mme [K], imprévisibles et imprévues, étaient nécessairement de nature à perturber le fonctionnement de son service.
Elle fait également valoir que contrairement à ce que prétend la salariée, il y a eu des échanges entre les parties, M. [T], directeur des ressources humaines ayant notamment accusé réception de sa demande de mobilisation de son compte personnel de formation ainsi que de sa demande de rupture conventionnelle, celle-ci ayant été refusée dans un délai de deux mois, non excessif compte tenu de la période estivale
***
L'employeur ayant choisi de se placer sur le terrain d'un licenciement pour faute grave doit rapporter la preuve des faits allégués et démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié au sein de l'entreprise.
Les absences de Mme [K] à son poste de travail, sanctionnées par la lettre de licenciement ne sont pas contestées.
Ces absences, sans arrêts de travail pour maladie, se sont ainsi succédé selon son propre relevé :
- du 2 au 13 juillet 2018,
- du 30 juillet au 24 août 2018,
- le 31 août 2018,
- les 6 et 7 septembre 2018,
- le 24 septembre 2018.
Mme [K] n'a pas répondu aux mises en demeure qui lui ont été adressées les 30 juillet et 28 août 2018 d'avoir à justifier ses absences, s'étant limitée à indiquer le 9 juillet que son absence de ces derniers jours ne serait pas justifié car son médecin était en vacances.
Mme [K] soutient que ses absences étaient justifiées par les manquements de l'employeur à ses obligations tant au titre de son obligation de sécurité que de son obligation d'exécution loyale du contrat.
Elle fait état notamment des difficultés opposées par son employeur à la mise en oeuvre de son congé de formation.
La cour relève que sa demande à ce titre, présentée le 28 juin 2017, a été acceptée par la société par courrier du 7 septembre 2017 et que Mme [K] a pu suivre cette formation prévue à compter du 7 novembre 2017, étant observé que la teneur de l'entretien du 28 juillet 2017 à ce sujet ne repose que sur les seules déclarations de la salariée.
Mme [K] fait ensuite valoir que l'employeur, ayant été contraint d'accepter ce congé de formation, pour ne pas avoir répondu dans le délai d'un mois qui lui était imparti, a alors adopté une attitude de menaces et d'intimidations à son égard.
Ces menaces et intimidations ne sont circonstanciées par aucun fait précis et/ou daté et ne reposent que sur le ressenti tel qu'exposé par Mme [K] et relaté par celle-ci auprès des médecins qu'elle a consultés (médecin traitant et médecin du travail).
A cet égard, les déclarations faites par son compagnon ou trois de ces collègues ne permettent pas de retenir qu'ils auraient personnellement constaté les difficultés alléguées, évoquées dans des termes généraux et non circonstanciés :
- 'elle a subi tout un tas de pressions successives comme les applications au travail qui ne fonctionnaient pas, uniquement pour elle, des accès refusés, des erreurs de salaire, d'emploi du temps et le tout accompagné de pressions orales de sa hiérarchie' sans plus de précision . 'elle a dû se battre pour obtenir le droit 'légitime' de faire sa formation pendant que les RH laissaient traîner les choses, elle s'épuisait ...', selon Mme [M] : la cour relève qu'aucune précision n'est apportée sur les 'pressions' exercées et que le délai de deux mois de traitement de la demande de congé de formation présentée juste avant les vacances d'été, n'était pas excessif, Mme [K] ayant pu suivre celle-ci aux dates prévues ;
- le compagnon de Mme [K] évoque lui aussi des intimidations, du chantage, des paroles pas respectées, là encore sans aucune précision ainsi que des difficultés informatiques qu'il a essayé de débloquer et qu'elle était la seule à rencontrer, précisant 'je ne formulerai aucun soupçon' ;
- 'elle était juste malade de ce qu'elle vivait au quotidien et des difficultés qu'elle rencontrait sans aide', selon Mme [C] qui évoque des soucis d'informatique, de paie, de congés de planning et de formation obligatoire dont le témoin indique que Mme [K] n'a pas pu suivre cette formation, ce qui est faux.
