CA Dijon, 1re ch. civ., 15 avril 2025, n° 22/01384
DIJON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Egma (SASU)
Défendeur :
SMA (SA), Allianz (SA), SMABTP (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Caullireau-Forel
Conseillers :
Mme Brugere, Mme Charbonnier
Avocats :
Me Telenga, SCP Profumo Gaudilliere Dubaele Avocats, Me Geslain, SCP Beziz-Cleon - Charlemagne-Creusvaux, Me Kouma
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Les consorts [C] / [T] ont acquis le 21 mars 2006 un terrain à [Localité 4], et ont fait construire une maison sise dans le [Adresse 16].
Ils n'ont pas souscrit d'assurance dommages-ouvrage.
M. [D] [Z], architecte assuré pour sa responsabilité professionnelle auprès de la compagnie Allianz Iard, s'est vu confier une mission partielle selon contrat de maîtrise d'oeuvre de conception du 30 août 2006.
Le permis de construire qu'il a déposé a été accordé le 20 décembre 2006.
La société EGMA, assurée auprès de SAGENA devenue SMA, a été chargée de la réalisation de la maison, selon contrat de marché de travaux à prix global révisable du 22 décembre 2006, tous corps d'état, sauf l'installation extérieure d'évacuation et de récupération des eaux pluviales.
M. [B] [P], assuré auprès de la SMABTP, a été chargé par le maître de l'ouvrage de la réalisation de l'installation extérieure d'évacuation et de récupération des eaux pluviales. Il était prévu la mise en place de deux fosses et la création d'une zone d'épandage et d'un puits perdu. Il a mis en place deux cuves de 2 000 litres chacune en mars et avril 2008.
Les travaux ont commencé dès l'acceptation du devis fin décembre 2006 pour s'achever le 11 juin 2008.
Les maîtres de l'ouvrage se sont plaints, dès la fin mars 2008, d'infiltrations en sous-sol et ont subi un premier sinistre important en juillet 2008, puis un second le 15 juillet 2009.
Un procès verbal de réception 'des travaux marché privé' a été signé avec réserves le 28 juillet 2009 entre les maîtres de l'ouvrage et la société EGMA, les réserves portant notamment sur un 'problème d'infiltration d'eau assez importante dans le sous sol'.
En octobre 2009, M. [P] a réalisé un puisard en remplacement de l'épandage.
La société EGMA a installé une pompe de relevage au droit du local technique de la piscine, en sous sol de la maison, avec évacuation dans le réseau des eaux usées.
Un 'procès verbal de réception des travaux marché privé' sans réserve a été régularisé entre les maîtres de l'ouvrage et l'entreprise EGMA le 15 mars 2010 suite aux travaux de reprise.
Un nouveau constat d'infiltrations d'eau a été effectué en janvier 2012 en suite duquel les époux [C] /[T] ont fait installer une deuxième pompe dans le vide sanitaire.
C'est dans ces conditions que les consorts [C]/[T] ont obtenu la désignation de M. [K] en qualité d'expert judiciaire. Ce dernier a déposé son rapport le 8 mai 2014.
A la suite de ce dépôt, M. [C] et Mme [T] ont fait assigner, par actes du 29 août 2014, M. [Z] et son assureur Allianz, la société EGMA et M. [P], ainsi que leurs assureurs respectifs SAGENA et SMABTP, sur le fondement des articles 1147 et 1792 du code civil, aux fins d'obtenir avant dire-droit, la désignation d'un nouvel expert et à titre subsidiaire la condamnation de M. [Z], de la société EGMA et de M. [B] [P] à leur rembourser le coût de la construction, soit la somme de 300 832,38 euros.
Par jugement avant-dire droit du 5 juillet 2016, le tribunal a ordonné une nouvelle mesure d'expertise confiée à M. [I] [A] lequel a déposé son rapport le 12 février 2019.
M. [C] et Mme [T] ont demandé la condamnation in solidum de M. [Z],la société EGMA et M. [P], avec leurs assureurs, respectifs à leur payer :
' au titre de la réparation, avec maîtrise d'oeuvre, une somme de 130 034,62 euros TTC,
' au titre du préjudice moral, une somme de 10 000 euros,
' au titre du trouble de jouissance, une somme de 26 400 euros,
' au titre des frais d'expertise réalisée par M. [K], la somme de 8 249,99 euros,
' au titre des frais d'expertise réalisée par M. [A], la somme de 41 346,86 euros,
' au titre de l'article 700, la somme de 5 000 euros.
Parallèlement, ils ont saisi le juge de la mise en état et par ordonnance du 2 décembre 2019, celui-ci, après avoir relevé que les demandes des consorts [C] - [T] à l'encontre de l'architecte M. [D] [Z] et de son assureur se heurtaient à une contestation sérieuse, a:
- condamné la société EGMA à payer aux consorts [C] - [T] une provision de 50 000 euros à valoir sur leur indemnisation,
- condamné M. [B] [P] à payer aux consorts [C] - [T] une provision de 40 000 euros à valoir sur leur indemnisation,
- condamné la société EGMA et M. [B] [P] à payer, chacun, aux consorts [C]/[T] une provision de 10 000 euros à titre de provision pour les frais d'instance.
- débouté les intéressés de leurs demandes à l'encontre de M. [D] [Z], de la société Allianz Iard, de la société SAGENA, devenue SMA, et de la SMABTP,
- débouté les parties de leurs plus amples ou contraires,
- réservé les dépens.
