Livv
Décisions

CA Riom, 1re ch., 6 mai 2025, n° 23/00917

RIOM

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Valleix

Conseillers :

M. Acquarone, Mme Bedos

Avocats :

Me Dos Santos, Me Paret, Me Savary, SCP Alpha MJ, SARL Akrich et Savary

TJ Clermont-Ferrand, du 30 mai 2023, n° …

30 mai 2023

I. Procédure

Suivant certificat de cession du 19 août 2019 M. [I] [N] a vendu à Mme [W] [D] un véhicule automobile BMW. Ce véhicule avait auparavant appartenu à Mme [O] [V], qui l'avait elle-même revendu à M. [I] [N]. Les conditions de la vente entre Mme [O] [V] et M. [I] [N] sont toutefois contestées.

Par exploits des 12 avril et 31 mars 2021, Mme [W] [D] a assigné M. [I] [N], entrepreneur individuel exerçant sous l'enseigne BR AUTOMOBILE, et Mme [O] [V], devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand, afin d'obtenir réparation de ses préjudices, consistant selon elle en une dépréciation du véhicule et des frais de réparations, outre préjudice moral et article 700 du code de procédure civile.

Le 19 juillet 2022 Mme [W] [D] a appelé en cause la SCP ALPHA MJ, en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. [I] [N].

Ni M. [I] [N] ni la SCP ALPHA MJ n'ont constitué avocat devant le tribunal judiciaire.

Les deux affaires ont été jointes, et à l'issue des débats, par jugement du 30 mai 2023, le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand a rendu la décision suivante :

« Le Tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe et en premier ressort,

Déboute Madame [W] [D] de ses demandes formées à l'encontre de Madame [O] [V] ;

Prononce l'inscription au passif de Monsieur [I] [N], représenté par la SCP ALPHA MJ en qualité de liquidateur judiciaire, de la somme de 1 500 euros au titre du préjudice moral de Madame [W] [D] résultant du défaut de délivrance conforme du véhicule BMW série 5 immatriculé [Immatriculation 9] ;

Déboute Madame [W] [D] du surplus de ses demandes indemnitaires (dévalorisation du véhicule et frais de réparation et d'entretien) ;

Déboute Madame [O] [V] de ses demandes indemnitaires formées à l'encontre de Madame [W] [D] (procédure abusive et préjudice moral) ;

Rejette les demandes des parties au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne Madame [W] [D] aux dépens ;

Dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire du jugement ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires. »

Dans les motifs de sa décision le tribunal judiciaire a notamment écrit :

Au cas présent, il résulte des éléments de la procédure que Madame [W] [D] a acquis, selon certificat de cession du 19 août 2019, un véhicule BMW série 5 immatriculé [Immatriculation 9] à un prix qu'elle déclare être de 13 800 euros, payé en espèces auprès de l'enseigne BR AUTOMOBILE, et qu'il lui a été remis à cette occasion une facture du contrôle technique du 19 août 2019 faisant état d'un kilométrage de 161 175.

Il apparaît néanmoins que le procès-verbal de contrôle technique effectué le 05 août 2021, soit deux ans après la vente, a mis en évidence le fait que le véhicule avait parcouru 296 452 kilomètres au 22 février 2019, soit un chiffre bien supérieur aux kilométrages relevés postérieurement à cette date le 19 août 2019 et le 05 août 2021.

Il s'ensuit que le kilométrage a vraisemblablement fait l'objet d'une falsification, de sorte que le kilométrage réel du véhicule ne correspond pas à celui qui a été porté à la connaissance de Madame [W] [D], ce qui caractérise un manquement de la part de Monsieur [I] [N], entrepreneur individuel exerçant sous l'enseigne BR AUTOMOBILE, à son obligation de délivrance conforme.

Madame [W] [D] fait valoir qu'elle est également bien fondée à rechercher la responsabilité de Madame [O] [V] sur ce même fondement, et soutient que la vente supposément conclue entre cette dernière et Monsieur [N] n'a jamais eu lieu, de sorte que la défenderesse est en réalité sa cocontractante.

