CA Rouen, ch. civ. et com., 10 avril 2025, n° 23/04021
ROUEN
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
M. N
Défendeur :
M. E.
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Vannier
Conseillers :
M. Urbano, Mme Menard-Gogibu
Avocats :
Me Barbier, Me Scolan, Me Solin, Me Absire, Me Marechal
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
La maison de M. [Z] a été endommagée par l'incendie de l'usine Lubrizol survenu en septembre 2019.
Il a sollicité M. [H] afin d'effectuer des travaux de peinture de sa maison et M. [W] a réalisé une partie de ceux-ci.
Le 7 novembre 2020, M. [Z] a constaté que la peinture appliquée au cours des travaux se décollait en divers endroits et a avisé MM. [H] et [W].
M. [H] a déclaré le sinistre à son assureur, les MMA, qui a dénié sa garantie.
Par acte de commissaire de justice du 19 septembre 2022, M. [Z] a fait assigner devant le tribunal de commerce de Rouen M. [H] lequel a fait mettre en cause les MMA IARD Assurances Mutuelles. Par ailleurs, les MMA IARD sont intervenues volontairement.
Par jugement en date du 16 octobre 2023, le tribunal de commerce de Rouen a :
- reçu la société MMA IARD en sa demande d'intervention volontaire,
- ordonné la jonction des rôles 2022 005235 et 2023 004046 sous le numéro
2022 005235,
- condamné Monsieur [N] [H] à payer à Monsieur [E] [Z] la somme de 12 287,04 euros TTC, somme qui sera révisée à la date du jugement en fonction de l'indice BT 46 applicable aux travaux de peinture,
- condamné Monsieur [N] [H] au paiement d'intérêts légaux de retard à compter de la notification du présent jugement,
- débouté Monsieur [H] de sa demande d'être garanti des condamnations prononcées à son encontre par les sociétés MMA Iard Assurances Mutuelles et MMA Iard,
- c ondamné Monsieur [N] [H] à payer la somme de 1 000 euros à Monsieur [E] [Z] ainsi que la somme de 500 euros à la société MMA Iard Assurances Mutuelles et de 500 euros à la société MMA Iard sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Monsieur [N] [H] aux dépens de l'instance, dont les frais de greffe liquidés à la somme de 90,98 euros.
Monsieur [N] [H] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 6 décembre 2023.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 décembre 2024.
EXPOSE DES PRETENTIONS
Vu les conclusions en réponse du 27 novembre 2024, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de Monsieur [N] [H] qui demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu le 16 octobre 2023 par le tribunal de commerce de Rouen, en ce qu'il a :
- reçu la société MMA Iard en sa demande d'intervention volontaire,
- condamné Monsieur [N] [H] à payer à Monsieur [E] [Z] la somme de 12 287,04 euros TTC, somme qui sera révisée à la date du jugement en fonction de l'indice BT 46 applicable aux travaux de peinture,
- condamné Monsieur [N] [H] au paiement d'intérêts légaux de retard à compter de la notification du présent jugement,
- débouté Monsieur [H] de sa demande d'être garanti des condamnations prononcées à son encontre par les sociétés MMA Iard Assurances Mutuelles et MMA Iard,
- condamné Monsieur [N] [H] à payer la somme de 1 000 euros à Monsieur [E] [Z] ainsi que la somme de 500 euros à la société MMA Iard Assurances Mutuelles et de 500 euros à la société MMA Iard sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Monsieur [N] [H] aux dépens de l'instance, dont les frais de greffe liquidés à la somme de 90,658 euros,
Statuant à nouveau,
- débouter Monsieur [E] [Z] de l'intégralité de ses demandes formées à l'encontre de Monsieur [N] [H],
A titre subsidiaire :
- dire que les travaux réalisés par Monsieur [N] [H] constituent un ouvrage au sens des articles 1792 et suivants de code civil,
- dire que les désordres allégués par Monsieur [E] [Z] sont de nature décennale.
