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Décisions

CA Douai, 2e ch. sect. 2, 24 avril 2025, n° 24/02957

DOUAI

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Actarem (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Barbot

Conseillers :

Mme Cordier, Mme Vilnat

Avocats :

Me Mas, Me Verbrugghe, Me Boddaërt

TJ Lille, du 31 mai 2024, n° 23/03269

31 mai 2024

FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous seing privé du 1er décembre 2011, la SCI Point central, aux droits de laquelle vient la société Actarem, a donné à bail commercial à M. [G], un local à usage de bureaux, dépendant d'un immeuble édifié à [Adresse 4].

Jusqu'à son départ imposé en octobre 2020 par des travaux structurels entrepris dans les parties communes de l'immeuble entravant l'accès aux locaux, M. [G] a exploité dans les locaux une activité d'achat-vente de bijoux anciens, d'or et de gemmes, de montres de collection, sous l'enseigne « JSD joaillerie ».

Le 1er mars 2019, la société Actarem a délivré à M. [G] un congé avec refus de renouvellement et offre d'une indemnité d'éviction pour la date du 30 novembre 2020.

Le 23 octobre 2019, elle l'a assigné devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille aux fins, d'une part, de voir désigner un expert pour chiffrer l'indemnité d'éviction, d'autre part, d'obtenir sa condamnation à diverses sommes au titre de charges non réglées et prétendument dues.

Par ordonnance de référé du 6 mars 2020, M. [I] a été désigné en qualité d'expert. Il a déposé son rapport le 28 septembre 2022, chiffrant notamment l'indemnité d'éviction.

Le 11 avril 2023, M. [G] a assigné la société Actarem devant le tribunal judiciaire de Lille afin d'obtenir le paiement de l'indemnité d'éviction et le remboursement du dépôt de garantie ainsi que des provisions pour charges non régularisées.

Par ordonnance d'incident du 31 mai 2024, le juge de la mise en état a':

- déclaré la demande de M. [G] en paiement d'une indemnité d'éviction irrecevable comme prescrite depuis le 1er mars 2021';

- déclaré la demande de M. [G] en remboursement des charges antérieures à l'année 2018 dirigée contre la société Actarem irrecevable pour défaut d'intérêt à agir';

- condamné M. [G] à payer à la société Actarem la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamné M. [G] aux dépens de l'incident';

- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état pour les conclusions au fond de Me Boddaert sur les demandes encore recevables et pour inviter les parties à se prononcer sur la possibilité d'une mesure de médiation.

Par déclaration du 17 juin 2024, M. [G] a interjeté appel de la décision précitée.

MOYENS ET PRETENTIONS

Par conclusions notifiées le 10 novembre 2024, M. [G] demande à la cour, de :

- reformer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 31 mai 2024';

- statuant de nouveau,

- débouter la société Actarem de ses demandes';

- condamner la société Actarem à une indemnité de 7.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en appel';

- condamner la société Actarem aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 10 octobre 2024, la société Actarem demande à la cour de':

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

- déclaré la demande en paiement d'une indemnité d'éviction prescrite et par conséquent le débouter de cette demande

- déclaré la demande de M. [G] en remboursement de charges antérieures à l'année 2018 irrecevable pour défaut d'intérêt à agir

- condamné M. [G] exerçant sous le nom commercial JSD joaillerie au paiement d'une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

- réformer l'ordonnance en ce qu'elle n'a pas statué sur la prescription de la demande de remboursement de charges formée par M. [G] pour la période du 1er janvier au 13 avril 2018.

- statuant à nouveau,

- déclarer la demande en remboursement des provisions sur charges du 1er janvier au 13 avril 2018 irrecevable comme prescrite et par conséquent l'en débouter';

- Y ajoutant

- condamner M. [G] au paiement d'une somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

MOTIVATION

- Sur la recevabilité de la demande en paiement d'une indemnité d'éviction

M. [G] fait valoir que':

- le juge de la mise en état a retenu un point de départ au délai de prescription biennal erroné, à savoir la date de délivrance du congé, alors que doit être prise en compte la date d'effet'de ce congé ;

- la prescription a été suspendue le temps de l'expertise, soit à compter de l'ordonnance désignant l'expert, le 6 février 2020, et n'a recommencé à courir que le 28 septembre 2022, date du dépôt du rapport de l'expert';

- la thèse du bailleur, suivant laquelle la prescription n'est pas interrompue dans le cas où la mesure d'expertise est déjà ordonnée lors de la prise d'effet de la prescription biennale, est infondée';

- subsidiairement, la prescription biennale est interrompue par la reconnaissance par la société Actarem de sa dette';

- s'il devait être considéré que la mesure d'expertise n'est pas suspensive de prescription, il doit être constaté que la prescription biennale a été interrompue à chacun des dires expertaux de la société Actarem et n'a pu commencer à courir que le 22 juillet 2022.

La société Actarem fait valoir que':

- quand bien même le juge de la mise en état s'est indéniablement trompé sur le point de départ du délai de prescription, M. [G] disposait d'un délai expirant le 1er décembre 2022 pour saisir la juridiction d'une demande en paiement de l'indemnité d'éviction, ce qu'il n'a pas fait puisque la première assignation délivrée par M. [G] contenant cette demande date du 11 avril 2023';

- s'agissant de la procédure de référé, outre le fait qu'elle ait été diligentée par ses soins, et non par M. [G], elle ne peut avoir interrompu voire suspendu un délai biennal, puisque ce délai n'avait pas commencé à courir';

- l'interruption puis l'éventuelle suspension ne pourraient de toute façon bénéficier qu'au demandeur à la mesure, soit elle-même';

- le seul fait de délivrer un congé avec offre de paiement d'une indemnité d'éviction ne vaut pas reconnaissance de ce droit à indemnité ni même le fait de saisir en référé le juge aux fins d'évaluation de l'indemnité';

- en toute hypothèse, ces deux éléments (délivrance du congé et assignation en référé) étant antérieurs au point de départ du délai de prescription, ils ne peuvent l'avoir interrompu';

- il ne peut lui être reproché d'avoir fait valoir ses observations auprès de l'expert, l'expression de dires ne valant pas reconnaissance non équivoque du droit à indemnité d'éviction.

Réponse de la cour

En droit, en fin de bail commercial, le bailleur dispose d'une option lui permettant, soit d'offrir le renouvellement du bail à son locataire, soit de lui refuser le renouvellement, et ce, de manière discrétionnaire, à charge cependant en telle hypothèse, de lui payer une'indemnité'd'éviction, destinée à compenser le préjudice subi du fait du non-renouvellement du bail.

L'article L 145-9 du code de commerce précise que le congé doit être donné par acte extrajudiciaire. Il doit, à peine de nullité, préciser les motifs pour lesquels il est donné et indiquer que le locataire qui entend, soit contester le congé, soit demander le paiement d'une indemnité d'éviction, doit saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date pour laquelle le congé a été donné.

Le locataire qui entend soit contester le refus de renouvellement, soit demander le paiement d'une'indemnité'd'éviction, doit saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de 2 ans à compter de la date à laquelle lui est signifié le refus de renouvellement en application de l'article 145-10 du même code.

L'article L.145-60 du même code, en vigueur depuis le 21 septembre 2000, dispose que toutes les actions exercées en vertu du présent chapitre se prescrivent par deux ans.

Ainsi, les articles L. 145-9 et L. 145-10 ont conservé la distinction entre les délais applicables à la prescription de l'action en paiement d'une indemnité d'éviction, selon que le bailleur délivre un congé avec refus de renouvellement (L. 145-9) ou que le locataire se voit refuser le renouvellement qu'il a demandé (L.145-10), à savoir la date pour laquelle le congé a été signifié dans la première hypothèse et, dans la seconde hypothèse, la date de signification du refus de renouvellement, même si cette date est antérieure à la fin du bail.

La seule inaction du locataire à compter de la date d'effet du congé avec offre d'indemnité d'éviction suffit à faire courir le délai de prescription biennale. Il lui appartient donc d'agir en justice et de ne pas se contenter de se maintenir dans les lieux. La sanction du défaut d'action dans le délai de deux ans est la perte du droit en application de l'article 2229 du code civil.

Après avoir été un temps envisagé comme des délais de forclusions, ces délais, que ce soit dans l'un ou l'autre des deux cas envisagés par les articles L 145-9 et L. 145-10 précité, ont été qualifiés de délais de prescription, qui peuvent faire l'objet d'interruption ou de suspension.

Conformément aux dispositions de l'article 2241 du code civil, la prescription peut être interrompue par une citation en justice (2ème Civ., 2 juin 2016, n°15- 19.818 ; Com., 26 novembre 2003, n° 01-11.865 ; 1ère Civ., 14 décembre 1977, n° 75-13.932, B. 478).

Selon l'article 2239 du code civil, la prescription est suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès. Le délai de prescription est alors suspendu pendant toute la durée de la mesure d'instruction et ne recommence à courir qu'à compter du jour où la mesure a été exécutée - en pratique, le jour du dépôt du rapport par l'expert - et pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois.

La Cour de cassation a énoncé, au visa du texte précité, que l'ordonnance par laquelle le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès ne peut avoir pour effet de suspendre un délai de prescription qui n'a pas commencé à courir à la date à laquelle cette décision est prononcée (2e Civ., 17 mai 2018, pourvoi n° 16-16.937).

Enfin, la prescription biennale peut être interrompue notamment par la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait, en application de l'article 2240 du code civil.

Cette reconnaissance, par le bénéficiaire de la prescription, qui peut être expresse ou tacite, résulte de tout fait impliquant sans équivoque l'existence du droit du créancier. Les juges du fond doivent ainsi caractériser la renonciation non équivoque du débiteur à se prévaloir de la prescription.

En l'espèce, par acte du 1er mars 2019, la société Actera a notifié un congé avec refus de nouvellement et offre d'indemnité d'éviction pour la date de fin de bail, soit le 30 novembre 2020, puis elle a assigné, le 23 octobre 2019, son preneur devant le juge des référés en vue notamment de voir désigner un expert pour la détermination de la valeur de cette indemnité, demande à laquelle il a été fait droit par ordonnance du 6 mars 2020 et a donné lieu à un rapport d'expertise déposé le 28 septembre 2022.

En premier lieu, contrairement à ce qu'a retenu le juge de la mise en état, le point de départ du délai de prescription biennale, applicable à l'action menée par le preneur en paiement de l'indemnité d'éviction, à la suite du congé avec refus de renouvellement et offre d'indemnité d'éviction délivré par le bailleur, est non le jour de délivrance de ce congé, mais la date d'effet dudit congé, soit en l'espèce le 30 novembre 2020.

Ainsi, le délai de deux ans dont disposait M. [G] a commercé à courir à compter du 30 novembre 2020, ce qu'admettent tant le preneur que le bailleur.

La décision entreprise est donc infirmée en ce qu'elle a déclaré l'action de M. [G] en paiement d'une indemnité d'éviction irrecevable comme prescrite «'depuis le 1er mars 2021.'»

En deuxième lieu, pour s'opposer à l'irrecevabilité de sa demande en paiement de l'indemnité d'éviction, formalisée par l'assignation délivrée le 11 avril 2023, M. [G] invoque l'existence d'une interruption et d'une suspension du délai de prescription, liées à la procédure de référé et à la mesure d'expertise sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile.

Sans même qu'il soit nécessaire de s'interroger sur la question de savoir si l'interruption ou la suspension de la prescription induite par la procédure de référé et la mesure d'expertise ordonnée par cette dernière peut jouer en faveur de toutes les parties, ou uniquement de la partie demanderesse - soit, en l'espèce, le bailleur -, il résulte des règles ci-dessus rappelées, et plus particulièrement de l'article 2239 du code civil, que la mesure d'instruction ordonnée à la suite d'une demande en référé, peu important de quelle partie cette dernière émane, ne peut avoir pour effet de suspendre un délai de prescription qui n'a pas commencé à courir à la date à laquelle la décision est prononcée.

Or, l'ordonnance de référé du 6 mars 2020, qui fait suite à l'assignation du bailleur du 23 octobre 2019, a fait droit à la demande d'expertise, et ce avant même que ne commence à courir le délai de prescription biennale, qui avait pour point de départ la date d'effet du bail, soit le 30 novembre 2020.

C'est donc à tort que M. [G] prétend qu'en application du texte précité, le délai de prescription aurait été suspendu et aurait repris son cours à compter du dépôt du rapport d'expertise, soit le 28 septembre 2022, et ce pour une durée de deux ans, sans qu'il explicite cette durée, qui apparaît contraire à la lettre même de l'article 2239 du code civil lequel se réfère au délai restant à courir, et qui ne peut être inférieur à six mois.

Il ne saurait être fait état d'une quelconque malice du bailleur dans la délivrance de cette assignation aux fins de désignation d'expert en référé, dès lors que, contrairement à ce qu'affirme le preneur, il est de l'intérêt tant du bailleur que du preneur de voir déterminer, au plus vite, le montant de l'indemnité d'éviction, seul le paiement de cette dernière par le bailleur permettant de mettre fin au droit au maintien dans les lieux du preneur.

En outre, le preneur ne se trouvait nullement empêché d'agir durant la mesure d'instruction, puisqu'il pouvait, avant le dépôt du rapport, engager l'action en paiement de l'indemnité et solliciter un sursis, dans l'attente de cet évènement.

De manière surabondante, il sera observé que le rapport de l'expert a, en l'espèce, été rendu le 28 septembre 2022, soit avant l'expiration même du délai de 2 ans commençant à courir à compter du 30 novembre 2020, ce qui laissait au preneur, muni des conclusions expertales, le temps d'engager son action en paiement antérieurement à l'acquisition de la prescription biennale.

En troisième lieu, M. [G] se prévaut d'actes de reconnaissance de son droit à indemnité d'éviction de la part du bailleur, qui auraient ainsi interrompu la prescription biennale.

De première part, le seul fait de délivrer un congé avec offre de paiement d'une indemnité d'éviction en application de l'article L 145-9 du code de commerce, ne vaut pas reconnaissance de ce droit à indemnité d'éviction, ce qui a justement été rappelé par le juge de la mise en état dans l'ordonnance entreprise.

De deuxième part, le fait pour le bailleur d'avoir saisi le juge en référé aux fins de détermination du montant de l'indemnité d'éviction, avant même la date d'effet du congé, ne peut valoir reconnaissance expresse, de sa part, du droit à indemnité interrompant le délai biennal, lequel n'avait pas encore commencé à courir.

Cette saisine ne vaut pas non plus renonciation tacite et non équivoque du bailleur à se prévaloir du délai de prescription biennale, dans l'instance engagée au fond au titre de l'action en paiement d'une indemnité d'éviction.

Les actes réalisés avant le point de départ du délai de prescription, soit avant le 30 novembre 2020, ne peuvent donc avoir interrompu ledit délai, lequel n'avait pas encore couru.

En ce qui concerne les actes réalisés postérieurement au 30 novembre 2020, et plus particulièrement les dires réalisés les 26 août 2021, 1er octobre 201 et 22 juillet 2022, dans le cadre expertal, il n'existe, dans ces dires, aucune reconnaissance expresse du bailleur du droit à l'indemnité d'éviction du preneur.

Le seul fait, pour le bailleur, de participer, dans le cadre des opérations d'expertise, à l'évaluation de l'indemnité d'occupation en discutant, dans des dires, les éléments apportés par le preneur pour établir son préjudice, qui y est qualifié d'' «'éventuel'»notamment dans le dire n° 2 du bailleur', et de préciser les modalités de fixation de cette indemnité, ne vaut pas reconnaissance non équivoque, par le bailleur, du principe même de l'indemnité d'éviction et du caractère indubitablement acquis de cette dernière au profit du preneur ni, dès lors, renonciation du bailleur à invoquer l'éventuelle prescription de l'action en paiement qui pourrait être engagée, compte tenu des éléments arrêtés par l'expertise.

Le preneur n'établit dès lors pas que le délai de prescription biennale ait été valablement interrompu par une renonciation non équivoque de son droit.

En conséquence, il convient de déclarer irrecevable l'action du preneur en paiement de l'indemnité d'éviction introduite le 11 avril 2023, soit postérieurement au délai de prescription de deux ans, qui a expiré le 30 novembre 2022.

- Sur la recevabilité de demande de M. [G] en remboursement des charges

Concernant le remboursement des charges indûment payées, M. [G] précise que':

- la société Actarem vient aux droits de la société Point central 2';

- il n'est pas produit par la société Actarem l' «'acte de vente, non versé à la procédure, devant traiter des flux financiers issus des baux'»';

- en l'absence de production de cet acte, il faut considérer que la société Actarem est redevable des régularisations de charges antérieures et donc du remboursement des charges indûment payées';

- sa demande au titre des charges, antérieure à l'année 2018, n'est pas prescrite, puisque les conclusions du 19 novembre 2019 ont interrompu la prescription';

- la demande de répétition des sommes indûment payées après 2015 n'est donc pas prescrite.

Il conclut au débouté de l'appel incident de la société Actarem, qui porte sur des éléments qui n'avaient pas été demandés au juge de la mise en état, cette demande ne trouvant son fondement que dans l'article 905-2 du code de procédure civile et le risque, faute de réponse de l'appelant dans le délai d'un mois, de voir ses conclusions déclarées irrecevables.

La société Actarem fait valoir qu'elle n'est propriétaire des lieux que depuis janvier 2018, de sorte que M. [G] devait se rapprocher de l'ancien propriétaire pour la période antérieure à cette date. Il n'a donc aucune qualité à agir à son encontre.

