CA Poitiers, ch. soc., 10 avril 2025, n° 22/01088
POITIERS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Région Centre Ouest Habitat (SARL)
Défendeur :
Région Centre Ouest Habitat (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Carracha
Conseillers :
Mme Lafond, M. Duchâtel
Avocats :
Me Gossin, Me Beche
EXPOSÉ DU LITIGE :
M. [H] [T] a été recruté par la société Région Centre Ouest Habitat (RCOH) le 1er avril 2012 en qualité de responsable de secteur.
Un nouveau contrat de travail a été régularisé le 30 septembre 2016 portant sur un poste de directeur d'agence, statut cadre, échelon C3, coefficient 420, au sein de l'agence située à [Localité 6], et ce avec effet au 1er octobre 2016.
Par courrier daté du 4 février 2019, M. [J], co-gérant de la société, a proposé à M. [T] de devenir co-gérant avec pour fonction de diriger l'établissement de [Localité 2], et de prendre à court ou moyen terme la gérance d'une société à créer par la société mère à laquelle serait cédé le fonds de commerce de [Localité 2] et dont il pourrait être associé avec une participation pouvant aller jusqu'à 49 % du capital social, et en lui demandant de communiquer sa position impérativement pour le 11 février 2019 au plus tard.
Par courrier recommandé daté du 12 février 2019, M. [T] s'est vu notifier une convocation à un entretien préalable à un licenciement pour faute grave fixé au 21 février 2019, assortie d'une mise à pied à titre conservatoire.
Par courrier recommandé du 4 mars 2019, la société RCOH a notifié à M. [T] son licenciement pour faute grave.
M. [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Poitiers par requête datée du 16 janvier 2020 aux fins de contester les modalités de la rupture de son contrat de travail.
Par jugement du 28 mars 2022, le conseil de prud'hommes de Poitiers a :
dit et jugé que le licenciement pour faute grave de M. [H] [T] est justifié,
débouté M. [H] [T] de l'intégralité de ses demandes,
débouté la société RCOH de sa demande reconventionnelle faite au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné chaque partie pour moitié aux dépens.
M. [T] a relevé appel de la décision par déclaration du 27 avril 2022.
Dans ses dernières conclusions signifiées par RPVA le 12 juillet 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, M. [T] demande à la cour de :
dire et juger qu'il est bien fondé en ses demandes, fins et conclusions,
infirmer le jugement entrepris,
juger son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,
dire et juger que la rupture est intervenue de façon brutale et vexatoire,
condamner la société RCOH à lui verser les sommes suivantes :
7 234,92 euros brut, outre les congés payés pour 723,49 euros brut à titre de rappel durant la mise à pieds conservatoire,
28 939,68 euros brut outre les congés payés s'y rapportant soit 2 893.96 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
17 880,64 euros net à titre d'indemnité légale de licenciement,
69 859,23 euros net à titre de dommages et intérêts au visa de l'article L.1235-3,
20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale et vexatoire,
ordonner la remise des bulletins de salaire, attestation pôle emploi et certificat de travail rectifiés sous astreinte de 500 euros par jour de retard, dix jours passés la notification de l'arrêt à intervenir, la cour se réservant la liquidation de l'astreinte,
condamner la société RCOH à lui verser la somme de 3 000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner la société RCOH aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions signifiées par RPVA le 10 octobre 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, la société RCOH demande à la cour de :
confirmer le jugement du 28 mars 2022 en ce qu'il a dit et jugé le licenciement pour faute grave de M. [T] justifié, en ce qu'il a débouté M. [T] de l'intégralité de ses demandes,
le réformer en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il a condamné chaque partie pour moitié aux dépens,
condamner M. [T] à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance et l'appel,
condamner M. [T] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 8 janvier 2025.
