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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 1, 11 avril 2025, n° 23/05306

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

M. U.

Défendeur :

M. R.

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Sentucq

Conseillers :

Mme Bret, Mme Girard-Alexandre

Avocats :

Me Dupuy, SARL Dubault-Biri & Associés, Me Haddadi, Me Lebreton, SCP de Nardi-Joly et Lebreton

TJ Meaux, du 30 janv. 2023, n° 22/01592

30 janvier 2023

FAITS ET PROCEDURE

Un acte intitulé Compromis de vente a été signé le 21 octobre 2021 par lequel Monsieur [U] [L] et Madame [I] [D], épouse [L], ont vendu à Monsieur [M] [G] et Madame [J] [K], épouse [G], un pavillon d=habitation formant le lot n 18 du lotissement dénommé [11], cadastré Section AH n [Cadastre 3] [Adresse 2].

Le prix était fixé à 1 400 000 euros et la somme de 70 000 euros était consignée à titre d=acompte entre les mains du notaire, Maître [S].

La réitération par acte authentique était prévue au plus tard le 30 novembre 2021.

En page 3/20 du Compromis de vente, la clause Construction ou Rénovation stipule :

« Le vendeur déclare avoir, au cours des dix dernières années, réalisé dans les biens les travaux suivants :

Atelier dépendance ne nécessitant pas de déclaration préalable

Aménagement des combles et de la mezzanine pour une surface d'environ 66 m2

Le Vendeur a effectué les démarches auprès de la mairie de [Localité 14] (77) afin de régulariser les travaux liés à l'aménagement des combles et de la mezzanine.

A défaut de fournir les déclarations relatives aux travaux précités, un certificat de prescription édité en date du 6 août 2021 par la mairie de [Localité 14] est annexé aux présentes.

Le Vendeur s'engage à régler la totalité de la taxe d'aménagement qui lui sera imputée suite à ces travaux. »

La clause Réitération par Acte Authentique énonce :

A La date ci-dessus mentionnée n=EST PAS EXTINCTIVE mais CONSTITUTIVE DU POINT DE DEPART à partir duquel l= une des parties pourra, si toutes les conditions suspensives sont réalisées, obliger l=autre à s=exécuter en lui adressant une lettre recommandée avec demande d=avis de réception. A défaut de s=être exécutée dans un délai de DIX JOURS suivant la date de la première présentation de cette lettre, la partie non défaillante aura le choix entre :

- invoquer la résolution de plein droit des présentes sans qu'il soit besoin de la faire constater judiciairement. La partie défaillante lui versera, à titre d= indemnité forfaitaire et de clause pénale, la somme de cent trente-sept mille cinq cents euros ( 137 500 euros)

- ou poursuivre en justice la réalisation de la vente, la partie défaillante supportant tous les frais des poursuites ou de justice, augmentés du montant de l= indemnité forfaitaire prévue à l=alinéa ci-dessus.@

La clause Disposition(s) Particulière(s) précise :

« Le Vendeur s'engage à accomplir à sa charge avant la signature de l'acte authentique, les travaux de rafraichissement suivants :

Rafraîchissement d'une couche de peinture blanche sur l'espace entrée/salon/salle à Manger et sur l'espace cage d'escalier du rez-de-chaussée (')

Remplacement des plinthes au niveau des combles (')

Remplacement de la barre de crédence (')

Revoir la pose de la barre de seuil(') »

Deux projets de réitération étaient établis par le notaire en date respective du 2 décembre et du 14 décembre 2021.

Le premier projet mentionne en page 15 à la clause Dispositions Relatives à la Construction

« L'immeuble vendu a fait l'objet :

D'un permis de construire délivré le 22 juin 1999 sous le n° de PC 77 268 99 00006 2 autorisant la construction de 35 maisons et un transformateur, suivi d'un permis modificatif délivré le 15 décembre 1999 sous le n° de PC 77268 99 00006 3, (modification de l'aspect extérieur.)

D'une déclaration d'achèvement des travaux en date du 26 décembre 2001

Concernant le certificat de conformité, il résulte d'un courrier de la Financière Rive Gauche en date du 18 Mai 2005, réceptionné par la Mairie de [Localité 14] le 19 mai 2005(que) la société promoteur a considéré que l'absence de réponse valait conformité pour l'ensemble des constructions.

Une copie des pièces est demeurée ci-annexée. Annexe n°10.

