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Décisions

CA Saint-Denis de la Réunion, ch. com., 16 avril 2025, n° 22/01204

SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Les Orangines (SCI)

Défendeur :

Société de transport par autocar et tourisme Océan Indien - Start OI (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Leger

Vice-président :

Mme Legrois

Conseiller :

Mme Beraud

Avocats :

Me Zair, SELARL Alquier & Associés, Me Simon Lebon

TJ Saint-Denis, du 28 juin 2022, n° 19/0…

28 juin 2022

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Suivant acte sous seing privé en date du 30 septembre 2010, la SCI Les orangines a donné à bail commercial à la société Transports [M] un local situé [Adresse 1] à [Localité 3] moyennant un loyer de 5 000 euros.

Par jugement du 29 février 2012, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis a prononcé la liquidation judiciaire de la locataire et a ordonné la cession des éléments de son actif, en ce compris les baux commerciaux, au profit de la SAS Matis ou de toute autre société en formation s'y substituant.

Par acte du 8 février 2013, l'entreprise a finalement été cédée par la société Transports [M] à la SAS Société de transport par autocar de la Réunion et tourisme de l'Océan Indien (ci-après dénommée Start OI) par l'effet de la faculté de substitution prévue par le jugement du tribunal mixte de commerce, en ce compris la reprise du bail commercial du 30 septembre 2010.

Par acte d'huissier délivré le 10 mai 2019, la SCI Les orangines a fait délivrer à la société Start OI un commandement de payer la somme de 35 738,02 euros au titre des loyers et taxes foncières impayées, ledit commandement visant la clause résolutoire. Dans le même acte, elle lui a fait sommation de justifier de la souscription d'une assurance contre les risques locatifs dans un délai d'un mois.

Par assignation du 4 juin 2019, la société Start OI a fait citer la SCI Les orangines à comparaître devant le juge de l'exécution aux fins que ce dernier sursoit à statuer sur la demande de nullité du commandement de payer au motif que la requérante avait entendu saisir parallèlement le tribunal de grande instance de Saint-Denis de contestations sur le fond relative à l'interprétation des stipulations contractuelles sur la charge des impôts fonciers.

Par jugement du 10 octobre 2019, le juge de l'exécution a constaté, au visa de l'article L.213-6 du code de l'organisation judiciaire, qu'il n'était saisi d'aucune difficulté relative à un titre exécutoire ni d'aucune demande entrant dans son champ de compétence. Il s'est donc déclaré incompétent et a dit n'y avoir lieu à surseoir à statuer.

Par assignation du 4 juin 2019, la société Start OI a cité la SCI Les orangines à comparaître devant le tribunal de grande instance devenu tribunal judiciaire aux fins de contester le montant de l'arriéré de loyers et charges visé par le commandement de payer du 10 mai 2019.

Par jugement contradictoire du 28 juin 2022, le tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion a :

- déclaré le bail opposable à la SCI Les orangines,

- jugé que la SCI Les orangines est fondée à solliciter l'indexation annuelle du loyer à compter du 1er octobre de chaque année sur la base de l'indice du coût de la construction,

- jugé qu'à défaut d'accord et de dispositions expresses dans le bail, la SCI Les orangines n'est pas fondée à réclamer paiement de la taxe foncière,

- débouté la société Start OI de sa demande en annulation du commandement de payer visant la clause résolutoire valable pour la somme de 9 223,02 euros à la date de son émission le 10 mai 2019,

- constaté l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire du bail à effet du 10 juin 2019,

- suspendu les effets de la clause résolutoire et autorisé la société Start OI à se libérer de sa dette de 9 223,02 euros en sus des loyers courants indexation comprise dans un délai de quatre mois suivant la date de signification du présent jugement,

- dit que si la société Start OI est à jour de sa dette de loyer et des loyers courants dans un délai de quatre mois suivant le jour de la signification du présent jugement, la clause résolutoire sera réputée ne jamais avoir joué et que le bail reprendra son plein effet,

- dit qu'à défaut de ce faire, et uniquement dans cette hypothèse : la clause résolutoire reprendra son plein effet à compter du 10 juin 2019 et la société Start OI sera condamnée à payer à la SCI Les orangines une indemnité d'occupation égale à 20 % du loyer qui aurait été dû, indexation comprise et cela à compter du 10 juin 2019 et jusqu'à son départ effectif des lieux et remise des clefs,

- ordonné en tant que de besoin et à défaut de départ volontaire, l'expulsion de la société Start OI et de tous occupants de son chef des locaux loués, y compris avec le concours de la force publique en cas de nécessité,

- débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la société Start OI à payer à la SCI Les orangines la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Start OI aux entiers dépens de l'instance.

Le premier juge a retenu que :

- la cession initiale était opposable à la SCI car les cocontractants ont été dûment appelés à l'audience de cession, le jugement a été régulièrement notifié et publié, la faculté de substitution était expressément prévue dans ce jugement, et elle a ensuite perçu des loyers de la part de la société Start OI pendant plusieurs années, lui a adressé des avis d'échéances, avant de lui délivrer un commandement visant la clause résolutoire se référant au bail ; elle ne peut donc à la fois soutenir qu'elle ne serait liée par aucun bail tout en se prévalant par ailleurs du bail et des paiements de son locataire,

- l'article L.145-41 du code de commerce ne prévoit pas à peine de nullité que la clause résolutoire soit reproduite in extenso dans le commandement de payer la visant et la copie du bail sur lequel elle est mentionnée y a été jointe ; cet acte, qui comprend donc les éléments permettant au locataire d'être informé de ce qui lui est réclamé, est valable,

- la clause d'indexation du loyer est claire et doit être appliquée,

- l'article 4 du contrat de bail prévoit un traitement particulier s'agissant de la taxe foncière par rapport aux autres contributions et charges en subordonnant leur remboursement par le preneur au bailleur à un accord entre les parties dont la SCI ne justifie pas,

- la bailleresse étant fondée à solliciter l'indexation du loyer et le commandement de payer n'étant pas nul, la clause résolutoire est acquise depuis le 10 juin 2019,

- compte tenu de la différence manifeste entre le montant restant à devoir et le montant initialement réclamé et eu égard aux conséquences importantes d'une résiliation du bail il y a lieu d'en suspendre les effets et d'accorder un délai de 4 mois à compter de la signification de la présente décision à la locataire pour s'acquitter de sa dette durant lesquels les effets de la clause seront suspendus et à l'issue duquel, elle sera réputée ne jamais avoir jouée si la situation est régularisée et elle sera acquise, des indemnités d'occupation seront dues et l'expulsion ordonnée à défaut du strict respect de l'échéancier,

- l'indemnité d'occupation sera fixée à un montant égal à celui qui aurait été dû en cas de poursuite du bail majoré de 20 %, la majoration du loyer en cas de renouvellement d'un bail commercial n'étant pas acquise.