Madame [O] [V] conteste tout lien d'intérêts avec Monsieur [I] [N], et se défend de tout manquement contractuel dès lors, d'une part, qu'elle n'a pas contracté avec Madame [W] [D] et, d'autre part, qu'elle ne s'est rendue coupable d'aucun manquement à l'égard de son propre acquéreur [']

Or, d'une part, il est acquis que Monsieur [I] [N] existe nécessairement dès lors qu'il dispose d'un identifiant SIRET et qu'un jugement du Tribunal de Commerce de BEAUVAIS du 10 mai 2022 l'a placé en liquidation judiciaire.

D'autre part, le certificat de cession du véhicule a été établi au nom de BR AUTOMOBILE, et aucune usurpation de l'identité de Monsieur [N] n'est établie, de sorte que sa qualité de vendeur ne saurait être remise en question.

Il ne peut dès lors être établi que Madame [O] [V] est celle qui a vendu à Madame [W] [D] le véhicule litigieux.

Il est constant que l'action exercée directement par le sous-acquéreur contre un vendeur antérieur est nécessairement de nature contractuelle.

Il s'ensuit que le sous-acquéreur ne saurait agir en réparation du préjudice que lui a causé le défaut de la chose en invoquant une responsabilité délictuelle.

Si sa responsabilité peut éventuellement être recherchée en sa qualité de sous-acquéreur, il appartient néanmoins à la demanderesse de démontrer une inexécution contractuelle imputable à Madame [V], à savoir le défaut de délivrance conforme du véhicule. Or, sur ce point, sauf à supposer que le certificat de cession du 14 août 2019 soit un faux, ce qui n'est pas démontré, celui-ci fait état de 306 642 kilomètres inscrits au compteur, tandis que la facture du contrôle technique du 19 août 2019 mentionne 161 175 kilomètres, ce qui permet de constater que la falsification du kilométrage est intervenue postérieurement à la vente du 14 août 2019.

À défaut pour Madame [W] [D] de démontrer l'existence d'un manquement contractuel imputable à Madame [O] [V], ses demandes formées à son encontre s'agissant d'un défaut de délivrance conforme seront rejetées.

***

Mme [W] [D] a fait appel de cette décision le 10 juin 2023, précisant :

« Objet/Portée de l'appel : Appel total qui tend à l'annulation et/ou l'infirmation des chefs de dispositif suivants: Déboute Madame [W] [D] de ses demandes formées à l'encontre de Madame [O] [V] ; Prononce l'inscription au passif de Monsieur [I] [N], représenté par la SCP ALPHA MJ en qualité de liquidateur judiciaire, de la somme de 1 500 euros au titre du préjudice moral de Madame [W] [D] résultant du défaut de délivrance conforme du véhicule BMW série 5 immatriculé [Immatriculation 9] ; Déboute Madame [W] [D] du surplus de ses demandes indemnitaires (dévalorisation du véhicule et frais de réparation et d'entretien) ; Déboute Madame [O] [V] de ses demandes indemnitaires formées à l'encontre de Madame [W] [D] (procédure abusive et préjudice moral) ; Rejette les demandes des parties au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne Madame [W] [D] aux dépens. »

Dans ses « conclusions de synthèse » ensuite du 18 janvier 2024, Mme [W] [D] demande à la cour de :

« 1. JUGER Madame [D] recevable et fondée en son appel.

RÉFORMER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de CLERMONT-FERRAND le 30 mai 2023 en ce qu'il a :

- Débouté Madame [W] [D] de ses demandes formées à l'encontre de Madame [O] [V] ;

- Prononcé l'inscription au passif de Monsieur [I] [N], représenté par la SCP ALPHA MJ en qualité de liquidateur judiciaire, de la somme de 1 500 euros au titre du préjudice moral de Madame [W] [D] résultant du défaut de délivrance conforme du véhicule BMW série 5 immatriculé [Immatriculation 9] ;

- Débouté Madame [W] [D] du surplus de ses demandes indemnitaires (dévalorisation du véhicule et frais de réparation et d'entretien) ;

- Rejeté les demandes des parties au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamné Madame [W] [D] aux dépens ;

Vu l'article 1604 du Code civil,

DÉBOUTER Madame [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, et de son appel incident exprimé par conclusions du 30 octobre 2023.