Au vu des pièces produites par Mme [K], les difficultés rencontrées et établies sont les suivantes :
- des difficultés de badgeage : des pièces produites, cette difficulté se serait produite au cours dune seule journée le 9 novembre 2017 soit plusieurs mois avant les absences de Mme [K] ;
- des difficultés dans la gestion de son planning et de sa situation administrative durant son congé de formation soit, là encore, plusieurs mois auparavant, et, au demeurant résolues (courriels des 30 octobre et 10 novembre 2017) ;
- une erreur sur le calcul de ses salaires, en novembre et décembre 2017 au moment de son congé de formation : le remboursement du trop-perçu, qui lui a été explicité au cours d'un entretien n novembre 2017 et par un courriel du 26 décembre 2017, dont le montant n'est pas contesté par Mme [K], a été échelonné par l'employeur.
De ces éléments, il ressort que les difficultés rencontrées, au demeurant d'une gravité relative, datent de plus de 6 mois avant les absences de la salariée et ne sont pas de nature à justifier celles-ci.
Par ailleurs, si Mme [K] invoque un manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur, les 'inquiétudes' formulées en novembre 2017 à propos de ses difficultés de planning avaient été résolues au vu des pièces produites et les 'alertes' qu'elle invoque, adressées à un représentant syndical sont postérieures au déclenchement de la procédure de licenciement.
Enfin, il ne peut qu'être relevé que suite à sa demande de rupture à l'amiable de son contrat par courrier du 3 juillet 2018 dans lequel elle invoquait ses difficultés, Mme [K] n'a pas réintégré son poste de travail, se trouvant soit en absences non justifiées, soit en arrêt de travail pour maladie, soit encore en congés payés, étant observé que l'employeur n'était pas tenu de répondre à sa demande de rupture dans un délai contraint et en avait au surplus accusé réception dès le 9 juillet.
Mme [K] invoque aussi une 'fraude' à la garantie procédurale soutenant qu'il y a eu une connivence entre la direction et le représentant de son syndicat, M. [Y], car il aurait été convenu d'un licenciement pour faute simple si elle ne solicitait pas la réunion du conseil, prévu par la convention collective.
L'existence du 'deal' proposé à Mme [K] semble découler des termes de la réponse faite par M. [Y] le 18 octobre 2018.
Cependant, la cour relève que le conseil qui doit seulement, aux termes de l'article 90 de la convention collective applicable, être consulté par l'employeur, a été réuni et a émis un avis favorable au licenciement au cours de la réunion du 18 octobre 2018, à raison de 4 voix sur cinq, dont celle de M. [Y], en sorte que même si celui-ci s'était opposé au licenciement, l'avis du conseil restait majoritairement favorable au licenciement, cet avis étant en tout état de cause seulement consultatif.
Par ailleurs, contrairement à ce que soutient Mme [K], le compte-rendu de cette réunion, produit par la société, est signé par tous les membres présents et mentionne qu'une vérification sera faite par l'entreprise au sujet du salaire de Mme [K] pour le mois de septembre.
La réitération des absences non justifiées dans le délai de 2 mois précédant l'engagement de la procédure de licenciement le 5 septembre 2018 autorisait l'employeur à faire état de celles à compter du 2 juillet 2018 nonobstant les règles de la prescription.
Même si, à l'évidence, l'absence du 24 septembre 2018 n'a pas pu être évoquée au cours de l'entretien préalable au licenciement du 17 septembre 2018, seule cette absence ne pouvait être visée au rang des motifs de la rupture.
Il reste néanmoins établi que Mme [K] s'est de manière réitérée et prolongée autorisée à ne pas se présenter à son poste de travail et, ce sans en justifier ni même en prévenir son employeur, la durée de ces absences représentant plus d'un mois à la date à laquelle la procédure de licenciement a été engagée, la seule situation de congé de son médecin traitant ne pouvant légitimer l'absence de production d'arrêts de travail pour maladie, si son état de santé le justifiait réellement.
L'obligation d'accomplir la prestation de travail est l'une des obligations principales du salarié.
Ainsi et indépendamment de la désorganisation découlant des absences imprévisibles et imprévues de Mme [K] et face à l'absence de réponse aux deux mises en demeure préalables de la société, l'attitude de la salariée caractérise une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise et justifiant son licenciement.
Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Mme [K] de ses demandes principales et subsidiaires au titre de la rupture de son contrat.
Sur la demande en paiement du salaire du mois de septembre 2018
Mme [K] sollicite le paiement de la somme de 2.118,58 euros à titre de rappel de salaire pour le mois de septembre 2018, estimant que les retenues opérées sont en totale opposition avec les dates indiquées dans la lettre de licenciement.
