CA Nîmes, 4e ch. com., 11 avril 2025, n° 24/02443
NÎMES
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Défendeur :
Mogwai et Cie (Sté), Majesticfilatures Retail (SAS), Association syndicale libre de l'ensemble immobilier opération oratoire
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Codol
Conseillers :
Mme Vareilles, M. Maitral
Avocats :
Me Vajou, Me Pericchi, Me Vancrayenest, Me Chabaud, Me Giudicelli, Me Aumont, Me Deneux, Me El Houssali
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Vu l'appel interjeté le 19 juin 2024 (n° RG 24/02456) par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C du [Adresse 3] [Localité 6] à l'encontre de l'ordonnance de référé rendue le 15 juillet 2024 par le tribunal judiciaire d'Avignon dans l'instance n° RG 23/00568 ;
Vu l'appel interjeté le 18 juillet 2024 (RG n° 24/02443) par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C du [Adresse 3] [Localité 6] à l'encontre de l'ordonnance de référé rendue le 15 juillet 2024 par le tribunal judiciaire d'Avignon dans l'instance n° RG 23/00568 ;
Vu l'ordonnance de jonction du 23 juillet 2024 rendue par la présidente de la 4ème chambre commerciale de la cour d'appel de Nîmes poursuivant l'instance sous le seul et unique numéro 24/02443 ;
Vu l'avis de fixation de l'affaire à bref délai du 30 août 2024 ;
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 12 mars 2025 par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C du [Adresse 3] [Localité 6], appelant, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 7 novembre 2024 par la SCI Mogwai et cie, intimée, appelante à titre incident, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 9 octobre 2024 par l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier 'Opération oratoire', intimée, appelante à titre incident, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 2 octobre 2024 par la SAS Majesticfilatures Retail, intimée, appelante à titre incident, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;
Vu l'ordonnance du 30 août 2024 de clôture de la procédure à effet différé au 20 mars 2025 ;
Vu les conclusions remises par la voie électronique le 25 mars 2025 par la SCI Mogwai et cie, intimée et appelante à titre incident, aux fins de révocation de l'ordonnance de clôture du 20 mars 2025, ou à défaut de rejet des débats des conclusions et pièces tardivement notifiées le 19 mars 2025 par la SAS Majesticfilatures Retail ;
Sur les faits
L'ensemble immobilier dénommé 'opération oratoire' est constitué de quatre bâtiments et de parkings. La SA [...] est directrice de l'association syndicale libre (ASL) de l'ensemble immobilier et syndic du syndicat des copropriétaires des bâtiments A, B et C et des parkings. Le bâtiment D est géré par un autre syndic.
La société Tudor city aux droits de laquelle vient la SCI Mogwai a consenti à compter du 1er octobre 1996 à la société Majesticfilatures Retail un bail commercial portant sur un local d'environ 289,26 M², situé au rez-de-chaussée du bâtiment C, sis [Adresse 3] à [Localité 6], constituant le lot n°605 de la copropriété. Ce local est situé sous le toit-terrasse de la résidence « L'Oratoire » qui est en forme de « L » et comporte deux branches orientées Est/Ouest et Nord/Sud. L'arrière-boutique du commerce de prêt à porter de la société Majesticfilatures Retail est située au croisement des deux branches.
La société Majesticfilatures Retail s'est plainte, à plusieurs reprises, auprès de son bailleur d'infiltrations d'eau subies depuis juin 2017. Les désordres se sont aggravés et le 31 octobre 2023, la société Majesticfilatures Retail a effectué une déclaration de sinistre auprès de son assureur.
De nombreuses investigations ont été menées pour déterminer l'origine des infiltrations et plusieurs entrepreneurs ont été mandatés pour tenter d'y remédier.
La SAS [...] a missionné en avril 2023 un expert. Ce dernier a déposé le 16 Août 2023 un rapport dans lequel il a conclu que :
- Les fuites affectaient une partie du plafond de l'arrière-boutique dans l'axe de la terrasse Nord/ Sud (point rouge sur le plan),
- La recherche de fuite effectuée par la société [...] en décembre 2022 avait permis de constater un défaut d'étanchéité de la bonde d'évacuation d'une terrasse privative, avec un lien direct avec les infiltrations qui se produisaient dans l'arrière-boutique du commerce Majesticfilatures Retail,
- Il était probable que les eaux infiltrées cheminaient au-dessus de la dalle du toit terrasse entre la bonde incriminée et le secteur affecté par les dommages à environ 5 mètres de la bonde, en passant par un trou situé au dessus du faux plafond affecté par les infiltrations
- Des points d'infiltration, autres que la bonde fuyarde déjà relevée, sont situés sous les jardinières posées sur les terrasses carrelées.
L'expert a proposé comme solution de reprise de déposer les jardinières et les grillages, démolir le carrelage, arracher le complexe d'étanchéité avec isolation inversée et tout refaire à neuf sur les trois terrasses.
Suivant procès-verbal d'assemblée générale du 14 novembre 2023, les copropriétaires de l'immeuble C ont voté la réalisation des travaux de réfection d'étanchéité de la terrasse située au-dessus du magasin Majesticfilatures Retail, suivant devis de la société [...] d'un montant de 109.224 euros, outre les honoraires du syndic et l'assurance dommages-ouvrage pour un total de 114.104 euros.
Suivant procès-verbal d'assemblée générale du 15 novembre 2023, les représentants de l'ASL de l'ensemble immobilier dénommé 'opération oratoire' ont voté la réalisation des travaux de réfection d'étanchéité de la terrasse, située au-dessus du magasin Majesticfilatures Retail, par la société [...] pour un montant de 112 172 euros TTC, outre les honoraires du directeur de l'ASL de 2 336 euros et l'assurance dommages-ouvrage de 2 150 euros.
