CA Orléans, ch. civ., 24 avril 2025, n° 22/01786
ORLÉANS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Peyj (SCI)
Défendeur :
Transterrassement Centre (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Collomp
Vice-président :
M. Sousa
Conseiller :
Mme Grua
Avocats :
Me Fortat, Me Baudry, Walter & Garance Avocats
FAITS ET PROCÉDURE
En vue de la construction d'un bâtiment à usage de concession automobile, la SCI Peyj [J] a confié à la société Transterrassement Centre, le 15 mai 2017, la réalisation des travaux du lot n° 1 « Terrassement et VRD » pour le prix forfaitaire de 363 580 euros HT et le lot n° 2 « Maçonnerie Gros oeuvre » pour le prix forfaitaire de 183 088,12 euros HT.
La société Transterrassement Centre a sous-traité à la société Eiffage Route Île-de-France Centre (la société Eiffage) la mise en oeuvre des enrobés du garage pour un prix de 81 905 euros TTC. Les travaux d'enrobé ont été réalisés par la société Eiffage, mais sa facture n'a pas été réglée.
Le maître d'ouvrage faisant état de malfaçons, une expertise a été ordonnée en référé le 10 juillet 2018. Le rapport d'expertise a été déposé le 25 mai 2020.
Par actes d'huissier de justice des 3 et 5 juin 2019, la société Eiffage a fait assigner la SCI Peyj [J] et la société Transterrassement Centre devant le tribunal de grande instance de Tours aux fins de paiement du solde de sa facture.
Par ordonnance du 8 octobre 2020, le juge de la mise en état a condamné la société Transterrassement à verser a la société Eiffage une provision de 24 154,60 ' HT et condamné la SCI Peyj [J] à payer à la société Transterrassement une somme de 56 000 ' à titre de provision.
Par jugement en date du 12 mai 2022, le tribunal judiciaire de Tours a :
- déclaré irrecevable l'action directe exercée par la société Eiffage Route Île-de-France Centre à l'encontre de la SCI Peyj [J] ;
- débouté la société Eiffage Route Île-de-France Centre de sa demande en paiement de la somme de 78 166,50 euros formée à l'encontre de la SCI Peyj [J] ;
- condamné en deniers ou quittances la société Transterrassement Centre à payer à la société Eiffage la somme de 74 154,60 euros HT au titre du contrat de sous-traitance du 9 novembre 2017 ;
- dit que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du 18 octobre 2018 ;
- ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis au moins une année entière dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
- déclaré sans objet la demande en garantie formée par la société Transterrassement Centre ;
- condamné la SCI Peyj [J] à payer à la société Transterrassement Centre la somme de 10 799,43 euros TTC, après déduction de la somme de 50 396 euros réglée en exécution de l'ordonnance du juge de la mise en état du 8 octobre 2020, au titre du marché de travaux VRD, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
- condamné la SCI Peyj [J] à payer a la société Transterrassement Centre la somme de 8 663,45 euros TTC, au titre du marché de travaux « Gros Oeuvre », avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
- ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis au moins une aimée entière dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
- débouté la société Transterrassement Centre de sa demande en garantie formée à l'encontre de la SCI Peyj [J] ;
- débouté la SCI Peyj [J] de ses demandes reconventionnelles et de sa demande en compensation légale ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- condamné la SCI Peyj [J] à payer à la société Transterrassement une indemnité pour frais irrépétibles de 4 000 euros ;
- condamné la société Transterrassement à payer à la société Eiffage une indemnité pour frais irrépétibles de 4 000 euros ;
- condamné in solidum la société Transterrassement et la SCI Peyj [J] aux dépens comprenant les dépens de l'instance en référé, ceux de l'incident devant le juge de la mise en état (RG 19/1840) et le coût de l'expertise judiciaire.