Ainsi que le fait valoir la société, les retenues opérées sur le bulletin de paie du mois de septembre 2018 correspondent aux absences non justifiées de la salariée durant les mois de juillet et août 2018 (à raison de 41 jours), les dates mentionnées correspondant au calendrier de ses absences versé aux débats par Mme [K].
De la même manière, l'imputation de jours de congés payés (soit 4 jours en août) correspond à ce calendrier.
Le jugement déféré qui a débouté Mme [K] de sa demande en paiement à ce titre sera donc confirmé.
Sur la demande en paiement au titre du solde de tout compte
Mme [K] sollicite le paiement de la somme de 3.112,32 euros au titre du solde de tout compte.
Aucune explication n'est donnée dans ses écritures au sujet de cette demande et le solde de tout compte n'est pas versé aux débats, la pièce 23 de Mpme [K] contenant uniquement l'attestation Pôle Emploi et le certificat de travail.
Faute de pouvoir analyser cette demande, la cour confirme le jugement déféré qui a débouté Mme [K] de sa demande de ce chef.
Sur la demande au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail
Mme [K] sollicite la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts au motif d'un manquement de l'employeur à son obligation d'exécution loyale du contrat invoquant le retard dans la délivrance des documents de fin de contrat et dans le paiement de l'indemnité de congés payés.
Il appartient à Mme [K] de rapporter la preuve du manquement de l'employeur à l'obligation lui incombant aux termes de l'article L. 1222-1 du code du travail.
S'agissant du retard dans le paiement de l'indemnité de congés payés, le décalage au 27 du mois suivant le licenciement intervenu le 27 octobre 2018 ne peut être considéré comme caractérisant la mauvaise foi de l'employeur, compte tenu des délais habituels de traitement des paies.
S'agissant de l'attestation Pôle Emploi, le document qu'elle produit qui est incomplet, ne comporte pas de date et, en tout état de cause, ne pouvait être établi qu'après le paiement de l'indemnité de congés payés.
Quant au fait que l'employeur ait mentionné '0" au titre du salaire perçu pour le mois de décembre 2017, il a été expressément précisé que c'était à raison de retenues pour le remboursement de sommes perçues, la cour ayant déjà relevé que le montant du trop-perçu n'était pas contesté par la salariée.
Enfin, le certificat de travail versé aux débats est daté du 27 octobre 2018.
En considération de ces éléments et de l'absence de démonstration d'un manquement de l'employeur à ses obligations, le jugement déféré qui a débouté Mme [K] de sa demande à ce titre sera confirmé.
Sur les autres demandes
Mme [K], partie perdante à l'instance et en son recours, sera condamnée aux dépens mais il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la société intimée la charge de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel par la société BPCE Assurances IARD,
Condamne Mme [K] aux dépens exposés en cause d'appel.
Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par Sandrine Lachaise, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Sandrine Lachaise Sylvie Hylaire
CHAMBRE SOCIALE - SECTION A
--------------------------
ARRÊT DU : 19 MARS 2025
PRUD'HOMMES
N° RG 22/03319 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MZH6
Madame [G] [K]
c/
S.A.S. BPCE ASSURANCES
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
à :
Me Alain LEBEAU, avocat au barreau de PARIS,
Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE
Me Marie-Haude NEDELEC, avocat au barreau de BORDEAUX
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 10 juin 2022 (R.G. n°19/01512) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 08 juillet 2022,
APPELANTE :
Madame [G] [K]
née le 29 juin 1977 à [Localité 3] de nationalité française Profession : Gestionnaire en assurance, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Marie-Haude NEDELEC, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
S.A.S. BPCE ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 2]
N° SIRET : 350 663 860
assistée de Me Alain LEBEAU, avocat au barreau de PARIS, représentée par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 janvier 2025 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie Hylaire, présidente, chargée d'instruire l'affaire,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvie Hylaire, présidente
Madame Sylvie Tronche, conseillère
Madame Laure Quinet, conseillère
Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,
lors du prononcé : Sandrine Lachaise
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [G] [K], née en 1977, a été engagée en qualité de gestionnaire de sinistre habitations par la société BPCE Assurances, devenue société BPCE Assurances IARD, ci-après dénommée société BPCE, par contrat de travail à durée déterminée à compter du 31 juillet 2007.
Par la suite, les parties ont conclu un contrat à durée indéterminée prenant effet le 2 janvier 2008.
