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Décisions

CA Paris, Pôle 4 - ch. 1, 10 avril 2025, n° 24/13531

PARIS

Ordonnance

Autre

CA Paris n° 24/13531

10 avril 2025

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

N° RG 24/13531 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJ2QH

Nature de l'acte de saisine : Déclaration d'appel valant inscription au rôle

Date de l'acte de saisine : 18 Juillet 2024

Date de saisine : 08 Août 2024

Nature de l'affaire : Demande en réparation des dommages causés par un intermédiaire

Décision attaquée : RG n° 17/04732 rendue par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'EVRY le 10 Mai 2019

Appelante :

S.C.I. KELLY, représentée par Me Philippe CHATELLARD de la SCP BLATTER SEYNAEVE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0441 - N° du dossier E00062ON

Intimée :

S.A.S. ADLP, Représentée par son mandataire AD HOC, Madame [K] [J], désignée en cette qualité par ordonnance du tribunal de commerce d'Evry en date du 4 octobre 2023.

Intervenantes Volontaires :

Compagnie d'assurance MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, société d'assurance mutuelle à cotisations fixes, inscrite au registre du commerce du MANS sous le N° 775.652.126, dont le siège social est AU [Adresse 1] , agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux y domiciliés en cette qualité, représentée par Me Marie-odile PEROT-CANNAROZZO, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 205 - N° du dossier 2024 229

MMA IARD, société anonyme, au capital de 537.052.368 ', inscrite au registre du commerce du MANS sous le N° 440.048.882, dont le siège social est AU [Adresse 1], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux y domiciliés en cette qualité, représentée par Me Marie-odile PEROT-CANNAROZZO, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 205 - N° du dossier 2024 229

ORDONNANCE SUR INCIDENT

DEVANT LE MAGISTRAT CHARGÉ DE LA MISE EN ÉTAT

(n° , 6 pages)

Nous, Nathalie BRET, magistrat en charge de la mise en état,

Assistée de Aïda AYARI, adjointe faisant fonction de greffière,

Vu l'appel déclaré le 18 juillet 2024 par la SCI Kelly, à l'encontre de la SAS ADLP, contre le jugement rendu le 10 mai 2019 par le tribunal judiciaire d'Evry, dans le litige l'opposant à la SAS ADLP ;

Vu les conclusions d'incident en date du 9 novembre 2024 et du 20 février 2025, aux termes desquelles la société d'assurance mutuelle à cotisations fixes MMA Iard Assurances Mutuelles et la société anonyme MMA Iard, intervenantes volontaires, demandent au conseiller de la mise en état de :

Vu les dispositions des articles 328 et suivants du Code de Procédure Civile,

Vu les notamment dispositions des Articles 542, 528-1 du Code de Procédure Civile

- DECLARER les MMA IARD ASSURANCES MUTULELLES et MMA IARD recevables et bien fondées en leur intervention volontaire.

- JUGER que c'est à la demande de la SCI KELLY, laquelle a refusé de régulariser la procédure à l'égard d'ADLP, que la Cour d'appel a rendu son arrêt le 2023, à l'encontre de FONCIA VAL D'ESSONNE « venant aux droits de la Société ADLP ».

EN CONSEQUENCE,

- JUGER irrecevable le second appel de la SCI KELLY à l'encontre de la décision rendue le 10 MAI 2019 par le Tribunal de Grande Instance d'EVRY.

- SUBSIDIAIREMENT,

- JUGER irrecevable, car hors délai, l'appel de la SCI KELLY à l'encontre de la décision rendue le 10 MAI 2019 par le Tribunal de Grande Instance d'EVRY.

EN TOUT ETAT DE CAUSE,

- DEBOUTER la SCI KELLY de ses demandes

- CONDAMNER la SCI KELLY à verser aux MMA la somme de 2.500 ' sur le fondement de l'article 700 CPC.

