CA Nîmes, 5e ch. soc. ph, 28 avril 2025, n° 22/04107
NÎMES
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 22/04107 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IVBY
CRL/JLB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON
23 novembre 2022
RG :20/00286
[D]
C/
S.A.S. API2M
Grosse délivrée le 28 AVRIL 2025 à :
- Me BREUILLOT
- Me VAJOU
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 28 AVRIL 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVIGNON en date du 23 Novembre 2022, N°20/00286
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et Monsieur Julian LAUNAY BESTOSO, Greffier, lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 05 Novembre 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 Janvier 2025 puis prorogée au 10 mars 2025 puis au 31 mars 2025 puis au 28 avril 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
Monsieur [H] [D]
né le 02 Avril 1971 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Anne-france BREUILLOT de la SELARL BREUILLOT & AVOCATS, avocat au barreau de CARPENTRAS
INTIMÉE :
S.A.S. API2M
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LX NIMES, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Chrystelle MICHEL, avocat au barreau D'AVIGNON
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 28 avril 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [H] [D] a été embauché le 07 mars 2003 suivant contrat de travail à durée déterminée à temps complet de deux mois par la SAS DISPAM, en qualité de manutentionnaire.
Le 11 mai 2003, le salarié a régularisé avec la SAS DISPAM un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet pour un poste de manutentionnaire jour. A compter du 14 mars 2012, le contrat de travail du salarié a été transféré à la SAS API2M, à effet au 18 mars 2013, avec reprise de son ancienneté.
La relation de travail est soumise à la convention collective nationale des transports routiers.
Le 14 mars 2013, M. [D] a été promu opérateur de flux avec un salaire correspondant au SMIC majoré d'une prime qualité mensuelle de 80 euros bruts établie en fonction de sa productivité.
Au dernier état de la relation de travail, le salaire de M. [D] était de 1 524,28 euros bruts pour 151,67 heures par mois, avec une prime d'ancienneté de 91,46 euros bruts soit un total mensuel de 1 615,74 euros bruts.
Le 8 novembre 2013, M. [D] a été victime d'un accident pris en charge par la sécurité sociale au titre de la législation relative aux risques professionnels.
Suite aux visites de reprise des 07 avril 2014, 30 mars 2015 et 29 juin 2015, le salarié a repris le travail à mi-temps thérapeutique. Trois avenants réduisant le temps de travail du salarié ont été conclus en date des 07 avril 2014, 30 mars 2015 et 31 août 2015.
Lors de la visite de reprise en date du 31 août 2015, M. [D] a été déclaré apte à reprendre son poste à temps complet, sans aucune réserve. Lors des visites médicales des 21 juin 2016 et 17 janvier 2018, le salarié a été déclaré apte à son poste de travail sans réserve.
Par ailleurs, M. [D] a obtenu une prise en charge du FONGECIF afin de suivre une formation d'agent d'entretien du bâtiment, dont il a obtenu le titre professionnel le 22 juin 2017.
M. [H] [D] a déclaré une rechute le 11 septembre 2018, laquelle a fait l'objet d'un refus de prise en charge par la Caisse Primaire d'assurance maladie au titre de la législation relative aux risques professionnels le 6 mars 2019.
M. [D] a été placé en arrêt de travail au titre de l'assurance maladie du 13 au 18 mars 2019, et a été déclaré inapte par le médecin du travail lors des visites de reprise des 12 et 19 mars 2019.
M. [D] a été licencié le 09 mai 2019 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Par requête du 30 juillet 2020, M. [D] a saisi le conseil de prud'hommes d'Avignon aux fins de voir qualifier son licenciement comme dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison de la faute de son employeur comme étant à l'origine de son inaptitude, et de voir condamner l'employeur au paiement de diverses sommes.
Par jugement en date du 23 novembre 2022, le conseil de prud'hommes d'Avignon a :
- débouté M. [D] de l'intégralité de ses demandes,
- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
- mis les dépens de l'instance ainsi que les éventuels frais d'exécution à la charge de M. [D].
Par acte du 22 décembre 2022, M. [D] a régulièrement interjeté appel de la décision.
Par ordonnance en date du 10 juin 2024, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 07 octobre 2024. L'affaire a été fixée à l'audience du 05 novembre 2024.
Lors de l'audience, il a été procédé au rabat de l'ordonnance de clôture à la demande des parties, et la clôture a été prononcée avant l'ouverture des débats.
Aux termes de ses dernières écritures intitulées ' conclusions d'appelant n°2 devant la cour d'appel de Nîmes' et de son bordereau de communication de pièces daté du 7 octobre 2024, M. [H] [D] demande à la cour de :
- infirmer dans toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes intervenu le 23 novembre 2022, en ce qu'il l' a débouté de l'intégralité de ses demandes, et notamment en ce qu'il a refusé de déclarer nul et sans cause réelle et sérieuse son licenciement par la SAS API2M et de condamner cette dernière au paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés correspondants et d'indemnité de licenciement,
Statuant de nouveau,
- déclarer illicite et en tous cas sans cause réelle et sérieuse le licenciement notifié par SAS API2M en raison de la faute commise par l'employeur à l'origine de l'inaptitude et le manquement de l'employeur à son obligation de reclassement,
- constater que son inaptitude est partiellement imputable à son accident du travail du 8 novembre 2013,
- voir condamner la SAS API2M, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à lui payer les sommes suivantes :
- 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement illicite et, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse,
- 4 067,63 euros à titre d'indemnité spéciale compensatrice de préavis prévue à l'article L.1226-14 du code du travail,
- 18 765,34 euros à titre d'indemnité spéciale de licenciement prévue à l'article L 1226-14 du code du travail, à compenser avec l'indemnité légale de licenciement de 8 478,95 euros,
- 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de formation et de maintien des capacités du salarié à occuper un emploi au sein de l'entreprise,
- 2 000 euros au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SAS API2M à lui remettre ses bulletins de salaires rectifiés et une attestation Pôle Emploi conforme sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de 15 jours après la notification de la décision à intervenir,
- voir condamner SAS API 2M à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à la salariée dans la limite de 6 mois en application de l'article L.1235-4 du code du travail,
- la condamner aux entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, M. [H] [D] fait valoir que :
- aucune prescription ne lui est opposable puisque la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 relative à l'urgence sanitaire en raison de la pandémie liée à la COVID 19 et l'ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 avaient prorogé les délais échus pendant cette période,
- la signature du solde de tout compte n'a d'effet libératoire que pour les sommes qui y sont mentionnées, et ses demandes salariales et indemnitaires, qui concernent notamment l'indemnité spéciale de licenciement qui ne figure pas sur le solde de tout compte, sont recevables,
- il a fait l'objet de plusieurs arrêts suite à sa reprise du travail après son arrêt maladie consécutif à l'accident du travail dont il a été victime le 8 novembre 2013, faute pour l'employeur d'avoir adapté son poste de travail en tenant compte des restrictions de son aptitude physique, ce qui a eu pour conséquence d'aggraver les séquelles de son accident du travail,
- même si la Caisse Primaire d'assurance maladie a refusé de prendre en charge son arrêt de travail du 23 février 2018 au titre de la législation relative aux risques professionnels, la durée de celui-ci démontre bien une aggravation de son état de santé, le médecin du travail ayant demandé dans son avis du 9 février 2019 que son arrêt soit prolongé,
- au surplus, la pénibilité des travaux qui lui étaient confiés a été accrue dès 2017, et il a été victime de pressions de la part de son employeur dès qu'il lui a rappelé que ses conditions de travail n'étaient pas compatibles avec son état de santé,
- la SAS API2M n'a pas été loyale dans sa recherche de postes de reclassement puisqu'elle n'a pas répondu à sa demande de suivre une formation pour obtenir le permis EC qui lui aurait permis d'accéder à un poste au sein de la société DISPAM, à proximité de son domicile, qu'elle n'a pas sollicité la SAMETH alors qu'il avait sollicité la reconnaissance de son statut de travailleur handicapé en février 2019, et qu'elle a ignoré ses demandes pour être reclassé à un poste d'agent d'entretien,
- son inaptitude trouve au moins partiellement son origine dans l'accident du travail dont il a été victime en 2013 puisque les soins qu'il suivait préalablement à son dernier arrêt de travail ont bien été pris en charge par l'organisme social au titre de celui-ci,
- la SAS API2M ne peut pas soutenir sérieusement qu'elle ignorait qu'il avait conservé des séquelles de son accident du travail, et que son inaptitude consécutive à la dégradation générale de son état de santé était au moins partiellement d'origine professionnelle,
- en l'absence de recherche loyale et sérieuse de reclassement son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et lui ouvre droit à des dommages et intérêts,
- le caractère professionnel de son inaptitude lui donne droit au bénéfice de l'indemnité spéciale de licenciement et à l'indemnité légale de préavis correspondant à deux mois de salaire,
- en raison du manquement de son employeur à l'obligation de formation pour lui garantir son adaptation à l'évolution de son emploi, il est fondé à solliciter des dommages et intérêts.
Aux termes de ses dernières écritures d'intimée en date du 07 octobre 2024, la SAS API2M demande à la cour de :
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Avignon du 23 novembre 2022, en ce qu'il a :
- débouté M. [D] de l'intégralité de ses demandes,
- mis les dépens ainsi que les éventuels frais d'exécution à la charge de M. [D],
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du CPC et statuant à nouveau de ce chef, condamner M. [D] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter M. [D] de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.
- condamner M. [D] aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel.