Concernant l'aménagement des combles- la mezzanine et l'abri de jardin, le Vendeur a effectué la régularisation de l'ensemble des travaux pour lesquels il a obtenu le certificat de conformité de la Mairie de [Localité 14] en date du 6 août 2021 ainsi qu'il résulte de la copie du courrier de la mairie ci annexé. Annexe n°11.

Le Vendeur déclare toutefois ne pas avoir souscrit ou être bénéficiaire d'une assurance dommages-ouvrage. »

Le second projet d'acte du 14 décembre 2021, indique : Dispositions relatives à la construction

Absence d=opération de construction ou de rénovation depuis dix ans (...)

Concernant l=aménagement des combles, de la mezzanine et l=abri de jardin, le Vendeur a réalisé ces travaux au cours de l=année ( non complété) sans avoir sollicité d=autorisation d=urbanisme préalable de la commune de [Localité 14] et s=est rapproché de cette dernière afin d=envisager la régularisation.

Il a été indiqué par la mairie, en date du 6 août 2021, que les travaux étaient prescrits, ainsi qu=il résulte de la copie du courrier de la mairie ci-annexé. Annexe n 12.

Le Vendeur déclare toutefois ne pas avoir souscrit ou être bénéficiaire d=une assurance dommages-ouvrage en cours.

Le Vendeur déclare ne pas avoir effectué les formalités nécessaires auprès du service des

impôts suite à l=achèvement des travaux pour déclarer la nouvelle superficie habitable à la suite d=aménagement des combles.

Aucune déclaration H1 n=a été déposée au service du Trésor Public compétent.

Les sanctions résultant de l'absence d'autorisation d'urbanisme sont les suivantes :

I-Sanctions pénales (')

II- Sanctions fiscales (')

III- Sanctions civiles fondées sur une action en responsabilité de la part des tiers ' le délai de prescription est de dix ans après l'achèvement dans la mesure où cet achèvement est antérieur au 18 juin 2008, à compter de cette date, le délai de l'action est de cinq ans à compter de la découverte des faits permettant d'exercer l'action, sachant que la durée de cinq ans se cumule avec la durée déjà écoulée antérieure au 18 juin 2008 sans pouvoir excéder dix ans. Pendant cette durée les tiers peuvent agir en justice à l'effet de démontrer un préjudice personnel lié à la violation d'une règle d'urbanisme, préjudice pouvant le cas échéant aller jusqu'à la condamnation à démolir aux frais du propriétaire.

IV Sanction civile de la part de la collectivité-aux termes de l'article L 480-14 du Code de l'Urbanisme, la commune ou l'Etablissement Public de coopération intercommunale compétent en matière de Plan Local d'Urbanisme peut saisir le tribunal de grande instance en vue de faire ordonner la démolition ou la mise en conformité d'un ouvrage édifié ou installé sans l'autorisation exigée par le présent livre (')

V Sanctions administratives- Ces sanctions sont imprescriptibles et revêtent les conséquences suivantes :

En cas de demande de permis de construire sur la construction, la situation actuelle devra être régularisée (')

Les constructions édifiées sans permis de construire ne peuvent être raccordées aux réseaux de distribution collectives tels que eaux, gaz, électricité, téléphone

En cas de sinistre de l'immeuble il sera impossible de reconstruire à l'identique, un nouveau permis de construire devra être demandé avec là aussi les éventuelles conséquences d'un refus.

L'Acquéreur déclare avoir pris connaissance de ces déclarations et en faire son affaire personnelle.

Il reconnaît avoir été averti de la possibilité de demander à l'administration d'autoriser a posteriori ce qui a déjà été réalisé par un permis de régularisation sous réserve que la construction respecte les règles d'urbanisme en vigueur au jour de la demande. »

Une sommation d=assister à la signature de l=acte de vente prévue le lundi 20 décembre 2021 avant 18 heures était délivrée par exploits séparés du 17 décembre 2021, à la requête des époux [L], à Monsieur et Madame [G].