Elle précise que l'assignation en remboursement des provisions sur charge a été délivrée le 13 avril 2023, toute demande relative à la période du 1er janvier 2018 au 13 avril 2018 à son encontre est prescrite, les conclusions en référé dont M. [G] se prévaut ne pouvant avoir interrompu la prescription, puisqu'elles ne comportaient pas de demande de condamnation au titre des sommes perçues, mais une demande de débouté.

1) sur la fin de non-recevoir tirée de la qualité à agir

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

En l'espèce, M [G] sollicite le remboursement des charges à la société Actarem, sans prendre en compte la date à laquelle cette dernière est devenue propriétaire de l'immeuble, et ce suivant acte notarié reçu le 25 janvier 2028.

Le preneur, qui a la charge d'invoquer les faits au soutien de sa prétention, doit donc, contrairement à ce qu'il prétend, établir les éventuelles clauses qui permettraient d'envisager un transfert des obligations et dettes à la charge du nouveau propriétaire et bailleur, dans le cadre de la cession. Or, il ne rapporte nullement cette preuve en l'espèce, alors même qu'il aurait pu, à supposer l'attestation notariale insuffisante comme il le prétend, solliciter la production de ladite pièce dans le cadre de la présente instance.

Ainsi, à juste titre le juge de la mise en état a-t-il estimé que M. [G] ne justifiait pas de son intérêt à agir à l'encontre de la société Actarem au titre des sommes qu'il aurait indûment versées à son précédent bailleur, avant la cession de l'immeuble intervenue en faveur de cette dernière société le 25 janvier 2018.

En conséquence, la décision entreprise est confirmée en ce qu'elle a déclaré irrecevables les demandes de M. [G] sur les charges réglées antérieurement au mois de janvier 2018 pour défaut du droit d'agir.

2) sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription concernant les demandes en restitution relatives aux charges payées sur la période de janvier 2018 au 13 avril 2018

S'agissant de la part des charges réclamées sur la période de janvier 2018 au 13 avril 2018, la cour n'est saisie que dans la limite de l'objet de la saisine du premier juge qui, au vu du dispositif des écritures reproduit dans son ordonnance, n'était saisi que d'une demande tendant à voir «'déclarer la demande en remboursement des provisions sur charges antérieures à 2018 irrecevable et à titre subsidiaire prescrite, et par conséquent l'en débouter'».

Ainsi, la société Actarem ne fait qu'affirmer avoir soulevé une fin de non-recevoir pour les charges postérieures à janvier 2018 et tenant à la prescription, sans le démontrer, ne produisant, en cause d'appel, même pas le jeu d'écritures présenté au juge de la mise en état.

Il n'est ainsi pas démontré que ce dernier aurait omis de statuer sur une fin de non-recevoir portant sur une demande en paiement relative aux charges postérieures à janvier 2018, ce que souligne justement M. [G].

La demande de la société Actarem tendant à la «'réformation de l'ordonnance en ce qu'elle n'aurait pas statué sur cette demande'» de ce chef est donc rejetée.

- Sur les dépens et accessoires

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, M. [G] succombant en ses prétentions, il convient de le condamner aux dépens d'appel.

Les chefs de la décision entreprise relatifs aux dépens et à l'indemnité procédurale sont confirmés.

M. [G] supportant la charge des dépens, il convient de le condamner à payer à la société Actarem la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de le débouter de sa demande d'indemnité procédurale.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME l'ordonnance du juge de la mise en état du 31 mai 2024, sauf en ce qu'elle a déclaré la demande de M. [G] en paiement d'une indemnité d'éviction irrecevable comme prescrite depuis le 1er mars 2021';

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT que le délai de prescription biennale a couru, sans avoir été ni interrompu ni suspendu, à compter du 30 novembre 2020';

En conséquence, DECLARE irrecevable, car prescrite, l'action en paiement de l'indemnité d'éviction formée par M. [G] ;

REJETTE la demande de la société Actarem visant à dire que le juge «'n'a pas statué sur la prescription de la demande de remboursement de charges formulée par M. [G] pour la période du 1er janvier au 13 avril 2018'» et à déclarer prescrite cette demande';

CONDAMNE M. [G] aux dépens d'appel';

CONDAMNE M. [G] à payer à la société Actarem la somme de 1'500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

LE DEBOUTE de sa demande d'indemnité procédurale.

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