MOTIVATION
I. Sur le bien fondé du licenciement
Au soutien de son appel, M. [T] expose que :
aucune plainte en abus de faiblesse n'a jamais été déposée à son encontre,
tous les travaux ont été réalisés sous le contrôle et responsabilité de M. [R], gérant de la société, dont le mandat a été rompu pour des prétextes fallacieux sans aucun rapport avec les chantiers en question,
tous les travaux ont été réalisés à la satisfaction des clients et tous les documents comptables étaient remontés au groupe Le Carré pour contrôle et traitement,
la société ne saurait prétendre qu'avant d'envisager de lui proposer le 14 décembre 2018 de le promouvoir sur des fonctions de gérant, son travail et ses méthodes de travail n'ont pas été analysées,
il a reçu un courrier le 4 février 2019 pour lui proposer de devenir co-gérant de la société et il a refusé cette proposition avant la date limite,
le gérant a alors prétendu avoir effectué un audit le 6 février 2019 pour engager une procédure de licenciement car la société pressentait qu'il risquait de rejoindre la concurrence et il fallait le sortir quel qu'en soit le motif, et s'il avait accepté le mandat, les contrats litigieux n'auraient jamais posé de difficulté,
les règles du code de la consommation ont été respectées par les commerciaux et techniciens et un directeur d'agence n'a pas vocation à se déplacer sur chaque chantier pour vérifier si de la mousse est réapparue sur un toit,
le gérant de l'époque, le groupe le Carré et le client lui-même n'ont fait aucune observation pour des travaux remontant à 2017, et le nouveau gérant ne possède aucune compétence technique pour les critiquer,
le fait de démousser une toiture et un an après de changer la couverture à la demande et à la satisfaction du client ne constitue pas deux fois la même opération,
le conseil de prud'hommes a renversé la charge de la preuve en matière de licenciement pour faute grave, méconnu les règles régissant la prescription disciplinaire et notamment le principe selon lequel il incombe à l'employeur de justifier de la date à laquelle les faits sont découverts,
il n'y a jamais eu de doublons de travaux et si la société est intervenue à plusieurs reprises chez certains clients les travaux étaient de nature différentes,
il n'a fait courir aucun risque à la société puisqu'il avait signé une délégation de pouvoir en matière civile et pénale,
en lui reprochant un prétendu manque de contrôle sur ses équipes, l'employeur a sanctionné non une faute mais une insuffisance professionnelle.
En réponse la société RCOH objecte pour l'essentiel que :
lors de sa prise de fonction, le nouveau gérant a constaté de nombreuses anomalies dans les commandes validées par M. [T] en sa qualité de directeur d'agence, alors qu'il était garant du respect des règles déontologiques et des dispositions du code de la consommation,
le salarié a validé des commandes en totale contradiction avec la réglementation en matière de démarchage à domicile et en violation du code de déontologie, en profitant de l'état de faiblesse manifeste de clients, en réalisant des doublons de travaux, pour le seul intérêt du gain au détriment de l'intérêt des clients et de l'image de la société,
il a participé aux formations sur la déontologie appliquée au démarchage à domicile qui était assortie d'un support détaillé sur les pratiques commerciales agressives et sur l'abus de faiblesse,
il a inculqué à ses équipes une habitude de fonctionnement en violation totale du code éthique de la vente,
s'agissant de clients de plus de 75 ans, la procédure prévoit de requérir l'accord écrit d'un membre de la famille sur la signature des documents commerciaux et il n'en n'a rien fait,
l'attestation de Mme [E] produite par le salarié est rédigée en des termes identiques à celle de Mme [X], démontrant qu'elles ont été rédigées sous la dictée, et la société a interrogé ces clientes qui attestent dans l'autre sens, ce qui démontre qu'elles n'ont pas la conscience nécessaire à l'acceptation des bons de commande,
elle ne peut pas prendre l'initiative de dépôt de plainte, n'étant pas directement victime et elle n'a pas pris l'initiative d'indemniser les clients victimes faute de demande spécifique de leur part,
la connaissance complète des faits s'est faite via la nomination du nouveau gérant en janvier 2019 et c'est à cette occasion qu'une vérification complète de l'état de l'agence a été effectuée, et les fautes ne sont pas prescrites.