En dernier lieu, Mme [K] occupait le poste de télégestionnaire indemnisation, classe 3, de la convention collective nationale des sociétés d'assurances.
Elle était notamment placée sous la responsabilité de Mme [V].
Au cours de la relation contractuelle, Mme [K] a bénéficié :
- d'un congé parental à temps plein en 2015 ;
- d'un temps partiel pour création d'entreprise de deux années (mai 2016 à mai 2018).
Au terme de son congé de création d'entreprise de 2 ans, fin mai 2018, Mme [K] a repris son activité à temps plein après avoir suivi une formation de 42,5 jours sur la période du 20 novembre 2017 au 4 décembre 2018.
Par courriel du 3 juillet 2018, Mme [E] a sollicité un « licenciement amiable »
Par courriers du 30 juillet et du 28 août 2018, la société BPCE Assurances a demandé à Mme [K] de justifier ses absences entre le 2 et 13 juillet 2018 et depuis le 30 juillet 2018.
Par lettre datée du 5 septembre 2018, Mme [K] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 17 septembre 2018.
Mme [K] a ensuite été licenciée pour faute grave par lettre datée du 27 octobre 2018 au motif de comportements fautifs et réitérés qui ont perturbé le bon fonctionnement de son service et d'absences injustifiées.
A la date du licenciement, Mme [K] avait une ancienneté de11 ans et deux mois et la société occupait à titre habituel plus de 10 salariés.
Par requête reçue le 24 octobre 2019, Mme [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités ainsi que des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour exécution déloyale du contrat de travail.
Par jugement rendu le 10 juin 2022, le conseil de prud'hommes a :
- constaté le bien fondé du licenciement pour faute grave de Mme [K],
- débouté Mme [K] de sa demande de requalification du licenciement,
- constaté l'irrecevabilité des demandes de rappel de salaire du mois de septembre 2018 ainsi que sur le solde de tout compte,
- débouté Mme [K] de sa demande de rappel de salaire du mois de septembre 2018,
- débouté Mme [K] de sa demande au titre du solde de tout compte,
- débouté Mme [K] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
- débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance (sic).
Par déclaration communiquée par voie électronique le 8 juillet 2022, Mme [K] a relevé appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 9 janvier 2025, Mme [K] demande à la cour :
- d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il :
* a constaté le bien fondé de son licenciement pour faute grave,
* l'a déboutée de sa demande de requalification du licenciement,
* a constaté l'irrecevabilité des demandes de rappel de salaire du mois de septembre 2018 ainsi que sur le solde de tout compte,
* l'a déboutée de ses demandes de rappel de salaire du mois de septembre 2018, au titre du solde de tout compte et de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
* a débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.
Statuant à nouveau sur le fond, de :
Sur le licenciement,
- à titre principal, condamner la société BCPE Assurances au paiement des sommes
suivantes :
* 6.559,27 euros à titre d'indemnité de licenciement,
* 4.070,56 euros au titre du préavis,
* 407,05 euros à titre de congés payés sur préavis,
* 28.500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- à titre subsidiaire, condamner la société BCPE Assurances au paiement des sommes suivantes :
* 6.559,27 euros à titre d'indemnité de licenciement,
* 4.070,56 euros au titre du préavis,
* 407,05 euros à titre de congés payés sur préavis,
Sur les autres demandes,
- condamner la société BCPE Assurances au paiement des sommes suivantes :
* 3.112,32 euros au titre du solde de tout compte,
* 2.118,58 euros à titre de rappel de salaire sur le mois de septembre 2018, * 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
En tout état de cause,
- dire que les sommes octroyées porteront intérêt au taux légal depuis la saisine,
- condamner la société BCPE Assurances au paiement de la somme de 2.000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 13 janvier 2025, la société BPCE demande à la cour de la déclarer recevable et bien fondée en ses écritures et, y faisant droit, de déclarer Mme [K] mal fondée en son appel et l'en débouter, et de :
A titre principal :
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bordeaux en date du 10 juin 2022,
A titre subsidiaire :
- fixer la rémunération moyenne de référence à 2.035,28 euros brut,
- limiter le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et
sérieuse à 3 mois de salaire, soit 6.105,84 euros brut,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bordeaux pour le surplus,
En tout état de cause, statuant à nouveau, condamner Mme [K] à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 janvier 2025 et l'affaire a été fixée à l'audience du 28 janvier 2025.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la rupture du contrat de travail
La lettre de licenciement adressée le 26 octobre 2018 à Mme [K] est ainsi rédigée :
« [...]