2. JUGER l'appel recevable et fondé STATUER à nouveau,

PRINCIPALEMENT :

Vu les Articles 9 à 12 du Code de procédure civile, 1358 et 1382 du Code civil,

Vu les Articles 1103,1604 du Code civil,

Subsidiairement l'article 1240 du Code civil,

Faute de preuve d'une vente [V] [N],

JUGER que Madame [V] est le vendeur du véhicule acquis par Madame [D]

JUGER que Madame [V] a manqué à l'obligation de contracter de bonne foi et à la garantie de délivrance conforme

CONDAMNER en conséquence Madame [V] à payer et porter à Madame [D] les sommes suivantes, en réparation de ses préjudices :

- 7 500 ' au titre de la dévalorisation du véhicule BMW Série 5, immatriculé [Immatriculation 9] ;

- 2 500 ' au titre des frais de réparation et d'entretien exposés ;

- 2 500 ' en réparation du préjudice moral ;

- 6 000 ' au titre de l'Article 700 du CPC en appel.

SUBSIDIAIREMENT,

JUGER que la responsabilité de Monsieur [N] exerçant à l'enseigne PR AUTOMOBILE est engagée.

JUGER recevable la régularisation de la procédure à l'égard de la SCP ALPHA MJ en qualité de liquidateur judiciaire de Monsieur [I] [N].

JUGER que la responsabilité de Monsieur [N], exerçant sous l'enseigne BR AUTOMOBILE, est engagée,

JUGER que sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de Monsieur [N] les mêmes sommes de :

- 7 500 ' au titre de la dévalorisation du véhicule BMW Série 5, immatriculé [Immatriculation 9] ;

- 2 500 ' au titre des frais de réparation et d'entretien exposés ;

- 2 500 ' en réparation du préjudice moral ;

- 6 000 ' au titre de l'Article 700 DU CPC

Vu l'Article 1240 du Code civil, le rôle tenu par Madame [V] et l'absence de mutation du certificat d'immatriculation du véhicule qu'elle avait acheté, in solidum avec la liquidation judiciaire de Monsieur [N] à payer et porter à Madame [D] les sommes précitées :

- 7 500 ' au titre de la dévalorisation du véhicule BMW Série 5, immatriculé [Immatriculation 9] ;

- 2 500 ' au titre des frais de réparation et d'entretien exposés ;

- 2 500 ' en réparation du préjudice moral ;

- 6 000 ' au titre de l'article 700 du CPC

CONDAMNER Madame [V] aux dépens de première instance et d'appel. »

***

Pour sa défense, dans des écritures du 30 octobre 2023, Mme [O] [V] demande à la cour de :

« Vu les articles 1199, 1240 et 1641 du Code civil,

Vu l'article 32-10 du Code de procédure civile,

Vu la jurisprudence en vigueur,

Vu les pièces versées au débat,

Il est demandé à la Cour de :

CONFIRMER le jugement rendu le 30 mai 2023 par le Tribunal Judiciaire de CLERMONT FERRAND en ce qu'il a :

- Débouté Madame [W] [D] de ses demandes formées à l'encontre de Madame [O] [V] ;

- Prononcé l'inscription au passif de Monsieur [I] [N], représenté par la SCP ALPFIA MJ en qualité de liquidateur judiciaire, de la somme de 1 500 euros au titre du préjudice moral de Madame [W] [D] résultant du défaut de délivrance conforme du véhicule BMW série 5 immatriculé [Immatriculation 9] ;

- Débouté Madame [W] [D] du surplus de ses demandes indemnitaires (dévalorisation du véhicule et frais de réparation et d'entretien) ;

- Condamné Madame [W] [D] aux dépens ;

INFIRMER pour le surplus, statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNER Madame [D] à verser à Madame [V] la somme de 5.000 euros au titre du préjudice causé par la procédure abusive à son encontre,

CONDAMNER Madame [D] à verser à Madame [V] la somme de 3.000 euros en réparation de son préjudice moral en raison de l'atteinte portée à son honneur et aux propos diffamants de Madame [D],

CONDAMNER Madame [D] aux dépens qui comprendront les dépens de première instance et ceux d'appel et la condamner à payer à Madame [V] une somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. »

***

La déclaration d'appel a été signifiée à M. [I] [N] le 18 juillet 2023, selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile.

M. [I] [N] ne comparait pas devant la cour.

La déclaration d'appel a été signifiée le 25 juillet 2023 à la SCP ALPHA MJ, en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. [I] [N], par remise à personne morale.

