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Décisions

Cass. com., 30 avril 2025, n° 24-10.359

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Econocom France (SAS)

Défendeur :

Bois et matériaux (SASU)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Schmidt

Rapporteur :

Mme Guillou

Avocats :

SAS Boucard-Capron-Maman, Me Goldman

Cass. com. n° 24-10.359

29 avril 2025

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 novembre 2023), rendu sur renvoi après cassation (Com., 11 mai 2022, n° 19-22.015), la société Bois & matériaux, qui a pour objet la distribution de bois et de matériaux de construction en France, a, le 1er janvier 2004, conclu pour elle et ses filiales un contrat de location d'équipements informatiques auprès de la société Econocom France (la société Econocom).

2. Ce contrat a été modifié le 7 octobre 2005, pour devenir un contrat de location qualifié d'« évolutif », et s'est matérialisé par l'acceptation d'une offre dite « option d'échange technologique » ou encore « TRO », acronyme de « Technology Refresh Option », s'insérant dans un ensemble contractuel comportant les conditions générales de location, les conditions applicables à l'option TRO et une annexe TRO définissant les conditions particulières de location et chiffrant les différentes variables, outre un contrat de gestion du TRO par équipement.

3. Cet ensemble a été renouvelé le 1er février 2007 et les parties se sont alors engagées, aux termes de l'annexe TRO en vigueur, pour une durée de location de 42 mois, au lieu de 36 mois précédemment. Cette annexe TRO a été remplacée par huit annexes TRO successives, à chaque modification du parc d'équipements informatiques, dont la dernière, datée du 1er août 2013, prévoyait une nouvelle durée de 42 mois expirant le 31 janvier 2017.

4. Par lettre du 27 décembre 2013, la société Econocom a signifié à la société Bois & matériaux la résiliation de l'option d'échange en cours sur le fondement de l'article 10 c) des conditions TRO pour risques avérés que le locataire ne puisse faire face à ses engagements financiers. Cette résiliation a eu pour effet de mettre fin à l'exercice de l'option d'échange prévue au contrat tandis que l'annexe TRO continuait à se poursuivre jusqu'à son terme au 31 janvier 2017.

5. La société Bois & matériaux a alors tenté de négocier la rupture anticipée de l'ensemble contractuel, ce que la société Econocom a refusé. C'est dans ces circonstances que la première a assigné la seconde en demandant que soit prononcée la nullité de l'annexe TRO du 1er août 2013 pour cause de perpétuité et d'illégalité de la fixation du prix des loyers, que soit constatée l'illicéité de certaines clauses de l'annexe TRO du 1er février 2007 ou des conditions générales de location du 1er janvier 2004 et qu'elles soient déclarées réputées non écrites sur le fondement de l'article L. 442-6 I, 1° et 2° du code de commerce. Elle demandait encore que la société Econocom soit condamnée à lui restituer le montant des loyers indûment perçus à compter du 1er août 2013 et à lui payer une certaine somme à titre de dommages et intérêts pour violation de son obligation de conseil.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

6. La société Econocom France fait grief à l'arrêt de « confirmer le jugement en toutes ses dispositions déférées sauf celles qui ont écarté les demandes en nullité des clauses relatives à l'exercice de l'option d'échange technologique et à la faculté de résiliation du contrat pour la société Econocom France », c'est-à-dire de dire que la société Econocom France a tenté de soumettre la société Bois & matériaux à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, de condamner la société Econocom France à restituer à la société Bois & matériaux le montant des loyers « indûment perçus » à compter du 1er août 2013 à parfaire à la date du jugement avec application du taux d'intérêt légal et anatocisme à compter de la signification de l'assignation devant le tribunal de commerce de Nanterre en date du 19 novembre 2014, et de rejeter les autres demandes de la société Econocom France, de prononcer la nullité « des clauses pour l'option d'échange technologique du 1er août 2013 » sur le fondement des articles 1709 du code civil et L. 442-6 I 2° du code de commerce, et de prononcer la nullité de l'article 14.3 ii) des conditions générales du contrat de location sur le fondement de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce, alors « que si les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain pour apprécier si des conclusions ou des pièces ont été déposées en temps utile, ils se doivent de répondre à des conclusions qui en sollicitent le rejet ; que dans ses dernières écritures, la société Econocom demandait notamment à la cour d'appel de "Rejeter des débats les conclusions de Bois et Matériaux signifiées le 18 mai 2023 ainsi que des pièces 52, 53, 54.1, 54.2 et 54.3" indiquant qu'elles ne lui avaient pas été communiquées en temps utile ; que la cour d'appel, qui s'est prononcée en considération des conclusions de la société Bois & matériaux du 18 mai 2023, a nécessairement écarté cette demande ; qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions d'appel de l'exposante qui sollicitaient le rejet des conclusions de la société Bois & matériaux du 18 mai 2023, la cour d'appel a violé les articles 15 et 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 15 et 455 du code de procédure civile :

7. Il résulte de ces textes que si les juges du fond apprécient souverainement si des conclusions ou des pièces ont été déposées en temps utile au sens du premier de ces textes, ils sont tenus de répondre à des conclusions qui en sollicitent le rejet, qu'elles soient déposées avant ou après le prononcé de l'ordonnance de clôture.

8. Pour faire droit pour partie aux demandes de la société Bois & matériaux, l'arrêt se prononce au visa des conclusions de la société Econocom France signifiées le 23 mai 2023 et de celles de la société Bois & matériaux signifiées le 18 mai 2023.

9. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas répondu aux conclusions de la société Econocom France du 23 mai 2023 qui demandait que les conclusions de la société Bois & matériaux du 18 mai 2023 et certaines des pièces qui étaient annexées soient écartées des débats au motif qu'elle n'avait pas pu en reprendre connaissance et y répondre en temps utile, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 novembre 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Bois & matériaux aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

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