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Décisions

CA Rennes, 7e ch. prud'homale, 24 avril 2025, n° 21/06776

RENNES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Voyages Rolland Kreisker Evasion (SAS)

Défendeur :

Voyages Rolland Kreisker Evasion (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ballereau

Conseillers :

Mme Charpentier, M. Guinet

Avocats :

Me Mace, Me Nguyen, Me Lhermitte

Cons. prud'h. Morlaix, du 18 nov. 2024, …

18 novembre 2024

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Voyages Rolland Kreisker évasion est spécialisée dans le secteur d'activité des transports routiers réguliers de voyageurs. Elle applique la convention collective du transport routier de voyageurs et emploie 36 salariés.

Le 2 septembre 2014, M. [G] [E] a été embauché en qualité de Conducteur Période Scolaire, (CPS) coefficient 140 V - groupe 7 bis, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée intermittent à temps partiel au minimum 850 heures annuelles en période scolaire, par la SAS Voyages Rolland Kreisker Evasion.

Par courrier en date du 7 juin 2018, M. [E] a fait état auprès de son employeur et de l'inspection du travail des difficultés relatives au paiement de ses heures de travail et à son planning.

Le 21 décembre 2018, M. [E] a réitéré ses demandes par la voix d'un avocat au motif que son contrat de travail ne mentionne pas la durée du travail au cours des périodes travaillées ni sa répartition en méconnaissance des dispositions conventionnelles.

Le 6 février 2019, le conseil de l'employeur lui a répondu en ses termes:

«(..)Monsieur [E] s'est adressé à l'Inspection du Travail qui a émis des observations en lien avec les contrats CPS et le décompte du temps de travail de cette catégorie particulière de conducteur.

Après échanges avec l'administration, nous lui avons donné notre position technique, après réalisation d'une étude que nous vous livrons, par lettre du 29 septembre 2018, pièces à l'appui, de façon à pouvoir exposer la pratique de notre client en la matière. A toutes fins utiles, je vous confirme que la répartition du temps de travail est fonction du calendrier scolaire notifié par l'Académie et transmis dès sa parution aux C.P.S.».

M. [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Morlaix par requête du 11 février 2019 en vue de la requalification de son contrat de travail en un contrat à temps plein et de la condamnation de la SAS Voyages Rolland Kreisker Evasion au paiement d'un rappel de salaires et de primes.

Le 12 avril 2019, M. [E] a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

Au terme de ses dernières demandes, M.[E] a sollicité auprès de la juridiction prud'homale de voir:

- Requalifier son contrat en contrat de travail à temps plein

- Condamner la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion au paiement de :

- 27 739 euros à titre de rappel de salaire outre 2 773,91 euros pour les congés payés y afférents,

- 2 311 euros à titre de rappel de salaire afférent à la prime de 13ème mois outre 231 euros de congés payés y afférents,

- 558 euros à titre de rappel de salaire afférent aux primes outre 56 euros de congés payés y afférents, À titre subsidiaire,

- Condamner la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion au paiement de :

- 12 091 euros à titre de rappel de salaire afférent aux heures complémentaires du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018 outre 1 210 euros de congés payés y afférents,

- 1 008,75 euros à titre de rappel de salaire afférent à la prime de 13ème mois outre 109 euros de congés payés y afférents,

- 242 euros à titre de rappel de salaire afférent aux primes dues outre 24 euros de congés payés y afférents,

En tout état de cause :

- Condamner la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion à régulariser la situation à l'égard de la caisse de retraite et au titre de la participation aux bénéfices

- Condamner la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion au paiement de :

- 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- 9 126 euros pour travail dissimulé,

- Dire et juger que sa démission doit être requalifiée en prise d'acte et que celle-ci est justifiée,

- Dire et juger que sa prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamner la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion au paiement de :

- 913 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

- 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SAS Voyages Rolland Kreisker évasion a demandé au conseil de prud'hommes de rejeter les demandes de M. [E].