Par déclaration en date du 22 juillet 2022, la SCI Pejy [J] a interjeté appel du jugement en ce qu'il l'a :
- déboutée de ses demandes reconventionnelles tendant à condamner la société Transterrassement à verser diverses sommes pour : réfaction à valoir sur son marché de travaux lot n° 1 (non-conformité contractuelle du matériau de remblai), pénalités de retard, travaux d'achèvement du local technique prévu au marché mais non réalisé (lot n° 2), travaux d'achèvement de la prestation TGBT prévue au marché mais non réalisée (lot n° 2) ;
- déboutée de sa demande tendant à voir ordonner avant dire droit un complément d'expertise pour donner tous éléments techniques permettant de chiffrer les travaux pour achever ceux prévus au marché de Transterrassement mais non réalisés (local technique et TGBT) ;
- déboutée de sa demande de compensation ;
- condamnée à des frais irrépétibles et aux dépens comprenant ceux du référé, de l'instance au fond et au coût de l'expertise.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 8 septembre 2023, la SCI Peyj [J] demande à la cour de :
- infirmer le jugement en ses chefs visés par la déclaration d'appel ;
Statuant à nouveau par l'effet dévolutif de l'appel :
- condamner la société Transterrassement à lui verser une somme de 21 352,36 euros HT soit 25 622,83 euros TTC à titre de réfaction à valoir sur son marché de travaux correspondant au lot n° 1, subséquente à une non-conformité contractuelle sur le matériau de remblai employé ;
- condamner la société Transterrassement à lui verser une somme de 19 506,98 euros au titre des pénalités contractuelles de retard dans le cadre du marché de travaux correspondant au lot n° 1 ;
- condamner la société Transterrassement à lui verser une somme de 9 007,93 euros HT soit 10 809,52 euros TTC au titre des travaux d'achèvement du local technique non réalisé au mépris du marché de travaux correspondant au lot n° 2 ;
- condamner la société Transterrassement à lui verser une somme de 5 150 euros HT soit 6 180 euros TTC au titre des travaux d'achèvement de la prestation correspondant au local TGBT non réalisée au mépris du marché de travaux correspondant au lot n° 2 ;
En tant que de besoin, entendre l'expert pour obtenir les éclaircissements suffisants permettant à la cour de statuer sur les demandes reconventionnelles formulées par elle au titre du lot n° 2, à savoir :
. donner tous éléments techniques et de faits permettant de chiffrer le montant des travaux pour la construction du local technique initialement prévue au marché de la société Transterrassement mais non réalisé par cette dernière ;
. donner tous éléments techniques et de faits permettant de chiffrer le montant des travaux pour la construction du local TGBT initialement prévue au marché de la société Transterrassement mais non réalisé par cette dernière ;
- condamner la société Transterrassement à lui verser la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance ;
- condamner la société Transterrassement aux dépens de première instance dont les honoraires d'expertise judiciaire établis à la somme de 10 809,92 euros TTC ;
- débouter la société Transterrassement de son appel incident portant sur les dépens de première instance, en ce compris ceux du référé, de l'instance au fond et au coût de l'expertise ;
- débouter la société Transterrassement de son appel incident tendant à la condamnation de la société Peyj [J] à la somme de 8 000 ' au titre des frais irrépétibles de première instance en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société Transterrassement à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance ;
- condamner la société Transterrassement aux dépens.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 31 mai 2023, la société Transterrassement Centre demande à la cour de :
- confirmer les chefs de jugement entrepris par lesquels le tribunal a :
. débouté la société Peyj [J] de ses demandes reconventionnelles tendant à condamner Transterrassement à verser diverses sommes pour : réfaction à valoir sur son marché de travaux lot n° 1 (non-conformité contractuelle du matériau de remblai), pénalités de retard, travaux d'achèvement du local technique prévu au marché mais non réalisé (lot n° 2), travaux d'achèvement de la prestation TGBT prévue au marché mais non réalisée (lot n° 2) ;
. débouté la société Peyj [J] de sa demande tendant à voir ordonner avant-dire droit un complément d'expertise pour donner tous éléments techniques permettant de chiffrer les travaux pour achever ceux prévus au marché de Transterrassement mais non réalisés (local technique et TGBT) ;
. débouté la société Peyj [J] de sa demande de compensation ;
- infirmer les chefs de jugement entrepris par lesquels le tribunal a :
. condamner la société Transterrassement à des frais irrépétibles ;
. condamner in solidum la société Transterrassement aux dépens comprenant ceux du référé, de l'instance au fond et au coût de l'expertise ;
Statuant à nouveau,
- condamner la société Peyj [J] aux entiers dépens de première instance, en ce compris ceux du référé, de l'instance au fond et au coût de l'expertise ;
- condamner la société Peyj [J] à lui payer la somme de 8 000 ' au titre des frais irrépétibles de première instance, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- à titre subsidiaire, et sur le seul point des pénalités de retard, les réduire à 1 ' ;
Sur les frais irrépétibles et les dépens de l'appel,
- condamner la société Peyj [J] à lui payer la somme de 4 000 ' en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société Peyj [J] aux dépens.
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.
MOTIFS
I- Sur la responsabilité de la société Terrassement Centre
A- Sur la non-conformité du matériau de remblai
Moyens des parties
La SCI Peyj [J] soutient qu'alors qu'elle sollicitait la condamnation de la société Transterrassement à réparer une non-conformité contractuelle, le tribunal qui a reconnu son existence l'a néanmoins déboutée au motif que cette non-conformité n'a engendré aucun désordre et qu'il a reçu un avis favorable du bureau de contrôle ; que l'entrepreneur est, en application de l'article 1147 du code civil ancien, tenu d'une obligation de résultat qui lui impose de réaliser des travaux conformes au contrat ; qu'il ne lui est pas possible de s'exonérer de son obligation d'exécution conforme sous le prétexte que les travaux réalisés recevraient l'avis favorable du bureau de contrôle ; que la société Transterrassement s'était contractuellement engagée à fournir et mettre en 'uvre remblais pierreux 0/80 sur 40 cm d'épaisseur pour un prix de 95 400 euros HT au titre du lot n° 1 ; qu'en cours de chantier, la société Transterrassement a mis en 'uvre un autre matériau remblais qui ne présentait pas les mêmes caractéristiques mécaniques ; qu'ainsi, le bureau de contrôle était amené à prononcer un avis « sous observation » sur cette modification décidée par la société Transterrassement sans accord préalable du maître d'ouvrage, ni information du maître d'ouvrage, au mépris de l'étude de sol et surtout du marché de travaux ; que la modification de matériaux est donc caractérisée, de sorte que la société Transterrassement a commis une faute dans l'exécution de son contrat ; que cette faute ouvre au maître d'ouvrage la possibilité de se prévaloir d'une réduction du prix conformément aux dispositions de l'article 1223 du code civil ; que le maître d''uvre a évalué l'économie réalisée par la société Transterrassement à hauteur de 21 352,36 euros HT ; qu'elle est donc bien fondée à appliquer une réduction du prix à due concurrence de ce montant en application des stipulations du marché, d'une part, et des dispositions de l'article 1217 du code civil d'autre part ; que la Cour de cassation considère que, lorsque le constructeur réalise un ouvrage non conforme aux prescriptions contractuelles, notamment en mettant en 'uvre unilatéralement un matériau différent de celui convenu, alors celui-ci engage sa responsabilité contractuelle de droit commun, et ce même en l'absence de préjudice ; que la conclusion d'un marché à forfait n'a pas pour conséquence d'empêcher l'engagement de la responsabilité du constructeur du fait d'une mauvaise exécution du contrat ; que la cour infirmera ce chef de jugement et fera droit à sa demande tendant à la condamnation de la société Transterrassement au règlement de la somme de 21 352,36 euros HT, soit 25 622,83 euros TTC.
