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Décisions

CA Riom, ch. soc., 8 avril 2025, n° 22/01069

RIOM

Autre

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CA Riom n° 22/01069

8 avril 2025

08 AVRIL 2025

Arrêt n°

ChR/NB/NS

Dossier N° RG 22/01069 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F2CJ

[H] [R]

/

S.A. CONSTRUCTEL ENERGIE

jugement au fond, origine conseil de prud'hommes - formation paritaire de clermont-ferrand, décision attaquée en date du 14 avril 2022, enregistrée sous le n° f 20/00530

Arrêt rendu ce HUIT AVRIL DEUX MILLE VINGT CINQ par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Sophie NOIR, Conseiller

Mme Clémence CIROTTE, Conseiller

En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

M. [H] [R]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par M. [T] [N], défenseur syndical CGT muni d'un pouvoir du 17 mai 2022

APPELANT

ET :

S.A. CONSTRUCTEL ENERGIE

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Barbara GUTTON PERRIN de la SELARL LX RIOM-CLERMONT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND, avocat constitué, substitué par Me Thierry CARRON de la SELARL REQUET CHABANEL, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

INTIMEE

M. RUIN, Président en son rapport, après avoir entendu, à l'audience publique du 10 février 2025, tenue en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans qu'ils ne s'y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré après avoir informé les parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

La SA CONSTRUCTEL ENERGIE (RCS CLERMONT-FERRAND 492 041 652), dont le siège social est situé à [Localité 4], est spécialisée dans le secteur d'activité des travaux d'installation électrique sur la voie publique.

Monsieur [H] [R], né le 9 octobre 1972, a été embauché à compter du 13 novembre 2003 par la société MECI (MONTAGENS ELECTRICAS E INDUSTRIAIS), devenue CONSTRUCTEL ENERGIE, suivant contrat de travail à durée indéterminée, à temps plein, en qualité de monteur électricien (catégorie ETAM). La convention collective nationale applicable à la relation de travail est celle des travaux publics.

Les bulletins de paie, en tout cas ceux à compter de janvier 2017, mentionnent pour Monsieur [H] [R] un emploi de 'monteur électricien' et une classification 'ETAM B'.

Par courrier recommandé daté du 8 juillet 2020, Monsieur [H] [R] a sollicité de son employeur un changement de classification conventionnelle, le salarié demandant à être classé 'ETAM E'.

En réponse, par courrier recommandé daté du 1er août 2020, la société CONSTRUCTEL ENERGIE a fait à Monsieur [H] [R] la proposition de classification suivante à compter du 1er septembre 2020 : 'ouvrier, niveau III, position 1, coefficient 150".

Le 18 décembre 2020, Monsieur [H] [R] a saisi le conseil de prud'hommes de CLERMONT-FERRAND aux fins de solliciter une classification conventionnelle ETAM technicien coefficient E et les rappels de salaire afférents.

La première audience devant le bureau de conciliation et d'orientation s'est tenue en date du 3 février 2021 (convocation notifiée au défendeur le 28 décembre 2020) et, comme suite au constat de l'absence de conciliation, l'affaire été renvoyée devant le bureau de jugement.

Le contrat de travail entre Monsieur [H] [R] et la société CONSTRUCTEL ENERGIE a été rompu par démission du salarié en date du 19 mars 2022.

Par jugement (RG 20/00530) rendu contradictoirement le 14 avril 2022 (audience du 20 janvier 2022), le conseil de prud'hommes de CLERMONT-FERRAND a :

- Constaté que la demande de Monsieur [H] [R] sur le rappel de salaire pour la période courant du mois de janvier au mois de juin 2017 est prescrite ;

- Débouté Monsieur [H] [R] de sa demande de revalorisation de coefficient conventionnel ;

- Débouté Monsieur [H] [R] de sa demande de rappel de salaire subséquent ;

- Débouté Monsieur [H] [R] de sa demande de rappel de salaire sur les indemnités de chômage partiel en 2020 ;

- Débouté les parties de leur demandes plus amples ou contraires ;

- Dit n'y avoir lieu à la condamnation au titre de l'article 700 pour chacune des parties ;

- Condamné Monsieur [H] [R] aux entiers dépens.