Par déclaration du 16 août 2022, la SCI Les orangines a interjeté appel de cette décision. La procédure a été orientée devant la chambre civile de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion.

Par ordonnance du 17 août 2022 l'affaire a été renvoyée à la mise en état.

L'appelante a notifié ses conclusions par voie électronique le 14 novembre 2022 et l'intimée le 3 février 2023 laquelle a formé appel incident.

Par message RPVA du 23 février 2022, le conseiller de la mise en état a invité les parties à s'exprimer sur la proposition de médiation qui leur était faite dans la suite du message. L'intimée a indiqué ne pas être opposée à cette proposition tout en émettant des réserves au regard des nombreuses tentatives de règlement amiable du litige ayant déjà échoué. L'appelante n'a pas donné suite à la proposition.

Par ordonnance du 14 septembre 2023, la procédure a été clôturée et les avocats ont été autorisés, à leur demande, à déposer leur dossier le 26 janvier 2024 au plus tard au greffe de la cour d'appel.

Par déclaration transmise par voie électronique le 30 janvier 2024 Maître Richard a indiqué se constituer en lieu et place de Maître Zair pour l'appelante.

Par arrêt du 26 avril 2024 la cour d'appel a ordonné la réouverture des débats, la révocation de l'ordonnance de clôture et renvoyé la procédure à l'audience de mise en état du 12 septembre 2024 afin de permettre à l'avocat de l'appelante qui avait rencontré des difficultés personnelles au cours de l'instruction puis avait été substitué par un autre conseil, de conclure.

Par avis du 12 septembre 2024 la procédure a été clôturée et, par mention portée au rôle d'audience du 14 novembre 2024, renvoyée à l'audience de mise en état de la chambre commerciale du 16 décembre 2024, Maître Zair intervenant à nouveau pour l'appelante.

Par ordonnance de la conseillère chargée de la mise en état devant la chambre commerciale rendue le 16 décembre 2024, la procédure a été à nouveau clôturée et renvoyée pour être plaidée à l'audience du 5 février 2025 à l'issue de laquelle la décision a été mise en délibéré au 26 mars 2025, prorogé au 16 avril 2025.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS

Par conclusions récapitulatives n°1 notifiées par voie électronique le 11 septembre 2024, la SCI Les orangines demande à la cour de :

- dire l'appel recevable et bien-fondé,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

affirmé la validité du commandement de payer au motif qu'aucune irrégularité n'a été démontrée par le preneur,

jugé que la clause d'indexation du loyer était claire et n'avait pas à être interprétée et qu'elle autorisait une indexation annuelle du loyer commercial,

constaté l'acquisition de la clause résolutoire,

ordonné l'expulsion de la société Start OI et de tout occupant de son chef,

condamné la société Start OI au entiers dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles

- infirmer le jugement du 28 juin 2022 en ce qu'il a ;

jugé que la cession du fonds de commerce lui était opposable nonobstant l'absence de signification de la cession et d'autorisation du bailleur comme exigé dans le bail commercial, jugé qu'à défaut d'accord et de dispositions expresses dans le bail, elle n'est pas fondée à réclamer paiement de la taxe foncière,

suspendu les effets de la clause résolutoire et autorisé la société Start OI à se libérer de sa dette de 9223,02 euros en sus des loyers courants indexation comprise dans un délai de quatre mois suivant la date de signification du présent jugement,

dit que si la société Start OI est à jour de sa dette de loyer et des loyers courants dans un délai de quatre mois suivant le jour de la signification du présent jugement, la clause résolutoire sera réputée ne jamais avoir joué et que le bail reprendra son plein effet,

dit qu'à défaut de ce faire, et uniquement dans cette hypothèse :

la clause résolutoire reprendra son plein effet à compter du 10 juin 2019,

la société Start OI sera condamnée à lui payer une indemnité d'occupation égale à 20 % du loyer qui aurait été dû indexation comprise et cela à compter du 10 juin 2019 et jusqu'à son départ effectif des lieux et remise des clefs,

ordonné l'expulsion de la société Start OI et de tout occupants de son chef des locaux loués, y compris avec le concours de la force publique en cas de nécessité,

Statuant à nouveau,

A titre principal,

Sur l'inopposabilité de la cession du fonds de commerce

- dire et juger que la cession du fonds de commerce lui est inopposable faute de notification de la cession au bailleur et d'autorisation de ce dernier,

- dire et juger que le fait d'avoir traité la société Start OI comme l'occupant des lieux, ne peut être considéré comme une renonciation expresse au droit de dénoncer cette occupation illégale, - dire et juger que la société Start OI doit être regardée comme un occupant sans droit ni titre,

En conséquence,

- ordonner l'expulsion de la société Start OI, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir.

- condamner la société Start OI aux entiers dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 10000 euros au titre des frais irrépétibles.