La société Transterrassement Centre réplique que le tribunal a justement débouté l'appelante de sa demande au motif que la substitution du matériau de remblai initialement prévu, l'avait été sans réserve de la part de la société Peyj [J] et avec la validation du bureau de contrôle Veritas mandaté par la société Peyj [J] et sans moins-value de la qualité de l'ouvrage ; qu'un avis sur l'ouvrage a été émis par le bureau Veritas en date du 11 octobre 2017, postérieurement à son avis du 10 octobre 2017, levant ainsi les observations émises sur ledit remblai ; que l'expert a donc justement considéré que le support avait bien été accepté en l'état et qu'il n'y a aucun désordre ni aucune moins-value à constater ; que l'expert ajoute surtout que le contrat est un marché passé à prix global et forfaitaire avec une obligation de résultat, de sorte que l'économie présumée sur le poste des remblais ne peut pas être déduite du décompte général définitif ; qu'en tout état de cause, les matériaux mis en 'uvre pour réaliser le remblai sont parfaitement conformes au marché de travaux, à tout le moins en raison de l'avis favorable sur les matériaux employés pour le remblai donné par le bureau de contrôle Veritas, le 11 octobre 2017 ; qu'en l'absence de préjudice, il ne saurait donc y avoir une quelconque sanction au prétendu manquement d'une obligation de conformité ; que le manquement est d'autant moins avéré qu'un accord était intervenu entre les parties sur les matériaux à utiliser qui sont d'ailleurs par ailleurs conformes à ce qui avait été prévu ; qu'en conséquence, aucun défaut de conformité ne pourrait être retenu par la cour d'appel qui ne pourra que confirmer le jugement entrepris et débouter la société Peyj [J] de sa demande complémentaire au titre d'une réduction du prix à hauteur d'une somme de 21 352,36 ' HT (25 622,83 ' TTC).
Réponse de la cour
L'article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
L'article 1231-1 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
Aux termes de l'article 1231-2 du code civil, les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé.
L'article 1er du contrat de marché à forfait du 15 mai 2017 stipule :
« L'entreprise signataire du marché s'engage à exécuter, pour le compte du maître de l'ouvrage, les travaux de terrassements voirie réseaux divers selon son devis du 8 mars 2017 signé par le maître de l'ouvrage, selon les documents du dossier et ci-après : les conditions générales et particulières du présent marché, ses éventuels avenants, le devis descriptif détaillé, les plans et dessins déterminants l'ouvrage et les travaux à réaliser ».
L'article 8 du contrat relatif à la modification du contrat stipule :
« Il ne sera apporté aucune modi'cation au marché pour travaux supplémentaires, changement des matériaux, etc., sans l'accord écrit des deux parties, régularisé au moyen d'un avenant indiquant les incidences éventuelles sur les prix, acompte complémentaire, délai convenu, etc ».
Le devis de la société Transterrassement Centre accepté par le maître d'ouvrage prévoyait la fourniture et mise en place de remblais pierreux 0/80 sur 40 cm sur une superficie de 10 600 m².
Le 10 octobre 2017, le bureau de contrôle Veritas a fait les observations suivantes après examen des documents d'exécution :
« Le matériau d'apport ne béné'cie pas des caractéristiques indiqués dans la conception de la forme établis par le géotechnicien.
Pour rappel : Apport d'une GNT 0/60 à 0/80 mm sur une épaisseur minimum de 40 cm. Sous bâtiment, une fermeture en 0/31.5 sera réalisée sur au moins 10 cm d'épaisseur (soit une épaisseur totale de couche de forme de 50 cm).
Par ailleurs, les matériaux concassés doivent présenter une absence de sulface (
En l'absence de justification, il existe un risque de gon'ement pouvant entraîner des désordres sur les structures de voiries et de dallage ».
La société Transterrassement se prévaut d'un avis conforme du bureau Veritas en date du 11 octobre 2017. Toutefois, si cet avis est mentionné dans le rapport d'expertise judiciaire, il n'est pas produit aux débats. Surtout, le bureau de contrôle Veritas était chargé de vérifier la conformité de l'ouvrage aux normes, et non de se prononcer sur une non-conformité de l'ouvrage aux stipulations contractuelles. Or la conformité de l'ouvrage aux normes de construction ne peut établir à elle seule le respect par le constructeur de la convention la liant au maître d'ouvrage.