Au soutien de ses demandes, la SAS API2M fait valoir que :
- M. [H] [D] a signé son solde de tout compte sans réserve lequel mentionne le montant de son indemnité de licenciement, il est donc forclos dans sa demande présentée au titre de l'indemnité spéciale de licenciement, étant au surplus observé qu'il sollicite la compensation de la somme ainsi demandée avec celle qui lui a été versée au titre de l'indemnité de licenciement visée au solde de tout compte confirmant qu'il s'agit bien d'une indemnité de même nature,
- M. [H] [D] a repris le travail le 31 août 2015 suite à son accident du travail de novembre 2013 et depuis cette date, le médecin du travail l'a déclaré apte à son poste sans restriction, que ce soit en 2016 ou en 2018,
- la Caisse Primaire d'assurance maladie a rejeté sa demande de prise en charge au titre d'une rechute en septembre 2018 de son accident du travail,
- elle a respecté le seul aménagement de poste qui lui a été demandé, qui ne concernait que le temps de travail, pendant la période de mi-temps thérapeutique d'avril 2014 à août 2015,
- dans le cadre de l'arrêt de travail à compter de septembre 2018, M. [H] [D] omet d'indiquer qu'il a été contrôlé par la Caisse Primaire d'assurance maladie, laquelle a ensuite refusé le versement des indemnités journalières au motif que l'arrêt n'était plus justifié,
- le médecin du travail n'a jamais fait mention d'une origine professionnelle de l'inaptitude dans ses avis et M. [H] [D] n'a jamais formé de recours contre ceux-ci,
- aucun des griefs formulés à son encontre par M. [H] [D] n'est caractérisé, les refus de congés étant systématiques pour tous les salariés en période estivale, quelque soit leur situation, les allégations de M. [H] [D] sur l'augmentation de sa charge de travail sont dénuées de tout fondement,
- M. [H] [D] omet de préciser qu'il a été sanctionné en août 2017 pour menaces de représailles et menace d'arrêt de travail s'il ne lui accordait pas ses congés,
- elle a respecté les recommandations du médecin du travail qui suggérait un poste de chauffeur avec transpalette électrique et non comme le soutient M. [H] [D] un poste de conducteur de transpalette électrique, ainsi que les formations dont disposait M. [H] [D] pour procéder à une recherche de reclassement,
- M. [H] [D] a refusé les propositions de reclassement qui lui ont été faites en interne, alors même qu'elle proposait de lui financer une formation FIMO pour lui permettre d'accéder à certains postes,
- la consultation des registres du personnel qu'elle verse aux débats établit qu'il n'existait aucun poste disponible susceptible d'être proposé à M. [H] [D] en dehors de ceux qu'il a refusés, étant observé que les postes au sein de DISPAM que revendique ce dernier sont des postes de conducteur super poids lourds nécessitant d'être titulaire du permis EC dont M. [H] [D] ne dispose pas,
- outre que M. [H] [D] ne bénéficiait pas du statut de travailleur handicapé à la date de son licenciement, il n'a jamais sollicité que la SAMETH soit consultée et la jurisprudence qu'il invoque en ce sens ne lui est pas transposable,
- les recherches de reclassement en externe n'ont pas abouti,
- le licenciement n'étant pas fondé sur une inaptitude d'origine professionnelle, aucune indemnité de préavis n'est dûe,
- outre son irrecevabilité, la demande d'indemnité spéciale de licenciement est infondée et ne peut en tout état de cause que consister dans le doublement de l'indemnité légale et non conventionnelle de licenciement,
- subsidiairement, la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse n'est pas motivée, M. [H] [D] n'ayant au surplus justifié de sa situation personnelle qu'au jour de la clôture, laquelle démontre qu'il a travaillé dès courant 2019,
- M. [H] [D] ne justifie pas de la réalité d'un préjudice au titre du manquement à l'obligation de formation étant rappelé qu'elle lui a permis de suivre une formation FONGECIF et qu'il a refusé sa proposition quant à la FIMO.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS
Recevabilité de la demande d'indemnité spéciale de licenciement
Par application des dispositions de l'article L 1234-20 du code du travail, le solde de tout compte, établi par l'employeur et dont le salarié lui donne reçu, fait l'inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail.
Le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature, délai au-delà duquel il devient libératoire pour l'employeur pour les sommes qui y sont mentionnées.
En l'espèce, la SAS API2M soutient que la demande soutenue par M. [H] [D] au titre du doublement de l'indemnité légale de licenciement est irrecevable faute pour celui-ci d'avoir contesté dans le délai de 6 mois le reçu pour solde de tout compte qu'il a signé le 21 mai 2019, lequel mentionne une indemnité de licenciement d'un montant de 8.478,95 euros.
M. [H] [D] conteste cette analysé et fait valoir que sa demande vise l'indemnité spéciale de licenciement et non l'indemnité de licenciement qui sont deux indemnités différentes.
Ceci étant, l'indemnité spéciale de licenciement prévue par l'article L 1226-14 du code du travail [ La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, (...) à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9] se substitue en cas de licenciement pour inaptitude à l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement prévue à l'article L 1234-9 du code du travail .
Ainsi, les deux indemnités sont de même nature, seul leur montant diffère en fonction de la nature du licenciement, l'une est exclusive de l'autre.
En conséquence, M. [H] [D] devait contester le solde de tout compte portant une mention selon lui erronée du montant de l'indemnité à laquelle il pouvait prétendre du fait de son licenciement et c'est à juste titre que le premier juge a constaté qu'il était recevable en sa demande. La décision déférée ayant statué en ce sens sera confirmée sur ce point.
* sur le fond
Demandes relatives à l'exécution du contrat de travail
L'article L 6321-1 du code du travail dans ses versions successives applicables au litige dispose que l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail.
Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.
Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme, notamment des actions d'évaluation et de formation permettant l'accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret.
Les actions de formation mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de formation mentionné au 1° de l'article L. 6312-1. Elles peuvent permettre d'obtenir une partie identifiée de certification professionnelle, classée au sein du répertoire national des certifications professionnelles et visant à l'acquisition d'un bloc de compétences.
Au visa de ce texte, M. [H] [D] sollicite la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts pou pour manquement de la SAS API2M à son obligation de formation pour assurer l'adaptation du salarié à l'évolution de son emploi. Il fait valoir que la seule formation qu'il a pu suivre, de type FONGECIF, n'est due qu'à sa seule initiative, et il ne s'est ensuite vu proposer aucun poste correspondant à sa nouvelle formation.
Il en déduit l'existence d'un préjudice en raison des difficultés dans lesquelles il s'est trouvé suite à la rupture de son contrat de travail pour retrouver un emploi.
La SAS API2M s'oppose à cette demande en rappelant que M. [H] [D] ne peut solliciter une double indemnisation au titre de l'obligation de reclassement dans le cadre du licenciement pour inaptitude. Elle rappelle au surplus qu'elle a validé le dossier FONGECIF de M. [H] [D] en lui garantissant un retour à son poste de travail à l'issue de la formation, à défaut de pouvoir disposer et proposer un poste en corrélation avec sa nouvelle qualification.
Elle fait valoir que contrairement à ce qui est soutenu par M. [H] [D], elle lui a proposé dans le cadre des offres de reclassement de lui financer une formation FIMO à laquelle le salarié n'a pas donné suite.
Enfin, elle considère que M. [H] [D] ne justifie pas de la réalité du préjudice qu'il allègue.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [H] [D] ne produit aucun élément au soutien de cette demande de dommages et intérêts et ne justifie ni d'un préjudice spécifique à ce manquement tel que la nécessité de renoncer à des offres d'emploi faute de formation suffisante pour y prétendre, ni d'un préjudice distinct de celui résultant de la difficulté à retrouver un emploi consécutivement à son licenciement, difficulté qui est prise en compte le cas échéant dans la détermination de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La décision déférée ayant statué en ce sens sera confirmée.
Demandes relatives à la rupture du contrat de travail
M. [H] [D] a été licencié pour inaptitude d'origine non professionnelle et impossibilité de reclassement par courrier daté du 9 mai 2019 rédigé dans les termes suivants :
' Monsieur,
Nous faisons référence à notre entretien du jeudi 30 avril 2019 à 11h00 avec Mme [T] [R], entretien auquel vous vous êtes présenté accompagné de Monsieur [J] [O], membre de la délégation unique du personnel.
Nous vous rappelons la situation :
Vous avez été en arrêt de travail du 12/09/2018 au 28/09/2018, puis en arrêt maladie du 01/10/2018 au 08/03/2019.
Vous avez passé une première visite médicale de reprise le 12 mars 2019 suite à laquelle vous avez été déclaré 'inaptitude au poste à prévoir. Contre-indication à la manutention manuelle répétée et lourde. Apte par exemple au poste de conducteur avec transpalette électrique. Revoir pour une 2ème visite.'
Le 19 mars 2019, vous avez eu la 2nd visite médicale, suite à laquelle le Dr [E] a déclaré « Inaptitude au poste. Contre-indication à la manutention manuelle répétée ou lourde. Apte par exemple au poste de conducteur avec transpalette électrique ».
Nous avons sollicité en date du 27 mars 2019, les Responsables ou Directeurs d'agence de notre société et des autres sociétés du Groupe afin d'examiner un reclassement possible au sein de leur site.
Nous avons également informé, en date du 27 mars 2019, la Fédération des entreprises de Transport et Logistique de France de votre inaptitude. Celle-ci est chargée de diffuser cette information à l'ensemble de ses adhérents (entreprises de transport de la région) qui pourraient être amenées à vous proposer un poste correspondant à votre inaptitude actuelle.
Dans le cadre de notre recherche de reclassement, au sein de notre société et des sociétés de notre groupe d'appartenance, nous avons été amené à examiner d'une part les postes vacants, et d'autre part ceux susceptibles de vous être proposés compatibles avec vos contraintes physiques et à la fiche d'inaptitude émise par le médecin du Travail.
Nous avons organisé une réunion des membres de la Délégation Unique du Personnel en qualité de délégués du personnel en séance extraordinaire le 08 avril 2019, afin de les consulter sur votre situation et les postes de reclassement envisagés. Ces derniers ont rendu un avis favorable.
Par courrier recommandé du 09 avril 2019, nous vous avons exposé le résultat de notre recherche de reclassement.
Sur les poste vacants au sein du groupe :
- manutentionnaires : aucun poste n'a pu vous être proposé du fait de votre inaptitude définitive au poste prononcée par le médecin du travail les 12 et 19 mars 2019.
- postes administratifs : les postes de gestionnaire opérationnel(le) administratif(ve) et d'assistant(e) d'exploitation à Auradis, de développeur EDI, d'assistant(e) au service encaissement ou au service RH sur [Localité 3] nécessitent une formation initiale spécifique que vous ne possédez pas et qui ne peut pas être acquise dans le cadre d'une simple adaptation au poste
- chef d'équipe logistique : poste sur le quai qui nécessite une aptitude à la manutention que vous n'avez pas
- quant aux postes de chauffeurs, vous êtes titulaire du permis C, sans FIMO. Les recherches de reclassement ont porté par conséquent sur les postes de chauffeurs poids lourds ( permis C), puisque vous n'êtes pas titulaire du permis EC, outre les contraintes physiques rattachées à ce porte ( arrimage, dételage, chargement et déchargement ), impliquant de la manutention plus ou moins lourde, incompatibles avec vos restrictions médicales,
les postes de chauffeurs sur lesquels nous recrutons sont presque exclusivement des postes de chauffeurs SPL ( permis EC ) pour la conduite d'ensembles articulés. Le transport en véhicule PL ( permis C ) est une activité de distribution fine ( messagerie ) de laquelle nous nous désengageons progressivement depuis plusieurs années sur [Localité 3] notamment.
A l'issue des différentes recherches que nous avons entreprises dans le but de vous conserver un emploi, nous avons été en mesure de vous proposer les postes de reclassement suivants :
- Société : AURADIS ' (Macon Loché)
Poste proposé : Conducteur PL Courte distance
Missions : Livrer et enlever des marchandises, sous température dirigée, dans le respect de la réglementation en vigueur et de la chaîne du froid.