- condamner, en tout état de cause, solidairement les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à garantir Monsieur [N] [H] de toutes les condamnations qui viendraient à être prononcées à son encontre, au profit de Monsieur [E] [Z],
En tout état de cause,
- débouter Monsieur [E] [Z] et les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, en ce qu'elles sont dirigées contre Monsieur [H],
- condamner solidairement et en tout état de cause in solidum Monsieur [E] [Z] et les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à Monsieur [N] [H] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement et en tout état de cause in solidum Monsieur [E] [Z] et les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Vu les conclusions du 24 octobre 2024, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens des sociétés MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles qui demandent à la cour de :
A titre principal,
- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Rouen du 16 octobre 2023 en ce qu'il a reconnu l'existence d'un ouvrage, au sens de l'article 1792 du code civil,
En conséquence,
- débouter Monsieur [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre des MMA,
- condamner toute partie succombante à payer la somme de 4.000 ' aux MMA sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais d'appel, outre les entiers dépens d'instance d'appel,
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Rouen du 16 octobre 2023 en ce qu'il a reconnu l'absence de désordres de nature décennale,
En conséquence,
- débouter Monsieur [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre des MMA,
- condamner toute partie succombante à payer la somme de 4.000 euros aux MMA sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais d'appel, outre les entiers dépens d'instance d'appel,
A titre très subsidiaire
- prononcer l'inopposabilité du rapport d'expertise amiable en date du 13 octobre 2021,
En conséquence,
- débouter Monsieur [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre des MMA,
- condamner toute partie succombante à payer la somme de 4.000 euros aux MMA sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais d'appel, outre les entiers dépens d'instance d'appel,
A titre infiniment subsidiaire, en cas de condamnation,
- ordonner l'opposabilité de la franchise contractuelle à hauteur de 800 euros, au bénéfice des MMA, en cas de condamnation sur le fondement de la garantie décennale, et 1.600 euros en cas de condamnation sur le fondement des dommages intermédiaires.
Vu les conclusions du 21 octobre 2024, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de Monsieur [E] [Z] qui demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [N] [H] à payer à M. [E] [Z] la somme de 12.287,04 euros TTC, somme à réviser à la date du jugement en fonction de l'indice BT 46,
- en conséquence, le condamner au paiement d'une somme de 13.187,07 euros avec intérêts de droit à compter du 8 novembre 2023,
- le débouter de toutes ses demandes reconventionnelles,
- condamner le même à payer à M. [Z] la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux entiers dépens.
MOTIFS DE LA DECISION
Exposé des moyens :
M. [H] soutient que :
- il a été sollicité ainsi que M. [W] par M. [Z] pour effectuer des travaux de nettoyage et de réfection de peinture sur l'immeuble de ce dernier qui présentait des dépôts de suie à la suite d'un incendie dans le voisinage et après réception sans réserve des travaux effectués conformément aux préconisations du fabricant du produit, M. [Z] s'est plaint de ce que la peinture s'écaillait ;
- M. [W] ayant déclaré le sinistre à son assureur, la MAAF, le Cabinet Saretec a été désigné en qualité d'expert amiable et M. [Z] a reçu 12 287,04 euros de la MAAF et de M. [W] ;
- M. [H] a déclaré le sinistre aux MMA qui ont dénié leur garantie contestant la nature décennale des désordres ;
- l'expert s'est contenté d'un constat visuel du bas de la maison de sorte qu'il n'a pas déterminé l'ampleur du dommage et n'a pas déterminé quel était le défaut affectant les travaux ; il n'a déposé qu'un rapport intermédiaire ;
- le montant des travaux de reprise établi par l'expert est exorbitant et correspond à quatre fois le montant des travaux initiaux de 5 410,90 euros ;
- l'avis du fabricant de la peinture qui a été sollicité par l'expert n'est pas probant puisqu'il émane d'une personne dont l'intérêt est de ne pas rechercher si son produit est affecté d'un vice et les essais qui ont été réalisés par le fabricant l'ont été hors la présence des parties ;
- le rapport de la société Saretec ne peut servir exclusivement pour fonder la décision de la juridiction saisie et aucun autre élément de preuve n'est rapporté contre M. [H] ;
- il a souscrit auprès des MMA une assurance garantissant sa responsabilité civile et décennale y compris pour ceux des ouvrages non soumis à obligation d'assurance ;
- les travaux ont fait l'objet d'une réception et constituent un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil puisqu'il a réparé des fissures et que la peinture appliquée est destinée à la protection des façades et à l'étanchéité ;
- dès lors que la peinture s'écaille, sa fonction de protection de la façade et d'étanchéité n'est plus assurée et il s'agit là d'un désordre de nature décennale ;
- ayant déclaré une activité de peinture lors de la souscription de l'assurance, les MMA ont nécessairement reconnu que les travaux de peinture constituaient un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil et en contestant le caractère d'ouvrage de ces travaux, l'assureur fait perdre toute utilité au contrat ;
- il a souscrit une garantie couvrant les dommages intermédiaires et le bon fonctionnement des éléments d'équipement sur ouvrage même non soumis à obligation d'assurance ;
- les MMA ont manqué à leur obligation d'information, de loyauté et de conseil en ne conseillant pas M. [H] sur l'utilité et l'opportunité de l'assurance souscrite.