Sur ce, la faute grave, qui peut seule justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits personnellement imputables au salarié, qui doivent être d'une importance telle qu'ils rendent impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis.
Le licenciement pour faute grave implique une réaction immédiate de l'employeur, la procédure de licenciement devant être engagée dans des délais restreints et le licenciement devant intervenir rapidement.
La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe exclusivement à l'employeur et il appartient à la juridiction saisie d'apprécier, au vu des éléments de preuve figurant au dossier, si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, à raison des fonctions qui lui sont confiées par son contrat de travail, et d'une gravité suffisante pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise.
Si elle ne retient pas la faute grave, il appartient à la juridiction saisie d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur, conformément aux dispositions de l'article L1232-1 du code du travail.
En l'espèce, la société RCOH a notifié à M. [T] son licenciement pour faute grave aux termes d'un courrier daté du 4 mars 2019, qui fixe les limites du litige, formulé de la manière suivante :
'Le 25 janvier 2019, j'ai été nommé co-gérant de la Société RCOH avec pour mission notamment de gérer l'établissement de [Localité 2] de la Société RCOH. C'est ainsi que j'ai été amené le 06 février 2019, au moment de l'établissement de salaires, à effectuer des vérifications de commandes passées par les commerciaux de cet établissement qui sont sous votre responsabilité.
Or lors de ces contrôles, j'ai été amené à constater que vous validiez des commandes qui ne respectent pas les règles élémentaires du droit de la consommation et de la vente hors établissement. C'est le cas par exemple de la commande de Mme [E] de janvier 2019. Après vérification du dossier client, il a été constaté que cette dame est âgée de 85 ans et qu'elle a signé 13 bons de commandes en 18 mois avec notre société pour un montant total de 72 924 euros ! J'ai alors le 06 février 2019 demandé à ce qu'un contrôle soit effectué chez cette personne. Il est apparu que cette dernière relevait d'un état de faiblesse manifeste. En outre le dernier bon de commande concerne un changement de toiture sur fibre alors qu'au cours des 18 derniers mois il lui a été facturé un démoussage de toiture. Quelle est l'utilité de tels travaux ' Je vous ai alors alerté sur le sujet et vous m'avez répondu qu'il fallait faire ces travaux car vous n'aviez jamais eu de problèmes avec cette personne qui n'avait pas de contresignataires. Ce comportement est inacceptable. J'ai la décision d'annuler purement et simplement la commande.
De même, alerté par le cas de Mme [E], nous sommes allés faire un contrôle chez M. [C] le 06 Février 2019. I1 est ainsi apparu que ce client de la société RCOH avait signé 13 bons de commandes avec notre société au cours des 18 derniers mois et ce pour un montant total de 140 000 ' alors que sa maison ne fait que 70m2. Là encore il apparaît des doublons de travaux inacceptables comme des travaux de peinture de façade en 08/2017 suivi de travaux de bardage sur cette même façade en 10/2017, un démoussage de toiture réalisé en 06/2017 et un nouveau démoussage de toiture en 09/2018, une isolation par soufflage en 04/2017 suivi quatre mois plus tard d'une isolation de rampants.
D'autres contrôles ayant eu lieu chez les clients à ce moment, il ressort que ces problèmes de doublons et de contrats successifs non justifiés apparaissent aussi chez les clients [P], [X] et [U].
Vous n'êtes pas sans savoir qu'il est de vos fonctions en votre qualité de directeur d'agence de respecter et faire respecter la réglementation en matière de démarchage à domicile ainsi que de contrôler le respect du code de déontologie. De plus, vous étiez chargé de la vérification de l'ensemble des documents commerciaux avant transmission à la gérance.
Il s'avère qu'il n'en fut rien et que votre comportement fait courir un risque important pour la société RCOH, et pour son image de marque. Ces manquements répétés prennent la forme d'une habitude de fonctionnement, ce que nous ne pouvons accepter. Il est d'ailleurs à signaler que certains responsables d'équipe, depuis votre mise à pied conservatoire, annulent eux-mêmes des commandes qu'ils avaient signées et qui avait été validées par vos soins.
Les explications recueillies auprès de vous lors de notre entretien du 21 février 2019 n'ont pas permis de modifier notre appréciation et cet entretien préalable n'a apporté aucun élément nouveau pouvant nous amener à reconsidérer la décision que nous projetions de prendre. Il est à signaler que vous avez d'ailleurs reconnu les faits reprochés.
Nous nous voyons donc dans l'obligation de mettre fin au contrat de travail vous liant à notre entreprise.
En conséquence, nous avons décidé de vous licencier pour fautes graves. (...)'
En vertu de l'article 1er du contrat de travail liant les parties, les attributions de M. [T] en qualité de directeur d'agence étaient notamment 'd'animer et perfectionner les équipes de vente et le personnel technique', d'assurer 'le recrutement, la formation et l'animation du personnel technique et commercial', de veiller 'au contrôle du respect du code de déontologie', 'd'assurer le service auprès de la clientèle (règlement des litiges avec la clientèle, suivi des chantiers et de satisfaction clientèle, le suivi des encaissements et des impayés)'.
L'article XVIII du contrat de travail, intitulé 'Délégation de pouvoirs en matière de respect des règles déontologiques et du droit à la consommation et de la concurrence', prévoit en outre que 'du fait de la diversité et du volume des tâches à accomplir par le gérant et dans un souci d'efficacité, la société RCOH, représentée par son gérant, délègue, en raison de ses compétences techniques et professionnelles, à M. [H] [T], ayant la qualité de directeur d'agence, de façon effective permanente, une partie des pouvoirs afin :
de respecter et faire respecter la réglementation en matière de démarchage à domicile,
de respecter et faire respecter la réglementation en matière de concurrence,
et en règle générale de respecter et faire respecter l'ensemble des textes du code de la consommation'.
Il est ainsi prévu que M. [T] 'sera chargé de la vérification de l'ensemble des documents commerciaux avant transmission à la gérance' et qu'il 's'engage à prendre toutes mesures utiles à l'accomplissement de sa mission et devra s'assurer qu'elles [les règles susvisées] sont effectivement respectées'.
Il ressort par ailleurs des pièces produites que M. [T] a assisté le 16 novembre 2017 à une formation consacrée à la déontologie.
M. [T] n'a pas discuté qu'en vertu des dispositions de son contrat de travail il était bien chargé de veiller à l'application des règles déontologiques et au respect des dispositions du droit de la consommation par ses équipes et affirme d'ailleurs que celles-ci ont bien été respectées.
Or, les exemples fournis par l'employeur permettent d'établir la violation manifeste par les équipes placées sous la responsabilité de M. [T] des dispositions applicables en matière de protection des consommateurs.
Ainsi, il est versé aux débats les 13 bons de commandes signés par M. [C], sur la période de 18 mois entre les mois d'avril 2017 et novembre 2018, pour un montant d'environ 140 000 euros, pour une habitation d'une superficie indiquée de 81 m2, avec des travaux d'isolation des combles en avril 2017 (3 498 euros), une isolation des rampants en août 2017 (9 429 euros), des travaux de peinture et de bardage en octobre 2017 (23 910 euros), un démoussage de toiture en juin 2017 (3 275 euros) puis des travaux de remplacement des tuiles et de nouveau de démoussage en août 2017 (6 641euros) avant un nouveau démoussage en septembre 2018 (9 727 euros).