Salaire de 1862.44 euros Bruts pour 169 heures mensuels + heures de nuit rémunérées selon la législation en vigueur + Prime qualité de 150 euros Bruts + Indemnisation des frais de route
Société : HELIODIS ([Localité 7])
Poste proposé : Conducteur PL Courte distance
Missions : Livrer et enlever des marchandises, sous température dirigée, dans le respect de la réglementation en vigueur et de la chaîne du froid.
Salaire de 1775.81 euros Bruts pour 169 heures mensuels +Prime qualité de 140 euros Bruts + Indemnisation des frais de route
Nous vous avons également informé qu'en cas d'acceptation de l'un de ces postes, nous organiserons votre inscription à la FIMO dont vous n'êtes pas titulaire et qui est obligatoire pour l'exercice du métier de Conducteur PL.
Par lettre du 12 avril 2019. reçue le 15 avril 2019. vous nous avez informé de votre refus des postes de reclassement proposés.
Par lettre recommandée du 19 avril 2019, nous vous avons convoqué à un entretien qui s'est tenu le 30 avril 2019 à 11h00.
Lors de cet entretien, vous nous avez fait part de votre intention de passer le permis EC. Toutefois, nous avons évoqué les différentes contraintes physiques liées à ce poste au sein de notre entreprise, impliquant de la manutention plus ou moins lourde, incompatibles avec vos restrictions médicales, ce dont vous avez convenu.
N'ayant pas d'autres postes de travail vacants et correspondants à vos restrictions médicales, sous sommes par conséquent dans l'obligation de vous notifier, par la présente, votre licenciement, pour inaptitude physique, déclarée par la médecine du travail les 12 et 19 mars 2019, et impossibilité de reclassement, licenciement qui prendra effet à la date d'envoi de la présente.
Du fait de votre impossibilité de travailler, la rupture prend effet immédiatement.
Nous vous informons que conformément à l'article L 911-8 du code de la sécurité sociale, vous bénéficierez du maintien, à titre gratuit, des garanties santé et prévoyance à compter de la date de cessation de votre contrat de travail et sous réserve de justifier d'une prise en charge par le régime de l'assurance chômage.
La durée de ce maintien est équivalente à la durée d'indemnisation par l'assurance chômage dans la limite de la durée de votre contrat de travail au sein de l'entreprise et en tout état de cause sans pouvoir excéder 12 mois.
Le service du personnel prendra contact avec vous afin de retirer votre solde de tout compte, certificat de travail et votre attestation Pôle emploi.
Nous vous prions d'agréer, Monsieur, l'expression de nos salutations distinguées.'
* sur l'origine de l'inaptitude
Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.
Puisque le droit du travail est autonome par rapport au droit de la sécurité sociale, l'application de ces dispositions protectrices n'est pas liée à la reconnaissance du caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie par un organisme de sécurité sociale . De la même manière, la circonstance qu'un salarié ait été au moment du licenciement déclaré consolidé de son accident du travail par la caisse primaire d'assurance maladie et pris en charge par les organismes sociaux au titre de la maladie n'est pas de nature à faire perdre à la salariée le bénéfice de la législation protectrice des accidentés du travail .
En conséquence, la mise en oeuvre du régime protecteur est seulement subordonnée à l'origine professionnelle de l'inaptitude et à sa connaissance par l'employeur. Ainsi, une décision de prise en charge ne constitue qu'un élément de preuve parmi d'autres laissés à l'appréciation du juge prud'homal auquel il appartient de rechercher lui-même l'existence d'un lien de causalité entre l'inaptitude et l'accident du travail ou la maladie professionnelle . De même, une décision de refus de prise en charge ne suffit pas davantage à écarter ce lien de causalité.
Ainsi, dès lors que l'accident est survenu au temps et au lieu du travail, la législation professionnelle s'applique, peu important la décision de refus prise par la caisse primaire d'assurance maladie et la connaissance ou non par l'employeur de l'exercice d'un recours du salarié. La protection s'applique également dès que l'employeur a eu connaissance de la nature professionnelle de la maladie ou de l'accident, même si la constatation par la sécurité sociale n'est pas encore intervenue ou n'a pas été sollicitée . De même, l'employeur qui est informé, au moment du licenciement, qu'une procédure avait été engagée par le salarié pour faire reconnaître le caractère professionnel de son accident ou de sa maladie doit mettre en oeuvre la législation professionnelle.
Les juges du fond ont obligation de rechercher eux mêmes l'existence de ce lien de causalité et la connaissance qu'avait l'employeur de l'origine professionnelle de l'accident ou de la maladie.
En l'espèce, M. [H] [D] soutient que l'inaptitude constatée par le médecin du travail trouve son origine dans l'aggravation des séquelles de son accident du travail du 8 novembre 2013, aggravation qui est la conséquence d'un manquement de l'employeur qui n'a pas adapté son poste de travail à son état de santé et qui l'a soumis à des conditions de travail et des pressions croissantes liées à la productivité.
Il reproche à son employeur de l'avoir sanctionné alors qu'il l'alertait sur le fait que ses conditions de travail n'étaient pas compatibles avec son état de santé.
Il considère que le refus de prise en charge des lésions à l'origine de son arrêt de travail de septembre 2018 au titre d'une rechute par la Caisse Primaire d'assurance maladie s'explique par le fait qu'il ne s'agissait pas de lésions nouvelles mais de l'aggravation des séquelles de son accident du travail, ce qui caractérise l'origine professionnelle au moins partielle de celles-ci.
Au soutien de ses explications, M. [H] [D] verse aux débats :
- la prise en charge des soins dispensés à compter du 1er septembre 2015, sans précision de la date de fin de prise en charge, puis à compter du 23 février 2018, sans précision de la date de fin de prise en charge, au titre de l'accident du travail du 8 novembre 2013, sans précision de la nature des soins,
- l'avis du médecin du travail en date du 5 février 2019 mentionnant ' poursuivre les soins et l'arrêt de travail - aménagement de poste à prévoir avec diminution de la manutention - dossier RQTH conseillé',
- la sanction de mise à pied disciplinaire de deux jours en date du 4 août 2017, pour les faits suivants ' Le 6 juillet 2017 à 9h, vous avez demandé des explications à votre responsable, M. [C] [Z] concernant le refus de vos congés d'été 2017, soit du 07 au 20/07/2017. Ce dernier vous a répondu que vous n'étiez pas prioritaire cette année. Ce à quoi vous avez répondu ' Ok je me mettrai donc en accident du travail sur les jours que j'ai posé comme ça je serais en vacances'. Votre chef d'équipe M. [I] [W] atteste que vous avez tenu le même discours lors de votre prise de poste à 7h30, le 07/07/2017.
Lors de l'entretien vous expliquez que vous avez tenu ces propos et que vous le regrettez. Vous avez dit cela sur le coup de la colère mais après réflexion, notre décision vous semble équitable vis-à-vis des membres de l'équipe. Cependant vous ne pouvez proférer des menaces de la sorte dès que votre responsable vous refuse des congés sur les dates que vous souhaitiez',
- des documents intitulés ' fiche élément de paie - manutentionnaire emballages' pour les mois de :
- février 2013 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' une nouvelle fois [H] a pris l'initiative de charger des palettes sans se référer à son supérieur dans un camion qui n'était pas le bon ( Lustucru du 18/02)' ,
- juin, juillet et août 2014 avec attribution de 100% de la prime et mention d'une absence accident du travail sur toute la période,
- mars 2016 avec attribution de 100% de la prime et mention d'une absence rechute accident du travail sur toute la période,
- juin 2016 avec attribution de 100% de la prime et une mention d'absence du 1er au 21 pour maladie puis CP,
- juillet 2016 avec attribution de 75% de la prime en raison d'un ' défaut de filmage durant l'audit du 29/06",
- septembre 2016 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' Le 19/06/2016 inversion des colis sur le discount - Le 07/09/2016 préparation d'une référence en FR LS non posée sur les palettes',
- octobre 2016 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' non-respect des procédures de préparation',
- juillet 2017 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' erreur de préparation le 27 07 2017, 10 colis de lait mis en casse ventilation car bien réceptionné mais introuvable. Inversion de colis sur l'atelier 5 eme gamme le 06 07 2017. Non-respect des procédures sur la qualité de préparation',
- août 2017 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' 31/07 saurisserie palettes avec colis débordants et mal filmés 01/08 9 colis validés mais non posés sur les supports',
- septembre 2017 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' mauvaise palettisations',
- novembre 2017 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' écarts lors de l'écartement des drives en préparation',
- janvier 2018 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' productivité catastrophique ( 700 colis de fromages en 8H de travail le 22/01) Ecart de préparation DRIVE manque 1colis de fromage le 10/01"
- février 2018 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' trop d'écarts en préparation ce mois ci',
- mars 2018 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' écarts de préparation',
- avril 2018 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' des écarts en préparation ce mois ci',
- mai 2018 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' écarts en préparation',
- août 2018 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' palettisation non conforme et erreur de préparation',
- janvier 2019 avec attribution de 0% de la prime avec mentions d'absences maladie sur toute la période,
- février 2019 avec attribution de 100% de la prime avec mentions d'absences justifiées non rémunérées sur toute la période,
- mars 2019 avec attribution de 0% de la prime avec mentions d'absences maladie, cp et absences justifiées non rémunérées sur toute la période,
- avril 2019 avec attribution de 100% de la prime avec mentions d'absences justifiées non rémunérées sur toute la période,
- décembre 2019 avec attribution de 100% de la prime avec mentions d'absences maladie sur toute la période,
- l'avis du médecin du travail en date du 21 juin 2016 qui dans le cadre d'une visite médicale de reprise le déclare 'Apte - apte conduite de chariot',
- les pièces relatives à la formation FONGECIP ' agent d'entretien de bâtiment' qu'il a suivie et validée du 17/10/2016 au 23/06/2017,
- des échanges de courriers d'octobre 2018 avec son employeur, aux termes desquels M. [H] [D] sollicite suite à la validation de sa formation, un changement de poste pour ' pouvoir rejoindre les services généraux ( maintenance ) de votre établissement' , et la réponse de la SAS API2M lui indiquant ne pouvoir donner suite à sa demande en l'absence de 'besoin de recrutement sur ce service à ce jour'.
La SAS API2M conteste toute origine professionnelle à l'inaptitude de M. [H] [D] et rappelle sans être utilement contredite que le médecin du travail l'a depuis la fin de son mi-temps thérapeutique en août 2015, toujours déclaré apte à son poste sans restriction et qu'il ne peut lui être reproché aucun manquement quant à une adaptation du poste de travail. Elle produit en ce sens les avis d'aptitude successifs rendus par le médecin du travail.
Elle nie toute forme d'accroissement de ses exigences ou de la pression exercée sur le salarié faisant valoir que M. [H] [D] occupe le même poste depuis des années, qui n'a pas changé dans ses modalités de fonctionnement.
