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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-1, 23 avril 2025, n° 24/13434

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

M. A

Défendeur :

Amoros Immobilier (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Ouvrel

Conseillers :

Mme de Bechillon, Mme Dampfhoffer

Avocats :

Me Campolo, Me Atias, Me Juston, SCP Badie, Simon-Thibaud, Juston, Me Badie, Me Hoffmann, Me Brunet-Debaines

TJ Draguignan, du 7 déc. 2021, n° 20/015…

7 décembre 2021

EXPOSE :

Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Draguignan le 7 décembre 2021, ayant statué ainsi qu'il suit :

' condamne in solidum Monsieur et Madame [A] à payer à Monsieur et Madame [U] la somme de 20'542,50 euros au titre de la réparation de la toiture, somme à actualiser en fonction de l'indice BT 01 entre le 28 septembre 2019 et le présent jugement, puis assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement ainsi que la somme de 1000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement,

' déboute Monsieur et Madame [U] du surplus de leur demande de réparation,

' dit que dans les rapports entre co-obligés, le partage de responsabilité s'effectuera à proportion de 50 % pour Monsieur et Madame [A] et 50 % pour la SARL Amoros immobilier,

' condamne la SARL Amoros immobilier à relever et garantir Monsieur et Madame [A] à hauteur de 50 % des condamnations prononcées en principal, intérêts, dépens et frais,

' condamne Monsieur et Madame [A] à relever la SARL Amoros immobilier à hauteur de 50 % des condamnations prononcées en principal, intérêts, dépens et frais,

' déboute Monsieur et Madame [A] ainsi que la SARL Amoros immobilier de la demande de partager les responsabilités avec Monsieur et Madame [U] ainsi que du surplus de leur demande d'être relevés et garantis,

' condamne in solidum Monsieur et Madame [A] et la SARL Amoros immobilier aux dépens, y compris les frais de l'expertise judiciaire, avec distraction ainsi qu'à payer à Monsieur et Madame [U] la somme de 2 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

' rappelle que la charge finale des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile sera partagée par moitié entre Monsieur et Madame [A], d'une part, et la SARL Amoros immobilier, d'autre part,

' écarte l'exécution provisoire de droit,

' rejette le surplus des demandes ;

Vu la motivation du jugement qui retient, en substance, que la demande des époux [U], acquéreurs, est principalement fondée sur le dol imputable aux deux défendeurs, vendeurs ; qu'il résulte d'un courriel du 2 novembre 2018 délivré par l'agence, intitulé 'lettre pour la protection juridique', que les époux [A] avaient confirmé à l'agence que la toiture avait été révisée en totalité et qu'ils se portaient garants de la bonne exécution des travaux ; que les documents relatifs à la réfection de la toiture étaient sans doute perdus, mais que les époux [A] avaient confirmé qu'il y avait un ensemble de factures de travaux et d'entretien de la maison ; qu'il en résultait que les époux [U] avaient reçu l'information lors de la dernière visite du bien selon laquelle la toiture avait été révisée en totalité ; qu'il existe des infiltrations localisées en sous-face de toutes les zones de couverture du toit, l'expert judiciaire ajoutant que les infiltrations récurrentes existent depuis de nombreuses années et n'ont jamais été correctement traitées; que par ailleurs, il n'y a pas de trace d'une quelconque révision générale de la toiture, mais seulement des traces de réparation ancienne ; qu'ainsi, les vendeurs avaient nécessairement connaissance des infiltrations dont ils n'ont pas informé les acquéreurs en leur faisant croire à une révision de la toiture ; qu'à titre subsidiaire, la garantie des vices cachés pouvait être actionnée compte tenu de la connaissance des infiltrations par les vendeurs; qu'en toute hypothèse, le dol ne peut être retenu contre l'agence immobilière qui n'a fait que répercuter aux acquéreurs les informations sur la toiture données par les vendeurs dans un courriel postérieur à la vente ;