En application des dispositions de l'articlre 90 de la convention collective des sociétés d'assurances, par courrier remis en main propre contre décharge en date du 24 septembre 2018, nous vous avons convoquée à la réunion du Conseil fixée au 18 octobre 2018 à laquelle vous ne vous êtes pas présentée.
A l'issue de la réunion du Conseil qui a fait l'objet d'un procès-verbal qui vous a été communiqué par courrier recommandé avec accusé de réception le 22 octobre 2018, les membres du Conseil ont exprimé leur avis sur la mesure de licenciement envisagée.
Par la présente, nous sommes au regret de vous notifier notre décision de vous licencier pour faute grave en raison de vos absences injustifiées.
En effet, nous avons constaté plusieurs absences pour lesquelles vous n'avez à aucun moment ourni de justificatifs:
- 2 au 13 juillet 2018, vous étiez absente à votre poste de travail sans en avoir informé votre manager et sans n'avoir fourni de justification.
- du 30 juillet au 26 août 2018, vous étiez absente à votre poste de travail sans en avoir informé votre manager et sans n'avoir fourni de justification.
- Le 31 août 2018, vous étiez absente à votre poste de travail sans en avoir informé votre manager et sans n'avoir fourni de justification.
- Les 6 et 7 septembre 2018, vous étiez absente à votre poste de travail sans en avoir informé votre manager et sans n'avoir fourni de justification.
- Les 15 et 24 septembre 2018, vous étiez absente à votre poste de travail sans en avoir informé votre manager et sans n'avoir fourni de justification.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 30 juillet 2018, nous vous avons demandé de justifier vos absences. Sans réponse et sans justification de votre part, le 28 août 2018, nous vous avons mis en demeure par courrier avec accusé de réception de justifier à nouveau, vos absences et/ou de reprendre le travail dans les meilleurs délais.
Nous vous avons rappelé à plusieurs reprises les dispositions de notre règlement intérieur, qui prévoient que toute absence doit être justifiée dans les 48 heures maximales, sauf cas de force majeure (art 8.2 et art.8.3).
Nous n'avons à ce jour, reçu aucun justificatif faisant suite à vos absences.
En sus de contrevenir aux dispositions de notre règlement intérieur, vos absences ont eu pour conséquence de perturber particulièrement le bon fonctionnement du service et la bonne marche de l'entreprise, dès lors que vos absences étaient imprévisibles.
Les explications recueillies auprès de vous lors de notre entretien n'ont pas permis de modifier notre décision de vous licencier,
Pour ces raisons et dès aujourd'hui, la poursuite de notre collaboration n'est plus envisageable et nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave.
Le licenciement prendra donc effet immédiatement à la date de première présentation de cette lettre et votre solde de tout compte sera arrêté à cette date, sans indemnité de préavis ni de licenciement.
[...] ».
Pour voir infirmer le jugement déféré, Mme [K] invoque le climat délétère ayant entouré sa formation de Responsable Qualité Sécurité Environnement, sa demande à ce titre ayant été considérée manifestement comme malvenue par sa hiérarchie et ayant conduit à de nombreux dysfontionnements tels que :
- des erreurs sur le nombre d'heures de son compteur du CPF,
- le non-paiement de ses heures de formation,
- une augmentation indue de son salaire malgré ses alertes,
- des disparitions des fichiers RH (contrat apparaissant comme suspendu),
- des accès refusés à la boîte courriel et aux logiciels;
- des erreurs récurrentes de planning,
- l'absence de tenue d'entretien individuel,
- l'établissement de plannings sans prise en compte des dates de formation,
- Etc [sic].
Selon l'appelante, ces difficultés seraient attestées par trois collègues de travail, Mesdames [C] et [M] et M. [R].
Mme [K] ajoute qu'un climat d'intimidations et de menaces s'est instauré à son égard et ce, malgré ses doléances tant auprès de l'employeur que des représentants du personnel ou encore de la responsable des ressources humaines et, enfin, du médecin du travail, notamment lors de la visite du 28 mai 2018.
Mme [K] fait ensuite valoir que ses arrêts de travail étaient motivés par son état d'épuisement professionnel, son médecin traitant attestant de la dégradation de son état de santé en lien avec ses conditions de travail.
