CA Nancy, ch. jex, 24 avril 2025, n° 24/01433
NANCY
Arrêt
Autre
PARTIES
Demandeur :
My Money Bank (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Martin
Conseillers :
Mme Abel, Mme Girardot
Avocats :
Me Gerriet, SCP Nicolai et Prost
EXPOSE DU LITIGE
Par acte notarié reçu le 1er octobre 2012, la société GE MONEY BANK a consenti à M. [Y] [D] (de nationalité anglaise et domicilié [Adresse 2] Royaume-Uni) un prêt d'un montant de 120 000 euros, remboursable sur une durée de 300 mois au taux variable de 3,40% l'an, afin de financer l'acquisition d'une maison d'habitation sise à [Adresse 5], garanti par un privilège de prêteur de deniers publié et enregistré le 2 novembre 2012, volume 2012 V n°1014 au Service de publicité foncière d'Epinal.
Par courrier du 28 janvier 2016, la société GE MONEY BANK a mis M. [Y] [D] en demeure de s'acquitter des échéances échues et impayées à hauteur de 15 343,48 euros dans un délai de huit jours, sous peine de recouvrement forcé. La mise en demeure a été notifiée à M. [Y] [D] à son adresse au Royaume-Uni, après dépôt à parquet, par courrier recommandé avec avis de réception retourné le 24 mars 2016 mentionnant qu'il n'habitait pas à l'adresse indiquée, et a été transmise aux autorités compétentes du Royaume-Uni (Royal Cours of justice WC2A 2LL London) le 8 février 2016 aux fins de notification ou signification à M. [Y] [D].
Par courrier du 10 mars 2016, la société GE MONEY BANK s'est prévalue de la déchéance du terme du prêt, et a mis M. [Y] [D] en demeure de lui payer les sommes exigibles à hauteur de 136 067,07 euros. Le courrier du 10 mars 2016 a été notifié à M. [Y] [D] à son adresse au Royaume-Uni, après dépôt à parquet, par courrier recommandé avec avis de réception retourné le 9 avril 2016 mentionnant qu'il n'habitait pas à l'adresse indiquée, et a été transmis aux autorités compétentes du Royaume-Uni (Royal Cours of justice WC2A 2LL London) le 21 mars 2016 aux fins de notification ou signification à M. [Y] [D].
Des commandements de payer aux fins de saisie-vente ont été transmis aux autorités compétentes du Royaume-Uni aux fins de notification ou signification à M. [Y] [D] les 1er février 2018 (signifié par procès-verbal de recherches infructueuses à [Localité 4] le 9 février 2018), le 10 octobre 2019, le 5 août 2021 (signifié par procès-verbal de recherches infructueuses à [Localité 4] le 21 décembre 2021 suite au retour de non exécution des autorités compétentes britanniques le 17 novembre 2021 à défaut pour M. [Y] [D] de résider à l'adresse indiquée), ainsi que le 15 février 2023 (signifié par procès-verbal de recherches infructueuses à [Localité 4] le 27 février 2023).
Par acte de commissaire de justice ayant dressé procès-verbal de recherches infructueuses à [Localité 4] le 12 janvier 2022, la société MY MONEY BANK a fait délivrer à M. [Y] [D] un commandement de payer valant saisie immobilière du bien sis à [Adresse 5], cadastré section AD n°[Cadastre 3] lieudit " [Localité 8] " pour 14 ares et 20 centiares, pour avoir paiement de la somme de 164 018,56 euros (outre les intérêts contractuels de retard) en vertu du prêt notarié consenti le 1er octobre 2012. Le commandement valant saisie a été transmis par lettre recommandée avec demande d'avis de réception le 22 décembre 2021 aux autorités compétentes du Royaume-Uni (Royal Courts of justice, [Adresse 6]) afin de notification ou signification à M. [Y] [D].
Le commandement a été publié au service de la publicité foncière d'Epinal le 28 février 2022, volume 2022 S n°8.
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Par acte de commissaire de justice ayant dressé procès-verbal de recherches infructueuses le 27 avril 2022 à [Localité 4], la SA MY MONEY BANK a fait assigner M. [Y] [D] à comparaître à l'audience d'orientation du 1er juillet 2022 et l'a sommé de prendre connaissance du cahier des conditions de vente enregistré au greffe fixant la mise à prix à 25 000 euros. L'acte d'assignation a été transmis aux autorités compétentes du Royaume-Uni (Royal Courts of justice, [Adresse 6]) le 27 avril 2022 afin de notification ou signification à M. [Y] [D].