Par jugement en date du 24 septembre 2021, le conseil de prud'hommes de Morlaix a :

- Débouté M. [E] de l'intégralité de ses demandes ;

- Débouté la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles

- Laissé les dépens à la charge de chacune des parties

***

M. [E] a interjeté appel de la décision par déclaration au greffe du 27 octobre 2021.

En l'état de ses dernières conclusions transmises par RPVA le 1er juillet 2022, M. [E] demande à la cour de :

- Infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Et, statuant de nouveau :

À titre principal,

- Requalifier son contrat de travail en un contrat à temps plein

- Condamner la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion au paiement des sommes suivantes :

- 27 739 euros à titre de rappel de salaire outre 2 773,91 euros de congés payés y afférents,

- 2 311 euros à titre de rappel de salaire afférent à la prime de 13ème mois outre 231 euros de congés payés y afférents,

- 558 euros à titre de rappel de salaire afférent aux primes dues à M. [E] outre 56 euros de congés payés y afférents,

À titre subsidiaire,

- Condamner la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion au paiement de :

- 12 091 euros à titre de rappel de salaire afférent aux heures complémentaires du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018 outre 1 210 euros de congés payés y afférents,

- 1 008,75 euros à titre de rappel de salaire afférent à la prime de 13ème mois outre 109 euros de congés payés y afférents,

- 242 euros à titre de rappel de salaire afférent aux primes dues à M. [E] en sus de la somme de 242 euros à titre de rappel de salaire afférent aux primes dues à M. [E] en sus de la somme de 24 euros de congés payés y afférents,

En tout état de cause :

- Condamner la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion à régulariser la situation à l'égard de la caisse de retraite et au titre de la participation aux bénéfices

- Condamner la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion au paiement de :

- la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- la somme de 9 126 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé, - Dire et juger que la démission de M. [E] doit être requalifiée en prise d'acte et que celle-ci est justifiée, - Dire et juger que la prise d'acte de M. [E] produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamner la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion au paiement de :

- 913 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

- 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En l'état de ses dernières conclusions transmises par RPVA le 17 octobre 2024, la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion demande à la cour de :

- Confirmer le jugement en ce qu'il a :

- Dit que M. [E] disposait d'un contrat d'intermittent et l'a débouté en conséquence M. [E] de sa demande de requalification du temps partiel en temps complet et de ses demandes indemnitaires formulées à ce titre.

- Dit l'absence de réalisation d'heures complémentaires et l'a débouté de ses demandes indemnitaires à ce titre et de celle relative à la condamnation à des dommages et intérêts pour travail dissimulé.

- Dit que la démission de M. [E] est claire et non équivoque et l'a débouté en conséquence de sa demande de requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- Infirmer le jugement en ce qu'il a :

- Débouté la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion de sa demande reconventionnelle de condamner M. [E] à payer à la société, la somme de 3 000 euros au titre de l'absence de préjudice et pour procédure abusive.

- Condamner M. [E] à lui payer la somme de 3 000 euros pour procédure abusive.

- Dire qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la SAS Voyages Rolland Kreisker évasion, les frais irrépétibles de la présente procédure.

- Débouter M. [E] de l'ensemble des demandes qu'il a formulé.

- Condamner M. [E] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et le condamner aux entiers frais et dépens.

***

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 18 novembre 2024 avec fixation de l'affaire à l'audience du 18 novembre 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs dernières conclusions régulièrement signifiées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de rejet des conclusions du 18 novembre 2024 de M.[E]

L'article 15 du code de procédure civile dispose: 'Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense'.

En vertu des dispositions de l'article 802 du code de procédure civile, auxquelles renvoie l'article 907 du même code relatif à la procédure devant la cour d'appel, après l'ordonnance de clôture aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.

En l'espèce, M. [E] , appelant, a notifié des conclusions successivement le 28 décembre 2021 et le 1er juillet 2022 tandis que la société intimée a conclu le 28 mars 2022.

Le 23 mai 2024, les parties ont été informées par le conseiller de la mise en état de la fixation de l'affaire à l'audience du 18 novembre 2024 avec une ordonnance de clôture au 22 octobre 2024.

La société intimée ayant transmis le 17 octobre 2024 quelques jours avant l'ordonnance de clôture initiale des conclusions n°2 comportant de nouveaux développements, portant le nombre de pages de 45 à 55 , ainsi que deux nouvelles pièces.( Pièces 29 et 30), l'ordonnance de clôture a été reportée sur la demande du conseil de l'appelant au 18 novembre pour lui permettre de répliquer avant l'audience maintenue au même jour.

Dans son dernier jeu de conclusions signifié le 18 novembre 2024 à 10h03, M. [E] n'a transmis aucune pièce complémentaire, se bornant à réfuter les pièces communiquées et les moyens opposés par l'employeur dans ses écritures du 17 octobre 2024. Les 2 pages supplémentaires de ses conclusions ( 31 pages pour le jeu n°2 et 33 pages pour le jeu n°3) liées notamment à un changement de pagination, ne modifient pas sensiblement pas le fond du litige et ne comporte aucune demande nouvelle.