La SCI Mogwai a accordé à la société Majesticfilatures Retail des franchises de loyer pour compenser son préjudice.
Sur la procédure
Par exploit du 29 novembre 2023, la société Majesticfilatures Retail a fait assigner la SCI Mogwai devant le juge des référés du tribunal judiciaire d'Avignon aux fins de la voir condamner à réaliser des travaux de nature à mettre fin aux désordres d'infiltrations et la voir condamner à lui payer des provisions à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices.
Par exploits des 31 janvier et 14 mars 2024, la SCI Mogwai a fait assigner en garantie le syndicat des copropriétaires du bâtiment C, sis [Adresse 3] à [Localité 6], et l'ASL de l'ensemble immobilier 'opération oratoire'.
Par ordonnance de référé du 15 juillet 2024, le président du tribunal judiciaire d'Avignon :
«Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ; cependant, dès à présent, vu l'article145 du code de procédure civile,
Tous droits et moyens des parties étant réservés,
Condamnons solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à réaliser tous travaux de nature à mettre un terme aux désordres décrits dans l'assignation et affectant les locaux loués à la société Majesticfilatures Retail [Adresse 3] [Localité 6], sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la signi'cation de la présente ordonnance,
Condamnons solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et 1'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures Retail la somme provisionnelle de 56 677,70 euros au titre du préjudice de jouissance,
Rejetons le surplus des demandes, notamment relatives au préjudice d'exploitation et au remboursement des franchises,
Condamnons solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures Retail la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejetons les autres demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire aux entiers dépens ».
Le syndicat des copropriétaires a relevé une première fois appel le 19 juin 2024 de cette ordonnance de référé pour la voir annuler ou à tout le moins réformer en ce qu'elle a :
au principal,
renvoyé les parties à se pourvoir ;
cependant, dès à présent, vu l'article 145 du code de procédure civile,
tous droits et moyens des parties étant réservés,
condamné solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à réaliser tous travaux de nature à mettre un terme aux désordres décrits dans l'assignation et affectant les locaux loués à la société Majesticfilatures Retail [Adresse 3] [Localité 6], sous astreinte de 500 euros /jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la signification de la présente ordonnance,
condamné solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'Association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures Retail la somme provisionnelle de 56 677,70 euros au titre du préjudice de jouissance,
condamné solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures Retail la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
rejeté la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6]
condamné solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'Association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire aux entiers dépens.
L'appel vise également l'ordonnance de référé du chef ayant condamné solidairement l'association syndicale libre et le syndicat des copropriétaires à garantir la société Mogwai de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre par la présente ordonnance.
Le syndicat des copropriétaires a relevé appel une seconde fois le 18 juillet 2024 de cette ordonnance de référé pour la voir annuler ou à tout le moins réformer en ce qu'elle a :
au principal,
renvoyé les parties à se pourvoir ;
cependant, dès à présent, vu l'article 145 du code de procédure civile,
tous droits et moyens des parties étant réservés,
condamné solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à réaliser tous travaux de nature à mettre un terme aux désordres décrits dans l'assignation et affectant les locaux loués à la société Majesticfilatures Retail [Adresse 3] [Localité 6], sous astreinte de 500 euros /jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la signification de la présente ordonnance,
condamné solidairement la société Mogawai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures Retail la somme provisionnelle de 56 677,70 euros au titre du préjudice de jouissance,
condamné solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures Retail la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
rejeté la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6]
condamné solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire aux entiers dépens.
Par ordonnance du 23 juillet 2024, la présidente de la 4ème chambre commerciale de la cour d'appel de Nîmes a ordonné la jonction des procédures N° RG 24/02443 et 24/02456 et dit que l'instance se poursuivra sous le seul et unique numéro 24/02443.
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6] a saisi le premier président de la cour d'appel de Nîmes d'une demande d'arrêt de l'exécution provisoire des condamnations prononcées à son encontre. Par ordonnance de référé du 13 décembre 2024, il a été débouté de ses demandes.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C du [Adresse 3]
[Adresse 3] [Localité 6], appelant, demande à la cour, au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile, de :
« Statuant sur l'appel formé par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C du [Adresse 3] [Localité 6], à l'encontre de l'ordonnance de référé rendue le 15 juillet 2024 par le juge des référés du tribunal judiciaire d'Avignon,
Le déclarant recevable et bien fondé,
Y faisant droit,
Confirmer la décision entreprise des chefs suivants :
- Rejeté les demandes relatives au préjudice d'exploitation et au remboursement des franchises
Infirmer la décision entreprise des chefs suivants :
' Au principal, renvoyé les parties à se pourvoir ; cependant, dès à présent, vu l'article 145 du code de procédure civile,
Tous droits et moyens des parties étant réservés,
' Condamné solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à réaliser tous travaux de nature à mettre un terme aux désordres décrits dans l'assignation et affectant les locaux loués à la société Majesticfilatures Retail [Adresse 3] [Localité 6], sous astreinte de 500 euros /jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la signification de la présente ordonnance ;
' Condamné solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures Retail la somme provisionnelle de 56 677,70 euros au titre du préjudice de jouissance ;
' Condamné solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures Retail la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
' Rejeté la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6] ;
' Condamné solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire aux entiers dépens ;
' Condamné solidairement l'ASL et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C du [Adresse 3] à [Localité 6], représenté par son syndic en exercice, la SAS [...], à garantir la SCI Mogwai de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre par la présente ordonnance.
Et statuant à nouveau
A titre principal,
- Mettre hors de cause le syndicat des copropriétaires de l'Immeuble C du [Adresse 3] à [Localité 6], représenté par son syndic en exercice.