Selon attestation du 2 novembre 2022 retournée par courrier du 18 janvier 2023, le greffe de la cour de justice de Belfast a informé le commissaire de justice de l'absence de remise de l'acte à M. [Y] [D] au motif qu'il ne résidait pas à l'adresse indiquée.
La SA MY MONEY BANK a sollicité à titre principal la vente forcée de l'immeuble saisi à la mise à prix de 25 000 euros et de voir fixer le montant de sa créance en principal, intérêts majorés, intérêts capitalisés et accessoires à la somme de 164 018,56 euros, suivant décompte arrêté au 9 novembre 2021.
M. [Y] [D] n'a pas comparu et n'a pas été représenté en première instance.
Par jugement ordonnant la réouverture des débats du 26 janvier 2023, le juge de l'exécution a invité la SA MY MONEY BANK avant dire-droit à :
- justifier de sa qualité à agir,
- produire l'attestation relatant l'exécution de la demande de la signification ou de la notification de l'assignation destinée à M. [Y] [D] exigée par l'article 6 de la convention de La Haye relative à la signification et à la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale conclue le 15 novembre 1965,
- produire la copie exécutoire de l'acte fondant la présente procédure de saisie immobilière,
- produire les conditions générales du prêt acceptées par l'emprunteur,
- produire l'attestation de signification ou de notification et copie de l'acte signifié ou notifié exigée par l'article 10 du règlement (CE) 1393/2007 du 13 novembre 2007 relatif à la signification et à la notification dans les Etats membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale qui n'est pas produite en ce qui concerne la déchéance du terme et la mise en demeure préalable,
- formuler ses observations sur l'éventuelle prescription de son action, la régularité de la tentative de signification du commandement de payer valant saisie à une adresse différente de celle figurant dans la lettre prononçant la déchéance du terme et dans l'assignation et, plus généralement, formuler toutes observations utiles sur d'éventuelles conséquences de la non production des éléments sollicités.
La SA MY MONEY BANK a produit la seconde copie exécutoire de l'acte notarié fondant la procédure, et s'en est remise à son assignation.
Par jugement en date du 26 janvier 2024, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Epinal statuant en matière de saisie immobilière a :
- déclaré irrecevables les demandes de la société MY MONEY BANK,
- condamné la société MY MONEY BANK aux dépens.
Le juge a constaté que M. [Y] [D] demeurait au Royaume Uni, Etat lié par la Convention de La Haye du 15 novembre 1965 relative à la notification internationale des actes judiciaires et extra judiciaires en matière civile, et que s'il résultait de l'attestation de l'huissier mandaté pour remettre l'assignation que celle-ci avait été adressée le 27 avril 2022, à "The Master (Queen's Bench and Appeals), Royal Courts of Justice", autorité centrale désignée par l'Irlande du Nord pour recevoir les demandes de signification ou de notification en provenance d'un autre Etat contractant et y donner suite (selon l'article 2 de la Convention), en revanche, aucune attestation établie conformément à la formule modèle annexée à la Convention, en application de l'article 6 alinéa 1er, relatant l'exécution de la demande de signification et indiquant la forme, le lieu et la date de l'exécution ainsi que la personne à laquelle l'acte avait été remis, en application de l'article 6 alinéa 2, ou précisant le fait qui aurait empêché l'exécution de la demande, n'était produite malgré la réouverture des débats en ce sens.
Le juge a retenu à titre surabondant que la SA MY MONEY BANK ne justifiait pas venir aux droits de la société GE MONEY BANK.
Le jugement a été signifié à M. [Y] [D] le 19 juillet 2024 par acte de commissaire de justice ayant dressé procès-verbal de recherches infructueuses à l'adresse sise à [Adresse 5], et a été transmis le même jour aux autorités compétentes du Royaume-Uni (Royal Courts of Justice à Belfast, Irlande du Nord) aux fins de notification ou signification à M. [Y] [D] à l'adresse sise [Adresse 2] Royaume Uni.
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Le 15 juillet 2024, la SA MY MONEY BANK a formé appel du jugement tendant à son infirmation en tous ses chefs critiqués.
Par ordonnance en date du 19 juillet 2024, le président de la chambre de l'exécution a autorisé la SA MY MONEY BANK à assigner à jour fixe M. [Y] [D] à l'audience de plaidoiries de la chambre de l'exécution de la cour d'appel du 21 novembre 2024.