Par courrier du 18 décembre 2021, Monsieur et Madame [G] écrivaient aux notaires qu=au constat des manquements imputables aux vendeurs à raison de leur obligation d=information précontractuelle d=information du fait de la révélation A au compte-goutte de la création d=une extension non précédée d= une déclaration préalable, de l=absence de souscription d=une assurance dommage-ouvrage, de la non déclaration à l=administration fiscale de cette surface et de l=absence d=indication du point de départ de la garantie décennale, » ils entendaient mettre fin à la vente, soulignant que s=agissant d=un prix important, leur niveau d=exigence est élevé et déplorant en outre que les vendeurs « n=aient pas été capables de respecter leurs engagements de refaire de menus travaux d=embellissement dans les règles de l=art et d=entretien de leur jardin préalablement à la vente. »

Le conseil des époux [L] répondait, par lettre recommandée du 21 décembre 2021 que ces derniers A prennent acte de votre décision et reprennent donc toute liberté sur ce bien afin de le remettre en vente@ et notant le caractère fautif du refus de régulariser au regard des informations données par les vendeurs, mettait en demeure les époux [G] de libérer la somme de 70 000 euros au profit des époux [L] outre le règlement de la somme de 67 500 euros.

Le conseil des époux [G] contestait, par courrier du 3 janvier 2022, l'imputation fautive de la non réalisation de la vente à ses clients acquéreurs, soulignant la non réalisation des travaux prévus à la page 20 du compromis et les modifications substantielles du pavillon non autorisées et non régularisées par une déclaration de travaux rectificative, indiquant que les époux [G] n'ont jamais donné leur accord sur la clause prévue par le notaire par laquelle les acquéreurs reconnaissent avoir été informés de la possibilité de de demander à l'administration d'autoriser a posteriori ce qui a déjà été réalisé par un permis de régularisation sous réserve que la construction respecte les règles d=urbanisme en vigueur le jour de la demande. Il concluait être également en mesure de solliciter le règlement de la clause pénale.

Par exploits délivré le 21 mars 2022, Monsieur et Madame [L] ont assigné Monsieur et Madame [G] devant le tribunal judiciaire de Meaux aux fins que ceux-ci soient déboutés de toutes leurs demandes et condamnés à leur régler la somme de 137 500 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2021 date de la mise en demeure.

Le jugement prononcé le 30 janvier 2023 a statué en ces termes :

Déclare Monsieur et Madame [L] recevables en leurs demandes, fins et conclusions,

Condamne solidairement Monsieur et Madame [G] à payer à Madame et Monsieur [L] la somme de 20.000 euros majorée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure soit le 21 décembre 2021,

Ordonne la restitution à Madame et Monsieur [G] de l'acompte de 70 000 euros séquestré entre les mains de Me [S], notaire à [Localité 12] à M. et Mme [G],

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne solidairement Monsieur et Madame [G] à payer à Monsieur et Madame [L] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne solidairement Monsieur et Madame [G] à supporter les dépens de l'instance

Rappelle que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit.

Monsieur [U] [L] et Madame [I] [D], épouse [L], ont interjeté appel selon déclaration reçue au greffe de la cour le 16 mars 2023.

Par conclusions signifiées le 13 septembre 2023 Monsieur et Madame [L] demandent à la cour de :

Vu les articles 1103 et suivants du Code civil,

Vu le compromis de vente signé le 20 octobre 2021,

Déclarer Monsieur [U] [L] et Madame [I] [L] recevables et bien fondés en leurs demandes, fins et conclusions ;

Débouter Monsieur [M] [G] et Madame [J] [G] de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

Confirmer le jugement rendu le 30 janvier 2023 en ce qu'il a solidairement condamné Monsieur [M] [G] et Madame [J] [G] à verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

Infirmer le jugement en ce qu'il a limité la condamnation solidaire de Monsieur [M] [G] et Madame [J] [G] à la somme de 20.000 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 décembre 2021 et ordonné la restitution à Monsieur [M] [G] et Madame [J] [G] de l'acompte de 70.000 euros séquestré entre les mains de Maître [S] ;

Statuant à nouveau,

Condamner solidairement Monsieur [M] [G] et Madame [J] [G] à verser à Monsieur [U] [L] et Madame [I] [L] la somme de 137.500 euros et ce, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2021, date de la mise en demeure ;

Condamner solidairement Monsieur [M] [G] et Madame [J] [G] à payer à Monsieur [U] [L] et Madame [I] [L] la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner solidairement Monsieur [M] [G] et Madame [J] [G] aux entiers dépens et dire que, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, Maître Julien DUPUY pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision ;

Par conclusions signifiées le 10 octobre 2023 Monsieur et Madame [G] demandent à la cour de :

Vu les articles 1112-1, 1113, 1132, 1192, 1193 et 1589, ainsi que 1231-5 du Code civil,

Vu le jugement du Tribunal Judiciaire de MEAUX en date du 30 janvier 2023,

DÉBOUTER les époux [L] de l'intégralité de leurs demandes en cause d'appel.

ACCUEILLANT l'appel incident de M. et Mme [G],

VOIR INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de MEAUX le
30 janvier 2023 dans toutes ses dispositions à l'exception de la restitution qui a été ordonnée au profit de M. et Mme [G] de l'acompte de 70 000 euros séquestré par eux entre les mains de Maître [S], Notaire à [Localité 12].

ACCUEILLIR en conséquence de l'infirmation complète du jugement du 30 janvier 2023 les époux [G] dans leurs demandes d'appel incident.

En conséquence,

PRONONCER la résiliation de la promesse de vente à la date du 18 décembre 2020, aux torts de Monsieur et Madame [L], vendeurs, compte tenu d'une information précontractuelle erronée et dolosive (article 1112-1 du Code civil) mais aussi d'une modification unilatérale des termes du contrat (article 1589 et 1193 du Code civil),

CONDAMNER Monsieur et Madame [L] à régler à Monsieur et Madame [G] la somme de 137.500 euros avec intérêt au taux légal à compter de la date du jugement du Tribunal Judiciaire de MEAUX au titre de la clause pénale contenue dans la promesse de vente du 20 octobre 2021,

Subsidiairement,

PRONONCER la résolution de la promesse de vente du 20 octobre 2021 au motif d'une erreur commise de bonne foi par les époux [G] sur l'économie générale du contrat et la désignation du bien (article 1132 du Code civil),

Dans cette hypothèse, s'agissant d'une résolution du contrat censé ne jamais avoir existé ;

JUGER qu'aucune clause pénale n'aura à s'appliquer de part ou d'autre,

Plus subsidiairement, dans l'hypothèse où les moyens ci-dessus seraient rejetés et le jugement de première instance confirmé dans son principe de la responsabilité des intimés.

Vu l'article 1231-5 du Code civil,

VOIR SUPPRIMER la clause pénale que les époux [L] sollicitent au regard du caractère excessif de celle-ci et de l'absence de tout préjudice sérieux et les débouter de leur appel de ce chef tendant au paiement à leur profit de la somme de 137 500 euros.

En toute hypothèse :

CONDAMNER les époux [L] à la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

CONDAMNER les époux [L] aux autres dépens de première instance et d'appel.

La cloture a été prononcée par ordonnance du 4 juillet 2024.

SUR QUOI,

LA COUR

Prolégomènes

Il sera liminairement observe que le jugement n'est pas contesté en ce qu'il a fait droit à la restitution de l'acompte de 70 000 euros aux acquéreurs, Monsieur et Madame [G].

1-L'imputabilité de la résiliation de la vente

Le jugement retient que lors de la signature du compromis de vente, Monsieur et Madame [G] avait parfaitement connaissance des travaux et de leur réalisation en l'absence d'autorisation administrative, que les modifications causées par ces travaux ont bien été intégrées dans le deuxième projet d'acte authentique et qu'ainsi ils ne rapportent pas la preuve d'une faute imputable aux vendeurs. Il en infère l'imputabilité entière de la non réitération de la vente aux acquéreurs et, au constat de son caractère excessif, ramène le montant de la clause pénale à la somme de 20 000 euros à la charge des époux [G], déboutant les époux [L] de leurs demandes de dommages et intérêts, à défaut de justificatifs. Au constat que les vendeurs n'ont pas transmis une information précontractuelle erronée et dolosive ni modifié de manière unilatérale les termes du contrat, il déboute les époux [G] de leurs demande de résiliation de la promesse de vente (sic) à la date du 18 décembre 2020. Au rappel des mentions claires du compromis de vente relatives aux modifications effectuées par les vendeurs ainsi que la réalisation des travaux sans autorisation, le jugement écarte la demande de résolution de la promesse de vente (sic) au motif de l'erreur sur l'économie générale du contrat.

Monsieur et Madame [L] font grief au jugement d'avoir diminué le montant de l'indemnisation forfaitaire leur revenant, sans avoir pris en compte les frais engagés sur le bien situé à [Localité 13] qu'ils n'ont pu acquérir et a été remis en vente, anéantissant le projet d'installation professionnelle de Monsieur [L], médecin, à [Localité 8], et ne prenant pas en compte le retard pris à la mise en vente du bien litigieux, finalement intervenue le 3 janvier 2023 à un prix inférieur de 200 000 euros par rapport au prix convenu avec les époux [G], cependant que le revirement de ces derniers les exposent en outre à la difficulté d'obtenir un financement pour un nouvel achat du fait de la hausse des taux d'intérêts.