Le 18 mai 2022, Monsieur [H] [R] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 23 avril 2022.

Vu les conclusions notifiées à la cour le 4 août 2022 par Monsieur [H] [R],

Vu les conclusions notifiées par la société CONSTRUCTEL ENERGIE à la cour le 6 janvier 2025 et au défenseur syndical de l'appelant le 9 janvier 2025,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 13 janvier 2025.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions, Monsieur [H] [R] conclut à l'infirmation du jugement et demande à la Cour de condamner la société CONSTRUCTEL ENERGIE à lui attribuer le niveau E de la convention des ETAM et à lui payer les sommes suivantes :

- 12.105,15 euros au titre du rappel de salaires lié à la requalification, congés payés afférents inclus,

- 304, 96 euros au titre du rappel de chômage partiel,

- 1.000 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article 700 du Code de procédure civile.

Monsieur [H] [R] sollicite l'attribution du coefficient E au sein de la grille de classification des emplois ETAM des travaux publics.

Au soutien de sa demande de revalorisation du coefficient conventionnel, Monsieur [H] [R] fait valoir que :

- La grille de classification des emplois ETAM des travaux publics comprend huit niveaux de classement de A à H, les niveaux A à D sont réservés aux employés et les niveaux E à H aux techniciens et agents de maitrise ;

- il a été embauché en tant qu'électricien monteur, dès lors, il s'agit d'un poste de technicien et non d'employé ;

- Suite à ses demandes de régularisation, l'employeur lui a proposé un nouveau contrat qui modifiait la convention collective applicable en le faisant dépendre de celle des ouvriers et non des ETAM, ce qu'il a refusé ;

- La grille de classification précise les tâches correspondant à chaque coefficient mais elles ne doivent pas nécessairement être toutes réalisées puisqu'elles dépendent de l'emploi occupé. Dès lors, un technicien de chantier ne réalise pas d'études. Il n'a pas à démontrer qu'il occupe les fonctions de chef d'équipe ou qu'il réalise des études, ces conditions étant suffisantes mais pas nécessaires ;

- il effectue des tâches de technicien monteur sur les chantiers ce que l'employeur ne conteste pas. L'employeur reconnaît à ce titre que le salarié dispose d'une certaine autonomie ainsi que d'une bonne connaissance professionnelles liée à l'expérience acquise ;

- Le contrat de travail précise qu'il exerce les fonctions de monteurs électricien catégorie ETAM. Cela démontre que l'employeur l'a considéré comme étant technicien par le biais d'un engagement contractuel. Par ailleurs, le fait d'exercer la fonction d'électricien démontre qu'il est technicien, notion qui se définit comme une personne qui connaît et pratique une technique.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, Monsieur [H] [R] conclut à une demande d'attribution du coefficient E au sein de la grille de classification des emplois ETAM des travaux publics et sollicite les rappels de salaire afférents.

Dans ses dernières conclusions, la société CONSTRUCTEL ENERGIE demande à la Cour de :

A TITRE PRINCIPAL :

- Déclarer qu'elle n'est saisie d'aucune demande en l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel de Monsieur [H] [R].

A TITRE SUBSIDIAIRE :

- Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de CLERMONT-FERRAND du 14 avril 2022 en ce qu'il a :

- Constaté que la demande de Monsieur [H] [R] sur le rappel de salaire pour la période courant du mois de janvier au mois de juin 2017 est prescrite ;

- Débouté Monsieur [H] [R] de sa demande de revalorisation du coefficient conventionnel ;

- Débouté Monsieur [H] [R] de sa demande de rappel de salaire subséquent ;

- Débouté Monsieur [H] [R] de sa demande de salaire sur les indemnités de chômage partiel en 2020 ;

- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- Dit n'y avoir lieu à la condamnation au titre de l'article 700 pour chacune des parties ;

- Condamné Monsieur [H] [R] aux entiers dépens.