Elle ajoute qu'une 'réelle problématique' des conditions de travail était présente sur le site de [Localité 4] avec notamment un taux d'absentéisme très élévé et d'autres salariés en situation de souffrance au travail.
Elle souligne enfin, ainsi que l'a relevé le conseil de prud'hommes, qu'elle n'a obtenu aucune réponse à ses nombreux courriels, l'absence de démarche du directeur des ressources humaines ainsi que la défaillance de ce service pour ne pas avoir pris en compte le sérieux de la situation.
Mme [K] en déduit que l'employeur a manqué à ses obligations légales de bonne foi et d'exécution loyale du contrat de travail et, en particulier, à son obligation de prévention et de sécurité et que ses absences ne sont pas injustifiées car elles étaient imputables au contexte relationnel.
* La société intimée conclut à la confirmation du jugement déféré exposant que les absences injustifiées de Mme [K] sont à l'origine de son licenciement et soulignant que ses nombreux courriers invitant la salariée à justifier de ses absences sont restés sans réponse.
Elle conteste notamment les accusations portées à son encontre par Mme [K] quant à des comportements de la direction qui auraient engendré la dégradation de son état de santé, soulignant que la salariée s'est contentée de s'absenter sans motif valable, ses déclarations faites auprès du médecin du travail en mai 2018, soit près de 5 mois avant la notification de son licenciement ne pouvant caractériser un manquement de l'employeur à ses obligations, d'autant que le médecin du travail ne lui a adressé aucun signalement suite à cette visite du 28 mai 2018.
La société ajoute que les absences de Mme [K], imprévisibles et imprévues, étaient nécessairement de nature à perturber le fonctionnement de son service.
Elle fait également valoir que contrairement à ce que prétend la salariée, il y a eu des échanges entre les parties, M. [T], directeur des ressources humaines ayant notamment accusé réception de sa demande de mobilisation de son compte personnel de formation ainsi que de sa demande de rupture conventionnelle, celle-ci ayant été refusée dans un délai de deux mois, non excessif compte tenu de la période estivale
***
L'employeur ayant choisi de se placer sur le terrain d'un licenciement pour faute grave doit rapporter la preuve des faits allégués et démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié au sein de l'entreprise.
Les absences de Mme [K] à son poste de travail, sanctionnées par la lettre de licenciement ne sont pas contestées.
Ces absences, sans arrêts de travail pour maladie, se sont ainsi succédé selon son propre relevé :
- du 2 au 13 juillet 2018,
- du 30 juillet au 24 août 2018,
- le 31 août 2018,
- les 6 et 7 septembre 2018,
- le 24 septembre 2018.
Mme [K] n'a pas répondu aux mises en demeure qui lui ont été adressées les 30 juillet et 28 août 2018 d'avoir à justifier ses absences, s'étant limitée à indiquer le 9 juillet que son absence de ces derniers jours ne serait pas justifié car son médecin était en vacances.
Mme [K] soutient que ses absences étaient justifiées par les manquements de l'employeur à ses obligations tant au titre de son obligation de sécurité que de son obligation d'exécution loyale du contrat.
Elle fait état notamment des difficultés opposées par son employeur à la mise en oeuvre de son congé de formation.
La cour relève que sa demande à ce titre, présentée le 28 juin 2017, a été acceptée par la société par courrier du 7 septembre 2017 et que Mme [K] a pu suivre cette formation prévue à compter du 7 novembre 2017, étant observé que la teneur de l'entretien du 28 juillet 2017 à ce sujet ne repose que sur les seules déclarations de la salariée.
Mme [K] fait ensuite valoir que l'employeur, ayant été contraint d'accepter ce congé de formation, pour ne pas avoir répondu dans le délai d'un mois qui lui était imparti, a alors adopté une attitude de menaces et d'intimidations à son égard.
Ces menaces et intimidations ne sont circonstanciées par aucun fait précis et/ou daté et ne reposent que sur le ressenti tel qu'exposé par Mme [K] et relaté par celle-ci auprès des médecins qu'elle a consultés (médecin traitant et médecin du travail).