Ainsi, nonobstant la conformité de l'ouvrage aux normes de construction, le bureau de contrôle Veritas a constaté que le matériau de remblai utilisé ne présentait pas les mêmes caractéristiques que celui prévu par le géotechnicien, de sorte qu'il n'est également pas conforme à celui prévu au devis de la société Transterrassement Centre.
Par courrier du 12 mars 2018, l'architecte chargé d'une mission d'assistance au maître d'ouvrage a également signalé au constructeur la non-conformité contractuelle en ces termes :
« Votre devis référencé dans le marché V.R.D. précise article II « travaux préparatoires » poste 7 :
Fourniture et mise en place de matériaux pierreux.
Il s'avère que le matériau que vous avez mis en 'uvre, le béton concassé, appelé par le bureau de contrôle Veritas, « matériau de récupération », n'est pas conforme ni à votre devis, ni au CCTP, ni aux préconisations de l'entreprise de sondage SOGBO.
Sur votre situation n° 3 du 17 juillet 2017, j'avais appliqué une réfaction provisoire en attente d'un entretien avec le maître d'ouvrage.
Sur site, suite à votre demande et après discussion Monsieur [J] m'a demandé d'établir le bon de paiement au montant initial de votre situation n° 3, pour un montant de TTC 85 634,28. Je me suis exécuté.
Après différents entretiens avec les maîtres d'ouvrage, ces derniers m'ont donné les prix des fournitures, ce qui m'a permis de calculer la moins-value qui s'élève à : HT 21 352,36 ' ».
L'architecte mandaté par le maître d'ouvrage a ainsi également constaté le défaut de mise en 'uvre du matériau de remblai prévu au devis et au cahier des clauses techniques particulières, et la société Transterrassement Centre ne conteste pas ce point.
La société Transterrassement ne justifie d'aucun avenant écrit portant accord des parties pour procéder à la modification du matériau de remblai, et comportant, aux termes de l'article 8 du contrat précité, les incidences sur le prix du marché. Ce faisant, la société Transterrassement a procédé à une modification unilatérale du contrat, en violation des règles du marché, ce qui établit l'existence d'une faute contractuelle.
L'architecte a calculé la moins-value résultant de l'utilisation de matériaux de récupération, d'un coût de 9,54 euros la tonne, au lieu de matériaux pierreux tels que prévus au devis, d'un coût de 14,50 euros la tonne. Cette moins-value s'élève à la somme de 21 352,64 euros, et l'intimé ne produit aucun élément propre à contredire les prix des matériaux retenus pour ce calcul.
Il est donc démontré que la faute commise par la société Transterrassement Centre a causé un préjudice à la SCI Peyj [J] qui a payé un prix englobant la fourniture et mise en place de matériaux de remblai plus onéreux que celui effectivement posé sans son accord préalable. Le caractère forfaitaire du prix n'autorisait nullement le constructeur à modifier unilatéralement le type de matériau devant être posé conformément à l'accord des parties.
La SCI Peyj [J] peut ainsi obtenir réparation du préjudice causé par la société Transterrassement Centre sans qu'il ne soit exigé que la non-conformité aux stipulations contractuelles ait causé un dommage à l'ouvrage, lequel serait susceptible de relever des garanties légales du constructeur.
En conséquence, la société Transterrassement Centre sera condamnée à payer à la SCI Peyj [J] la somme de 21 352,36 euros HT soit 25 622,83 euros TTC en réparation du préjudice subi, et le jugement sera infirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande formée à ce titre.