EN TOUT ETAT DE CAUSE, et à titre reconventionnel :

- Débouter Monsieur [H] [R] de l'intégralité de ses demandes ;

- Condamner Monsieur [H] [R] aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

- Condamner Monsieur [H] [R] au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

In limine litis, la société CONSTRUCTEL ENERGIE soutient que la déclaration d'appel de Monsieur [H] [R] n'a pas d'effet dévolutif. A ce titre, elle fait valoir que la déclaration d'appel indique au titre de l'objet de l'appel la mention 'appel général' sans préciser les chefs de jugement critiqués. Dès lors, la société CONSTRUCTEL ENERGIE expose que Monsieur [H] [R] n'a pas respecté les dispositions de l'article 901 du Code de procédure civile qui imposent que la déclaration d'appel doit contenir les chefs de jugement expressément critiqués auquel l'appel est limité. Par ailleurs, Monsieur [H] [R] n'a pas établi de régularisation de la déclaration d'appel dans le délai imparti. Ainsi, la société CONSTRUCTEL ENERGIE conclut à l'absence d'effet dévolutif de l'appel prévu par l'article 562 du Code de procédure civile et soutient que la Cour d'appel n'est saisie d'aucun chef de jugement et n'a donc pas à statuer sur les demandes de Monsieur [H] [R].

In limine litis, la société CONSTRUCTEL ENERGIE soutient, à titre subsidiaire, que les demandes de rappel de salaire sont en partie prescrites. Elle expose que Monsieur [R] a sollicité le 08 juillet 2020 une demande de rappel de salaire courant de janvier 2017 à décembre 2020. L'employeur indique que la période courant de janvier 2017 à juin 2017 est prescrite au regard du délai de prescription triennale prévu par l'article L. 3245-1 du Code du travail. La société CONSTRUCTEL ENERGIE conclut à l'irrecevabilité de la demande formulée sur cette période.

La société CONSTRUCTEL ENERGIE indique, à titre subsidiaire, que Monsieur [H] [R] ne peut prétendre à une revalorisation conventionnelle. A ce titre elle soutient que :

- La classification dépend des fonctions réellement exercées par le salarié qui lui appartient de démontrer. Or, Monsieur [H] [R] ne démontre pas qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique. Par ailleurs, Monsieur [H] [R] ne peut se contenter d'affirmer que le fait d'effectuer des tâches d'électricien fait de lui un technicien puisqu'aucun élément n'étaye cet argument.

- La demande de Monsieur [H] [R] est infondée puisqu'il réalise des travaux d'installation et de mise en service des équipements électriques. Or, le niveau E de la classification des ETAM implique des conditions que l'employeur affirme comme étant cumulatives:

- Une responsabilité dans l'organisation du travail, or, le salarié n'organise pas les travaux qui sont préparés en amont par le donneur d'ordre et le conducteur de travaux, il n'exerce pas de pouvoir de contrôle sur le travail d'autrui ni de commandement ou de direction sur les autres salariés ;

- Une capacité à recevoir délégation, d'autonomie, d'initiative et d'adaptation, or, Monsieur [H] [R] ne bénéficie pas d'une délégation de pouvoirs, il ne dispose d'aucun pouvoir d'initiative mais intervient selon les instructions qui lui sont données. Il doit respecter les procédures et en référer à son supérieur hiérarchique, il n'est pas chargé de faire respecter les règles de sécurité ;

- Une certaine technicité et expertise, or, les travaux que Monsieur [H] [R] réalise sont de nature simple ;

- Des compétences acquises par l'expérience ou la formation, or, le salarié n'a jamais fait valoir de diplôme professionnel reconnu.

- Monsieur [H] [R] mentionne des salariés ayant demandé une revalorisation de leur coefficient hiérarchique et ayant obtenu gain de cause. L'employeur objecte que ces salariés étaient placés dans des situations différentes car ils occupaient un poste de chef d'équipe, statut ETAM avec des fonctions de commandement. Cette situation n'est pas comparable à celle de Monsieur [H] [R] qui occupe un poste de technicien monteur, sans fonction d'encadrement, et sous l'autorité hiérarchique de son chef de chantier.