Elle fait valoir que non seulement la Caisse Primaire d'assurance maladie a refusé le caractère de rechute de l'accident du travail aux lésions fondant l'arrêt de travail d'octobre 2018, mais qu'elle a également considéré que l'arrêt de travail n'était plus justifié au titre de l'assurance maladie à compter du 9 mars 2019.
De fait, aucune des pièces produites par M. [H] [D] ne mentionne la nécessité d'un aménagement de son poste de travail en dehors des pièces relatives à la mise en place d'un mi-temps thérapeutique en 2015 dont il n'est pas soutenu qu'il n'aurait pas été respecté par l'employeur.
Les documents ' fiche élément de paie - manutentionnaire emballages' partiellement produits sur la période de travail ne caractérisent aucune accentuation de la pression qui aurait été exercée sur le salarié ou une augmentation de la pénibilité de son emploi, étant observé que M. [H] [D] a pu bénéficier de la prime qui correspond pour moitié à la 'qualité de la prestation' et pour moitié à la disponibilité sur des mois où il était absent pendant toute la période. Les non attributions intégrales ou partielles de primes sont motivées par des faits précis dont M. [H] [D] ne démontre pas en quoi ils seraient erronés ou la conséquence d'un accroissement d'exigence à son égard.
L'avis d'aptitude du 21 juin 2016, contrairement à ce qui est soutenu par l'appelant, ne pose aucune restriction à son aptitude, puisqu'il est mentionné ' Apte' en caractère gras et dessous ' apte conduite chariots' sans aucune mention de tâches qu'il ne pourrait accomplir. Déduire de la mention ' apte conduite chariots' que M. [H] [D] est inapte à toute autre tâche est contraire à la mention d'aptitude portée en caractère gras sur le certificat, étant au surplus observé que ce certificat d'aptitude intervient après plusieurs certificats médicaux du médecin du travail en lien avec le mi-temps thérapeutique dont a bénéficié M. [H] [D] sur lesquels était mentionnée une ' aptitude avec aménagement de poste'.
La sanction du 4 août 2017, contrairement à ce qui est soutenu par M. [H] [D], ne vient pas sanctionner son droit d'expression mais un chantage envers son responsable suite à un refus de congés et ne saurait caractériser un refus par l'employeur de prendre en compte la situation médicale de son salarié qui ne peut sérieusement anticiper le fait qu'il serait un mois plus tard en ' accident du travail' lequel suppose un événement soudain survenu au temps et au lieu du travail.
Enfin, l'absence d'affectation sur un poste suite à la validation de la formation ' agent d'entretien de bâtiment' n'a aucune incidence sur l'appréciation de l'origine de l'inaptitude, étant rappelé au surplus que l'acceptation par l'employeur d'un suivi de formation n'implique pas pour lui l'obligation en cas de validation d'affecter le salarié sur un poste correspondant à celle-ci.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [H] [D] ne rapporte pas la preuve que son inaptitude à son poste de travail constatée par le médecin du travail le 19 mars 2019 a une origine professionnelle.
En conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a débouté M. [H] [D] de cette demande et de ses demandes indemnitaires subséquentes.
La décision déférée sera confirmée sur ce point.
* existence d'une cause réelle et sérieuse - recherches de reclassement loyales et sérieuses
Selon l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
En l'espèce, il ressort des termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, que le licenciement de M. [H] [D] a été prononcé pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement.
L'article L 1226-10 du code du travail dispose que lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions
écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au
besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.
Pour l'application du présent article, le groupe est défini, lorsque le siège social de l'entreprise dominante est situé sur le territoire français, conformément au I de l'article L. 2331-1 et, dans le cas contraire, comme constitué par l'ensemble des entreprises implantées sur le territoire français.
En cas de constat d'inaptitude à reprendre l'emploi précédemment occupé, le salarié bénéficie d'un droit au reclassement affirmé dans son principe par les articles L.1226-2 et L.1226-10 du code du travail. Qu'elle soit totale ou partielle, temporaire ou permanente l'inaptitude ouvre droit à cette obligation.
L'obligation de reclassement est mise à la charge de l'employeur qui doit rechercher un autre emploi approprié aux capacités du salarié, en tenant compte des conclusions écrites du médecin du travail, notamment des indications qu'il formule sur l'aptitude de l'intéressé à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.
Les recherches et propositions de reclassement doivent être «sérieuses». L 'emploi offert doit être aussi comparable que possible à celui précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.
Le médecin du travail a la possibilité de « dispenser » l'employeur de rechercher un reclassement par une mention expresse dans l'avis d'inaptitude, quelle que soit l'origine de l'inaptitude et quelle que soit la nature du contrat de travail dans l'hypothèse où « le maintien du salarié dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé » et dans l'hypothèse où « l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi »
Les propositions de reclassement faites par l'employeur doivent être loyales et sérieuses. L'emploi proposé doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. L'appréciation du caractère sérieux de la recherche de reclassement relève du pouvoir souverain des juges du fond. L'obligation de recherche n'implique pas que l'employeur soit tenu de proposer un poste qui n'est pas disponible ou d'imposer à un autre salarié une modification de son contrat de travail afin de libérer son poste pour le proposer en reclassement au salarié inapte.
S'agissant de la charge de la preuve, il incombe à l'employeur de prouver qu'il a mis
en oeuvre toutes les possibilités de reclassement.
En l'espèce, l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail le 19 mars 2019 mentionne ' inaptitude au poste - contrindication à la manutention manuelle répétée ou lourde - apte par exemple : poste conducteur avec transpalette électrique'.
Pour justifier du respect de son obligation de recherche de reclassement, la SAS API2M fait valoir qu'elle a tenu compte des diplômes, titres et permis ainsi que de l'expérience de M. [H] [D], et de l'avis du médecin du travail en précisant qu'un conducteur avec transpalette électrique est un chauffeur routier qui utilise un transpalette électrique pour décharger son camion, et non pas comme le soutient l'appelant un poste de conducteur de transpalette électrique, lequel correspond à un emploi de manutentionnaire qui conduit les engins de manutention pour déplacer les palettes, et suppose d'être titulaire d'un CACES.
Elle explique que compte-tenu de son activité, ses postes de conducteurs correspondent à des postes de chauffeur poids lourds ou super poids lourds, nécessitant d'être titulaire du permis EC ainsi que de la FIMO, ce qui n'est pas le cas de M. [H] [D] qui ne dispose que d'un permis C.
Elle a proposé à M. [H] [D] de lui financier une formation FIMO à laquelle il n'a pas donné suite.
Elle a en parallèle de cette proposition de formation identifié les postes de conducteurs permis C au sein du groupe auquel elle appartient, et a ensuite interrogé le médecin du travail pour validation des deux postes ayant ainsi été identifiés, lesquels ont été proposés au salarié par courrier du 9 avril 2019 qui les a refusés par courrier du 12 avril 2019, et n'a pas répondu à la proposition de financement de la FIMO.
Elle précise justifier par la production des registres du personnel des sociétés du groupe desquels elle déduit qu'il n'existait pas de postes autres que ceux proposés à M. [H] [D] répondant à ses compétences et aux recommandations du médecin du travail.
La SAS API2M produit au soutien de ses explications :
- les six courriers adressés aux sociétés du groupe, reprenant la situation personnelle de M. [H] [D], les mentions portées sur l'avis d'inaptitude, le fait qu'il soit titulaire du permis C 'mais ne possède pas encore la FIMO', ainsi qu'à TLF Méditerranée (organisation professionnelle qui représente l'ensemble des métiers de la chaîne du transport et de la logistique ), pour diffusion à ses adhérents,
- les réponses des sociétés, dont deux précisant qu'elles recherchent uniquement des conducteurs permis EC, une qu'elle propose deux postes de manutentionnaire en contrat de travail à durée déterminée et contrat saisonnier,
- le procès-verbal de consultation des représentants du personnel sur les propositions de reclassement envisagées pour M. [H] [D], soit deux postes de chauffeur poids lourds courte distance permis C basés à [Localité 5] et [Localité 7], en précisant que ces postes nécessitent d'être titulaire de la FIMO qui sera financée par l'entreprise en cas d'acceptation d'un des deux postes,
- la consultation du médecin du travail sur les propositions de reclassement,
- la réponse de M. [H] [D] aux propositions de reclassement en date du 12 avril 2014 dans lequel il indique ' je suis surpris de votre proposition de postes. En effet, vous me proposez des postes situés à plus de 500 km de mon domicile. Ma situation personnelle ne me permet pas d'envisager un déménagement. De ce fait, je me vois dans l'obligation de refuser ces deux postes. Je suis prêt à étudier avec vous la possibilité de passer le permis EC',
- son registre du personnel et celui des autres sociétés du groupe sur la période concernée.
M. [H] [D] conteste le caractère loyal et sérieux de la recherche de reclassement en faisant valoir que la SAS API2M n'a pas répondu à sa demande de lui permettre de passer le permis EC qui lui aurait ouvert la possibilité d'être reclassé sur un poste à proximité de son domicile.
Elle lui reproche également de ne pas avoir contacté un organisme tel que la SAMETH alors qu'il avait sollicité la reconnaissance de son statut de travailleur handicapé dès février 2019, et de ne pas avoir accédé avant son incapacité à sa demande de reclassement sur un poste en maintenance.
Enfin, elle considère que la SAS API2M aurait dû lui proposer l'un des quatre postes publié par la société DISPAM [Localité 3], laquelle appartient au même groupe que son employeur.
Ceci étant, il a été évoqué supra l'absence de poste en maintenance tel que sollicité par M. [H] [D], ce qui exclut toute possibilité de reclassement à ce titre.
De même, si l'employeur est tenu de mettre en oeuvre des mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail, il n'a pas pour autant l'obligation de financer des formations onéreuses telle que le permis EC pour permettre un reclassement de son salarié déclaré inapte.
Enfin, les postes proposés par la société DISPAM revendiqués par M. [H] [D] posent comme pré-requis d'être titulaire du permis EC et de la FIMO, ce qui n'est pas le cas de ce dernier.
Par ailleurs, l'absence de consultation de la SAMETH ne saurait être reprochée à la SAS API2M qui fait valoir à juste titre que M. [H] [D] ne s'est vu reconnaître le statut de travailleur handicapé que postérieurement à son licenciement, en août 2019.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la SAS API2M a procédé à une recherche loyale et sérieuse de reclassement au profit de M. [H] [D] qui a justement été débouté de sa demande de requalification de son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse sur ce fondement, et de ses demandes indemnitaires subséquentes.