Les sociétés MMA font valoir que :
- les travaux de peinture sur l'existant réalisés par M. [H] ne constituent pas un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil ;
- la haute résistance de la peinture utilisée est une de ses propriétés mais ne constitue pas sa fonction ; elle n'assure aucune fonction d'étanchéité ;
- la police souscrite par M. [H] ne couvre, dans son volet responsabilité civile lorsque l'assuré exerce une activité de peinture, que les dommages causés aux tiers et ne portant pas sur les travaux ;
- la police couvre également l'activité de menuiserie intérieure qui doit faire l'objet d'une assurance obligatoire ;
- il n'existe aucune preuve d'un quelconque manquement à la loyauté imputable à l'assureur alors qu'il produit les conditions générales et particulières de la police ;
- l'écaillement de la peinture ne constitue pas un désordre ou un dommage de nature décennale ;
- faute d'ouvrage, la garantie applicable aux dommages intermédiaires ne s'applique pas ;
- M. [H] n'a pas souscrit la garantie relative à la garantie de bon fonctionnement des éléments d'équipement sur ouvrage non soumis à obligation d'assurance ;
- le rapport de la société Saretec ne peut servir exclusivement pour fonder la décision de la juridiction saisie et il n'est pas opposable aux MMA qui n'ont pas participé aux opérations menées par l'expert ;
- le rapport est sommaire et ne permet pas de déterminer l'ampleur des dommages ;
- sa franchise est opposable.
M. [Z] fait valoir que :
- selon les essais conduits par le fabricant, la peinture s'est écaillée parce qu'elle avait été posée sur une ancienne peinture en piolite qui avait généré des tensions de sorte que M. [H] aurait dû décaper ou appliquer un support spécifique ;
- l'expert ne s'est pas contenté d'un examen visuel sommaire du bas de la maison mais est monté dans les étages ;
- M. [Z] verse aux débats des photographies et divers éléments qui justifient de l'ampleur des désordres qui sont généralisés ;
- M. [H] a acheté la peinture et l'a appliquée, il lui appartient de démontrer la cause étrangère qu'il allègue ;
- le rapport est corroboré par l'analyse émanant du fabricant de la peinture, des photographies, des écailles de peinture et le fait que M. [W] n'a pas contesté sa responsabilité pas plus que son assureur, la MAAF ;
- l'expert s'est fait assister d'un économiste qui a chiffré le montant des réparations ;
- il vise l'article 1231-1 du code civil.
Réponse de la cour :
1°) sur la valeur probante du rapport de la SAS cabinet :
Dès lors que selon l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, il en résulte que, hormis les cas où la loi en dispose autrement, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties (Cass. Civ. 2, 9 février 2023 n° 21-15.784).
Il appartient à la partie qui se fonde sur un tel rapport d'expertise versé aux débats de produire d'autres éléments de preuve permettant de le corroborer.