Par acte de commissaire de justice du 16 septembre 2024 attestant de la transmission aux autorités compétentes du Royaume-Uni (Royal Courts of Justice, Strand, Room E 16, WC2A, 2LL London) aux fins de notification ou signification à M. [Y] [D] de l'acte d'assignation à jour fixe à l'audience de la cour d'appel de Nancy du 21 novembre 2024 (comportant en annexe le jugement déféré, la déclaration d'appel, la requête et l'ordonnance autorisant l'assignation à jour fixe ainsi que le bordereau de pièces), auxquels il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SA MY MONEY BANK, appelante, demande à la cour sur le fondement de l'article R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution, de la convention de La Haye du 15 novembre 1965 et des articles 684 et suivants du code de procédure civile :
- de déclarer son appel recevable et bien fondé,
Y faisant droit,
- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement en date du 28 janvier 2024 du juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Epinal, statuant en matière de saisie immobilière,
Statuant à nouveau,
- de juger que la société MY MONEY BANK justifie de sa qualité à agir,
- de juger que les actes de saisie immobilière ont été régulièrement notifiés,
- de juger recevables les demandes de la societé MY MONEY BANK,
- de valider la procédure de saisie immobilière engagée par MY MONEY BANK en ce compris le cahier des conditions de vente déposé au greffe du juge de l'exécution immobilière du tribunal judiciaire d'Epinal,
- de fixer le montant de la créance du poursuivant en principal, intérêts majorés, intérêts
des intérêts, accessoires, à la somme de 164 018,56 euros, suivant décompte arreté au 9 novembre 2021, sous réserve des intérêts postérieurs, le tout comme mentionné dans le cahier des conditions de vente,
- de juger que les intérêts continueront à courir jusqu'à la distribution du prix de vente à intervenir et au plus tard à la date prévue par l'article R. 334-3 complétant l'article R. 334-2 du code des procédures civiles d'exécution,
- de déclarer en frais privilégiés de vente, les dépens de la présente instance,
- de juger que la vente sera ordonnée conformément à l'article R. 322-15 du code des procédures civiles d'exécution, et poursuivie selon les articles R. 322-26 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,
- de fixer le montant de la mise à prix à la somme de 25 000 euros,
- de dire que la vente forcée aura lieu aux conditions générales des clauses du cahier des conditions de vente,
- de désigner, conformément à l'article R. 322-26 du code des procédures civiles d'exécution, l'étude PRAECO (Picot - Hazard - Toussaint), huissiers de justice associés à [Localité 7] qui a établi le procès-verbal de description des biens, pour assurer une visite des biens saisis en se faisant assister, si besoin est, d'un serrurier et de la force publique,
- de dire que ledit huissier de justice se fera assister lors de l'une des visites de l'expert qui a établi notamment les diagnostics amiante et termites (et éventuellement plomb), afin que ce dernier puisse les réactualiser si nécessaire,
- de dire que la décision à intervenir, désignant l'huissier de justice pour assurer les visites, devra être signifiée trois jours au moins avant les visites, aux occupants des biens saisis,
- d'ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de vente, qui comprendront le coût des visites et des divers diagnostics (ou réactualisation), dont distraction au profit de Me Virginie Gerriet, avocat aux offres de droit.
Au soutien de ses demandes, la SA MY MONEY BANK fait valoir en substance :
- que suivant procés-verbal des délibérations de l'assemblée générale mixte en date du 28 mars 2017, les associés de la société GE MONEY BANK ont décidé de transformer la société en société anonyme et de procéder à son changement de dénomination sociale en « MY MONEY BANK '' ; qu'il s'agit donc de la même personne morale, de sorte qu'elle justifie de sa qualité à agir ;
- que les conditions de l'article 688 du code de procédure civile et de l'article 15 de la Convention de La Haye du 15 novembre 1965 sont remplies ; que l'huissier de justice a dressé l'attestation de transmission du commandement de payer valant saisie et de l'assignation à l'entité requise au Royaume-Uni, et que l'assignation a été traduite en langue anglaise pour permettre la signification ; qu'elle produit l'attestation de notification de l'assignation qui a été délivrée à M. [Y] [D] par l'entité requise le 18 janvier 2023, conformément à l'article 6 de la convention de La Haye.
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M. [Y] [D], assigné par acte de commissaire de justice transmis directement aux autorités étrangères compétentes le 16 septembre 2024, n'a pas constitué avocat.
L'affaire appelée à l'audience du 21 novembre 2024 a fait l'objet d'un renvoi à la mise en état.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 5 mars 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la qualité à agir de la SA MY MONEY BANK
Il y a lieu de constater que le créancier poursuivant justifie d'un changement de dénomination sociale acté par procès-verbal de délibération de l'assemblée générale mixte du 23 mars 2017, qui prévoit expressément que cette transformation n'entraîne pas la création d'une personne morale nouvelle.