La décision déférée ayant statué en ce sens sera confirmée sur ce point.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 23 novembre 2022 par le conseil de prud'hommes d'Avignon,
Condamne M. [H] [D] à verser à la SAS API2M la somme de 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne M. [H] [D] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 22/04107 - N° Portalis DBVH-V-B7G-IVBY
CRL/JLB
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AVIGNON
23 novembre 2022
RG :20/00286
[D]
C/
S.A.S. API2M
Grosse délivrée le 28 AVRIL 2025 à :
- Me BREUILLOT
- Me VAJOU
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 28 AVRIL 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AVIGNON en date du 23 Novembre 2022, N°20/00286
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et Monsieur Julian LAUNAY BESTOSO, Greffier, lors du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 05 Novembre 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 Janvier 2025 puis prorogée au 10 mars 2025 puis au 31 mars 2025 puis au 28 avril 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANT :
Monsieur [H] [D]
né le 02 Avril 1971 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Anne-france BREUILLOT de la SELARL BREUILLOT & AVOCATS, avocat au barreau de CARPENTRAS
INTIMÉE :
S.A.S. API2M
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LX NIMES, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Chrystelle MICHEL, avocat au barreau D'AVIGNON
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 28 avril 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
M. [H] [D] a été embauché le 07 mars 2003 suivant contrat de travail à durée déterminée à temps complet de deux mois par la SAS DISPAM, en qualité de manutentionnaire.
Le 11 mai 2003, le salarié a régularisé avec la SAS DISPAM un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet pour un poste de manutentionnaire jour. A compter du 14 mars 2012, le contrat de travail du salarié a été transféré à la SAS API2M, à effet au 18 mars 2013, avec reprise de son ancienneté.
La relation de travail est soumise à la convention collective nationale des transports routiers.
Le 14 mars 2013, M. [D] a été promu opérateur de flux avec un salaire correspondant au SMIC majoré d'une prime qualité mensuelle de 80 euros bruts établie en fonction de sa productivité.
Au dernier état de la relation de travail, le salaire de M. [D] était de 1 524,28 euros bruts pour 151,67 heures par mois, avec une prime d'ancienneté de 91,46 euros bruts soit un total mensuel de 1 615,74 euros bruts.
Le 8 novembre 2013, M. [D] a été victime d'un accident pris en charge par la sécurité sociale au titre de la législation relative aux risques professionnels.
Suite aux visites de reprise des 07 avril 2014, 30 mars 2015 et 29 juin 2015, le salarié a repris le travail à mi-temps thérapeutique. Trois avenants réduisant le temps de travail du salarié ont été conclus en date des 07 avril 2014, 30 mars 2015 et 31 août 2015.
Lors de la visite de reprise en date du 31 août 2015, M. [D] a été déclaré apte à reprendre son poste à temps complet, sans aucune réserve. Lors des visites médicales des 21 juin 2016 et 17 janvier 2018, le salarié a été déclaré apte à son poste de travail sans réserve.
Par ailleurs, M. [D] a obtenu une prise en charge du FONGECIF afin de suivre une formation d'agent d'entretien du bâtiment, dont il a obtenu le titre professionnel le 22 juin 2017.
M. [H] [D] a déclaré une rechute le 11 septembre 2018, laquelle a fait l'objet d'un refus de prise en charge par la Caisse Primaire d'assurance maladie au titre de la législation relative aux risques professionnels le 6 mars 2019.
M. [D] a été placé en arrêt de travail au titre de l'assurance maladie du 13 au 18 mars 2019, et a été déclaré inapte par le médecin du travail lors des visites de reprise des 12 et 19 mars 2019.
M. [D] a été licencié le 09 mai 2019 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Par requête du 30 juillet 2020, M. [D] a saisi le conseil de prud'hommes d'Avignon aux fins de voir qualifier son licenciement comme dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison de la faute de son employeur comme étant à l'origine de son inaptitude, et de voir condamner l'employeur au paiement de diverses sommes.
Par jugement en date du 23 novembre 2022, le conseil de prud'hommes d'Avignon a :
- débouté M. [D] de l'intégralité de ses demandes,
- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
- mis les dépens de l'instance ainsi que les éventuels frais d'exécution à la charge de M. [D].
Par acte du 22 décembre 2022, M. [D] a régulièrement interjeté appel de la décision.
Par ordonnance en date du 10 juin 2024, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 07 octobre 2024. L'affaire a été fixée à l'audience du 05 novembre 2024.
Lors de l'audience, il a été procédé au rabat de l'ordonnance de clôture à la demande des parties, et la clôture a été prononcée avant l'ouverture des débats.
Aux termes de ses dernières écritures intitulées ' conclusions d'appelant n°2 devant la cour d'appel de Nîmes' et de son bordereau de communication de pièces daté du 7 octobre 2024, M. [H] [D] demande à la cour de :
- infirmer dans toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes intervenu le 23 novembre 2022, en ce qu'il l' a débouté de l'intégralité de ses demandes, et notamment en ce qu'il a refusé de déclarer nul et sans cause réelle et sérieuse son licenciement par la SAS API2M et de condamner cette dernière au paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés correspondants et d'indemnité de licenciement,
Statuant de nouveau,
- déclarer illicite et en tous cas sans cause réelle et sérieuse le licenciement notifié par SAS API2M en raison de la faute commise par l'employeur à l'origine de l'inaptitude et le manquement de l'employeur à son obligation de reclassement,
- constater que son inaptitude est partiellement imputable à son accident du travail du 8 novembre 2013,
- voir condamner la SAS API2M, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à lui payer les sommes suivantes :
- 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement illicite et, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse,
- 4 067,63 euros à titre d'indemnité spéciale compensatrice de préavis prévue à l'article L.1226-14 du code du travail,
- 18 765,34 euros à titre d'indemnité spéciale de licenciement prévue à l'article L 1226-14 du code du travail, à compenser avec l'indemnité légale de licenciement de 8 478,95 euros,
- 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de formation et de maintien des capacités du salarié à occuper un emploi au sein de l'entreprise,
- 2 000 euros au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SAS API2M à lui remettre ses bulletins de salaires rectifiés et une attestation Pôle Emploi conforme sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de 15 jours après la notification de la décision à intervenir,
- voir condamner SAS API 2M à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à la salariée dans la limite de 6 mois en application de l'article L.1235-4 du code du travail,
- la condamner aux entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, M. [H] [D] fait valoir que :
- aucune prescription ne lui est opposable puisque la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 relative à l'urgence sanitaire en raison de la pandémie liée à la COVID 19 et l'ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 avaient prorogé les délais échus pendant cette période,
- la signature du solde de tout compte n'a d'effet libératoire que pour les sommes qui y sont mentionnées, et ses demandes salariales et indemnitaires, qui concernent notamment l'indemnité spéciale de licenciement qui ne figure pas sur le solde de tout compte, sont recevables,
- il a fait l'objet de plusieurs arrêts suite à sa reprise du travail après son arrêt maladie consécutif à l'accident du travail dont il a été victime le 8 novembre 2013, faute pour l'employeur d'avoir adapté son poste de travail en tenant compte des restrictions de son aptitude physique, ce qui a eu pour conséquence d'aggraver les séquelles de son accident du travail,
- même si la Caisse Primaire d'assurance maladie a refusé de prendre en charge son arrêt de travail du 23 février 2018 au titre de la législation relative aux risques professionnels, la durée de celui-ci démontre bien une aggravation de son état de santé, le médecin du travail ayant demandé dans son avis du 9 février 2019 que son arrêt soit prolongé,
- au surplus, la pénibilité des travaux qui lui étaient confiés a été accrue dès 2017, et il a été victime de pressions de la part de son employeur dès qu'il lui a rappelé que ses conditions de travail n'étaient pas compatibles avec son état de santé,
- la SAS API2M n'a pas été loyale dans sa recherche de postes de reclassement puisqu'elle n'a pas répondu à sa demande de suivre une formation pour obtenir le permis EC qui lui aurait permis d'accéder à un poste au sein de la société DISPAM, à proximité de son domicile, qu'elle n'a pas sollicité la SAMETH alors qu'il avait sollicité la reconnaissance de son statut de travailleur handicapé en février 2019, et qu'elle a ignoré ses demandes pour être reclassé à un poste d'agent d'entretien,
- son inaptitude trouve au moins partiellement son origine dans l'accident du travail dont il a été victime en 2013 puisque les soins qu'il suivait préalablement à son dernier arrêt de travail ont bien été pris en charge par l'organisme social au titre de celui-ci,
- la SAS API2M ne peut pas soutenir sérieusement qu'elle ignorait qu'il avait conservé des séquelles de son accident du travail, et que son inaptitude consécutive à la dégradation générale de son état de santé était au moins partiellement d'origine professionnelle,
- en l'absence de recherche loyale et sérieuse de reclassement son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et lui ouvre droit à des dommages et intérêts,
- le caractère professionnel de son inaptitude lui donne droit au bénéfice de l'indemnité spéciale de licenciement et à l'indemnité légale de préavis correspondant à deux mois de salaire,
- en raison du manquement de son employeur à l'obligation de formation pour lui garantir son adaptation à l'évolution de son emploi, il est fondé à solliciter des dommages et intérêts.
Aux termes de ses dernières écritures d'intimée en date du 07 octobre 2024, la SAS API2M demande à la cour de :
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Avignon du 23 novembre 2022, en ce qu'il a :
- débouté M. [D] de l'intégralité de ses demandes,
- mis les dépens ainsi que les éventuels frais d'exécution à la charge de M. [D],
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du CPC et statuant à nouveau de ce chef, condamner M. [D] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter M. [D] de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.
- condamner M. [D] aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel.