A titre subsidiaire

Sur la demande de rappel de taxe foncières

- dire et juger que l'article 4 impose le paiement de la taxe foncière au preneur sans qu'il soit besoin d'un nouvel accord de volonté et qu'en tout état de cause la reconnaissance par le preneur de l'exigibilité de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères vaut reconnaissance de l'exigibilité de la taxe foncière compte tenu de leur indivisibilité,

En conséquence,

- condamner la société Start OI à payer une somme de 50 715 euros au titre d'un rappel de taxes foncières pour les années 2016 à 2022,

A titre subsidiaire,

- Si la cour estimait que seule la Taxe d'Enlèvement des Ordures Ménagères (TEOM) est due, elle devra condamner le preneur au paiement d'une somme de 19 339 euros au titre des années 2016 à 2022,

- Ces sommes devront porter intérêt au taux légal à compter de la demande en justice, avec capitalisation annuelle des intérêts échus,

Sur la demande de résolution du bail commercial et l'indemnité d'occupation A titre principal,

- dire et juger n'y avoir lieu à délai de grâce compte tenu de la mauvaise foi du preneur et de l'inexécution de l'obligation d'assurer le local commercial,

- dire et juger que la société Start OI n'a pas payé le rappel de loyers et effectué l'indexation requise dans le délai fixé par le premier juge au titre de la suspension des effets de la clause résolutoire,

- dire et juger que la société Start OI reste devoir l'indexation sur les loyers commerciaux depuis le 1 er octobre 2017 jusqu'au 10 juin 2019,

- fixer le montant de l'indemnité d'occupation mensuelle à 15 000 euros due depuis le 11 juin 2019 et jusqu'au départ effectif des lieux, outre la taxe foncière ou la TEOM selon ce qui aura été décidé par la Cour d'Appel et ce jusqu'à son départ effectif, sauf à ordonner une expertise sur la valeur locative si la Cour d'Appel ne s'estime pas suffisamment éclaire sur celle-ci,

En conséquence,

- débouter la société Start OI de sa demande de suspension des effets de la clause résolutoire et ordonner l'expulsion de la société Start OI et tout occupant de son chef, sous astreinte de 1000 par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- condamner la société Start OI au paiement d'un arriéré d'indemnités d'occupation de 557402,70 euros, situation arrêtée au 30 octobre 2022 et à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir,

- condamner la société Start OI à payer, en sus de l'indemnité d'occupation, la taxe foncière ou la TEOM selon ce qui aura été décidé par la Cour d'Appel et ce jusqu'à son départ effectif,

Ces sommes devront porter intérêt au taux légal à compter de la demande en justice, avec capitalisation annuelle des intérêts échus,

A titre subsidiaire,

Sur la demande de résiliation du bail commercial pour fautes

- dire et juger que la société Start OI a commis au moins quatre fautes contractuelles consistant à ne pas avoir payé le loyer commercial indexé et les taxes foncières et à refuser toute indexation du loyer commercial, à ne pas avoir justifié de l'assurance obligatoire pour l'activité qu'elle exerce dans les locaux donnés à bail et à ne pas s'être mise en conformité en ce qui concerne la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement et à utiliser les lieux en violation des stipulations contractuelles et au détriment du bailleur,

En conséquence,

- prononcer la résiliation du bail commercial aux torts du preneur,

- ordonner l'expulsion de la société Start OI et tout occupant de son chef, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- condamner la société Start OI à payer le rappel de loyers indexés depuis le mois d'octobre 2017 jusqu'au mois d'octobre 2022, soit la somme de 42 599,94 euros (9 223,02 euros pour la période allant d'octobre 2017 à mars 2019 plus 33 376,92 euros pour la période d'avril 2019 à octobre 2022 selon décompte du preneur) et pour la période postérieure et ce jusqu'au prononcé de la résiliation,

- fixer le montant de l'indemnité d'occupation due à compter de la résiliation du bail commercial à 15000 euros mensuels à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et jusqu'au départ effectif des lieux,

- condamner la société Start OI à payer, en sus de l'indemnité d'occupation de 15 000 euros, la taxe foncière ou la TEOM selon ce qui aura été décidé par la Cour d'Appel et ce jusqu'à son départ effectif,

Ces sommes devront porter intérêt au taux légal à compter de la demande en justice, avec capitalisation annuelle des intérêts échus,

A titre infiniment subsidiaire,

- dire et juger que les loyers doivent être indexés selon la clause contractuelle, - condamner la société Start OI à payer un rappel de loyers indexés depuis le mois d'octobre 2017 jusqu'au mois d'octobre 2022, soit la somme de 42 599,94 euros, somme à parfaire pour la période postérieure jusqu'à la date du prononcé de l'arrêt à intervenir et sous déduction des sommes payées postérieurement au jugement du 28 juin 2022,

Ces sommes devront porter intérêt au taux légal à compter de la demande en justice, avec capitalisation annuelle des intérêts échus,

En tout état de cause,

- condamner la société Start OI aux entiers dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 10.000 euros.

L'appelante fait valoir que :

- la cession ne lui est par opposable car, d'une part, son agrément n'a pas été recueilli et obtenu lors de la cession du droit au bail, d'autre part, si l'offre d'achat du fonds de commerce comportait bien une faculté de substitution, elle ne précisait pas l'identité du bénéficiaire, indication indispensable pour que le tribunal puisse s'assurer que le cessionnaire substitué n'est pas au nombre de ceux que la loi interdit, enfin, il ne peut être considéré que le fait qu'elle ait traité la société Start OI comme son locataire l'empêche de prétendre à l'inopposabilité de l'acte de cession du fonds de commerce car pour valoir reconnaissance du droit d'autrui une acceptation tacite doit être claire et non-équivoque et une simple tolérance ne vaut pas renonciation tacite à un droit, or elle était dans l'ignorance des éventuels accords passés entre la société Matis et l'intimée et a toujours considéré que la première était sa co-contractante,

- la locataire est tenue de lui verser le rappel de taxe foncière dans la mesure où d'une part, l'article 4 du bail prévoit que cette taxe est à la charge du preneur et d'autre part elle a reconnu être débitrice de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) qui est indivisiblement liée à la taxe foncière, en reconnaissant devoir la TEOM, elle a nécessairement reconnu l'être de la taxe foncière,

- le commandement de payer n'est entaché d'aucune nullité car d'une part les moyens invoqués par l'intimée à ce titre sont des moyens de pure forme et, d'autre part car il n'est pas prescrit que la clause résolutoire soit reproduite dès lors que le bail commercial qui la contient est joint à l'acte pour qu'il soit valable, ce qui est le cas en l'espèce, car les obligations méconnues par le locataire sont clairement spécifiées, car une erreur dans le quantum de la créance ne remet pas en cause sa validité ;