La SCP ALPHA MJ ne comparait pas devant la cour.

***

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fait ici expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées, étant précisé que le litige se présente céans de la même manière qu'en première instance.

Une ordonnance du 12 décembre 2024 clôture la procédure.

II. Motifs

1. Sur la vente du véhicule

Mme [D] plaide qu'en réalité le véhicule automobile litigieux ne lui a pas été vendu par M. [N] mais par Mme [V], laquelle aurait joué « un rôle plus que trouble dans ces opérations successives de vente de véhicule » et se serait rendue finalement coupable « d'une fraude organisée » (conclusions pages 9 et 11). C'est pourquoi, dans le dispositif de ses écritures, l'appelante demande notamment à la cour de :

Faute de preuve d'une vente [V] [N],

JUGER que Madame [V] est le vendeur du véhicule acquis par Madame [D]

Or une telle hypothèse ne résiste pas à l'examen des pièces.

En effet, d'un premier certificat de cession daté du 12 mars 2019, il ressort que M. [R] [B] a vendu à Mme [O] [V] le véhicule BMW immatriculé [Immatriculation 9].

Un second certificat de cession, daté du 14 août 2019, montre que ce même véhicule a été revendu par Mme [O] [V] à M. [I] [N]. Aucune raison ne permet de suspecter le caractère fictif de cette vente. Les bordereaux SIREN produits au dossier par Mme [V] indiquent en effet que M. [N] exerçait depuis le 3 juin 2015 une activité légalement déclarée d'entretien et de réparation de véhicules automobiles, l'entreprise ayant cessé son activité le 14 juin 2023 en raison d'une liquidation judiciaire, comme cela résulte d'un bordereau BODACC du 22 juin 2023, également versé au dossier.

Par ailleurs, Mme [V] justifie de ce qu'après avoir mis en vente son véhicule au mois d'août 2019, elle a été contactée par M. [N], se présentant comme un professionnel de l'automobile. Des échanges électroniques produits au dossier il résulte que M. [N] s'est montré assez pressant, et manifestement très intéressé par cette voiture, prêt à l'acquérir alors que Mme [V] n'avait pas encore fait son changement de carte grise. Ces éléments ne sont pas de nature à impliquer Mme [V] dans un quelconque trafic. Sans doute a-t-elle eu tort de vendre son véhicule alors que la carte grise n'est pas encore à son nom, mais pour autant la vente elle-même n'en était pas moins valable.

Dans ces conditions, l'argumentation de Mme [D], consistant à soutenir que la vente [V]/[N] n'a jamais eu lieu, ne saurait prospérer, et il doit être retenu que Mme [D] a acquis le véhicule litigieux de M. [N] et non pas de Mme [V].

2. Sur l'obligation de délivrance

Le véhicule automobile BMW immatriculé [Immatriculation 9] a donc été vendu par la société BR AUTOMOBILE, enseigne commerciale de M. [N], à Mme [D] le 19 août 2019. Le certificat de cession ne comporte aucun kilométrage, le cadre prévu à cet effet étant demeuré vierge. Des éléments techniques incontestables permettent cependant de comprendre que le kilométrage réel du véhicule avait été modifié par M [N] avant la vente à Mme [D].

En effet, lors de la vente [B]/[V] le 12 mars 2019 le compteur kilométrique de la voiture indiquait 298 817 unités. Lorsqu'ensuite Mme [V] a revendu la voiture à M. [N], le compteur indiquait 306 642 unités. Or, lorsque la société BR AUTOMOBILE, enseigne commerciale de M. [N], a fait réaliser un contrôle technique le 19 août 2019, c'est-à-dire le jour de la vente de la voiture à Mme [D], le kilométrage n'était plus que 267 175 unités. Un autre contrôle technique, réalisé le 5 août 2021, montre que le kilométrage de la voiture est passé de 296 452 unités le 22 février 2019 à 167 175 unités le 19 août 2019. D'évidence, le compteur de la voiture avait été trafiqué pour indiquer un kilométrage apparent très inférieur au kilométrage réel.

Et dans la mesure où lorsque Mme [V] a vendu la voiture à M. [N] le kilométrage indiqué était de 306 642 unités, la modification du compteur kilométrique du véhicule n'a pu être réalisée que par M. [N] lui-même.