Au soutien de ses demandes, la SAS API2M fait valoir que :
- M. [H] [D] a signé son solde de tout compte sans réserve lequel mentionne le montant de son indemnité de licenciement, il est donc forclos dans sa demande présentée au titre de l'indemnité spéciale de licenciement, étant au surplus observé qu'il sollicite la compensation de la somme ainsi demandée avec celle qui lui a été versée au titre de l'indemnité de licenciement visée au solde de tout compte confirmant qu'il s'agit bien d'une indemnité de même nature,
- M. [H] [D] a repris le travail le 31 août 2015 suite à son accident du travail de novembre 2013 et depuis cette date, le médecin du travail l'a déclaré apte à son poste sans restriction, que ce soit en 2016 ou en 2018,
- la Caisse Primaire d'assurance maladie a rejeté sa demande de prise en charge au titre d'une rechute en septembre 2018 de son accident du travail,
- elle a respecté le seul aménagement de poste qui lui a été demandé, qui ne concernait que le temps de travail, pendant la période de mi-temps thérapeutique d'avril 2014 à août 2015,
- dans le cadre de l'arrêt de travail à compter de septembre 2018, M. [H] [D] omet d'indiquer qu'il a été contrôlé par la Caisse Primaire d'assurance maladie, laquelle a ensuite refusé le versement des indemnités journalières au motif que l'arrêt n'était plus justifié,
- le médecin du travail n'a jamais fait mention d'une origine professionnelle de l'inaptitude dans ses avis et M. [H] [D] n'a jamais formé de recours contre ceux-ci,
- aucun des griefs formulés à son encontre par M. [H] [D] n'est caractérisé, les refus de congés étant systématiques pour tous les salariés en période estivale, quelque soit leur situation, les allégations de M. [H] [D] sur l'augmentation de sa charge de travail sont dénuées de tout fondement,
- M. [H] [D] omet de préciser qu'il a été sanctionné en août 2017 pour menaces de représailles et menace d'arrêt de travail s'il ne lui accordait pas ses congés,
- elle a respecté les recommandations du médecin du travail qui suggérait un poste de chauffeur avec transpalette électrique et non comme le soutient M. [H] [D] un poste de conducteur de transpalette électrique, ainsi que les formations dont disposait M. [H] [D] pour procéder à une recherche de reclassement,
- M. [H] [D] a refusé les propositions de reclassement qui lui ont été faites en interne, alors même qu'elle proposait de lui financer une formation FIMO pour lui permettre d'accéder à certains postes,
- la consultation des registres du personnel qu'elle verse aux débats établit qu'il n'existait aucun poste disponible susceptible d'être proposé à M. [H] [D] en dehors de ceux qu'il a refusés, étant observé que les postes au sein de DISPAM que revendique ce dernier sont des postes de conducteur super poids lourds nécessitant d'être titulaire du permis EC dont M. [H] [D] ne dispose pas,
- outre que M. [H] [D] ne bénéficiait pas du statut de travailleur handicapé à la date de son licenciement, il n'a jamais sollicité que la SAMETH soit consultée et la jurisprudence qu'il invoque en ce sens ne lui est pas transposable,
- les recherches de reclassement en externe n'ont pas abouti,
- le licenciement n'étant pas fondé sur une inaptitude d'origine professionnelle, aucune indemnité de préavis n'est dûe,
- outre son irrecevabilité, la demande d'indemnité spéciale de licenciement est infondée et ne peut en tout état de cause que consister dans le doublement de l'indemnité légale et non conventionnelle de licenciement,
- subsidiairement, la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse n'est pas motivée, M. [H] [D] n'ayant au surplus justifié de sa situation personnelle qu'au jour de la clôture, laquelle démontre qu'il a travaillé dès courant 2019,
- M. [H] [D] ne justifie pas de la réalité d'un préjudice au titre du manquement à l'obligation de formation étant rappelé qu'elle lui a permis de suivre une formation FONGECIF et qu'il a refusé sa proposition quant à la FIMO.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues à l'audience.
MOTIFS
Recevabilité de la demande d'indemnité spéciale de licenciement
Par application des dispositions de l'article L 1234-20 du code du travail, le solde de tout compte, établi par l'employeur et dont le salarié lui donne reçu, fait l'inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail.
Le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature, délai au-delà duquel il devient libératoire pour l'employeur pour les sommes qui y sont mentionnées.
En l'espèce, la SAS API2M soutient que la demande soutenue par M. [H] [D] au titre du doublement de l'indemnité légale de licenciement est irrecevable faute pour celui-ci d'avoir contesté dans le délai de 6 mois le reçu pour solde de tout compte qu'il a signé le 21 mai 2019, lequel mentionne une indemnité de licenciement d'un montant de 8.478,95 euros.
M. [H] [D] conteste cette analysé et fait valoir que sa demande vise l'indemnité spéciale de licenciement et non l'indemnité de licenciement qui sont deux indemnités différentes.
Ceci étant, l'indemnité spéciale de licenciement prévue par l'article L 1226-14 du code du travail [ La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, (...) à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9] se substitue en cas de licenciement pour inaptitude à l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement prévue à l'article L 1234-9 du code du travail .
Ainsi, les deux indemnités sont de même nature, seul leur montant diffère en fonction de la nature du licenciement, l'une est exclusive de l'autre.
En conséquence, M. [H] [D] devait contester le solde de tout compte portant une mention selon lui erronée du montant de l'indemnité à laquelle il pouvait prétendre du fait de son licenciement et c'est à juste titre que le premier juge a constaté qu'il était recevable en sa demande. La décision déférée ayant statué en ce sens sera confirmée sur ce point.
* sur le fond
Demandes relatives à l'exécution du contrat de travail
L'article L 6321-1 du code du travail dans ses versions successives applicables au litige dispose que l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail.
Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.
Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme, notamment des actions d'évaluation et de formation permettant l'accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret.
Les actions de formation mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de formation mentionné au 1° de l'article L. 6312-1. Elles peuvent permettre d'obtenir une partie identifiée de certification professionnelle, classée au sein du répertoire national des certifications professionnelles et visant à l'acquisition d'un bloc de compétences.
Au visa de ce texte, M. [H] [D] sollicite la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts pou pour manquement de la SAS API2M à son obligation de formation pour assurer l'adaptation du salarié à l'évolution de son emploi. Il fait valoir que la seule formation qu'il a pu suivre, de type FONGECIF, n'est due qu'à sa seule initiative, et il ne s'est ensuite vu proposer aucun poste correspondant à sa nouvelle formation.
Il en déduit l'existence d'un préjudice en raison des difficultés dans lesquelles il s'est trouvé suite à la rupture de son contrat de travail pour retrouver un emploi.
La SAS API2M s'oppose à cette demande en rappelant que M. [H] [D] ne peut solliciter une double indemnisation au titre de l'obligation de reclassement dans le cadre du licenciement pour inaptitude. Elle rappelle au surplus qu'elle a validé le dossier FONGECIF de M. [H] [D] en lui garantissant un retour à son poste de travail à l'issue de la formation, à défaut de pouvoir disposer et proposer un poste en corrélation avec sa nouvelle qualification.
Elle fait valoir que contrairement à ce qui est soutenu par M. [H] [D], elle lui a proposé dans le cadre des offres de reclassement de lui financer une formation FIMO à laquelle le salarié n'a pas donné suite.
Enfin, elle considère que M. [H] [D] ne justifie pas de la réalité du préjudice qu'il allègue.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [H] [D] ne produit aucun élément au soutien de cette demande de dommages et intérêts et ne justifie ni d'un préjudice spécifique à ce manquement tel que la nécessité de renoncer à des offres d'emploi faute de formation suffisante pour y prétendre, ni d'un préjudice distinct de celui résultant de la difficulté à retrouver un emploi consécutivement à son licenciement, difficulté qui est prise en compte le cas échéant dans la détermination de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La décision déférée ayant statué en ce sens sera confirmée.
Demandes relatives à la rupture du contrat de travail
M. [H] [D] a été licencié pour inaptitude d'origine non professionnelle et impossibilité de reclassement par courrier daté du 9 mai 2019 rédigé dans les termes suivants :
' Monsieur,
Nous faisons référence à notre entretien du jeudi 30 avril 2019 à 11h00 avec Mme [T] [R], entretien auquel vous vous êtes présenté accompagné de Monsieur [J] [O], membre de la délégation unique du personnel.
Nous vous rappelons la situation :
Vous avez été en arrêt de travail du 12/09/2018 au 28/09/2018, puis en arrêt maladie du 01/10/2018 au 08/03/2019.
Vous avez passé une première visite médicale de reprise le 12 mars 2019 suite à laquelle vous avez été déclaré 'inaptitude au poste à prévoir. Contre-indication à la manutention manuelle répétée et lourde. Apte par exemple au poste de conducteur avec transpalette électrique. Revoir pour une 2ème visite.'
Le 19 mars 2019, vous avez eu la 2nd visite médicale, suite à laquelle le Dr [E] a déclaré « Inaptitude au poste. Contre-indication à la manutention manuelle répétée ou lourde. Apte par exemple au poste de conducteur avec transpalette électrique ».
Nous avons sollicité en date du 27 mars 2019, les Responsables ou Directeurs d'agence de notre société et des autres sociétés du Groupe afin d'examiner un reclassement possible au sein de leur site.
Nous avons également informé, en date du 27 mars 2019, la Fédération des entreprises de Transport et Logistique de France de votre inaptitude. Celle-ci est chargée de diffuser cette information à l'ensemble de ses adhérents (entreprises de transport de la région) qui pourraient être amenées à vous proposer un poste correspondant à votre inaptitude actuelle.
Dans le cadre de notre recherche de reclassement, au sein de notre société et des sociétés de notre groupe d'appartenance, nous avons été amené à examiner d'une part les postes vacants, et d'autre part ceux susceptibles de vous être proposés compatibles avec vos contraintes physiques et à la fiche d'inaptitude émise par le médecin du Travail.
Nous avons organisé une réunion des membres de la Délégation Unique du Personnel en qualité de délégués du personnel en séance extraordinaire le 08 avril 2019, afin de les consulter sur votre situation et les postes de reclassement envisagés. Ces derniers ont rendu un avis favorable.
Par courrier recommandé du 09 avril 2019, nous vous avons exposé le résultat de notre recherche de reclassement.
Sur les poste vacants au sein du groupe :
- manutentionnaires : aucun poste n'a pu vous être proposé du fait de votre inaptitude définitive au poste prononcée par le médecin du travail les 12 et 19 mars 2019.
- postes administratifs : les postes de gestionnaire opérationnel(le) administratif(ve) et d'assistant(e) d'exploitation à Auradis, de développeur EDI, d'assistant(e) au service encaissement ou au service RH sur [Localité 3] nécessitent une formation initiale spécifique que vous ne possédez pas et qui ne peut pas être acquise dans le cadre d'une simple adaptation au poste
- chef d'équipe logistique : poste sur le quai qui nécessite une aptitude à la manutention que vous n'avez pas
- quant aux postes de chauffeurs, vous êtes titulaire du permis C, sans FIMO. Les recherches de reclassement ont porté par conséquent sur les postes de chauffeurs poids lourds ( permis C), puisque vous n'êtes pas titulaire du permis EC, outre les contraintes physiques rattachées à ce porte ( arrimage, dételage, chargement et déchargement ), impliquant de la manutention plus ou moins lourde, incompatibles avec vos restrictions médicales,
les postes de chauffeurs sur lesquels nous recrutons sont presque exclusivement des postes de chauffeurs SPL ( permis EC ) pour la conduite d'ensembles articulés. Le transport en véhicule PL ( permis C ) est une activité de distribution fine ( messagerie ) de laquelle nous nous désengageons progressivement depuis plusieurs années sur [Localité 3] notamment.
A l'issue des différentes recherches que nous avons entreprises dans le but de vous conserver un emploi, nous avons été en mesure de vous proposer les postes de reclassement suivants :
- Société : AURADIS ' (Macon Loché)
Poste proposé : Conducteur PL Courte distance
Missions : Livrer et enlever des marchandises, sous température dirigée, dans le respect de la réglementation en vigueur et de la chaîne du froid.