A cet égard, les déclarations faites par son compagnon ou trois de ces collègues ne permettent pas de retenir qu'ils auraient personnellement constaté les difficultés alléguées, évoquées dans des termes généraux et non circonstanciés :
- 'elle a subi tout un tas de pressions successives comme les applications au travail qui ne fonctionnaient pas, uniquement pour elle, des accès refusés, des erreurs de salaire, d'emploi du temps et le tout accompagné de pressions orales de sa hiérarchie' sans plus de précision . 'elle a dû se battre pour obtenir le droit 'légitime' de faire sa formation pendant que les RH laissaient traîner les choses, elle s'épuisait ...', selon Mme [M] : la cour relève qu'aucune précision n'est apportée sur les 'pressions' exercées et que le délai de deux mois de traitement de la demande de congé de formation présentée juste avant les vacances d'été, n'était pas excessif, Mme [K] ayant pu suivre celle-ci aux dates prévues ;
- le compagnon de Mme [K] évoque lui aussi des intimidations, du chantage, des paroles pas respectées, là encore sans aucune précision ainsi que des difficultés informatiques qu'il a essayé de débloquer et qu'elle était la seule à rencontrer, précisant 'je ne formulerai aucun soupçon' ;
- 'elle était juste malade de ce qu'elle vivait au quotidien et des difficultés qu'elle rencontrait sans aide', selon Mme [C] qui évoque des soucis d'informatique, de paie, de congés de planning et de formation obligatoire dont le témoin indique que Mme [K] n'a pas pu suivre cette formation, ce qui est faux.
Au vu des pièces produites par Mme [K], les difficultés rencontrées et établies sont les suivantes :
- des difficultés de badgeage : des pièces produites, cette difficulté se serait produite au cours dune seule journée le 9 novembre 2017 soit plusieurs mois avant les absences de Mme [K] ;
- des difficultés dans la gestion de son planning et de sa situation administrative durant son congé de formation soit, là encore, plusieurs mois auparavant, et, au demeurant résolues (courriels des 30 octobre et 10 novembre 2017) ;
- une erreur sur le calcul de ses salaires, en novembre et décembre 2017 au moment de son congé de formation : le remboursement du trop-perçu, qui lui a été explicité au cours d'un entretien n novembre 2017 et par un courriel du 26 décembre 2017, dont le montant n'est pas contesté par Mme [K], a été échelonné par l'employeur.
De ces éléments, il ressort que les difficultés rencontrées, au demeurant d'une gravité relative, datent de plus de 6 mois avant les absences de la salariée et ne sont pas de nature à justifier celles-ci.
Par ailleurs, si Mme [K] invoque un manquement à l'obligation de sécurité de l'employeur, les 'inquiétudes' formulées en novembre 2017 à propos de ses difficultés de planning avaient été résolues au vu des pièces produites et les 'alertes' qu'elle invoque, adressées à un représentant syndical sont postérieures au déclenchement de la procédure de licenciement.
Enfin, il ne peut qu'être relevé que suite à sa demande de rupture à l'amiable de son contrat par courrier du 3 juillet 2018 dans lequel elle invoquait ses difficultés, Mme [K] n'a pas réintégré son poste de travail, se trouvant soit en absences non justifiées, soit en arrêt de travail pour maladie, soit encore en congés payés, étant observé que l'employeur n'était pas tenu de répondre à sa demande de rupture dans un délai contraint et en avait au surplus accusé réception dès le 9 juillet.
Mme [K] invoque aussi une 'fraude' à la garantie procédurale soutenant qu'il y a eu une connivence entre la direction et le représentant de son syndicat, M. [Y], car il aurait été convenu d'un licenciement pour faute simple si elle ne solicitait pas la réunion du conseil, prévu par la convention collective.
L'existence du 'deal' proposé à Mme [K] semble découler des termes de la réponse faite par M. [Y] le 18 octobre 2018.
Cependant, la cour relève que le conseil qui doit seulement, aux termes de l'article 90 de la convention collective applicable, être consulté par l'employeur, a été réuni et a émis un avis favorable au licenciement au cours de la réunion du 18 octobre 2018, à raison de 4 voix sur cinq, dont celle de M. [Y], en sorte que même si celui-ci s'était opposé au licenciement, l'avis du conseil restait majoritairement favorable au licenciement, cet avis étant en tout état de cause seulement consultatif.
Par ailleurs, contrairement à ce que soutient Mme [K], le compte-rendu de cette réunion, produit par la société, est signé par tous les membres présents et mentionne qu'une vérification sera faite par l'entreprise au sujet du salaire de Mme [K] pour le mois de septembre.
La réitération des absences non justifiées dans le délai de 2 mois précédant l'engagement de la procédure de licenciement le 5 septembre 2018 autorisait l'employeur à faire état de celles à compter du 2 juillet 2018 nonobstant les règles de la prescription.