A titre subsidiaire,
- Juger que la demande de remboursement des franchises accordées par la SCI Mogwai et cie à la SAS Majesticfilatures Retail sont infondées et entachées de contestations sérieuses
- Débouter la SCI Mogwai et cie de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre du syndicat des copropriétaires de l'immeuble C du [Adresse 3] à [Localité 6], représenté par son syndic en exercice.
- Juger que l'ensemble des demandes provisionnelles formées par la SAS Majesticfilatures Retail sont entachées de contestations sérieuses.
- Juger que la demande de condamnation sous astreinte de réaliser les travaux est devenue sans objet
- Débouter la SAS Majesticfilatures Retail de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre du syndicat des copropriétaires de l'immeuble C du [Adresse 3] à [Localité 6], représenté par son syndic en exercice.
En tout état de cause,
- Débouter les intimés de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires, ainsi que de tout appel incident à l'encontre du concluant.
- Condamner solidairement la SCI Mogwai et cie et la SAS Majesticfilatures Retail à payer la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamner solidairement la SCI Mogwai et cie aux entiers dépens de première instance et d'appel. ».
Au soutien de ses prétentions, l'appelant fait valoir que les travaux de réfection de l'étanchéité prévus à la mi-avril n'ont pu débuter que le 13 juin 2024 en raison de la nécessité de déposer une déclaration préalable de travaux ; ils ont été réceptionnés le 17 septembre 2024 sans réserve. La demande de condamnation à effectuer les travaux sous astreinte est devenue sans objet. Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C ne peut à lui seul être condamné à effectuer les travaux et à indemniser la société Majesticfilatures Retail et la SCI Mogwai de leurs prétendus préjudices financiers. Il ne peut pas non plus être condamné in solidum avec l'ASL puisqu'il fait partie intégrante de l'ASL et que cela reviendrait à le condamner deux fois. Ce n'est pas parce que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C s'est prononcé en faveur des travaux de réfection qu'il a entendu les payer puisqu'il était expressément prévu qu'ils soient mis à la charge de l'ASL. Le choix de l'entreprise revenait in fine à l'ASL.
À titre subsidiaire, l'appelant expose que les désordres ont perduré parce que l'origine des sinistres a été mal identifiée par les techniciens intervenus et que les sinistres se sont multipliés. La société Majesticfilatures Retail et la SCI Mogwai ont fait preuve d'une parfaite inertie en se satisfaisant jusqu'au mois de novembre 2023 des investigations et réparations réalisées afin de mettre fin aux infiltrations survenues pour la première fois en juin 2017. Leurs demandes sont entachées de contestations sérieuses.
L'appelant fait observer que la société Majesticfilatures Retail a conclu à l'illicéité de la clause du bail selon laquelle elle ne pourrait invoquer la responsabilité de la bailleresse, ni exiger aucune indemnité ou diminuer de loyer pour des troubles causés par des tiers ou en cas d'inondation des locaux loués. Le juge des référés ne pouvait interpréter un contrat sans excéder ses pouvoirs. Il a outrepassé ses pouvoirs en accordant une provision alors que l'existence de l'obligation était sérieusement contestable. Il a procédé par déduction alors qu'aucune partie n'était en capacité de produire la surface réellement impactée par le prétendu préjudice de jouissance. La société Majesticfilatures Retail ne produit aucun élément comptable et/ou bancaire de nature à justifier des pertes d'exploitation invoquées. Seuls deux secteurs de son arrière-boutique seraient affectés par les infiltrations. Le syndicat des copropriétaires n'a commis aucune faute et n'a pas à rembourser au bailleur le 'geste commercial' qu'il a bien voulu consentir à son locataire.
Dans ses dernières conclusions, la société Mogwai et cie, intimée et appelante incidente, demande à la cour, au visa de l'article 835 du code de procédure civile, des articles 1231-1 et 1725 du code civil, et de l'article 700 du code de procédure civile,
« Confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné solidairement le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C situé [Adresse 3] ' [Localité 6] et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à garantir la SCI Mogwai de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre ;
Y ajoutant,
Rectifier l'erreur matérielle de l'ordonnance entreprise en ce que son dispositif ne reprend pas la condamnation solidaire du syndicat des copropriétaires de l'immeuble C situé [Adresse 3] ' [Localité 6] et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à garantir la SCI Mogwai de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre ;
Confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a rejeté les demandes de la société Majesticfilatures relatives au préjudice d'exploitation ;
Infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné solidairement la SCI Mogwai, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C situé [Adresse 3] ' [Localité 6] et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à réaliser tous travaux de nature à mettre un terme aux désordres décrits dans l'assignation et affectant les locaux loués à la société Majesticfilatures situés [Adresse 3] [Localité 6], sous astreinte de 500 euros jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la signification de la présente ordonnance ;
Infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné solidairement la SCI Mogwai, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C situé [Adresse 3] ' [Localité 6] et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures la somme provisionnelle de 56.677,70 euros au titre du préjudice de jouissance ;
Infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné solidairement la SCI Mogwai, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C situé [Adresse 3] ' [Localité 6] et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
Infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle rejeté les demandes relatives au remboursement des franchises ;
Statuant à nouveau,
Débouter le Syndicat des copropriétaires Immeuble C du [Adresse 3] [Localité 6], l'ASL de l'ensemble immobilier Opération oratoire et la société Majesticfilatures de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de la SCI Mogwai et cie ;
Dire n'y avoir lieu à référé sur les demandes de condamnation provisionnelle de la société Majesticfilatures en tout état de cause à l'encontre de la SCI Mogwai et cie ;
Condamner in solidum l'ASL de l'ensemble immobilier Opération oratoire et le syndicat des copropriétaires immeuble C du [Adresse 3] [Localité 6] à rembourser à la SCI Mogwai et cie la somme de 61.846,88 euros arrêtée au 15 septembre 2024, sauf à parfaire, au titre des franchises qu'elle a accordées à la société Majesticfilatures ;
Condamner tout succombant à payer à la SCI Mogwai et cie la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Le condamner en outre aux entiers dépens, dont le montant pourra être recouvré directement par la SELARL AvouéPericchi, avocat conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ; ».
La société bailleresse intimée expose que le syndicat des copropriétaires est un tiers par rapport à elle et elle n'est pas responsable des infiltrations d'eau dans les lieux loués qui ont leur origine dans les parties communes. Il ne saurait être imposé au bailleur les obligations du syndicat des copropriétaires relatives aux parties communes. Il peut être valablement dérogé par des conventions particulières à la répartition des obligations entre bailleur et preneur prévue par le code civil, sauf faute lourde du bailleur. En l'espèce, il ressort de la clause figurant à l'article 6 du bail commercial que la société Majesticfilatures Retail a renoncé à invoquer la responsabilité de la SCI Mogwai pour les désordres allégués. Les franchises accordées ne sont que l'expression d'une extrême bonne foi et d'une compréhension du bailleur à l'égard de son locataire.
La société bailleresse intimée indique que seuls deux secteurs de l'arrière-boutique du local de sa locataire ont été affectés par les infiltrations de sorte que cette dernière ne peut sérieusement soutenir qu'elle ne disposait d'aucune jouissance paisible. La locataire ne démontre ni même n'allègue avoir été empêchée d'exploiter son local conformément à sa destination contractuelle. Il n'est pas démontré avec l'évidence requise en référé que la responsabilité du bailleur soit engagée par des manquements de sa part en lien avec les désordres allégués.
À titre subsidiaire, la société bailleresse intimée rétorque que les demandes au titre de l'impossibilité de jouir de manière complète des locaux et de la perte du chiffre d'affaires se recoupent et ne visent qu'à réparer le même préjudice. La locataire ne produit pas de pièce susceptible de justifier ses demandes exorbitantes. Ni la marge brute de 66% n'est justifiée, ni la surface de 103,54 m² attribuée pour la « partie arrière » de son local. Il n'y a qu'un pourcentage d'une surface de 76,63 m² de l'arrière boutique qui est affecté par les infiltrations. Aucune pièce de nature à préciser la surface exactement impactée n'est produite. La baisse temporaire de 30% du loyer n'est pas justifiée.
La société bailleresse intimée réplique que les nombreuses investigations effectuées par le syndic n'étaient pas suffisantes et que les infiltrations ont persisté ; elle n'avait donc d'autre choix que d'assigner le syndic afin qu'il procède à des réparations concrètes pour remédier de manière définitive aux infiltrations. Le syndic ayant proposé une expertise amiable, elle n'a pas délivré son assignation aux fins d'expertise judiciaire. Elle n'a eu de cesse de s'impliquer dans le suivi des multiples investigations menées et a adressé des mises en demeure pour contester l'absence de réparation définitive. Le syndicat des copropriétaires est responsable des dommages causés aux propriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice des actions récursoires. L'article 9 des statuts de l'ASL de l'ensemble immobilier opération oratoire du 19 janvier 1995 met à la charge de l'ASL les travaux de réparation et de réfection des ouvrages d'étanchéité des toitures, de structures et de fondations. Il n'y a aucun doute sur l'origine des infiltrations qui proviennent des parties communes de l'immeuble. La condamnation solidaire du syndicat des copropriétaires de l'Immeuble C et de l'ASL à réaliser les travaux préconisés par l'expert ainsi qu'à garantir la SCI bailleresse de toute condamnation à son encontre est parfaitement fondée.
S'agissant des franchises de loyers accordées au preneur, la société bailleresse intimée précise que la société Majesticfilatures Retail en fait l'aveu réitéré en appel. Des franchises ont été consenties bien avant le 1er juillet 2022. Aucune somme du tableau des franchises ne saurait être exclue.
Dans ses dernières conclusions, l'association syndicale libre, intimée, appelante incidente, demande à la cour de :
« Recevoir l'appel incident de l'ASL de l'ensemble immobilier Opération oratoire,
Y faire droit,
Réformer l'ordonnance de référé en date du 15 juillet 2024 en ce qu'elle a condamné l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire solidairement avec la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], à :
- réaliser tous travaux de nature à mettre un terme aux désordres décrits dans l'assignation et affectant les locaux loués à la société Majesticfilatures Retail [Adresse 3], [Localité 6], sous astreinte de 500 euros /jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la signification de la présente ordonnance,
- à payer à la société Majesticfilatures Retail la somme provisionnelle de 56 677,70 euros au titre du préjudice de jouissance, outre 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et les dépens,
Débouter purement et simplement la SCI Mogwai et cie et la SAS Majesticfilatures Retail, de leurs demandes et de leur appel incident,
En tout état de cause, se déclarer incompétent en raison de l'existence de contestations sérieuses, sur les demandes et appel incident de la SCI Mogwai et cie et la SAS Majesticfilatures Retail
Condamner à la SCI Mogwai et cie à payer à l'ASL de l'ensemble immobilier Opération oratoire la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. ».
L'ASL intimée réplique que la demande de condamnation sous astreinte à réaliser les travaux se trouve sans objet, les travaux d'étanchéité ayant été exécutés et réceptionnés. Aucun manquement, ni faute ne peut lui être reproché. Elle a tout mis en oeuvre pour trouver l'origine des infiltrations. Aucune expertise n'a été sollicitée par la société Majesticfilatures Retail ou la SCI Mogwai.