Salaire de 1862.44 euros Bruts pour 169 heures mensuels + heures de nuit rémunérées selon la législation en vigueur + Prime qualité de 150 euros Bruts + Indemnisation des frais de route
Société : HELIODIS ([Localité 7])
Poste proposé : Conducteur PL Courte distance
Missions : Livrer et enlever des marchandises, sous température dirigée, dans le respect de la réglementation en vigueur et de la chaîne du froid.
Salaire de 1775.81 euros Bruts pour 169 heures mensuels +Prime qualité de 140 euros Bruts + Indemnisation des frais de route
Nous vous avons également informé qu'en cas d'acceptation de l'un de ces postes, nous organiserons votre inscription à la FIMO dont vous n'êtes pas titulaire et qui est obligatoire pour l'exercice du métier de Conducteur PL.
Par lettre du 12 avril 2019. reçue le 15 avril 2019. vous nous avez informé de votre refus des postes de reclassement proposés.
Par lettre recommandée du 19 avril 2019, nous vous avons convoqué à un entretien qui s'est tenu le 30 avril 2019 à 11h00.
Lors de cet entretien, vous nous avez fait part de votre intention de passer le permis EC. Toutefois, nous avons évoqué les différentes contraintes physiques liées à ce poste au sein de notre entreprise, impliquant de la manutention plus ou moins lourde, incompatibles avec vos restrictions médicales, ce dont vous avez convenu.
N'ayant pas d'autres postes de travail vacants et correspondants à vos restrictions médicales, sous sommes par conséquent dans l'obligation de vous notifier, par la présente, votre licenciement, pour inaptitude physique, déclarée par la médecine du travail les 12 et 19 mars 2019, et impossibilité de reclassement, licenciement qui prendra effet à la date d'envoi de la présente.
Du fait de votre impossibilité de travailler, la rupture prend effet immédiatement.
Nous vous informons que conformément à l'article L 911-8 du code de la sécurité sociale, vous bénéficierez du maintien, à titre gratuit, des garanties santé et prévoyance à compter de la date de cessation de votre contrat de travail et sous réserve de justifier d'une prise en charge par le régime de l'assurance chômage.
La durée de ce maintien est équivalente à la durée d'indemnisation par l'assurance chômage dans la limite de la durée de votre contrat de travail au sein de l'entreprise et en tout état de cause sans pouvoir excéder 12 mois.
Le service du personnel prendra contact avec vous afin de retirer votre solde de tout compte, certificat de travail et votre attestation Pôle emploi.
Nous vous prions d'agréer, Monsieur, l'expression de nos salutations distinguées.'
* sur l'origine de l'inaptitude
Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.
Puisque le droit du travail est autonome par rapport au droit de la sécurité sociale, l'application de ces dispositions protectrices n'est pas liée à la reconnaissance du caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie par un organisme de sécurité sociale . De la même manière, la circonstance qu'un salarié ait été au moment du licenciement déclaré consolidé de son accident du travail par la caisse primaire d'assurance maladie et pris en charge par les organismes sociaux au titre de la maladie n'est pas de nature à faire perdre à la salariée le bénéfice de la législation protectrice des accidentés du travail .
En conséquence, la mise en oeuvre du régime protecteur est seulement subordonnée à l'origine professionnelle de l'inaptitude et à sa connaissance par l'employeur. Ainsi, une décision de prise en charge ne constitue qu'un élément de preuve parmi d'autres laissés à l'appréciation du juge prud'homal auquel il appartient de rechercher lui-même l'existence d'un lien de causalité entre l'inaptitude et l'accident du travail ou la maladie professionnelle . De même, une décision de refus de prise en charge ne suffit pas davantage à écarter ce lien de causalité.
Ainsi, dès lors que l'accident est survenu au temps et au lieu du travail, la législation professionnelle s'applique, peu important la décision de refus prise par la caisse primaire d'assurance maladie et la connaissance ou non par l'employeur de l'exercice d'un recours du salarié. La protection s'applique également dès que l'employeur a eu connaissance de la nature professionnelle de la maladie ou de l'accident, même si la constatation par la sécurité sociale n'est pas encore intervenue ou n'a pas été sollicitée . De même, l'employeur qui est informé, au moment du licenciement, qu'une procédure avait été engagée par le salarié pour faire reconnaître le caractère professionnel de son accident ou de sa maladie doit mettre en oeuvre la législation professionnelle.
Les juges du fond ont obligation de rechercher eux mêmes l'existence de ce lien de causalité et la connaissance qu'avait l'employeur de l'origine professionnelle de l'accident ou de la maladie.
En l'espèce, M. [H] [D] soutient que l'inaptitude constatée par le médecin du travail trouve son origine dans l'aggravation des séquelles de son accident du travail du 8 novembre 2013, aggravation qui est la conséquence d'un manquement de l'employeur qui n'a pas adapté son poste de travail à son état de santé et qui l'a soumis à des conditions de travail et des pressions croissantes liées à la productivité.
Il reproche à son employeur de l'avoir sanctionné alors qu'il l'alertait sur le fait que ses conditions de travail n'étaient pas compatibles avec son état de santé.
Il considère que le refus de prise en charge des lésions à l'origine de son arrêt de travail de septembre 2018 au titre d'une rechute par la Caisse Primaire d'assurance maladie s'explique par le fait qu'il ne s'agissait pas de lésions nouvelles mais de l'aggravation des séquelles de son accident du travail, ce qui caractérise l'origine professionnelle au moins partielle de celles-ci.
Au soutien de ses explications, M. [H] [D] verse aux débats :
- la prise en charge des soins dispensés à compter du 1er septembre 2015, sans précision de la date de fin de prise en charge, puis à compter du 23 février 2018, sans précision de la date de fin de prise en charge, au titre de l'accident du travail du 8 novembre 2013, sans précision de la nature des soins,
- l'avis du médecin du travail en date du 5 février 2019 mentionnant ' poursuivre les soins et l'arrêt de travail - aménagement de poste à prévoir avec diminution de la manutention - dossier RQTH conseillé',
- la sanction de mise à pied disciplinaire de deux jours en date du 4 août 2017, pour les faits suivants ' Le 6 juillet 2017 à 9h, vous avez demandé des explications à votre responsable, M. [C] [Z] concernant le refus de vos congés d'été 2017, soit du 07 au 20/07/2017. Ce dernier vous a répondu que vous n'étiez pas prioritaire cette année. Ce à quoi vous avez répondu ' Ok je me mettrai donc en accident du travail sur les jours que j'ai posé comme ça je serais en vacances'. Votre chef d'équipe M. [I] [W] atteste que vous avez tenu le même discours lors de votre prise de poste à 7h30, le 07/07/2017.
Lors de l'entretien vous expliquez que vous avez tenu ces propos et que vous le regrettez. Vous avez dit cela sur le coup de la colère mais après réflexion, notre décision vous semble équitable vis-à-vis des membres de l'équipe. Cependant vous ne pouvez proférer des menaces de la sorte dès que votre responsable vous refuse des congés sur les dates que vous souhaitiez',
- des documents intitulés ' fiche élément de paie - manutentionnaire emballages' pour les mois de :
- février 2013 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' une nouvelle fois [H] a pris l'initiative de charger des palettes sans se référer à son supérieur dans un camion qui n'était pas le bon ( Lustucru du 18/02)' ,
- juin, juillet et août 2014 avec attribution de 100% de la prime et mention d'une absence accident du travail sur toute la période,
- mars 2016 avec attribution de 100% de la prime et mention d'une absence rechute accident du travail sur toute la période,
- juin 2016 avec attribution de 100% de la prime et une mention d'absence du 1er au 21 pour maladie puis CP,
- juillet 2016 avec attribution de 75% de la prime en raison d'un ' défaut de filmage durant l'audit du 29/06",
- septembre 2016 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' Le 19/06/2016 inversion des colis sur le discount - Le 07/09/2016 préparation d'une référence en FR LS non posée sur les palettes',
- octobre 2016 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' non-respect des procédures de préparation',
- juillet 2017 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' erreur de préparation le 27 07 2017, 10 colis de lait mis en casse ventilation car bien réceptionné mais introuvable. Inversion de colis sur l'atelier 5 eme gamme le 06 07 2017. Non-respect des procédures sur la qualité de préparation',
- août 2017 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' 31/07 saurisserie palettes avec colis débordants et mal filmés 01/08 9 colis validés mais non posés sur les supports',
- septembre 2017 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' mauvaise palettisations',
- novembre 2017 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' écarts lors de l'écartement des drives en préparation',
- janvier 2018 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' productivité catastrophique ( 700 colis de fromages en 8H de travail le 22/01) Ecart de préparation DRIVE manque 1colis de fromage le 10/01"
- février 2018 avec attribution de 0% de la prime en raison de ' trop d'écarts en préparation ce mois ci',
- mars 2018 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' écarts de préparation',
- avril 2018 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' des écarts en préparation ce mois ci',
- mai 2018 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' écarts en préparation',
- août 2018 avec attribution de 50% de la prime en raison de ' palettisation non conforme et erreur de préparation',
- janvier 2019 avec attribution de 0% de la prime avec mentions d'absences maladie sur toute la période,
- février 2019 avec attribution de 100% de la prime avec mentions d'absences justifiées non rémunérées sur toute la période,
- mars 2019 avec attribution de 0% de la prime avec mentions d'absences maladie, cp et absences justifiées non rémunérées sur toute la période,
- avril 2019 avec attribution de 100% de la prime avec mentions d'absences justifiées non rémunérées sur toute la période,
- décembre 2019 avec attribution de 100% de la prime avec mentions d'absences maladie sur toute la période,
- l'avis du médecin du travail en date du 21 juin 2016 qui dans le cadre d'une visite médicale de reprise le déclare 'Apte - apte conduite de chariot',
- les pièces relatives à la formation FONGECIP ' agent d'entretien de bâtiment' qu'il a suivie et validée du 17/10/2016 au 23/06/2017,
- des échanges de courriers d'octobre 2018 avec son employeur, aux termes desquels M. [H] [D] sollicite suite à la validation de sa formation, un changement de poste pour ' pouvoir rejoindre les services généraux ( maintenance ) de votre établissement' , et la réponse de la SAS API2M lui indiquant ne pouvoir donner suite à sa demande en l'absence de 'besoin de recrutement sur ce service à ce jour'.
La SAS API2M conteste toute origine professionnelle à l'inaptitude de M. [H] [D] et rappelle sans être utilement contredite que le médecin du travail l'a depuis la fin de son mi-temps thérapeutique en août 2015, toujours déclaré apte à son poste sans restriction et qu'il ne peut lui être reproché aucun manquement quant à une adaptation du poste de travail. Elle produit en ce sens les avis d'aptitude successifs rendus par le médecin du travail.
Elle nie toute forme d'accroissement de ses exigences ou de la pression exercée sur le salarié faisant valoir que M. [H] [D] occupe le même poste depuis des années, qui n'a pas changé dans ses modalités de fonctionnement.