B- Sur les travaux inexécutés
Moyens des parties
La SCI Peyj [J] explique la société Transterrassement n'a pas achevé ses prestations au titre du lot n° 2 ; qu'elle a préféré se délier de ses obligations en appliquant unilatéralement une moins-value à son marché pour un montant de 3 246 euros HT pour la réalisation du local technique et de l'armoire TGBT, alors que le montant des travaux à réaliser pour pallier à la défaillance de la société Transterrassement est d'un coût de 14 157,93 euros HT ; qu'elle a exposé la somme totale de 10 809,52 euros TTC pour réaliser le local technique en lieu et place de la société Transterrassement ; que l'expert a refusé d'analyser ces factures par comparaison avec le prix appliqué en réfaction par la société Transterrassement au seul motif que les prestations ne sont pas comparables ; que ce raisonnement est inepte puisque, de toute évidence, la société Transterrassement pouvait retenir dans sa décomposition une somme totale moindre que n'importe quel autre tiers au chantier en considération de la masse totale des travaux contractés et de l'ampleur du chantier ; que l'existence d'un écart de prix ne peut pas conduire, pour ce seul motif, au rejet de sa demande, alors que les travaux sont similaires ; qu'il n'a pas été contesté en cours d'expertise ni par l'expert judiciaire que le local technique a été réalisé, de sorte que qu'elle est fondée à solliciter la réparation de son préjudice à due concurrence du montant des travaux réglés pour réaliser le local technique ; qu'en ce qui concerne l'armoire TGBT, la situation est identique que pour le local technique en ce que la société Transterrassement a unilatéralement décidé de s'exonérer de son obligation de réaliser ladite armoire en imposant une moins-value sur son marché de travaux ; que la situation diffère néanmoins en ce qu'elle se trouve contrainte, compte tenu d'une erreur imputable à la société Transterrassement, d'envisager à grands frais la réalisation d'un dispositif technique permettant d'isoler la nourrice des équipes électriques qui la jouxte ; qu'en effet, la nourrice d'eau est à proximité immédiate d'une armoire électrique, ceci en raison d'un défaut de réalisation imputable à la société Transterrassement, tel qu'il a été dénoncé en cours de chantier ; que cette configuration contraint tout intervenant à fabriquer un dispositif sur mesure pour isoler la nourrice d'eau et pallier la défaillance de la société Transterrassement ; que la société Transterrassement qui en est parfaitement consciente a préféré appliquer spontanément une moins-value à son marché à due concurrence de la réalisation du local TGBT pour éviter de réparer les conséquences de la malfaçon commise à l'occasion des travaux ; que la demande de complément d'expertise a été formulée en tant que de besoin si la cour estimait ne pas disposer d'éléments suffisants pour pallier l'ineptie du raisonnement de l'expert suivant lequel le seul écart de prix justifierait l'existence de prestations distinctes ; que le placard TGBT ne peut être réalisé que sous réserve d'isoler préalablement l'eau de l'électricité, et c'est précisément ce qui a été chiffré par l'entreprise Barateau pour un montant de 6 180 euros TTC ; que si ces travaux ont été rendus nécessaires, ce n'est pas parce qu'ils étaient initialement prévus au marché mais parce qu'ils ont été rendus nécessaires compte tenu des non-conformités et malfaçons affectant les prestations réalisées par Transterrassement ; que cette somme sera donc mise au débit de la société Transterrassement, de sorte que la cour infirmera le chef de jugement entrepris.
La société Transterrassement Centre explique que dans le cadre du marché de travaux, il était prévu un local technique et d'une armoire TGBT ; que l'expertise a permis de constater que les prestations avaient été respectées à l'exception des travaux d'achèvement sur le local technique et sur l'armoire TGBT ; que pour tenir compte de cette intervention de la société Barateau, l'expert judiciaire a opéré sur le marché de travaux une réfaction de prix pour un montant de 4 846 ', refusant d'aller plus loin et de suivre les allégations de la société Peyj [J] au titre des deux autres factures invoquées ; que l'expert a justifié le rejet des factures BM Maçonnerie et EURL Vauguet au motif que les prestations ne sont pas comparables à celles contractées par la société Transterrassement, et le tribunal n'a pu que suivre la position de l'expert ; que l'expert n'a soulevé aucune sous-évaluation du prix fixé par la société Transterrassement et accepté par la société Peyj [J], et n'a pas même relevé la nécessité de procéder à la totalité des travaux devisés puis facturés par les sociétés BM Maçonnerie et EURL Vauguet ; qu'elle ne saurait être condamnée à une somme supérieure à ce que prévoit le contrat régularisé avec la société Peyj [J] elle-même, et à ce titre, le préjudice de cette dernière ne saurait être évalué à une somme supérieure à celle arrêtée par elle dans le contrat ; que la demande au titre du local technique sera donc rejetée ; qu'au titre des travaux sur l'armoire TGBT, la société Peyj [J] sollicite sa condamnation pour des sommes correspondant à des prestations qui n'ont pas été mises à sa charge ; que l'expert n'a pas constaté la malfaçon alléguée par la SCI Peyj [J] ; que l'expert a justement retenu la nécessité de refermer le dispositif TGBT par la réalisation d'un citerneau et a chiffré ces travaux pour un montant inférieur à
celui proposé par la société Peyj [J] et correspondant au prix mentionné dans la décomposition du prix du marché ; que c'est donc de parfaite mauvaise foi que la société Peyj [J] prétend que la société Transterrassement aurait préféré appliquer une moins-value à son marché pour éviter de réparer les conséquences de la malfaçon commise à l'occasion des travaux ; que le tribunal a justement retenu un montant indemnisable à hauteur du coût des travaux de réalisation d'un coffret de mise hors gel de la nourrice conformément au marché conclu entre les parties et au préjudice réellement rencontré par l'appelante ; que la cour déclarera mal fondées les demandes de l'appelante du chef d'un prétendu surcoût pour la réalisation des travaux d'achèvement du local technique et de l'armoire TGBT et déclarera également mal fondée sa demande d'ordonner un complément d'expertise tendant à donner tous les éléments techniques permettant au juge de chiffrer les travaux prétendument dus à l'appelante ; que si par impossible, la cour devait retenir que les travaux d'achèvement portant sur le local technique et/ ou la prestation TGBT étaient dus, elle devra considérer les conditions de la demande avant dire droit formulée par l'appelante pour la débouter et confirmer le jugement entrepris ; qu'en effet, par application des dispositions de l'article 283 du code de procédure civile, l'audition de l'expert judiciaire commis aux fins de permettre au juge d'obtenir les éclaircissements utiles, suppose que le rapport n'offre pas les éclaircissements suffisants pour permettre au juge de statuer, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que le rejet des demandes s'impose d'autant plus que le créancier de l'obligation ne peut pas exiger plus que ce qui avait été prévu au contrat ; qu'en n'ayant pas réglé la prestation et en pouvant la faire exécuter au besoin par autrui, la société Peyj [J] ne peut sincèrement pas exiger une quelconque condamnation de ce chef.