Le fait pour M.[E] de signifier des conclusions n°3 quelques heures avant l'ordonnance de clôture dont la date était annoncée par message du greffe du 18 octobre 2024, n'est pas contraire à la loyauté des débats, dès lors qu'il s'agissait pour l'appelant de répliquer aux conclusions et pièces transmises le 17 octobre 2024 de son adversaire, soit quelques jours avant l'ordonnance de clôture initiale.

Dans ces conditions, les conclusions signifiées par M. [E] le 18 novembre 2024 seront déclarées recevables.

Sur la demande de requalification du contrat de travail à temps complet

Au soutien de la demande d'infirmation du jugement, M.[E] sollicite à titre principal la requalification de son contrat de travail intermittent en un contrat à temps complet et sollicite des rappels de salaires et de primes durant la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018 :

- 27 739 euros à titre de salaires outre les congés payés afférents,

- 2311 euros à titre de prime 13ème mois , outre les congés payés afférents,

- 558 euros à titre de prime mensuelle outre les congés payés afférents.

M.[E] soutient que :

- l'emploi de conducteur en période scolaire peut faire l'objet d'un contrat de travail intermittent et à temps partiel soumis à l'article L 3123-34 du code du travail ainsi qu'aux dispositions de l'accord du 24 septembre 2004 étendu par arrêté du 30 juin 2005 et annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires de transport ,

- en l'espèce, son contrat de travail intermittent ne précise pas ni la durée de travail hebdomadaire ni la répartition des heures de travail à l'intérieur des périodes travaillées en méconnaissance des dispositions légales et conventionnelles,

- en l'absence d'une telle mention, son contrat de travail est présumé à temps complet à charge pour l'employeur de rapporter la preuve que le salarié ne devait pas se tenir à sa disposition permanente.

- cette preuve n'est pas rapportée par la société Voyages Rolland Kreisker qui ne justifie pas lui avoir transmis au début de chaque année scolaire ses plannings comprenant la répartition de ses heures de travail, à l'exception de celui de l'année scolaire 2018/2019 communiqué tardivement le 11 octobre 2018,

- l'employeur a d'ailleurs reconnu auprès de l'inspection du travail saisie par le salarié dans un courrier du 4 juin 2018 qu'il avait omis d'annexer le planning.

- l'employeur tente de se retrancher derrière la réunion se tenant habituellement en août avant la rentrée scolaire, pendant les périodes de suspension du contrat de travail, et qu'il lui appartenait de le lui transmettre même par voie dématérialisée,

- contrairement à ce qui est soutenu par l'employeur, les trajets réalisés par le salarié ne se limitaient pas qu'aux tracés réguliers de ramassage scolaire mais s'étendaient à des transports imprévus, dénommés Transports 'A la Demande' ( TAD Taxi), en semaine et le samedi. Les messages vocaux laissés par son employeur ne permettaient pas de les refuser.

- il avait aussi des trajets de sorties 'sport scolaire UNSS' ne figurant pas dans les plannings fixes qui lui étaient remis tardivement de sorte qu'il a dû travailler le mercredi après-midi en sus du ramassage scolaire et des Transports à la Demande tout au long de la relation contractuelle.

- il s'ensuit qu'il était impossible pour le salarié de compléter cet emploi par un second,

- il subissait une modification incessante des plannings et un volume d'heures de travail fluctuant et verse aux débats des messages qui lui étaient transmis (2016-2019) comportant des modifications unilatérales.

- il était souvent averti des modifications apportées à son planning le jour même ou la veille pour le lendemain, par voie orale, et n'a conservé que quelques messages vocaux (7 en 2017 et 2018)

- il était dans l'obligation selon son contrat de travail d'avoir en permanence un téléphone portable.

La société Rolland Kreisker Evasion s'oppose à la demande de requalification de M.[E], décrit comme un salarié maîtrisant parfaitement le dispositif contractuel, affirmant de mauvaise foi se tenir à disposition permanente de son employeur et ayant déjà saisi les juridictions prud'homales dans des litiges similaires avec des précédents employeurs.

Le contrat de travail intermittent est défini par l'article L.3123-34 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi no 2016-1088 du 8 août 2016 ayant combiné les dispositions des anciens articles L 31223-31 et L 3123-33 selon lequel:

' Le contrat de travail intermittent est un contrat à durée indéterminée. Il peut être conclu afin de pourvoir un emploi permanent qui par nature comporte une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées. Ce contrat est écrit.

Il mentionne notamment :

1o La qualification du salarié ;

2o Les éléments de la rémunération ;

3o La durée annuelle minimale de travail du salarié ;

4o Les périodes de travail ;

5o La répartition des heures de travail à l'intérieur de ces périodes.'