- CONDAMNER la SCI KELLY en tous les dépens d'appel ;

Vu les conclusions d'incident en date du 16 décembre 2024 aux termes desquelles la SCI Kelly demande au conseiller de la mise en état de :

Vu notamment les articles 528-1 et 538 et du Code de procédure civile,

- Juger que la SCI KELLY est recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

Rejeter la demande d'intervention volontaire des sociétés MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et MMA IARD,

Subsidiairement,

- débouter les sociétés MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et MMA IARD de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, et en particulier :

- Débouter les sociétés MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et MMA IARD de leur demande tendant à voir la SCI KELLY déclarée irrecevable en son appel en raison d'un appel antérieur,

- Juger que la SCI KELLY a respecté les dispositions de l'article 528-1 du Code de procédure civile et qu'elle est recevable en son appel,

EN TOUT ETAT DE CAUSE

- Condamner la société ADLP IMMOBILIER, représentée par son mandataire ad hoc, madame [K] [J], au paiement des dépens de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés par maître Philippe CHATELLARD, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile et à payer à la SCI KELLY la somme de 5 000 par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

SUR CE,

Sur la recevabilité de l'intervention volontaire des sociétés MMA

Les sociétés MMA sollicitent de déclarer recevable leur intervention volontaire en appel ; elles estiment avoir intérêt à intervenir dans la procédure dans laquelle la société ADLP Immobilier est mise en cause, puisqu'elle est leur assurée au titre de la responsabilité civile professionnelle et que la police d'assurance est mobilisable ;

Aux termes de l'article 328 du code de procédure civile, « L'intervention volontaire est principale ou accessoire » ;

En l'espèce, la société ADLP Immobilier n'a pas constitué avocat dans le cadre de la procédure d'appel.

Les sociétés MMA justifient, par la police d'assurance, intervenir en qualité d'assureur responsabilité civile de la société ADLP ;

Il convient de considérer que les sociétés MMA ont intérêt à intervenir dans la présente procédure, en ce que la police d'assurance responsabilité civile professionnelle de la société ADLP contractée auprès d'elles est mobilisable, ce d'autant plus que leur assurée a fait l'objet d'une procédure collective ;

Il y a donc lieu de déclarer recevable leur intervention volontaire ;

Sur la recevabilité de l'appel

Les sociétés MMA estiment que l'appel est irrecevable ; elles fondent leur demande sur deux moyens :

- le principe de l'irrecevabilité des recours successifs, qui rend irrecevable le présent appel au motif qu'il s'agit d'un second appel, et ce même si le premier appel a été déclaré irrecevable par un arrêt du 1er juin 2023,

- l'expiration du délai d'appel sur le fondement de l'article 528-1 du code de procédure civile, l'appel formé le 18 juillet 2024 étant intervenu plus de deux ans après la date du jugement du 10 mai 2019 ;

La société Kelly oppose que :

- il n'y a pas identité de parties puisque le premier appel a été dirigé contre la société Foncia Val d'Essonne « suite à une erreur dans la désignation des parties provoquée par l'huissier de justice de la société ADLP Immobilier » et le présent appel est dirigé contre le mandataire ad hoc de la société ADLP Immobilier ; il n'y a donc pas autorité de la chose jugée de l'arrêt du 1er juin 2023 qui a déclaré irrecevable le premier appel ;

- la notification du jugement est intervenue dans le délai de deux ans ; en outre, selon la cour de cassation (17-14291), lorsqu'une partie interjette appel, même irrecevable dans le délai de deux ans, le délai de forclusion de l'article 528-1n'est pas applicable ; or elle a formé son premier appel le 8 novembre 2019, soit dans le délai d'un mois suivant la signification du jugement, et la cour a déclaré cet appel dirigé contre la société Foncia irrecevable, sachant que « l'erreur de l'huissier » ne lui est pas opposable ;

Sur le principe de l'irrecevabilité des recours successifs

Aux termes de l'article 546 du code de procédure civile, « Le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n'y a pas renoncé.

En matière gracieuse, la voie de l'appel est également ouverte aux tiers auxquels le jugement a été notifié » ;

Aux termes de l'article 911-1 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur du 01 septembre 2017 au 01 septembre 2024, « Le conseiller de la mise en état peut d'office, par ordonnance et en raison de la nature de l'affaire, impartir des délais plus courts que ceux prévus aux articles 908 à 910.

La caducité de la déclaration d'appel en application des articles 902 et 908 ou l'irrecevabilité des conclusions en application des articles 909 et 910 sont prononcées par ordonnance du conseiller de la mise en état qui statue après avoir sollicité les observations écrites des parties. L'ordonnance qui prononce la caducité ne peut être rapportée.