- Monsieur [H] [R] relève en réalité du statut ouvrier et a été positionné à tort sous le statut ETAM lorsqu'il a été embauché. Les travaux d'électricité réalisés par Monsieur [H] [R] sont effectués à partir des directives données par son supérieur. Par ailleurs, les salariés occupant le poste d'électricien au sein de l'entreprise bénéficient du statut ouvrier. Dès lors, l'employeur lui a proposé un positionnement en cohérence avec ses attributions correspondent au statut ouvrier niveau III position 1 coefficient 150, cette position s'accompagnant en plus d'une augmentation salariale.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.

MOTIFS

- Sur l'effet dévolutif -

La société CONSTRUCTEL ENERGIE soutient que Monsieur [H] [R] a effectué un appel général sans viser aucun chef de jugement critiqué, que cette déclaration d'appel non conforme aux dispositions de l'article 901 du code de procédure civile n'ayant pas été régularisée dans le délai impératif prescrit par le code de procédure civile, l'effet dévolutif prévu par l'article 562 du code de procédure civile n'a pas opéré devant la cour d'appel de Riom.

Selon l'article 542 du code de procédure civile, l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.

Selon l'article 562 du code de procédure civile, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution opère pour le tout lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement.

Selon l'article 901 du code de procédure civile, la déclaration d'appel est faite par acte contenant notamment, à peine de nullité, les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement

Seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement. Il en résulte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas.

Par ailleurs, l'obligation prévue par l'article 901 du code de procédure civile, de mentionner dans la déclaration d'appel les chefs de jugement critiqués encadre les conditions d'exercice du droit d'appel. Il en résulte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas, quand bien même la nullité de la déclaration d'appel n'aurait pas été sollicitée par l'intimé.

La déclaration d'appel affectée d'une irrégularité, en ce qu'elle ne mentionne pas les chefs du jugement attaqués, peut être régularisée par une nouvelle déclaration d'appel, dans le délai imparti par le code de procédure civile à l'appelant pour conclure au fond. Il ne résulte d'aucun texte que l'absence d'effet dévolutif consécutif à l'inobservation des dispositions de l'article 901 du code de procédure civile sur la mention des chefs de jugement critiqués doive être soulevée par la partie intimée avant l'expiration du délai imparti à l'appelant pour conclure, durant lequel la possibilité lui est ouverte de régulariser la déclaration d'appel.

Ces règles, qui ne privent l'appelant du droit d'accès au juge dès lors qu'il a été mis en mesure d'effectuer la régularisation de sa déclaration d'appel indépendamment de tout incident soulevé par la partie intimée, encadrant les conditions d'exercice du droit d'appel dans les procédures dans lesquelles l'appelant est représenté par un professionnel du droit (avocat ou défenseur syndical), sont dépourvues d'ambiguïté et concourent à une bonne administration de la justice en assurant la sécurité juridique de cette procédure. Elles ne portent donc pas atteinte, en elles-mêmes, à la substance du droit d'accès au juge d'appel.

En l'espèce, par lettre recommandée expédiée le 18 mai 2022, le défenseur syndical de Monsieur [H] [R] a effectué une déclaration d'appel ainsi libellée : 'Déclare faire appel sur l'ensemble du jugement rendu le 20 avril 2022 par le conseil de prud'hommes de CLERMONT-FERRAND (RG 20/00530) qui l'opposait à la société CONTRUCTEL ENERGIE venant aux droits de la société MECI.... En effet, le conseil n'a pas fait une juste application de la convention collective de ETAM des travaux publics qui régissait le contrat de M. [R] et qui prévoit que les techniciens sont classés à partir du niveau E et que les coefficients A à D sont réservés aux employés'.

L'effet dévolutif d'une déclaration d'appel doit s'apprécier in concreto et non in abstracto.

En première instance, Monsieur [H] [R] a présenté une seule demande principale, celle de se voir classifier ETAM E pour le poste de travail occupé au sein de la société CONSTRUCTEL ENERGIE, et des demandes subséquentes, à savoir un rappel de salaire et un rappel d'indemnités de chômage partiel en conséquence de cette reclassification.

Dans son jugement (RG 20/00530) rendu contradictoirement le 14 avril 2022, le conseil de prud'hommes de CLERMONT-FERRAND a débouté Monsieur [H] [R] de toutes ses demandes, notamment la demande de revalorisation de coefficient conventionnel, la demande de rappel de salaire subséquent et la demande de rappel sur les indemnités de chômage partiel en 2020.

Dans ce cadre, la mention dans la déclaration d'appel du 18 mai 2022 que Monsieur [H] [R] fait appel de l'ensemble du jugement en ce que le conseil de prud'hommes n'a pas fait une juste application de la convention collective de ETAM des travaux publics qui régissait le contrat de travail et qui prévoit que les techniciens sont classés à partir du niveau E et que les coefficients A à D sont réservés aux employés, constitue une mention des chefs de jugement que l'appelant critique expressément et de ceux qui en dépendent, à savoir les dispositions du jugement déféra ayant rejeté sa demande de classification ETAM E ainsi que les rappels de rémunération qui en découlent.

L'effet dévolutif a donc opéré en l'espèce s'agissant du rejet par le conseil de prud'hommes des demandes de revalorisation de coefficient conventionnel, de rappel de salaire subséquent et de rappel sur les indemnités de chômage partiel, prétentions formulées en première instance par Monsieur [H] [R].

La société CONSTRUCTEL ENERGIE sera déboutée de sa demande afin de voir la cour déclarer qu'elle n'est saisie d'aucune demande en l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel de Monsieur [H] [R]

- Sur la prescription -

Le montant de la rémunération payée et la classification attribuée par l'employeur sont des mentions qui apparaissent sur les bulletins de paie que la société CONSTRUCTEL ENERGIE faisait parvenir chaque mois à Monsieur [H] [R].

La première mise en demeure adressée à l'employeur par le salarié afin d'accorder à Monsieur [H] [R] la classification conventionnelle 'ETAM E', ainsi que la rémunération afférente, date du 8 juillet 2020.

Vu le délai de prescription en matière de salaire, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit que la demande de Monsieur [H] [R] sur le rappel de salaire pour la période courant du mois de janvier 2017 au mois de juin 2017 est prescrite.

- Sur la classification conventionnelle -

En principe, le contrat de travail précise la qualification professionnelle du salarié en référence à la classification fixée par la convention collective applicable dans l'entreprise. La classification professionnelle d'un salarié dépend des fonctions effectivement exercées dans l'entreprise qui l'emploie. Il appartient au salarié d'établir que les fonctions qu'il exerce réellement correspondent à la classification revendiquée. Un salarié ne peut pas revendiquer une qualification subordonnée à un diplôme qu'il n'a pas ou à des fonctions qu'il n'exerce pas. Toutefois, l'employeur ne peut se prévaloir ni de l'absence de réclamation d'une autre classification par le salarié au cours de l'exécution du contrat de travail ni de la renonciation du salarié au coefficient correspondant à ses fonctions. En cas de litige, il appartient au juge d'apprécier les fonctions réellement exercées par le salarié en référence à la classification fixée par la convention collective applicable dans l'entreprise.

Il n'est pas contesté que la convention collective nationale applicable en l'espèce à l'employeur est celle du secteur des travaux publics.

La convention collective nationale des ouvriers des travaux publics mentionne :

'La grille de classification des ouvriers de travaux publics comprend les définitions générales des emplois, répertoriés en 4 niveaux de qualification, à l'intérieur desquels se situent 7 positions. A ces définitions d'emploi est annexé un tableau de critères classants permettant de faciliter l'adéquation entre le contenu des emplois et les capacités nécessaires pour les occuper.

Ces critères sont les suivants : responsabilité dans l'organisation du travail ; autonomie/initiative ; technicité ; formation/expérience.

niveau I. - Ouvriers d'exécution

Position 1 (coefficient 100) : Le titulaire exécute sous contrôle régulier des travaux élémentaires, à partir de directives précises. Les emplois de cette position comportent des travaux simples ne nécessitant pas de connaissances mais une simple adaptation aux conditions de travail de l'environnement.