L'activité du conducteur en période scolaire ( CPS) est régie du fait des fluctuations inhérentes au calendrier imposé chaque année aux entreprises de transport de voyageurs, par des dispositions conventionnelles spécifiques issues de l'accord du 24 septembre 2004, étendu par arrêté du 30 juin 2005 et annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport.

Il est ainsi prévu que les conducteurs CPS bénéficient d'un contrat de travail mentionnant notamment en son article 25 :

- La qualification du salarié ;

- Les éléments de la rémunération ;

- La durée annuelle minimale contractuelle de travail en période scolaire qui ne peut être inférieure à 550 heures pour une année pleine comptant au moins 180 jours de travail;

- le volume d'heures complémentaires dans la limite du quart de la durée annuelle minimale de travail fixée au contrat de travail,

- la répartition des heures de travail dans les périodes travaillées.

Toute modification des jours scolaires ou de l'horaire type des services effectués est communiquée au conducteur concerné avec un délai de prévenance de 3 jours ouvrables sous réserve que l'entreprise en ait eu elle-même connaissance dans ce délai.

Par ailleurs, les CPS bénéficient de la garantie de travail journalière liée au nombre de vacations prévues à l'article XX ci-dessus ainsi que des dispositions de l'article 7 3 relatives à l'indemnisation des coupures et de l'amplitude.

(..) En dehors des périodes d'activités scolaires, les fonctions de conducteurs scolaires sont par nature suspendues. Ces conducteurs sont , s'ils le désirent prioritaires pour occuper pendant ces périodes des emplois distincts de leur activité principale.(..) En tout état de cause, le cumul de ces différentes activités doit leur garantir 5 semaines de congés payés annuels non travaillées.'

En cas de défaut de respect des règles de forme présidant à la conclusion du contrat de travail intermittent, le contrat de travail est présumé à temps plein, mais l'employeur est recevable à rapporter la preuve contraire (Soc., 18 juin 2008, pourvoi no 07-40.123).

L'article L. 3123-35 du code du travail dispose que :'Les heures dépassant la durée annuelle minimale fixée au contrat de travail intermittent ne peuvent excéder le tiers de cette durée sauf accord du salarié. (La CCN dit le quart. Du coup, est-il nécessaire de reproduire cet article')

Si le dépassement de la durée maximale annuelle ouvre droit au paiement d'heures correspondant à ce dépassement et, le cas échéant, quand le salarié a effectué des heures de travail au-delà de la limite prévue à l'article L. 3123-35 du code du travail, à des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi, il n'affecte pas, à lui seul, la qualification de contrat de travail intermittent (Soc., 2 mars 2016, pourvoi no 14-23.009, 14-23.216, Bull. 2016, V, no 43).

En l'espèce, M.[E] bénéficiait d'un contrat de travail intermittent en qualité de Chauffeur en période scolaire ( CPS) à temps partiel pour tenir compte des périodes travaillées et des périodes non travaillées et assurait depuis des années le même circuit scolaire à proximité de son domicile.

Son contrat de travail mentionne:

- une rémunération brute lissée calculée sur la moyenne mensuelle annuelle sur la base du taux horaire brut de 10,35 euros,

- au minimum 850 heures annuelles en période scolaire, supérieur au minimum conventionnel,

- un volume d'heures complémentaires maximum de 1 440 heures par an de dépassement,

- une répartition des heures de travail durant les périodes travaillées ainsi définie: ' le programme des semaines et jours scolaires ainsi que la répartition quotidienne des heures de travail est annexée aux présentes et la Direction communiquera celui applicable chaque année à réception du calendrier communiqué par l'Académie de [Localité 8]'.

Le contrat de travail conclu avec M.[E] ne mentionnant pas la répartition des heures de travail durant les périodes travaillées, son contrat doit être présumé à temps complet à charge pour l'employeur de rapporter la preuve que le salarié ne devait pas se tenir à sa disposition permanente.

Pour soutenir que le salarié ne se tenait pas à sa disposition permanente, la société établit que:

- les circuits scolaires définis au minimum pour 2 années consécutives étaient stables et invariables permettant aux conducteurs de connaître longtemps à l'avance leurs plages de travail. Ils étaient établis en fonction de la commune où le chauffeur était domicilié pour limiter les temps de trajets.

- M.[E] était chargé du ramassage scolaire dans le secteur à proximité de la commune de [Localité 2] où il était domicilié sur la base de circuits identiques selon les journées de travail.