Ils opposent à l'appel incident des époux [G], que ceux-ci ont eu 4 mois pour prendre une connaissance parfaite des lieux, ayant visité le bien en juin 2021 et le compromis ayant été signé en octobre 2021, qu'il n'y a aucune différence significative de désignation du bien entre le compromis et les deux projets d'acte authentiques, qu'ils ont été transparents sur les travaux réalisés sans autorisation administrative et la régularisation obtenue auprès de la mairie qui a attesté de la prescription. Ils concluent qu'aucun manquement contractuel ne leur est imputable ni une erreur, le compromis étant très clair sur la situation administrative du bien. Au rappel que l'indemnité d'immobilisation constitue le prix de l'exclusivité consentie au bénéficiaire de la promesse, ils concluent au rejet de la demande de réduction de la clause pénale.

Monsieur et Madame [G], au soutien de leur rappel incident, font valoir un premier moyen tenant au motif de la résiliation du contrat qu'ils imputent à la fois à la présentation erronée et dolosive du bien dans le cadre de la promesse de vente mais également à une modification unilatérale des termes du contrat ayant conduit à un bouleversement complet de son économie. Ils soutiennent à cet égard, aux visas des articles 1112-1, 1113 et 1589, 1192 et 1193 du Code civil, que le bien objet du compromis ne correspond en rien à celui visé dans les projets d'acte authentique du 2 et du 14 décembre 2021, au regard de la situation administrative le vendeur ayant indiqué avoir effectué les démarches en mairie pour régulariser les travaux liés à l'aménagement des combles alors qu'il n'en est rien, la fourniture d'un certificat de prescription ne pouvant abuser la cour et n'exonérant pas les vendeurs de leurs obligations. Ils en infèrent l'absence d'accord sur la chose et, comparant l'acte qu'ils ont signé avec les époux [L] avec celui finalement par ces derniers le 3 janvier 2023 avec leurs nouveaux acquéreurs, les époux [X], ils constatent une différence sur l'information donnée quant aux conséquences de la construction irrégulière dont les nouveaux acquéreurs, au contraire des époux [G], ont pleinement été informés des risques qu'ils ont acceptés d'assumer.

Réponse de la cour

Selon les dispositions de l'article 1112-1 du Code civil, celle des parties qui connaît une information dont l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre doit l'en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant. Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.

Il incombe à celui qui prétend qu'une information lui était due de prouver que l'autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu'elle l'a fournie.

Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir qui engage la responsabilité de celui qui en était tenu.

Aux termes de l'article 1589 alinéa 1 du Code civil : ' La promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix.'

Les stipulations du compromis de vente relatives à la construction et aux autorisations administratives délivrées rappelées dans l'exposé des faits, établissent que les époux [G] ont signé le compromis de vente au regard de l'engagement des Vendeurs 'd'avoir effectué les démarches nécessaires auprès de la mairie de de [Localité 14] (77) afin de régulariser les travaux liés à l'aménagement des combles et de la mezzanine » et qu' « A défaut de fournir les déclarations relatives aux travaux précités, un certificat de prescription édité en date du 6 août 2021 par la mairie de [Localité 14] est annexé aux présentes. »

Ces stipulations expriment de manière claire que la situation du bien au regard des travaux réalisés tenant à l'aménagement des combles et de la mezzanine est régularisée en suite des démarches effectuées en mairie par la production d'un certificat de prescription.

Les stipulations du premier projet d'acte authentique relativement à ces mêmes travaux reprennent celles du compromis.

Cependant la cour relève que dans le second projet d'acte authentique en date du 14 décembre 2021, cette clause est rédigée dans un sens différent puisqu'elle ajoute à l'irrégularité des travaux pour laquelle un certificat de prescription a été délivré par la mairie le 6 août 2021, une précision non mentionnée dans le compromis ni dans le premier projet d'acte authentique, relative à la déclaration du vendeur tenant au non accomplissement des formalités nécessaires auprès du service des impôts en « suite de l=achèvement des travaux pour déclarer la nouvelle superficie habitable après aménagement des combles, tenant à la déclaration H1 non déposée au service du Trésor Public compétent et cite de manière détaillée l'ensemble des sanctions pénales, fiscales et civiles auxquelles les acquéreurs sont exposés, notamment au regard des actions en responsabilité émanant de tiers, au risque de démolition de l'ouvrage en résultant mais également au regard des sanctions administratives imprescriptibles tenant à l'obligation de régulariser la situation actuelle, en cas de demande de permis de construire ou de sinistre, ainsi qu'à l'impossibilité de raccordement aux réseaux des constructions édifiées irrégulièrement outre le risque de s'exposer à un refus de permis de construire en cas de demande de régularisation.