- la clause de révision du loyer ne souffre d'aucune ambiguïté en ce qu'elle autorise une indexation annuelle du loyer commercial, elle offre seulement aux parties d'opter pour une révision annuelle ou triennale,

- faute d'avoir payé les causes du commandement de payer, la clause résolutoire a joué son effet extinctif et le bail a été résolu un mois après la signification de ce commandement,

- la faute de la société locataire qui n'a pas transmis un justificatif d'assurance conforme et fait preuve de mauvaise foi contractuelle en contestant la validité du commandement de payer et de la clause d'indexation des loyers en persistant à ne pas respecter le contrat de bail depuis cinq ans, exclut qu'elle puisse bénéficier de délais de paiement suspendant les effets de la clause résolutoire,

- l'intimée n'a pas respecté le délai fixé par le premier juge pour apurer sa dette et doit être expulsée,

- l'indemnité d'occupation à laquelle elle est tenue depuis le 10 juin 2019, date depuis laquelle la clause résolutoire est acquise doit être évaluée à la somme de 15 000 euros sur la base du rapport d'expertise privé qu'elle a fait réaliser,

- la locataire a commis quatre fautes graves qui justifient la résiliation du bail en refusant l'indexation du loyer commercial au mépris des stipulations du bail, en refusant de fournir une attestation d'assurance et en souscrivant une assurance non conforme à son activité réelle, en n'informant pas l'administration du changement d'exploitant alors qu'elle qu'elle exerce une activité classée au titre des installations pour la protection de l'environnement soumise à déclaration, en envoyant les déchets engendrés par le lavage de ses autobus réalisé sur la parcelle voisine, sur la parcelle objet du bail litigieux.

Par conclusions d'intimée et d'appel incident n°1 notifiées par voie électronique le 3 février 2023 la SAS Start OI demande à la cour d'infirmer le jugement critiqué en ce qu'il a :

- jugé que la SCI Les orangines est fondée à solliciter l'indexation annuelle du loyer à compter du 1er octobre de chaque année sur la base de l'indice du coût de la construction,

- l'a débouté de sa demande en annulation du commandement de payer visant la clause résolutoire valable pour la somme de 9223,02 euros à la date de son émission le 10 mai 2019, - constaté l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire du bail à effet du 10 juin 2019,

- ordonné en tant que de besoin et à défaut de départ volontaire, son expulsion et de tout occupants de son chef des locaux loués, y compris avec le concours de la force publique en cas de nécessité,

- l'a condamnée à payer à la SCI Les orangines la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamnée aux entiers dépens de l'instance.

Et, statuant à nouveau :

- annuler le commandement de payer visant la clause résolutoire valable pour la somme de 9223,02 euros à la date de son émission le 10 mai 2019 ;

- juger que les dispositions contractuelles prévoient une révision légale triennale et non l'application d'une clause d'échelle mobile ;

- juger que le loyer commercial ne peut être indexé en l'état des dispositions contractuelles ;

- juger que le paiement de l'impôt foncier ne peut être sollicité en l'absence d'accord préalable de sa part et de communication des justificatifs afférents; - juger qu'elle a satisfait à l'obligation de production de son attestation d'assurance ;

En conséquence,

- débouter la SCI Les orangines de sa demande de résiliation judiciaire du bail;

A titre subsidiaire :

- confirmer le jugement (RG n° 19/01971) rendu le 28 juin 2022 par le Tribunal judiciaire de Saint-Denis en ce qu'il a :

jugé qu'à défaut d'accord et de dispositions expresses dans le bail, la SCI Les orangines n'est pas fondée à réclamer paiement de la taxe foncière,

suspendu les effets de la clause résolutoire et l'a autorisée à se libérer de sa dette de 9223,02 euros en sus des loyers courants indexation comprise dans un délai de quatre mois suivant la date de signification du présent jugement, dit que si elle est à jour de sa dette de loyer et des loyers courants dans un délai de quatre mois suivant le jour de la signification du présent jugement, la clause résolutoire sera réputée ne jamais avoir joué et que le bail reprendra son plein effet. »

En tout état de cause :

- condamner société SCI Les orangines à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner société SCI Les orangines aux dépens.

L'intimée fait valoir que :

- elle a qualité et intérêt à agir car la cession du droit au bail par la société Matis à son égard est opposable à l'appelante, dans la mesure où le co-gérant de la société Transports [M] étant également celui de la SCI, il était présent à l'audience, la décision prise par le tribunal mixte de commerce lui a été notifiée et la SCI n'a introduit aucun recours à son encontre, au contraire elle lui a fait délivrer le commandement de payer directement,

- cet acte est nul car il ne vise pas les termes de la clause résolutoire et, ne le renseignant pas sur la nature et le montant exact des sommes à payer, il n'est pas de nature à lui permettre de satisfaire aux demandes de la bailleresse,

- la SCI ne démontre pas que le contrat de bail ait prévu une indexation du loyer dans la mesure où la clause qu'elle invoque s'intitule clause de révision et correspond en réalité d'une volonté de révision légale dont elle n'a pas respecté les formes, ainsi elle n'a pas entendu faire application de cette clause au cours du bail alors qu'une révision annuelle y est prévue, n'a pas prévu d'indice permettant de calculer une éventuelle indexation du loyer et elle ne lui a fait aucune proposition qu'il aurait pu accepter, condition nécessaire à l'application d'une révision légale qui ne peut être régularisée rétroactivement,

- les montants sollicités par la SCI ne sont pas ceux qui ont été visés dans le commandement de payer, alors que la valeur de l'indice de référence n'est pas précisée au contrat de bail et que celle retenue pour le loyer de fin 2018 est inconnue, au regard de ces doutes, seul le loyer visé par le bail est dû,

- le contrat de bail subordonne le remboursement de la taxe foncière à un accord entre les parties, qu'elle n'a jamais donné ; en outre, la SCI ne justifie pas des montants sollicités à ce titre ; enfin, cette taxe a été appelée deux fois pour l'année 2016 dans le décompte produit,

- elle a transmis une attestation d'assurance qui est conforme à l'activité de dépôt de véhicule qu'elle exerce dans les locaux loués,

- la bailleresse a fait preuve de mauvaise foi en lui délivrant un commandement de payer exigeant une somme conséquente alors qu'elle a toujours réglé ses loyers et qu'elle n'a commis aucun manquement, dès lors la clause résolutoire ne peut être considérée comme acquise,

- si cela était le cas, elle est fondée à demander l'octroi de délais de paiement suspendant ladite clause dans la mesure où elle a toujours payé ses loyers,

- faute de preuve de ce que le terrain loué à pris de la valeur, l'indemnité d'occupation ne saurait dépasser le montant du loyer.