Les documents fournis par le salarié , notamment ses feuilles de journée durant la période en litige (2016-2018), confirment que les circuits, les jours et heures de ramassage scolaire étaient stables à partir de la commune de [Localité 4] jusqu'au collège de [5]. Le fait non contesté que M.[E] ne se rendait jamais aux réunions organisées par l'employeur courant août avant chaque rentrée scolaire, corrobore le fait qu'il disposait des éléments d'information pour exercer son activité à temps partiel, s'agissant des mêmes circuits d'une année sur l'autre.

Concernant les trajets occasionnels réalisés en dehors des ramassages scolaires, si M.[E] insiste sur le caractère imprévu des Transports à la Demande ( TAD) , force est de constater qu'il se prévaut seulement de 4 transports durant l'année 2017 durant la période incriminée ( 2016-2018) et que l'employeur affirme sans être contredit qu'il a cessé de solliciter M.[E] à compter de janvier 2018 pour ce type de transport. Au demeurant, deux des transports invoqués par le salarié ont finalement été annulés comme l'illustrent les messages vocaux retranscrits par M.[E] le 11 janvier 2017 de son supérieur hiérarchique ' [N] a essayé de t'appeler et tu réponds pas , donc ton billet UNSS de [Localité 7] que tu devais faire est annulé', et le 17 mai 2017 ' donc ton UNSS [Localité 6] est annulée, donc tu fais [5] [Localité 4] ', ce dernier trajet correspondant à son circuit scolaire habituel. En tout état de cause, les pièces du salarié révèlent que l'employeur prenait soin d'obtenir son accord préalable pour réaliser des transports occasionnels lesquels ne présentaient aucun caractère obligatoire, le conducteur disposant du choix de ne pas les réaliser sans subir de récrimination de l'employeur.

Il en est de même pour des transports en lien avec des activités extra-scolaires d'enfants (UNSS) certains mercredi après-midi, l'employeur faisant valoir sans être contredit utilement que l'accord de M.[E] était sollicité pour effectuer ce travail en complément de son activité principale de ramassage scolaire dans la limite annuelle fixée par son contrat de travail. Les deux messages vocaux des 11 janvier 2017 et du 17 mai 2017 produits par le salarié confirment la version de l'employeur sur la liberté de choix de M.[E].

Les affirmations de M.[E] selon lesquelles il subissait une modification incessante et unilatérale de ses plannings et un volume d'heures de travail fluctuant reposent sur :

- des copies d'écran de la messagerie du service d'exploitation de la société faisant apparaître les seuls intitulés de messages transmis de manière ponctuelle à M.[E] ( 1 par trimestre environ) à M.[E] entre février 2016 et mars 2019 dont les intitulés imprécis ' Planning' ou 'TAD' ne permettent pas de déterminer la teneur des messages. ( Pièce 6)';

- un message transmis à son supérieur hiérarchique le 10 mars 2017 par M.[E]. Ce message rédigé en termes sibyllins est inexploitable faute de le resituer dans son contexte en l'absence des messages précédents.

- un autre message du mardi 29 novembre 2016 adressé à son supérieur hiérarchique à propos d'un changement d'heure de départ d'un transport le mercredi après-midi à 12h45, sans qu'il soit possible d'apprécier l'ampleur de la modification.

Outre le fait que l'employeur s'est interrogé sur le fait que M.[E] détienne des copies des écrans de la messagerie de son responsable d'exploitation et que la plupart des mails ne concernent pas le salarié (mail de M. [J] pièce 29), il ne se déduit nullement de ces éléments fragmentaires la preuve d'une modification incessante du temps de travail du salarié.

La version de M.[E] est au surplus contredite par ses feuilles de route révélant au contraire une stabilité et une régularité de ses horaires durant les jours de travail, conforme à un circuit de ramassage scolaire.

Le fait que M.[E] dispose en permanence durant son service d'un téléphone portable fourni par son employeur ne constitue pas en soi un élément permettent d'accréditer les dires du salarié sur le fait qu'il devait se tenir constamment à la disposition de son employeur. La cour observe que les messages vocaux retranscrits par l'appelant démontrent qu'il ne répondait pas aux appels de son employeur en cas de sollicitations même urgents pour des Transports à la demande.