Même si, à l'évidence, l'absence du 24 septembre 2018 n'a pas pu être évoquée au cours de l'entretien préalable au licenciement du 17 septembre 2018, seule cette absence ne pouvait être visée au rang des motifs de la rupture.
Il reste néanmoins établi que Mme [K] s'est de manière réitérée et prolongée autorisée à ne pas se présenter à son poste de travail et, ce sans en justifier ni même en prévenir son employeur, la durée de ces absences représentant plus d'un mois à la date à laquelle la procédure de licenciement a été engagée, la seule situation de congé de son médecin traitant ne pouvant légitimer l'absence de production d'arrêts de travail pour maladie, si son état de santé le justifiait réellement.
L'obligation d'accomplir la prestation de travail est l'une des obligations principales du salarié.
Ainsi et indépendamment de la désorganisation découlant des absences imprévisibles et imprévues de Mme [K] et face à l'absence de réponse aux deux mises en demeure préalables de la société, l'attitude de la salariée caractérise une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise et justifiant son licenciement.
Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Mme [K] de ses demandes principales et subsidiaires au titre de la rupture de son contrat.
Sur la demande en paiement du salaire du mois de septembre 2018
Mme [K] sollicite le paiement de la somme de 2.118,58 euros à titre de rappel de salaire pour le mois de septembre 2018, estimant que les retenues opérées sont en totale opposition avec les dates indiquées dans la lettre de licenciement.
Ainsi que le fait valoir la société, les retenues opérées sur le bulletin de paie du mois de septembre 2018 correspondent aux absences non justifiées de la salariée durant les mois de juillet et août 2018 (à raison de 41 jours), les dates mentionnées correspondant au calendrier de ses absences versé aux débats par Mme [K].
De la même manière, l'imputation de jours de congés payés (soit 4 jours en août) correspond à ce calendrier.
Le jugement déféré qui a débouté Mme [K] de sa demande en paiement à ce titre sera donc confirmé.
Sur la demande en paiement au titre du solde de tout compte
Mme [K] sollicite le paiement de la somme de 3.112,32 euros au titre du solde de tout compte.
Aucune explication n'est donnée dans ses écritures au sujet de cette demande et le solde de tout compte n'est pas versé aux débats, la pièce 23 de Mpme [K] contenant uniquement l'attestation Pôle Emploi et le certificat de travail.
Faute de pouvoir analyser cette demande, la cour confirme le jugement déféré qui a débouté Mme [K] de sa demande de ce chef.
Sur la demande au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail
Mme [K] sollicite la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts au motif d'un manquement de l'employeur à son obligation d'exécution loyale du contrat invoquant le retard dans la délivrance des documents de fin de contrat et dans le paiement de l'indemnité de congés payés.
Il appartient à Mme [K] de rapporter la preuve du manquement de l'employeur à l'obligation lui incombant aux termes de l'article L. 1222-1 du code du travail.
S'agissant du retard dans le paiement de l'indemnité de congés payés, le décalage au 27 du mois suivant le licenciement intervenu le 27 octobre 2018 ne peut être considéré comme caractérisant la mauvaise foi de l'employeur, compte tenu des délais habituels de traitement des paies.
S'agissant de l'attestation Pôle Emploi, le document qu'elle produit qui est incomplet, ne comporte pas de date et, en tout état de cause, ne pouvait être établi qu'après le paiement de l'indemnité de congés payés.
Quant au fait que l'employeur ait mentionné '0" au titre du salaire perçu pour le mois de décembre 2017, il a été expressément précisé que c'était à raison de retenues pour le remboursement de sommes perçues, la cour ayant déjà relevé que le montant du trop-perçu n'était pas contesté par la salariée.
Enfin, le certificat de travail versé aux débats est daté du 27 octobre 2018.
En considération de ces éléments et de l'absence de démonstration d'un manquement de l'employeur à ses obligations, le jugement déféré qui a débouté Mme [K] de sa demande à ce titre sera confirmé.
Sur les autres demandes
Mme [K], partie perdante à l'instance et en son recours, sera condamnée aux dépens mais il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la société intimée la charge de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel par la société BPCE Assurances IARD,
Condamne Mme [K] aux dépens exposés en cause d'appel.
Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par Sandrine Lachaise, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Sandrine Lachaise Sylvie Hylaire