CA Reims, ch. 1 civ. et com., 29 avril 2025, n° 23/01872
REIMS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
FLS (SAS)
Défendeur :
TCA Assurances (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Pilon
Conseillers :
Mme Pozzo di Borgo, M. Leclere-Vue
Avocats :
Me Quentin, Me Hübsch, SELARL BQD Avocats, SELARL HBS
* * *
La SAS FLS, exploitant une discothèque en Gironde, a souscrit un contrat d'assurance auprès de la société Gefion Insurance A/S le 13 février 2018, par l'intermédiaire de la SAS TCA Assurances, courtier en assurance.
Par acte du 10 février 2022, la société TCA Assurances a fait assigner la SAS FLS devant le tribunal de commerce de Reims afin de l'entendre condamner à lui payer la somme de 15 574.97 euros au titre de cotisations d'assurance impayées.
Par jugement du 5 septembre 2023, le tribunal a :
- reçu la société TCA Assurances et l'a déclarée bien fondée,
En conséquence,
- débouté la société FLS de toutes ses demandes, fins et prétentions,
- condamné la société FLS à régler à la société TCA Assurances la somme de 15 574.97 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la mise en demeure par la société FLS,
- condamné la société FLS à régler à la société TCA Assurances la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société FLS aux dépens, dont frais de greffe liquidés à la somme de 69.59 euros TTC,
- rappelé l'exécution provisoire de droit de la décision à intervenir.
La SAS FLS a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 28 novembre 2023.
Par conclusions notifiées le 29 juillet 2024, elle demande à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de :
- déclarer la SAS TCA Assurances irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir,
En tout état de cause,
- débouter la SAS TCA Assurances de l'intégralité de ses demandes formées à son encontre,
- débouter la SAS TCA Assurances de sa demande indemnitaire au titre d'une prétendue résistance abusive,
En revanche,
- accueillir la SAS FLS en son appel,
Y faisant droit,
- condamner la SAS TCA Assurances à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive,
- condamner la SAS TCA Assurances à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SAS TCA Assurances aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Elle conteste la qualité de la société TCA Assurances à agir pour poursuivre le règlement de cotisation d'assurance, d'autant que la société Gefion Insurance fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire.
Elle conteste de même sa qualité à agir pour le recouvrement de cotisation pour la société GMI faute de justification d'un contrat conclu avec celle-ci.
Sur le fond, la société FLS conteste la validité des contrats invoqués par la société TCA Assurances et affirme que l'ordre d'assurance que celle-ci produit n'est en aucun cas un mandat d'assurance tel que prévu à l'article L112-1 du code des assurances. Elle affirme qu'aucun mandat n'a été régularisé.
Elle ajoute qu'elle n'a régularisé aucun des avenants proposés par TCA Assurances postérieurement à sa révocation de mandat de souscription et de gestion du 23 septembre 2020, de sorte qu'elle n'est contractuellement liée ni avec la société TCA Assurances, ni avec la compagnie GMI.
La société FLS invoque en outre la nullité des contrats invoqués par la société TCA Assurances à raison d'une réticence dolosive commise par la société TCA Assurances faute de l'avoir informée de l'insuffisante solvabilité et de la liquidation de la société Gefion Insurance.
Par conclusions notifiées le 13 décembre 2024, la SAS TCA Assurances sollicite la confirmation du jugement, sauf en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages intérêts en raison de la résistance abusive de la société FLS. Elle demande à la cour, statuant à nouveau, de :
- condamner la société FLS à lui régler la somme de 2 500 euros de dommages intérêts pour résistance abusive,
- débouter la société FLS de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la société FLS à lui régler la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société FLS aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Nicolas Hübsch, avocat membre de la SELARL HBS, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle explique qu'elle a reçu mandat de souscription et de gestion d'assurance de la part de la société FLS et qu'elle est également mandataire de la société Gefion Insurance, comme de la société GMI pour recouvrer les sommes dues au titre des contrats d'assurance souscrits. Elle ajoute que la liquidation judiciaire de la société Gefion Insurance a laissé subsister les polices existantes.
Elle indique en outre avoir procédé au replacement du contrat d'assurance auprès d'une autre compagnie, la société GMI, avant que sa mission n'ait pris fin ensuite de la révocation du mandat par la société FLS, le 31 décembre 2020, puis que ce contrat a été renouvelé pour la période du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2021 faute d'avoir été dénoncé dans le délai convenu.
La SAS TCA Assurances conteste toute réticence dolosive au motif qu'elle n'avait connaissance d'aucune difficulté financière de la société Gefion Insurance au jour de la formation du contrat.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 janvier 2025, l'affaire étant renvoyée pour être plaidée à l'audience du 27 janvier 2025, puis celle du 3 mars 2025.
MOTIFS
Sur la qualité à agir de la société TCA Assurances :
La somme de 15 574.97 euros dont la société TCA Assurances réclame le paiement est constituée de primes d'assurance dues à la société Gefion Insurance et à la société GasanMamo Insurance (société GMI).
La société TCA Assurances explique qu'elle est courtier d'assurances, mais qu'elle a reçu mandat des deux sociétés d'assurance.
Elle produit en ce sens une « attestation de mandat » par laquelle la société Gefion Insurance atteste qu'elle est son mandataire, ainsi qu'un certificat de mandat selon lequel la société GMI certifie que la société TCA Assurances est son mandataire et que ce mandat emporte notamment la délégation de pouvoirs de recouvrement de toutes sommes.
Toutefois, la société TCA Assurances figure à la présente instance en son nom personnel et non en qualité de mandataire des sociétés Gefion Insurance et GMI, seules créancières des primes d'assurances.
Elle doit donc être déclarée irrecevable à agir en paiement de ces sommes. Le jugement sera donc infirmé de ce chef.
Sur les demandes en paiement d'une indemnité pour résistance et procédure abusives
Compte tenu de la solution donnée au litige la SAS TCA Assurances n'est pas fondée à obtenir la condamnation de la société FLS à lui payer une indemnité pour résistance abusive. Le jugement sera donc confirmé de ce chef.
La société FLS ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une faute de la société TCA Assurances qui aurait fait dégénérer en abus le droit dont celle-ci dispose d'agir en justice. Elle sera donc déboutée de sa demande en paiement de dommages intérêts pour procédure abusive.
Sur les dépens et frais irrépétibles :
La société TCA Assurances, qui succombe, doit supporter les dépens de première instance et d'appel et ne peut prétendre au paiement d'une indemnité pour ses frais irrépétibles exposés pour ces deux instances. Le jugement sera donc infirmé de ces chefs.
Il est équitable d'allouer à la société FLS la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement,
Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il déboute les parties de leurs demandes en paiement pour résistance et procédure abusives,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Déclare la SAS TCA Assurances irrecevable à agir en paiement des cotisations d'assurance,
Condamne la SAS TCA Assurances aux dépens de première instance et d'appel,
Condamne la SAS TCA Assurances à payer à la SAS FLS la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute la SAS TCA Assurances de ses demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.