Réponse de la cour
Vu les articles 1231-1 et 1231-2 du code civil précités,
La réalisation du local technique était prévue au marché de la société Transterrassement Centre qui n'a pas procédé à ces travaux, ainsi que l'expert judiciaire l'a constaté. Il n'est produit aucun avenant au contrat portant modification des prestations dues par le constructeur, de sorte que l'inexécution de cette prestation constitue une faute contractuelle l'obligeant à réparer le préjudice causé au maître d'ouvrage.
La SCI Peyj [J] justifie avoir fait réaliser les travaux pour la réalisation de ce local technique en produisant les factures suivantes :
- facture BM Maçonnerie du 19 mai 2018 : 2 880 ' TTC
- facture BM Maçonnerie du 17 octobre 2018 : 6 900 ' TTC
- facture EURL Vauguet du 28 juin 2018 : 1 029,52 ' TTC
Soit la somme totale de 10 829,52 euros.
Il résulte de la comparaison de ces factures avec le devis de la société Transterrassement Centre que les travaux sont similaires. Toutefois, il est certain que le coût de construction du local technique dans le cadre du marché à forfait ne pouvait qu'être inférieur au coût de réalisation de la même prestation par des artisans intervenant pour ce seul local technique sur un ouvrage déjà édifié. La différence du prix est donc pleinement justifiée et il ne peut être reproché d'avoir à la SCI Peyj [J] d'avoir fait réaliser le local technique à un prix plus onéreux, dès lors qu'il s'agit de la conséquence de l'inexécution par la société Transterrassement de ses obligations.
La société Transterrassement doit donc réparer l'entier préjudice subi par la SCI Peyj [J] qui ne se limite pas au montant de la prestation mentionnée au devis initial, mais doit couvrir le coût intégral engendré par les travaux supplémentaires auxquels le maître d'ouvrage a dû recourir pour bénéficier du local technique inclus au marché.
Toutefois, il résulte du rapport d'expertise que l'expert a proposé de retenir une moins-value sur le prix du marché initial de 4 846 euros HT au titre de la non-réalisation du local technique, soit 5 815,20 euros TTC. Le tribunal a pris en compte cette moins-value pour fixer le solde dû par la SCI Peyj [J] à la société Transterrassement Centre.
En conséquence, afin de ne pas procéder à une double indemnisation du préjudice subi par la SCI Peyj [J], il y a lieu de déduire de son préjudice le montant de la moins-value dont elle a déjà bénéficié.
La société Transterrassement Centre sera donc condamnée à payer à la SCI Peyj [J] la somme de 5 014,32 euros (10 829,52 - 5 815,20) et le jugement sera infirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande formée à ce titre.
Le devis de la société Transterrassement Centre prévoyait la réalisation d'un local TGBT (tableau général basse tension) pour le prix de 419,50 euros HT. Il est établi que le local TGBT n'a pas été réalisé, ainsi qu'il résulte de l'avis de l'expert en l'annexe B au rapport d'expertise. Le rapport final du bureau de contrôle Veritas en date du 8 février 2018 mentionne également l'absence de placard électrique renfermant le TGBT. Enfin, la société Transterrassement Centre n'allègue ni ne justifie avoir procédé à la réalisation du local TGBT. Le défaut d'exécution est donc établi.
Il est en outre établi que la société Transterrassement Centre a déplacé l'alimentation en eau et n'a pas réalisé le citerneau 1500 x 800 x 1000 de profondeur prévu au devis avec couvercle en tôle striée. Ainsi, l'architecte assistant le maître d'ouvrage a indiqué au constructeur dans un courrier électronique en date du 9 décembre 2017 :
« À votre initiative, vous avez modifié l'implantation de l'alimentation générale de l'eau, prévue dans un citerneau à l'extérieur du bâtiment du bâtiment pour l'implanter dans la partie parking (') je vous demande de protéger physiquement l'installation contre les chocs et les intempéries ».
L'absence de protection de l'alimentation générale en eau a d'ailleurs été constatée par l'expert judiciaire, et la société Transterrassement Centre a reconnu l'absence de réalisation du citerneau en pratiquant une moins-value à ce titre de 1 000 euros HT soit 1 200 euros TTC dans sa facture définitive adressée au maître d'ouvrage. En conséquence, la nourrice d'alimentation générale en eau du bâtiment a été déplacée unilatéralement, et n'a pas été protégée, de sorte que la société Transterrassement Centre a également commis une faute contractuelle à ce titre qui n'est intégralement réparée par la moins-value pratiquée, dès lors qu'il était prévu un citerneau enterré d'un mètre de profondeur et que désormais la nourrice d'alimentation en eau émerge du sol et doit être protégé par un ouvrage non souterrain.
