Cass. 1re civ., 2 avril 2025, n° 23-12.384
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Défendeur :
VRT (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Champalaune
Rapporteur :
M. Ancel
Avocats :
Me Balat, SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix
Avocat général :
M. Salomon
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 janvier 2023), Mme [O] [W], a ouvert en 2010 à titre professionnel un compte Instagram accessible sur les réseaux depuis la plateforme de la société Meta platforms Ireland Limited (Meta Platforms). Les conditions générales d'utilisation de ce compte comprennent une clause attributive de juridiction au profit des tribunaux irlandais en cas de litige se rapportant à l'accès ou l'utilisation du service à des fins professionnelles ou commerciales. La société VRT, créée par Mme [W] dans le cadre de son activité professionnelle, exploite la marque « [O] en particulier ».
2. Invoquant le piratage du compte, Mme [W] et la société VRT ont introduit une action en indemnisation contre la société Meta platforms devant une juridiction française.
3.La société Meta platforms a soulevé l'incompétence de la juridiction française.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et les première et deuxième branches du second moyen
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
5. Mme [W] et la société VRT font grief à l'arrêt de déclarer le tribunal judiciaire de Paris incompétent et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir, alors « qu'en vertu de l'article 1171 du code civil, « dans un contrat d'adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l'avance par l'une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite » ; que cette règle de droit interne constitue une loi de police au sens de l'article 9.1 du règlement (CE) nº 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I), qui concerne de surcroît en l'espèce directement la validité d'une clause attributive de compétence,
de sorte qu'il appartient au juge français d'apprécier la légalité de cette clause au regard de cette règle et d'apprécier en conséquence si la clause attributive de compétence n'introduit pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »
Réponse de la Cour
6. L'article 1.2 du règlement (CE) n° 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008, sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I), dispose :
« 2. Sont exclus du champ d'application du présent règlement : (...)
e) les conventions d'arbitrage et d'élection de for ; (...) ».
7. Aux termes de l'article 25.1 du règlement Bruxelles I bis, si les parties, sans considération de leur domicile, sont convenues d'une juridiction ou de juridictions d'un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont compétentes, sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet État membre.
8. Cet article ne prévoit pas la réserve des lois de police.
9. La cour d'appel ayant relevé que le contrat stipulait une clause attributive de juridiction aux tribunaux irlandais, de sorte que l'appréciation éventuelle de la validité de cette clause ne pouvait être faite qu'au regard du droit irlandais, sans que soit applicable la réserve des lois de police, le moyen tiré de ce que cette clause serait contraire à l'article 1171 du code civil est inopérant.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [O] [W] et la société VRT aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [O] [W] et la société VRT et les condamne à payer à la société Meta platforms la somme globale de 3 000 euros ;