Qu'à l'égard de la SARL Amoros immobilier, le jugement considère que sa responsabilité envers les acquéreurs est une responsabilité extra-contractuelle, qu'il n'y a pas lieu de mettre à la charge des acquéreurs une part de responsabilité et qu'en revanche, les vendeurs et l'agence ayant concouru à la réalisation des mêmes désordres, ils seront condamnés in solidum à les réparer ; qu'il retient que l'agence immobilière n'avait pas satisfait à son devoir de conseil en laissant signer un acte de vente sans réclamer les factures de travaux, ce qui avait eu pour conséquence de faire naître le litige entre les parties de sorte que la responsabilité doit être partagée par moitié avec les vendeurs ;

Vu l'appel interjeté contre cette décision par Monsieur et Madame [A] le 23 décembre 2021 et par la SARL Amoros immobilier le 3 janvier 2022 ;

Vu les conclusions de Monsieur et Madame [A], en date du 1er février 2022, demandant de :

' infirmer la décision dont appel et statuant à nouveau :

' débouter Monsieur et Madame [U] de toutes leurs demandes,

' condamner l'agence immobilière à les relever et garantir de toutes les condamnations prononcées à leur encontre,

' rejeter la demande des époux [U] en paiement de la somme de 10'000 euros à titre de dommages et intérêts et ramener l'indemnisation au titre des réparations de la toiture à de plus justes proportions, et ce en partage avec les époux [U] et l'agence immobilière,

' condamner les époux [U] in solidum avec l'agence immobilière Amoros immobilier à leur payer la somme de 3500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens avec distraction ;

Vu les conclusions de la SARL Amoros immobilier, en date du 27 juillet 2022, demandant de :

' recevoir l'appel et le dire bien fondé,

' à titre principal, débouter les intimés de toutes leurs demandes,

' à titre subsidiaire, débouter les époux [U],

' juger qu'il existe un partage de responsabilité avec les époux [U] qui devront supporter au moins 50 % des frais de réparation de la toiture,

' juger qu'il existe un partage de responsabilité avec les époux [A] qui ne saurait être supérieure à 20 % en ce qui les concerne et qui serait de 80 % pour les vendeurs,

' condamner les époux [U] et les époux [A] à lui verser la somme de 3000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

' écarter l'exécution provisoire qui causerait des conséquences manifestement excessives ;

Vu les conclusions récapitulatives et d'intervention volontaire en date du 6 novembre 2024 aux fins de ré enrôlement à la suite du décès de Madame [H] [U], prises par [O] [U], à titre personnel et en qualité d'ayant droit de Madame [H] [U], [J] [U], [K] [U], et [P] [V] [I] en qualité d'ayant droits de Madame [H] [U], demandant de :

' ordonner le ré-enrôlement de l'affaire à la suite de la régularisation de l'intervention volontaire des ayants- droit de Madame [H] [U],

' rejeter toutes les demandes des appelants,

' confirmer le jugement qui a condamné les époux [A] et la SARL Amoros immobilier à payer la somme de 20'542,50 euros au titre de la réparation de la toiture avec indexation,

' l'infirmer en ce qu'il a rejeté le surplus des demandes de réparation et statuant à nouveau,

' condamner les époux [A] et la SARL Amoros immobilier au paiement de la somme de 10'000 euros à titre de dommages et intérêts, celle de 3000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture du 27 janvier 2025 ;

MOTIFS

Par acte du 27 avril 2018, Monsieur et Madame [A] ont vendu à Monsieur [O] [U] et Madame [H] [U] pour un montant de 250'000 euros, dont 10 000 euros de commission d'agence, un bien immobilier dans un ensemble situé à [Localité 3].

L'acte contenait une clause d'exclusion de la garantie des vices cachés de la part des vendeurs.

La vente a été négociée par l'intermédiaire de l'agence SARL Amoros immobilier disposant du mandat de vente de Monsieur et Madame [A].

Se plaignant d'infiltrations au niveau de la toiture peu de temps après leur entrée en jouissance, Monsieur et Madame [U], après l'intervention de l'expert de leur propre assureur, ont obtenu, par ordonnance du 24 avril 2019, la désignation d'un expert judiciaire en référé qui a déposé son rapport le 26 septembre 2019, puis ils ont fait assigner les vendeurs, Monsieur et Madame [A] ainsi que la SARL Amoros immobilier.

L'action initiée par les époux [U] est fondée sur le dol et sur la garantie des vices cachés.

Les acquéreurs exposent, à cet égard, que les man'uvres frauduleuses sont caractérisées et destinées à emporter leur consentement alors qu'ils n'ont pas été informés de l'état des lieux, que le défaut préexistait à la vente et qu'ils n'en avaient pas connaissance puisqu'on leur a fait, au contraire, croire à la réparation des désordres ; que les vendeurs ne peuvent invoquer l'existence des orages exceptionnels, car non seulement les infiltrations ne se produisent pas seulement à l'occasion d'orages exceptionnels, mais surtout parce que l'expert a relevé que les infiltrations sont régulières, répétées et anciennes ; que l'argumentation de l'agence est contraire à celle des vendeurs qui prétendent que la toiture était visible par un profane, que l'agence valide l'argumentation des époux [U] en affirmant la préexistence des vices ; que l'expertise judiciaire indique clairement l'existence de réparations anciennes démontrant que la couverture a été, avant la signature de l'acte, le siège infiltrations; que le courriel postérieur à la vente retrace les conditions de la transaction, et aussi le fait qu'ils s'étaient préoccupés de l'état de la toiture avant la signature; que la responsabilité de l'agence est engagée comme n'ayant effectué aucune vérification, ni contrôle.

Les époux [A] font valoir, en substance, que les acquéreurs connaissaient l'existence des infiltrations au moment de leur achat et qu'ils avaient parfaitement conscience de l'ancienneté de la toiture, ayant à cet égard précisément indiqué à l'expert qu'ils avaient constaté des traces d'infiltrations; il contestent les termes du courriel de l'agence immobilière relatant qu'ils lui auraient confié avoir effectué des travaux de réfection complète de toiture, mais qu'ils n'en avaient plus les factures, soulignant, à cet égard, que même s'ils n'avaient pu récupérer les factures dans leur maison de famille, ils auraient pu en demander une copie à l'entrepreneur; ils affirment, en conséquence, que la seule allégation ayant pu tromper les acquéreurs consiste dans le mail de l'agence dont ils contestent les termes ; qu'aucun dol ne peut donc leur être imputé ; ils ajoutent que depuis la vente et jusqu'à l'expertise, plusieurs interventions ont eu lieu sur la toiture, que l'expert a constaté de nombreuses tuiles cassées et qu'il n'est pas démontré que ces désordres existaient au moment de la vente ; qu'eux-mêmes n'ont pas fait de déclaration de sinistre pour des infiltrations durant les cinq années précédant la vente et qu'en outre, la région a connu des conditions météorologiques particulièrement défavorables aux mois d'avril et novembre 2018 à l'origine des infiltrations d'eau dont se sont plaints les acquéreurs; qu'il n'est donc pas prouvé l'existence de vices cachés antérieurs à la vente et qu'il n'est pas plus prouvé leur mauvaise foi.

Sur la responsabilité de l'agence immobilière, ils affirment que sa responsabilité est entière dans la mesure où elle a pris l'initiative de délivrer un mail ne contenant que des indications erronées et qu'ils contestent; ils soutiennent, en conséquence, que c'est l'agence qui par cette information a trompé les acquéreurs sur l'état du bien.

L'agence immobilière fait, à son tour, valoir essentiellement, en ce qui concerne sa responsabilité, qu'elle n'est pas un professionnel de la construction, ni du bâtiment et qu'elle ne pouvait connaître l'état de la toiture ; que sa responsabilité ne peut être recherchée que pour un manquement à son obligation de conseil et que celui-ci n'est pas prouvé; que selon l'expertise, l'origine des infiltrations se trouve essentiellement dans la vétusté de la toiture; qu'elle ignorait tout de la couverture et n'avait pas les moyens de détecter son état à l'origine des infiltrations ; que le jugement ne raisonne que par hypothèses et suppositions ; qu'elle n'avait pas l'obligation d'alerter l'acquéreur sur l'âge de la toiture, ni sur les travaux à y réaliser ; qu'en aucune manière, elle n'a eu entre ses mains la preuve de la réfection de la toiture ou les factures et que son mail du 2 novembre 2018 se borne à retranscrire les allégations de son vendeur; qu'en toute hypothèse, un partage de responsabilité devra intervenir avec les époux [A] qui ne peuvent bénéficier d'une toiture neuve à ses frais et également avec les époux [U] qui n'ignoraient pas l'état du bâtiment qu'ils avaient, eux-mêmes, acquis en 2006 déjà construit et qui l' ont revendu à un prix inférieur à celui auquel ils l' avaient acheté.

************

Il résulte des éléments versés aux débats et notamment de la lecture du rapport de l'expert judiciaire, que les désordres sont constitués par des infiltrations localisées en sous-face de toutes les zones de la couverture ; que l'immeuble est sujet à infiltrations depuis de longues années lesquelles n'ont jamais été correctement traitées; que le clos et le couvert ne sont pas correctement assurés, la couverture datant de l'origine de la construction, soit environ 40 années et étant de médiocre qualité, ainsi que l'état des solins avec, en outre, de très nombreuses tuiles cassées et également l'état médiocre de l'abergement de la cheminée; qu'elle porte des traces de réparations anciennes, permettant de certifier qu'elle a été, par le passé avant la signature de l'acte, le siège d'infiltrations ; qu'en revanche, il n'y a pas eu de révision générale de celle-ci contrairement au mail du 2 novembre 2018 de l'agence immobilière ainsi rédigé :

« Comme demandé, je peux vous confirmer que lors de la prise de mandat ainsi que lors des visites Monsieur et Madame [A] nous avaient bien confirmé entre autres que la toiture avait été révisée en totalité et qu'ils se portaient garants de la bonne exécution des travaux.

Lors de notre dernière visite, le 8 mars 2018, à 16h30, ils avaient même redit que plusieurs de leurs documents étaient sans doute perdus chez la s'ur défunte de Madame [A] à la villa de [Localité 7] car ils n'avaient plus accès à cause d'un contentieux avec toute la famille.

Parmi les documents égarés, ils m'avaient confirmé qu'il y avait l'ensemble des factures de travaux et d'entretien de la maison et de l'extension.

Concernant la maison, les factures manquantes attendues étaient la véranda, le forage, la toiture et l'abri de jardin. »

L'expert préconise une réfection complète du toit qu'il chiffre à la somme de 18 675 euros HT.

Sur les rapports vendeurs- acquéreurs :

La recherche par les époux [U] de la responsabilité des époux [A] est fondée sur le dol et sur la garantie des vices cachés.

Sur le dol :

Les époux [U] prétendent avoir été trompés sur l'état de la toiture, faisant de ce chef valoir, même s'ils reconnaissent ne jamais avoir rencontré leurs vendeurs, que l'agence les aurait rassurés par des information s'avérant erronées.

Les époux [A] contestent, pour leur part, avoir pu donner une information erronée à leurs acquéreurs au sujet de la révision de la toiture ; ils affirment que la seule information ayant pu les tromper serait les allégations du courriel du 2 novembre 2018 de l'agence immobilière et que ces informations, qu'ils contestent, n'émanent pas d'eux; qu'ils n'ont donc jamais évoqué la réalisation de travaux de réfection totale, et encore moins prétendu détenir une facture de cette prestation (« ces informations n'émanant aucunement des époux [A], on ne peut légitimement leur reprocher aujourd'hui quelconque man'uvre », page 7 de leurs conclusions, ou encore :' cette information est fausse, les époux n'ayant jamais attesté, ni même garanti la révision de la toiture », page 12 de leurs conclusions) ; en outre, ils ajoutent que les époux [U] avaient connaissance de l'ancienneté de la construction et qu'ils ont d'ailleurs indiqué à l'expert avoir constaté, préalablement à la cession, les traces d'infiltrations.

Les époux [U] font également le grief aux vendeurs de ne pas les avoir informés du mauvais état de la toiture et de l'existence des infiltrations récurrentes ; ils affirment à ce sujet que le défaut préexistait à la vente et qu'il serait déterminant de leur consentement.

En l'état des pièces versées aux débats, d'une part, rien ne permet cependant d'imputer aux vendeurs l'allégation des époux [U], selon laquelle ils auraient été trompés sur la réalisation, avant la vente, d'une révision générale de la toiture, les vendeurs contestant, en effet, expressément avoir tenu les propos rapportés par l'agence et aucun élément de leur implication à cet égard n'étant par ailleurs produit, le seul document évoquant cette occurrence consistant dans le mail de l'agence du 2 novembre 2018 qui ne fait que rapporter des propos prétendument tenus par les vendeurs.

Par ailleurs et selon les époux [U], ils n'ont donc jamais rencontré leurs vendeurs de sorte que les seules informations qu'ils ont eues l'ont été par l'intermédiaire de l'agence dont la tromperie prétendue ne saurait avoir un quelconque effet dans le cadre des rapports vendeurs- acquéreurs pour une demande fondée sur le dol.

En troisième lieu, la confrontation des éléments ci-dessus rapportés permet de retenir :

- que les observations expertales démontrent l'état d'apparence évidente des infiltrations, nombreuses et généralisées, existant en sous-face de toute la couverture de l'immeuble lors des visites faites préalablement à la vente, ainsi que la vétusté de l'entier immeuble et de sa toiture;

- que celle-ci est, au demeurant, admise comme connue par les acquéreurs puisqu'ils indiquent dans leurs écritures : « s'il est certain que les époux [U] pouvaient se rendre compte de l'ancienneté de la toiture, ils ne pouvaient pas s'attendre sérieusement à une toiture fuyarde ».... ou encore «c'est parce qu'ils se sont rendus compte de la vétusté de la toiture et de l'état de l'ouvrage »...;

- qu'il résulte de la nature même et l'importance des désordres tels que caractérisés par les expertises, tant celle de l'assureur des époux [U] que l'expertise judiciaire, qu'à défaut de travaux de reprise dûment justifiés, ils ne pouvaient que persister compte tenu de leur cause, structurelle et ancienne tenant à la qualité de la toiture et à sa conception : selon l'expert, la couverture date, en effet, d'environ 40 ans, l'ouvrage initial est de médiocre qualité, les tuiles sont posées dans un sens opposé au sens préconisé de sorte qu'elles se soulèvent en cas de vent, ce qui favorise les fuites; les solins et l'abergement sont dans un état très médiocre, la toiture n'a jamais été révisée;

- que dans ces conditions, il sera considéré:

* qu'ils pouvaient, eux mêmes, constater les stigmates nombreux des infiltrations provenant de la toiture,

* qu'ils ne se sont cependant pas inquiétés, malgré l'ampleur et le siège des désordres vus et malgré la vétusté connue de l'immeuble, d'une justification dûment établie, notamment par la production de factures, quant à d'éventuels travaux et quant à leur consistance

* et qu'ils ne peuvent davantage sérieusement contester avoir été, dans ces circonstances, conscients de la nécessité de devoir engager d'importants travaux de rénovation de la toiture en cause,

de sorte qu'au vu de la situation dans laquelle ils ont ainsi contracté la preuve, qui incombe aux acquéreurs de ce que la réticence reprochée aux vendeurs sur les infiltrations aurait été déterminante de leur consentement, n'est pas faite.

Il sera, de ce chef, en dernier lieu relevé :

* qu'ils ont acquis à un prix inférieur à celui d'achat de leur vendeur qui en 2006, était de 260 979 euros,

* et que selon l'expert, ( pages 9 et 24 de son rapport) :

« au cours des différentes visites qui précédèrent la signature de l'acte, les époux [U], futurs acquéreurs, constatèrent la présence de traces infiltrations en sous-face de la couverture en tuiles de l'immeuble »

« Lors de l'achat, les époux [U] avaient pleinement conscience que la couverture de l'immeuble était ancienne et qu'ils ne pouvaient donc pas jouir des avantages d'une couverture neuve ».

La demande fondée sur le dol dont il est, en toute hypothèse, rappelé qu'elle ne peut prospérer que dans les rapports vendeur-acquéreurs, sera donc rejetée.

Sur la garantie des vices cachés :

L'acte de vente [A]- [U] contient une clause d'exclusion de la garantie des vices cachés du vendeur, impliquant que soit faite la démonstration de la mauvaise foi du vendeur, outre la preuve de l'ensemble des conditions de l'article 1641 du code civil, la charge en incombant aux époux [U].

Sur la question de la bonne ou mauvaise foi du vendeur, il résulte des éléments versés et des observations ci-dessus déjà faites que les époux [A] ne sauraient être considérés comme de bonne foi ne pouvant, en effet, sérieusement prétendre, compte tenu de l'origine, de l'ancienneté et de l'étendue des infiltrations, avoir ignoré leur réalité et leur persistance.

Les autres conditions de la mise en oeuvre de la responsabilité du vendeur sur ce fondement résultent de l'article 1641 du code civil aux termes duquel le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui en diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus.

Outre l'exigence de la démonstration de l'existence d'un vice caché avant la vente, ces dispositions impliquent également en ce qui concerne les conséquences du vice, la démonstration d'une situation alternative, à savoir, qu'il doit rendre la chose impropre à l'usage auquel on la destine ou qu'il doit en diminuer tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il l'avait connu.

Les vices en cause qui selon l'expert, consistent dans des infiltrations récurrentes ne permettent pas d'assurer 'convenablement le couvert' de la maison.

En l'état des observations de l'expert (« au cours des différentes visites qui précédèrent la signature de l'acte, les époux [U], futurs acquéreurs, constatèrent la présence de traces infiltrations en sous-face de la couverture en tuiles de l'immeuble »), les vices étaient, en conséquence, visibles avant l'achat de M et Mme [U] qui, par ailleurs, reconnaissent avoir été conscients de la vétusté du bien .

Il s'agit donc d'un vice apparent, excluant le bien fondé de la mise en oeuvre de leur action au visa de l'article 1641 du code civil .

En toute hypothèse, et compte tenu des développements ci-dessus faits sur le caractère non déterminant de la réticence, la condition légale prévoyant que le vice doit rendre la chose impropre à l'usage auquel on la destine ou doit en diminuer tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il l'avait connu, n'est pas davantage caractérisée.

Il en résulte le rejet des demandes des époux [U] contre les époux [A] fondées sur la garantie des vices cachés, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de relevé et garantie, subsidiairement formée par ceux-ci à l'encontre de l'agence immobilière.

Sur les rapports acquéreurs-agence immobilière et sur la mise en oeuvre de la responsabilité délictuelle de celle-ci:

Il a été ci-dessus énoncé que les époux [U] ne peuvent invoquer à l'encontre de l'agence immobilière l'existence de man'uvres dolosives, l'action fondée sur le vice du consentement étant, en effet, réservée aux rapports vendeur-acquéreur.

La responsabilité de la SARL Amoros immobilier ne peut donc prospérer que sur le fondement extra-contractuel, au titre de son obligation de conseil.

Le tribunal a retenu de ce chef qu'elle aurait dû s'assurer de l'efficacité de l'acte de vente en veillant à ce que les factures de révision de la toiture, selon elle annoncées par les vendeurs, soient communiquées aux acquéreurs.