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La cour d'appel rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine les moyens développés au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la partie discussion des conclusions.

Elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « donner acte», de « constater » ou de « dire et juger » lorsqu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, le rappel des moyens invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions.

En conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci.

Sur l'opposabilité de la cession du droit au bail

En droit, l'article L.145-16 du code de commerce édicte le principe du droit de céder le bail avec le fonds de commerce. En cas de cession d'entreprise à un tiers dans le cadre d'une liquidation judiciaire, les clauses réglementant la circulation du bail, comme les clauses d'agrément, sont valables mais inefficaces.

En l'espèce, l'appelante ne remet pas en cause l'opposabilité à son égard de la cession du droit au bail résultant du jugement d'adoption du plan de cession du 29 février 2012, affirmant que le preneur originel était la société Transport [M] puis que la société Matis est devenue officiellement le nouveau locataire commercial.

Elle excipe cependant d'une clause d'agrément qui aurait conditionné l'opposabilité à son égard de la cession du droit au bail par la société Matis à la société Start OI sans en préciser les termes.

La cession a porté sur les éléments d'actifs de la société Transport [M] dans le cadre du plan de cession de cette entreprise, homologué par le tribunal mixte de commerce le 29 février 2012 puis concrétisé par l'acte de cession signé le 8 février 2013, et non sur celle du seul fonds de commerce qui aurait relevé de l'autorisation du juge-commissaire, comme cela a été le cas dans l'arrêt de la cour de cassation cité par l'intimée.

La clause visée par cette dernière, qu'elle analyse comme étant une clause d'agrément, est, dans ce cas, valable mais inefficace. En effet, dans le cadre de la cession de l'entreprise, le bail commercial constituant un contrat nécessaire au maintien de l'activité de l'intimée, elle ne saurait être dépendante de l'accord de la bailleresse sous peine de compromettre la réussite du plan. C'était bien le cas en l'espèce et la propriétaire n'est dès lors pas fondée à invoquer l'absence d'agrément du nouveau locataire.

Le jugement d'adoption du plan de cession prévoit expressément une possibilité de substitution de la société Matis par toute autre société sans poser de condition particulière. L'appelante ne peut en ajouter une a posteriori en considérant que l'identité du bénéficiaire de la substitution devait être indiquée dans ce jugement. La société Start OI a donc acquis les éléments d'actifs de la société Transports Soupryenmestry, en ceux compris le droit au bail sur le bien appartenant à la SCI.

Dès lors, la cession du bail est opposable à l'appelante sans qu'elle ne puisse invoquer l'absence d'agrément de l'intimée comme nouvelle locataire ou qu'il n'ait été nécessaire que cette dernière soit nommément désignée par le jugement ordonnant la cession des éléments d'actifs de l'entreprise.

Le jugement critiqué sera confirmé en ce qu'il a déclaré le bail opposable à la SCI Les orangines. De fait, l'intimée n'est pas occupante sans droit ni titre du bien loué et son expulsion ne sera pas ordonnée à ce titre.

Sur la demande de résolution du contrat

Au soutien de sa demande de résolution du contrat, l'appelante excipe de l'existence d'un impayé afférent à l'indexation du loyer et au paiement des taxes foncière et d'enlèvement des ordures ménagères, outre le non-respect par l'intimée de produire une attestation d'assurance conforme.

Sur l'indexation du loyer

L'article 3 des conditions générales du bail intitulé « Révision », prévoit que le bailleur et le preneur peuvent opter pour l'un ou l'autre des deux régimes suivants :

Révision triennale : les parties conviennent de réviser le loyer tous les trois ans, à la date « d'anniversaire de prise d'effet du bail. La révision n'intervient qu'à la demande expresse de l'une ou l'autre des parties par acte extrajudiciaire ou lettre RAR (')

ou révision annuelle : les parties conviennent d'indexer automatiquement le loyer tous les ans, à la date anniversaire de la prise d'effet du contrat.

La révision est calculée en fonction des variations de l'indice Insee du coût de la construction sur quatre trimestres ».

Les conditions particulières du contrat de bail stipulent, quant à elles, dans un paragraphe intitulé « révision du loyer » que : « la révision du loyer s'effectuera à la date anniversaire du bail par indexation automatique en fonction des variations de l'indice Insee du coût de la construction. Indice de base') ».

Les parties ont donc, lors de la conclusion du bail, fait le choix commun d'opter pour que s'applique une indexation automatique annuelle par indexation sur l'indice Insee du coût de la construction du trimestre précédent sans qu'il ne soit besoin d'un acte extra-judiciaire. La clause est dépourvue d'ambiguïté et le mode de calcul est clair.

De plus, les pièces produites établissent que le loyer initial fixé à 5 000 euros s'élevait à 5 395,52 euros en septembre 2017 ce qui induit que, contrairement à ce qu'affirme l'intimée, une indexation a été appliquée antérieurement. Si la propriétaire n'a pas soulevé le fait que l'indexation n'a pas été appliquée chaque année, le loyer étant resté constant entre octobre 2013 et septembre 2017, il ne peut néanmoins être considéré qu'aucune indexation n'était envisagée ou que la SCI y aurait renoncé. Cette indexation automatique implique donc que la locataire, de sa propre initiative, aurait dû adapter le montant de son loyer à la date anniversaire, soit le 1er octobre de chaque année.