Pour agir contre M. [H] et contre les MMA sur le fondement de l'article 1792 du code civil, M. [Z] fait état :
- du rapport du Cabinet Saretec du 13 octobre 2021 établi au contradictoire de M. [Z], de M. [H], de M. [W], du vendeur de la peinture, la société Caparol et de son fabricant, la société Daw France selon lequel la peinture s'écaille au pourtour de la façade avant en partie courante et au droit des tableaux de fenêtres, que l'hypothèse d'un support trop humide doit être privilégiée, que l'hypothèse d'un vice de la peinture ou du fixateur ne pourra être validée que par des analyses en laboratoire et avec l'accord du fabricant qui doit accepter de donner la composition exacte de son produit ;
- du compte rendu d'analyse du 6 octobre 2021 émanant de la société Daw, fabricant de la peinture, selon lequel celle-ci a été appliquée sur une peinture ancienne constituée de piolite dont la caractéristique est de fariner tout en restant adhérente de sorte que la peinture nouvelle a créé des tensions avec le support ancien et s'est détachée ;
- du rapport de vérification des coûts de reprise établi à la demande de la MAAF par la société Etudes & Quantum ;
- des chèques émanant de la MAAF, assureur de M. [W] et de ce dernier établis à l'ordre de M. [Z] afin de l'indemniser de la moitié de son préjudice ;
- des photographies de la maison de M. [Z] illustrant l'état dégradé de la peinture ;
- de morceaux d'écailles de peintures versés aux débats.
Le cabinet Saretec n'ayant pas exclu l'existence d'un vice affectant la peinture fabriquée par la société Daw, a indiqué qu'il était nécessaire de la faire analyser par un laboratoire et a précisé qu'une analyse était en cours par le fabricant lui-même. La cour constate toutefois que le cabinet Saretec a expressément écrit « Cependant, le fabricant Daw étant juge et partie, nous doutons fort qu'il relève un vice du matériau » de sorte que l'analyse émanant de la société Daw ne peut revêtir aucune force probante particulière.
Le rapport de vérification des coûts ayant été établi dans les mêmes circonstances que le rapport du cabinet Saretec, et cet écrit ne comportant aucune indication quant aux circonstances dans lesquelles les désordres sont survenus et leur imputabilité, ne saurait corroborer le rapport du Cabinet Saretec.
La reconnaissance de responsabilité implicite effectuée par M. [W] et la MAAF en payant la moitié des sommes réclamées par M. [Z] au titre de son préjudice ne saurait avoir aucune conséquence quant à l'action diligentée contre M. [H] ou contre les MMA.
Enfin, les photographies produites, si elles démontrent que la peinture est effectivement écaillée, ce qui n'est pas contesté par M. [H] ou par les MMA, ne permettent pas de corroborer le rapport en ce qu'il estime que l'hypothèse d'un support trop humide doit être privilégiée.
Il s'ensuit que le rapport du cabinet Saretec, dont les conclusions sont au demeurant hypothétiques, n'est pas corroboré par d'autres pièces probantes.
2°) Sur l'application de l'article 1792 du code civil :
L'article 1792 du code civil dispose que « Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère. »
Il est constant que par devis et facture établis par M. [H] les 22 juin et 19 octobre 2020, M. [H] a fourni et fait appliquer deux couches de peinture de type D2 sur la maison de M. [Z] après avoir nettoyé la façade, réparé des fissures et appliqué un produit fixateur.
Selon la documentation du vendeur de la peinture, la société Caparol, la peinture de classe D2 constitue un « film mince » ayant une fonction décorative apportant une coloration aux façades extérieures tout en protégeant les supports. La même documentation distingue les « revêtements de classe » D1, D2 et D3, cette dernière classe apportant la couche de peinture la plus épaisse des « revêtements d'imperméabilité » qui « résistent aux fissures présentes ou à venir » et présentent « souplesse dans le temps et bonne résistance aux intempéries » (pièce n° 4 des sociétés MMA).
La documentation émanant de la société Caparol produite par M. [H] selon laquelle la peinture de ravalement appliquée dénommée « Moresko Plus » de classe 2 est destinée à « la décoration et la protection des façades » n'est nullement contradictoire avec la documentation produite par les MMA qui vise la protection des supports et elle ne permet nullement d'affirmer que cette peinture est destinée à assurer l'étanchéité ou l'imperméabilisation du support sur lequel elle est appliquée.
Faute par M. [H] de démontrer que cette peinture a une fonction autre que décorative et qu'elle permet notamment d'assurer l'étanchéité à l'eau ou à l'air de la façade sur laquelle elle est appliquée, M. [H] échoue à démontrer qu'elle constitue un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil.
Par ailleurs, le fait d'avoir procédé à la réparation de fissures avant d'appliquer la peinture ne constitue pas un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil s'il n'est pas démontré que ces réparations ont eu pour objet de permettre une mise hors d'eau ou hors d'air ou d'assurer l'imperméabilisation de la façade avec un produit adéquat, ce dont M. [H] ne justifie pas.
Il s'ensuit que M. [H] doit être débouté de toutes ses demandes formées contre les MMA fondées sur la police d'assurance souscrite par lui garantissant sa responsabilité décennale ou celle garantissant sa responsabilité décennale même si elle porte sur des ouvrages non soumis à obligation d'assurance ou sur des dommages intermédiaires.
3°) Sur la demande en paiement formée par M. [Z] contre M. [H] :
L'article 1231-1 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
Selon devis du 22 juin 2020, M. [H] a été engagé pour fournir de la peinture de type D2 et en appliquer deux couches sur la maison de M. [Z] après avoir nettoyé la façade, réparé des fissures et appliqué un produit fixateur.
La facture des travaux a été émise par M. [H] le 19 octobre 2020 et il n'est pas contesté que quelques semaines après la fin des travaux, la peinture appliquée par M. [H] et par M. [W] a commencé à s'écailler, les photographies produites par M. [Z] illustrant suffisamment ce phénomène.
M. [H] ayant fourni et appliqué la peinture et étant tenu d'une obligation de résultat, il lui appartient de rapporter la preuve que la dégradation de la peinture procède d'une cause étrangère. A défaut de rapporter une telle preuve ou à défaut de démontrer que la cause étrangère revêt les caractères de la force majeure, les conséquences de l'inexécution contractuelle doivent intégralement être supportées par le débiteur.
M. [H] ne produit aucune pièce de nature à démontrer que la dégradation de la peinture qu'il a appliquée et qui est apparue quelques semaines après les travaux résulte d'une cause étrangère au sens de l'article 1231-1 du code civil de sorte qu'il doit être déclaré responsable du préjudice subi par M. [Z] du fait de l'inexécution contractuelle qui lui est imputée.
En se fondant sur le rapport établi par la société Etudes & Quantum, M. [Z] a précisé que le montant des travaux de reprise, comportant l'installation d'un échafaudage, s'élevait à 24 574,08 euros et qu'eu égard au fait que M. [W] et son assureur avaient réglé leur part sur cette somme, M. [H] devait en régler le solde de 12 287,04 euros.
Etant rappelé que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties et qu'il appartient à la partie qui se fonde sur un tel rapport d'expertise versé aux débats de produire d'autres éléments de preuve permettant de le corroborer, la cour constate que :
- des photographies produites par M. [Z], il résulte que sa maison comporte une tour de grande hauteur de sorte qu'un échafaudage est nécessaire pour effectuer les travaux de reprise ;
- le cabinet Etudes & Quantum a disposé d'un devis établi par une société ACA portant sur la location et le montage d'un échafaudage pendant un mois pour la somme de 12 090 euros (hors taxes) ;
- le cabinet Etudes & Quantum a disposé d'un devis établi par une société Lapostolle portant sur le grattage de la peinture non adhérente, la pose d'un enduit, le ponçage et l'application de deux couches de peinture pour un montant de 12 224,09 euros (hors taxes) sur 141,66 m² pour un chantier d'une durée de sept jours, montant ramené à 10 080,07 euros (hors taxes) après que le cabinet Etudes & Quantum a fait observer que la surface à traiter n'était que de 110 m².
Les devis ayant été visés dans le rapport du cabinet Etudes & Quantum, la cour dispose d'éléments suffisants pour statuer en se référant à ces pièces.
Le fait que la peinture appliquée par M. [H] doive être grattée explique le coût supérieur des travaux de reprise.
En revanche, la location de l'échafaudage ayant été calculée sur un mois pour 1650 euros (hors taxes) alors que le chantier est censé durer sept jours, seuls seront retenus neuf jours de location comprenant un jour pour le montage et un jour pour le démontage, soit 1650 / 30 x 9 = 495 euros.
Le cabinet Etudes & Quantum ayant estimé que l'offre de la société ACA était très proche de sa propre estimation, ce qui constitue une information émanant d'un professionnel qui a pu être discutée contradictoirement au cours de la présente procédure et qui n'a pas été utilement contredite par M. [H], il y a lieu de dire que la somme totale de reprise est de 12 090 ' 1650 +4 95 + 10 080,07 = 21 015,07 euros.
M. [W] et la MAAF ayant déjà réglé la somme de 12 287,04 euros, le solde de
21 015,07 - 12 287,04 = 8 728,03 euros doit être mis à la charge de M. [H] à titre de dommages et intérêts.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné Monsieur [N] [H] à payer à Monsieur [E] [Z] la somme de 12 287,04 euros TTC, somme qui sera révisée à la date du jugement en fonction de l'indice BT 46 applicable aux travaux de peinture, et M. [H] sera condamné à payer à M. [Z] la somme de 8 728,03 euros somme qui sera révisée à la date du jugement (16 octobre 2023) en fonction de l'indice BT 46 applicable aux travaux de peinture.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a :
- condamné Monsieur [N] [H] au paiement d'intérêts légaux de retard à compter de la notification du jugement,
- condamné Monsieur [N] [H] à payer la somme de 1 000 euros à Monsieur [E] [Z] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
4°) Sur la demande formée par M. [H] contre les MMA :
Il a déjà été dit que les dispositions de l'article 1792 du code civil étant sans application aux faits de l'espèce, M. [H] devait être débouté de toutes ses demandes formées contre les MMA fondées sur la police d'assurance souscrite par lui garantissant sa responsabilité décennale ou celle garantissant sa responsabilité décennale même si elle porte sur des ouvrages non soumis à obligation d'assurance ou sur des dommages intermédiaires.
Si un enduit de façade, qui constitue un ouvrage lorsqu'il a une fonction d'étanchéité (3e Civ., 4 avril 2013, pourvoi n° 11-25.198), ne constitue pas un élément d'équipement, même s'il a une fonction d'imperméabilisation, dès lors qu'il n'est pas destiné à fonctionner (3e Civ., 13 février 2020, pourvoi n° 19-10.249), il en est de même à plus forte raison pour une peinture dont il a déjà été dit qu'elle n'avait aucune fonction d'imperméabilisation.
M. [H] doit être débouté de sa demande formée contre les MMA fondée sur la police d'assurance souscrite par lui garantissant sa responsabilité au titre de la garantie de bon fonctionnement des éléments d'équipement d'un ouvrage.
M. [H] soutient que les MMA ont manqué à leur obligation d'information, de loyauté et de conseil en lui faisant souscrire une police d'assurance inadaptée à sa situation.
Etant observé que M. [H] a déclaré exercer une activité principale de peinture et une activité secondaire de menuiseries intérieures, la garantie de l'assureur en matière décennale a vocation à s'appliquer dès lors que M. [H] utiliserait une peinture assurant l'imperméabilisation de la façade, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce, ou effectuerait des travaux de menuiserie s'incorporant à l'immeuble de sorte que le contrat le liant aux MMA présente bien une utilité pour lui.
M. [H] n'ayant pas contesté avoir reçu les conditions générales de la police d'assurance et ayant versé aux débats les conditions particulières dudit contrat, il ne démontre pas la faute qu'il impute à son assureur.
Le jugement entrepris sera confirmé pour le surplus de ses dispositions.
Les dépens de la procédure d'appel seront mis à la charge de M. [H] et il sera condamné à payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à M. [Z].
En revanche, les faits de l'espèce s'opposent à ce qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans les rapports entre M. [H] et son assureur.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire en dernier ressort ;
Confirme le jugement du tribunal de commerce de Rouen du 16 octobre 2023 sauf en ce qu'il a condamné Monsieur [N] [H] à payer à Monsieur [E] [Z] la somme de 12 287,04 euros TTC, somme qui sera révisée à la date du jugement en fonction de l'indice BT 46 applicable aux travaux de peinture,
Statuant à nouveau :
Condamne M. [H] à payer à M. [Z] la somme de 8 728,03 euros somme qui sera révisée à la date du jugement (16 octobre 2023) en fonction de l'indice BT 46 applicable aux travaux de peinture ;
Y ajoutant :
Condamne M. [H] aux dépens de la procédure d'appel ;
Condamne M. [H] à payer à M. [Z] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Rejette la demande des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles formée contre M. [H] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.