Dans le dossier de M. [P] (8 interventions entre octobre 2016 et juillet 2018 pour un montant total d'environ 66 000 euros), il ressort des pièces produites que les équipes de M. [T] ont facturé des travaux d'isolation des combles en octobre 2016 avant de facturer de nouveaux travaux d'isolation 'sous toiture' en février 2017, puis un démoussage en mars 2017 (6 512 euros) avant de procéder à un changement de couverture sur ardoises en mars 2018 (9 854 euros) et de nouveaux travaux d'isolation des combles en juillet 2018 (2 029 euros). Il est également produit le témoignage de de M. [B] [V], formateur technique au sein de la société, que la cour tient pour crédible, qui atteste avoir 'constaté que des travaux de démoussage de toiture, datant du 09/03/17 et qu'un an après des travaux similaires de changement de toiture sur ardoises pour 63 m2 ont été facturé. Or hormis le doublon de travail, il apparaît que la société RCOH a changé 12 ardoises pour 9 854 euros au lieu des 63 m2".
Il est également produit plusieurs factures concernant Mme [X] (18 contrats pour un montant total d'environ 135 000 euros entre octobre 2015 et décembre 2017) avec plusieurs travaux d'isolation en juillet 2016, avril 2017 et septembre 2017, une rénovation de façade en août 2016 suivie de travaux de bardage sur cette même façade en mars, avril et octobre 2017.
Les attestations de Mmes [E] et [X] produites par M. [T] sont contredites par les témoignages contraires plus récents de ces mêmes clientes établis à la demande de la société RCOH.
Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les équipes placées sous la responsabilité de M. [T] ont été amenées à facturer à plusieurs reprises des travaux non justifiés au regard des interventions précédemment exécutées et même des travaux non réalisés s'agissant de M. [P].
Au regard du nombre de bons de commande régularisés dans ces dossiers et de leur montant, il ne fait aucun doute que M. [T], qui devait s'assurer de leur conformité au code de déontologie et aux dispositions du code de la consommation, et qui n'a pas établi ni même allégué qu'il avait procédé à un contrôle de l'utilité de ces travaux et de la capacité des clients à contracter, ne pouvait qu'avoir conscience des pratiques illicites de ses commerciaux.
Enfin, aucun élément ne permet d'établir que la société RCOH avait connaissance de l'existence de ces pratiques, laquelle ne peut seulement résulter de la consolidation des résultats de la filiale au sein du groupe, avant le début du mois de février 2019, lorsque s'est manifesté le soudain besoin de s'assurer que M. [T], qui venait de décliner la proposition de M. [J] de devenir co-gérant, et alors que la société était alertée des départs de plusieurs salariés pour rejoindre l'un de ses anciens gérants dans une entreprise concurrente, respectait les dispositions du code de la consommation, de sorte qu'aucune prescription des faits fautifs ne saurait être retenue.
Les pratiques commerciales abusives reprochées à M. [T] et matériellement établies étaient susceptibles d'entraîner des litiges commerciaux et de nuire à l'image de marque de la société RCOH, de sorte qu'en ne mettant pas en oeuvre le contrôle de l'activité de ses équipes auquel il était tenu en application des dispositions de son contrat de travail, le salarié a commis une faute grave justifiant la rupture immédiate de son contrat de travail.
Le licenciement de M. [T] est par conséquent fondé et ses demandes d'indemnisation au titre des conséquences de la rupture ne peuvent qu'être rejetées.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
II. Sur les demandes accessoires
M. [T], qui succombe, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel, la décision attaquée étant infirmée sur ce point.
Aucune considération d'équité ne justifie d'allouer à la société RCOH une quelconque somme au titre de ses frais irrépétibles engagés tant en première instance qu'en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement rendu le 28 mars 2022 par le conseil de prud'hommes de Poitiers en ce qu'il a :
jugé que le licenciement pour faute grave de M. [H] [T] est justifié,
débouté M. [H] [T] de l'intégralité de ses demandes,
débouté la société RCOH de sa demande reconventionnelle faite au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,
Condamne M. [H] [T] aux dépens de première instance et d'appel,
Déboute les parties de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.