Dans le cadre du présent litige, l'appelante ne sollicite néanmoins que le paiement du montant de l'indexation qui aurait dû être appliquée entre le mois d'octobre 2017 et le mois de mars 2019. Elle indique, en effet, dans un courrier adressé à l'intimée le 19 février 2018, qu'entre le mois de septembre 2013 et le mois de septembre 2017 elle a payé un loyer révisé dont le montant était, en septembre 2017, de 5 395,52 euros.

Dans le commandement de payer délivré le 10 mai 2019, elle chiffre le montant de la révision à la somme de 473,68 euros entre octobre 2017 et septembre 2018, puis à 589,81 euros entre octobre 2018 et mars 2019, soit un impayé total de 9 223,02 euros.

Néanmoins, elle ne justifie pas des indices retenus ni des calculs ayant permis d'aboutir à ce résultat et les avis d'échéances qui ont été transmis à la locataire font état d'une indexation d'un montant de 589,81 euros sur toute la période. L'intimée souligne ces incohérences et conteste le montant sollicité dans la mesure où les sommes retenues ne correspondent pas toutes à l'application des indices connus pour ces périodes.

Il résulte du contrat de bail que la clause prévoyant l'indexation du loyer ne fixe pas de date de départ ni la valeur de l'indice à retenir lorsqu'il a été conclu, elle est néanmoins suffisamment claire pour qu'on comprenne qu'il s'agit de l'indice Insee du coût de la construction sur le trimestre en cours soit, selon la position commune des parties, 1520.

Pour calculer l'indexation la formule est la suivante : loyer à la date de signature du contrat de bail x (dernier indice publié au moment de la révision / indice de référence lors de la fixation initiale).

L'indice Insee du coût de la construction en cours en octobre 2017 était de 1664 (parution au journal officiel le 20 septembre 2017). Dès lors, le loyer révisé à cette date s'élevait à 5 000 x (1664/1520) soit 5 473,68 euros.

L'indice en cours en octobre 2018 étant de 1699 (parution au journal officiel le 20 septembre 2018), le loyer révisé à compter de cette date s'élevait à 5 000 x (1699/1520) soit 5 588,82 euros.

Le montant de l'indexation à appliquer entre octobre 2017 et septembre 2018 est dont de 473,68 euros soit la somme totale de 5 684,16 euros pour cette période (473,68x12). Le montant à retenir pour la période d'octobre à mars 2019 est de 588,81 euros soit la somme de 3 532,92 euros (588,82x6).

Il n'est pas contesté que le montant du loyer initial de 5 000 euros a été toujours été honoré. L'intimée est donc redevable d'une somme de 9 217,08 euros au titre de l'indexation du loyer commercial due entre le mois d'octobre 2017 et le mois de mars 2019 ainsi que des loyers suivants indexés selon la formule susvisée.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a jugé que la SCI Les orangines est fondée à solliciter l'indexation annuelle du loyer à compter du 1er octobre de chaque année sur la base de l'indice du coût de la construction mais il sera infirmé en ce qu'il a chiffré la dette de la société Start OI à ce titre à la somme de 9 223, 02 euros et cette somme le sera à celle de 9 217,08 euros.

Sur le remboursement de la taxe foncière et de la taxe d'enlèvement des ordures ménagère

L'article L145-35 du Code de commerce dispose que ne peuvent être imputés au locataire : (') 3° Les impôts, notamment la contribution économique territoriale, taxes et redevances dont le redevable légal est le bailleur ou le propriétaire du local ou de l'immeuble ; toutefois, peuvent être imputés au locataire la taxe foncière et les taxes additionnelles à la taxe foncière ainsi que les impôts, taxes et redevances liés à l'usage du local ou de l'immeuble ou à un service dont le locataire bénéficie directement ou indirectement.

L'article 4 des conditions générales du contrat de bail commercial intitulé « Impôts et taxes » prévoit : « Le preneur devra acquitter toutes les contributions et charges de la ville, de police et de voiries auxquelles les locataires sont usuellement tenus.

En outre le cas échéant suivant l'accord des parties, il remboursera au bailleur: - la taxe sur les bureaux à [Localité 4] et en Ile de France (1)

- la part d'impôt foncier relative aux lieux loués (1) ».

Cette clause stipule donc que la taxe foncière n'est prise en charge par la locataire que « le cas échéant ». Sa formulation et sa mise en page n'induisent pas, comme l'appelante l'affirme, qu'une distinction doit être faite entre une location située en Ile de France et sur l'île de la Réunion mais qu'il appartenait aux parties d'exprimer clairement leur choix que la locataire assume le paiement de la part d'impôts foncier relative aux lieux loués, ce qu'elles n'ont pas souhaité lors de la conclusion du bail puisque cela n'est pas spécifié. En outre, aucun élément objectif ou objectivable ne démontre que les parties ont convenu que le paiement serait assuré par l'intimée.

De plus, le fait que par courrier de son avocat cette dernière ait pu convenir être redevable de la taxe d'enlèvement des ordures ménagère (TEOM) n'induit pas qu'elle ait pu reconnaître être recevable de la taxe foncière. En effet, si la TEOM s'applique aux propriétés soumises à la taxe foncière et qu'elle est souvent mentionnée sur l'avis afférent à la taxe foncière, aucun texte légal ou réglementaire, ni aucune disposition conventionnelle du bail ne prévoit une indivisibilité entre elles.

Concernant la TEOM, si l'appelante n'en avait pas sollicité le paiement en première instance, elle sollicite le paiement des taxes afférentes au bien qu'elle loue depuis l'origine du litige. Cette demande n'est dès lors pas nouvelle en cause d'appel.

Comme l'a justement retenu le premier juge, les dispositions de la loi Pinel qui excluent expressément que le bailleur puisse refacturer la TEOM au locataire ne sont pas applicables en l'espèce. L'intimée a reconnu par courrier en date du 15 novembre 2021 être redevable des sommes réclamées à ce titre et n'élève aucune contestation sur ce point en cause d'appel.

Le relevé produit daté du 1er février 2022 retient pour la période de 2016 à 2021 un montant global de 16 440 euros et un règlement de 10 960 euros, soit un reste à payer de 5 480 euros. Pour l'année 2022 la somme due à ce titre est de 2 899 euros.