La partie dont la déclaration d'appel a été frappée de caducité en application des articles 902,905-1,905-2 ou 908 ou dont l'appel a été déclaré irrecevable n'est plus recevable à former un appel principal contre le même jugement et à l'égard de la même partie.
De même, n'est plus recevable à former appel principal l'intimé auquel ont été régulièrement notifiées les conclusions de l'appelant et qui n'a pas formé un appel incident ou provoqué contre le jugement attaqué dans les délais impartis aux articles 905-2 et 909 ou dont l'appel incident ou provoqué a été déclaré irrecevable » ;

Il résulte de l'article 546 du code de procédure civile, selon lequel le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt, que la partie qui a régulièrement saisi une cour d'appel d'un premier appel formé contre un jugement n'est pas recevable à réitérer un appel du même jugement contre le même intimé ; selon l'article 911-1, alinéa 3, du même code, la partie dont l'appel a été déclaré irrecevable n'est plus recevable à former un appel principal contre le même jugement et à l'égard de la même partie ;

En l'espèce, le 8 novembre 2019, la SCI Kelly a formé, à l'encontre de « la SAS Foncia Val d'Essonne venant aux droits de la SAS ADLP », appel du jugement du 10 mai 2019 ;

Par arrêt du 1er juin 2023 (pièce 36), afférent à cet appel, la cour d'appel de Paris a notamment déclaré la SCI Kelly irrecevable en son appel dirigé à l'encontre de la société Foncia Val d'Essonne comme venant aux droits de la société ADLP, notamment en l'absence de preuve que la société Foncia Val d'Essonne vient aux droits de la société ADLP ;

Il convient de considérer que l'appel du même jugement du 10 mai 2019, formé par la SCI Kelly le 18 juillet 2024 à l'égard de la SAS ADLP, afférent au présent dossier, n'a pas été formé à l'égard de la même partie que l'appel du 8 novembre 2019, qui a été formé à l'égard de la SAS Foncia Val d'Essonne ;

En effet, il est justifié que la SAS Foncia Val d'Essonne ne vient pas aux droits de la société ADLP, que c'est par erreur que l'huissier a signifié à la SCI Kelly le jugement à la requête de « la SAS Foncia Val d'Essonne venant aux droits de la SAS ADLP » ce qui a induit en erreur la SCI Kelly ;

Aussi en application de l'article 911-1 alinéa 3 du code de procédure civile, il y a lieu d'écarter le moyen relatif à l'irrecevabilité des recours successifs ;

Sur le délai d'appel

Aux termes de l'article 538 du code de procédure civile, « Le délai de recours par une voie ordinaire est d'un mois en matière contentieuse ; il est de quinze jours en matière gracieuse » ;

Aux termes de l'article 528-1 du code de procédure civile, « Si le jugement n'a pas été notifié dans le délai de deux ans de son prononcé, la partie qui a comparu n'est plus recevable à exercer un recours à titre principal après l'expiration dudit délai.

Cette disposition n'est applicable qu'aux jugements qui tranchent tout le principal et à ceux qui, statuant sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident, mettent fin à l'instance » ;

Aux termes de l'article 2241 du code civil, dans sa version en vigueur depuis le 19 juin 2008, « La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure » ;

Il résulte de l'article 528-1 du code de procédure civile, selon lequel si le jugement n'a pas été notifié dans le délai de deux ans de son prononcé, la partie qui a comparu n'est plus recevable à exercer un recours à titre principal après l'expiration dudit délai, que lorsqu'une partie forme un appel, même irrecevable, dans le délai de deux ans du prononcé de la décision, ce délai de forclusion n'est pas applicable. Encourt en conséquence la censure l'arrêt d'une cour d'appel qui déclare irrecevable l'appel d'un jugement sur le fondement de ce texte, tout en relevant que l'appelant avait interjeté, moins de deux ans suivant le prononcé de ce jugement, un premier appel, qui avait été déclaré irrecevable au visa des articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce (2ème chambre civile, 17 mai 2018, pourvoi n° 17-14.291) ;