Dans ces conditions, la société intimée rapporte la preuve que le salarié ne devait pas se tenir à sa disposition permanente, qu'il pouvait s'organiser à titre personnel en dehors de son activité à temps partiel comprise entre 17,85 et 23,74 heures hebdomadaires. L'employeur parvenant à renverser la présomption simple, le salarié sera débouté de sa demande de requalification de son contrat intermittent en un contrat à temps complet et de ses demandes accessoires de rappel de salaire, de rappel de prime 13ème mois et de rappel de la prime conventionnelle d'ancienneté égale à 2 % de la rémunération.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Sur la demande d'heures complémentaires

M.[E] sollicite à titre subsidiaire le paiement d'un rappel de salaire de 12 091 euros au titre des heures complémentaires effectuées entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2018, outre les congés payés afférents. Il fait valoir qu'il a procédé aux rectifications nécessaires dans de nouveaux décomptes en déduisant les jours de congés et des temps de pause et constate que l'employeur se borne à contester le calcul du temps de travail de quelques journées sans remettre en cause l'écrasante majorité des autres journées.

L' employeur conteste le bien fondé de cette demande en soulignant l'absence de crédibilité du salarié dont les circuits étaient identiques et stables ne permettaient pas objectivement d'effectuer des heures excédentaires dans de telles proportions, en dénonçant des décomptes fantaisistes non confortés par des éléments issus de son planning, des disques et des feuilles d'activité remplies par ses soins . Il souligne le fait que le salarié n'hésitait pas à déclarer des heures de travail illégitimes en déclarant à tort du temps travaillé en actionnant le chronotachygraphe lors de prise de service anticipée sans motif légitime. Il indique par ailleurs avoir fourni régulièrement des explications au salarié sur le mode de calcul des majorations des heures complémentaires .

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte des dispositions de l'article L 3171-3 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures complémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, les États membres doivent imposer aux employeurs l'obligation de mettre en place un système objectif, fiable et accessible permettant de mesurer la durée du temps de travail journalier effectué par chaque travailleur (CJUE, gde ch.,14 mai 2019, aff. C-55/18, pt 60, Federación de Servicios de Comisiones Obreras, CCOO : JurisData n° 2019-009307; JCP S 2019, 1177, note M. Morand).

Le contrat de travail intermittent ne constituant pas en soi une annualisation du temps de travail autorisant l'employeur à ne décompter les heures supplémentaires qu'au-delà de la durée annuelle légale ou conventionnelle, le salarié est soumis au régime des heures supplémentaires de droit commun, qui sont décomptées semaine par semaine travaillée (soc 28 mai 2014 n°13 12087; soc 16 juin 2010 n°08-43 244).

Il est rappelé que :

- M.[E] est rémunéré sur une base de 850 heures annuelles minimales sur 11 mois , soit 77,27 heures par mois (17,84 heures par semaine).

- sur chaque semaine lissée, les heures réalisées au-delà de 17,84 heures et jusqu'au tiers soit 23,77 heures sont majorées de 10 % et les heures réalisées au-delà du tiers, soit au-delà de 23,77 heures sont majorées de 25 % et acquittées chaque fin de mois.

En l'espèce, M. [E] produit :

- son contrat de travail prévoyant une durée annuelle de travail minimale de 850 heures hors heures complémentaires, prévoyant une rémunération lissée calculée sur la base d'un taux horaire de 10,35 euros, représentant en dernier lieu une moyenne de 927,60 euros brut par mois.

- ses bulletins de salaire de janvier 2016 à avril 2019 faisant mention du paiement régulier d'heures complémentaires majorées à 110 % ou 125 % .

- des décomptes de ses heures de travail (pièce 9) faisant mention de 363,89 HS en 2016, de 336,56 HS en 2017 et de 363,89 HS en 2018, représentant la somme globale de 12 091, 85 euros (4 515,25+ 4 312,14+ 3 264,46 euros).( Pièce 9)

- des tableaux sous format Excel ( pièce 7 bis) détaillant la durée quotidienne et hebdomadaire de travail, entre le 31 août 2015 et le 5 avril 2019, faisant apparaître des durées hebdomadaires dépassant régulièrement 21 heures par semaine.

- diverses attestations d'activité journalière remplies par le salarié durant la période septembre 2015- 2019 (janvier et février 2016 manquantes) et destinées à son employeur, incluant des feuilles de route préimprimées sur lesquelles figurent des annotations manuscrites du salarié en détaillant des tâches annexes autres que la conduite du véhicule (entretien, garage), les éventuelles difficultés de circulation.

Ces documents sont accompagnés parfois de la copie de disques chronotachygraphes , difficilement exploitables.