Dès lors il sera fait droit à la demande de l'appelante pour un montant de 8379 euros.

Le jugement critiqué sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande en paiement au titre de la taxe foncière et, y ajoutant, l'intimée sera condamnée au paiement de la somme de 8 379 euros au titre de la TEOM.

Sur la délivrance d'une attestation d'assurance

Le bail stipule que les locaux loués sont réservés à l'activité commerciale, industrielle ou artisanale de dépôt, parking, garage de bus et bureaux.

L'article 6) j) de ses conditions générales prévoit que le preneur a l'obligation de souscrire un contrat d'assurance couvrant tous les risques locatifs, pour un montant équivalent à la valeur des locaux remis ou reconstruits à neuf, avec clause de renonciation expresse à tous recours contre le bailleur.

L'appelante a sommé l'intimée dans le commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 10 mai 2019 de justifier de la souscription d'une assurance contre les risques locatifs dans le délai d'un mois à compter de cet acte. Elle expose dans ses conclusions qu'il s'agit d'une assurance couvrant le preneur pour les risques liés à son activité qui est exigée.

Par courrier adressé à l'intimée daté du 27 mai 2019, la société d'assurance Ark'Assur, agence dépendant du réseau Allianz, a porté à la connaissance de cette dernière des précisions quant au contrat d'assurance souscrit en tant que locataire qui prévoit dans ses dispositions générales, notamment, le fait que les bâtiments professionnels, les réservoirs, cuves, citernes extérieurs et fixes destinés au stockage de carburant sont bien concernés par le contrat souscrit et il lui est précisé que le risque locatif est bien couvert.

De plus, la société Allianz a attesté par courrier du 16 février 2021 de ce que l'intimée avait souscrit un contrat de responsabilité civile des entreprises de service prenant effet le 1er janvier 2019 garantissant les risques liés à son activité de transport.

La corrélation de ces deux documents démontre que l'obligation de souscrire une assurance mise à la charge de la locataire par le contrat de bail était bien respectée concernant ses activités commerciales à la date fixée par le commandement de payer, soit le 10 juin 2019 et qu'elle en a justifié dès le 27 mai 2019.

Sur la validité du commandement de payer

L'article L.145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

En espèce, l'acte délivré à l'intimée le 10 mai 2019 mentionne qu'il lui est demandé le paiement d'un arriéré de loyer et de taxe foncière, qu'à défaut de satisfaire à ce commandement dans le délai d'un mois la bailleresse pourra se prévaloir des dispositions de la clause résolutoire insérée au bail. Il lui est également fais sommation d'avoir à justifier de la souscription d'une assurance contre les risques locatifs, comme cela a déjà été développé. Etaient annexés le décompte mois par mois de l'indexation et de la taxe foncière réclamées ainsi que la copie complète du bail.

Il n'est pas exigé sous peine de nullité que la clause résolutoire soit reproduite si le contrat de bail la stipulant est annexé au commandement. L'acte délivré le 10 mai 2019 précisait clairement le délai fixé pour s'y soumettre, mettait la locataire en position d'être informée de façon précise de quels manquements lui étaient reprochés, de ce qui lui était fait sommation de faire ou de payer, sur quel fondement et quelles seraient les conséquences d'une inexécution de sa part.

Dès lors l'acte et les documents qui y sont annexés sont tout à fait valable et le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'intimée de sa demande de nullité.

Sur l'acquisition de la clause résolutoire, la résolution du contrat, l'octroi de délais de paiement suspendant la clause résolutoire et les indemnités d'occupation

Il découle de ce qui précède que l'intimée est redevable de la somme de 9 217,08 euros au titre de l'indexation du loyer commercial due entre le mois d'octobre 2017 et le mois de mars 2019 et de la somme de 8 379 euros au titre de la TEOM. Le commandement de payer visant la clause résolutoire étant valable, il doit être constaté son acquisition un mois après sa signification, soit au 10 juin 2019, mais pour ce montant seulement.

En l'absence de manquement à l'obligation de justifier de la souscription d'une assurance, c'est à bon droit et par des motifs pertinents que la cour d'appel adopte, que le premier juge en a suspendu les effets au regard du défaut minime de paiement, accordant des délais de paiement à la locataire.

Il sera, en outre, précisé, que l'intimée justifie avoir versé à la CARPA la somme de 2 000 euros afférente à la condamnation prononcée par le premier juge au titre de l'article 700 du code de procédure civile, celle de 9 223,02 euros correspondant au montant visé pour l'indexation par le commandement de payer et la somme de 33 776,92 euros au titre des loyers échus entre le mois d'avril 2019 et celui d'octobre 2022 outre indexation. Elle démontre ainsi être totalement en capacité d'honorer sa dette, ce qui justifie l'octroi des délais de paiement sollicités.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement critiqué en ce qu'il a constaté l'acquisition de la clause résolutoire du bail à effet du 10 juin 2019, suspendu ses effets et autorisé l'intimée à se libérer de sa dette en sus du loyer courant indexation comprise dans un délai de 4 mois, cette durée paraissant suffisante au regard des sommes déjà consignées, dit qu'en cas de régularisation cette clause serait réputée ne jamais avoir joué et, qu'à défaut de régularisation, elle serait acquise, que des indemnités d'occupation seraient dues jusqu'à complète libération des lieux et l'expulsion des lieux ordonnée.

En revanche, il sera infirmé en ce qu'il a fixé le montant de la dette à la somme de 9 223,02 euros.

En outre, concernant le montant de l'indemnité d'occupation, l'appelante sollicite qu'elle soit fixée à la somme de 15 000 euros, se fondant sur un rapport d'expertise privée évaluant la valeur locative du bien à cette somme. L'intimée réplique qu'il n'est pas démontré que le terrain ait pris de la valeur.

Le jugement dont appel a, dans ses motifs, fixé l'indemnité d'occupation à un montant égal à celui qui aurait été dû en cas de poursuite du bail majoré de 20% mais le dispositif a condamné l'intimée à payer une indemnité d'occupation égale à 20% du loyer qui aurait été dû indexation comprise. Ces dispositions ne sont pas concordantes.