Par jugement du 11 octobre 2022, le tribunal judiciaire de Dijon a :
- débouté M. [C] et Mme [T] de leurs prétentions en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de M. [Z] et de son assureur la compagnie Allianz,
- condamné la société EGMA à payer à M. [C] et à Mme [T]:
* la somme de 62 534,71 euros au titre de la réparation des dommages,
* la somme de 4 400 euros au titre de l'indemnisation du préjudice de jouissance,
- condamné M. [P] à payer à M. [C] et à Mme [T] :
* la somme de 51 164,76 euros au titre de la réparation des dommages,
* la somme de 3 600 euros au titre de l'indemnisation du préjudice de jouissance,
- dit qu'il convient de déduire de ces condamnations les provisions versées en exécution de l'ordonnance du 2 décembre 2019,
- débouté les parties de leurs demandes en ce qu'elles sont dirigées contre les sociétés SMA et SMABTP,
- condamné in solidum la société EGMA et M. [P] à payer à M. [C] et à Mme [T] une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société EGMA et M. [P] aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertises de M. [K] et de M. [A],
- dit qu'il convient de déduire de ces condamnations les provisions pour frais d'instance versées par les défendeurs en exécution de l'ordonnance du 2 décembre 2019,
- dit que la charge définitive des condamnations au titre des frais irrépétibles et des dépens sera supportée par la société EGMA à concurrence de 55 % et par M. [P] à concurrence de 45 %,
- déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration du 4 novembre 2022, la société EGMA a relevé appel de ce jugement des chefs la concernant.
' Selon conclusions notifiées le 12 juillet 2023, la SARL EGMA demande à la cour, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, de :
' réformer le jugement du tribunal judiciaire de Dijon du 11 octobre 2022 en ce qu'il :
- l'a condamnée à payer à M. [C] et Mme [T] :
. la somme de 62 534,71 euros au titre de la réparation des dommages,
. la somme de 4 400 euros au titre de l'indemnisation du préjudice de jouissance,
- a débouté les parties de leurs demandes dirigées à l'encontre des sociétés SMA et SMABTP,
- l'a condamnée in solidum avec M. [P] à payer à M. [C] et à Mme [T] la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'a condamnée in solidum avec M. [P] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertises de M. [K] et de M. [A],
- a dit que la charge définitive des condamnations au titre des frais irrépétibles et des dépens sera supportée par elle à concurrence de 55 %, et par M. [P] à concurrence de 45 %,
- a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
et statuant à nouveau,
' à titre principal,
- constater que, suite à la levée des réserves mentionnées dans le procès-verbal de réception du 28 juillet 2009, l'ouvrage a été réceptionné sans réserve selon un procès-verbal de réception en date du 15 mars 2010,
- constater en conséquence que tous les vices et malfaçons apparents affectant l'ouvrage ont été purgés à compter du 15 mars 2010,
- débouter en conséquence les consorts [C] -[T] de l'ensemble de leurs demandes et prétentions à son encontre,
- condamner les consorts [C]- [T] à verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les consorts [C] - [T] aux entiers dépens, ce y compris les frais relatifs aux deux expertises judiciaires,
' à titre subsidiaire,
- confirmer le jugement du 11 octobre 2022 en ce qu'il a ramené les demandes des consorts [C] -[T] concernant le chiffrage des travaux de réparation à de plus justes proportions au regard des conclusions du rapport de M. [A], à savoir à la somme de 113 969,47 euros TTC en lieu et place de la somme de 130 034,62 euros TTC sollicitée par les consorts [C] - [T],
- confirmer le jugement du 11 octobre 2022 en ce qu'il a rejeté la demande des consorts [C] - [T] concernant l'indemnisation d'un prétendu préjudice de jouissance/moral qu'ils chiffrent arbitrairement et sans aucune justification à la somme de 10 000 euros,
- ramèner les demandes des consorts [C] - [T] concernant l'indemnisation du préjudice économique/de jouissance à de plus justes proportions au regard des conclusions du rapport de M. [A], à la somme de 4 240 euros TTC en lieu et place de la somme de 8 000 euros retenu par le tribunal,
- constater que selon le rapport de M. [A], les désordres affectant l'ouvrage sont indépendants les uns des autres et peuvent être attribués distinctement à différents locateurs d'ouvrage,
- confirmer en conséquence le jugement du 11 octobre 2022 en ce qu'il a refusé de prononcer des condamnations in solidum,
- constater que selon le rapport de M. [A] :
. sa responsabilité doit être retenue à hauteur de 50 % du sinistre général,
. la responsabilité de M. [P] doit être retenue à hauteur de 40 % du sinistre général,
. la responsabilité des consorts [C] - [T] doit être retenue à hauteur de 10 % du sinistre général,
- juger que les condamnations prononcées à son encontre ne pourront donc excéder 50 % du montant total des condamnations qui seront prononcées dans cette affaire, tant concernant la prise en charge des travaux de reprise que concernant la réparation des éventuels préjudices consécutifs,
- partager les dépens, y compris les frais d'expertise, entre les différentes personnes responsables du sinistre général selon le rapport d'expertise de M. [A], ce qui inclut la condamnation des consorts [C] - [T] à prendre en charge 10 % des dépens,
' et en tout état de cause et à titre reconventionnel,
- constater que les désordres n'étaient pas apparents lors de la réception définitive de l'ouvrage qui a eu lieu le 15 mars 2010 sans réserve,
- constater que les désordres apparus antérieurement à la réception ne procèdent pas des mêmes causes que ceux apparus en janvier 2012, et qu'il s'agit donc de désordres différents,
- constater que les maitres d'ouvrage ne pouvaient en aucun cas apprécier les désordres affectant l'ouvrage dans toute leur ampleur et dans toutes leurs conséquences lors de la réception,
- constater donc que les désordres n'étaient pas apparents pour les maîtres d'ouvrage au moment de la réception, quel que soit sa date,
- constater que les désordres relevés par l'expert judiciaire sont de nature décennale selon l'avis même de l'expert judiciaire,
- constater qu'elle est assurée auprès de la société SMA SA et que les garanties de la SMA SA sont parfaitement mobilisables en l'espèce,
- condamner la société SMA SA, son assureur, à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre,
- condamner tout succombant à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
' Selon conclusions d'intimés et d'appel incident notifiées le 25 avril 2023, M. [R] [C] et Mme [J] [T] demandent à la cour, au visa de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance 2016-1311 du 10 février 2016, des articles 1231 et suivants du code civil,des articles 1792 et suivants du code civil, de:
' les déclarer recevables en leur appel incident,
' réformer le jugement entrepris en ce qu'il :
- les a déboutés de leurs demandes dirigées à l'encontre de M. [Z] et de son assureur, la société Allianz Iard,
- a condamné la société EGMA à leur payer :
. la somme de 62 534,71 euros au titre de la réparation des dommages
. la somme de 4 400 euros au titre de l'indemnisation du préjudice de jouissance
- a condamné M. [P] à leur payer :
. la somme de 51 164,76 euros au titre de la réparation des dommages,
. la somme de 3 600 euros au titre de l'indemnisation du préjudice de jouissance,
- a débouté les parties de leurs demandes en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre des sociétés SMA et SMABTP,
- a condamné in solidum la société EGMA et M. [P] aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertises de M. [K] et de M. [A],
- dit que la charge définitive des condamnations au titre des frais irrépétibles et des dépens sera supportée par la société EGMA à concurrence de 55 % et par M. [P] à concurrence de 45 %,
statuant à nouveau,
' A titre principal,
- condamner in solidum M. [Z], la société EGMA et M. [P] à leur payer les sommes ci-après :
. 113 699,47 euros TTC au titre des travaux de remise en état,
. 33 000 euros au titre du préjudice de jouissance,
. 10 000 euros en réparation de leur préjudice moral, chacun recevant 5 000 euros,
- condamner in solidum M. [Z], la société EGMA et M. [P] à leur payer la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum M. [Z], la société EGMA et M. [P], aux entiers dépens de l'instance lesquels comprendront les frais d'expertise qui s'élèvent à la somme de 49 595,99 euros,
' A titre subsidiaire,
- condamner in solidum M. [Z], architecte, solidairement avec son assureur la compagnie Allianz, la société EGMA, solidairement avec sa compagnie d'assurance la société SAGENA, l'entreprise [P], solidairement avec sa compagnie d'assurance la société SMABTP, à leur payer les sommes ci-après :
- 113 699,47 euros TTC au titre des travaux de remise en état,
- 33 000 euros au titre du préjudice de jouissance,
- 10 000 euros en réparation de leur préjudice moral, chacun recevant 5 000 euros,
- condamner in solidum M. [Z], architecte, solidairement avec son assureur la compagnie Allianz, la société EGMA, solidairement avec sa compagnie d'assurance la société SAGENA, l'entreprise [P], solidairement avec sa compagnie d'assurance la société SMABTP, à leur payer la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum M. [Z], architecte, solidairement avec son assureur la compagnie Allianz, la société EGMA, solidairement avec sa compagnie d'assurance la société SAGENA, l'entreprise [P], solidairement avec sa compagnie d'assurance la société SMABTP, aux dépens de l'instance qui comprendront les frais d'expertise qui s'élèvent à la somme de 49 595,99 euros.
' Selon conclusions d'intimés et d'appel incident notifiées le 28 avril 2023, M. [B] [P] et son assureur la SMABTP demandent à la cour, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, de :
' pour la SMABTP :
- la déclarer recevable en ses écritures,
- confirmer le jugement du 11 octobre 2022 n°22/130 en ce qu'il a débouté les consorts [C] - [T] et les autres parties de l'ensemble de leurs demandes et prétentions à son encontre, les désordres ne relevant pas de la garantie décennale,
' pour M. [P] :
' déclarer recevable son appel incident,
en conséquence :
' réformer le jugement du 11 octobre 2022 n°22/130 en ce qu'il :
- l'a condamné à régler à M. [C] et Mme [T] la somme de 51 164,76 euros au titre de la réparation des dommages, et la somme de 3 600 euros au titre de l'indemnisation du préjudice de jouissance,
- l'a condamné in solidum avec la société EGMA à payer à M. [C] et Mme [T] la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'a condamné in solidum avec la société EGMA aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertises de M. [K] et de M. [A],
- dit que la charge définitive des condamnations au titre des frais irrépétibles et des dépens sera supportée par la société EGMA à concurrence de 55 %, et par lui à concurrence de 45 %,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
et statuant à nouveau :
' A titre principal,
- constater que son entreprise n'est pas responsable des désordres,
par conséquent,
- débouter les consorts [C] - [T] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions à l'encontre de son entreprise et de la SMABTP,
- débouter la compagnie d'assurance Allianz de sa demande de garantie à son encontre et à l'encontre de la SMABTP,
' A titre subsidiaire, condamner la société EGMA à garantir son entreprise et la SMABTP de toutes condamnations pouvant être prononcées à leur encontre,
' A titre très subsidiaire,
- confirmer le jugement du 11 octobre 2022 en ce qu'il a refusé de prononcer des condamnations in solidum,
- confirmer le jugement du 11 octobre 2022 en ce qu'il a chiffré le montant des travaux de reprise à la somme 113 969,47 euros,
- condamner son entreprise à régler aux consorts [C]-[T] la seule somme de 45 479,79 euros au titre de la réparation des désordres en tenant compte du partage des responsabilités opéré par l'expert judiciaire, soit 40% pour lui,
- déduire du montant de la condamnation de son entreprise le montant de la provision déjà versée suite à l'ordonnance du 2 décembre 2019,
- confirmer le jugement du 11 octobre 2022 en ce qu'il a débouté les consorts [C] - [T] de leur demande au titre du préjudice moral à hauteur de 10 000 euros,
- ramener la demande des consorts [C] ' [T] au titre du préjudice de jouissance à de plus justes proportions, sans que le montant n'excède 4 240 euros tel que fixé par l'expert,
- répartir le montant du préjudice de jouissance entre les parties comme suit :
. 2 120 euros pour la société EGMA
. 1 696 euros pour son entreprise
- 424 euros qui resteront à la charge des consorts [C]-[T],
- débouter les consorts [C]-[T] de leur demande de condamnation in solidum au titre des dépens,
en conséquence :
- répartir les dépens, comprenant les frais d'expertise, entre la société EGMA à hauteur de 50 %, lui-même à hauteur de 40 % et les consorts [C]-[T] à hauteur de 10 % du sinistre général,
- ordonner que la condamnation de la SMABTP sera limitée, compte tenu des seuils de franchise applicables;
' En tout état de cause,
- condamner les consorts [C] ' [T] à payer à son entreprise et la SMABTP la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;
- condamner les consorts [C] ' [T] aux entiers dépens, qui seront recouvrés par la Selarl du Parc & associés, comme prescrit par l'article 699 du code de procédure civile.