Contrairement à ce que soutiennent les appelants, ces conséquences légales tenant à l'irrégularité des travaux d'aménagement des combles et de la mezzanine n'ont pas été exprimées dans le compromis de vente, lequel laissait clairement à penser que la situation était couverte par la « prescription des travaux » certifiée en ces termes par l'attestation de la mairie du 6 août 2021 et non autrement motivée, or, la situation décrite dans le second projet d'acte du 14 décembre 2021 révélait un risque au regard de l'imprescriptibilité des sanctions administratives auxquelles les acquéreurs étaient exposés dont celui du refus de délivrance d'un nouveau permis de construire en cas de travaux, outre les sanctions fiscales potentielles du fait de l'extension non déclarée.

Il en résulte que contrairement à ce qui a été jugé, les acquéreurs étaient fondés à refuser la réitération de la vente au regard de la non communication d'une information déterminante tenant aux conséquences pénales, civiles, administratives et fiscales encourues du chef des travaux non autorisés par l'administration pour l'aménagement des combles et de la mezzanine et de la non déclaration de l'extension aux services fiscaux cependant que l'attestation du maire relative à la « prescription des travaux » au vu de son absence de motivation n'était pas de nature à rassurer les acquéreurs quant à la délivrance paisible du bien incombant aux vendeurs.

La responsabilité des vendeurs est donc engagée pour avoir limité, dans le compromis de vente, l'information déterminante qu'ils devaient aux acquéreurs quant aux conséquences desdits travaux irrégulièrement entrepris, au seul certificat de « prescription des travaux » délivré par la mairie.

La cour relève en outre que la circonstance que le bien ait finalement été vendu par les époux [L] à des tiers, par acte authentique du 3 janvier 2023, à un prix inférieur de 200 000 euros, stipulant de manière claire les conséquences pénales, civiles, administratives et fiscales des travaux irréguliers dont les acquéreurs ont indiqué faire leur affaire personnelle, est sans emport, dans la mesure où les époux [G] étaient fondés à refuser de prendre à leur charge les conséquences d'une irrégularité imputable à leurs vendeurs.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de condamnation des époux [G] au règlement de la clause pénale.

Aux termes de l'acte de vente page 15/20, Réitération par Acte Authentique, l'indemnité forfaitaire et de clause pénale est due en suite du refus fautif d'exécuter la réitération de la vente or en l'espèce la non-réitération est due à un motif légitime de résiliation et non à une faute de sorte que les époux [G] ne sauraient être condamnés à ce paiement.

Ils ne sont pas non plus fondés à solliciter la condamnation des vendeurs qui n'ont pas refusé d'exécuter leur engagement.

Les époux [G] seront donc déboutés de leur demande en paiement de l'indemnité d'immobilisation et de clause pénale.

2- Les dommages et intérêts demandés par les époux [L]

Le sens de l'arrêt qui a retenu l'absence de faute imputable aux acquéreurs conduit à débouter les vendeurs de leur demande de dommages et intérêts.

3 -Les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement qui a condamné les époux [G] aux dépens ainsi qu'à régler aux époux [L] une somme de 3 000 euros au tire des frais irrépétibles sera infirmé.

Statuant à nouveau, Monsieur et Madame [L] seront condamnés in solidum aux dépens outre le règlement à Monsieur et Madame [G] de la somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement excepté en ce qu'il a ordonné la restitution à Monsieur [M] [G] et Madame [A] [G] de l'acompte de 70 000 euros séquestré entre ls mains de Maître [S], notaire à [Localité 12] ;

Statuant à nouveau des autres chefs ;

DEBOUTE Monsieur [U] [L] et Madame [I] [L] de l'intégralité de leurs demandes ;

DEBOUTE Monsieur [M] [G] et Madame [A] [G] de leur demande au titre de l'indemnité d'immobilisation et de clause pénale ;

CONDAMNE Monsieur [U] [L] et Madame [I] [L] aux dépens ainsi qu'à régler à Monsieur [M] [G] et Madame [A] [G] une somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles.

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