Aussi, il n'en résulte aucun défaut d'intérêt ou de qualité à agir du créancier.
Sur la régularité de la procédure de première instance
Au préalable, il convient de retenir que selon l'article 1er alinéa 2 de la convention de La Haye du 15 novembre 1965 relative à la signification et à la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale, applicable entre la France et le Royaume-Uni (Grande Bretagne et Irlande du Nord), ladite convention ne s'applique pas lorsque l'adresse du destinataire de l'acte judiciaire ou extrajudiciaire à transmettre à l'étranger est inconnue.
Aussi, en l'absence de convention bilatérale particulière, et selon l'article 683 du code de procédure civile, les règles de droit commun du code de procédure civile relatives aux notifications adressées au défendeur résidant à une adresse inconnue à l'étranger doivent être respectées.
En l'espèce, il ressort à la fois des avis de réception des courriers recommandés adressés à M. [Y] [D] les 24 mars 2016 et 9 avril 2016, que du retour des autorités compétentes britanniques de non exécution relatif à la signification d'un commandement de payer aux fins de saisie vente le 17 novembre 2021, que M. [Y] [D] ne réside plus à l'adresse sise [Adresse 2], figurant à l'acte notarié dressé le 1er octobre 2012, de sorte que son adresse demeure inconnue à l'étranger depuis 2016 au jour de son assignation à comparaître à l'audience d'orientation prévue le 1er juillet 2022.
Par ailleurs, il ressort des tentatives de signification des actes à M. [Y] [D], à l'adresse du bien saisi sis à à [Adresse 5], cadastré section AD n°[Cadastre 3] lieudit " [Localité 8] ", ayant donné lieu à l'établissement de procès-verbaux de recherches infructueuses les 9 février 2018, 21 décembre 2021 et le 12 janvier 2022, que M. [Y] [D] ne réside pas en France au jour de son assignation à l'audience d'orientation.
Aussi, les articles 684 à 688 du code de procédure civile trouvaient à s'appliquer en l'espèce en ce qui concerne la signification ou la notification à M. [Y] [D] de l'assignation à comparaître à l'audience d'orientation, dans la mesure où son adresse au Royaume-Uni était inconnue.
L'article 688 du code de procédure civile dispose que " la juridiction est saisie de la demande formée par assignation par la remise qui lui est faite de l'acte complété par les indications prévues à l'article 684-1 ou selon le cas, à l'article 687-1, le cas échéant accompagné des justificatifs des diligences accomplies en vue de sa notification au destinataire. (...). "
Or, il ressort des dispositions combinées des articles 684 et 685 du code de procédure civile, que lorsqu'il est certain que le défendeur réside dans un pays étranger, en l'absence de convention internationale applicable autorisant l'huissier ou le greffier à transmettre directement l'acte à son destinataire ou à une autorité compétente, une copie de l'acte destiné à lui être notifié est remise au procureur de la République en double exemplaire, qui les fait parvenir sans délai aux fins de transmission au ministre de la justice.
En outre, selon l'article 686 dudit code et dans tous les cas, le greffier ou l'huissier chargé de la notification doit, le jour même de la remise de la copie de l'acte au parquet, ou au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, expédier au destinataire, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, une copie certifiée conforme de l'acte à notifier.
Par suite, selon l'article 687-1 dudit code, s'il ressort des éléments transmis par l'autorité requise au procureur de la République ou les services postaux que le destinataire n'habite pas à l'adresse indiquée, et que celui-ci n'a plus ni domicile ni résidence connus, l'huissier de justice relate dans l'acte les indications ainsi fournies et procède à la signification comme il est dit aux alinéas 2 à 4 de l'article 659.
Aussi, dans un tel cas excluant l'application de la convention de la Haye du 15 novembre 1965 relative à la signification et à la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale (en l'absence d'adresse connue de M. [Y] [D] au Royaume-Uni, selon son article 1er alinéa 2 précité), il appartenait à la SA MY MONEY BANK de produire à la juridiction de première instance les justificatifs attestant que l'assignation à comparaître avait été transmise selon les prescriptions des articles 684 à 687 du code de procédure civile, correspondant à la remise de l'acte d'assignation à parquet en double exemplaire et à l'expédition d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception à la dernière adresse connue au Royaume-Uni, contenant la copie certifiée conforme de l'assignation à notifier.