Position 2 (coefficient 110) : Le titulaire exécute, sous contrôle fréquent, des travaux sans difficulté particulière, à partir de directives simples. Il est responsable de la bonne exécution de son travail et peut être amené, dans le cadre des tâches qui lui sont confiées, à prendre certaines initiatives élémentaires. Les emplois de cette position comportent des travaux simples ; ils peuvent requérir un niveau de formation professionnelle ou une pratique professionnelle acquise en position 1.

Niveau II. - Ouvriers professionnels

Position 1 (coefficient 125) : Le titulaire organise et exécute, avec initiative, à partir de directives générales, les travaux courants de sa spécialité. Les emplois de cette position comportent l'exécution de travaux impliquant de bonnes connaissances techniques et le respect des contraintes de l'environnement. Ils nécessitent un diplôme professionnel, une formation ou une technicité acquise par expérience au niveau I.

Position 2 (coefficient 140) : Le titulaire organise et exécute, avec initiative, à partir de directives, les travaux de sa spécialité ; il est responsable de leur bonne réalisation. Il peut être amené à accomplir certaines tâches avec l'assistance d'aides. Les emplois de cette position comportent la réalisation de travaux impliquant le respect des règles de l'art, la prise en compte des contraintes liées aux environnements et, si nécessaire, la lecture et la tenue de documents courants. Ils nécessitent un diplôme professionnel, une formation spécifique ou une expérience acquise à la position précédente.

Niveau III. - Ouvriers compagnons ou chefs d'équipe

Position 1 (coefficient 150) : Le titulaire réalise, à partir de directives générales, l'ensemble des travaux, notamment délicats, de sa spécialité. Dans ce cadre, il dispose d'une certaine autonomie et prend des initiatives se rapportant à la réalisation des travaux qui lui sont confiés ou pour faire face à des situations imprévues. Il peut être amené à accomplir certaines tâches avec l'assistance d'aides dont il guide le travail et contrôle les résultats. Il est capable de lire des plans d'exécution et de tenir des documents courants. Les emplois de cette position comportent la réalisation de travaux délicats impliquant le respect des règles de l'art, la prise en compte des contraintes liées aux environnements. Ils nécessitent un diplôme professionnel et/ou une formation spécifique et/ou impliquent une bonne connaissance professionnelle obtenue par l'expérience acquise à la position précédente.

Position 2 (coefficient 165) : Le titulaire réalise, à partir de directives d'organisation générale, les travaux de sa spécialité ; il possède la maîtrise de son métier. Il est capable : - de lire et d'interpréter des plans d'exécution ou des instructions écrites ; - d'évaluer ses besoins prévisionnels en outillage, petits matériels et matériaux ; et/ou pour les chefs d'équipe : - d'organiser le travail du personnel constituant l'équipe appelée à l'assister. Les emplois de cette position comportent la réalisation de travaux complexes ou diversifiés qui impliquent une connaissance professionnelle confirmée dans une technique et une certaine connaissance professionnelle dans d'autres techniques acquise par expérience et/ou par formation complémentaire. Ils nécessitent un diplôme professionnel, une formation spécifique ou une expérience acquise à la position précédente.

Niveau IV. - Maîtres-ouvriers ou maîtres-chefs d'équipe (coefficient 180) : Le titulaire possède une parfaite maîtrise du métier permettant soit : - de réaliser avec autonomie les travaux les plus délicats nécessitant une haute technicité dans une technique, et, de plus, des connaissances des techniques connexes permettant d'assurer des travaux relevant de ceux-ci ; de conduire et d'animer régulièrement, suivant les directives données par les agents de maîtrise, une équipe dans une spécialité et de rendre compte de l'activité de cette dernière. Il doit être capable de transmettre son expérience. Il peut être apte à assurer un tutorat vis-à-vis des jeunes. Il peut être amené à assurer des rapports avec des tiers dans le cadre d'instructions précises et ponctuelles et dans un domaine d'activité bien délimité. Les emplois du niveau IV impliquent les connaissances définies au niveau III, position 2, acquises par formation et/ou expérience professionnelle.'

La convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise (ETAM) des travaux publics mentionne :

- 4 niveaux (A à D) pour les employés.

- 4 niveaux (E à H) pour les techniciens et agents de maîtrise

- le niveau ETAM B correspond aux critères suivants : 'Effectue des travaux d'exécution sans difficulté particulière. Ou Travaux d'assistance à un ETAM d'une position supérieure. Est responsable de la qualité du travail fourni et des échéances qui lui sont indiquées, sous l'autorité de sa hiérarchie. Reçoit des instructions précises. Peut être amené à prendre une part d'initiatives dans le choix des modes d'exécution. Peut être appelé à effectuer des démarches courantes. Respecte les règles de sécurité. Première qualification. Expérience acquise en niveau A. Ou Formation générale, technologique ou professionnelle. Ou Diplôme de l'enseignement technologique ou professionnel de niveau CAP, BEP'.

- le niveau ETAM E correspond aux critères suivants : 'Réalise des travaux d'exécution, de contrôle, d'organisation, d'études, etc. Ou Exerce un commandement sur les salariés placés sous son autorité. Résout des problèmes à partir de méthodes et techniques préétablies. Peut transmettre ses connaissances. Agit dans le cadre d'instructions permanentes et/ou de délégations. Est amené à prendre des initiatives, des responsabilités. A un rôle d'animation. Sait faire passer l'information et conduit des relations ponctuelles avec des interlocuteurs externes. Peut représenter l'entreprise dans le cadre de ces instructions et délégations. Veille à faire respecter l'application des règles de sécurité et participe à leur adaptation. Connaissances structurées des diverses techniques et savoir-faire de sa spécialité professionnelle et de leurs applications. Haute technicité dans sa spécialité. Se tient à jour dans sa spécialité. Expérience acquise en niveau E. Ou Formation générale, technologique ou professionnelle.'

En l'espèce, le contrat de travail mentionne seulement pour Monsieur [H] [R] une embauche en qualité de 'monteur électricien catégorie ETAM', sans autre précision de classification conventionnelle.

Les bulletins de paie, versés aux débats pour la période de janvier 2017 à mars 2022, mentionnent pour Monsieur [H] [R] :

- un emploi de 'monteur électricien', une classification 'ETAM B' de janvier 2017 à février 2018 ;

- un emploi de 'monteur électricien', sans classification précisée, en mars et avril 2018 ;

- un emploi de 'monteur électricien', une classification niveau 'B', de mai 2018 à décembre 2019 ;

- un emploi de 'monteur électricien', un statut 'employé', un niveau 'B', à compter de janvier 2020.

Il n'est pas contesté que la société CONTRUCTEL ENERGIE a appliqué à Monsieur [H] [R] la rémunération mensuelle brute correspondant à la classification conventionnelle ETAM B.

Monsieur [H] [R] ne justifie d'aucun diplôme ou formation qualifiante. Il justifie de la seule expérience professionnelle suivante : avoir été employé par la société CONTRUCTEL ENERGIE du 13 novembre 2003 au 19 mars 2022 sur un poste de monteur électricien. S'agissant des fonctions et tâches réellement exercées au sein de la société CONSTRUCTEL ENERGIE, Monsieur [H] [R] ne procède que par seule voie d'affirmation imprécise.

Monsieur [H] [R] prétend à la classification ETAM E sans produire le moindre élément d'appréciation objectif précis concernant ses tâches et fonctions au sein de la société CONSTRUCTEL ENERGIE mais en affirmant seulement qu'un poste de monteur électricien ne saurait correspondre à la dénomination 'employé' mais nécessairement à celle de 'technicien'.

Monsieur [H] [R] ne démontre en rien qu'il réalisait des travaux de contrôle, d'organisation, d'études, ou un commandement sur les salariés placés sous son autorité, qu'il pouvait résoudre des problèmes à partir de méthodes et techniques préétablies, transmettre ses connaissances, agir dans le cadre d'instructions permanentes et/ou de délégations, qu'il était amené à prendre des initiatives, des responsabilités, qu'il avait un rôle d'animation, qu'il savait faire passer l'information et conduit des relations ponctuelles avec des interlocuteurs externes, qu'il pouvait représenter l'entreprise dans le cadre de ces instructions et délégations, qu'il veillait à faire respecter l'application des règles de sécurité et participe à leur adaptation, qu'il avait des connaissances structurées des diverses techniques et savoir-faire de sa spécialité professionnelle et de leurs applications, qu'il disposait d'une haute technicité dans sa spécialité, qu'il avait un diplôme ou une formation de niveau E.

