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Cass. 2e civ., 7 mai 2025, n° 23-21.455

COUR DE CASSATION

Autre

Rejet

PARTIES

Défendeur :

Conseil national des barreaux, Ordre des avocats au barreau de Marseille

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Martinel

Rapporteur :

Mme Brouzes

Avocat général :

M. Brun

Avocats :

SARL Corlay, SCP Piwnica et Molinié

Cass. 2e civ. n° 23-21.455

6 mai 2025

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 7 juillet 2023), soutenant que M. [Y], qui exerce à [Localité 4] une activité de « mandataire d'assuré », se livre à des consultations juridiques en violation des dispositions des articles 4, 54 et suivants de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, le Conseil national des barreaux et l'ordre des avocats au barreau de Marseille ont saisi un juge des référés afin qu'il lui soit fait défense de se livrer à une activité de consultations juridiques et de rédaction d'actes, à peine d'astreinte.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. M. [Y] fait grief à l'arrêt de dire qu'il ne respecte pas les dispositions des articles 54 et suivants de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi du 31 décembre 1990 et en conséquence, de lui faire défense de se livrer à une activité de consultation juridique et de rédaction d'actes, dans le délai de 10 jours à compter de la signification de l'arrêt, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par infraction dûment constatée et de dire que l'astreinte courra sur une durée maximale de neuf mois à compter du onzième jour suivant la signification de l'arrêt, alors « que constitue une consultation juridique le fait de donner un « avis sur une situation soulevant des difficultés juridiques ainsi que sur la (ou les) voie(s) possible(s) pour les résoudre » ; qu'en considérant que le fait d'apprécier « en fonction de la situation personnelle de chacun de ses clients et de facteurs multiples (taux d'incapacité, âge, situation professionnelle et personnelle, recours des tiers payeurs...) l'indemnisation des divers postes de préjudice qui lui apparaît la plus juste en fonction des indemnisations habituellement accordées » était qualifiable de « consultation juridique », la cour d'appel a violé l'article 54 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réformes de certaines professions judiciaires et juridiques, l'annexe à l'article A. 211-11 du code des assurances ensemble l'article 835 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires qui s'imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

5. En application de l'article L. 211-10 du code des assurances, l'assureur du conducteur responsable d'un accident de la circulation doit, à peine de nullité de la transaction susceptible d'intervenir avec la victime, informer celle-ci qu'elle peut, dès l'ouverture de la procédure d'offre obligatoire, se faire assister par un avocat de son choix.

6. L'article R. 211-39 de ce code prévoit que, pour satisfaire à cette obligation légale d'information, l'assureur doit encore accompagner sa première correspondance avec la victime d'une notice relative à l'indemnisation des victimes d'accident de la circulation.

7. Si le modèle type de cette notice, figurant en annexe à l'article A. 211-11 du même code, issu de l'arrêté du 20 novembre 1987, mentionne, au titre des « conseils utiles », que la victime peut confier la défense de ses intérêts à toute personne de son choix et devra se faire représenter par un avocat en cas de procès, aucune de ces dispositions réglementaires n'autorise un tiers prestataire, autre qu'un professionnel du droit ou relevant d'une profession assimilée, à exercer, à titre habituel et rémunéré, une activité d'assistance à la victime pendant la phase non contentieuse de la procédure d'offre obligatoire, si elle comporte des prestations de conseil en matière juridique, au sens de l'article 54 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.

8. L'arrêt relève que M. [Y] proposait dans des « mandats de gestion et procuration » de représenter les victimes d'accidents de la circulation dans le processus d'indemnisation et d'assurer toute la gestion administrative du dossier, et que ces mandats lui donnaient l'autorisation de recevoir toutes correspondances et communications, d'y répondre en leur nom, de prendre les décisions relatives à l'organisation des expertises matérielles et corporelles, de recevoir les offres d'indemnisation, de les négocier, de les accepter ou de les refuser et de percevoir pour leur compte tous les règlements leur revenant.

9. Il constate qu'il résultait des pièces versées aux débats que M. [Y] analysait les propositions d'offres d'indemnisation des assureurs, qu'il rédigeait les réponses en formulant parfois une contre-proposition, qu'il prenait des décisions quant à l'orientation des expertises médicales amiables, qu'il analysait les rapports pour conseiller ses clients sur les suites à donner et qu'il était le seul interlocuteur des assureurs pendant la phase amiable.

10. L'arrêt retient que l'intéressé ne se limitait pas à une simple gestion administrative ou à une discussion purement technique aboutissant à un calcul automatique d'indemnités, mais qu'il appréciait en fonction de la situation personnelle de chacun de ses clients et de facteurs multiples tels que le taux d'incapacité, l'âge, la situation professionnelle et personnelle ou le recours des tiers payeurs, l'indemnisation des divers postes de préjudice qui lui apparaissait la plus juste en fonction des indemnisations habituellement accordées.

11. Ayant exactement déduit qu'une telle activité d'assistance exercée, fût-ce durant la phase non contentieuse de la procédure d'offre, à titre principal, habituel et rémunéré, comportait des prestations de conseil en matière juridique, au sens de l'article 54 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, la cour d'appel a souverainement apprécié la mesure propre à faire cesser le trouble manifestement illicite qu'elle constatait.

12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [Y] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [Y] et le condamne à payer au Conseil national des barreaux et à l'ordre des avocats au barreau de Marseille la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le sept mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

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