La SCI Peyj [J] produit un devis de la société Serrurerie Barateau prévoyant la fabrication et la pose d'une armoire de protection isolées pour le TGBT et un coffre isolé pour la nourrice à eau pour le prix de 6 180 euros TTC. Le prix est désormais plus onéreux dès lors que les prestations ne sont pas incluses dans le marché à forfait et qu'il est nécessaire de procéder à de nouveaux travaux du fait du déplacement unilatéral de l'implantation de la nourrice à eau qu'il convient de protéger par un coffre adapté, à défaut de réalisation du citerneau enterré.
Il convient donc de réparer intégralement le préjudice résultant de l'inexécution contractuelle de la société Transterrassement Centre, en allouant au maître d'ouvrage une indemnité permettant de réaliser les travaux précités, déduction faite de la moins-value pratiquée par le constructeur au titre du défaut de réalisation du citerneau afin d'éviter une double indemnisation du préjudice.
En conséquence, il convient de condamner la société Transterrassement Centre à payer à la SCI Peyj [J] la somme de 4 980 euros (6180 ' 1200) au titre du local TGBT et du coffre pour la nourrice à eau, et le jugement sera infirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande formée à ce titre.
Les parties disposant toutes deux de créances certaines, liquides et exigibles, il sera fait droit à la demande de compensation formée par la société Peyj [J]. Au regard des éléments qui précèdent, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande tendant à entendre l'expert judiciaire. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a débouté la SCI Peyj [J] de sa demande en compensation légale.
II- Sur les pénalités de retard
Moyens des parties
L'appelante explique que pour rejeter sa demande, le tribunal a refusé de tenir compte du planning des travaux de la société Transterrassement au motif qu'il ne serait pas revêtu de sa signature et a considéré que le retard pris ne compromettait pas la date de livraison finale ; que, cependant, l'absence de signature du planning des travaux n'enlève rien à sa force contractuelle ; que l'ouvrage devait être achevé au 31 décembre 2017 ; que ce n'est qu'à compter de la mi-janvier 2018 que le bâtiment a été pourvu en électricité, de sorte qu'il est tout à fait erroné de juger que les travaux étaient achevés à la date du 3 janvier 2018 ; que le maître d''uvre organisait encore des réunions de chantier au-delà du 31 décembre 2017, ce qui démontre l'inachèvement complet tous corps d'état à cette date ; que les travaux se sont, en effet, poursuivis plus d'un mois après la prise de possession de l'ouvrage ; que le maître d''uvre a décompté les pénalités de retard par référence au planning des travaux pour identifier 37 jours ouvrés, soit 57 jours de retard, étant rappelé que le contrat ne distingue pas entre jour ouvré et jour non ouvré ; que le retard étant établi, la cour ne pourra qu'infirmer le chef de jugement rejetant sa demande et condamner la société Transterrassement Centre au paiement d'une pénalité contractuelle de retard d'un montant de 19 506,98 euros.
La société Transterrassement Centre réplique que le tribunal a justement débouté la société Peyj [J] de sa demande au titre des pénalités pour des retards en s'appuyant sur les constatations expertales ; que le tribunal a relevé, à juste titre, que les travaux de dallage réalisés qui ont été différés n'ont pas compromis la date de livraison finale du bâtiment ; que le tribunal retient, encore à juste titre, que la livraison s'est faite dans le respect du délai prévu par le marché de travaux pour l'achèvement complet de tous corps d'état et en a conclu que les pénalités de retard prévues par le marché de travaux n'avaient pas à être appliquées ; que les opérations d'expertise judiciaire ont permis d'établir que les travaux ont été achevés le 31 décembre 2017 et que le bâtiment a été remis en la possession du maître de l'ouvrage à la date du 3 janvier 2018, de sorte qu'aucun retard au sens de l'article 12 de ce contrat ne saurait être caractérisé ni être de nature à déclencher les pénalités de retard ; que la société Peyj [J] n'explique nullement en quoi il serait fait dérogation à cette interprétation de la clause 12 dudit contrat, très clairement rédigée, en particulier sur la notion de « délai d'exécution spécifique » en cas de « planning fixé entre les parties » ; qu'en effet, dans la mesure où aucun planning des travaux n'a fait l'objet d'une signature de la part de la société Peyj [J], aucun délai partiel d'exécution ne pourrait lui être valablement opposé ; qu'elle ne saurait être tenue pour responsable d'éventuels retards imputables à d'autres corps d'état intervenus sur le chantier ; que la cour ne pourra que confirmer le jugement entrepris de ce chef et débouter la société Peyj [J] de ses demandes au titre de pénalités de retard ; que s'agissant de pénalités de retard qui viennent normalement compenser la réalité d'un préjudice subi, la cour observera qu'il n'y en a aucun et que bien au contraire l'exploitation des lieux n'a pas été retardée d'une quelconque manière que ce soit ; qu'ainsi, à défaut de confirmer le jugement entrepris sur l'absence d'application de pénalités de retard, la cour devrait en tout état de cause réduire ses pénalités à 1 '.
Réponse de la cour
Les contrats stipulaient que les travaux devaient être réalisés pour l'achèvement complet tout corps d'états, pour le 31 décembre 2017.
L'article 12 des contrats stipule :
« En dehors du cas de l'intervention sur le chantier de plusieurs entreprises, nécessitant l'établissement d'un planning 'xé en accord entre elles et le maître d'ouvrage et déterminant un délai d'exécution spéci'que, la réception des travaux marquant la 'n du délai d'exécution sera prononcée dans le délai découlant des conditions de réalisation conclues avec l'entreprise.