La déclaration d'appel est l'acte de saisine de la cour d'appel et le délai d'appel est un délai de forclusion ; l'annulation par l'effet d'un vice de procédure de l'acte de saisine de la juridiction qui interrompt les délais de prescription et de forclusion, s'applique à la décision d'annulation d'une déclaration d'appel fondée sur l'article 117 du code de procédure civile (2ème chambre civile, 16 octobre 2024, pourvoi n° 13-22.088) ;

En l'espèce, la société Kelly estimant qu'elle a formé son premier appel dans le délai, que l'erreur de l'huissier qui a mené à l'irrecevabilité de cet appel prononcée par l'arrêt du 1er juin 2023 ne lui est pas opposable, que son deuxième appel formé le 18 juillet 2024 est recevable, et visant l'arrêt de la cour de cassation n°17-14291, il convient de considérer qu'elle fonde sa défense sur l'absence d'application du délai de forclusion de deux ans prévu par l'article 528-1 du code de procédure civile et que la question de l'interruption du délai d'appel par la procédure relative au premier appel est dans le débat ;

Il convient de considérer que la signification du jugement du 10 mai 2019, à la SCI Kelly le 11 octobre 2019 selon un procès-verbal de vaines recherches visant les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, est régulière à l'égard de la SCI Kelly, et ce même si l'huissier a mentionné par erreur qu'il agissait à la requête de « la SAS Foncia Val d'Essonne venant aux droits de la SAS ADLP » au lieu de la SAS ADLP ; il n'y a donc pas lieu à application de l'article 528-1 du code de procédure civile, aux termes duquel le délai d'appel serait expiré le lundi 10 mai 2021 ;

La SCI Kelly a exercé son recours dans le délai d'un mois de la signification du 11 octobre 2019, conformément aux dispositions de l'article 538 du code de procédure civile, puisqu'elle a formé appel le 8 novembre 2019, à l'encontre de « la SAS Foncia Val d'Essonne venant aux droits de la SAS ADLP » du jugement du 10 mai 2019 ;

Le délai d'appel est un délai de forclusion et ce délai est interrompu par l'annulation par l'effet d'un vice de procédure d'une première déclaration d'appel fondée sur l'article 117 du code de procédure civile ;

Toutefois la première déclaration d'appel n'a pas fait l'objet d'une décision d'annulation par l'effet d'un vice de procédure fondée sur l'article 117 du code de procédure civile mais a été déclarée irrecevable par l'arrêt de la cour d'appel du 1er juin 2023 ;

Il y a donc lieu de considérer que le délai d'appel n'a pas fait l'objet d'une interruption par la procédure relative au premier appel ;

En tout état de cause, même à supposer qu'il puisse être considéré que le délai d'appel a été interrompu par la procédure relative au premier appel, il y aurait lieu d'estimer que le délai d'appel d'un mois a recommencé à courir à compter de l'arrêt du 1er juin 2023, expirant le lundi 3 juillet 2023, et que le second appel formé le 18 juillet 2024 serait tardif ;

Ainsi l'appel formé par la SCI Kelly le 18 juillet 2024 est donc tardif et irrecevable ;

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le sens de la présente ordonnance conduit à condamner la SCI Kelly aux dépens du présent incident et aux dépens d'appel et à payer aux MMA la somme unique de 2.000 ' par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition au greffe,

Déclarons recevable l'intervention volontaire en appel de la société d'assurance mutuelle à cotisations fixes MMA Iard Assurances Mutuelles et la société anonyme MMA Iard, en qualité d'anciens assureurs responsabilité civile professionnelle de la société ADLP Immobilier ;

Déclarons irrecevable l'appel déclaré le 18 juillet 2024 par la SCI Kelly, à l'encontre de la SAS ADLP, contre le jugement rendu le 10 mai 2019 par le tribunal judiciaire d'Evry, dans le litige l'opposant à la SAS ADLP ;

Condamnons la SCI Kelly aux dépens du présent incident et aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à la société d'assurance mutuelle à cotisations fixes MMA Iard Assurances Mutuelles et la société anonyme MMA Iard la somme unique de 2.000 ' par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Paris, le 10 Avril 2025

Le greffier Le magistrat en charge de la mise en état

Copie au dossier

Copie aux avocats

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