- le courrier du 7 mai 2018 du contrôleur du travail saisi par le salarié sollicitant auprès de l'employeur des explications sur le décompte du temps de travail effectif, la méthode de calcul des heures complémentaires,

- le second courrier du 23 juillet 2018 du contrôleur du travail après la réponse de l'employeur et demandant un décompte de la durée du travail de M.[E] sur la base des disques et non de manière forfaitaire

Le salarié a également communiqué en cours d'instance d'appel un décompte rectifié déduisant les heures de travail qu'il avait prises en compte par erreur s'agissant de jours fériés non travaillés ( 1er et 8 mai 2017, 5 juin 2017 et 21 mai 2018.

Ce nouveau décompte comporte manifestement des incohérences au titre de l'année 2018, en ce qu'il fait état d'un nombre d'heures complémentaires identique à celui de 2016 (363,89 HS) avec une évaluation minorée ( 3264,46 euros) sans cohérence avec le quantum.

Les éléments fournis par le salarié sont toutefois suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre utilement en produisant ses propres éléments.

En réponse, la société Rolland Kreisker Evasion conteste la fiabilité des décomptes du salarié en fournissant pour sa part :

- le courrier du 7 juin 2018 de M.[E] lui transmettant diverses réclamations liées au paiement des heures complémentaires, dont le seuil de déclenchement des majorations (10 % et 25 %) est contesté. Il produit les réponses qu'il a apportées le 23 juillet 2018 puis le 29 septembre 2018 au contrôleur du travail saisi par le salarié, précisant notamment qu'il règle les majorations d'heures complémentaires en fin de mois et qu'il opère le cas échéant une régularisation à la fin de l'année scolaire. Son dernier courrier n'a donné lieu à aucune réponse de l'inspection du travail.

- les plannings des jours travaillés pour M.[E] durant l'année scolaire 2015-2016 ,

- son 'planning type' de son circuit scolaire inchangé d'une année sur l'autre : du lundi au vendredi de 7h33 à 9h40, puis de 12h46 à 14h25, et à l'exception du mercredi après-midi de 16h34 à 17h30 (conclusions page 19) moyennant une rémunération quotidienne sur la base de 3 heures et 29 centièmes en intégrant un temps de nettoyage de 0,67 heures.

- des fiches mensuelles de synthèse d'activité, correspondant à l'estimation des circuits de ramassage scolaire du conducteur entre le domicile de ce dernier et le terminus, et du trajet de retour sans passager, outre un temps de nettoyage et de prise de carburant de 25 minutes chaque jour.

- des exemples de disques chronotachygraphes, permettant de vérifier la cohérence des données avec les feuilles de synthèse (journée du 3 octobre 2016, 14 octobre 2016, du 8 février 2017, du 15 mai 2018, du 31 mai 2018,..)

- les attestations d'activités journalières remplies par le conducteur de façon manuscrite afin de lui permettre de confirmer les éventuelles dépassements et de fournir les explications utiles,

- le courrier de réponse du 29 septembre 2018 apportée au contrôleur du travail expliquant que le mode de décompte du temps de travail effectif du salarié est toujours rémunéré dès lors que les attestations remplies par le salarié permettent de régulariser la situation en cas de dépassement des temps habituels.

Outre le fait que le suivi des heures de travail était effectué par l'employeur au travers de l'analyse des disques et des feuilles d'activité remplies par le salarié signalant d'éventuels dépassements ou modifications de la durée du travail, la société a souligné les incohérences et les erreurs figurant dans les documents établis par M.[E], en citant plusieurs exemples significatifs:

- au cours des journées du 3 octobre 2016, du 8 février 2017, du 15 mai 2018 et du 31 mai 2018 : les décomptes de son temps de travail ne sont pas cohérents avec les relevés de ses disques ni avec son planning. Le salarié ne s'explique pas sur des durées supplémentaires ' Hors Disk' de plus de 16 minutes ajoutées au temps de travail journalier.

- en septembre 2018, le salarié a anticipé sans motif légitime sa prise de service de 10 minutes par rapport à son planning, se maintenant en position de travail alors qu'il était normalement en coupure de 15h48 à 16h50 et déclarant dans sa feuille d'activité des temps autres que la conduite de 14h45 à 17h40 en contradiction avec les relevés de son disque révélant qu'il avait conduit durant cette période. Il en est de même lorsqu'il a déclaré sans en justifier des temps supplémentaires d'entretien de son véhicule alors qu'un temps forfaitaire était déjà pris en compte dans l'évaluation de ses tâches( Pièce 28)

Il résulte des pièces produites de part et d'autre par les parties que l'employeur, à qui il incombe d'assurer le contrôle des heures de travail effectuées, a fourni des éléments précis permettant de contredire le chiffrage effectué par l'appelant; que M.[E] ne fournit aucune explication au fait qu'il prenait sans motif légitime son service de manière anticipée, qu'il positionnait le chronotachygraphe en période travaillée alors qu'il s'agissait d'un temps de coupure, ce dont il résulte que les relevés dont il se prévaut à l'appui du décompte de son temps de conduite et du temps de travail effectif sont faussés au regard des saisies erronées qu'il a lui-même effectuées sur le chronotachygraphe. Enfin, l'évaluation des temps de pause faite par M.[E] en cause d'appel est forfaitaire est peu cohérente avec les décomptes du temps de travail effectué à la seconde près par le salarié.

