CA Rennes, 3e ch. com., 25 mars 2025, n° 23/07040
RENNES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes de Loire-Atlantique
Défendeur :
Dentasmile (Association)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Contamine
Vice-président :
Mme Clement
Conseiller :
Mme Ramin
Avocats :
Me Bommelaer, Me Sirot
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Le CDOCD demande à la cour de :
- infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action du CDOCD,
En conséquence,
- déclarer recevable l'action du CDOCD,
- débouter l'association Dentasmile de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner l'association Dentasmile à verser au CDOCD la somme de 5 000,00 euros à titre de dommages-intérêts,
- condamner l'association Dentasmile à cesser immédiatement la concurrence déloyale dont elle est responsable en procédant au retrait sur les supports internet Facebook, docali.fr, careers-docali.fr, des actes de publicité litigieux, sous astreinte de 1 000,00 euros par jour de retard, à défaut de s'être mis en conformité afin de cesser la concurrence déloyale dans un délai de dix jours à compter de la signification de l'arrêt,
- autoriser l'association Dentasmile à publier à ses frais l'entière décision à intervenir dans le quotidien Ouest-France et sur son site internet docali.fr ou tout autre site qu'elle se serait substituée, sous astreinte de 1 000,00 euros par jour de retard, à défaut d'avoir publié et fait publier la décision et ce dans un délai de dix jours à compter de la signification de l'arrêt,
- autoriser le CDOCD à publier la décision à intervenir sur son site internet cdocd44.fr et sur sa communication officielle,
- condamner l'association Dentasmile à payer au CDOCD la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner l'association Dentasmile aux entiers dépens,
- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts, présentée par l'association Dentasmile pour procédure abusive.
L'association Dentasmile demande à la cour de :
à titre principal,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- déclaré l'action du CDOCD irrecevable,
et en conséquence,
- débouté le CDOCD de l'ensemble de ses demandes,
à titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour jugeait l'action du CDOCD recevable :
- juger irrecevables l'ensemble des demandes de condamnation et d'indemnisation formées le CDOCD au visa des griefs nouvellement émis par le CDOCD, s'agissant des « pratiques commerciales déloyales » imputées à l'association Dentasmile ainsi que des prétendues violations par elle de la « réglementation ayant trait à la publicité sur certains produits encadrée par le code de la santé publique » et du code du travail,
Et en conséquence,
- débouter le CDOCD de ces demandes,
- écarter l'application de l'article L. 6323-1-9 alinéa 2 du code de la santé publique, y compris aux faits postérieurs à son entrée en vigueur, cette disposition étant contraire au droit européen,
- à défaut, saisir la Cour de Justice de l'Union Européenne d'une question préjudicielle formulée dans les termes suivants :
« L'article 56 du TFUE et les dispositions de la Directive n°2000/31/CE sur le commerce électronique doivent-ils être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale, telle que l'article L.6323-1-9 alinéa 2 du Code de la santé publique, qui prévoit une interdiction générale et absolue pour les centres de santé de recourir à toute forme de publicité '
L'interdiction générale et absolue pour les centres de santé de recourir à toute forme de publicité est-elle nécessaire et proportionnée à l'objectif d'intérêt général poursuivi par le Législateur français visant à « éviter que ces centres, qui peuvent être créés et gérés notamment par des organismes à but lucratif, ne mettent en avant ces conditions de prise en charge [tenant à ce qu'« ils pratiquent le mécanisme du tiers payant et ne facturent pas de dépassements d'honoraires »] pour développer une pratique intensive de soins contraire à leur mission et de nature à porter atteinte à la qualité des soins dispensés » ' » ;
- et surseoir à statuer dans l'attente de la réponse de la Cour,
à titre infiniment subsidiaire,
- juger l'ensemble des demandes formées par le CDOCD mal-fondées ,
- et en conséquence,
- débouter le CDOCD de l'ensemble de ses demandes,
En tout état de cause,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- débouté le CDOCD de l'ensemble de ses demandes,
- condamné le CDOCD au paiement d'une somme de 3 000 euros à l'association Dentasmile au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné le CDOCD aux dépens de première instance,
- débouter le CDOCD de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de l'association Addentis [sic] de voir condamner le CDOCD à lui payer la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts compte tenu du caractère abusif de son action,
- et statuant de nouveau de ce chef,
- condamner le CDOCD au paiement d'une somme de 30 000 euros à l'association Dentasmile à titre de dommages intérêts compte tenu du caractère abusif de son action,
- condamner le CDOCD au paiement d'une somme de 20 000 euros à l'association Dentasmile au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
- condamner le CDOCD aux entiers dépens d'appel.
Il est renvoyé aux dernières écritures des parties visées supra pour l'exposé complet de leurs moyens et prétentions.
DISCUSSION
Le CDOCD soutient que l'association Dentasmile ne respecte pas des obligations légales ou réglementaires du code de la consommation (pratique commerciale trompeuse), du code de la santé publique (interdiction de la publicité en faveur des centres de santé) et du code du travail (inexécution du contrat de travail de bonne foi), créant une rupture d'égalité entre elle et ses salariés et les autres chirurgiens-dentistes constitutive de concurrence déloyale.
L'intérêt à agir du CDOCD
Le CDOCD fait valoir, en substance, qu'un ordre professionnel peut, au regard des missions qui lui sont confiées, agir en concurrence déloyale pour défendre l'intérêt collectif de sa profession en cause. Il soutient qu'il défend les intérêts éthiques et l'honneur et la dignité de la profession, qu'il bénéficie d'une habilitation légale pour obtenir réparation d'une atteinte causée à l'intérêt collectif de la profession, peu important qu'elle s'exerce sous un mode salarial ou libéral. Il ajoute que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l'action.
L'association Dentasmile fait valoir, pour l'essentiel, qu'en application de l'article L.490-1 du code de commerce, les organisations professionnelles ne peuvent introduire l'action que pour des faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession. Elle soutient que le CDOCD ne vise qu'à protéger les intérêts individuels d'une partie seulement des membres de la profession, à savoir exclusivement les chirurgiens-dentistes libéraux, contre ceux des professionnels salariés. Elle rappelle que les centres de santé, personnes morales, ne sont pas tenues aux règles déontologiques pour la défense desquelles le CDOCD dit agir.
Selon l'article122 code de procédure civile :
« constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »
L'article 31 du même code dispose :
« L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. »
Il est relevé que l'article L.490-1 du code de commerce n'est pas applicable à l'action en concurrence déloyale fondée sur l'article 1240 du code civil ou à l'action fondée sur les pratiques commerciales déloyales visées par le code de la consommation, en ce qu'il n'a trait qu'aux actions relatives aux protections légales du livre IV du même code, à savoir les actions relatives aux pratiques anti-concurrentielles et restrictives de concurrence, non invoquées par le CDOCD.
Selon l'article L.4121-1 du code de la santé publique :
« L'ordre des médecins, celui des chirurgiens-dentistes et celui des sages-femmes veillent au maintien des principes de moralité, de probité, de compétence et de dévouement indispensables à l'exercice de la médecine, de l'art dentaire, ou de la profession de sage-femme et à l'observation, par tous leurs membres, des devoirs professionnels, ainsi que des règles édictées par le code de déontologie prévu à l'article L. 4127-1. Ils contribuent à promouvoir la santé publique et la qualité des soins.
Ils assurent la défense de l'honneur et de l'indépendance de la profession médicale, de la profession de chirurgien-dentiste ou de celle de sage-femme. (...) »
En application de l'article L.4122-1 du même code :
« Le conseil national de l'ordre remplit sur le plan national la mission définie à l'article L.4121-2. Il veille notamment à l'observation, par tous les membres de l'ordre, des devoirs professionnels et des règles édictées par le code de déontologie prévu à l'article L. 4127-1. Il évalue, en lien avec des associations de patients agréées en application de l'article L. 1114-1 et selon des modalités précisées par décret, le respect du principe de non-discrimination dans l'accès à la prévention ou aux soins, mentionné à l'article L. 1110-3, par les membres de l'ordre. Il lui revient de mesurer l'importance et la nature des pratiques de refus de soins par les moyens qu'il juge appropriés.(...)
Il peut, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession de sage-femme, de médecin ou de chirurgien-dentiste, y compris en cas de menaces ou de violences commises en raison de l'appartenance à l'une de ces professions. »
L'article L.4123-1 du même code précise :
« Le conseil départemental de l'ordre exerce, dans le cadre départemental et sous le contrôle du conseil national, les attributions générales de l'ordre, énumérées à l'article L. 4121-2.(...)
Il peut, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession médicale, y compris en cas de menaces ou de violences commises en raison de l'appartenance à l'une de ces professions. (...) »
Cet article ne limite pas l'intervention des CDOCD à la seule vérification des obligations déontologiques des chirurgiens-dentistes, effectivement non applicables aux personnes morales qui les emploient, mais l'autorise à agir plus largement pour la réparation des préjudices subis du fait de l'atteinte à l'intérêt collectif de la profession.
L'action en concurrence déloyale a pour objet la réparation du préjudice résultant d'actes de concurrence déloyale, dont ceux, allégués en l'espèce, qui correspondent à la violation de règles de droit par l'association Dentasmile, susceptibles de causer une rupture d'égalité dans les conditions d'exercice des praticiens. L'action vise ainsi à défendre l'intérêt collectif des chirurgiens-dentistes, quel que soit leur mode d'exercice, de sorte que le CDOCD a un intérêt légitime au succès de ses prétentions.
Il convient d'infirmer le jugement de première instance et de déclarer recevable l'action du CDOCD.
La recevabilité des demandes formées par le CDOCD « au visa des griefs nouvellement émis »
L'association Dentasmile fait valoir que le CDOCD a modifié l'objet du litige en première instance en développant des griefs sans lien avec la violation de l'article L.6323-1-9 du code de la santé publique, seule initialement invoquée.
L'article 4 du code de procédure civile dispose :
« L'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
Ces prétentions sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense. Toutefois l'objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant. »
Le CDOCD a formé une action en responsabilité pour concurrence déloyale tendant à obtenir une indemnisation du préjudice susceptible d'en être résulté et à la cessation des actes déloyaux. Il a, dans sa motivation, allégué des manquements supplémentaires à celui initialement développé de violation de l'interdiction de publicité, manquements qu'il estime de nature à établir ladite concurrence déloyale. Ce faisant, il n'a fait qu'ajouter des moyens et arguments, sans modifier l'objet du litige constitué par ses prétentions indemnitaires et en cessation des actes déloyaux.
Les demandes du CDOCD seront déclarées recevables.
Au fond,
I - La concurrence déloyale
Constitue un acte de concurrence déloyale, susceptible d'être sanctionné par l'application de l'article 1240 du code de commerce, le non-respect d'une réglementation dans l'exercice d'une activité, qui induit nécessairement un avantage concurrentiel indu pour son auteur.
Les centres de santés sont régis par les articles L.6323-1 et suivants du code de la santé publique. Les articles D. 6323-1 à R. 6323-25 du code de la santé publique précisent les conditions de création et de fonctionnement des centres de santé.
L'article L. 6323-1 du code de la santé publique prévoit :
« Les centres de santé sont des structures sanitaires de proximité, dispensant des soins de premier recours et, le cas échéant, de second recours et pratiquant à la fois des activités de prévention, de diagnostic et de soins, au sein du centre, sans hébergement, ou au domicile du patient. Ils assurent, le cas échéant, une prise en charge pluriprofessionnelle, associant des professionnels médicaux et des auxiliaires médicaux.
(...)
Tout centre de santé, y compris chacune de ses antennes, réalise, à titre principal, des prestations remboursables par l'assurance maladie.
Les centres de santé sont ouverts à toutes les personnes sollicitant une prise en charge médicale ou paramédicale relevant de la compétence des professionnels y exerçant. »
L'article L.6323-1-1 du même code les autorise à :
« 1° Mener des actions de santé publique, d'éducation thérapeutique du patient ainsi que des actions sociales, notamment en vue de favoriser l'accès aux droits et aux soins des personnes les plus vulnérables ou à celles qui ne bénéficient pas de droits ouverts en matière de protection sociale (...) »
1-1) la violation des dispositions des articles L.121-1 et L.121-3 du code de la consommation
Constituent des pratiques commerciales déloyales interdites, les pratiques commerciales trompeuses.
Selon l'article L.121-1 du code de la consommation :
« Les pratiques commerciales déloyales sont interdites.
Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service.
Le caractère déloyal d'une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d'une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s'apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe.
Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L. 121-2 à L. 121-4 et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L. 121-6 et L. 121-7. »
Selon l'article L.121-2 du code de la consommation :
« Une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l'une des circonstances suivantes : (...)
2° Lorsqu'elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l'un ou plusieurs des éléments suivants :
a) L'existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service ; (...)
c) Le prix ou le mode de calcul du prix, le caractère promotionnel du prix notamment les réductions de prix au sens du I de l'article L. 112-1-1, les comparaisons de prix et les conditions de vente, de paiement et de livraison du bien ou du service ; (...)
3° Lorsque la personne pour le compte de laquelle elle est mise en 'uvre n'est pas clairement identifiable ; (...) »
L'article L.121-3 du code de la consommation ajoute :
« Une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l'entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu'elle n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte. »
En dehors des pratiques commerciales réputées trompeuses, listées par l'article L.121-4 du code de la consommation, il est nécessaire de démontrer que la pratique visée est de nature à modifier substantiellement le comportement économique du consommateur moyen.
a) Le CDOCD soutient que l'association Dentasmile se livre à des pratiques commerciales trompeuses en ayant recours à une communication de masse par les réseaux sociaux pour se doter d'une meilleur visibilité, via des « posts » ouverts à tout public, et qu'elle utilise ces canaux pour procéder à du dénigrement de la pratique réelle ou supposée des praticiens exerçant à titre libéral.
Les messages visés par le CDOCD pour justifier d'une communication de masse qui procéderait à un dénigrement de la pratique réelle ou supposée des praticiens exerçant à titre libéral, sont certes, accessibles à tout public mais ne développe qu'une information à destination de futurs salariés (pièce 65 - www.careers-docali.com). Les messages vantant des centres « innovants et performants » (pièce 6, 7 et 8) et un travail collectif pour « fournir les meilleurs soins (aux) patients » (pièce 5), mettant le patient « au coeur de l'organisation » comme étant leur « principal atout » (pièce 32) et, la diffusion de photographies d'une soirée de « l'équipe Dentasmile », montrant leurs bonnes relations pour être « plus motivés que jamais pour le bien-être de nos patients » (pièce 50), par leur caractère très général, ne sont pas sérieusement, par eux-mêmes, de nature à tromper les potentiels dentistes salariés, professionnels avisés.
b) Le CDOCD fait par ailleurs valoir que le contenu des informations communiquées est trompeur quant à la proximité, l'ouverture à tous, l'accessibilité à tous, la qualité des soins, l'existence d'une entité représentant de nombreux professionnels.
- la proximité
Le CDOCD s'appuie sur des avis Google de supposés patients se plaignant de l'absence de réponse de l'association Dentasmile à leurs sollicitations, notamment pour les prises de rendez-vous. Ces avis dont l'origine et les auteurs ne sont pas identifiables sont sans aucune valeur probante.
Quant à la publication Facebook mentionnant que « Dentasmile est proche de chez vous » (pièce 38), cela se réfère à un centre de Bellevue, [Localité 5], dont il n'est pas démontré qu'il n'existerait pas.
- l'ouverture à tous
Le CDOCD fait valoir que sur sa page Facebook, l'association Dentasmile dit être ouverte « pour toute la famille » (pièce 39) tandis que dans un courriel adressé au CDOCD, une personne se disant patiente, [E] [G], relate un refus de prendre en charge des moins de dix-huit ans au centre de [Localité 8]. Toutefois, cette seule copie de courriel, sans vérification in concreto du refus de prise en charge, qui n'est corroborée que par un avis Google de « Yazz » (pièce 40) d'une personne non identifiée et qui peut, d'ailleurs, être la même, est insuffisante à rapporter la preuve de l'absence de « l'ouverture à tous ».
- l'accessibilité à tous
Le CDOCD fait valoir que sur sa page Facebook, l'association Dentasmile dit être « accessible à tous » (pièce 32), elle en déduit que cela signifierait, pour le public profane, que tous les actes pratiqués sont en reste à charge zéro, ce qui ne ressort nullement du seul groupe de mot visé et n'est, dès lors, pas de nature à entraîner la confusion alléguée dans l'esprit du patient.
- la qualité des soins
Le CDOCD fait valoir que sur sa page Facebook, l'association Dentasmile vante la qualité des soins prodigués (pièce 72 et 74) ce qui serait contredit par des avis de patients.
Ces avis qui ne sont que les commentaires Google, dont l'origine et les auteurs ne sont pas identifiables, sont sans aucune valeur probante.
Le CDOCD produit également dans une copie de courriel adressé au président du CDOCD, d'une personne se disant patient, évoquant 22 rendez-vous pour la réalisation et la pose d'un appareil dentaire inopérant, patient dont le nom et l'adresse mail ont été effacés, sans que ses assertions ne soient vérifiées par un quelconque contrôle in concreto permettant de les corroborer.
- une entité représentant de nombreux professionnels
Le CDOCD n'explique pas sur quelle pièce il se fonde pour évoquer une publicité trompeuse à ce titre et ne fait qu'affirmer que cette entité n'existe pas. Il ne saurait en être tiré aucun élément de nature à établir des pratiques déloyales.
En conséquence, aucune publicité de nature à modifier substantiellement le comportement du patient moyen voire de futurs salariés n'est établie et par là même, aucune violation du code de la consommation de nature à constituer un acte de concurrence déloyale n'est démontrée.
1-2 ) la violation du code de la santé publique relative à l'interdiction de la publicité en faveur des centres de santé
Le CDOCD fait valoir que l'association Dentasmile : communique de nombreuses informations qui n'entrent pas dans les limitations posées par l'article L.6323-1-9 al.1 du code de la santé publique, déploie un arsenal de propositions d'offres d'emploi s'assimilant à une campagne de publicité désorganisant l'art dentaire, relaie des articles provenant de magazines non spécialisés qui ne sont pas de nature à promouvoir la santé publique, et qu'elle viole ainsi l'interdiction posée par l'article L.6323-1-9 al. 2 issu de l'ordonnance n°2018-17 du 12 janvier 2018.
L'association Dentasmile fait valoir que l'interdiction de publicité concernant les centres de santé n'étant entrée en vigueur que le 2 mars 2018, lendemain de la publication du décret n°2018-143 du 27 février 2018 relatif aux centres de santé, les faits antérieurs ne sont pas susceptibles de lui être reprochés.
Elle soutient que l'article L.6323-1-9 al. 2 est contraire au droit européen, qu'il convient d'en écarter l'application ou, à tous le moins, de saisir la CJUE d'une question préjudicielle.
Enfin, elle considère qu'en tout état de cause, les actes litigieux ne sont pas de nature publicitaire.
- l'application de la loi dans le temps
Il est rappelé qu'auparavant les centres de santé, personnes morales non soumises aux règles de déontologie de la profession de chirurgien-dentiste, n'avaient aucune interdiction réglementaire de publicité, contrairement aux chirurgiens-dentistes, personnes physiques.
Il n'est pas contesté que l'article L6323-1-9 du code de la santé publique est entré en vigueur le 2 mars 2018 ; il dispose :
« L'identification du lieu de soins à l'extérieur des centres de santé et l'information du public sur les activités et les actions de santé publique ou sociales mises en 'uvre, sur les modalités et les conditions d'accès aux soins ainsi que sur le statut du gestionnaire sont assurées par les centres de santé.
Toute forme de publicité en faveur des centres de santé est interdite. »
Selon l'article L6323-1-9 al. 2 modifié, entré en vigueur depuis le 21 mai 2023:
« Toute forme de publicité en faveur des centres de santé, ou incitant à recourir à des actes ou à des prestations délivrés par ces derniers, est interdite. »
Ainsi, sans justification de ce que les publications ou communications se soient poursuivies ou aient été visibles après le 2 mars 2018, les pièces 2, 5, 6, 7, 8 du CDOCD, correspondant à des captures d'écran ou des photographies prises antérieurement, ne peuvent établir l'existence d'une publicité interdite.
- la contrariété au droit européen
Par arrêt du 4 mai 2017 (affaire C-339/15, M. [U]), la Cour de justice de l'Union européenne a retenu que :
« 1) La directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) n 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil (« directive sur les pratiques commerciales déloyales »), doit être interprétée en ce sens qu'elle ne s'oppose pas à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui protège la santé publique et la dignité de la profession de dentiste, d'une part, en interdisant de manière générale et absolue toute publicité relative à des prestations de soins buccaux et dentaires et, d'autre part, en fixant certaines exigences de discrétion en ce qui concerne les enseignes de cabinets dentaires.
2) La directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique »), doit être interprétée en ce sens qu'elle s'oppose à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui interdit de manière générale et absolue toute publicité relative à des prestations de soins buccaux et dentaires, en tant que celle-ci interdit toute forme de communications commerciales par voie électronique, y compris au moyen d'un site Internet créé par un dentiste.
3) L'article 56 TFUE [relatif à la libre prestation de services à l'intérieur de l'Union ] doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui interdit de manière générale et absolue toute publicité relative à des prestations de soins buccaux et dentaires. »
Puis, sur renvoi préjudiciel, par ordonnance du 23 octobre 2018 (affaire C-296/18, Conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes de la Haute-Garonne), la CJUE a considéré que « l'article 8 de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique »), doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui interdit de manière générale et absolue toute publicité des membres de la profession dentaire, en tant que celle-ci leur interdit tout recours à des procédés publicitaires de valorisation de leur personne ou de leur société sur leur site Internet. »
Ces décisions et une mise en demeure de la Commission européenne du 24 janvier 2019 (pièce 50 Dentasmile), ont conduit la France qui prohibait tout recours aux procédés publicitaires pour les personnels de santé, à infléchir sa réglementation.
Désormais, l'article R4127-215-1 dans sa version en vigueur depuis le 25 décembre 2020 (décret n°2020-1658 du 22 décembre 2020) dispose :
« I. - Le chirurgien-dentiste est libre de communiquer au public, par tout moyen, y compris sur un site internet, des informations de nature à contribuer au libre choix du praticien par le patient, relatives notamment à ses compétences et pratiques professionnelles, à son parcours professionnel et aux conditions de son exercice.
Cette communication respecte les dispositions en vigueur et les obligations déontologiques définies par la présente section. Elle est loyale et honnête, ne fait pas appel à des témoignages de tiers, ne repose pas sur des comparaisons avec d'autres chirurgiens-dentistes ou établissements et n'incite pas à un recours inutile à des actes de prévention ou de soins. Elle ne porte pas atteinte à la dignité de la profession et n'induit pas le public en erreur.
II. - Le chirurgien-dentiste peut également, par tout moyen, y compris sur un site internet, communiquer au public ou à des professionnels de santé, à des fins éducatives ou sanitaires, des informations scientifiquement étayées sur des questions relatives à sa discipline ou à des enjeux de santé publique. Il formule ces informations avec prudence et mesure, en respectant les obligations déontologiques, et se garde de présenter comme des données acquises des hypothèses non encore confirmées. (...) »
En revanche, l'interdiction de toute publicité en faveur des centres de santé, laquelle n'existe que depuis 2018, a été maintenue. Cette interdiction ne concerne que les procédés commerciaux et non les informations objectives que ces centres peuvent mettre à disposition de leurs patients.
Saisie d'une question prioritaire de constitutionnalité, la Cour de cassation l'a renvoyée au Conseil constitutionnel au motif que « l'interdiction de toute forme de publicité, désormais édictée à l'égard des seuls centres de santé, est susceptible de porter atteinte au principe d'égalité ».
Par décision n°2022-998 QPC du 3 juin 2022, le Conseil constitutionnel a considéré que le second alinéa de l'article L.6323-1-9 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2028-17 du 12 janvier 2018 était conforme à la constitution en écartant le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi aux motifs que :
« (...)6- Les centres de santé sont ouverts à toutes les personnes sollicitant une prise en charge médicale relevant de la compétence des professionnels qui y exercent. Ils pratiquent le mécanisme du tiers payant et ne facturent pas de dépassements d'honoraires.
7. En adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu éviter que ces centres, qui peuvent être créés et gérés notamment par des organismes à but lucratif, ne mettent en avant ces conditions de prise en charge pour développer une pratique intensive de soins contraire à leur mission et de nature à porter atteinte à la qualité des soins dispensés. Il a ainsi poursuivi un motif d'intérêt général.
8. Dans la mesure où l'interdiction de la publicité en faveur des centres de santé contribue à prévenir une telle pratique, la différence de traitement critiquée par l'association requérante est en rapport avec l'objet de la loi. (...) »
Il ressort des décisions rendues par la CJUE que seules les interdictions absolues et générales de communication et de publicité opposées aux praticiens relatives à des prestations de soins buccaux et dentaires sont disproportionnées.
L'interdiction de publicité des centres de santé a, comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel, pour objet d'éviter une pratique de soins contraire à leur mission de permettre une accessibilité aux soins par des prestations remboursables et le recours au tiers payant, sans dépassements d'honoraires. Le risque étant, selon le Conseil constitutionnel, que la publicité réalisée pour promouvoir leur activité conduise à une pratique intensive des soins contraires à leur mission et mette en péril la qualité et la sécurité des soins des patients.
L'interdiction de publicité des soins buccaux et dentaires par les centres de santé, non absolue et générale, mais uniquement limitée à ces personnes morales qui ont accepté une mission spécifique dévolue par la loi et le règlement et les contraintes qui en résultent dans un motif d'intérêt général, n'apparaît pas disproportionnée en application du droit de l'Union européenne.
- la question préjudicielle
Selon l'article 267 du TFUE :
« La Cour de justice de l'Union européenne est compétente pour statuer, à titre préjudiciel :
a) sur l'interprétation des traités,
b) sur la validité et l'interprétation des actes pris par les institutions, organes ou organismes de l'Union.
Lorsqu'une telle question est soulevée devant une juridiction d'un des États membres, cette juridiction peut, si elle estime qu'une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, demander à la Cour de statuer sur cette question.
Lorsqu'une telle question est soulevée dans une affaire pendante devant une juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne, cette juridiction est tenue de saisir la Cour.(...) ».
Il résulte de l'article 1er, paragraphe 5, des Recommandations de la Cour à l'attention des juridictions nationales, relatives à l'introduction de procédures préjudicielles (2018/C 257/01) que :
« Un renvoi préjudiciel peut notamment s'avérer particulièrement utile lorsqu'est soulevée, devant la juridiction nationale, une question d'interprétation nouvelle présentant un intérêt général pour l'application uniforme du droit de l'Union ou lorsque la jurisprudence existante ne paraît pas fournir l'éclairage nécessaire dans un cadre juridique ou factuel inédit. ».
Dès lors qu'à l'aune des principes déjà dégagés par la CJUE, il n'apparaît pas que l'article L6323-1-9 al. 2 du code de la santé publique conduise à une interdiction absolue et générale de toute publicité relative aux soins buccaux et dentaires, il n'y a pas lieu de transmettre de question préjudicielle.
- les violations alléguées
La publicité peut être faite à des fins informatives ou commerciales lorsqu'elle est destinée à promouvoir directement ou indirectement des services. Les centres de soins ne sont autorisés à communiquer que des informations objectives portant sur l'identification du lieu de soins à l'extérieur de leur établissement, sur les activités et les actions de santé publique ou sociales mises en 'uvre, sur les modalités et les conditions d'accès aux soins ainsi que sur le statut du gestionnaire.
- la communication d'informations n'entrant pas dans la liste limitative des éléments sur lesquels un centre de santé est autorisé à communiquer
Le CDOCD verse aux débats des copies d'écran de communications sur Facebook de l'association Dentasmile sans rapport aucun avec les informations sur lesquelles elle est autorisée à communiquer et notamment : une image représentant un enfant avec le commentaire « Quand ton patient te dit que tu lui as sauvé la vie ! » (pièce 52 - 8 novembre 2019), des photographies des coulisses de « shooting photos » des salariés (pièce 58 - 4 septembre et 9 octobre 2020), des photographies de personnes trinquant dans un bar avec le message « Dentasmile continue de s'agrandir, découvrez notre prochaine destination : [Localité 6] ! » (pièce 51 - 17 janvier 2019). Ces publications sont interdites par l'article susvisé et donc de nature à constituer un acte de concurrence déloyale. Elles sont, au surplus, antérieures à l'autorisation donnée aux chirurgiens-dentistes de faire eux-mêmes de la promotion, participant de facto à la rupture d'égalité.
- le déploiement de propositions d'offres d'emploi s'assimilant à une campagne de publicité
Le CDOCD verse aux débats des copies d'écran de communications sur Facebook ou sur careers-docali.fr aux fins de recrutement massif de salariés avec les messages « cette année, sous le sapin de Dentasmile, vous trouverez des CDI par milliers » ou des citations de salariés valorisant leur activité au sein de la structure, les équipements, l'absence de gestion administrative, le partage et le dynamisme. Ces communications qui promeuvent indirectement ses services sont interdites par l'article susvisé et donc de nature à constituer un acte de concurrence déloyale. La plupart de ces publications sont, au surplus, antérieures à l'entrée en vigueur de l'autorisation donnée aux chirurgiens-dentistes de faire eux-mêmes de la promotion, participant de facto à la rupture d'égalité.
- le relai d'articles provenant de magazines non spécialisés
Les publications visées par le CDOCD sont antérieures à l'interdiction de publicité pour les centres de santé mais étaient toujours visibles sur la page Facebook Docali au 9 décembre 2020. Elles correspondent à des redirections vers des articles publicitaires pour du café ne tachant pas les dents (article du journal 20 minutes) (pièce 69) ou pour une brosse à dents connectée permettant de « désormais consulter l'historique de votre brossage de dents » (pièce 70). Elles donnent ainsi aux patients des informations non vérifiées scientifiquement. Outre que ces publications sont interdites par l'article L.6323-1-9 al.2 du code de la santé publique, elles participent à une perte de crédibilité de la fonction de chirurgien-dentiste.
1-3) la violation du code du travail
Le CDOCD fait valoir que l'association Dentasmile n'exécute pas de bonne foi les contrats de travail et agit de manière déloyale avec ses salariés en les exposant à des risques de condamnations ou de sanctions en ce qu'ils pourraient être poursuivis pour violation des règles déontologiques en acceptant tacitement la publicité faite par leur employeur alors même qu'ils sont soumis à une pression de réalisation du chiffre d'affaires en ce que leur rémunération comporte une part variable.
Ce disant, le CDOCD procède par allégations et ne justifie par aucune pièce de faits précis concernant un ou plusieurs salariés chirurgiens-dentistes de nature à caractériser une violation du code du travail.
1-4) - le préjudice
Seule la violation de l'interdiction de la publicité a été établie. Cette violation d'une réglementation visant à maintenir les centres de soins dans la mission qui leur a été confiée par la loi, constitue un acte de concurrence déloyale à l'égard des praticiens exerçant hors centre de santé, ce, a fortiori, avant l'entrée en vigueur de l'autorisation donnée aux chirurgiens-dentistes de faire eux-mêmes de la promotion, en ce qu'elle a nécessairement désorganisé l'accès au soins et, pour le relai d'articles non scientifiques et non vérifiés, qu'elle a induit une perte de crédibilité de la fonction de chirurgien-dentiste.
L'ampleur de la désorganisation des soins et de la captation de clientèle n'est pas déterminable au vu des seules pièces présentées par le CDOCD qui ne sont que des extraits de publication de sites internet non vérifiables. Par ailleurs, l'atteinte morale demeure limitée eu égard aux violations constatées supra. En outre, le CDOCD affirme sans l'établir par aucune des pièces versées, lesquelles ne portent que sur des violations alléguées qui ne s'étendent pas au delà de l'année 2020, que les actes se sont « multipliés jusqu'à ce jour ».
En conséquence, et au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient d'allouer au CDOCD une juste somme de 2 000 ' en réparation de ces préjudices.
De la même manière, faute de vérification de la poursuite de tels actes après 2020, il n'y pas lieu d'ordonner leur cessation sous astreinte, ni la publication de la condamnation à titre de complément d'indemnisation.
II - La demande reconventionnelle au titre de la procédure abusive
Selon l'article 32-1 du code de procédure civile : « Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 3 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés ».
En outre, le droit d'agir en justice trouve une limite dans l'abus d'exercice de cette liberté fondamentale, ce qui autorise la partie adverse à solliciter le paiement de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240, du code civil.
Il appartient aux juges du fond saisis d'une demande de dommages et intérêts sur ce fondement de caractériser la faute à l'origine de l'exercice du droit ayant fait dégénérer l'exercice du droit en abus.
Le CDOCD avait un intérêt à agir. Il n'est pas établi de témérité de son action ou d'inanité des arguments portés devant la cour qui y a fait droit, pour partie au moins.
Il convient de rejeter les demandes d'indemnisation à ce titre. Le jugement sera confirmé.
Dépens et frais irrépétibles
Succombant principalement à l'instance, la société Dentasmile sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et à payer une somme de 3 000 ' au CDOCD au titre des frais irrépétibles.
Par ces motifs,
La cour,
Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Nantes en toutes ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts de l'association Dentasmile pour procédure abusive,
Déclare recevable l'action et les prétentions du Conseil départemental de l'ordre des chirurgiens dentistes de Loire Atlantique,
Condamne l'association Dentasmile à payer au Conseil départemental de l'ordre des chirurgiens dentistes de Loire Atlantique la somme de 2 000 ' à titre d'indemnisation,
Rejette la demande du Conseil départemental de l'ordre des chirurgiens dentistes de Loire Atlantique de cessation de la concurrence déloyale sous astreinte,
Rejette la demande du Conseil départemental de l'ordre des chirurgiens dentistes de Loire Atlantique de publication de la décision,
Condamne l'association Dentasmile aux dépens de première instance et d'appel,
Condamne l'association Dentasmile à payer au Conseil départemental de l'ordre des chirurgiens dentistes de Loire Atlantique la somme de 3 000 ' au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande des parties,