Cependant, force est de constater en l'espèce que la SA MY MONEY BANK n'a pas remis à la juridiction saisie en première instance les justificatifs de telles diligences accomplies en vue de la notification à M. [Y] [D] de l'assignation en justice.
En outre, il y a lieu de constater que la SA MY MONEY BANK n'a pas remis au greffe du juge de l'exécution, conformément à l'article 687-1 du code de procédure civile, l'acte du commissaire de justice devant compléter l'assignation et relatant les indications transmises par l'autorité requise au procureur de la République ou par les services postaux, ainsi que le cas échéant sa signification à M. [Y] [D] comme il est dit aux alinéas 2 à 4 de l'article 659 (en cas de retour d'exécution attestant que le destinataire n'habite pas à l'adresse indiquée au Royaume-Uni, et que celui-ci n'a plus ni domicile ni résidence connus, tel que ressortant de l'attestation de l'autorité requise du 2 novembre 2022), comportant notamment l'obligation supplémentaire, à peine de nullité de l'acte, de l'envoi de la copie du procès-verbal et de l'acte à signifier à la dernière adresse connue du destinataire par courrier recommandé avec demande d'avis de réception, ainsi qu'un avis par lettre simple de l'accomplissement de cette formalité.
En effet, il y a lieu de constater que la notification de l'assignation à M. [Y] [D] par acte de commissaire de justice ayant dressé procès-verbal de recherches infructueuses à l'adresse du bien saisi sis [Localité 4] (88) est intervenue le 27 avril 2022, soit le même jour que l'acte de transmission de l'assignation aux autorités compétentes du Royaume-Uni aux fins de signification, sans attendre le retour d'exécution de l'autorité requise.
Par suite, le défaut de remise au greffe du juge de l'exécution d'une assignation à l'audience d'orientation accompagnée des diligences accomplies en vue de sa notification à M. [Y] [D] selon les prescriptions des articles 684 à 687 du code de procédure civile, et complétée par les indications prévues à l'article 687-1, constitue une irrégularité entachant l'acte introductif d'instance.
Or, selon l'article R. 311-10 du code des procédures civiles d'exécution, la nullité des actes de la procédure de saisie immobilière est régie par la section IV du chapitre II du titre V du livre Ier du code de procédure civile.
En effet, l'article 114 du code de procédure civile dispose que, " aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public. "
En l'espèce, la délivrance de l'assignation à comparaître à l'audience d'orientation à une adresse inconnue à l'étranger sans respecter la procédure prévue au code de procédure civile fait grief à M. [Y] [D], en ce que la remise de l'acte à signifier à parquet est suivie de l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'adresse du destinataire au Royaume-Uni, et que l'acte du commissaire de justice tendant à dresser procès-verbal de recherches infructueuses à réception du retour de non exécution par les autorités étrangères compétentes doit également être envoyé à la dernière adresse connue du destinataire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, suivie d'un avis par lettre simple.
Il en résulte que la procédure applicable prévue par les articles 684 à 688 du code de procédure civile concernant la signification ou la notification à M. [Y] [D] de l'assignation à comparaître à l'audience d'orientation avait pour effet d'accroître les possibilités de remise de la convocation en justice.
Or, le défaut de comparution de M. [Y] [D] à l'audience d'orientation a pour conséquence l'irrecevabilité des contestations et demandes incidentes soulevées postérieurement et portant sur des actes de la procédure de saisie immobilière antérieurs à celle-ci, selon l'article R. 311-5 du code des procédures civiles d'exécution.
Il en résulte que le grief subi par M. [Y] [D] et résultant de l'absence de respect de la procédure applicable tendant à la remise de l'assignation est caractérisé.
Dans ces conditions, il convient de prononcer la nullité de l'assignation, qui a pour conséquence l'annulation du jugement d'orientation déféré.
Or, la dévolution ne peut jouer lorsque l'annulation du jugement résulte de l'annulation de l'acte introductif d'instance.
Dès lors, l'appel formé à l'encontre du jugement annulé ne saisit la cour d'aucune demande.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut, prononcé par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
CONSTATE que l'acte introductif d'instance est entaché d'une irrégularité,
PRONONCE la nullité de l'assignation à comparaître à l'audience d'orientation,
CONSTATE l'annulation du jugement d'orientation déféré,
CONSTATE que l'appel formé par la SA MY MONEY BANK est privé d'effet dévolutif,
Y ajoutant,
RENVOIE les parties à mieux se pourvoir,
CONDAMNE la SA MY MONEY BANK aux dépens de première instance et d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur MARTIN, président de chambre à la cour d'appel de NANCY, et par Madame Christelle CLABAUX-DUWIQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.