Monsieur [H] [R] ne peut donc prétendre à la classification conventionnelle ETAM E.

La société CONSTRUCTEL ENERGIE donne le descriptif suivant des tâches et fonctions exercées par Monsieur [H] [R] au sein de l'entreprise : le salarié n'organise pas les travaux car ceux-ci sont préparés en amont par le donneur d'ordre (ENEDIS par exemple) et le conducteur de travaux en interne. Le salarié dispose du dossier « prestation de réalisation de travaux » et de l'identification des travaux d'électricité à effectuer (pose de compteur LINKY, pose de câbles, branchement, pose de disjoncteur'). Monsieur [H] [R] n'exerce aucun contrôle sur le travail d'autrui et ne réalise aucune étude. Le salarié n'exerce pas un pouvoir de commandement ou de direction sur d'autres salariés et aucun salarié n'est placé sous son autorité. Monsieur [H] [R] ne bénéficie d'aucune délégation de pouvoirs de sorte qu'il ne dispose d'aucun pouvoir d'initiative. Le salarié intervient selon les instructions qui lui ont été données au préalable de l'intervention. Son autonomie n'est que partielle. Il doit également faire remonter les éléments ayant entraîné une perte de temps sur le chantier. Il n'a aucune initiative à prendre, seulement respecter les procédures et en référer au niveau supérieur (Chef de chantier) en cas de difficultés. Il n'a aucun contact avec des interlocuteurs externes. Le salarié doit veiller à respecter personnellement les règles de sécurité, il n'est pas chargé de faire respecter ces règles par les autres salariés. Les travaux que Monsieur [H] [R] réalise sont des travaux d'électricité de nature simple. Monsieur [H] [R] n'a jamais fait valoir de diplôme professionnel reconnu. Le salarié occupe un poste d'électricien-monteur sans aucune fonction d'encadrement et il est lui-même placé sous l'autorité hiérarchique de son chef de chantier, Monsieur [P] [X]

[F].

La société CONSTRUCTEL ENERGIE justifie que le niveau E de la classification des techniciens correspond au sein de CONSTRUCTEL ENERGIE à des postes de 'Gestionnaire Flotte équipement', ces salariés ayant la charge de la gestion de la flotte automobiles (minipelles, camions, remorques') et des équipements nécessaires à l'activité.

La société CONSTRUCTEL ENERGIE justifie que des salariés occupant des postes d'électricien dans l'entreprise sont classés dans la catégorie ouvrier.

L'intimée relève à juste titre que l'appelant fait état de jurisprudences concernant des salariés de l'entreprise qui étaient des chefs d'équipe, responsabilité que Monsieur [H] [R] n'assumait pas, en tout cas ne démontre pas avoir assumé.

La société CONSTRUCTEL ENERGIE reconnaît que le poste occupé par Monsieur [H] [R] ne correspondait pas à une classification ETAM, que ce soit employé ou technicien, qu'il y a eu une erreur de classification lors de l'embauche, mais que l'appelant relevait en réalité du statut ouvrier niveau 3 position 1 coefficient 150 au sens de la convention collective des travaux publics.

Il échet de constater que Monsieur [H] [R] ne demande pas une classification relevant de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics et qu'il a refusé la proposition de la société CONSTRUCTEL ENERGIE de le classer statut ouvrier niveau 3 position 1 coefficient 150.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [H] [R] de toutes ses demandes au titre d'une revalorisation de sa classification professionnelle au sein de la société CONSTRUCTEL ENERGIE.

- Sur les dépens et frais irrépétibles -

Monsieur [H] [R], qui succombe en toutes ses prétentions, sera condamné aux entiers dépens, de première instance et d'appel.

En première instance comme en appel, il n'y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

- Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant,

- Condamne Monsieur [H] [R] aux dépens d'appel ;

- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN

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