Elle fait valoir que non seulement la Caisse Primaire d'assurance maladie a refusé le caractère de rechute de l'accident du travail aux lésions fondant l'arrêt de travail d'octobre 2018, mais qu'elle a également considéré que l'arrêt de travail n'était plus justifié au titre de l'assurance maladie à compter du 9 mars 2019.
De fait, aucune des pièces produites par M. [H] [D] ne mentionne la nécessité d'un aménagement de son poste de travail en dehors des pièces relatives à la mise en place d'un mi-temps thérapeutique en 2015 dont il n'est pas soutenu qu'il n'aurait pas été respecté par l'employeur.
Les documents ' fiche élément de paie - manutentionnaire emballages' partiellement produits sur la période de travail ne caractérisent aucune accentuation de la pression qui aurait été exercée sur le salarié ou une augmentation de la pénibilité de son emploi, étant observé que M. [H] [D] a pu bénéficier de la prime qui correspond pour moitié à la 'qualité de la prestation' et pour moitié à la disponibilité sur des mois où il était absent pendant toute la période. Les non attributions intégrales ou partielles de primes sont motivées par des faits précis dont M. [H] [D] ne démontre pas en quoi ils seraient erronés ou la conséquence d'un accroissement d'exigence à son égard.
L'avis d'aptitude du 21 juin 2016, contrairement à ce qui est soutenu par l'appelant, ne pose aucune restriction à son aptitude, puisqu'il est mentionné ' Apte' en caractère gras et dessous ' apte conduite chariots' sans aucune mention de tâches qu'il ne pourrait accomplir. Déduire de la mention ' apte conduite chariots' que M. [H] [D] est inapte à toute autre tâche est contraire à la mention d'aptitude portée en caractère gras sur le certificat, étant au surplus observé que ce certificat d'aptitude intervient après plusieurs certificats médicaux du médecin du travail en lien avec le mi-temps thérapeutique dont a bénéficié M. [H] [D] sur lesquels était mentionnée une ' aptitude avec aménagement de poste'.
La sanction du 4 août 2017, contrairement à ce qui est soutenu par M. [H] [D], ne vient pas sanctionner son droit d'expression mais un chantage envers son responsable suite à un refus de congés et ne saurait caractériser un refus par l'employeur de prendre en compte la situation médicale de son salarié qui ne peut sérieusement anticiper le fait qu'il serait un mois plus tard en ' accident du travail' lequel suppose un événement soudain survenu au temps et au lieu du travail.
Enfin, l'absence d'affectation sur un poste suite à la validation de la formation ' agent d'entretien de bâtiment' n'a aucune incidence sur l'appréciation de l'origine de l'inaptitude, étant rappelé au surplus que l'acceptation par l'employeur d'un suivi de formation n'implique pas pour lui l'obligation en cas de validation d'affecter le salarié sur un poste correspondant à celle-ci.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [H] [D] ne rapporte pas la preuve que son inaptitude à son poste de travail constatée par le médecin du travail le 19 mars 2019 a une origine professionnelle.
En conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a débouté M. [H] [D] de cette demande et de ses demandes indemnitaires subséquentes.
La décision déférée sera confirmée sur ce point.
* existence d'une cause réelle et sérieuse - recherches de reclassement loyales et sérieuses
Selon l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
En l'espèce, il ressort des termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, que le licenciement de M. [H] [D] a été prononcé pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement.
L'article L 1226-10 du code du travail dispose que lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions
écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au
besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.
Pour l'application du présent article, le groupe est défini, lorsque le siège social de l'entreprise dominante est situé sur le territoire français, conformément au I de l'article L. 2331-1 et, dans le cas contraire, comme constitué par l'ensemble des entreprises implantées sur le territoire français.
En cas de constat d'inaptitude à reprendre l'emploi précédemment occupé, le salarié bénéficie d'un droit au reclassement affirmé dans son principe par les articles L.1226-2 et L.1226-10 du code du travail. Qu'elle soit totale ou partielle, temporaire ou permanente l'inaptitude ouvre droit à cette obligation.
L'obligation de reclassement est mise à la charge de l'employeur qui doit rechercher un autre emploi approprié aux capacités du salarié, en tenant compte des conclusions écrites du médecin du travail, notamment des indications qu'il formule sur l'aptitude de l'intéressé à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.
Les recherches et propositions de reclassement doivent être «sérieuses». L 'emploi offert doit être aussi comparable que possible à celui précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.
Le médecin du travail a la possibilité de « dispenser » l'employeur de rechercher un reclassement par une mention expresse dans l'avis d'inaptitude, quelle que soit l'origine de l'inaptitude et quelle que soit la nature du contrat de travail dans l'hypothèse où « le maintien du salarié dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé » et dans l'hypothèse où « l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi »
Les propositions de reclassement faites par l'employeur doivent être loyales et sérieuses. L'emploi proposé doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. L'appréciation du caractère sérieux de la recherche de reclassement relève du pouvoir souverain des juges du fond. L'obligation de recherche n'implique pas que l'employeur soit tenu de proposer un poste qui n'est pas disponible ou d'imposer à un autre salarié une modification de son contrat de travail afin de libérer son poste pour le proposer en reclassement au salarié inapte.
S'agissant de la charge de la preuve, il incombe à l'employeur de prouver qu'il a mis
en oeuvre toutes les possibilités de reclassement.
En l'espèce, l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail le 19 mars 2019 mentionne ' inaptitude au poste - contrindication à la manutention manuelle répétée ou lourde - apte par exemple : poste conducteur avec transpalette électrique'.
Pour justifier du respect de son obligation de recherche de reclassement, la SAS API2M fait valoir qu'elle a tenu compte des diplômes, titres et permis ainsi que de l'expérience de M. [H] [D], et de l'avis du médecin du travail en précisant qu'un conducteur avec transpalette électrique est un chauffeur routier qui utilise un transpalette électrique pour décharger son camion, et non pas comme le soutient l'appelant un poste de conducteur de transpalette électrique, lequel correspond à un emploi de manutentionnaire qui conduit les engins de manutention pour déplacer les palettes, et suppose d'être titulaire d'un CACES.
Elle explique que compte-tenu de son activité, ses postes de conducteurs correspondent à des postes de chauffeur poids lourds ou super poids lourds, nécessitant d'être titulaire du permis EC ainsi que de la FIMO, ce qui n'est pas le cas de M. [H] [D] qui ne dispose que d'un permis C.
Elle a proposé à M. [H] [D] de lui financier une formation FIMO à laquelle il n'a pas donné suite.
Elle a en parallèle de cette proposition de formation identifié les postes de conducteurs permis C au sein du groupe auquel elle appartient, et a ensuite interrogé le médecin du travail pour validation des deux postes ayant ainsi été identifiés, lesquels ont été proposés au salarié par courrier du 9 avril 2019 qui les a refusés par courrier du 12 avril 2019, et n'a pas répondu à la proposition de financement de la FIMO.
Elle précise justifier par la production des registres du personnel des sociétés du groupe desquels elle déduit qu'il n'existait pas de postes autres que ceux proposés à M. [H] [D] répondant à ses compétences et aux recommandations du médecin du travail.
La SAS API2M produit au soutien de ses explications :
- les six courriers adressés aux sociétés du groupe, reprenant la situation personnelle de M. [H] [D], les mentions portées sur l'avis d'inaptitude, le fait qu'il soit titulaire du permis C 'mais ne possède pas encore la FIMO', ainsi qu'à TLF Méditerranée (organisation professionnelle qui représente l'ensemble des métiers de la chaîne du transport et de la logistique ), pour diffusion à ses adhérents,
- les réponses des sociétés, dont deux précisant qu'elles recherchent uniquement des conducteurs permis EC, une qu'elle propose deux postes de manutentionnaire en contrat de travail à durée déterminée et contrat saisonnier,
- le procès-verbal de consultation des représentants du personnel sur les propositions de reclassement envisagées pour M. [H] [D], soit deux postes de chauffeur poids lourds courte distance permis C basés à [Localité 5] et [Localité 7], en précisant que ces postes nécessitent d'être titulaire de la FIMO qui sera financée par l'entreprise en cas d'acceptation d'un des deux postes,
- la consultation du médecin du travail sur les propositions de reclassement,
- la réponse de M. [H] [D] aux propositions de reclassement en date du 12 avril 2014 dans lequel il indique ' je suis surpris de votre proposition de postes. En effet, vous me proposez des postes situés à plus de 500 km de mon domicile. Ma situation personnelle ne me permet pas d'envisager un déménagement. De ce fait, je me vois dans l'obligation de refuser ces deux postes. Je suis prêt à étudier avec vous la possibilité de passer le permis EC',
- son registre du personnel et celui des autres sociétés du groupe sur la période concernée.
M. [H] [D] conteste le caractère loyal et sérieux de la recherche de reclassement en faisant valoir que la SAS API2M n'a pas répondu à sa demande de lui permettre de passer le permis EC qui lui aurait ouvert la possibilité d'être reclassé sur un poste à proximité de son domicile.
Elle lui reproche également de ne pas avoir contacté un organisme tel que la SAMETH alors qu'il avait sollicité la reconnaissance de son statut de travailleur handicapé dès février 2019, et de ne pas avoir accédé avant son incapacité à sa demande de reclassement sur un poste en maintenance.
Enfin, elle considère que la SAS API2M aurait dû lui proposer l'un des quatre postes publié par la société DISPAM [Localité 3], laquelle appartient au même groupe que son employeur.
Ceci étant, il a été évoqué supra l'absence de poste en maintenance tel que sollicité par M. [H] [D], ce qui exclut toute possibilité de reclassement à ce titre.
De même, si l'employeur est tenu de mettre en oeuvre des mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail, il n'a pas pour autant l'obligation de financer des formations onéreuses telle que le permis EC pour permettre un reclassement de son salarié déclaré inapte.
Enfin, les postes proposés par la société DISPAM revendiqués par M. [H] [D] posent comme pré-requis d'être titulaire du permis EC et de la FIMO, ce qui n'est pas le cas de ce dernier.
Par ailleurs, l'absence de consultation de la SAMETH ne saurait être reprochée à la SAS API2M qui fait valoir à juste titre que M. [H] [D] ne s'est vu reconnaître le statut de travailleur handicapé que postérieurement à son licenciement, en août 2019.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la SAS API2M a procédé à une recherche loyale et sérieuse de reclassement au profit de M. [H] [D] qui a justement été débouté de sa demande de requalification de son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse sur ce fondement, et de ses demandes indemnitaires subséquentes.
La décision déférée ayant statué en ce sens sera confirmée sur ce point.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 23 novembre 2022 par le conseil de prud'hommes d'Avignon,
Condamne M. [H] [D] à verser à la SAS API2M la somme de 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne M. [H] [D] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT