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Décisions

CA Lyon, 3e ch. A, 15 avril 2025, n° 23/09427

LYON

Ordonnance

Autre

PARTIES

Défendeur :

Bpce Lease (SA), Natiocrédimurs (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dumurgier

Avocats :

Me Laffly, Me Alleaume

T. com. Roanne, du 6 déc. 2023, n° 2022f…

6 décembre 2023

Par jugement rendu le 6 décembre 2023, le tribunal de commerce de Roanne, saisi par acte du 3 octobre 2022 délivré par la SNC Natiocrédimurs et la société BPCE Lease, a :

- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par le défendeur,

- condamné M. [L] [S] à payer aux sociétés Natiocrédimurs et BPCE Lease la somme de 115 600 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 février 2021, au titre de son engagement de caution solidaire de la société Recytep,

- ordonné la capitalisation annuelle des intérêts,

- débouté les demandeurs de leur demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,

- condamné M. [S] à payer aux sociétés Natiocrédimurs et BPCE Lease la somme de 2000 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance,

- dit n'y avoir lieu à sursoir à l'exécution provisoire du jugement.

Ce jugement a été signifié le 29 février 2024 à M. [L] [S] qui en a relevé appel par déclaration reçue au greffe le 18 décembre 2023, portant sur l'ensemble des chefs de la décision expressément critiqués.

L'intimée a constitué avocat le 4 janvier 2024.

L'appelant a remis ses conclusions au greffe et les a notifiées à l'intimée le 12 mars 2024.

Le 10 juin 2024, les sociétés Natiocrédimurs et BPCE Lease ont notifié des conclusions d'incident saisissant le conseiller de la mise en état aux fins de voir, au visa des articles 524 et 554 du code de procédure civile :

- prononcer la radiation de l'affaire inscrite au rôle de la cour sous le numéro 23/09427,

- condamner M. [S] à payer à la société Natiocrédimurs la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [S] à payer à la société BPCE Lease la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [S] aux entiers dépens de l'instance.

Elles ont notifié des conclusions aux fins de radiation n°2 le 10 janvier 2025, en réponse aux conclusions d'incident de l'appelant, en maintenant l'ensemble de leurs demandes.

Au terme de conclusions d'incident n°2 notifiées le 20 mars 2025, M. [S] demande au conseiller de la mise en état, au visa des articles 524 du code de procédure civile et L.312-1 du code de la consommation, de :

- débouter les sociétés Natiocrédimurs et BPCE Lease de leur demande de radiation de la présente affaire,

- condamner in solidum les sociétés Natiocrédimurs et BPCE Lease à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum les sociétés Natiocrédimurs et BPCE Lease aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l'article 524 du code de procédure civile, lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

L'appelant ne conteste pas ne pas avoir exécuté la décision dont il a fait appel qui était assortie de l'exécution provisoire.

Il s'oppose toutefois à la demande de radiation de son appel en expliquant être dans l'incapacité financière d'exécuter les condamnations mises à sa charge, percevant actuellement un salaire net mensuel de 4 227 euros pour faire face à des charges incompressibles de 3 046 euros par mois, incluant le remboursement d'une dette dont il est redevable envers l'URSSAF, ce qui lui laisse un reste à vivre de 1 031 euros.

Il ajoute qu'aucun crédit ne peut lui être accordé, qu'il n'a aucune épargne, ce que confirmerait la saisie infructueuse pratiquée sur ses comptes par les sociétés intimées, et qu'il n'est plus propriétaire d'aucun bien immobilier, ayant vendu son patrimoine immobilier en 2018 et 2020 pour faire face aux difficultés financières qu'il a rencontrées à la suite de la liquidation judiciaire de sa société.

Il souligne enfin que le défaut d'exécution de la décision entreprise ne cause aucun préjudice aux sociétés Natiocrédimurs et BPCE Lease, qui ont été désintéressées à hauteur de 100 % de la somme dont elles sont créancières dans le cadre de la garantie qu'elles ont souscrite auprès de la société BPIFrance.

Les sociétés demanderesses à l'incident considèrent que M. [S] ne justifie pas que l'exécution de la décision déférée à la cour serait de nature à entrainer des conséquences manifestement excessives ou qu'il serait dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

Elles reprochent à l'appelant de maintenir une totale opacité sur la consistance réelle de ses revenus et de son patrimoine, de s'abstenir de produire ses derniers relevés bancaires et ses derniers avis d'imposition et d'inclure dans ses charges une pension alimentaire de 1 177,64 euros destinée à ses enfants, sans apporter la preuve de son versement effectif, et la mensualité de remboursement d'une location avec option d'achat, dont le contrat n'est pas produit.

Elles ajoutent que, lors de la souscription de son engagement de caution, M. [S] avait déclaré, en sus de ses revenus professionnels évalués à 30 000 euros par an et de la valeur des parts de la société Recytep, être propriétaire de sa résidence principale à [Localité 12] et d'un bien immobilier indivis situé à [Localité 8], valorisé à 400 000 euros, et disposer d'un patrimoine financier de 15 000 euros et d'un compte courant d'associé de 82 102 euros.

Elles soulignent enfin que l'intéressé n'a jamais sollicité de délais de paiement en première instance, même à titre subsidiaire, et que, contrairement à ce qu'il affirme de manière totalement infondée, l'inexécution de la décision frappée d'appel leur cause préjudice, la garantie BPIFrance, qui n'est intervenue qu'à hauteur de 50 %, n'ayant pas vocation à se substituer à la caution défaillante.

M. [S] qui affirme être dans l'impossibilité d'exécuter la condamnation à payer la somme principale de 115 600 euros ne produit aucun avis d'imposition ni aucun relevé de compte bancaire.

Il se contente de verser aux débats un bulletin de salaire du mois de septembre 2024 qui établit qu'il exerce l'activité de directeur de site de la société Aprochim et qu'il perçoit un salaire net avant impôt de l'ordre de 5 500 euros.

En l'absence d'avis d'imposition, il n'est pas permis de vérifier s'il dispose d'autres sources de revenus telles que des revenus de valeurs mobilières ou des revenus fonciers.

L'appelant fait état de charges normales de la vie courante et se contente de produire la première page et la page 4 du jugement de divorce rendu le 18 décembre 2015, il y a près de 10 ans, pour justifier du versement d'une pension alimentaire de 1 177 euros pour ses trois enfants.

En l'absence de relevés de compte bancaire, il n'est pas permis de vérifier que cette charge est toujours effective alors que, par ailleurs, sur la fiche de dialogue qu'il a remplie le 2 août 2022 dans le cadre de la souscription d'une location avec option d'achat, M. [S] a déclaré qu'il n'avait pas d'enfant à charge.

Enfin, si l'appelant démontre avoir donné procuration pour la vente de l'immeuble lui appartenant en indivision situé à [Localité 9] pour un prix de 350 000 euros, il ne justifie pas de l'utilisation qu'il a faite du produit de la vente

Au regard de ces éléments, M. [S] ne démontre pas se trouver dans l'impossibilité d'exécuter la condamnation au paiement de la somme principale de 115 600 euros.

Si la radiation de l'appel est une simple faculté pour le juge qui doit s'assurer de la proportionnalité de la mesure au regard de l'exercice du droit d'appel, en l'espèce, au vu du montant de la condamnation prononcée en faveur des sociétés intimées et de l'absence de tout règlement par le débiteur, la radiation du rôle de l'affaire n'est pas une mesure disproportionnée au regard des buts poursuivis qui sont d'assurer la protection du créancier, d'éviter les appels dilatoires et d'assurer la bonne administration de la justice, ni au regard du droit d'accès au juge reconnu par l'article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'appelant ayant la faculté de solliciter la réinscription de l'affaire au rôle en justifiant de l'exécution, au moins partielle, de la condamnation mise à sa charge.

Dans ces circonstances, il sera fait droit à la demande de radiation de l'affaire du rôle.

Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, les dépens doivent être mis à la charge de M. [S].

Les conditions d'application de l'article 700 du code de procédure civile sont réunies en faveur des sociétés intimées. Toutefois, les circonstances particulières de l'espèce commandent de laisser à leur charge les frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés.

PAR CES MOTIFS

Ordonnons la radiation du rôle de l'affaire enregistrée sous le n° de RG 23 / 09427,

Disons que, sous réserve de la péremption, l'affaire pourra être réinscrite au rôle notamment sur justification de l'exécution de la décision dont appel ou de l'octroi de délais de paiement par le juge de l'exécution,

Condamnons M. [L] [S] aux dépens,

Disons n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit des sociétés Natiocrédimurs et BPCE Lease.

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