CA Aix-en-Provence, ch. 1-1, 25 mars 2025, n° 21/03203
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Défendeur :
Syndicat des copropriétaires de la copropriété Le Phenix, SCI (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Toulouse
Conseillers :
Mme Ouvrel, Mme de Bechillon
Avocats :
Me Drujon d'Astros, Me Siboni, Me Valery, Me Fel
EXPOSÉ DU LITIGE
La SCI [7] possède plusieurs lots, dont les lots 41, 44 et 49, au sein de la copropriété [Adresse 8] située sur la commune Le Pradet.
Le 17 juillet 2015, un commandement de payer les charges de copropriété a été signifié à la SCI [7] pour un montant de 21 757,57euros.
Le 2 novembre 2015, en vertu de ce commandement de payer, le syndicat des copropriétaires a pris une hypothèque légale sur les lots de copropriété de la SCI [7] pour un montant de 24 525,07 euros.
Parallèlement, la SCI [7] a confié à M. [L] [N], notaire à Dives-sur-Mer, au sein de la SCP [L] [N]- Guy Pigaux - Guillaume Heron - [I] [N] (la SCP [N]-Pigaux-Heron) la rédaction des actes de vente des lots 41, 44 et 49.
M. [N], notaire, par courriers du 29 octobre 2015, a sollicité du syndic la fourniture de certificats conformément aux prescriptions des articles 20-1 de la loi du 10 juillet 1965 et 5 du décret du 17 mars 1967.
Les 5 novembre et 10 novembre 2015, le syndic de copropriété a dressé deux certificats mentionnant que la SCI [7] était débitrice à l'égard du syndicat des copropriétaires de certaines sommes.
Le 15 janvier 2016, la SCI [7] a vendu les trois lots de copropriété n°41, n°44 et n°49.
M. [N], notaire, a écrit le 21 janvier 2016 au syndic de copropriété pour les informer de la vente, et a remis au syndic les sommes suivantes :
- au titre de la vente du lot n°41 : un chèque de 2 059,62 euros correspondant aux charges restant dues au titre des charges de copropriété pour ce lot, et un second chèque de 300 euros au titre des honoraires de mutation, soit la somme, pour ce lot, de 2 359,62 euros,
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- au titre de la vente des lots n°44 et n°49, un chèque de 3 849,39 euros correspondant aux charges restant dues au titre des charges de copropriété pour ces lots, et un second chèque de 300 euros au titre des honoraires de mutation, soit la somme, pour ces lots, de 4 149,39 euros.
Les 27 janvier et 5 février 2016, le syndicat des copropriétaires a fait signifier deux oppositions sur prix de vente des lots pour un montant de 22 959,14 euros.
Le 2 mai 2016, l'avocat du syndicat de copropriétaires a mis en demeure la SCP [N]-Pigaux-Heron de régler entre les mains du syndic le montant des charges objet de l'opposition.
M. [N], notaire, dessaisi des fonds, n'a pas été en mesure de verser les sommes demandées.
Le 17 janvier 2017, l'assemblée générale des copropriétaires a autorisé le syndic à engager une procédure en responsabilité.
Par assignation du 5 octobre 2018, le syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8], représenté par son syndic en exercice, la SARL [5] a fait citer M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron, devant le tribunal de grande instance de Toulon aux fins de les voir notamment condamnés à lui payer la somme de 22 959,14 euros, objet de l'opposition formée entre ses mains, outre la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice subi.
Par assignation du 7 novembre 2018, M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron ont assigné la SCI [7] en intervention forcée devant le tribunal de grande instance de Toulon aux fins de voir ordonner la jonction avec la procédure principale, leur donner acte de ce qu'ils contestent leur responsabilité mais, subsidiairement, voir notamment la SCI [7] condamnée à les garantir de toutes condamnations prononcées contre eux.
Cette procédure a été enrôlée sous le n° RG 18/5259 et jointe à la procédure principale par mention au dossier le 5 février 2019.
Par jugement contradictoire rendu le 21 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Toulon a :
' condamné in solidum M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron à payer au syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8], représenté par son syndic en exercice, la SARL [5], la somme de 22 959,14euros,
' dit que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 6 mai 2016,
' dit que M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron seront relevés intégralement de cette condamnation et des intérêts y afférents par la SCI [7],
' débouté les parties de toutes leurs autres demandes,
' condamné solidairement M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron à payer au syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8], représenté par son syndic en exercice, la SARL [5], la somme de 2 500euros au titre des frais irrépétibles,
' ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,
' condamné in solidum M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron au paiement des dépens de l'instance.
Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré que le notaire avait commis une faute extra-contractuelle à l'encontre du syndicat des copropriétaires en manquant à son obligation de ne pas verser les fonds correspondant à l'opposition prévue par l'article 20 de la loi du 10 juillet 1967, ce d'autant qu'il avait versé dans le même temps des sommes couvrant celles objet de l'opposition au vendeur. Ainsi, il a retenu qu'au regard de la sanction légale consistant en l'inopposabilité du transfert de la somme au syndic, le notaire et l'étude devaient être condamnés in solidum à verser la somme de 22 959,14 euros au syndicat des copropriétaires, correspondant à la somme due à la date à laquelle elle aurait dû être versée, indépendamment des événements ultérieurs, soit trois mois après l'opposition.
Toutefois, il a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande indemnitaire en retenant qu'il n'avait pas perdu de chance de recouvrer la somme due par le copropriétaire-vendeur dès lors qu'elle avait été attribuée par cette décision, et qu'il ne se prévalait d'aucun préjudice causé par la faute du notaire.
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Par déclaration transmise au greffe le 3 mars 2021, M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron ont relevé appel de cette décision en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a dit qu'ils seront relevés intégralement de leur condamnation et des intérêts y afférents par la SCI [7] et débouté les parties de leurs autres demandes.
Par conclusions transmises le 20 janvier 2025, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron sollicitent de la cour qu'elle :
' ordonne la révocation de l'ordonnance de clôture,
' à défaut, écarte des débats les conclusions n°2 signifiées par le syndicat des copropriétaires [7] le 19 décembre 2024, ainsi que la pièce n° 34 communiquée le même jour,
' infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a accordé leur recours en garantie à l'encontre de la SCI [7].
Statuant à nouveau :
A titre principal :
' dise qu'ils n'ont commis aucune faute,
' prononce la nullité de l'opposition formée par le syndicat des copropriétaires [7] le 5 février 2016,
' déboute le syndicat des copropriétaires [7] de l'intégralité de ses demandes,
A titre subsidiaire :
' dise que le syndicat des copropriétaires [7] ne justifie pas d'un préjudice certain,
' déboute le syndicat des copropriétaires [7] de l'intégralité de ses demandes,
A titre infiniment subsidiaire :
' limite les demandes indemnitaires du syndicat des copropriétaires [7] à la somme de 6 566, 32 euros,
' confirme le jugement en ce qu'il a condamné la SCI [7] à les garantir de toutes condamnations pouvant être prononcées à leur encontre,
' condamne en conséquence la SCI [7] à les garantir de toutes condamnations pouvant être prononcées à leur encontre,
En toute hypothèse :
' condamne tout succombant à leur payer une indemnité de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.
Sur la révocation de l'ordonnance de clôture, ils soutiennent n'avoir pas pu répliquer aux conclusions de l'intimé notifiées à 11 jours de la clôture en pleine période de vacances, de sorte qu'il s'agit d'un non-respect du contradictoire constituant un motif grave justifiant la révocation de l'ordonnance de clôture.
A titre principal, sur leur responsabilité, ils soutiennent qu'ils n'ont commis aucune faute. D'une part, ils font valoir que si la totalité de la créance du syndicat des copropriétaires ne lui a pas été versé, cela ne résulte que de la carence du syndic, dans la mesure où il lui appartenait d'indiquer sur l'état daté le montant total de la créance du syndicat des copropriétaires, ce qui n'a pas été le cas. D'autre part, les appelants font valoir qu'ils n'avaient pas l'obligation d'attendre le délai de quinze jours à compter de la date où le syndicat des copropriétaires a été informé de la vente avant de débloquer les fonds, dans la mesure où l'opposition du 5 février 2016, qui ne comprenait pas le détail et l'imputabilité des sommes réclamées mais une unique somme, était nulle, en application de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1965, et donc inopposable au notaire.
A titre subsidiaire, sur le préjudice, ils font valoir que la demande indemnitaire de l'intimé se heurte au principe de réparation intégrale du préjudice en ce qu'elle en constitue une double indemnisation. En effet, ils exposent que la SCI [7] a fait l'objet d'une saisie immobilière devant le juge de l'exécution de Toulon, procédure au sein de laquelle l'intimé prouve que sa créance d'un montant de 88 214,75 euros qui a été admise à titre super privilégié et privilégié a été intégralement payée, de sorte que la somme de 22 959,14 euros objet de l'opposition du 5 février 2016 qui concernait tous les lots, a nécessairement été imputée sur cette somme.
A titre infiniment subsidiaire, ils font valoir que si l'intimé démontre que sa créance n'a été que partiellement payé, il lui appartiendra de justifier des sommes restant dues au titre des créances ayant donné lieu à opposition en prenant également en compte la déduction de la somme perçue au titre des ventes du 15 janvier 2016, soit 6 509,91 euros.
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De plus, ils font valoir que l'opposition du 19 juin 2018 qui fonde les poursuites dans le cadre de la procédure de saisie immobilière, a porté sur plusieurs des lots ayant fait l'objet de l'opposition du 27 janvier 2016, la comparaison aboutissant à la somme de 13 076, 23 euros au titre des lots non mentionnés dans l'opposition du 19 juin 2018, et uniquement dans celles de 2016, de sorte qu'il ne subsisterait, au maximum, qu'une somme de 6 566, 32 euros après déduction du montant déjà perçu par le syndicat des copropriétaires.
En outre, ils considèrent que l'intimé a commis une faute de nature à les exonérer de leur responsabilité, dès lors que l'absence de certains lots dans l'opposition du 19 juin 2018 démontre qu'il n'a pas déclaré l'intégralité de sa créance lors des opérations de saisie immobilière alors qu'il aurait pu être payé de l'intégralité, au regard de son superprivilège et privilège, ce qui a concouru à la survenance de son préjudice.
Ils contestent les arguments allégués par l'intimé en soutenant que les créances qui ont fait l'objet d'une condamnation par le jugement du 18 juin 2021 ne peuvent pas être les mêmes que celles concernées par l'opposition de 2016, dans la mesure où :
- la condamnation de 2021 repose sur des montants de charges arrêtés au 19 juin 2018 alors que, pour que des créances puissent faire l'objet d'une opposition valable, il faut une assemblée générale ayant approuvé les charges et leur répartition,
- la somme objet du jugement du 18 juin 2021 correspond à des charges dues pour des lots différents de ceux concernés par les oppositions de 2016.
A titre subsidiaire, si la cour devait estimer que leur responsabilité est engagée et que l'intimé justifie d'un préjudice indemnisable, ils sollicitent la condamnation de la SCI [7] à les garantir des condamnations prononcées à leur encontre, en vertu du principe de subrogation de l'article 1346 du code civil, dans la mesure où cette dernière est le débiteur final des sommes réclamées au titre des oppositions.
Par conclusions transmises le 20 décembre 2024 au visa des articles 1231-7 et 1240 du code civil et 19 et 20 de la loi du 10 juillet 1965, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, le syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8], représenté par son syndic en exercice, la SARL [5], demande à la cour de :
' confirmer en toutes ses dispositions la décisions entreprise,
' condamner M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Sur la responsabilité du notaire, le syndicat des copropriétaires soutient que le notaire a commis une faute engageant sa responsabilité délictuelle en méconnaissant les dispositions de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1965, dans la mesure où il s'est dessaisi des fonds de la vente au mépris de l'opposition formée dans le délai de quinze jours de la réception de son avis de mutation, alors qu'il aurait dû attendre un accord entre le syndic et le vendeur sur les sommes restants dues et, à défaut d'accord, l'expiration d'un délai de trois mois avant de verser les sommes objet de l'opposition au syndic, puisque la validité des oppositions n'est pas contestable et qu'elles n'ont pas fait l'objet d'une contestation judiciaire.
Ainsi, l'intimé fait valoir que le versement réalisé en méconnaissance des dispositions précitées lui est inopposable.
Sur le préjudice, le syndicat des copropriétaires soutient qu'à la suite d'une procédure de saisie-immobilière à l'encontre de la SCI [7] à laquelle il s'est greffé, cette dernière a été autorisée à vendre amiablement les biens saisis et une distribution judiciaire du prix de vente a eu lieu par jugement du 12 septembre 2019, mais ne lui a pas permis de recouvrer l'intégralité de sa créance compte tenu du nombre de créanciers inscrits.
De plus, il expose que la SCI [7] reste toujours redevable, eu égard à son insolvabilité, de charges de copropriété au titre de lots inachevés et donc non livrés qui s'élèvent à un montant de 21 183,48 euros, arrêté au 19 juin 2018 et fixé par un jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulon le 18 juin 2021.
Ainsi, il considère que le notaire lui a fait subir un préjudice de perte de chance de recouvrer les fonds séquestrés entre ses mains au titre de la créance arrêtée au 5 février 2016 qui s'élevait à un montant de 22 959,14 euros, possibilité qui lui était offerte en vertu des dispositions de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1965.
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La SCI [7], intimée par M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron, par acte d'huissier du 2 juin 2021, par procès verbal de recherches infructueuses de l'article 659 du code de procédure civile, et contenant dénonce de l'appel, n'a pas constitué avocat.
La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 30 décembre 2024.
Avant l'ouverture des débats, le 27 janvier 2025, compte tenu de l'accord des parties manifesté à cette fin, cette ordonnance a été révoquée et la clôture a de nouveau été prononcée le même jour.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La Cour d'appel précise, en l'état de la déclaration d'appel du 3 mars 2021 et de l'absence d'appel incident de la part de l'intimé, qu'il convient d'observer qu'aucune critique n'est émise contre les chefs de dispositif de la décision entreprise ayant fait droit à l'appel en garantie de M. [L] [N] et la SCP [N]-Pigaux-Heron par la SCI [7], et ayant rejeté la demande de dommages et intérêts sollicités par le syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8] en réparation du préjudice subi. Dès lors, la cour n'est saisie d'aucune remise en cause de ces décisions devenues définitives, et n'a pas à se prononcer à leur égard, même pour les confirmer.
Sur la demande de condamnation au paiement par le notaire de la somme objet de l'opposition
L'article 20 I de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 relative au statut de la copropriété dispose que lors de la mutation à titre onéreux d'un lot, et si le vendeur n'a pas présenté au notaire un certificat du syndic ayant moins d'un mois de date, attestant qu'il est libre de toute obligation à l'égard du syndicat, avis de la mutation doit être donné par le notaire au syndic de l'immeuble par lettre recommandée avec avis de réception dans un délai de quinze jours à compter de la date du transfert de propriété. Avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la réception de cet avis, le syndic peut former au domicile élu, par acte extrajudiciaire, opposition au versement des fonds dans la limite ci-après pour obtenir le paiement des sommes restant dues par l'ancien propriétaire. Cette opposition contient élection de domicile dans le ressort du tribunal judiciaire de la situation de l'immeuble et, à peine de nullité, énonce le montant et les causes de la créance. Le notaire libère les fonds dès l'accord entre le syndic et le vendeur sur les sommes restant dues. A défaut d'accord, dans un délai de trois mois après la constitution par le syndic de l'opposition régulière, il verse les sommes retenues au syndicat, sauf contestation de l'opposition devant les tribunaux par une des parties. Les effets de l'opposition sont limités au montant ainsi énoncé.
Tout paiement ou transfert amiable ou judiciaire du prix opéré en violation des dispositions de l'alinéa précédent est inopposable au syndic ayant régulièrement fait opposition. L'opposition régulière vaut au profit du syndicat mise en 'uvre du privilège mentionné à l'article 19-1.
L article 5 du décret n°67-223 du 17 mars 1967 dispose que le syndic, avant l'établissement de l'un des actes mentionnés à l'article 4, adresse au notaire chargé de recevoir l'acte, à la demande de ce dernier ou à celle du copropriétaire qui transfère tout ou partie de ses droits sur le lot ou les lots objets d'une même mutation, un état daté comportant trois parties.
1. Dans la première partie, le syndic indique, d'une manière même approximative et sous réserve de l'apurement des comptes, les sommes pouvant rester dues, pour chaque lot considéré, au syndicat par le copropriétaire cédant, au titre :
a) Des provisions exigibles du budget prévisionnel ;
b) Des provisions exigibles des dépenses non comprises dans le budget prévisionnel ;
c) Des charges impayées sur les exercices antérieurs ;
d) Des sommes mentionnées aux articles 26-6 et 33 de la loi du 10 juillet 1965 ;
e) Des avances exigibles.
Ces indications sont communiquées par le syndic au notaire ou au propriétaire cédant, à charge pour eux de les porter à la connaissance, le cas échéant, des créanciers inscrits.
2. Dans la deuxième partie, le syndic indique, d'une manière même approximative et sous réserve de l'apurement des comptes, les sommes dont le syndicat pourrait être débiteur, pour chaque lot considéré, à l'égard du copropriétaire cédant, au titre :
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a) Des avances mentionnées à l'article 45-1 ;
b) Des provisions pour les périodes postérieures à la période en cours et rendues exigibles en raison de la déchéance du terme prévue par l'article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965.
3. Dans la troisième partie, le syndic indique les sommes qui devraient incomber au nouveau copropriétaire, pour chaque lot considéré, au titre :
a) De la reconstitution des avances mentionnées à l'article 45-1 et ce d'une manière même approximative ;
b) Des provisions non encore exigibles du budget prévisionnel ;
c) Des provisions non encore exigibles dans les dépenses non comprises dans le budget prévisionnel.
Dans une annexe à la troisième partie de l'état daté, le syndic indique la somme correspondant, pour les deux exercices précédents, à la quote-part afférente à chaque lot considéré dans le budget prévisionnel et dans le total des dépenses hors budget prévisionnel. Il mentionne, s'il y a lieu, l'objet et l'état des procédures en cours dans lesquelles le syndicat est partie.
Sur la faute reprochée au notaire
En vertu des dispositions de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Le devoir de conseil du notaire chargé de donner aux conventions des parties les formes légales et l'authenticité implique une mission de renseigner leurs clients sur les conséquences des engagements qu'ils contractent.
Le notaire, professionnel du droit et officier ministériel, est tenu d'éclairer les parties et de s'assurer de la validité et de l'efficacité des actes rédigés par lui, c'est-à-dire des actes qui réalisent exactement les buts poursuivis par leurs clients et dont les conséquences sont pleinement conformes à celles qu'ils se proposaient d'atteindre. Son rôle est de veiller, à titre préventif, aux différends susceptibles de naître, notamment en les empêchant dans toute la mesure du possible.
Il est de la mission du notaire de conférer sécurité juridique complète aux actes qu'il reçoit et il ne peut se contenter d'exécuter un travail de pure transcription littérale des déclarations des personnes qui s'adressent à lui.
Ainsi, il doit préalablement à la rédaction des actes, procéder à la vérification des faits et conditions nécessaires pour assurer l'utilité, la sécurité juridique et l'efficacité de ses actes.
En l'occurrence, dans le cadre de la vente par la SCI [7] de ses lots 41, 44 et 49 au sein de la copropriété [7], M. [L] [N], notaire chargé de la rédaction des actes de vente, a sollicité le 29 octobre 2015 du syndic de la copropriété la fourniture des certificats requis en application des articles 20 I de la loi du 10 juillet 1965 et 5 du décret du 17 mars 1967.
Le 5 novembre 2015, le syndic a dressé un premier certificat au titre des lots 44 et 49, indiquant que la SCI [7] était débitrice envers la copropriété de la somme de 3 932,32 euros. Le 10 novembre 2015, le syndic a dressé un certificat au titre du lot 41, indiquant que la SCI [7] était débitrice envers la copropriété de la somme de 1 902,85 euros. Ces certificats précisaient également que des procédures étaient en cours et que la SCI [7] était redevable envers le syndicat des copropriétaires de la copropriété [6] [Adresse 11], au titre de l'ensemble des nombreux lots dont elle était propriétaire, une somme totale de 26 665,72 euros au 5 novembre 2015 et 25 062,87 euros au 10 novembre 2015.
Par acte du 15 janvier 2016, le lot 41 a été vendu par la SCI [7] au prix de 104 800 euros, et, par un acte notarié distinct du même jour, les lots 44 et 49 ont été vendus au prix de 120 000 euros.
Le 21 janvier 2016, M. [L] [N], notaire, a écrit au même syndic de la copropriété, la SARL [5], conformément à l'article 20 de la loi de 1965 pour lui notifier les deux ventes intervenues, leur objet, le nom des acquéreurs, et lui transmettant un chèque de 2 059,62 euros au titre des charges restant dues par le vendeur sur le lot 41, un chèque de 300 euros au titre des honoraires de mutation, un chèque de 3 849,39 euros au titre des charges de copropriété restant dues par le vendeur s'agissant des lots 44 et 49, ainsi qu'un chèque de 300 euros au titre des honoraires de mutation, soit la somme totale de 6 509,01 euros.
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Par acte délivré par huissier de justice le 27 janvier 2016, le syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8] a fait signifier à M. [L] [N], notaire, une opposition fondée sur l'article 20 de la loi de 1965 au titre de sa créance sur la SCI [7] à hauteur de 22 959,14 euros dont 22 616,86 euros en principal. Le 5 février 2016, le syndicat des copropriétaires a fait délivrer à M. [L] [N], notaire, une nouvelle opposition au même titre et pour la même somme correspondant à des charges de copropriété impayées sur de nombreux lots de copropriété entre janvier 2014 et mars 2016.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 mai 2016, le conseil du syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8] a mis en demeure M. [L] [N], notaire, de régler entre les mains du syndic le montant des charges objet de l'opposition du 5 février 2016, à hauteur de 22 959,14 euros.
En effet, il appert que par acte du 17 juillet 2015, le syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8] avait délivré à la SCI [7] un commandement de payer les charges de copropriété à hauteur de 21 757,57 euros par référence à un décompte du 1er juillet 2015 reprenant l'historique des sommes dues par la SCI [7] pour l'ensemble des nombreux lots dont elle était propriétaire, les ayant acquis les 28 octobre 2011 et 1er février 2013. Sur la base de ce commandement, le syndicat des copropriétaires avait fait inscrire une hypothèque légale, publiée le 3 novembre 2015, au service de la publicité foncière, sur les lots 2, 8, 12, 20, 23, 29, 40, 41, 42, 44 et 45 appartenant à la SCI [7], pour garantir la créance de 21 525,07 euros, et donc, au total, à hauteur de 24 525,07 euros.
Or, le 12 mai 2016, M. [L] [N] répond avoir adressé la somme de 6 509,01 euros au syndic de copropriété le 21 janvier 2016, conformément aux deux états datés qui lui avaient été précédemment communiqués, avoir reçu l'opposition, mais ne plus détenir de fonds lui permettant de régler les sommes réclamées. Il résulte du décompte des ventes du 15 janvier 2016 que M. [L] [N] a effectivement, notamment, remis le 22 janvier 2016 à l'avocat de la vendresse les sommes de 32 893,02 euros et 32 957,97 euros au titre des ventes des lots 41, 44 et 49 intervenues.
Il ressort de ces éléments que le notaire a répondu aux exigences de l'article 5 du décret de 1967 en sollicitant du syndic l'état daté relatif aux charges liées précisément au trois lots vendus et en s'acquittant du montant ainsi déclaré à hauteur de 6 509,01 euros auprès du syndic dans les quinze jours de la vente des biens.
En revanche, alors qu'il a reçu deux oppositions les 27 janvier et 5 février 2016 dans les quinze jours de la notification des deux ventes intervenues, conformément à l'article 20 I de la loi de 1965, M. [L] [N] s'est libéré de l'intégralité des fonds issus de la vente sans justifier avoir obtenu l'accord entre le syndic et le vendeur sur les sommes restant dues, accord inexistant, et sans attendre, dans ce cas, l'expiration d'un délai de trois mois après l'opposition ainsi délivrée.
M. [L] [N] invoque la nullité de l'opposition du 5 février 2016 pour irrespect des dispositions de l'article 20 de la loi de 1965 en ce qu'elle n'énonce pas le montant et les causes de la créance, mais fait état d'une somme globale de 22 959,14 euros sans précision complémentaire sur le détail des sommes dues, ni imputation par lots. Or, quand bien même cette opposition ne répond pas aux exigences de l'article sus-visé, force est de relever que cet acte n'a pas été contesté par les parties habilitées à agir à son encontre, de sorte qu'elle existe en tant que telle, le notaire ne pouvant, de son propre chef, se faire juge de sa validité et décider de ne pas la mettre en oeuvre à raison d'une irrégularité soulevée a posteriori. Il appartenait donc à M. [L] [N] de prendre en compte la dite opposition et, en premier lieu d'attendre le délai de quinze jours suivant la notification des ventes en vue d'une possible opposition, ce d'autant qu'à la lecture de l'état daté du 5 novembre 2015, le syndic avait fait état d'une dette plus importante de 26 665,72 euros au titre de l'ensemble des lots détenus par la SCI [7] dans la copropriété. Or, en l'espèce, il appert que M. [L] [N] s'est libéré des fonds principaux les 22 et 26 janvier 2016, alors que l'opposition lui a été délivrée le 27 janvier 2016, moins de quinze jours après la notification des ventes, effectuée le 21 janvier précédent.
La faute de M. [L] [N] est donc caractérisée et sa responsabilité est engagée.
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Sur le préjudice du syndicat des copropriétaires
La sanction légale de tout paiement ou transfert amiable ou judiciaire du prix opéré en violation des dispositions de l'article 20 I de la loi de 1965 tient en l'inopposabilité de celui-ci au syndic ayant régulièrement fait opposition.
Toutefois, il appartient au syndicat des copropriétaires de la copropriété la SCI [7] de démontrer le caractère certain du préjudice souffert.
En effet, il est établi que l'opposition formée par le syndic au nom du syndicat des copropriétaires le 27 janvier 2016 à hauteur de 22 959,14 euros se rapporte aux charges dues par l'intimée au titre de l'ensemble des lots par elle détenues dans la copropriété.
Or, la SCI [7] a fait l'objet d'une procédure de saisie immobilière. Par jugement du 28 juin 2018, la vente amiable des lots 1, 2, 3, 4, 5 et 6 a été constatée. Aux termes du jugement du 12 septembre 2019 rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Toulon, une distribution judiciaire du prix de vente a été opérée, la somme à distribuer s'élevant à 1 000 000 euros. Concernant la créance du syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8], le juge de l'exécution a validé intégralement cette créance en la ventilant ainsi :
' 75 542,17euros à titre de super privilège du syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8] au titre de l'article 2374 du code civil pour l'exercice en cours et les deux derniers exercices échus,
' 12 672,58euros à titre de privilège du syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8] au titre de l'article 2374 du code civil pour les charges et travaux relevant des articles 10 et 30 de la loi du 10 juillet 1965 pour les deux exercices antérieurs à ceux qui précédent,
Soit un total de : 75 542,17 + 12 672,58 = 88 214,75euros.
Le syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8] a acquiescé à cette décision qui est donc définitive à son égard.
A la lecture du jugement du 12 septembre 2019, il appert que les émoluments de l'avocat poursuivant ont été prélevés sur les sommes à revenir au syndicat des copropriétaires, à hauteur de 1 570,29 euros pour le super privilège et 263,42 euros pour le privilège, de sorte que c'est une somme de 86 381,04 euros qui est revenue au syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8] à l'issue de cette décision. Plusieurs créanciers ont ainsi bénéficié de cette distribution du prix de vente de 1 000 000 euros, la décision précisant que les créanciers bénéficiant d'hypothèque ayant un rang postérieur ne pourraient être colloqués, en l'absence de fonds disponibles.
A contrario, cela signifie que le syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8] en a bénéficié, notamment à raison de ses super privilèges et privilèges, en premier rang. Il est au demeurant justifié de ce qu'une somme précisément de 86 381,04 euros lui a été virée le 21 février 2020.
Pourtant, le syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8] affirme ne pas avoir pu percevoir l'intégralité de sa créance compte tenu du nombre de créanciers inscrits. C'est à lui de démontrer que tel a effectivement été le cas, sans procéder par simple voie d'affirmations.
Certes, la SCI [7] était propriétaire de nombreux lots dans la copropriété et redevables de charges au titre de l'ensemble de ces lots.
Toutefois, dans le cadre de la présente procédure, M. [L] [N] et la SCP [N]-Pigaux-Heron ne peuvent être redevables que des sommes non recouvrées et figurant dans l'opposition des 27 janvier et 5 février 2016 qu'ils auraient dû prendre en compte.
Ainsi, M. [L] [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron ne peuvent être responsables du défaut de paiement des condamnations issues du jugement du 18 juin 2021, obtenu sur la base d'une assignation du 13 avril 2017, donc bien postérieure à l'opposition du 5 février 2016 et ces condamnations ne correspondant pas nécessairement à des sommes garanties par l'opposition de 2016.
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Le syndicat des copropriétaires justifie d'une opposition réalisée le 19 juin 2018 dans le cadre de la vente des lots2, 8, 18, 20, 23, 29, 40, 42, 45, 48, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56 et 59 de la SCI [7] à hauteur de 96 706,59 euros. Cette opposition a servi de fondement aux poursuites du syndicat des copropriétaires dans le cadre de la procédure de saisie immobilière.
La comparaison entre cette opposition et celles des 27 janvier et 5 février 2016 démontre que plusieurs lots sont communs et leurs dettes reprises. Toutefois, il appert que plusieurs lots mentionnés dans les oppositions de 2016 n'ont pas été repris dans l'opposition du 19 juin 2018, faisant apparaître, ainsi que justifié par la pièce 20 des appelants, une créance de 13 076,23 euros dénoncée en 2016, mais non reprise en 2018, de sorte que cette somme n'a pas pu être incluse dans les 86 381,04 euros perçus, et que le syndicat des copropriétaires n'a pas pu en être alors désintéressé. Sur cette somme, il convient de déduire les versements effectués par M. [L] [N] à hauteur de 6 509,91 euros. Ainsi, en définitive, il apparaît que le syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8], malgré les procédures engagées ensuite, y compris en saisie immobilière, n'a pas été désintéressé d'un solde de 6 566,32 euros au titre des oppositions des 27 janvier et 5 février 2016 que M. [L] [N] aurait dû prendre en compte. Tel est le préjudice découlant directement et certainement de la faute commise par le notaire, l'intimé ne démontrant pas avoir dû conserver à sa charge d'autres sommes issues des oppositions litigieuses.
La décision entreprise sera donc infirmée sur le montant du préjudice retenu et donc de la condamnation mise à la charge in solidum de M. [L] [N] et de la SCP [N]-Pigaux-Heron.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
M. [L] [N] et la SCP [N]-Pigaux-Heron qui succombent au litige, supporteront les dépens de première instance et d'appel. En outre, l'indemnité à laquelle ils ont été condamnés en première instance au titre des frais irrépétibles sera confirmée, et, une indemnité supplémentaire de 3 000 euros sera mise à leur charge au bénéfice du syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8], sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en considération de l'équité et de la situation économique respectives des parties.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné in solidum M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron à payer au syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8], représenté par son syndic en exercice, la SARL [5], la somme de 22 959,14 euros,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions soumises à la cour,
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Condamne in solidum M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron à payer au syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8], représenté par son syndic en exercice, la SARL [5], la somme de 6 566,32 euros,
Condamne in solidum M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron au paiement des dépens,
Condamne in solidum M. [N], notaire, et la SCP [N]-Pigaux-Heron à payer au syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 8] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
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Déboute M. [L] [N] et la SCP [N]-Pigaux-Heron de leur demande sur ce même fondement.