Le délai d'exécution, tenant de l'incidence éventuelle des avenants signés et des conditions éventuelles de perturbations dûment consignées dans les PV de réunion de chantier ou en cas de force majeure (événements imprévisibles, irrésistibles, extérieurs à l'entreprise), de grève générale de la profession, à l'exclusion des jours de grève propres à l'entreprise en particulier.
En cas de dépassement du délai contractuel ainsi établi, des pénalités de retard seront décomptées de la facture de l'entreprise, sur la base d'un forfait 'xé à 1/1000e du montant hors taxes du marché par jour de retard ».
Il convient de rappeler que l'article 1792-6 du code civil dispose que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement.
En application de ce texte, la prise de possession de l'ouvrage et le paiement des travaux font présumer la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de le recevoir avec ou sans réserves, ainsi que l'a d'ailleurs jugé la Cour de cassation (3e Civ., 1er avril 2021, pourvoi n° 19-25.563 ; 3e Civ., 18 avril 2019, pourvoi n° 18-13.734 ; 3e Civ., 30 janvier 2019, pourvoi n° 18-10.197, Bull. 2019, III).
Par ailleurs, l'achèvement des travaux n'est pas une condition de la réception, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation (3e Civ., 13 novembre 2014, pourvoi n° 13-24.316 ; 3e Civ., 20 septembre 2011, pourvoi n° 10-21.354 ; 3e Civ., 18 décembre 2012, pourvoi n° 11-23.590 et 11-23.591).
En l'espèce, l'expert judiciaire a relevé que l'ouvrage n'a pas fait l'objet d'une réception expresse, mais que le maître d'ouvrage a pris possession de l'ouvrage à l'expiration du délai contractuel, refusant toutefois la réception des travaux considérant que l'ouvrage était affecté de non-façons, malfaçons et non-conformités, outre des travaux inexécutés.
À l'examen des pièces communiquées par l'ensemble des parties, l'expert a con'rmé que le bâtiment était en état d'être réceptionné lors de la prise de possession de l'ouvrage. Il convient également de constater que lors de la prise de possession des lieux, une grande partie du prix du marché était réglée par le maître d'ouvrage, soit 3/4 du prix pour le lot n° 1.
La SCI Peyj [J] ne pouvait donc différer de prononcer la réception de l'ouvrage, le cas échéant avec réserves, au motif de l'existence de malfaçons et non-façons, aux seules fins de bénéficier de pénalités de retard. S'il est exact que le maître d'oeuvre a pu établir un compte-rendu de chantier après le 31 décembre 2017, soit le 17 janvier 2018, celui-ci rappelait notamment : « la réception des travaux doit être prononcée », ce qui démontre une nouvelle fois que l'ouvrage était en état d'être réceptionné.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, il ne peut qu'être considéré que la société Transterrassement Centre a exécuté les travaux dans le délai contractuellement fixé, de sorte qu'aucune pénalité de retard n'est due au maître d'ouvrage. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la SCI Peyj [J] de sa demande formée à ce titre.
III- Sur les frais de procédure
Le jugement sera infirmé en ses chefs condamnant la SCI Peyj [J] aux dépens et à payer une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à la société Transterrassement Centre qui supportera donc seule les dépens de première instance et de référé, incluant le coût de l'expertise judiciaire.
La société Transterrassement Centre sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à la SCI Peyj [J] une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et une somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel. La société Transterrassement Centre sera déboutée de ses demandes au titre des dépens et des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement en ce qu'il a :
- débouté la SCI Peyj [J] de ses demandes reconventionnelles indemnitaires et de sa demande en compensation légale ;
- condamné la SCI Peyj [J] à payer à la société Transterrassement une indemnité pour frais irrépétibles de 4 000 euros ;
- condamné la SCI Peyj [J] aux dépens comprenant les dépens de l'instance en référé, ceux de l'incident devant le juge de la mise en état (RG 19/1840) et le coût de l'expertise judiciaire ;
CONFIRME le jugement en ses autres dispositions critiquées ;
STATUANT À NOUVEAU sur les chefs infirmés et Y AJOUTANT :
DIT que la société Transterrassement Centre a commis des fautes engageant sa responsabilité contractuelle à l'égard de la SCI Peyj [J] ;
CONDAMNE la société Transterrassement Centre à payer à la SCI Peyj [J] les sommes suivantes :
- 25 622,83 euros au titre de la non-conformité du matériau de remblai ;
- 5 014,32 euros au titre des travaux inexécutés (local technique) ;
- 4 980 euros au titre des travaux inexécutés (local TGBT et coffre pour la nourrice à eau)
ORDONNE la compensation des sommes dues entre les parties fixées au titre du jugement et du présent arrêt ;
CONDAMNE la société Transterrassement Centre aux entiers dépens d'appel ;
CONDAMNE la société Transterrassement Centre à payer à la SCI Peyj [J] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ;
CONDAMNE la société Transterrassement Centre à payer à la SCI Peyj [J] la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ;
DÉBOUTE la société Transterrassement Centre de ses demandes au titre des dépens et frais irrépétibles.