Au regard de ces éléments fournis par les parties, la cour a la conviction que M.[E] a été rémunéré de l'ensemble des heures complémentaires qu'il a effectuées durant la période en cause (2016-2018) et qu'il a donc été rempli de ses droits. Il sera donc débouté de ses demandes de rappels de salaire au titre des heures complémentaires, de prime de 13ème mois et de la prime conventionnelle d'ancienneté, par voie de confirmation du jugement.

La demande subséquente de M.[E] de régularisation de sa situation à l'égard de la caisse de retraite et au titre de sa participation aux bénéfices doit être également rejetée comme non fondée, par voie de confirmation du jugement.

Sur la prise d'acte

Selon l'article L 1231-1 du code du travail, le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié ou d'un commun accord. En cas de prise d'acte de la rupture par le salarié, il lui appartient d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur.

Lorsque le salarié invoque des manquements suffisamment graves de son employeur empêchant la poursuite de son contrat de travail, la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. A défaut, la prise d'acte est considérée comme une démission.

M. [E] invoque à l'appui de sa prise d'acte notifiée le 12 avril 2019 des désaccords avec la Direction sur 'le paiement des heures ' sans plus de précision. Le fait que le salarié ait engagé depuis le 11 février 2019 une procédure prud'homale en paiement d'heures complémentaires établit l'existence d'un litige préexistant avec son employeur. Toutefois, la cour ayant rejeté la demande en paiement du rappel de salaire au titre des heures complémentaires, le salarié ne démontre pas la réalité du manquement invoqué à l'encontre de la société de sorte que la prise d'acte de M.[E] doit produire les effets d'une démission, par voie de confirmation du jugement.

Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes indemnitaires présentées par M.[E] consécutivement à la rupture de son contrat de travail.

Sur le travail dissimulé

Il n'est pas établi que l'employeur ait dissimulé de manière intentionnelle une partie du temps de travail de M. [E] par l'inscription sur les bulletins de salaire d'un nombre d'heures inférieur à celui réellement effectué.

M. [E] ne caractérisant aucunement le caractère intentionnel de la dissimulation invoquée, le jugement doit en conséquence être confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande indemnitaire sur ce fondement.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral

M.[E] présente une demande de 3 000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral au motif que son employeur a adopté un comportement vexatoire à son égard lorsqu'il a invectivé le salarié lors de l'audience de conciliation du conseil des prud'hommes. Tout en reconnaissant qu'il n'aurait pas dû utiliser le car pour se rendre à l'audience et que son comportement pouvait justifier une sanction disciplinaire, M.[E] estime avoir subi un préjudice.

La société intimée s' oppose à une telle demande et conteste toute attitude irrespectueuse ou vexatoire de la part du représentant de la Direction lors de l'audience de conciliation. Elle observe que les conseillers n'auraient pas manqué d'interpeller l'employeur en cas de nécessité et qu'ils ne l'ont pas fait. Elle ajoute avoir démenti dans son courrier du 19 avril 2019 les allégations de M.[E] à ce sujet.

Faute pour M.[E] de démontrer un comportement discourtois ou agressif du dirigeant de la société à son égard lors de l'audience de conciliation et de rapporter la preuve du préjudice subi, le salarié est mal fondé à solliciter une indemnisation en réparation de son préjudice moral. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur la demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour procédure abusive

L'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à des dommages-intérêts qu'en cas de malice, mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.

Aucun élément ne permettant de caractériser le caractère abusif de l'action initiée par M.[E], la demande de dommages-intérêts de la société Voyages Rolland sera rejetée par voie de confirmation du jugement.

Sur les autres demandes et les dépens

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie les frais non compris dans les dépens. Les parties seront déboutées de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles, le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions relatives de l'article 700 du code de procédure civile

M.[E] sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Rejette la demande de la société Voyages Rolland Kreisker Evasion tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions signifiées par M. [E] le 18 novembre 2024.

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne les dépens.

et y ajoutant :

Déboute les parties de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M.[E] aux dépens de première instance et d'appel.

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