En outre, la valeur locative du bien loué concernant l'intimée, qui ne peut être considérée comme un nouveau locataire, correspond au montant du loyer augmenté de l'indexation annuelle calculé à partir de l'indice du coût de la construction pour le semestre en cours. Aucun motif ne justifie donc que la valeur résultant de l'expertise privée communiquée par l'appelante ne soit retenue ni que le montant du loyer soit majoré de 20%. Le jugement sera infirmé sur ce point et l'indemnité d'occupation sera fixée au montant du loyer indexé, conformément aux conditions particulières et générales du bail et selon la formule susvisée.

Enfin, l'appelante demande à la cour d'appel de dire et juger que l'intimée n'a pas payé le rappel de loyers et effectué l'indexation requise dans le délai fixé par le premier juge au titre de la suspension de la clause résolutoire. Cette demande ne peut qu'être rejetée, n'entrant pas dans le périmètre de saisine de la cour d'appel dans le cadre du présent litige.

Sur la résiliation du bail pour faute

L'appelante soutient que l'intimée a commis des fautes graves justifiant la résiliation du bail en refusant de payer l'indexation à compter du mois d'octobre 2017, alors qu'elle l'avait fait jusque-là, en refusant de fournir un attestation d'assurance ce dont il peut être déduit une absence d'assurance, en ne se manifestant pas auprès de la Préfecture et de la Drire pour signaler le changement d'exploitant intervenu du fait de la cession du fonds de commerce de la société Transport [M] qui exerçait une activité classée au titre des installations classées pour la protection d'emprisonnement l'environnement soumise à déclaration, en franchissant la limite séparative avec le terrain voisin dont elle est également locataire, afin de faire réparer et laver ses autobus, les déchets ainsi générés étant renvoyés sur sa parcelle qui se voit dans l'obligation de les traiter.

Concernant le paiement de l'indexation, s'il est désormais établi qu'elle devait être appliquée de manière automatique par l'intimée chaque année et que celle-ci a arrêté de le faire à compter du mois de septembre 2017, il sera néanmoins rappelé que la somme réclamée par l'appelante à ce titre à compter du mois d'octobre 2018 n'était pas correctement calculée, qu'elle a également exigé le paiement de taxes qu'elle ne pouvait récupérer au regard des dispositions du contrat de bail et que l'intimée démontre avoir consigné une somme importante lui permettant d'honorer sa dette une fois le litige tranché. Elle n'a de ce fait commis aucune faute grave justifiant la résiliation du contrat de bail.

Concernant la délivrance d'une attestation d'assurance, il a été établi qu'elle a produit les documents justifiant du respect de cette obligation. Elle n'a dès lors pas non plus commis de faute grave à ce titre.

Concernant la déclaration du changement de du nom de l'exploitant d'une installation classée, l'intimé démontre avoir adressé à la sous-préfecture de [Localité 5] une déclaration de changement de nom de l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement le 13 septembre 2013. Elle a ainsi respecté ses obligations à ce titre et n'a commis aucune faute grave.

Concernant le trouble du voisinage invoqué par la SCI, d'une part, celle-ci n'en démontre pas la réalité, la mise en demeure évoquée par ses conclusions n'étant pas produite à la procédure et ne pouvant en tant que telle suffire à démontrer la réalité du préjudice allégué.

D'autre part, le moyen développé consiste en réalité à se plaindre d'un trouble causé par le locataire d'un fonds voisins, appartenant à un autre propriétaire. En effet, la lecture de l'acte de cession d'entreprise du 8 février 2013 met en lumière que le bail objet du présent litige concerne le terrain situé [Adresse 1], [Localité 3] appartenant à la SCI Les orangines et dont la destination est « dépôt parking garage bus et bureau » et non le bail donné pour le local voisin situé [Adresse 2] [Localité 3], appartenant à la M. [F] [M] dont la destination est « parking de cars ». Si en exécution du plan de cession l'intimée s'est vue céder les droits au bail des deux locaux, le trouble invoqué ne peut constituer une inexécution contractuelle rendant impossible le maintien du bail en cours entre la SCI et la société Start OI.

En conséquence, aucune faute grave pouvant justifier la résiliation du bail litigieux n'est caractérisée. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'appelante de toutes ses demandes plus amples ou contraires au terme du dispositif.

Sur les autres demandes

Partie perdante, la société Start OI sera condamnée à régler les entiers dépens de l'appel sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile, la disposition du jugement ayant mis à sa charge ceux de première instance étant confirmée.

Au regard de la solution apportée au litige, l'équité ne commande pas d'allouer une quelconque somme à l'intimée au titre des frais irrépétibles, la SCI Les orangines sera déboutée de sa prétention de ce chef et le jugement sera infirmé en ce qu'il lui a alloué la somme de 2 000 euros à ce titre.

La société Start OI sera également déboutée de sa demande en ce sens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a :

- chiffré la dette de la société Start OI vis-à-vis de la SCI Les orangines à la somme de 9 223, 02 euros,

- condamné la société Start OI à payer à la SCI les orangines une indemnité d'occupation égale à 20% du loyer qui aurait été dû indexation comprise,

- condamné la société Start OI à payer à la SCI Les orangines la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que la dette de société Start OI au titre de l'indexation du loyer pour la période du 1er octobre 2017 au 1er avril 2019 s'élève à la somme de 9 217,08 euros,

Dit que l'indemnité d'occupation sera égale au montant du loyer indexé conformément aux conditions particulières et générales du bail soit selon la formule loyer à la date de signature du contrat de bail x (dernier indice publié au moment de la révision / indice de référence lors de la fixation initiale),

Déboute la SCI Les orangines de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant,

Condamne la société Start OI à verser à la SCI Les orangines la somme de 8 379 euros au titre de la de la taxe d'enlèvement des ordures ménagère ;

Condamne la société Start OI aux entiers dépens de l'appel ;

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.

Le présent arrêt a été signé par Madame Séverine LEGER, conseillère faisant fonction de présidente de chambre, et par Madame Nathalie BEBEAU, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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