L'agence immobilière, qui prétend que son mail du 2 novembre 2018 a été rédigé par sa secrétaire, et qu'il se borne à retranscrire les propos des époux [A], (que ceux-ci contestent), ne peut effectivement, compte tenu de sa propre position sur ce mail, s'affranchir de l'obligation qui était la sienne et qui exigeait, alors que la vétusté de l'immeuble et les traces d'infiltrations étaient évidentes, qu'elle s'assure, pour une bonne information de l'acquéreur, de la réalité des travaux ou à tout le moins, qu'elle l'avise des risques de cette situation de prétendus travaux dont elle allègue avoir reçu information sans en avoir la preuve effective.

L'agence ne saurait, à cet égard, se prévaloir de ce qu'elle n'est pas un professionnel du bâtiment, ni de la construction, ni qu'elle ne pouvait, elle-même, se rendre compte de l'état de la toiture dès lors qu'il ne lui est en toute hypothèse pas reproché de ne pas avoir signalé le mauvais état de la toiture, mais d'avoir admis aux termes des allégations, selon elle reçues du vendeur, que le toit avait été révisé et de ne pas s'en être assurée, en l'état de sa vétusté évidente alors donc qu'il lui incombait d'en informer l'acquéreur.

Sa faute est ainsi caractérisée.

Toutefois, la mise en oeuvre de sa responsabilité supposant, en application des règles de la responsabilité civile délictuelle de droit commun telles qu'à bon droit rappelées par l'agence immobilière, la preuve non seulement d'une faute, mais également celle d'un préjudice et d'un lien de causalité entre le préjudice et la faute et l'acquéreur ne démontrant pas, au vu des conditions dans lesquelles il a acheté, que la connaissance de cette information aurait été déterminante, soit de son consentement sur la vente, soit de la négociation d'un prix différent, sa demande contre l'agence manque en droit.

Elle sera, en conséquence, rejetée comme mal fondée.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a condamné in solidum Monsieur et Madame [A] ainsi que la SARL Amoros immobilier à payer à Monsieur et Madame [U] la somme de 20'542,50 euros, outre les accessoires, la somme de 1000 euros au titre de leur préjudice moral ainsi que dans ses dispositions consécutives sur les partages de responsabilité et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

En raison de leur succombance, les époux [U] supporteront les entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel.

Ils seront déboutés de leur demande à titre de dommages et intérêts pour 10'000 euros.

L'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

La cour, statuant après débats en audience publique, par mise à disposition au greffe, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Reçoit l'intervention volontaire de M. [O] [U] en qualité d'ayant droit de Madame [H] [U], et de M. [J] [U], M. [K] [U], et Mme [P] [V] [I] en qualité d'ayant droits de Madame [H] [U],

Infirme le jugement en toutes ses dispositions soumises à la cour, et, statuant à nouveau :

Rejette toutes les demandes de M. [O] [U], à titre personnel et en qualité d'ayant droit de Madame [H] [U], de M. [J] [U], M. [K] [U], et Mme [P] [V] [I] en qualité d'ayant droits de Madame [H] [U] tendant à obtenir l'indemnisation de leurs préjudices au titre de la réparation de la toiture du bien acquis, tant financièrement qu'en termes de préjudice moral, à l'encontre de M. et Mme [A],

Rejette les demandes présentées par M. [O] [U], à titre personnel et en qualité d'ayant droit de Madame [H] [U], de M. [J] [U], M. [K] [U], et Mme [P] [V] [I] en qualité d'ayant droits de Madame [H] [U] à l'encontre de la SARL Amoros Immobilier,

Dit n'y avoir lieu à appel en garantie de la SARL Amoros Immobilier par M. et Mme [A], ainsi qu'à tout partage de responsabilité,

Condamne M. [O] [U], à titre personnel et en qualité d'ayant droit de Madame [H] [U], M. [J] [U], M. [K] [U], et Mme [P] [V] [I] en qualité d'ayant droits de Madame [H] [U], à supporter les entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avocats en ayant fait la demande,

Rejette les demandes présentées par M. [O] [U], à titre personnel et en qualité d'ayant droit de Madame [H] [U], de M. [J] [U], M. [K] [U], et Mme [P] [V] [I] en qualité d'ayant droits de Madame [H] [U] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. et Mme [A] ainsi que la SARL Amoros immobilier de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

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