' Selon conclusions d'intimée notifiées le 27 juillet 2023, la SA SMA, assureur de la société EGMA, demande à la cour de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les parties de leurs demandes dirigées contre elle,
- débouter la SA EGMA de son appel en garantie dirigé contre elle,
- débouter la société Allianz de ses demandes dirigées contre elle,
- débouter M. [C] et Mme [T] de leur appel incident et de toutes leurs demandes dirigées contre elle,
- condamner la SA EGMA et les consorts [C]- [T] à lui payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- les condamner aux entiers dépens,
' A titre subsidiaire,
- débouter les consorts [C]-[T] de leur demande de condamnation in solidum et juger que la part de la société EGMA et de son assureur ne peut excéder 50 % du montant total des condamnations,
- ramener à de plus justes proportions leurs demandes pour tenir compte des conclusions de l'expert,
- débouter les requérants de leurs demandes au titre du préjudice de jouissance,
- juger qu'elle pourra opposer sa franchise contractuelle sur les préjudices immatériels soit 10% du montant des dommages avec un minimum de 629,60 euros et un maximum de 6 296 euros et que la SA EGMA devra conserver à sa charge le montant de sa franchise au titre de la garantie décennale.
' Selon conclusions d'intimée notifiées le 22 juin 2023, la SA Allianz Iard, assureur de M. [Z], architecte, demande à la cour, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, de :
- constater que la société EGMA, appelante, ne forme aucune demande à son encontre,
- débouter purement et simplement la société EGMA, les consorts [C] ' [T] ou toute autre partie, de toutes demandes à son encontre,
dans tous les cas,
- dire et juger que la société EGMA, M. [B] [P], et leurs assureurs respectifs la garantiront et la relèveront de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,
- condamner la société EGMA, ou toute autre partie succombante, à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner cette même société, ou toute autre partie succombante, aux entiers dépens.
' La société EGMA a fait signifier sa déclaration d'appel et ses conclusions à M. [D] [Z] par actes du 14 février et du 4 mai 2023 remis à sa personne.
Les consorts [C] - [T] d'une part et M. [P] et la SMABTP d'autre part ont fait signifier leurs conclusions à M. [Z] par actes du 24 mai et 30 mai 2023, délivrés selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile.
M. [Z] n'a pas constitué avocat.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé complet de leurs moyens.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 16 janvier 2025.
SUR CE LA COUR,
A titre liminaire, la cour observe que certaines des demandes tendant à voir 'constater', 'juger', ... ne constituent qu'un rappel de moyens ou d'arguments mais ne contiennent aucune prétention au sens des articles 4, 5 et 954 du code de procédure civile. Elles ne saisissent donc pas la cour qui ne statuera pas sur ces 'demandes'.
I/ Sur la nature des travaux, sur la nature des désordres et leur cause
Il est constant que M. [C] et Mme [T] ont confié à la société EGMA la construction d'une maison neuve d'habitation à [Localité 4], selon marché de travaux du 22 décembre 2006.
Ledit marché de travaux est étendu à tous corps d'état, le devis estimatif annexé ayant été établi pour tous corps d'état à hauteur de 300 966 euros, à l'exception de la prestation concernant l'installation extérieure d'évacuation et de récupération des eaux pluviales qui a été confiée à M. [P].
Celui-ci a mis en place deux cuves en mars et avril 2018 destinées à collecter les eaux pluviales et ce en contrariété avec les préconisations du Bafu reprises par l'architecte et sa propre facture du 9 avril 2008 qui portait sur la mise en place de deux fosses de 2 000 litres avec raccordement et création d'épandage ou puits perdu pour évacuation des excédents.
Suite à des inondations en sous-sol en mars 2008 puis juillet 2009, il a mis en oeuvre, en octobre 2009, un puits filtrant en remplacement de l'épandage et la société EGMA a installé une pompe de relevage dans le local technique de la piscine avec évacuation dans le réseau des eaux usées.
Selon procès verbaux de constat dressés par Me [Y] les 15 juillet 2009 et 6 janvier 2012, il est constaté que de l'eau s'est infiltrée sur la surface totale du sous sol et a endommagé les cloisons et aménagements.
M. [A], expert judiciaire a constaté fin 2016 des infiltrations très présentes à l'intérieur du sous-sol du pavillon provenant des eaux pluviales et ou souterraines.
Il a relevé, tout comme M. [K], trois catégories de défauts affectant les travaux (en page 67 et suivantes de son rapport) :
1/ Les défauts affectant la structure / le gros 'uvre
L'expert reproche à l'entreprise générale EGMA :
- de ne pas avoir demandé au maître d'ouvrage un rapport géotechnique,
- de pas avoir appréhendé le risque fort de stagnation des eaux de ruissellement au contact de la paroi en raison du contexte géographique du terrain peu perméable (argileux) en déclivité vers le bâtiment,
- de ne pas avoir respecté les préconisations du bureau structure notamment au niveau de la construction des murs en agglo de parpaings pleins, l'entreprise ayant mis en place des parpaings creux.
2/ Les défauts affectant le lot assainissement des eaux pluviales extérieur et le système d'infiltration
Il est mis en évidence :
- l'absence de protection périphérique et d'assainissement notamment de drainage,
- un réseau d'assainissement pluvial totalement détruit après la pose par l'entreprise de VRD lors des phases de remblaiement anarchique avec des matériaux non conformes.
Le sapiteur a constaté que l'ensemble du réseau d'évacuation des eaux pluviales avait été réalisé avec un matériau impropre tuyau PVC type M1 à coller (prévus pour l'intérieur) au lieu de PVC CR 8 à emboîtement à joint. Il a été constaté de nombreuses déformations des collecteurs rendant ces derniers fuyards en de multiples points et que les collecteurs d'eaux pluviales n'étaient pas raccordés aux fosses,
- la cuve de stockage des eaux pluviales préfabriquée s'est révélée être fendue dans un angle intérieur générant ainsi des fuites sur l'intérieur de la construction faute d'étanchéité,
- le volume du puits d'infiltration est trop faible par rapport aux données de la maison mais aussi à la perméabilité du sol.
3/ le défaut concernant le raccordement de la vidange des eaux de la piscine sur le réseau des eaux pluviales
L'expert judiciaire indique que le maître d'ouvrage ou son installateur a fait raccorder la vidange de la piscine au moment de l'hivernage sur les canalisations intérieures du réseau d'eaux pluviales et que la réaction d'inondation par retour dans le pavillon a été immédiate de par la faible capacité du puits d'infiltration à absorber autant d'eau d'un seul coup mais aussi du système d'évacuation et des regards extérieurs créés par l'entreprise de VRD de maçonnerie.
Ce faisant, la société EGMA ne peut valablement soutenir que les désordres survenus en 2008 et 2009 auraient été définitivement réglés par la mise en place d'une pompe de relevage et d'un puits et que ceux survenus en 2012 seraient donc distincts et auraient des causes différentes alors que le rapport [K], sur lequel elle se fonde, a relevé courant 2013 les mêmes causes que M. [A], à l'exception de la vidange de la piscine, à savoir :
- les trous dans les maçonneries constatés à l'intérieur du vide sanitaire tandis que le sol est argileux et ne permet pas à l'eau de s'infiltrer dans le sol,
- l'absence de drain au pourtour de la maison et l'absence d'une membrane d'étanchéité le long des murs enterrés,
- une installation d'évacuation des eaux de pluie ayant une capacité insuffisante dès lors que les deux citernes de rétention finalement installées ne fonctionnent qu'une fois (elles restent pleines faute d'utilisations domestiques) et se déversent dans un puits filtrant ce qui est insuffisant au regard des obligations instaurées par la mairie imposant aux propriétaires de ne pas déverser leurs eaux sur le réseau communal,
- de manière très subsidiaire, le déboitement de la rehausse du regard de visite de la cuve.
Il en résulte que si M. [A] a distingué plusieurs causes expliquant les infiltrations, celles-ci constituent un dommage unique affectant l'ouvrage unique que constitue la maison des consorts [C]-[T], ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges.
II/ Sur la date de réception et ses effets
La société EGMA indique que l'importance des travaux réalisés après les premières infiltrations doit conduire à considérer le procès verbal de réception dressé en 2009 comme une pré-réception, la réception définitive étant intervenue, selon elle, le 15 mars 2010.
Elle estime que le tribunal aurait dû :
- soit considérer que les désordres étaient apparents au moment de la réception de sorte qu'elle ne devait encourir aucune condamnation dès lors que les maîtres de l'ouvrage avait eu connaissance d'inflitrations en cours de chantier et qu'ils avaient signé le procès verbal de reception sans réserve,
- soit considérer que les désordres n'étaient en réalité pas apparents au moment de ladite réception de sorte qu'il s'agit de désordres de nature décennale dès lors que les maîtres de l'ouvrage ne pouvaient appréhender ces désordres dans toute leur ampleur et dans toutes leurs conséquences lors de la réception définitive.
Il est constant que les maîtres de l'ouvrage ont signé un procès verbal de réception avec réserves le 28 juillet 2009 mentionnant notamment le problème d'infiltrations d'eau dans le sous-sol.
La cour observe, à l'instar des premiers juges, que ce procès verbal est signé, outre par les maîtres d'ouvrage, par M. [N], en qualité de maître d'oeuvre, et par la société EGMA, dont M. [N] est le gérant.
Suite aux premières inondations du sous-sol successivement en juillet 2008 et juillet 2009, M. [P] a réalisé un puisard en remplacement de l'épandage, qui ne pouvait plus être réalisé en raison de la construction d'une terrasse, tandis que la société EGMA installait une pompe de relevage dans le local technique de la piscine avec évacuation dans le réseau des eaux usées.
Un nouveau document intitulé 'procès verbal de réception des travaux de marché privé' sans réserve a été signé entre les maîtres de l'ouvrage et M. [N], en qualité de maître oeuvre, et la société EGMA le 15 mars 2010.
La cour observe qu'en annexe de ce document, il a été signé le même jour la 'levée des réserves du précédent procès verbal de travaux du 28 juillet 2009".
De nouvelles inondations ont été déplorées en fin d'année 2011 dont les conséquences ont été observées selon procès verbal de constat du 6 janvier 2012.
L'article 1792-6 alinéa 2 du code civil définit la réception comme "l'acte par lequel le maître d'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves" et l'article 1792-4-1 du même code fait de la réception le point de départ des délais des garanties légales des constructeurs.
Le raisonnement de la société EGMA consistant à fixer la date de la réception au 15 mars 2010 et à requalifier le document du 28 juillet 2009 ne peut pas être suivi dès lors qu'à cette première date, le maître de l'ouvrage a accepté de prendre possession de l'ouvrage et en a payé le prix intégral tant au titre des travaux exécutés par la société EGMA qu'au titre de ceux exécutés par M. [P].
En principe, la réception concerne l'ouvrage dans son ensemble et en l'espèce, il n'a pas été dérogé à ce principe, étant observé que si M. [P] n'a pas signé le procès-verbal de réception du 28 juillet 2009, il ne conteste pas qu'il puisse lui être opposé au titre d'une réception tacite ce d'autant que les réserves mentionnées dans ce document concernent tant les travaux exécutés par la société EGMA que les travaux exécutés par M. [P].
C'est justement en raison des réserves consignées le 28 juillet 2009 que les désordres apparents à cette date ne peuvent être regardés comme ayant été purgés, comme le soutient la société EGMA.
Les travaux destinés à lever les réserves ont été réalisés tant par la société EGMA que par M. [P].
La nature de ces travaux ne peut avoir aucune incidence sur la date de réception, puisque les réserves n'empêchaient pas l'entrée en possession.
Le document du 15 mars 2010 est un procès-verbal de levée des réserves que le maître d'ouvrage a signé en pensant que les travaux réalisés avaient permis de remédier aux causes des infiltrations d'eau en sous-sol.
C'est par une motivation pertinente que la cour adopte que les premiers juges ont retenu que les maîtres de l'ouvrage ne pouvaient avoir accepté, en signant le procès verbal du 15 mars 2010, les infiltrations d'eau en sous-sol qui n'étaient plus décelables à cette date.
Les travaux se sont révélés inefficaces si bien que de nouveaux désordres se sont produits, de même nature et de même ampleur que ceux constatés avant la réception et ayant donné lieu à l'émission de réserves.
C'est donc également à juste titre que les premiers juges ont estimé que les désordres ne pouvaient relever de la garantie décennale mais de la responsabilité contractuelle des deux entreprises intervenues sur le chantier.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré, étant relevé qu'à hauteur de cour, les maîtres de l'ouvrage fondent leurs demandes à titre principal sur la responsabilité contractuelle des constructeurs.
III/ Sur la responsabilité des constructeurs, de l'architecte et les garanties
1) la responsabilté de M. [Z], architecte
Les consorts [C]-[T] se fondent sur le rapport d'expertise de M. [K] pour soutenir que la responsabilité de l'architecte est engagée pour n'avoir pas prévu de drains sur ses plans alors qu'il connaissait l'environnement du terrain.
Ils ajoutent que l'architecte, qui avait une mission qualitative et quantitative, aurait dû étudier et préconiser des puits filtrants conformes à l'importance du toit.
Selon contrat de maîtrise d'oeuvre de conception du 30 août 2006, l'architecte avait pour mission :
- les études préliminaires consistant à définir les caractéristiques qualitatives et quantitatives du projet (plan de masse, plan de niveau, perspectives et la SHO globale),
- un avant-projet en vue du permis de construire en établissant pour les administrations et services publics à l'échelle convenable et au moins 1 cm/m notamment : plan de masse, plan par niveau, plan de façade, coupes, plan des abords, certains détails qui pourraient s'avérer nécessaires, notice descriptive et photographique du volet paysager, le parti consécutif constructif retenu, notice de demande de permis de construire,
- un projet : l'architecte établit les documents graphiques nécessaires pour la réalisation du dossier d'appel d'offres (plans susvisés à l'échelle 2cm/m, coupes complémentaires mettant en évidence les particularités de la construction, plan de couverture et structure porteuse, réseau des principales canalisations extérieures).
Il est certain que les consorts [C]-[T] n'ont pas eu recours à l'architecte durant la phase de réalisation des travaux.
Il résulte des deux rapports d'expertise que M. [Z], architecte, avait prévu dans ses plans la réalisation d'une citerne, dont le trop plein s'évacuait dans deux puits filtrants verticaux et dont le trop plein s'évacuait dans un épandage horizontal de 50 m².
Cette installation est conforme aux préconisations du bureau d'aménagement foncier et d'urbanisme (BAFU) et donc aux exigences de la collectivité, le permis de construire ayant été obtenu le 20 décembre 2006.
Il ne saurait être reproché à l'architecte, qui n'était pas saisi d'une mission de conception et qui n'avait donc pas à rédiger le cahier des charges techniques particulières, de ne pas avoir prévu les drains alors que sa mission était limitée à la phase du permis de construire et que la solution de drainage se décide au stade des plans d'exécution dont il n'était pas saisi.
Comme les premiers juges l'ont relevé, les experts ne critiquent en aucune manière les préconisations mais ont mis en évidence que les travaux envisagés n'avaient pas été mis en oeuvre par M. [P] qui a, dans un premier temps, installé deux cuves en mars 2008 puis, dans un deuxième temps, un puisard.
En conséquence, c'est à juste titre que la première juridiction a écarté la responsabilité de l'architecte et a débouté M. [C] et Mme [T] de leurs demandes dirigées à son encontre et par voie de conséquence à l'endroit de son assureur, Allianz Iard.
2) Sur la responsabilité des constructeurs et des maîtres de l'ouvrage
M. [A] a estimé que la société EGMA avait négligé les données géotechniques du sous-sol notamment en cas d'arrivée d'eau intempestive et n'avait pas respecté les DTU 20.1 et 14.1. lors de la réalisation du sous-sol, critiquant également la constitution des remblais de fouilles et la mise en oeuvre de parpaings creux au lieu de parpaings pleins en sous-sol.
Par ailleurs, M. [K] a également retenu la responsabilité de l'entreprise générale tant dans sa mission de maîtrise d'oeuvre que dans celle de réalisation tous corps d'état (TCE) estimant qu'eu égard à la position de la maison, de la nature du terrain, elle aurait dû mettre en place un drain, une membrane d'étanchéité le long des murs enterrés et boucher efficacement les trous dans les murs afin d'éviter les infiltrations dans le vide sanitaire.
Si aucun contrat de maîtrise d'oeuvre n'a été signé entre la société EGMA et les maîtres de l'ouvrage, la première s'est bien comportée comme un maître d'oeuvre, ceci résultant parfaitement des procès-verbaux de réception et de levée des réserves signés par M. [N], gérant de la société EGMA, en qualité de maître d'oeuvre, et du marché de travaux TCE.
La société EGMA ne conteste pas, dans ses écritures, les défauts de conception et d'exécution ainsi constatés.
En ce qui concerne M. [P], il n'est pas contestable que celui-ci n'a pas mis en oeuvre les préconisations du Bafu reportées sur les plans de l'architecte. Il n'a pas davantage réclamé de rapport géotechnique notamment pour la construction du puits.
Il ne saurait se retrancher derrière l'impossibilité de réaliser l'épandage du fait de la construction de la terrasse alors qu'il n'est pas contredit que lors de son intervention initiale pour la mise en place des deux cuves en mars et avril 2008, celle-ci n'était pas encore édifiée.
Aucun élément au dossier ne vient étayer la version de M. [P] selon laquelle il n'aurait eu le choix que de réaliser un puits perdu en remplacement de l'épandage, étant précisé que sa facture du 9 avril 2008 portait sur la mise en place de deux fosses de 2 000 litres avec raccordement et création d'épandage ou puits perdu pour évacuation des excédents.
D'autres défauts d'exécution dans la réalisation des travaux ont été relevés engageant la responsabilité de M. [P] : absence de protection périphérique et d'assainissement notamment de drainage, choix du tuyau en PVC prévu pour être posé à l'intérieur du bâtiment présentant une résistance insuffisante, cuve de stockage des eaux pluviales préfabriquée fendue dans un angle intérieur, puits d'infiltration d'un volume trop faible.
Enfin, de leur côté, les maîtres de l'ouvrage contestent les conclusions de l'expert les concernant estimant que celui-ci ne rapporte pas la preuve du branchement d'une vidange hivernale de la piscine.
Il résulte des conclusions de la société EGMA, qui a également été chargée de la maçonnerie de la piscine, que le raccordement de celle-ci n'avait pas été mis en place en juillet 2009 ce qui exclut la vidange des eaux de la piscine comme cause des infitrations survenues en 2008 et 2009 mais ne permet pas de l'écarter pour celles survenues en 2012.
Comme l'ont relevé, à juste titre, les premiers juges, l'expert judiciaire a pu vérifier en page 33 de son rapport l'exutoire de la vidange de la piscine et la présence d'une pompe de vidange débitant 20m3/heure tandis que la capacité de la piscine est de 45 m3 et que le puits a une capacité d'absoption de 0,50 m3/heure.
Par ailleurs, si les maîtres de l'ouvrage ont pu contester que soit laissée à leur charge une part de responsabilité de 10% du fait de la vidange de la piscine sur les canalisations intérieures du réseau d'eaux pluviales, ils n'ont jamais contesté ni au cours des opérations d'expertise ni au travers de leurs dires, avoir vidangé leur piscine sur ledit réseau à partir de fin 2009.
C'est donc de manière parfaitement justifiée que les premiers juges ont tenu pour acquises les observations de M. [A] sur la participation partielle de cette vidange aux désordres constatés par ce dernier du moins pour ceux de 2012.
Si la vidange de la piscine a pu aggraver le phénomène d'infiltrations, il n'est nullement établi que celle-ci aurait engendré des dommages spécifiques et distincts de ceux générés par les autres causes imputables aux constructeurs de sorte que l'absence d'usage de la pompe ne nécessitant aucuns travaux particuliers, les premiers juges ont estimé à bon droit que les maîtres de l'ouvrage ne devaient supporter aucun travaux de réparation des dommages mais une minoration de l'indemnisation du trouble de jouissance à hauteur de la part justement évaluée par l'expert à 10%.
A hauteur de cour, les consorts [C]-[T], appelants incidents, demandent la condamnation in solidum de la société EGMA et de M. [P] à leur payer notamment le coût des travaux de reprise.
Dès lors que les manquements de la société EGMA et de M. [P] ont contribué au même dommage, ils doivent être condamnés in solidum à le réparer. Le jugement dont appel doit donc être réformé sur ce point, étant précisé que les premiers juges n'étaient pas saisis d'une demande de condamnation in solidum des constructeurs.
En ce qui concerne la répartition de la responsabilité entre les constructeurs, l'expert a retenu une part de 50% pour la société EGMA et de 40% pour M. [P].
La responsabilité des maîtres de l'ouvrage étant écartée en ce qui concerne la reprise des désordres, en tenant compte des manquements respectifs des constructeurs et du fait qu'investie d'un marché de travaux tous corps d'état, la société EGMA aurait dû s'inquiéter de la mise en place de drains périphériques, la cour confirme la répartition retenue par les premiers juges, soit 55% pour la société EGMA et 45% pour M. [P].
3) Sur la garantie des assureurs des contructeurs
La cour observe que la demande de condamnation des consorts [C]-[T] dirigée à l'encontre des assureurs de l'architecte et des constructeurs n'est formée qu'à titre subsidiaire dans l'hypothèse où la cour aurait retenu que le désordre était de nature décennale, ce qui n'est pas le cas.
La demande de condamnation en garantie formée par la société EGMA à l'encontre de son assureur SMA ne peut être qu'écartée au regard de l'exclusion d'un désordre de nature décennal, étant précisé que la limitation de la garantie de la SMA aux seuls désordres de nature décennale n'est pas discutée.
Le jugement déféré est donc confirmé sur ce dernier point.
IV/ Sur l'indemnisation des travaux de reprise
Les maîtres de l'ouvrage demandent l'indemnisation de leurs préjudices comme suit :
- 113 699,47 euros TTC au titre des travaux de remise en état,
- 33 000 euros au titre du préjudice de jouissance,
- 10 000 euros en réparation de leur préjudice moral, soit chacun 5 000 euros.
Le montant des travaux de remise en état, tel que fixé par les premiers juges, n'est pas débattu de sorte que le jugement déféré est confirmé sur ce point, dont à déduire les provisions accordées par ordonnance du 2 décembre 2019.
Les consorts [C]-[T] font valoir, au titre du préjudice qualifié d''économique' de jouissance que, depuis 2009, ils sont privés d'une installation en bon état de fonctionnement et victimes d'inondations à répétition, trouble aggravé par les opérations d'expertise nécessaires pour y remédier, les entreprises intervenues ayant dévasté leur jardin à l'aide de pelles mécaniques au printemps et à l'été 2017.
Ils ajoutent qu'ils n'ont pas pu utiliser leur piscine.
Ils ont calculé leur préjudice de jouissance comme suit estimant que le trouble occasionné par les inondations à répétition pouvait être au minimum estimé à 10% de la valeur locative (arrêtée à 2 200 euros) compte tenu de la surface en cause, pondérée par le fait qu'il ne s'agit pas stricto sensu d'une partie destinée à être habitée : 220 x 150 mois = 33 000 euros.
Dans son rapport, M. [A] a évalué le préjudice de jouissance subi par les maîtres de l'ouvrage à une somme totale de 4 240 euros sur la base de 40 euros par mois sur 106 mois, somme à laquelle les constructeurs souhaitent voir minorer ce préjudice.
Tel que l'ont fait justement observer les premiers juges, en l'absence de perte de revenus générée par ce trouble, le préjudice invoqué ne peut être qualifié d'économique.
Il n'est pas contesté que les maîtres de l'ouvrage ont subi un trouble de jouissance consistant en la privation de leur sous-sol régulièrement inondé.
Toutefois, il est certain que ce sous-sol n'était pas destiné, au terme du permis de construire, à servir de pièces d'habitation.
Par ailleurs, les dégradations inhérentes aux opérations d'expertise afin de déterminer les causes du désordre et de trouver une solution ne sont pas imputables aux constructeurs.
Enfin, il a été retenu une part de responsabilité des maîtres d'ouvrage dans leur trouble de jouissance puisque par leur comportement (vidange de la piscine) ils ont aggravé leur préjudice.
En conséquence c'est par une parfaite appréciation de la situation que les premiers juges, tenant compte de ces éléments mais également de la nature et la durée du préjudice de jouissance, l'ont justement évalué à une somme de 8 000 euros.
Si le préjudice de jouissance ne peut être confondu avec un préjudice moral, la cour observe que les consorts [C]-[T] ne démontrent pas l'anxiété qu'aurait pu générer pour eux cette procédure.
En conséquence, le jugement déféré est confirmé en qu'il les a déboutés de ce chef de demande.
V/ Sur les demandes accessoires
Le jugement déféré est confirmé sur les dépens et les frais non compris dans les dépens.
La société EGMA, appelante principale, et M. [P], appelant incident, succombants, doivent être condamnés in solidum aux dépens d'appel.
A hauteur de cour, les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a :
- condamné la société EGMA à payer à M. [C] et à Mme [T] :
* la somme de 62 534,71 euros au titre de la réparation des dommages,
* la somme de 4 400 euros au titre de l'indemnisation du préjudice de jouissance,
- condamné M. [P] à payer à M. [C] et à Mme [T] :
* la somme de 51 164,76 euros au titre de la réparation des dommages,
* la somme de 3 600 euros au titre de l'indemnisation du préjudice de jouissance,
Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,
Condamne in solidum la Sarlu EGMA et M. [B] [P] à payer à M. [R] [C] et Mme [J] [T] les sommes suivantes, dont il convient de déduire les provisions allouées dans l'ordonnance du 2 décembre 2019 :
- 113 699,47 euros TTC au titre des travaux de remise en état,
- 8 000,00 euros au titre du préjudice de jouissance,
Dit que dans les rapports entre eux, la société EGMA et M. [B] [P] contribueront aux sommes ci-dessus à hauteur de 55 % pour la première et de 45 % pour le second,
Condamne in solidum la Sasu EGMA et M. [B] [P] aux dépens d'appel, dont la charge définitive sera ventilée à hauteur de 55% pour la Sasu EGMA et 45 % pour M. [B] [P],
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.