Il est de jurisprudence constante que l'indication d'un kilométrage erroné caractérise un manquement à l'obligation de délivrer une chose conforme aux spécifications convenues par les parties (1re Civ., 8 octobre 2009, nº 08-20.282).

M. [N] étant l'auteur de la manipulation ayant conduit à la falsification du kilométrage réel de la voiture vendue à Mme [D], il lui doit réparation.

D'un avis technique établi par M. [U] [M], expert automobile, dans une lettre du 8 octobre 2021, il résulte que le préjudice de Mme [D] peut être évalué à la somme de 7700 EUR. Dans le dispositif de ses écritures Mme [D] réclame 7500 EUR. Le tribunal judiciaire lui a alloué « 1500 EUR au titre du préjudice moral ['] résultant du défaut de délivrance conforme du véhicule ». Or le défaut de délivrance conforme constitue un préjudice matériel dans la mesure où l'objet acquis n'est pas celui qui était convenu lors de la vente ; d'autant plus dans le cas présent où la falsification du kilométrage, faisant paraître le véhicule plus « jeune » qu'il n'est, entraîne une dépréciation de l'objet qui constitue à tout le moins un préjudice financier.

La somme de 7500 EUR sera donc allouée à Mme [D]. Elle est également fondée à réclamer la somme de 2500 EUR en réparation de son préjudice moral, la falsification du kilométrage de la voiture étant une faute particulièrement grave de la part du vendeur, trahissant la confiance de l'acquéreur et induisant un dommage supérieur à la seule dévalorisation du bien.

Il n'y a pas lieu par contre d'allouer à Mme [D] une somme au titre des frais de réparation et d'entretien de la voiture, ces dépenses devant en toute hypothèse être assumées par le nouvel acquéreur, étant observé que même en considérant les 167 175 km indiqués lors de la vente à Mme [D], il en résulte que des réparations et des frais d'entretien étaient prévisibles concernant un véhicule ayant déjà beaucoup roulé.

L'imprudence fautive de Mme [V], ayant consisté à vendre son véhicule sans avoir préalablement fait établir une carte grise à son nom, ce qui a induit dans ce dossier complexe un élément supplémentaire de confusion, la prive de toute indemnisation au titre d'une procédure abusive et d'une « atteinte portée à son honneur ». Nulle faute ne peut être ici reprochée à Mme [D].

5000 EUR sont justes pour l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel au bénéfice de Mme [D]. Il n'y a pas lieu à d'autre application de ce texte.

Aucune raison ne justifie de condamner in solidum Mme [V] avec M. [N] au paiement des sommes ci-dessus, dans la mesure où d'une part Mme [V] est étrangère à la falsification du kilométrage par M. [N], d'autre part sa faute consistant à ne pas avoir fait établir une carte grise à son nom est sans relation causale avec le préjudice de Mme [D] résultant de la falsification du kilométrage par M. [N].

M. [N] supportera les dépens de première instance et d'appel.

Les indemnisations et dépens mis à la charge de M. [N] seront fixés au passif de sa liquidation judiciaire, la créance de Mme [D] ayant été valablement déclarée à titre chirographaire 28 juin 2022 auprès du liquidateur de M. [N], ainsi qu'il en est justifié.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt rendu par défaut,

Infirme le jugement en ce que le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand limite à la somme de 1500 EUR le préjudice de Mme [W] [D] résultant du défaut de délivrance conforme, rejette les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamne Mme [D] aux dépens ;

Confirme le jugement pour le reste ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés :

Fixe à la liquidation judiciaire de M. [I] [N], exerçant sous l'enseigne commerciale BR AUTOMOBILE, les sommes suivantes au bénéfice de Mme [W] [D] :

- 7500 EUR en réparation du préjudice résultant pour Mme [W] [D] de la falsification du kilométrage du véhicule vendu BMW immatriculé [Immatriculation 9], constituant une infraction à l'obligation de délivrance conforme ;

- 2500 EUR en réparation du préjudice moral de Mme [W] [D] ;

- 5000 EUR en application de l'article 700 du code de procédure civile, en première instance et en appel ;

- les dépens de première instance et d'appel ;

Déboute les parties de leurs autres demandes.

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site