L'ASL souligne que les demandes indemnitaires de la société Majesticfilatures Retail se heurtent à des contestations sérieuses. L'ASL n'a pas à supporter les dégradations ou conséquences financières des infiltrations qui ne proviennent pas des parties communes de son immeuble. La copropriété située à l'étage supérieur de l'immeuble n'a pas été attraite dans la procédure. L'interprétation de la clause excluant la garantie du bailleur pour fait d'un tiers ou en cas d'inondation des locaux loués ne peut que relever du pouvoir du juge du fond.
Dans ses dernières conclusions, la société Majesticfilatures Retail, intimée, appelante incidente, demande à la cour, au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile, des articles 1219, 1719 et suivants du code civil, et 1240 du code civil, enfin de l'article 14 alinéa 5 de la loi du 10 juillet 1965, de :
« Recevoir la société Majesticfilature Retail en ses conclusions d'intimée et d'appelante incidente
Y faisant droit
A titre principal
Débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6] de ses prétentions et de toutes ses demandes
Confirmer la condamnation sous astreinte de la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à réaliser tous travaux de nature à mettre un terme aux désordres décrits dans l'assignation et affectant les locaux loués à la société Majesticfilatures Retail [Adresse 3] [Localité 6], sous astreinte de 500 euros /jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la signification de la présente ordonnance,
Pour le surplus
Infirmer l'ordonnance entreprise sur le préjudice de jouissance
Condamner à titre provisionnel et solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire, à verser à la société Majesticfilatures Retail la somme de 178 746,70 euros pour la période du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2024 sous déduction des franchises consenties par le bailleur sur cette période à raison des divers dégâts des eaux, s'élevant à la somme de 44 792,08 euros,
Condamner à titre provisionnel et solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6] et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire, à verser à la société Majesticfilatures Retail la somme de 125 000 euros (cent vingt-cinq mille euros) à valoir sur son préjudice d'exploitation,
A titre subsidiaire
Débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6] de ses prétentions et de toutes ses demandes
Confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise du 15 juillet 2024 rendue par le président du tribunal judiciaire d'Avignon,
Y ajoutant
Condamner à titre provisionnel et solidairement la société Mogwai et cie, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], et l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire, à verser à la société Majesticfilatures Retail la somme de 2 933,04 euros pour la période du 1er juillet 2024 au 30 septembre 2024,
En toute hypothèse,
Condamner, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] [Localité 6], à verser à la société Majesticfilatures Retail la somme de 4 000 euros en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens d'instance ».
La société Majesticfilatures Retail fait valoir que le bailleur doit une garantie de jouissance au preneur. Même si le trouble est causé par des tiers, cela ne dispense pas le bailleur de son obligation de faire les réparations nécessaires autres que locatives. On ne peut déduire de la clause n°6 du bail une renonciation du preneur à invoquer la responsabilité de la SCI Mogwai, compte tenu de la nature des désordres et de sa qualité de copropriétaire au sein du syndicat des copropriétaires. Au demeurant, la SCI Mogwai, en consentant des franchises à son locataire et en recherchant in fine la responsabilité du syndicat, fait une lecture de cette clause conforme. Le locataire, ayant la qualité de tiers au sens de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, peut agir directement contre le syndicat en raison des troubles de jouissance inhérents au défaut d'entretien ou au vice de construction d'une partie commune. Le syndicat des copropriétaires a procédé à des votes portant sur les travaux d'étanchéité en février 2023 et novembre 2023. Il y a eu absence de travaux pérennes depuis juin 2017 et les désordres perdurent et même paraissent s'amplifier avec un sol très humide. La jouissance des locaux est partiellement affectée et les conditions de son exploitation ne sont pas optimales.
La société Majesticfilatures Retail précise que le sinistre impacte de manière directe une surface de l'ordre de 37 % de la superficie totale de la boutique (289,26 m²), portant sur l'arrière-boutique, les toilettes et la pièce n°1 (superficie de 107,09 m²); les désordres touchent maintenant des cabines d'essayage. Elle recevable et fondée à solliciter une réfaction du loyer sur une base de 30 % (soit une somme de 2 576 euros/mois) de celui-ci à compter du 1er juillet 2017 jusqu'à la date de réalisation des travaux et le temps de séchage nécessaire à la réalisation de tous les embellissements intérieurs. Le bailleur a consenti une franchise de 20% du loyer mais seulement à compter du 1er juillet 2022. Les pertes d'exploitation ne représentent pas la même indemnité ; elles visent à compenser la perte du chiffre d'affaires subie.
Pour un plus ample exposé, il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.
MOTIFS
1) Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture ou de rejet des conclusions de la société Majesticfilatures Retail
La notification par la société Majesticfilatures Retail de conclusions et pièces, la veille de l'ordonnance de clôture, ne constitue pas une cause grave justifiant qu'il soit procédé à sa révocation, en application de l'article 803 du code de procédure civile.
Les parties ont été avisées le 30 août 2024 de la clôture de la procédure à effet différé au 20 mars 2025.
La société Majesticfilatures Retail a conclu une première fois le 2 octobre 2024. Puis, elle a attendu le 19 mars 2025 pour communiquer de nouvelles conclusions récapitulatives actualisant le montant du préjudice de jouissance invoqué et faisant état de deux nouvelles pièces, dont un constat de commissaire de justice du 27 novembre 2024 et un courrier de l'inspection du travail du 15 janvier 2025, pour justifier de l'étendue dudit préjudice. En produisant, la veille de la clôture, ces documents dont elle était donc en possession depuis plusieurs mois, la société Majesticfilatures Retail a mis les autres parties dans l'impossibilité d'en prendre connaissance et de pouvoir exercer leur droit de défense. Il convient, par conséquent, d'écarter ces conclusions et pièces tardives des débats.
2) Sur la demande de travaux
Aux termes de l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
L'article 835, alinéa 1, dispose que : 'Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.'
La réfection de l'étanchéité des toitures terrasses engagée par l'ASL a débuté le 18 juin 2024. La réception est intervenue contradictoirement sans réserve le 17 septembre 2024.
La demande de condamnation sous astreinte du bailleur, du syndicat des copropriétaires et de l'ASL à réaliser les travaux de nature à mettre fin aux désordres est donc devenue sans objet.
3) Sur la demande de provision
Aux termes de l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Sur la responsabilité du bailleur
La franchise de loyer accordée par le bailleur ne saurait valoir reconnaissance non équivoque de sa part de sa responsabilité civile contractuelle.
L'article 1719 du code civil impose au bailleur de faire jouir paisiblement le preneur de la chose louée pendant la durée du bail.
L'article 1721 met à la charge du bailleur l'obligation de garantir le preneur des vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l'usage quand même le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail.
Toutefois, l'article 1725 du code civil dispose que le bailleur n'est pas tenu de garantir le preneur du trouble que des tiers apportent par voies de fait à sa jouissance, sans prétendre d'ailleurs aucun droit sur la chose louée ; sauf au preneur à les poursuivre en son nom personnel.
En l'occurrence, le bail conclu entre la SCI Mogwai et la société Majesticfilatures Retail stipule que le preneur ne pourra invoquer la responsabilité du bailleur, ni exiger du bailleur aucune indemnité ni diminution du loyer en cas de troubles de jouissance ou dommages causés par des voisins ou des tiers et ce à quelque titre que ce soit, notamment en cas de travaux effectués dans les immeubles voisins ou sur la voie publique.
L'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que "le syndicat des copropriétaires a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires".
Les travaux sur les parties communes de l'immeuble placé sous le régime de la copropriété et dans lequel sont situés les lieux loués n'incombant pas au bailleur, celui-ci ne peut être personnellement condamné à effectuer des réparations sur les parties communes (3ème Civ., 2 mars 1994, n°92-16.329).
Lorsque les désordres à l'origine des préjudices dont le preneur demande réparation affectent des parties communes de l'immeuble, chaque bailleur, pris individuellement, ne peut en être tenu responsable sauf à se voir reprocher de ne pas avoir procédé à toutes les diligences nécessaires pour que le syndicat des copropriétaires y mette fin ( 3e Civ., 11 avril 2019, n° 17-22.758).
En l'espèce, tout en indiquant que les infiltrations d'eau prennent naissance dans la toiture terrasse de l'immeuble, partie commune, la société Majesticfilatures Retail ne reproche pas à son bailleur d'avoir manqué de diligence dans la réalisation des travaux de réfection.
Il résulte des dires des parties lors de la réunion d'expertise, des factures et des courriers versés au débat que dès qu'elle a été avisée le 21 juin 2017 de l'existence d'un désordre, la SCI Mogwai l'a signalé au syndic des locaux du rez-de-chaussée qui lui a répondu que les fuites provenaient du local du dessus géré par un autre syndic. Le 21 septembre 2017, ella a transmis ces informations à sa locataire en lui joignant un constat amiable 'dégât des eaux' à remplir en vue de le transmettre aux assurances concernées. La SCI Mogwai a relancé le syndic le 9 janvier 2018 lorsque de nouvelles infiltrations d'eau sont survenues. Le syndic du local du dessus a missionné le 21 mai 2018 la société [...] pour qu'elle procéde à des travaux d'enduit de la façade fissurée et infiltrante. La société [...] est intervenue pour une recherche de fuite sur la terrasse carrelée les 14 novembre 2018 et 9 janvier 2019. La société [...] a été missionnée par la société [...] pour procéder à des travaux de reprise de l'étanchéité facturés le 29 juillet 2019. Des investigations complémentaires ont été effectuées les 6 et 7 juillet 2020 par la société [...]. Le 9 septembre 2021, le syndic gérant le local du dessus a missionné la société [...] pour qu'elle procéde à la réparation du toit terrasse. Le 5 octobre 2021, la société [...] a posé un couvre joint en façade et mis en oeuvre une résine sur la dernière marche d'escalier. La société Majesticfilatures Retail s'étant plainte le 29 octobre 2021 de la persistance des infiltrations d'eau, le syndic gérant le local du dessus a missionné à nouveau la société [...] le 19 novembre 2021. Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 29 novembre 2021, le bailleur a mis en demeure ce syndic de faire entreprendre des travaux propres à remédier aux infiltrations subies par sa locataire. La société [...] a été missionnée le 8 décembre 2021 pour procéder au nettoyage des joints en périphérie de la terrasse et à la pose d'un joint hydrofuge sur son contour. Un nouveau rapport a été déposé le 13 décembre 2021 par la société [...], à la demande du syndic [...]. Suivant devis du 4 janvier 2022, le syndic [...] a missionné la société [...] afin qu'elle procéde aux travaux de réalisation d'une résine et de dépose et repose du gravier. La SCI Mogwai a mis en demeure le 22 mars 2022 le syndic [...] d'entreprendre des travaux conformes au rapport de la société [...]. Le 23 mars 2022, le syndic [...] a répondu qu'un nouveau devis de recherche de fuite était en cours. La société [...] est à nouveau intervenue le 13 juin 2022. Une recherche de fuite par la société [...] le 23 décembre 2022 a permis de localiser une première source d'infiltration au niveau de la bonde d'évacuation d'une terrasse privative. Le 2 janvier 2023, la société [...] a émis un devis d'intervention sur cette bonde qui a été approuvé par le syndic [...].
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 30 mai 2022, la SCI Mogwai a mis en demeure la société [...] d'inscrire à l'ordre du jour de la prochaine assemblée la question de la réfection de l'étanchéité de la terrasse, puis de faire établir les devis nécessaires à la mise en concurrence obligatoire en fonction du montant des travaux arrêté par l'assemblée.
Il a été mis à l'ordre du jour de l'assemblée générale ordinaire du syndicat des copropriétaires du bâtiment C du 27 février 2023 et de l'ASL du 3 mai 2023 la réalisation des travaux d'étanchéité partielle ou totale de la terrasse suivant devis des sociétés [...] et [...].
Ce n'est que parce que la société [...] a proposé l'instauration d'une expertise amiable que la SCI Mogwai n'a pas fait délivrer l'assignation en référé expertise qu'elle avait projetée. Suite au dépôt du rapport de l'expert [N] du 16 août 2023, tant le syndicat des copropriétaires que l'ASL ont demandé des devis aux sociétés [...] et [...] qu'elles ont soumis à des assemblées générales des 14 et 15 novembre 2023.
Ainsi, le bailleur a multiplié les démarches auprès du syndic de copropriété et il pouvait légitimement croire que les investigations et interventions successives d'entreprises allaient être de nature à mettre fin aux désordres ; dans ce contexte, la contestation par le bailleur de sa responsabilité pour ne pas avoir procédé aux diligences nécessaires pour satisfaire aux demandes de sa locataire est sérieuse. La demande de provision doit, par conséquent, être rejetée en ce qu'elle est dirigée contre le bailleur.
Sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires du bâtiment C
L'état descriptif de division et réglement de copropriété précise que les parties privatives comprennent le revêtement des sols des locaux y compris le revêtement de sols du patio privatif mais non le dispositif d'étanchéité ni le gros oeuvre.
Les travaux d'étanchéité de la terrasse même privative relèvent du gros oeuvre et donc des charges générales de l'immeuble. D'ailleurs, l'assemblée générale des copropriétaires du bâtiment C s'est prononcée le 14 novembre 2023 en faveur des travaux de réfection de l'étanchéité de la terrasse située au-dessus du local commercial donné à bail à la société Majesticfilatures Retail, suivant devis de la société [...], reconnaissant ainsi que les travaux lui incombaient au moins pour partie dès lors qu'ils portaient sur les parties communes du bâtiment C.
Le rapport d'expertise de Monsieur [N] a mis en évidence un défaut total d'étanchéité de la toiture terrasse relevant d'un défaut d'entretien des parties communes. En vertu de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, la responsabilité du syndicat des copropriétaires est incontestablement engagée de plein droit, sans qu'il soit nécessaire de démontrer une faute de sa part.
Sur la responsabilité de l'ASL
L'ASL a pour objet la propriété et l'entretien des biens et équipements communs situés à l'intérieur du périmètre de l'ensemble immobilier non destinés à être attribués à un propriétaire ou à un syndicat de copropriétaires : espaces libres, passages, réseaux et équipements de toute nature créés ou réalisés par la société d'équipement développement valorisation.
En vertu de l'article 4 de ses statuts, l'ASL de l'ensemble immobilier Opération oratoire a la responsabilité de l'application de l'article 9 du cahier des charges relatif à la répartition des charges d'entretien, de réparation et de réfection des ouvrages d'étanchéité des toitures, de structures et de fondations.
Les infiltrations d'eau se sont produites au droit de la toiture terrasse du parking de l'oratoire. Les désordres proviennent donc à l'évidence des parties communes de l'ensemble immobilier géré par l'ASL. Lors de la convocation à l'assemblée générale ordinaire du 3 mai 2023, la SA [...] en sa qualité de directrice de l'association syndicale libre a d'ailleurs indiqué que les travaux pour remédier aux infiltrations se produisant dans le magasin de la société Majesticfilatures Retail étaient à prendre en charge par l'ASL.
Par conséquent, c'est à bon droit que le premier juge a considéré que le syndicat des copropriétaires du bâtiment C et l'ASL étaient incontestablement responsables des préjudices subis par la société Majesticfilatures Retail. La solidarité entre les responsables n'est pas de nature à octroyer une double réparation de son préjudice à la victime qui a seulement le choix de s'adresser à l'un ou l'autre.
Sur les préjudices subis par la société Majesticfilatures Retail
Il ressort du constat dressé le 31 octobre 2023 par commissaire de justice que de l'eau coule à travers le plafond de la partie cuisine dans l'arrière boutique de la société Majesticfilatures Retail ; que, dans la réserve, le sol est recouvert d'eau stagnante et qu'une partie du plafond est effondrée ; qu'il existe également des traces d'infiltrations au niveau du soubassement en angle de l'escalier dans la surface de vente et des traces d'humidité et de moisissure importantes dans le placard attenant. La société Majesticfilatures Retail ne peut indéniablement plus faire qu'un usage partiel des lieux loués. Son préjudice de jouissance est donc fondé en son principe.
Dans ses courriers électroniques des 29 octobre, 18 novembre et 15 décembre 2021, la société Majesticfilatures Retail a fait état de 50 M² inutilisables de son fonds de commerce sur les 289,26 M² de surface totale louée. Elle prétend, dans ses écritures, que ce sont 107,09 M² qui sont inexploitables en incluant la pièce n°1. L'intégralité de l'arrière boutique est désormais inutilisable du fait de l'extension des désordres qui affectent même, mais de manière très limitée, la surface de vente, le montant du préjudice de jouissance non contestable est évalué à 20% du loyer.
Du 1er janvier 2019 au 31 octobre 2023, le loyer s'élevait à 8 587,61 euros par mois. Le préjudice non contestable peut être arrêté à 99 616,28 euros pendant cette période de 58 mois.
Du 1er novembre 2023 au 30 septembre 2024, le loyer s'élevait à 8 888,18 euros par mois. Le préjudice non contestable peut être arrêté à 19 554 euros pendant cette période de 11 mois.
Le préjudice total non contestable est donc de 119 170,28 euros.
Il résulte du courrier versé au débat par le preneur que le bailleur a accepté de lui accorder une réduction de loyer de 20% à compter du 1er juillet 2022. Le preneur reconnaît également qu'il a bénéficié de la gratuité de deux mois de loyers en avril et mai 2022 mais pour d'autres causes qu'il se garde de citer. De plus, dans son courrier du 3 juin 2022, le preneur explique que le bailleur a consenti un effort exceptionnel pour tenir compte de la situation, corroborant ainsi les déclarations de ce dernier selon lesquelles la remise des loyers d'avril et de mai 2022 a bien été accordée suite aux infiltrations d'eau subies par le preneur.
Ainsi, d'après le tableau fourni par le bailleur qui tient compte d'une réduction de 25% accordée de mai à juillet 2023 mais également de l'absence de paiement du loyer de mars 2024, la société Majesticfilatures Retail a bénéficié d'une remise de loyers de 61 846,88 euros arrêtée au 15 septembre 2024 qui doit être retranchée de la somme de 119 170,28 euros. Une provision d'un montant de 57 323,40 euros sera, par conséquent, allouée au preneur.
La perte d'exploitation alléguée qui découlerait d'une baisse de chiffre d'affaires ne saurait se confondre avec le préjudice immatériel qu'est la privation partielle de la jouissance des lieux donnés à bail. En revanche, c'est à bon droit que le juge des référés a relevé que la boutique de prêt à porter exploitée par la société Majesticfilatures Retail n'avait jamais été fermée, que seule l'arrière boutique avait été impactée de façon certaine et que la demanderesse ne produisait aucun élément propre à démontrer l'existence d'une baisse du chiffre d'affaires ou de la fréquentation en lien avec les infiltrations.
Le préjudice financier de la société Majesticfilatures Retail faisait l'objet de contestations sérieuses, l'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande de provision, à ce titre.
4) Sur les demandes du bailleur
Les responsabilités du syndicat des copropriétaires du bâtiment C et de l'ASL étant retenues, sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, la SCI Mogwai qui a réparé une partie du préjudice subi par sa locataire en lui accordant des franchises de loyer, est bien fondée à leur en solliciter le remboursement.
Le syndicat des copropriétaires du bâtiment C et l'ASL seront, par conséquent, condamnés in solidum à payer à la SCI Mogwai la somme provisionnelle de 61 846,88 euros arrêtée au 15 septembre 2024 par le bailleur dans ses écritures.
En revanche, la demande de garantie formée par le bailleur est sans objet, aucune condamnation n'étant prononcée à son encontre.
5) Sur les frais du procès
L'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a alloué à la société Majesticfilatures Retail la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile mais infirmée en ce qu'elle a condamné la société Mogwai et cie à la payer solidairement avec le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C et l'association syndicale libre .
Les dépens de première instance seront mis à la charge conjointe du syndicat des copropriétaires de l'immeuble C et de l'association syndicale libre.
L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société Majesticfilatures Retail, qui ne dirige sa demande en cause d'appel qu'à l'encontre du syndicat des copropriétaires de l'immeuble C, et de lui allouer une indemnité de 2 500 euros, à ce titre.
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sera condamné aux dépens d'appel, dont la distraction sera ordonnée au profit de la SELARL AvouéPericchi qui en a fait la demande.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Déboute la SCI Mogwai de sa demande de rabat de l'ordonnance de clôture,
Ecarte des débats les conclusions et pièces notifiées le 19 mars 2025 par la voie électronique par la société Majesticfilatures Retail,
Confirme l'ordonnance du 15 juillet 2024 en ce qu'elle a débouté la société Majesticfilatures Retail de sa demande de provision au titre du préjudice d'exploitation,
L'infirme sur le surplus des dispositions soumises à la cour,
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Dit que la demande de condamnation solidaire de la société Mogwai et cie, du syndicat des copropriétaires de l'immeuble C sis [Adresse 3] à [Localité 6], et de l'association syndicale libre de l'ensemble immobilier Opération oratoire à réaliser tous travaux de nature à mettre un terme aux désordres, sous astreinte, est devenue sans objet,
Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires du bâtiment C sis [Adresse 3] à [Localité 6] et l'ASL de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures Retail la somme provisionnelle de 57 323,40 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice de jouissance,
Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires du bâtiment C sis [Adresse 3] à [Localité 6] et l'ASL de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la SCI Mogwai une provision de 61 846,88 euros sur le montant des franchises de loyers accordées à la société Majesticfilatures Retail, arrêtées au 15 septembre 2024,
Déclare sans objet la demande de garantie formée par la SCI Mogwai,
Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires du bâtiment C sis [Adresse 3] à [Localité 6] et l'ASL de l'ensemble immobilier Opération oratoire à payer à la société Majesticfilatures Retail une indemnité de 3 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés en première instance,
Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires du bâtiment C sis [Adresse 3] à [Localité 6] et l'ASL de l'ensemble immobilier Opération oratoire aux dépens de première instance,
Y ajoutant,
Déboute le syndicat des copropriétaires du bâtiment C sis [Adresse 3] à [Localité 6] de sa demande tendant à être mis hors de cause,
Condamne le syndicat des copropriétaires du bâtiment C sis [Adresse 3] à [Localité 6] à payer à la société Majesticfilatures Retail une indemnité de 2 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés en appel,
Condamne le syndicat des copropriétaires du bâtiment C sis [Adresse 3] à [Localité 6] aux entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de la Selarl AvouéPericchi, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.